Différences n°197 - juin 1998

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Sommaire du numéro

n°197 de juin 1998 Spécial Congrès

  • Messages d'accueil
  • Rapport d'activité 1995-98 par J.C. Dulieu
  • Rapport d'ouverture par Mouloud Aounit
  • Thème1: le racisme dans la crise
    • Introduction par P. Muzard
    • Synthèse par J.C. Dulieu
  • Thème2: Antiracisme; prévention, éducation, citoyenneté, lutte contre l'extrême-droite
    • Introduction par Liliane Lainé
    • Synthèse par Alain Callès
  • Thème3: Mondialisation et amitié entre les peuples; migrations, immigrations
    • Introduction par J.J. Kirkyacharian
    • Synthèse par Bernadette Hétier
  • Les motions et déclarations votées par le congrès
  • Déclaration solennelle du congrès du MRAP
  • Les invités, les messages

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Texte brut du numéro

Juin 1998 - N° 197 1 Numéro S éci C ngrès Bobigny 8, 9 et 10 mai 1998 l rtl!]p . - Il MESSAGES Sylvain Goldstein, président de la Fédération du MRAP-93 « LA FEDERATION DE LA SEINE-SAINT-DENIS vous souhaite la bienvenue. La Seine-Saint-Denis, 1,450 million d'habitants, 40 communes, pourcentage de gens touchant le RMI le plus important de France métropolitaine, nombre de sans-papiers ayant demandé la régularisation le plus important de France, département accueillant la Coupe du monde de football. Département en luttes, dont je citerai quelques exemples: _ La lutte des sans papiers du 93 qui occupent l'Eglise Saint-André située à 50 mètres du lieu de notre congrès _ La lutte des jeunes, parents d'élèves et enseignants qui réclament une véritable égalité pour les jeunes de la Seine-Saint-Denis _ La lutte des hospitaliers d'Avicenne qui réclament des moyens pour une santé de qualité. Durant notre congrès, nous aurons d'ailleurs l'occasion de manifester notre solidarité à deux reprises avec les sans papiers en accueillant la coordination 93 des sans papiers demain samedi vers 18 heures, ensuite en soutenant et en trouvant une forme de participation pour la marche départementale des sans-papiers qui se déroulera dimanche à partir de 9h 30. Je vous propose d'ailleurs, si vous en êtes d'accord, que le congrès leur fasse d'ores et déjà parvenir un texte de soutien. Quant au MRAP-93, il est présent dans le département dans 18 des 40 communes. Je ne décrirai pas leurs activités dans le détail, elles sont le reflet du pluralisme de nos adhérents et leurs difficultés sont le reflet des problèmes à faire vivre une association en milieu fortement urbanisé. Je vous invite à l'occasion de ce congrès à rencontrer les militants du 93 qui vous donneront plus de détails sur leurs activités et problèmes. Je tiens à remercier pour l'aide qu'ils nous accordent et le soutien qu'ils nous donnent tous ces jours M. Bernard Birsinger, député-maire de Bobigny et M. Robert Clément, président du Conseil général de la Seine-Saint-Denis. Bernard Birsinger, maire de Bobigny « C'EST AVEC BEAUCOUP DE PLAISIR que je vous souhaite la bienvenue à Bobigny, ville préfecture de la Seine-SaintDenis. Nous sommes très heureux de recevoir votre congrès car les actions menées par le MRAP correspondent aux orientations municipales depuis des décennies. Votre association, créée depuis bientôt 50 ans, basée sur la lutte contre l'antisémitisme, a étendu son champ d'action contre le racisme au sens large, pour le respect des droits de l'Homme, au-delà des sensibilités politiques, philosophiques et confessionnelles des individus. Votre combat a permis le vote de la première loi contre le racisme, du 1 er juillet 1972. C'est un honneur pour la Seine-Saint-Denis d'accueillir vos travaux et je pense que votre choix a été particulièrement judicieux. Ce département souffre socialement, mais se bat aussi très fort pour sa dignité. Les solidarités y sont multiples et si le Front national fait beaucoup trop, des énergies se mobilisent afin de faire face de la manière la plus adéquate possible. Ici même à Bobigny, il recule depuis deux élections. Comme maire de Bobigny, je vais vous parler un peu de ma ville, et je crois qu'ainsi vous situerez mieux l'engagement des Balbyniens dans la lutte contre le racisme et pour la dignité des hommes. On traite souvent de l'immigration comme d'un phénomène qui vient de naître et qui n'aurait pas de passé. Pourtant, c'est un aspect essentiel de l'histoire de France. Si l'on prend l'exemple de Bobigny, on constate que déjà au début du siècle, des saisonniers italiens et espagnols fournissaient le gros de la main-d'oeuvre des récoltes saisonnières des maraîchers. A partir de 1921, des Belges et des Luxembourgeois contribuent au peuplement de notre commune. En 1926, ce sera le tour des Italiens, mais aussi des Algériens qui sont alors déclarés français. Plus près de nous, dans les années soixante, l'immigration italienne est encore plus forte présente dans notre cité. S'y agrège une nouvelle immigration: celle des Portugais. Dans les années soixante-dix, l'immigration algérienne prendra le relais. Tous ces immigrés de la Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP D'ACCUEIL période la plus récente, Portugais et Algériens, ont fourni l'essentiel de la main-d'oeuvre qui a bâti les immeubles où ~abitent .gr~nd nom~~e de Balbyniens aujourd'hui. Leurs enfants et leurs petits-enfants participent activement à la Vie ~SsocIatJve et pohtlque de notre commune. L'idéal progressiste de la majorité municipale de Bobigny est aussi le ChOlX de toutes ces personnes venues d'ailleurs pour bâtir notre ville. Notre ville déploie de nombreux efforts pour le mieux vivre ensemble et dans cette orientation, les actions municipales fleurissent. Nous sommes fiers d'avoir sur les murs la belle affiche intitulée « Diversité, Egalité, c'est ma cité ». Nous sommes fiers de mener un travail conjoint avec le MRAP dont le plus beau fruit fut une exposition accompagnée d'une plaquette qui fait référence dans le domaine de l'Education. C'est à Bobigny aussi que fut lancé cet automne le si beau « livre blanc de toutes les couleurs ». Afin de sensibiliser les Balbyniens à votre combat, nous publions dans notre journal « Bonjour Bobigny» une interview de votre secrétaire général Mouloud Aounit. Vous pouvez aussi,je pense, rencontrer les sans-papiers hébergés dans l'Eglise Saint-André, à un battement d'aile de votre congrès. Bobigny choisit de se battre positivement contre tous les racismes. Notre objectif: rassembler les publics, permettre la reconnaissance de l'Autre, l'échange, n'est-ce pas une des meilleures manières de contribuer à lutter contre les préjugés, le racisme, la xénophobie? Nous aurons l'occasion d'en reparler ensemble. En attendant, je vous souhaite un bon, un excellent travail et encore une fois bienvenue à Bobigny, terre de solidarité, ville coeur de la Seine-Saint-Denis. » SOMMAIRE Allocution d'ouverture de Sylvain Goldstein, président de la FD MRAP de Seine-Saint-Denis Allocution d'accueil de Bernard Birsinger, maire de Bobigny Rapport d'activités 1995-1998 présenté par Jean-Claude Dulieu Rapport d'introduction présenté par Mouloud Aounit Texte d'introduction du thème 1 présenté par Paul Muzard Synthèse des travaux en ateliers thème 1, rapporteur: Jean-Claude Dulieu Texte d'introduction du thème 2 présenté par Liliane Lainé Synthèse des travaux en ateliers thème 2, rapporteur: Alain Callès Texte d'introduction du thème 3 présenté par Jean-Jacques Kirkyacharian Synthèse des travaux en ateliers thème 3, rapporteur: Bernadette Hétier Motions et déclarations Déclaration solennelle Invités et messages Liste des membres du conseil national élu par le Congrès Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP 2 2 4 13 19 19 22 22 26 27 30 33 34 18 • Il RAPPORT , D'ACTIVITES 1995 a"'" 1998 présenté par Jean-Claude Dulieu (développement) et Jean-Jacques Kirkyacharian (international) Renée Le Mignot (campagnes nationales) Alain Callès (groupe de travail sur l'extrême droite) Bernadette Hétier (immigration) René Neveu (gens du Voyage) Liliane Lainé (éducation) NOUS AVONS CHOISI de présenter cette synthèse des activités du mouvement de manière thématique. Cette synthèse a été possible grâce aux rapports d'activités fournis par les comités locaux et aux articles parus dans la presse, aux rapports des commissions nationales, aux comptes rendus des congrès locaux et départementaux ainsi qu'aux contributions individuelles. Pour éviter d' être trop long, nous avons envoyé à chaque CL le rapport d'activités de chacune des commissions nationales et nous avons remis à chaque délégation un document présentant l'ensemble des activités recensées pour ces trois dernières années. En choisissant de présenter cette synthèse de manière thématique, nous prenons le risque de tomber parfois dans la simplification ,je vous demande donc de l'indulgence. 1 - LES EXPRESSIONS ET INTERVENTIONS INTERNATIONALES 1 - Les activités par secteur géographique Le secteur international est à la fois unique dans sa conception et diversifié dans ses interventions. Un seul chiffre, durant ces trois dernières années, nous avons, par voie de presse, pris 137 positions publiques. Conception unique: c'est le plus important et j 'y reviendrai à la fin. Nous ne sommes pas une organisation de solidarité, ni une association tiers-mondiste, nous sommes le MRAP. L'AfTique, l'Amérique, la Méditerranée, l'Asie sont des espaces où sévit sous de multiples formes le racisme, qui n' est que l' expression la plus barbare de l' inégalité. Mais il y a des lieux où notre responsabilité est particulièrement engagée: le Maghreb et la Palestine, l'Afrique (sans oublier l'Afrique du Sud), l'Amérique où le racisme a une tradition multiséculaire. C' est pour cela que nous avons mis en place des groupes de travail sur chacun de ces points. Ils attirent trop peu de militants. 2 - Les organisations antiracistes à l'étranger: l'Europe Nous avons depuis longtemps des relations bilatérales et des échanges de documentations avec beaucoup d'organisations. Nous avons même des relations de partenariat avec l'IMADR, organisation internationale à forte prédominance asiatique, dont lacques Chevassus est vice-président. Les organisations européennes sont celles qui nous concernent le plus directement, et elles s'intéressent beaucoup à nous. Le MRAP, même si on n' est pas d'accord avec lui, y jouit d'un grand prestige, grâce au caractère politiquement ambitieux et rigoureusement indépendant qui est le nôtre. C'est ainsi que le MRAP a été partie prenante dès le début de l' entreprise de constitution d'un réseau consultatif à l' échelle de l'Union Européenne. Sans qu'il soit question d'aliéner notre indépendance, nous pouvons bénéficier de l'appui de ce réseau. Quoiqu'il en soit, qu'on le veuille ou non, le MRAP devra se mettre à l'heure européenne, car le racisme actuel a un caractère général qui se retrouve dans chacun des pays de l'Union. Certes, nous pouvons parfois être déconcertés par les propositions de tel ou tel partenaire, mais nous n' avancerons pas en nous repliant sur nous-mêmes ; au contraire nous devons nous montrer offensifs en développant notre conception de la lutte contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples. 3 - Une conception à la fois une et double Elle est maintenant très connue dans les instances internationales, elle nous vaut l'amitié et la confiance des organisations Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP non gouvernementales qui y militent, ainsi que celles de plusieurs fonctionnaires de l'ONU. L'aide apportée par nos amis de New York est très précieuse car, sans eux, nous ne pourrions pas être présents aux réunions qui se tiennent à Manhattan. Cette participation aux instances de l'ONU peut sembler décevante car elle influe vraiment peu sur le déroulement des événements ! Mais on peut toujours dire cela de n'importe quelle action politique: les effets éventuels nous échappent de toute façon. Ce qui compte, dès maintenant, c'est que les idées du MRAP ont acquis une grande influence au sein de pas mal d'ONG. Il faudra poursuivre et développer notre action dans cette voie. 4 - Conclusion L'activité internationale du MRAP ne constitue pas un secteur « à part », elle estun élément constitutif de notre intervention publique contre le racisme en France. J'ai déjà dit et écrit que de ce point de vue la campagne pour Mumia Abu-lamai est exemplaire. Elle révèle en effet les limites et même le mensonge profond de certains antiracismes d'Etat. Clinton vient précisément de mettre les pieds dans le plat en reprenant une idée empruntée à la Nouvelle Droite américaine, à savoir que, finalement, l'esclavage a eu des effets positifs puisque maintenant il y a des Noirs qui accèdent aux hautes responsabilités aux USA. Oui, ils peuvent même ordonner aux hélicoptères de la police de bombarder les maisons et d'y tuer des militants. L'antiracisme, c'est la lutte pour l'égalité. L'inégalité est mondiale et elle génère, à partir de son mécanisme mondial, le racisme en chacun de ses points cruciaux. L'activité du MRAP pour l'amitié entre les peuples est la réponse à ce processus de division, de haine, voire d'extermination, qui ne cessera pas par miracle, ni par de bonnes intentions. Les militants du MRAP ne renoncent pas à la grande idée révolutionnaire : le monde n'est pas bon, il faut le changer. Il - NOS ACTIONS ET CAMPAGNES INTERNATIONALES L'ex-Yougoslavie La présence du MRAP (avec Marie-Noëlle Bornibus) au tribunal Permanent des peuples, qui regroupe plusieurs ONG et dont l'objectif était d'analyser les violations des Droits de l'Homme et du droit international dans l'ex-Yougoslavie en guerre, a été appréciée. A noter que les conclusions ont été présentées à l'ONU et à toutes les institutions concernées. Nous avons engagé une campagne de solidarité avec les déserteurs de l'ex-Yougoslavie notamment pour empêcher leur expulsion et pour l'application des résolutions du Parlement Européen demandant aux pays membres d'assurer l'accueil des déserteurs. 1 Turquie- Kurdistan Nous avons agi pour la solidarité avec le peuple kurde (notamment de Turquie) là-bas et ici avec les actions suivantes: • la présence d'un représentant du MRAP (en général Xavier Schapira) aux délégations se rendant au Kurdistan lors des célébrations du Newroz (nouvel an kurde). Participation de Xavier au « train de la paix» ou encore la campagne en faveur des réfugiés kurdes en France, notamment contre les détentions arbitraires • la création avec notamment France Libertés et la CIMADE d'un collectif regroupant toutes les organisations kurdes en France sur la question kurde • travail de solidarité avec les familles de disparus; rappelons la participation d'Alain Callès à la première Assemblée internationale sur la question des disparus qui s'est tenue à Istanbul • création depuis l'élargissement de la solidarité avec les disparus à l'ensemble des pays concernés, à l'initiative du MRAP, d'un collectif regroupant les associations kurdes, turques, colombiennes, tamouls, sri lankaises, marocaines etc, qui organisa une soirée d'information à l'occasion de la journée internationale des droits de l'Homme. Pour Mumia Abu-Jamal et Leonard Peltier Lors de notre dernier Congrès, le rapport d'orientation dans sa partie internationale, appelait à se mobiliser en faveur des prisonniers politiques aux USA dont Mumia Abu-lamai et Léonard Peltier. L'actualité devait hélas nous donner raison puisque quelques mois plus tard la date d'exécution de Mumia était fixée au 17 Août 1995. A l'initiative du MRAP, le collectif national « Sauvons Mumia Abu lamai » était créé en urgence et organisait des rassemblements réguliers devant l'Ambassade des Etats-Unis, y compris pendant la période estivale, lancement d'un appel de personnalités et signature de pétitions. Le MRAP a été reçu à l'ambassade des Etats-Unis. Mumia sauvé in extremis, la campagne continue sans relâche depuis trois ans. Le MRAP et la FSU ont parrainé la sortie en français du livre de Mumia « En direct du couloir de la mort ». Deux mille exemplaires ont été vendus par notre Mouvement, l'intégralité des bénéfices réalisés reversés à la défense de Mumia. Nous avons organisé un concert qui a rapporté à la défense 36 800 francs, le MRAP est intervenu sur ce sujet à l'ONU et au Parlement européen. Il faut encore citer: • l'organisation de plusieurs meetings d' information dont un en présence de Léonard Weinglass, l'avocat principal de Mumia • 1 <publication sous forme de brochure de la première interview de Mumia après le sursis à exécution, ce qui a permis de rapporter 19 800 francs à la défense. Au total, c' est près de 100 000 francs qui ont été versés. • la participation du MRAP au Tribunal International à Philadelphie le 6 décembre 1997. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • Il Parallèlement, s'est poursuivie la campagne pour obtenir la libération de Léonard Peltier (dirigeant de l'American Indian Movement) : avec le lancement de cartes et de pétitions, l'intervention auprès de l'ambassade et de Clinton, le rassemblement en présence de Bobby Castillo, représentant de l'AIM. Au fur et à mesure, cette campagne s'est élargie à la question de la peine de mort aux Etats-Unis, compte tenu de son application raciste. Campagnes que nous avons menées en partenariat avec Amnesty International, l' ACAT, American Against Death Penality. Pour Sarah Balabagan et Véronique Akobé Le MRAP a participé au collectif« Sauvez Sarah» (pétitions, délégations, rassemblements). S'appuyant sur le succès de cette campagne, le MRAP relançait avec notamment l' AVFT (Association contre les Violences faites aux Femmes au Travail) la campagne pour obtenir la libération de Véronique Akobé. III - LES EXPRESSIONS AU PLAN NATIONAL Quelques chiffres tout d'abord afin d'illustrer l'étendue de nos champs d'intervention et les échos dans la presse, échos qui permettent de mesurer l'impact et la reconnaissance de notre mouvement. Durant ces trois dernières années, nous avons tenu 13 conférences de presse et envoyé 554 communiqués affirmant nos positions concernant les lois Pasqua Debré, la circulaire et la loi Chevènement, la lutte des sans papiers, l'antisémitisme, le FN, les différentes manifestations racistes, la citoyenneté, les sujets internationaux. Ces chiffres sont bien entendu à considérer avec prudence du fait de l'interrelation existant entre les différents thèmes proposés. Dans le« Lit- tout », nous retrouvons la publication de bon nombre de ces communiqués, témoignant de l'influence de notre mouvement sur la tournure des événements. Nous y trouvons également bon nombre de communiqués et d'action des comités locaux, et si l'on se penche un peu plus près, on peut mesurer l'ampleur de nos interventions et de leur écho auprès du public. Ces chiffres révèlent aussi l' intérêt accordé par la presse, au MRAP et à ses différents combats. Quelques chiffres : sur les trois années écoulées, le MRAP fut cité plusieurs centaines de fois dans la presse nationale et régionale. Nous constatons alors l'intervention originale et systématique du MRAP dans les grands débats de notre société et sur l'intérêt que porte notre mouvement à l'évolution du monde. Même si l'intégralité de nos actions n'est pas relevée par la presse, ces chiffres laissent entrevoir l'image que les lecteurs de cette presse ont de notre mouvement localement et nationalement. IV - INTERVENTIONS DU MRAP DANS L'HEXAGONE L' activité de nos comités locaux permet à notre mouvement de participer au combat de proximité contre l'obscurantisme et le racisme, en luttant pour l'égalité des droits, pour une véritable citoyenneté. Quelle a été l'ampleur de nos actions? Les permanences juridiques Chaque fois qu'un comité local se crée, la question de la mise en place d'une permanence d'accueil et d'intervention se pose. Ce qui témoigne de l' importance de cette activité. Notre mouvement a développé un réseau sans précédent de permanencesjuridiques. Nous en comptabilisons plus de cinquante dans l'Hexagone. Lieux de rencontre et de conseils, elles se sont développées durant les trois dernières années, du fait de l'inhumanité des lois Pasqua, des limites de la circulaire Chevènement et de la loi du même nom. Nos permanences sont l'endroit privilégié de la connaissance du mouvement, du vécu des victimes, des lois sur l'immigration, des dégâts tant au regard du droit que de la démocratie que provoquent ces textes et leur application. C'est ce contact permanent qui a permis à notre mouvement d'apporter une contribution concrète à l'analyse et à l' élaboration de propositions sur ces questions durant la dernière période, ce qui a rendu possible la constitution d'un savoir sur ces questions et de forger une capacité d'analyse et de propositions connues et reconnues de tous. Nous pouvons remercier et féliciter les centaines de bénévoles qui sans relâche assument cette responsabilité. Le siège national dispose du travail des commissions juridique et immigration ainsi que du secteur juridique ; celui-ci a organisé quatre stages de formation par an, en direction des militants, formation d'autant plus nécessaire que la réalité sur l'immigration est en perpétuelle évolution. Stages qui ont connu un véritable succès, avec à chaque fois plus de 40 participants. Sans compter les stages décentralisés comme à Lille avec François Prunet. Grâce à cette aide ainsi qu'à la lutte des sans-papiers, nos permanences sont devenues de réels lieux de rencontre, d'écoute, de solidarité, et surtout d' interventions individuelles et d'actions citoyennes. Les permanences dans certains départements permettent d'engager de nombreuses actions en partenariat. Les structures juridiques nationales ont ces trois dernières années, développé analyses et propositions sur les textes de lois en débat, circulaire etc. Notons dans le cadre de la permanence du siège national que trois collectifs ont été mis sur pied pour mobiliser les efforts des intéressés eux mêmes: il s'agit des jeunes entrés hors regroupement familial, des femmes en détresse et des Algériens. Initiatives à développer. Rappelons que le secteur juridique a largement apporté sa contribution aux travaux de la CNCDH. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP Immigration Durant ces trois dernières années, les membres de la commission immigration ont connu une activité très intense. En effet, l'actualité a mis le mouvement sous pression permanente. Nous avons développé des actions spécifiques et collectives contre les méfaits dramatiques des lois Pasqua-Debré et pour leur abrogation. Réactions et actions en liaison avec la lutte citoyenne des sans- papiers pour leur régularisation. Notre mouvement au fil de ces luttes, tant du point de vue national que local a développé analyses, réactions, interventions, qui furent très appréciées. Notre mouvement a toujours tenté d' être directement impliqué concrètement dans ces combats (félicitations aux militants des CL qui furent en liaison directe avec les comités des sans- papiers). Notre participation s'est voulu concrète, tout en assumant notre rôle politique visant à donner au mouvement toute sa pOltée sur les questions fondamentales telles que la politique d'immigration dont la France a besoin à l'aube du 3emc millénaire. Ou encore sur des propositions ou contre-propositions face aux textes de lois. - 1.1. Le MRAP dans le soutien au mouvement des sans-papiers A noter la présence des comités locaux auprès des sans-papiers à travers la France et le soutien de leurs revendications. L'implication du MRAP dans le « G 10 », devenu en raison de sa géométrie variable le « G X », avec les associations partenaires du secteur immigration. La participation régulière du MRAP aux réunions de travail organisées par la Coordination nationale des sans-papiers. Le MRAP a participé aux réunions organisées par les syndicats pour organiser des manifestations. Au total, le MRAP même s' il manque d'un nombre suffisant de personnes disponibles au niveau national, est présent durablement sur ce front complexe, évolutif et parfois difficile à « gérer ». 1. 2. Le MRAP dans les mobilisations autour des lois Nous avons été à l'initiative du collectif contre le« délit de solidarité» et nous avons assuré son fonctionnement (projet Toubon, 1995-1996). Nous avons été à l'initiative du collectif de préparation de la manifestation de juin 1996 (1 cr projet Debré). Nous avons participé, avec trois autres associations, à l'initiative du GISTI (4-12-1 996) d'un appel à la désobéissance civile (2éme projet Debré) avant-coureur des appels et de la manifestation nationale des «pétitionnaires». Sans parler du travail de réflexion et d'élaboration de propositions lors des débats sur les nouvelles lois dont j'ai parlé précédemment . 1. 3. Droit d'asile et zones d'attente L'ANAFE, dont le MRAP est l'un des membres fondateurs, a été créée en décembre 89 pour être présente auprès des étrangers maintenus en zone d'attente à leur entrée en France. Elle fonctionne en dépit, soit de l' obstruction des autorités administratives, soit de leur inerti~. Elle est présente à Roissy, Orly, Toulouse, Marseille, Dunkerque, Lille. L'action de l' ANAFE a notamment permis de dénoncer les agissements inadmissibles du Docteur B. à Roissy. Elle a également publié un rapport sur l'état déplorable des Zones d'attente et des violations de droit qui y sont commises. Elle reste mobilisée sur la question des transporteurs aériens, des conditions d'accueil et de la présence associative dans ces zones. 1. 4. La commission de sauvegarde du droit d'asile créée en 1977 est un regroupement d'associations dont l'objectif essentiel est de réagir à toutes décisions pouvant porter atteinte au droit d'asile. Elle a participé à la campagne « réfugiés » d'Amnesty international de 97. Elle a travaillé sur le problème des Basques, s'est exprimée sur le projet de loi Chevènement et travaille actuellement à un projet dit« Aznar »visant à limiter le droit d'asile dans les états de l'Union européenne. 1. 5. Bilan URMED 1995-1998 dont notre mouvement fait partie, depuis sa création en janvier 1995. Les associations fondatrices sont au nombre de 5, directement issues du précédent collectif « ADMEF» (1994) : AIDES, CIMADE, Comité contre la Double Peine, MRAP, Sida-InfoService. Médecins du monde, également ex-ADMEF a adhéré à la plate-forme URMED sans participer activement à ce stade aux réunions du « groupe de pilotage» du collectif. Sa plate-forme : Agir pour la défense des malades étrangers atteints de pathologies graves et de leurs parents et tuteurs (s'il s'agit notamment d'enfants mineurs). En août 1995, un séminaire de formation URMED a été organisé. Enjanvier 1996, l'URMED réalise un dossier de communication contenant essentiellement un argumentaire pour la régularisation des grands malades ainsi que la proposition de loi URMED. Dossier qui a été très largement utilisé auprès des parlementaires, ce qui a favorisé des changements législatifs. Le dossier est également utilisé pour susciter la création de « relais régionaux », comme à Marseille et à Nice. Un relais informel est très actif à Bordeaux. Nous vous invitons à démultiplier ces mobilisations régionales. De décembre 1995 à décembre 1996 : participation d'URMED en tant que tel et d'associations d'URMED (AIDES, CIMADE, MDM, MRAP) et du GISTI (ex-ADMEF) au« Collectif contre la précarisation et les exclusions» afin de présenter des propositions au gouvernement Juppé sur le projet de loi de renforcement de la cohésion sociale. Le MRAP est désigné par le Collectif comme association pilote du groupe de travail sur Accès aux Droit et Droits des étrangers. Propositions présentées également auprès des commissions sociales du Sénat et de l'Assemblée ainsi que de nombreux groupes parlementaires. En juin 97 : réaction sur la circulaire du 24 juin et le critère 1.7 relatif aux malades étrangers. Septembre 97 à mars 98 : réactions au projet de loi puis à la loi Chevènement. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • Tsiganes et gens du Voyage En 1990, avec la loi Besson, naissait l'espoir d'une amélioration de la question du stationnement des caravanes de nos amis voyageurs. En effet, le texte obligeait les départements à établir un schéma départemental et à toutes les communes de plus de 5 000 habitants de réaliser des aires d'accueil. A la date du 16 octobre 1995, seuls 15 départements se sont dotés de ce fameux schéma et il n 'y a de recensés que 5 000 emplacements pour un besoin estimé à 25 000. Certes, depuis des aires se sont ouvertes mais combien ont fermé? Le groupe de travail de la commission est intervenu chaque fois qu'il a été informé de comportements anormaux de maires, de forces de l'ordre ou de particuliers. Des membres du MRAP ont participé aux réunions de l'URAVIF, à l'Assemblée générale de l'UNISAT à Paris, aux rencontres d'un groupe de travail au secrétariat d'Etat au Logement, au colloque sur les gens du voyage organisé à Lille par la LDH ainsi qu'au colloque de l'AMIF (Association des maires d'Ile-de-France) le 16 décembre 97. Nous avons égaIement participé à la manifestation organisée par le relais à Bouguenais (Loire-Atlantique) pour fêter son 30eme anniversaire. Nous avons protesté à la suite de l'émission « Zone interdi te » du Il janvier 98. Pour pallier l'insuffisance de la législation actuelle, la commission a travaillé sur des propositions présentées à des réunions de travail au ministère. Nous avons insisté sur la reconnaissance de la caravane comme habitat et sur l'oubli dont sont victimes les Gens du voyage, pour qu'ils soient reconnus comme citoyens à part entière et dans le respect de leur spécificité culturelle. Le MRAP intervient également pour que le ministère des Affaires sociales soit responsable de toutes ces questions qui relèvent actuellement de plusieurs ministères. La commission tente par ses activités en liaison avec des CL ainsi qu'avec des associations de défense des Voyageurs de briser les préjugés dont souffrent les intéressés. La commission nourrit par ses contributions les travaux de la CNCDH. Contributions d'autant plus importantes, que nous sommes les seuls à aborder le sujet des gens du voyage. Antisémitisme et néo-nazisme La commission a une activité régulière. Même si elle pâtit un peu du manque d'intérêt porté par l'ensemble du Mouvement sur son travail compte tenu d'une certaine évolution de l'expression du racisme dans notre pays. La commission â produit plusieurs publications, notes, études et organisé des rencontres plurielles, colloques. Par exemple, le colloque « cinquante ans après Nuremberg» qui a pris la forme d'un procès de l'extrême droite et qui a été suivi d'un « appel du Sénat ». Il faut citer ici la plainte en diffamation déposée par le FN contre notre Mouvement (suite au communiqué après l'assassinat à Sens d'un jeune d'origine maghrébine) et qui nous a permis de mener une campagne contre le FN : l'objectif était de transformer le procès contre le MRAP en un procès contre le FN (appel de plusieurs centaines de personnalités reprenant à leur compte la déclaration incriminée du MRAP). Nous avons publié un Appel de personnalités aussi, sur un texte écrit par A. Jacquard à la demande du MRAP, réagissant aux déclarations Le Pen sur« l'inégalité des races» : cet appel a été signé par plus de 600 scientifiques. Les actions juridiques contre différents responsables du FN se sont multipliées. A noter également que depuis 1992, le MRAP grâce au travaux de cette commission, émet des propositions à la Commission consultative des droits de 1 'homme pour prévenir et endiguer les exactions des groupes néo-nazis ( demandant notamment la dissolution de ces groupes.) Cette commission a été à l'initiative de la création d'un groupe de travail sur l'extrême droite animé par P. Krausz, A. Callès et Renée Le Mignot. Face à l'urgence d'une importante ri poste à la montée de l'extrême droite, la direction du MRAP a décidé de mettre en place un groupe de travail pour s'adapter aux nouvelles données et pour redéployer son combat. L'évolution de l'extrême droite, son implantation dans le système politique et son développement dans le tissu de la société dans son ensemble, a montré l'urgence d'une adaptation rapide à la situation. La nécessité d'entreprendre ce travail est corroborée par une étude réalisée en 96 auprès des nouveaux adhérents qui a mis en évidence que plus de 70% des nouveaux adhérents nous rejoignaient pour lutter en priorité contre le FN. En moins d'un an d'existence, ce groupe dispose d'un bilan plus que satisfaisant, à savoir : • participation du MRAP au Comité national de vigilance contre l'extrême droite (la présidence du colloque organisé à Strasbourg lors du congrès FN a été confiée au MRAP, Alain Callès) • participation du MRAP à des réunions inter-organisations en vue de sensibiliser l'opinion publique sur la nécessité de dissoudre le FN qui n'est pas un parti comme les autres et tombe sous le coup de la loi. Depuis juin, cette idée progresse tant auprès de l'opinion qu'au sein des organisations. • organisationd'unecampagned' ampleurnationaleautourde trois axes de travail : - Analyse des idées de l'extrême droite; création d'un argumentaire (consultable sur plusieurs sites Internet). Cet argumentaire correspond à un besoin interne au Mouvement aussi bien qu'à l'extérieur de celui-ci. Déjà, des organisations amies l'ont repris sur leur site. Conçu sous forme de fiches, il peut être réactualisé facilement. De nouvelles fiches sur des thèmes qui n'ont pas encore été abordés, sont en cours de réalisation. - Lancement d'une campagne nationale avec du matériel nouveau: le journal de 4 pages destiné à l'opinion<< grand public », les trois affiches et les trois autocollants. En parallèle à cette campagne nationale, un concours d'affiches auprès d'écoles de graphistes a eu lieu. Il a fait l'objet d'une exposition dans une galerie parisienne et les meilleurs prix ont été retenus pour les cartes de la campagne du 21 mars. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP - Formations de militants par des pratiques nouvelles et la recherche de la meilleure mise en valeur possible du « capital expérience» des militants du MRAP avec notamment un week end de formation et un travail avec le théâtre de l'Opprimé. Secteur Education à la Citoyenneté Je serai nécessairement brève dans la mesure ou vous avez reçu une synthèse de l'activité du secteur complétée par le rapport détaillé qui a été distribué aux délégations. Je me contenterai donc d'insister sur quelques points. Tout en développant quantitativement notre activité, nous nous sommes efforcés de lui donner une orientation nouvelle, mieux adaptée à une réalité en pleine évolution, plus à même de répondre aux interrogations de la jeunesse et à ses perspectives d'avenir. C'est ainsi que nous évitons l'expression « éducation contre le racisme» pour faire vivre une démarche plus positive d'« éducation à la citoyenneté». En ce qui concerne l'activité quotidienne de notre secteur, notons que le Mouvement a renforcé ses capacités d'intervention avec le recrutement d'un salarié (suivant l'engagement pris lors de notre dernier congrès) et la mise en place d'une équipe cohérente animée par moi même, équipe renforcée aujourd'hui par un stagiaire BEATEP., et une stagiaire allemande volontaire de l' ASF. Cette activité éducative se manifeste notamment durant la semaine d'éducation contre le racisme dont le succès ne cesse de croître. Certes la prise de conscience aiguë du danger de la montée du FN a favorisé ce développement mais les efforts du MRAP sont également largement reconnus. Très brièvement, notons à titre d'exemples: • Entre janvier et octobre 97, plus de 980 demandes de documentation ont été traitées. • Nous accueillons régulièrement en sessions de formations des groupes de lycéens, éducateurs et formateurs. • 2 à 3 interventions extérieures par semaine rythment l' activité du secteur, sous forme de rencontres, tables rondes, conférences, animation, non seulement à l'école mais dans les différentes sphères de la société, quartiers, centres sociaux, MJC, bibliothèques etc, sans compter les centaines d'interventions des comités locaux. Ces trois dernières années furent marquées également par les nombreuses présentations de nos outils pédagogiques (80 présentations de nos expositions durant l'année 1997). Avec l'anniversaire de l'abolition de l'esclavage, nous avons dû procéder à des retirages de la cassette « l'esclavage hier et aujourd'hui» ainsi que de celle sur« les oubliés de l'histoire » très utilisée dans le cadre du concours de la Résistance, organisé dans chaque académie, et dont le sujet porte cette année sur « l'apport des immigrés dans ce combat ». Un nouvel outil pédagogique le « jeu de loi» connaît un indéniable succès puisque les trois exemplaires qui sont au siège sont loués en permanence. Nous avons dû faire réaliser 20 j eux supplémentaires, acquis par des partenaires tels que la FOL, les Francas, MJC, etc. Jeu qui initie les enfants de 8 à 13 ans à la découverte de la loi de 72 et peut s'inscrire dans des projets plus larges d'éducation à la citoyenneté. A ce jour plusieurs inaugurations ont été organisées (Paris, Rouen, Lille) avec toujours les mêmes succès médiatiques. L'équipe réfléchit à une nouvelle adaptation enjeu de plateau. rjF Évolution du nombre d'adhérents Base 100 en 1988 108 106 104 102 100 98 96 94 92 90 00 (J) a T"" N ('1) ..q Ln 00 00 (J) (J) (J) (J) (J) (J) (J) (J) (J) (J) (J) (J) (J) (J) T"" T"" T"" T"" T"" T"" T"" T"" Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • Il 1 Notons aussi à Paris l'exposition d' oeuvres réalisées à l'occasion du concours d'affiches antiracistes par des élèves de deux écoles d'Art parisiennes à la galerie La Pochade. Les trois premières oeuvres ont été reproduites en cartes postales (21 mars) et la première a été tirée en affiche. Enfin, pour répondre aux demandes de formation interne, le secteur Education organise des stages destinés aux adhérents et éducateurs. L'éducation à la citoyenneté connaît en outre une intense activité par les actions des comités locaux qui s'investissent de plus en plus. Actuellement nous enregistrons durant la semaine éducative plus de 200 manifestations soit à l'initiative du MRAP soit en partenariat. En conclusion, par les orientations nouvelles que nous avons définies, en faisant de l'éducation contre le racisme une partie intégrante d'une éducation à la citoyenneté, notre action rencontre un écho de plus en plus favorable auprès de tous ceux qui, par leur profession ou leur engagement personnel, oeuvrent à la formation du citoyen. Commission Jeunes Quelles ont été les orientations et actions de la commission jeunes? En premier lieu, la lutte contre le racisme, en impulsant les actions nationales du MRAP dans certaines universités en région parisienne, souvent en sollicitant et en obtenant le partenariat avec les syndicats étudiants. La commission jeunes s'est efforcée de faire connaître les droits des étrangers en participant à de nombreuses fêtes telles que CAP Solidarité, de la JOC, avec exposition et stand sur les sans- papiers de StBernard. Elle a participé auxjournées d'information sur la citoyenneté et sur la nationalité à la demande de certaines organisations de jeunes ou encore des services municipaux chargés de la jeunesse comme à Bobigny. La commission a élaboré plusieurs fiches sur la situation des jeunes étrangers voulant vivre en France, sur la Naturalisation, sur la Nationalité et a édité plusieurs numéros du bulletin « Inter- jeunes ». Les membres de la commission ont constitué avec succès un groupe « jeunes » dans la région parisienne. Aujourd' hui ne devons-nous pas localement les aider pour cette expérience ? Ce qui permettrait à notre mouvement de mieux répondre aux exigences telles que le soutien aux étudiants étrangers ou aux maîtres auxiliaires ou encore aux jeunes qui rencontrent des difficultés de séjour lorsqu'ils atteignent l'âge de la majorité. Nous pouvons féliciter cette équipe de jeunes militants qui a fait un excellent travail qui mérite d'être mieux connu. Nous vous invitons à réfléchir sur les moyens à mettre en oeuvre localement pour multiplier les groupes jeunes au sein du MRAP. Commission développement et formation interne Conçue il y a quelques années, elle connut une nouvelle organisation en 1995. En effet, elle est composée aujourd'hui de huit membres prenant en charge chacun un secteur géographique, permettant ainsi une décentralisation et favorisant une liaison avec le national d'une autre qualité. Après une période de rodage et de diagnostic sur l'état réel du mouvement grâce aux différents questionnaires adressés aux CL, nous pouvons affirmer que l'année 97 fut opérationnelle. Pour atteindre ses objectifs, le secteur fut renforcé comme annoncé lors du dernier congrès par le recrutement d'un salarié à temps plein. Quelques éléments d'appréciation des résultats enregistrés: après dix ans de baisse du nombre de nos adhérents, nous enregistrons depuis trois ans non seulement l'arrêt de cette érosion ,mais une sensible augmentation de nos effectifs: +3% en 1995 ; + 3,2% en 1996 ; + Il ,5% en 1997, retrouvant ainsi nos effectifs de 1988. En 1997, l'actualité politique chargée du début d'année, avec notamment l'élection de Vitrolles, les manifestations contre la loi Debré et contre la tenue du congrès du FN à Strasbourg, a accentué l'attrait de notre Mouvement mais cette progression significative est aussi le résultat d'une meilleure gestion des cotisations tant sur le plan national que local. Pour cela nous devons féliciter Eric Lathière-Lavergne qui se consacre sans compter au secteur Développement. En ce début d'année nouvelle, nous avons engagé une campagne d'adhésions avec l'envoi à4 850 personnes d'un appel à l'adhésion. Les premières réponses sont plus qu'encourageantes et sont la démonstration que nous pouvons nous doter d'une structure à la hauteur des exigences du combat actuel. Nous invitons l'ensemble des comités locaux à faire preuve d'ambition dans ce domaine. En effet, depuis le dernier congrès durant lequel nous avions mis l'accent sur la nécessité de faire vivre un antiracisme de proximité, nous devons aujourd 'hui nous fixer l'objectif de nous doter d'un Mouvement pleinement enraciné dans la société française, capable d' innover en apportant localement des réponses antiracistes adaptées aux expressions multiples du racisme dit « ordinaire ». Dans le rapport d'activités du secteur vous pourrez prendre connaissance dans le détail de la composition sociologique des adhérents du MRAP. Trois remarques à ce propos: le MRAP compte plus de femmes, 52,5%, que d'hommes; 64,5% des adhérents sont des actifs dont 40% d'enseignants; la moyenne d'âge assez élevée montre une faiblesse réelle en direction de lajeunesse. L'analyse précise du nombre de nos adhérents démontre que nous connaissons une deuxième difficulté. En effet, nous constatons derrière les chiffres globaux que nous réalisons chaque année un nombre impOtiant de nouvelles adhésions. Toutefois nous avons une difficulté réelle à fidéliser les adhérents. En effet, nous enregistrons seulement 76% de renouvellement. Nous sommes confrontés à une absence de fidélisation à notre structure qui ne se traduit heureusement pas en une absence de fidélité à nos idées. Une question nous est posée collectivement, comment répondre à ce phénomène? Nous pouvons constater qu'en terme Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP d' adhérents, nous tendons vers un mieux. Qu'en est-il au sujet des comités locaux? Nous assistons à un nouveau déploiement de nos structures locales. Après une période où nous enregistrions plus de pertes de comités que de créations, 1996 fut la première année ou la tendance fut inversée avec 6 créations nouvelles et en 1997, 16 nouvelles structures ont vu le jour ainsi que 2 reconstitutions compensant largement les 5 disparitions que nous regrettons. A noter que des créations ont été réalisées dans des départements où nous étions totalement absents à l' exempIe de la Saône-et-Loire, la Gironde, le Bas-Rhin, la HauteMarne. Nous pouvons mesurer aussi le meilleur attrait de notre mouvement dans l'opinion par l'augmentation des demandes de documentation sur le MRAP : 1 550 pour 96 et 97. Lors du dernier congrès nous avions pris la décision de mettre en place un travail de formation interne. Où en sommesnous aujourd 'hui ? Certains stages furent mis en place venant s' ajouter à ceux du secteur juridique. Nous avons cité ceux du secteur éducation et celui sur le FN, nous avons également mis en place, après consultation par questionnaires auprès des comités locaux, un dossier « fiches argumentaires ». Fiches qui sont envoyées aux PST avec la Lettre du secrétariat. Citonsen quelques-unes : le 17 octobre 61, le racisme et la crise, Mumia Abu-Jamal, présentation du MRAP, les ramifications de l'extrême droite, le lexique juridique, l'abolition de l' esclavage, l'affaire Dreyfus. Dossier argumentaire qui a déjà fait ses émules avec la parution du dossier sur la lutte contre le F.N. Nous vous invitons a participer pleinement à la réalisation de cet outil pour les militants. Le secteur Développement a également été à l'initiative de deux réunions des PST qui ont connu un véritable succès de par la participation massive mais aussi par le niveau des questions abordées et de la réflexion. Comment en serait-il autrement, compte tenu de l'engagement concret des PST dans le combat au quotidien. Nous proposons de poursuivre cette démarche chaque année sous des formes diverses. Concernant la circulation de l'information, nous avons élaboré des outils nouveaux venant s' ajouter à notre journal mouvement au regard de l'étude réalisée auprès d'un échantillon de comités locaux qui non seulement ont fait apparaître leur satisfaction mais aussi de nombreuses propositions. Je pense que nous pouvons affirmer que nous sommes constamment en progrès même si nous devons encore améliorer. Il est également un fait que dans la préparation de ce congrès, les CL n'ont pas été en manque d'infos. Tous ces résultats font la démonstration de nos possibilités. Il me paraît déterminant que nous les mettions en relief d'autant que nous n'avons pas encore relevé entièrement le défi lancé par Mouloud lors du précédent congrès à savoir d'engager une véritable mutation de notre pratique militante antiraciste. Une culture nouvelle qui ne sera possible que si elle est étroitement liée à une véritable évolution de notre organisation. Campagne de communication L'objectif était de renouveler l'image du MRAP, de tenter de la diffuser au-delà de son audience habituelle, de redonner aux idées défendues par le Mouvement une nouvelle force. Il a été mis en place un groupe de travail « communication» dirigé par Malte Martin et Eliane Benarrosh. Création d'un nouveau logo et d'une nouvelle « signature MRAP » ainsi que d'un matériel de communication. Internet L'activité Internet est constitué de deux parties. Le site Internet lui-même qui comprend: l' histoire du MRAP, ses campagnes, ses produits, un répertoire des comités, des ressources documentaires, des liens avec des organisations amies (dont le site juridique de SOS Net). Mais ce site est aussi un instrument interactif puisqu'il permet l'échange avec des individus et des organisations. Notre site est consulté de façon très satisfaisante. Base : 15 000 consultations annuelles, dont à peu près 15% émanent de serveurs basés à l'étranger, beaucoup de consultations d'anglophones et de Néerlandais. L'avenir : notre investissement dans ce secteur devra se renforce r. Progressivement toutes les écoles et Différences qui est le lien établissements scolaires fondamental entre le mouvement et l'adhérent. En effet, nous avons mis en place la Lettre du secrétariat dont la cheville ouvrière est Renée Le Mignot, le miroir des activités dans Différences, le réseau FAX permettant actuellement à 67 CL de recevoir au quotidien les positions du MRAP. Dernière initiative en date le spécial « infos congrès» . Des outils qui sont très appréciés dui Le développement en 1997 auront accès à internet de même qu'un nombre croissant de particuliers. Les consultations sont donc appelées à augmenter de même que les sollicitations par courrier électronique. C'est pour cela que nous lançons un journal internet pour enfants, qui recueillera les travaux des milieux scolaires et périscolaires, et doit être un support pour l'intervention Nombre de comités locaux Création de CL Disparition de CL Nouveaux adhérents Demande de documentation générale En retour: Adhésions Abonnement à Différences Taux de retour 165 16 5 1108 638 134 9 22,4% Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP de nos militants dans les éta- Cff" • • blissements scolaires. Problèmes de deux natures pour le Mouvement: la gestion de ce site nécessite d'augmenter le nombre des personnes qui s'en occupent et d'accroître les moyens financiers. Implication des comités locaux J'aurais pu illustrer chaque thème développé précédemment par de nombreuses actions de comités locaux. En effet la liste des actions est impressionnante comme vous pouvez le constater dans le bilan que nous vous avons remis ce matin. La richesse de notre Mouvement et sa reconnaissance sont le fruit des actions très diversifiées des CL. Aux quatre coins de 1 'Hexagone, les CL cherchent à répondre d'une manière plus adaptée aux manifestations multiples du racisme au quotidien « en faisant vivre l'antiracisme de proximité ». Des actions de formes très diverses ont été menées par les militants sur le terrain. Actions réactives au racisme mais aussi actions préventives: • enreliant les appels à la désobéissance civile contre le délit de solidarité ou pour la régularisation des sans-papiers • enagissantcontre les exclusions à Vitrolles, les arrêtés antimendicité à Menton, Périgueux, Carcassonne, Montpellier, Avignon, Metz, Nice, Tarbes, Pau. Issy-les-Moulineaux avec le soutien aux familles contre les coupures d'électricité • en participant aux luttes contre les discriminations raciales à l'emploi à St-Nazaire, ou aux collectifs contre le chômage à Agen ou encore à la marche européenne contre le chômage à Poitiers, Nantes et Lille • en menant des actions contre les discriminations à l'école comme à Hautmont, à Vairé as, contre la fermeture de classes ou d'école en Dordogne, le soutien aux « sans bahuts» en Seine-Saint-Denis, réactions aux propos racistes dans les établissements scolaires tel qu'à Dijon ou à l'hôpital à Rouen • en réagissant contre les ségrégations au logement, avec à Charvieu-Chavagneux une initiative aux côtés des sans logis. Sans faire le tour de l'ensemble des fêtes de l'amitié, actions d'information, débats et autres colloques, organisés localement citons quelques exemples: débats sur l'Islam, sur les préjugés racistes, sur le 17 octobre, projection du film« la ballade des sans-papiers », débats sur l'enfance, autour du thème du printemps des communautés etc. Expositions et débats sur la différence, pour les droits de l'homme, l'humour contre le racisme, racisme et police, le racisme au cours de l'Histoire, exposition « tous parents, tous différents ». Des colloques et forums en direction des jeunes, concours « graine de citoyens », et de dessins antiracistes, création d'un agenda antiraciste pour les jeunes. Intervention avec le monde de la culture avec vingt-trois plasticiens du Nord qui ont réalisé une exposition itinérante « la culture face à l'intolérance» en réponse aux politiques culturelles dans les villes FN ; exposition« Lettres d'Algérie» ; représentation théâtrale « la femme aux allumettes », festival la « musique sans frontière », exposition « mille textes et mille dessins contre la discrimination », expo-vente antifasciste. Animation de nombreux festivals culturels utilisant les supports tels que le cinéma ou le livre. Les « 72 heures du livre », festival du livre « culture plurielle », festival des art mélangés, fes tival du film contre l'exclusion et l'intolérance, projection du film « Avoir vingt ans dans les Aurès ». Nous pouvons constater la richesse de nos interventions dans tout le pays, activités qui ont permis de nombreuses mises en réseau par un travail en partenariat. Pour toutes ces campagnes, nous avons multiplié de nombreuses actions spécifiques du MRAP mais aussi et surtout des actions en partenariat. Partenariat Lors de notre précédent congrès nous avions défini les bases générales de notre conception du « partenariat », à savoir une activité en partenariat sur des objectifs précis à atteindre et déterminés avec l'ensemble de nos partenaires économiques, sociaux et politiques. Cette activité plurielle s'inscrivant dans des structures souples, respectant l'identité de chacun et n' existant parfois que le temps de l'action entreprise. Comme nous venons de le voir, notre mouvement a organisé et répondu présent à de nombreuses actions collectives, mis en place de nombreux collectifs. Concernant les actions « spécifiques » du MRAP, durant ces trois dernières années, nous avons à chaque fois eu une attitude de demande de soutien. Ce soutien nous l'accordons également aux autres organisations à toute action, proche de nos préoccupations immédiates. FOltS de cette riche expérience, nous sommes actuellement en capacité d'adapter les formes d'intervention collective aux réalités en perpétuelle évolution. CONCLUSION Nous devons évaluer la richesse des activités et des interventions locales à leur juste valeur. Sans flagornerie aucune, féli citations à l'ensemble des militants pour toutes ces activités qui font que notre Mouvement a pu apporter sa pierre au combat contre le racisme et est de plus en plus connu et reconnu dans notre pays. L'ensemble de ce bilan des actions « contre» les manifestations racistes, xénophobes, « contre» les discriminations et ségrégations raciales, « pour» l'égalité à la citoyenneté, « pour» le respect de la dignité humaine nous amène à réfléchir, pour le proche avenir, aux axes de notre stratégie. En effet, tous ces combats ont posé de façon nouvelle certaines problématiques de notre combat, à savoir: • le combat pour la citoyenneté et l'égalité des droits • le contenu de la politique d' immigration dont la France a besoin pour le 3ème millénaire • le contenu de l'éducation à la citoyenneté • la définition de l'antiracisme de proximité • les stratégie pour une lutte efficace contre le fléau de l'extrême droite. • le rôle de chacune de nos instances .• Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP RAPPORT D'OUVERTURE présenté par Mouloud Aounit MON PREMIER MOT est tout naturellement pour vous souhaiter la bienvenue. Bienvenue à vous tous qui arrivez de nombreuses régions de France, porteurs de vos mobilisations pour la défense des droits de 1 'Hommede tous les hommes - de vos combats pour faire reculer le racisme, et de vos engagements pour développer des relations de compréhension entre les habitants de ce pays par-delà les origines ou les spécificités des uns et des autres. Permettez-moi aussi d'adresser mes remerciements aux élus de la direction sortante, cette équipe qui, dans un contexte particulièrement difficile, avec dévouement et disponibilité, a fait face aux devoirs que vous leur avez confiés, qu'ils en soient ici chaleureusement remerciés. Je ne peux oublier ces artisans de l'ombre, la petite équipe de salariés qui, j'en atteste et vous en êtes les témoins, n'a eu de cesse d'être disponible, travaillant dans des conditions parfois difficiles, le stress faisant partie de leur quotidien. Ils n'ont pas compté leur temps pour servir notre cause, qu'ils en soient eux aussi remerciés. Je tiens à remercier tout particulièrement le groupe chargé de la préparation de ce congrès qui, avec détermination et conviction, a permis une vaste consultation du mouvement. Enfin,je dois souligner la contribution du Conseil général qui a mis à notre disposition, gracieusement, ce magnifique auditorium ainsi que la municipalité de Bobigny et son député-maire M. Birsinger qui nous accueille dans sa ville que je remercie chaleureusement. Le MRAP dans son histoire Le congrès qui s'ouvre aujourd'hui revêt, vous en conviendrez, un caractère particulier, à un moment lourd d'inquiétudes. C'est un rendez-vous avec nous-mêmes, mais aussi avec notre histoire. En effet le 22 mai 1999, le MRAP aura 50 ans. Un demi-siècle de luttes au service des droits de l'Homme durant lequel notre mouvement a traversé 1 'histoire de France, l'histoire avec un grand « H ». Un demi-siècle au service de la dignité, contre l'intolérance, pour le respect des droits des peuples. Vous, les héritiers de ce patrimoine, vous comprendrez à la fois la chance et l'honneur d'avoir à affronter l'avenir et d'élaborer le devenir de notre combat. Pour cela, notre voie est éclairée par ceux qui nous ont précédés et nous nous appuyons sur l'identité forgée par les luttes et l'action de ces artisans des droits de l'homme qui sont parmi nous: je salue à cet effet Charles Palant, Albert Lévy, Charles Owezarek, et tant d'autres ici présents. La préparation Un congrès est un rendez-vous avec nous-mêmes, pour évaluer et ajuster notre stratégie, préparer l'avenir et le devenir de nos luttes. Dans un contexte qui annonce un avenir difficile, il est impératif de donner vie et sens aux nécessaires mutations que notre mouvement doit opérer. C'est précisément au regard de ces mutations que nous avons souhaité donner à ce congrès, dans sa préparation et comme dans son déroulement, une organisation inédite, innovante, mobilisatrice. Pendant près de quatre mois, vous avez pu vous familiariser avec les trois thèmes retenus par le Conseil national pour déterminer les orientations du mouvements. Neufreprésentants nationaux ont été chargés d'assurer le suivi auprès des comités locaux pour donner une certaine cohérence à l'ensemble des travaux préparatoires. AI' occasion de leurs visites sur le terrain, ils ont compris que sur les grandes luttes, les comités se retrouvent dans des ripostes identiques. En même temps, il ressort que les comités locaux sont constitués d'équipes très diversifiées tant par leurs méthodes de travail, que par leur nombre d'adhérents, leurs centres d'intérêts et de mobilisations et ce, dans des contextes locaux particuliers. Par ailleurs, les représentants nationaux qui ont circulé à travers la France ont beaucoup appris sur le mouvement, sur ses richesses, sa diversité, son pluralisme d'idées, d'approches des problèmes, d'opinions. C'est un bien précieux pour servir notre cause et qui fait de notre mouvement un carrefour humain, un lieu de convergence de convictions diverses. Aussi, fort de ces atouts, ce congrès va être un moment d'échanges et de recherches pour avancer ensemble. Pour permettre de partager au maximum nos réflexions, le conseil national a décidé que l'ensemble des congressistes travaillerait sur les trois thèmes proposés. Etudier trois thèmes tous ensemble, au lieu de trois thèmes en trois groupes, triple le temps de débat en groupes. Vous comprendrez aisément, j'en suis sûr, la nécessité de rigueur et de synthèse qui vous sera demandée. J'en appelle à votre coopération. Le racisme aujourd'hui et notre bilan Nous avions souligné, lors du dernier congrès, combien notre société était perméable aux idées racistes. Trois ans après, nous devons reconnaître malheureusement que la situation ne s'est pas améliorée; elle s'est aggravée au point où il nous faut, sans exagération, tirer la sonnette d'alarme. Le fait est que notre société est infectée par le racisme : il imprègne non seulement des pratiques, mais aussi les esprits en France et en Europe. Un récent sondage, à l'échelle de Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • • l'Union européenne, réalisé au printemps 97 est édifiant : 33 % des personnes interrogées se déclarent assez racistes ou très racistes. Une seule personne sur trois ne s'estime pas du tout raciste. Si on se réfère à ceux qui se déclarent très racistes, la Belgique arrive en tête avec 22 %, suivie par la France 16 % et l'Autriche 14 %. Par ailleurs, le récent score réalisé par le FN (plus de 10 %) confirme cette tendance. Toujours selon les sondages, la notion de préférence nationale est acceptée par près de 33 % des Français. Ils justifient et trouvent légiti me qu'un chef d'entreprise choisisse un Français à un étranger en période de crise. La lepénisation des esprits se mesure aussi par le fait que 73 % des Français sondés partagent l'idée que les immigrés viennent en France uniquement pour profiter de la protection sociale. Par ailleurs, l'autre fait significatif de cette détérioration sur cette dernière période est la progression et l'enracinement du Front national. Géographiquement, il poursuit son implantation dans les régions du Nord, de l'Estetdu Sud-Est de la France. Dans 5 régions, il atteint ou dépasse 17 % de l'électorat, il est particulièrement présent à l'est d'une ligne Rouen / Perpignan. Sociologiquement, il maintient son influence sur un électorat populaire et accapare des zones urbaines marquées par de fortes exclusions. Mais il s'implante aussi dans des zones moins touchées par l'exclusion et où les populations sont moins fragilisées par la crise. Ce fait révèle la progression d'un racisme d'adhésion idéologique - car il n'y a pas de racisme sans fond idéologique; s'appuyant sur un sentiment d'exaspération, le Front national a réussi à se poser comme porteur de certains thèmes, notamment de « la nation contre l'Europe », et de « la défense de l'identité nationale» comme protection face à la mondialisation. Parallèlement à la montée du Front national, 50 ans après l'ouverture des camps, malgré les témoignages des survivants et les informations que nous possédons sur l'univers concentrationnaire, nous assistons à la résurgence et à l'offensive de l'idéologie négationniste. Le développement de lieux de diffusion d'oeuvres négationnistes, l'association d'ex-compagnons de route tels que Garaudy avec les négationnistes notoires de la Vieille Taupe, illustrent un peu plus cette dégradation. Ce climat est lourd. Il influe sur les logiques sécuritaires qui ont prévalu notamment dans la gestion du dossier de l'immigration. Il bride les volontés politiques pour l'accès à la citoyenneté civique des immigrés par le droit de vote. Il pèse sur le comportement des élus et notamment à faire respecter la loi par exemple pour le stationnement des gens du voyage. Ce climat amplifie et donne une légitimité aux discriminations de tous ordres, de plus en plus banalisées. Dire tout cela ne doit pas nous amener à nous culpabiliser; imagine-t-on, un instant, quel serait l'état de notre société sans vos mobilisations, sans nos combats avec d'autres organisations, que ce soit pour les sans-papiers, les déboutés du droits d'asile, pour l'abrogation des lois Pasqua, la lutte contre toutes les discriminations, sans notre intervention juridique et notre action d'éducation et de prévention. Quel antiracisme aujourd'hui? Le bilan d'activités présenté révèle combien, dans un contexte difficile, les résistances ont été nombreuses. Incontestablement, elles ont permis de soulager, de réconforter parfois de réparer, mais a-t-on vraiment guéri? A-t-on vraiment entamé le racisme? Avons-nous attaqué le mal à la racine pour perturber de manière significative et durable les processus qui amènent au rejet de l'autre parce que différent et malgré tout semblable. Quelle qu'ait été notre ardeur, l'extension du racisme quoti dien des braves gens, la banalisation de l'idéologie de la préférence nationale, les innombrables discriminations comme celles pratiquées à l'embauche, l'enracinement du Front national, la contamination d'une partie de la droite et de ses électeurs, ont mis à nu une problématique. N'avons-nous pas sous-estimé les soubassements et les ressorts du racisme? Avons-nous suffisamment compris que nous étions dans des processus d' aggravation du racisme, du recul des droits? L'ampleur de l'avancée du racisme n'a-t-elle pas dépassé nos analyses? Notre antiracisme n'a-t-il pas été trop souvent caractérisé par la gestion des expressions les plus visibles? Aussi nous sommes en droit, parce que nous voulons que notre congrès soit celui de la vérité et de la responsabilité, d'examiner comment à l'avenir les ripostes au cas par cas, l'activité de solidarité doivent intégrer et servir une analyse politique susceptible de démonter les mécanismes pervers du racisme. Cependant contrairement aux autres années, nous avons peutêtre mieux appréhendé, au cours de la préparation de ce congrès, ce que nous appelons le racisme de la crise, résultat de la persistance et de l'aggravation de cette dernière qui génère une dynamique infernale d'exclusions. Nous avons sans doute aussi sur cette dernière période mieux perçu que les agressions de type raciste étaient l'envers d' avancées. Ainsi, l'âpreté du racisme est-elle d' autant plus vive que l'intégration des immigrés est en marche, comme l'ont révélé diverses études, si bien que notre combat s'inscrit dans une tension entre des avancées certaines et la volonté de les paralyser. Quatre pistes d'orientation Pour préparer l'avenir du mouvement, je vous invite, trois jours durant, à réfléchir d'une part sur les défis que nous souhaitons relever, et d'autre part sur les moyens et les conditions qui sont nécessaires. A cet effet, je soumets à votre sagacité quatre thèmes qui peuvent, sans exhaustivité, représenter les urgences du présent et de l'avenir. Le premier: les luttes plurielles pour l'égalité des droits et une citoyenneté active pour tous. Le discours antiraciste, même fondé sur l'approfondissement des connaissances, et quelle que puisse en être son intention pédagogique, n'a que peu ou pas de prise sur les tenants du racisme, en raison de l'enracinement durable et de la profondeur de la crise économique et sociale qui affecte nos sociétés. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP Afin que le racisme et la xénophobie, tels qu'ils s'expriment chez les plus vulnérables et les exclus puissent reculer, il est urgent de placer, à l'aube du 21 cme siècle, la lutte contre les inégalités dont tous sont victimes, au coeur de l' action contre le racisme (tant que persistera l'intolérable misère au sein d'une société riche, l'idéologie de la préférence nationale ne pourra que s' épanouir). La lutte des pauvres, des précaires, des exclus et de ceux qui prennent leur parti, est créatrice de solidarité pratique dans la vie quotidienne . C'est pourquoi, pour le MRAP, la lutte pour l'égalité des droits est synonyme de lutte contre les discriminations et le racisme, sous toutes ses formes et quelles qu'en soient les victimes. Cette lutte pour l'égalité doit se conduire avec l'ensemble des citoyens, des associations, des syndicats et des militants politiques. Pour ce faire, nous devons saisir les raisons d'espérer. Déjà le mouvement social de l'automne 95 avait mis en avant le slogan durable de « Tous ensemble ». Le mouvement des chômeurs de l'hiver 97-98 a révélé un début de jonction publique des luttes des « sans» dont les sans-papiers. On y a vu participer une France de toutes les couleurs, résurgence des marches plurielles organisées dans les années quatre-vingts par les enfants de l' immigration contre le racisme et pour l'égalité des droits. Ainsi nous inscrivons-nous pour une marche en avant vers une citoyenneté active pour tous car il ne peut y avoir intégration sans égalité, c'est-à-dire sans citoyenneté partagée. C'est tout le sens de la revendication et de la conquête, toujours d' actualité, du droit de vote aux élections locales et européennes, pour les résidents des pays tiers et, au-delà du droit de vote, la participation civique à la vie des quartiers, des associations, des syndicats dans l'ensemble des domaines de la vie économique et sociale. La tâche est d'autant plus difficile qu'il faut qu'ensemble nous cherchions à résoudre cette question : comment faire progresser cette citoyenneté pour tous dans une période de déréglementation généralisée des droits ? Le deuxième défi est l'action contre la lepénisation des esprits et des pratiques. La crise de la citoyenneté donne prise à ce révélateur et générateur du mal qu'est le Front national. Ce parti de la désespérance est un cancer social. Il progresse sur l'effondrement des valeurs traditionnelles d'intégration de tous. Il croît sur les vides de la citoyenneté, prospère devant les abandons et les renoncements à donner vie aux valeurs de la République. La progression du Front national vient aussi de l'absence de clivage politique visible entre les différents partis. La confusion actuelle entre la gauche et la droite en matière des droits de l'Homme et plus particulièrement en matière de politique d'immigration, son incapacité à remplir ces zones de non-droit par des actes inspirés des valeurs de la République, sont autant d'éléments qui propulsent le Front national. Quelle (s) réponse (s) devons-nous apporter ? Une chose est sûre, il faut en finir avec la tIédeur qui sévit actuellement. Le MRAP, pour ce qui le concerne, n'est pas resté inactif dans l'action contre le FN, au contraire. Il a, dans cette dernière période, redonné une place centrale à ce combat, tant par la réflexion que par la réalisation de campagnes et de matériels produits à cet effet. Après un riche débat, contradictoire, le mouvement a désormais une ligne claire sur ce sujet. L'idée selon laquelle le Front national est à la fois un révélateur du mal et qu'il est le mal, le fait que désormais la question de la légalité de ce parti, que nous avons posé en tant que première organisation antiraciste, soit reprise par des citoyens, des élus, voire même des députés toutes tendances politiques confondues, révèlent la pertinence de notre réflexion. Enfin, il faut constater que ce parti se sert de la démocratie comme d'un marchepied, qu'il confisque les libertés fondamentales telles que la liberté associative, syndicale, érige la délation en moyen de contrôle, met en acte le racisme. Ce parti qui bafoue en permanence les principes de la Constitution peutil continuer à recevoir en toute légalité un financement public? Aussi ne faut-il pas que notre Constitution mette hors d'état de nuire ce parti? A cette fin l'inscription dans notre Constitution de la lutte antiraciste en tant que telle pourrait être un objectif que notre Mouvement devrait poursuivre. Le troisième défi, cardinal pour notre mouvement, est celui de l'éducation à la citoyenneté. Nous savons que le racisme ne répond pas à une définition uniforme. C'est un phénomène global à plusieurs entrées: idéologique, politique, sociologique, historique. C'est dire que les réponses doivent embrasser l'ensemble de ces domaines. Parmi ceux -ci, l'éducation est un des moyens importants pour extirper le mal: le travail de fond et l'action sur les mentalités donnent consistance à notre oeuvre antiraciste. Car ni la culpabilisation, ni la stigmatisaton outrancière ne peuvent avoir raison du mal, au contraire. Notre travail d'éducation doit en particulier vaincre: - l'amnésie Le non-dit, le refoulement autour de la guerre d'Algérie, l' impossibilité d'assumer un lourd passé colonial, favorisent la persistance du racisme anti-algérien. C'est dire le rôle important que revêt la campagne dont le MRAP a été l'instigateur pour faire sortir les victimes du 17 octobre 1961 des oubliettes de l'Histoire. J'en profite pour dire combien nous accueillons avec une réserve extrême la tentative d'une écriture officielle de cette sombre page de notre histoire. - le refus de la mémoire La lutte contre le racisme va de pair avec le combat pour la reconnaissance. Force est de constater l'existence de « trous de mémoire », dont sont victimes les immigrés. A titre d' illustration, peu de gens savent que nombreux sont les immigrés à avoir versé leur sang pour la France et peu connaissent l'ampleur de leur contribution au développement industriel depuis cent cinquante ans au moins. Conscient de l'importance de la mobilisation sur ce terrain, le MRAP a investi en se dotant d'un secteur éducation à la ci- Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • • toyenneté à part entière, en lui attribuant des moyens financiers et humains conséquents. Les résultats et l'activité de ce secteur prouvent et attestent du bien fondé et de l'utilité de cet axe de travail. Des supports existent et notre actualité a été riche dans ce domaine. Les commémorations sont utiles, comme les procès, lorsqu'ils permettent de montrer comment certaines logiques peuvent déboucher sur l'innommable. Il en a été ainsi du procès Papon. La commémoration de l'abolition de l'esclavage a été utile même si l'on peut regretter qu' elle n' ait pas porté davantage sur les séquelles de ce crime contre l'humanité, traces visibles dans le déséquilibre Nord-Sud, séquelles qui taraudent le racisme anti-africain. Notre approche de ce travail participe à l'éducation à la citoyenneté, à la restauration pour tous de leurs droits. Le 4ème thème concerne les défis internationaux. Le racisme menace la paix des nations et des peuples. Il est la négation de l'amitié entre les peuples. Sur le fond, l'expérience nous a permis d'enrichir notre approche de« l'amitié entre les peuples» contenue dans notre sigle. Cette formule a acquis de la consistance, un sens moins général, plus actuel, davantage enraciné dans notre identité antiraciste. L'antiracisme international a souvent été lié à des problèmes comme l'apartheid, le colonialisme, dont il n'est pas question de minorer l'importance, mais qui ont été souvent perçus comme des problèmes particuliers, spécifiques. Or de plus en plus, nous voyons apparaître que l'amitié entre les peuples est l'autre versant de l'antiracisme et cela il faut le démontrer, de sorte que celui puisse aider le mouvement tout entier dans l'effort d'actualisation de son identité. Par exemple, l' action internationale fait sentir la pauvreté de l'antiracisme consensuel. Certaines campagnes internationales nous aident aussi à comprendre et à faire la lumière sur les processus d' exclusion ou certaines logiques sociales qui tendent à l' exclusion, c'est le cas de la campagne pour Mumia Abu-Jamal. Je voudrais encore évoquer quatre préoccupations majeures dans ce domaine: il s'agit de l'Europe, de la mondialisation, de l'Afrique, de la solidarité et du codéveloppement. L'Europe Une part de plus en plus importante des politiques qui détermineront la vie des peuples en Europe, ainsi que leur relation avec le monde, sera élaborée au niveau de l 'Union européenne. Cet espace fait désormais partie de notre environnement, de notre quotidien. Il influence les politiques touchant à nos préoccupations quotidiennes, que ce soit en matière d'immigration, de droit d'asile ou en matière de citoyenneté. C'est donc un défi pour les citoyens des pays de l'Union, en particulier pour le mouvement associatif, d'apprendre à penser et à agir ensemble pour la défense des valeurs fondamentales d' égalité et de solidarité dans l'Union. Par ailleurs, le développement de la xénophobie, la montée et l'activisme des parties d'extrême droite à l'échelle européenne, nous imposent d'échanger et d'agir ensemble contre cette Europe recroquevillée sur elle-même, frileuse. C'est dans cet esprit qu'un premier pas va être franchi avec la constitution prochaine du réseau européen d'organisations antiracistes, dont la préparation par les organisations françaises est coordonnée par Jean-Jacques Kirkyacharian. Mondialisation et sous-développement Fruit de la modernisation des techniques et des moyens de communication, ce qu'on appelle la mondialisation rapproche les pays et les peuples, tout en suscitant aussi des inquiétudes. En tant que telle, elle ne doit pas être tenue comme dangereuse ou négative. S'il s' agit de la mondialisation de la solidarité et des échanges, le MRAP ne peut y voir qu'un développement positif. C'est le détournement de la mondialisation par le néolibéralisme sauvage au mépris des droits individuels, des acquis sociaux et des droits des peuples, qui doit être combattu en France, en Europe et au niveau international. D'où la pertinence du soutien et de la participation du MRAP aux mobilisations contre tout ce qui porte atteinte aux droits sociaux, politiques, économiques et culturels des peuples, tels que l'AMI et le NTM. Le sous-développement persistant du Sud relève des mêmes causes que les exclusions chez nous, bien que les conséquences y soient plus dramatiques. L'envers de cette réalité, c'est la solidarité. L'idée que le Nord et le Sud ne pourront sortir de la crise qu'ensemble paraît complètement loufoque à beaucoup de gens, et pourtant l'aide au Tiers-Monde n'est pas une affaire de bons sentiments, elle est une exigence de survie de la planète. Notre mouvement a une action forte à mener en ce sens, une action de sensibilisation qui passe par une information disposant de moyens conséquents. Le problème des flux migratoires constitue un aspect de notre réflexion mais il nous appartient d'analyser aussi la situation à partir de ce que vivent massivement les populations du Tiers-Monde qui devraient avoir aussi le droit de vivre dignement sur leur propre terre, ce qui implique peut-être de nouvelles conditions politiques. L'Afrique C'est un continent proche, tant sur le plan géographique qu'historique. La France a une responsabilité particulière dans la situation actuelle de nombreux pays d'Afrique, héritée du commerce de la traite et de son passé colonial. Elle intervient directement dans la politique intérieure de certains de ces pays, y compris militairement, met sous tutelle les économies des pays (franc CFA, monopoles financiers et industriels), conditionne ses « aides» au respect des droits de l'Homme depuis la Conférence de La Baule: ce qui conduit le président de la République française et son ministre des Affaires étrangères en septembre 1997 à délivrer par exemple un certificat de bonne conduite au président de la Mauritanie. En tant que Mouvement, nous devons aider le peuple français à exercer son devoir de solidarité auprès des populations afri- Différences n° 197 j uin 1998 - spécial congrès du MRAP caines concernées, tant sur le territoire français que dans les pays d'origine. Il ne doit pas être complice des décisions prises en son nom comme au Rwanda, en Somalie, au CongoBrazzaville, Congo-Kinshasa, au Togo, en Centre Afrique, au Soudan, aux Comores, à Djibouti, en Mauritanie. n ne doit pas accepter que se multiplient les exactions racistes qui sous couvert de « conflits ethniques» se multiplient. Cette explication simpliste sert à berner les opinions publiques et à déplacer certaines responsabilités dont les origines et les explications sont plus complexes. S ol id a rité et codéve loppeme nt Disons-le franchement, nous sommes attachés à la notion de codéveloppement, elle est incontestablement une réponse et une solution pour l'avenir, pour l'Afrique, ses populations mais aussi pour les économies occidentales en crise. Le développement de l'Afrique, avec ses richesses humaines et naturelles, contribuera à sortir de la crise. Par ailleurs, cette idée tranche avec les approches du développement qui ressemblaient à des actes de charité envers ce continent. Nul doute aussi que cette approche rend plus positifle regard que l'on peut porter sur les immigrés présents chez nous. Le MRAP ne peut que refuser sans appelle détournement de la politique de codéveloppement par l'aide au retour accordée à quelques milliers de sans-papiers. Il constate, en outre, l'inadéquation des conditions d'aide au retour telles que définies par la circulaire du 19 janvier 1998. La récente désignation de Sami Naïr, en tant que délégué interministériel au co développement et aux migrations internationales, peut témoigner de la volonté du gouvernement de convenir avec les pays d' origine d'une meilleure maîtrise des flux migratoires. Le MRAP considère que la participation des immigrés présents en France au partenariat pour le développement de leur pays ou région d'origine est en soi un objectif prioritaire. Cet objectif est inséparable pour le moins de l'annulation de la dette par les pays développés. Le MRAP devra continuer à être présent dans le débat sur les politiques du codéveloppement, sans se laisser instrumentaliser par une politique gouvernementale de maintien ou de renforcement de la fermeture des frontières. Pour relever ces défis, je voudrais attirer votre attention sur deux points: la mutation inachevée de notre antiracisme et le dilemme dans le fonctionnement de nos instances. L'an t iracism e de proxi mité Depuis le dernier congrès, nous avons mis cet objectif au coeur de l'identité même de notre antiracisme. Cette pratique, qui donne un visage humain, permet de passer de l'universel au singulier, de la théorie à la pratique, suppose d'aller à la rencontre des gens. Cet antiracisme, s'il a été poursuivi de manière inégale, n'en reste pas moins, d'une manière générale, encore à construire. Cette forme d'antiracisme permet d'aller au-devant des gens « contaminés» qui se trompent parce qu'on les a trompés, de tenter de comprendre leurs angoisses, leurs souffrances et les amener à sortir d'une vison ethnicisante. Le fonctionnement de nos instances Il faut regarder avec une attention particulière notre fonctionnement. Toutes les mutations que nous devons opérer dans la formulation de nos objectifs, dans la dimension des problèmes posés, nous invitent à disposer d'un type de fonctionnement qui associe l' ensemble des adhérents à l'échange et à la recherche. Or, il se révèle de plus en plus, que notre Mouvement ne dispose pas d' instrument efficace à cet effet. Des notes qui vous ont été adressées, il ressort que du fait de l'histoire, le conseil national n'est plus ou ne peut plus être représentatif de nombreux comités isolés et privés de lien avec d'autres. De nombreuses absences, parfois près de la moitié, en affaiblissent par ailleurs la représentativité. Nous devons constater qu'à ce sujet, nous n' avons reçu aucune suggestion dans le débat mais plutôt l'expression de la crainte de voir le conseil national ne soit atteint dans son rôle politique. En responsables du mouvement que nous sommes tous ici, nous ne devons pas nous enfermer dans des blocages mais tenir les deux bouts de la chaîne. Il est tout aussi nécessaire que le MRAP dispose d'une instance politique entre la tenue de deux congrès, mais aussi que l'ensemble du mouvement soit irrigué par une vie interne qui fera son unité et sa cohérence dans sa marche en avant. On ne peut sacrifier ni l' un, ni l'autre. Le fait qu ' aucune proposition n'ait été préparée pour ce congrès devrait permettre des échanges dépassionnés et ouverts; peutêtre le Conseil national qui sortira de ce congrès aura-t-il à s'emparer de ce qui est aujourd'hui un dilemme. Par ailleurs, la lutte contre le racisme est utile, chacun d'entre vous en convient, mais cette utilité, au-delà de cette enceinte, n'est pas toujours reconnue. N'avez-vous pas été en prise avec cette réflexion, fréquente, selon laquelle si on invite le MRAP dans un débat, il faut inviter les gens qui ne pensent pas comme lui. C'est ce qui nous empêche parfois d'intervenir dans des établissements scolaires, certaines institutions officielles, le prétexte étant le respect de la démocratie et du pluralisme, comme si nous pouvions accepter que soit mis un signe d'égalité entre le racisme, ce délit qui abîme les hommes, et l'antiracisme qui est une valeur qui protège. Aussi nous vous soumettrons, en fin de congrès, une proposition de modification des statuts, pour que notre mouvement et plus particulièrement notre cause, soit reconnue d'utilité publique. Cette utilité représenterait un acte politique majeur. E n conclus ion J'ai parlé de mutation lors la dernière Conférence nationale. Tout au long du propos, un peu long excusez-moi, j ' ai essayé de vous faire partager, au-delà des angoisses, des inquiétudes, des défis à relever, la nécessité de nous transformer continuellement tout en restant fidèles à nous-mêmes. Cela ne peut être le résultat d'une démarche autoritaire, elle ne peut être que le fruit de la convergence des convictions de chacun d'entre vous, c'est cela qui doit engendrer ce changement. La transforma- (fT" Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP ~ tion du MRAP ira de pair aussi avec la prise de conscience des gens avec lesquels nous travaillons. Je suis sûr que chacun de vous répondra à cette responsabilité que nous portons. Réponse aussi à l'attente d'un nombre croissant de nos concitoyens qui souhaitent que l'antiracisme sorte du discours humanitaire et de ses impuissances, ce avec quoi nous sommes d'accord. C'est le prix à payer pour bâtir ensem ble une réelle mobilisation, pour que la compréhension, le droit de tous les hommes et des peuples, aient raison des haines, que l' individu ne soit plus considéré comme un objet de rejet mais un sujet précieux de droit et de respect. La liberté, la justice ne se divisent pas: il n'y a pas de liberté sans égalité, parce que la République ne peut exister sans le respect des droits de tous et par la fraternité. En cela nous défendons aussi la démocratie . • LES MEMBRES DU CONSEIL NATIONAL ÉLU PAR LE CONGRÈS le dimanche 10 mai 1998 Elus au titre des fédérations Alpes-Maritimes : Alexandrine Vocaturo (T) - Inge Verhagen (T). Ardèche: Nadia Kurys (T) - Sandrine Taine (S). Bouchesdu- Rhône: Horya Mékrélouf (T) - Baya Jurquet (S) - Alain Huertas (T) - Guy Peys (S) - Philippe Youchenko (T) - Christiane Azam (S). Dordogne: Jean-Michel Duretête (T) - Nathalie Schlemer (S). Doubs: Jacques Epailly (T) - André Vagneron (S). Essonne: Alain Callès (T) - Anne-Marie Decraemer (S) - Etienne Lenormand (T). Eure-et-Loire : Jeanine Orssaud (T) - Jacqueline Marre (S). Garonne: Denis Seel (T) - Pierre Miani (S). Hauts-de-Seine: Jean Yves Treiber (T) - Alain Petit (S) - Patrick Schweizer (T) - Sonia Fievet (S). Hérault : Pierre Gourdou (T). Isère: Dominique Perroud-Maillet (T) - Gérard Ponson (S) - Yves Genêt (T) - Chantal Brème (S) - François Savigneux (T) - Mabrouk Medjed (S). Landes: Gérard Kerforn (T) -Amina Amalfi (S). Loire-Atlantique : Gérard Guéniffey (T) - Cécile Fillaud (S) - Françoise Thoumas (T) - Stéphane Fouéré (S). Loiret: Noël Hily (T) - Nathalie Retel (S). Moselle : Vincent Mazzone (T) - Jean-Bernard Wojciechowski (S) - Gianpiero Moro (T) - Anne-Marie Martin (S). Nord : Jean-Claude Dulieu (T) - Louisette Faréniaux (S) - Monique Debrabander (T) - Benoît Savouré (S). Oise: Yvon Dahan (T) - Liliane Laurent (S). Paris: François Sirot (T) - Emmanuel Lechevalier (S) - Jean-Claude Vessillier (T) - Christine Ballesteros (S) - Isabelle Sirot (T) - Pierre Guillibert (S) - Marie Montolieu (T) - Lynne MacFadyen (S) - Ingrid Berthet (T) - Raymonde Bedu (S) - Jean-Marie Janod (T) - Malte Martin (S) - Yasmina Kaci (T) - Sandra Aidara (S). Puy-de-Dôme: Jean Berthier (T) - André Lavignon (S). Pyrénées-Atlantiques: Jean-Claude 1 Pomarède (T) - Brigitte Paloque (S). Bas-Rhin: Nadine Soccio (T) - Didier Deloux (S). Rhône: Gilles Lewkowicz (T) - Abdesslam Ikrimah (S) - Damien Dufaitre (T) - Barbara Courlet (S). Haute-Savoie: Simone Novat (T) - Michel Menassé (S). Seine-et-Marne : Geneviève Monti (T) - Véronique Achallé (S). Seine-Maritime: Matthieu Charlionnet (T) - Philippe Saint Germain (S). Seine-Saint-Denis: Sylvain Goldstein (T) - Arnaud Schneider (S) - Pascale Luneau (T) - Bruno Niederkorn (S) - Marie-Annick Butez (T) - Hervé Pariente (S) - Marie-Christine Lucas (T) - Alain Flauw (S). Tarn: Pierre Lapierre (T) - Michel de Chanterac (S) - Stéphanie Corso (T) - Monique Fauré (S). Val-de-Marne : Elie Chaia (T) - Claude Garnier (S) i - Didier Poupardin (T) - Paulette Maury (S) - Marc Tzwangue (T) - Marie-Louise Castier (S). Val d'Oise: Khaled Benaissa (T) - Jean-Pie rre Reyal (S). Vaucluse: Claire Senet (T) - Alain Lamouroux (S) - Illei Feuerwerker (T). Vienne: Bernadette Guérid (T) - Romane Dominguez (S). Haute Vienne : Jacques Chevassus (T) - Geneviève Krausz (T). Yvelines: Kader Ghadi (T) - Arlette Derivry (S) - Alain Vriens (T) Elus au titre des commissions nationales Antisémitisme : Catherine Grupper (T) - Jeannie Dumesnil (S) - Christiane Guenneteau (T). Développement: Paul Muzard (T) - Renée Le Mignot (T). Afrique-Dom Tom : Marie-Catherine Andréani (T) - Delphine Deporte (S) - Nathalie Alliaume Séri (T) - Habsa Sail (S). Education: Liliane Lainé (T). Extrême droite: Pierre Krausz (T) - Alice Marteaux (S) - Catherine Cornette (T). Europe: Cathie Lloyd (T). Gestion: Palmyre Burgaleta (T) - Alain Ribat (T) . Immigration - 1 : François Prunet (T) - Georges Léopold (S) - Thamar Bourand (T) - Thierry Pinsard (S). Immigration - 2 : Bernadette Hétier (T) - Jacques Mignot (S) - Jean-Marc Bourquin (T) - Pascale Waiman (S). Jeunes: Céline Butez (T) - Juliette Duretête (S) - Samy Loumi (T) - Diane Foreau (S). Juridique: Pierre Mairat (T) - Stéphane Meyer (S) - Laure Perrin (T) - Ahcène Taleb (S). Méditerranée : Eliane Benarrosh (T) - Ahmed Khenniche (T) - Jusfiq Hadjar (S). Tsiganes: René Neveu (T) - Roland Gruart (T) - Jean-François Geissmann (S) Elus au titre du Conseil national sortant (10 % au plus des membres du CN) Mouloud Aounit (T). Charles Palant (T). Dominique Brendel (T). Jean-Jacques Kirkyacharian (T). Bertrand Bary (T) Membres d'honneur Albert Lévy (T), Charles Owezarek (T) Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP 1 1 J Thème 1 LE RACISME DANS LA CRISE Texte d'introduction Présenté par Paul Muzard Racisme dans la crise ou racisme de la crise? Le racisme est un phénomène inhérent à la crise. Non pas que le racisme n'ait pas existé auparavant, animé par le mépris et l'infériorisation. La crise est un phénomène financier qui rejaillit sur l'économie. Elle installe une suprématie de l'argent qui cherche les plus grands profits ; c'est pourquoi les capitaux sont placés selon les règles de la spéculation et non dans l'intérêt de 1 'Homme et d'un développement économique de croissance qui nécessite des investissements. Les capitaux vont là où ils rapportent le plus. Cette crise évolue selon un processus constant. Les projets de création de l'AMI, puis de NTM constituent un sommet (provisoire) en matière de liberté pour les matèhés financiers qui auraient un statut supérieur à celui des Etats. Les répercussions sur l'emploi sont considérables, et en aggravation constante: chômage, précarité de l'emploi (CDD, intérim, temps partiel, stages pour remplacer des emplois) ; la précarité de l'emploi débouche sur d'autres précarités ou exclusions en matière de logement, de santé, de formation, etc ... Ces conséquences objectives de la crise économico-financière entraînent des comportements d'exclusion; la nature de la crise n'étant pas expliquée (on n'a encore jamais vu un gouvernement dénoncer les marchés financiers pour enrichissement et crime d'appauvrissement des peuples ou des gens), les fantasmes les plus irrationnels en viennent à avoir le statut de normes. 1. Ainsi le racisme change-t-il de nature pour devenir un racisme de différenciation et non plus simplement (si l'on peut ClT' p. 20 Texte de synthèse (1) Rapporteur: Jean-Claude Dulieu Depuis le dernier congrès, notre Mouvement a mené sans relâche le combat antiraciste en privilégiant la lutte réactive contre les multiples expressions du racisme. Aujourd'hui, nous constatons une maturation de notre réflexion. En effet, face à l'ampleur de l'évolution de ce fléau, il est indispensable d'approfondir notre analyse sur les causes multiples de cette évolution. L'ensemble du Mouvement s'oriente vers l' analyse de la crise et le délitement multiforme du lien social. Les causes socio-économiques sont certes déterminantes mais apparaissent aussi des causes induites ou concomitantes: une crise culturelle, philosophique, idéologique, politique, psychosociologique. Afin d' élaborer une stratégie offensive, notre Mouvement doit renforcer son analyse de l'évolution du racisme. La forme du débat que nous avons adoptée hier, nous a permis de dessiner une tendance dans la réflexion. En effet, il apparaît majoritairement que les participants pensent que les effets multiples de la crise nous imposent un élargissement de notre champ d' intervention politique. Ceci est d'autant plus important que le Front national intervient dans le domaine idéologique en livrant par une fausse cohérence une analyse et un projet politique clé en main avec, comme ossature, les exclusions qu'elles soient d'ordre ethnique, culturel ou social. Il paraît de plus en plus évident pour chacun d'entre nous que le MRAP n'a pas le pouvoir d'infléchir seul le racisme par une ClT' p. 21 (l) Les trois thèmes du congrès ont été débattus par l'ensemble des congressistes répartis en quatre groupes de travail. Les textes de synthèse rendent compte de l'ensemble des discussions des quatre groupes. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • (Intro 1 suite de la page 19) dire !) de mépris. « Ces gens-là sont de trop », dit-on dans un premier temps, puis « ces gens ne sont pas comme nous, il faut les renvoyer, notre identité est en péril ». Ainsi« la préférence nationale» devient-elle une opinion de plus en plus partagée, une idéologie majoritaire, pour se traduire par des comportements « naturels» et délictueux à la fois. Il faut dire que le signal de la préférence nationale a été donné dès 1974 par la décision d' arrêt de l'immigration, et deux ans plus tard par l'encouragement au retour avec prime à l' appui. Elle s'exprime aujourd'hui par un racisme ordinaire, quotidien, et par des discriminations relativement généralisées, au travail par exemple, comme le sociologue Philippe Bataille l'a révélé dans son ouvrage « Le racisme au travail ». La préférence nationale n'est pas l'invention de l'extrême droite; elle a sévi au cours de toutes les crises de ce type, notamment à la fin du siècle dernier et au cours des années trente. Elle est une pente naturelle. Elle a comme synonyme le « bouc émissaire ». 2. Par les précarités qu'elle génère, la crise provoque une très grande fragilisation des gens: peur de perdre un emploi, peur de s'opposer à une discrimination de type raciste ou autre, de mener une action de lutte, par crainte de se faire repérer et d'aggraver une situation déjà précaire; peur de subir des représailles relatives à la situation administrative; peur de témoigner; toutes ces peurs renforcent l'exploitation et renforcent aussi un sentiment très fort d' insécurité d'où perte de repères, éclatement des valeurs, modification des mentalités. Or ce thème de l'insécurité est plus habituellement utilisé en faveur des gens qui ont à protéger leur avoir, et aussi pour des désagréments réels. Le sentiment d'insécurité se traduit aussi par des doutes identitaires. Les mentalités sont très marquées par un sentiment de perte d'identité. Un regroupement, même très modeste, d'immigrés sur une place, dérange et donne lieu à des réflexions du type: « on n' est plus en France» ou <~e me suis demandé si j'étais en France». Ce sentiment est renforcé par le processus de construction de l'Europe, l'euro et l'abandon du franc, les abandons de souveraineté nationale, etc ... Part de fantasmes? Part d'insécurité? Part de rejet? 3. La mémoire semble être d'une efficacité relative pour freiner ces dérives. Malgré les témoignages d'un certain nombre de survivants victimes du fascisme, malgré les « traces» qui demeurent, la mémoire est frappée d'amnésie. On recommence avec les mêmes peurs, les mêmes « arguments» irrationnels, les mêmes capitulations devant les séductions trompeuses. 4. L'extrême droite fait partie de ces séductions. L'extrême droite est un symptôme (cf. Perrine au) et un produit de crise. Elle s'est développée déjà au cours des années trente. Son influence, depuis 1977, et avec plus d'évidence depuis 1983, se développe suivant un processus, comme ceux de tous les enchaînements de la crise. Elle aggrave le racisme en ce qu'elle structure politiquement le racisme irrationnel et spontané. Au fil des ans, le FN propose une pseudo-analyse de la crise (l'immigré responsable de tous les maux) ainsi que des solutions ultra-libérales populistes. Il s'enracine et entraîne une fidélisation de ses électeurs. Les sondages de la SOFRES, publiés le 28 avril dernier, révèlent des aspects inquiétants de ce processus. Les succès de l'extrême droite en Allemagne, en Autriche avec 22 % des voix et 41 députés, en Norvège comme deuxième force politique, en Italie, etc, lui donnent une légitimité internationale. Les pratiques des municipalités gérées par le FN concrétisent son idéologie dont le succès sur le terrain ne se dément pas, malgré des actes délinquants. Parmi les partis politiques, c'est le FN qui, seul, a la « dynamique» électorale à son avantage et qui arbitre le jeu politique: bien que le succès de Toulon puisse être de nature à tempérer cette assertion. 5. La crise et ses effets, dont le racisme, posent un problème politique fondamental. Le chômage a progressé parce que, contrairement à leurs affirmations et promesses, les pouvoirs publics n'ont pas agi sur le chômage. Face aux déséquilibres budgétaires, ils ont agi par la rigueur sur les dépenses en limitant les droits, à la santé par exemple, en ponctionnant les salariés, et même les chômeurs, et en augmentant les prélèvements sociaux. Mais les profits financiers n'ont guère été touchés par ces mesures. On laisse d'ailleurs entendre actuellement que les premiers fruits d'une croissance annoncée iront aux comblement des déficits, avant d'aller à des initiatives économiques et sociales. En se rejetant mutuellement les responsabilités, la droite et la gauche ont semé la confusion. On a le sentiment que l'enjeu est davantage de se battre contre la gauche ou réciproquement . contre la droite, et donc pour le pouvoir en soi, plutôt que de se battre pour des valeurs. Les campagnes électorales et les discours politiques en général sont plus empreints de démagogie que de pédagogie. Que peut comprendre un citoyen sur l'euro, sur le pacte de stabilité et même sur le rôle d'un conseil régional? Les discours politiques sont loin des gens, loin de leurs préoccupations. Les gens sont exclus des débats. Comment s'étonner que beaucoup se jettent dans les bras d'un démagogue dont le discours correspond à leurs attentes, se laissant ainsi berner par des potions mortelles? La confusion est aggravée quand des justifications de décisions de gauche sont argumentées à partir des soi disant appréciations de l'extrême droite. « Vous voulez donc faire progresser le Front national?» par exemple en demandant la régularisation de tous les sans-papiers? Réflexion qui est un aveu d'impuissance à justifier des décisions politiques en s' appuyant sur des valeurs humaines, qui révèle aussi que la préoccupation de se faire comprendre et de faire progresser la cons~ience citoyenne n'est pas présente. Les arguments relatifs à un budget bloqué pour ne pas satisfaire les revendications des chômeurs par exemple, sans proposer d'alternative programmée et crédible, n'enracinent-ils pas le doute? ri Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP 6. Tous ces constats ou observations nous amènent à réfléchir sur la nécessité de nous doter d'un mouvement antiraciste adapté ; face au racisme ordinaire, quel projet de développement? Sur fond de crise telle que décrite et vécue, quel antiracisme mettre en oeuvre? Action réactive? Action au coup par coup? Comment réagir par exemple au slogan intériorisé et normatif de la préférence nationale? Quel travail de proximité? Quels obstacles? Le racisme est le résultat de l'un des enchaînements de la crise, il est l'une des exclusions, même si c'est la plus radicale. II est comme intégré au laminage des droits, à l'aggravation des inégalités. Quelles conséquences sur nos objectifs? Quelle stratégie? Quel partenariat dans le combat contre l'exclusion (logement, école, travail, santé) sur la base de nos spécificités contre les discriminations et ségrégations sociales? L'insécurité des gens est d'autant plus forte, que la « politique », les politiques sont discrédités. Si l'on peut dire que les associations en général répondent à l'urgence, selon des préoccupations thématiques, peut-il y avoir convergence oujonction avec les partis politiques qui prendraient le relais pour un projet politique global ? Comment s'y prendre avec les politiques? Nous disons que les politiques ferment le débat, et invoquent parfois le péril du FN, pour refuser des droits. Comment pour notre part, faire prendre en compte positivement nos valeurs de référence? Comment les rendre accessibles ou compréhensibles pour les gens? Quels niveaux d'interventions pour être des aiguillons des forces politiques? Pour qu'elles trouvent des solutions concrètes au phénomène de l'exclusion ? Pour qu'elles élaborent un projet mobilisateur incluant les valeurs qui sont les nôtres? Comment démonter la fausse analyse de la crise, telle que formulée par le FN ? Quelles conséquences ces approches peuvent-elles avoir sur le développement, sur les comités locaux, au plan national et au plan local? Quel projet de développement? Quelles conséquences sur l'implantation des CL suivant les spécificités locales? Quel accueil des nouveaux adhérents ? Quelle adaptation de nos instances? Quelles formations envisager? Quel contenu? Le MRAP peut-il lutter contre les causes de la crise? • Synthèse thème 1 (suite de la page 19) action réactive ou le simple rappel des valeurs, nos militants font majoritairement l'analyse que le MRAP doit élargir son champ politique. Il doit donc devenir un aiguillon de la pensée politique et une force de propositions. Ceci implique qu'il doit rappeler aux décideurs notamment aux élus qu'ils ont des responsabilités particulières pour résoudre les effets multiples de la crise de la société. Dans le cadre de cette activité, le MRAP réaffirme sa spécificité et son indépendance à l'égard des partis politiques et gouvernements. C'est là sa force d'aiguillon. Pour l'efficacité de son combat, le MRAP doit articuler son antiracisme de proximité autour du partenariat avec les autres organisations: syndicats, partis, associations. Pour préciser cette intervention le Mouvement doit renforcer son investissement dans le champ social avec les « sans droits », contre la précarité, pour l'école. Le mouvement de novembre et décembre 95, la lutte des chômeurs, ou celle des enseignants de Seine-Saint-Denis ne permettent- ils pas de reconstituer le tissu social, de faire reculer les discriminations et ainsi de combattre efficacement le FN. Le partenariat permet la création d'un rapport de force face aux institutions favorisant l'obtention de l'égalité des droits, de la citoyenneté ( comme le droit de vote des étrangers). Cette défense des droits passe aussi par un rôle d'interpellation et de harcèlement du gouvernement. Ainsi se pose la question de la désobéissance civile à des lois scélérates qui ne respec· tent pas le principe d'égalité fixé par la Constitution. Quant au thème de la « préférence », le congrès propose au mouvement de travailler cette question et de lancer une contre offensive idéologique. Le Congrès invite le Mouvement à poursuivre la réflexion sur les particularités de l'extrême droite en France, le rôle de la presse française qui banalise le FN contrairement à la presse étrangère, les stratégies de la division des droites, rupture avec la mémoire. Pour répondre efficacement à ces différents niveaux de lutte contre le racisme, quelle doit être l'organisation de notre mouvement ? Il faut bien sûr poursuivre les efforts pour le développement du mouvement, pour la formation interne des adhérents. Réfléchir également aux rôles de nos différentes instances notamment aux Fédérations qui comme le National doivent être un lieu d'impulsion et d'aide aux comités locaux afin d'améliorer l'antiracisme de proximité. Se pose également la question de la communication et de la presse. Le Mouvement a besoin d'une presse interne mais doit également développer une communication externe. Ce qui nous amènera à reconcevoir le rôle de laLettre du secrétariat et de Différences, ainsi que notre effort constant de communication permettant d'identifier immédiatement le Mouvement non seulement au niveau du sigle au plan national comme au plan local, mais aussi favorisant la visibilité du MRAP et faciliter la prise de contact avec nos structures locales. Nécessité de développer nos efforts en direction de la jeunesse, particulièrement de la deuxième génération .• Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP Il Thème 2 ANTIRACISME: prévention, éducation, citolenneté. lune contre l'extrême droite Texte d'introduction Présenté par Liliane Lainé Dans quelques semaines, nous allons célébrer le 50ème anniversaire de notre Mouvement, créé pour que disparaissent àjamais le racisme et l'antisémitisme, causes de tant de crimes et de souffrances. Depuis cette époque, bien que l'action menée par notre Mouvement ne se soit pas ralentie, le racisme non seulement n'a pas disparu mais - sous des formes qui se sont certes modifiées - il atteint aujourd'hui des sommets inquiétants: 63 % des personnes interrogées dans le cadre d'un sondage récent se déclarent racistes; le FN s'est installé dans la politique municipale et régionale, ses idées continuent à se propager. Ce constat nous oblige à nous interroger sur les formes et les moyens de notre lutte, c'est-à-dire sur l'antiracisme opposé à la montée du racisme, non seulement pour en combattre les manifestations mais pour en prévenir l'apparition. Tel est le sens du 2éme thème soumis à notre réflexion. Antiracisme et antiracisme de proximité Pour commencer, il conviendra de préciser certaines définitions. Le racisme a évolué, s'est ancré dans la crise, atteint toutes les sphères de la société, s'étend au-delà de nos frontières, l'antiracisme doit tenir compte de ces évolutions. Parce que nous savons que le racisme se développe sur le terreau de la misère, nous avions, lors du dernier congrès, défini le concept d' « antiracisme de proximité ». ri Texte de synthèse Rapporteur: Alain Callès Les groupes de travail demandent que l'actuel groupe « lutte contre l'extrême droite » se transforme en une commission permanence statutaire du Mouvement. La citoyenneté est le pôle central de la lutte contre les exclusions, les discriminations et les idées du FN. La mise en avant de la pratique citoyenne est une manière d'engager positivement notre lutte et de ne pas nous cantonner au réactif. La citoyenneté n' est pas un poncif, un concept vide de sens mais correspond à un vécu de terrain ce qui illustre le rôle essentiel de la démarche d'un antiracisme de proximité. La citoyenneté se réalise concrètement par l'intégration sur tous les plans: logement, travail, culturel et politique. Notamment dans le cadre politique, les congressistes ont exprimé la nécessité de reprendre la campagne du droit de vote pour tous, à tous les niveaux, à tous les échelons électeurs et éligibles (aux élections politiques, prud' homales, etc.). Ce qui permettra de pousser le « politique » à se positionner et aussi de faire participer les gens à la vie locale donc de les réinsérer dans le tissu social. La campagne sur les élections européennes peut être utilisée comme un support pour cette campagne. Il faut rappeler la distinction entre la citoyenneté par laquelle on agit sur son environnement et la nationalité qui est un état statique donné à la naissance. La nationalité est un outil pour faciliter l'intégration. Les congressistes demandent que la nationalité soit attribuée à la naissance dans le respect du droit du sol. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP Cette définition nous semblait convenir à la nécessité d'une « pratique de terrain» permettant une écoute plus proche des gens, qu' ils soient victimes de l'exclusion ou tentés par des fausses solutions débouchant sur davantage d'exclusion. Ces perspectives impliquaient un engagement militant important dans les quartiers et sur tous les terrains de la lutte contre l' exclusion. Notre mouvement est-il en mesure de faire face à ces exigences? Ne faut-il pas nous adapter à la réalité de nos possibilités et développer l'action commune avec les partis politiques, le mouvement syndical et d'autres associations? Education Dans l'action de prévention du racisme, l'éducation occupe, bien sûr un rôle primordial. L'éducation est un moyen de lutte contre les préjugés et les amalgames. Beaucoup d' idées préconçues constituent la base du racisme et contribuent à le banaliser. Pour certains, l'assimilation: « Immigrés = chômage = échec scolaire = délinquance = insécurité» semble une évidence. Ces amalgames sont bien sûr encouragés par l'extrême droite mais trouvent aussi.une crédibilité dans les mesures prises par les gouvernements de droite - et parfois de gauche - à l'encontre de l'immigration. Pour démonter ces mensonges et ces idées préconçues, un travail approfondi et pédagogique est nécessaire. Il s'adresse à tous, adultes, enfants, adolescents mais il est évident qu'un effort particulier doit se faire en direction de lajeunesse. Le rôle de l'école. Si l'école n'a pas l'exclusivité de l'action éducative (qu'elle partage avec les MJC, bibliothèques, associations de quartier, foyers, etc ... ), son rôle est néanmoins primordial. - C'est à l'école que se font les principaux apprentissages et l'on sait que l'ignorance est souvent source de préjugés. A l'école, on apprend à connaître les autres et leurs différences, L'exercice de cette citoyenneté permet de lutter contre les replis communautaires, d'espaces, les replis religieux (tous les intégrismes ... ) ou les tensions communautaristes qui se manifestent parfois dans les établissements scolaires (notamment des LEP). La pratique permet de retisser le tissu social et d' exercer des solidarités avec tous. Elle implique une démarche de partenariat quels que soient les partenaires (syndicaux, religieux, associatifs, campagnes oecuméniques « accueillir l'étranger », etc). Cette démarche repose essentiellement sur la revendication de l'égalité des droits et des devoirs. L'exigence de l'égalité des droits pour tous est un acte revendicatif! Elle est en opposition avec une démarche de discrimination positive ou de quotas bien qu'il faille rester à l'écoute de certaines demandes et de ce qui la motivent comme celles des Harkis. Dans le cadre de l'exercice de la citoyenneté, il a été demandé par un groupe de mettre fin à l'obligation d'être ressortissant euroà connaître les rouages de la société et des lois qui en régissent le fonctionnement (droits et devoirs). C'est à l'école que l'on apprend l'histoire. N'y a-t-il pas des carences au niveau de ces apprentissages (programmes, matières enseignées, méthodes, etc.) ? - L'école publique assure depuis longtemps une mission d'intégration pour que tous les enfants, quelle que soit leur origine ethnique, sociale, culturelle, philosophique, y trouvent également leur place. Qu'en est-il aujourd'hui ? Comment pouvons-nous compléter le travail de l'école? Les textes « ministérie s » donnent des ouvertures, comment les mettre en pratique ? Comment utiliser au maximum la Semaine d' éducation? Enfin, c'est à l'école que se forment les mécanismes de la pensée critique qui doit contribuer à la formation du citoyen. Se référer au texte sur le travail du MRAP en milieu éducatif proposé lors de la journée de formation interne. Citoyenneté Une question peut se poser: « Faut-il considérer l'éducation contre le racisme» comme un élément spécifique de notre combat ou comme partie du domaine plus large « d'éducation à la citoyenneté» ? Il est illusoire de prétendre trouver spontanément des antiracistes dans une société où la citoyenneté est bafouée, où « l'égalité des droits » figurant dans la Déclaration des Droits de l'Homme (<< Les hommes naissent libres et égaux en droits ») n'est pas reconnue dans les faits. Concernant la citoyenneté, beaucoup de questions vont se poser à nous: le citoyen, engagé dans la vie de la cité, est celui qui participe pleinement au fonctionnement de la société. N'y a-t-il pas une contradiction entre les inégalités qui sont à la base de notre société et la notion même de citoyenneté? Que dire des réticences observées dans les établissements scolaires pour la participation des délégués des élèves à la vie de l'école? W" péen pour être fonctionnaire y compris pour les stages. Le moyen efficace, et de fond, de lutter contre le Front National, est d'avancer fermement et sans équivoque sur nos valeurs, les principes fondamentaux que nous posons, et leurs mises en application concrète. Tout ce que l'on vient de décrire s'oppose au discours du FN qui a une démarche de division et de fragmentarisation des citoyens entre eux par la création de groupes sociaux, économiques, culturels et au final ethniques et par une volonté de hiérarchisation des groupes entre eux. La demande de dissolution du FN est un des moyens, parmi d'autres, d'éclairer de manière pédagogique sur la nature réelle du FN et d'essayer d'entraver les mécanismes d'alliances avec la structure existante actuelle. Cette approche doit se faire dans le cadre d'une campagne de sensibilisation avec d'autres partenaires faisant la démonstration que « le Front national n'est pas un parti comme les autres ». C'est un parti fasciste. W" p. 25 Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP Il (Intro thème 2 suite de la page 23) Citoyenneté et nationalité. La condition première de l'exercice de la citoyenneté est le droit de vote. Comment peut-on parler de citoyenneté lorsque toute une partie de la population est exclue de ce droit (les étrangers) ou s'exclut elle-même parce qu'elle ne se sent pas concernée par la vie politique? Citoyenneté, différence et identité. Comment les minorités sont-elles reconnues (notamment les Tsiganes et Gens du voyage) ? Comment concilier l'insertion (différente de l' assimilation) et le droit à la différence? Comment préserver son identité? Citoyenneté, laïcité et intégrisme. Toutes ces questions sont primordiales si l'on veut analyser les causes du racisme et proposer des solutions. La population française est caractérisée par sa diversité (résultant de son histoire). Cette diversité est souvent présentée comme une cause de problèmes, alors qu'elle est au contraire une source de richesse. En ne reconnaissant pas cet aspect, on appauvrit notre pays. Le MRAP ne doit-il pas lancer une campagne pour que le caractère multiculturel de la société française soit reconnu? Cela passe peut-être par une politique nouvelle imposant un nombre représentatif d'immigrés ou de Français, issus de l'immigration, dans tous les secteurs de la société notamment dans les médias? Le Front national On ne peut aborder les problèmes de citoyenneté sans parler du FN dont les idées sont la négation des principes élémentaires de la démocratie qui doivent permettre l'exercice de la citoyenneté (inégalité des races, préférence nationale, né gationnisme, etc). La mise en place d'une campagne contre le Front national et la recherche des moyens de lutte dépassent le cadre de ce groupe de travail. Néanmoins, parce que le FN se développe sur le terreau de la misère, diffuse des idées fausses, embrigade lajeunesse, porte atteinte à la démocratie et à la citoyenneté, la lutte contre ce parti s'inscrit dans tout ce qui précède: prévenir la misère, lutter contre les stéréotypes, travailler sur la mémoire pour la maintenir vivante et former à la citoyenneté sont des moyens de lutte importants contre l'extrême droite. La législation actuelle permet-elle de désigner le FN pour ce qu'il est, un parti dont les idées sont racistes et xénopho bes, dont les dirigeants se mettent hors la loi et dont les méthodes sont fascisantes? • Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP Synthèse thème 2 (suite de la page 23) Notre démarche s'inscrit en complément des explications fournies, sur le terrain, sur le caractère antirépublicain (reconnu par le président de la République) et anticonstitutionnel du FN. Quelques congressistes ont regretté qu'il n'y ait pas eu un débat plus approfondi dans les comités locaux sur ce sujet, ils considèrent que cette démarche favorise la « victimisation » du Front national. Le MRAP dénonce les délégations qui sont données à des élus Front national pour siéger dans des consei Is d'établissements scolaires. Le MRAP doit proposer à tous ceux qui sont impliqués dans ces CA (syndicats, parents d'élèves, élus, élèves) d'élaborer une position commune visant à rendre impossible la présence de représentants d'un parti dont toutes les positions s'opposent aux principes qui fondent l'école de la République. A propos de la loi contre racisme, il est demandé à ce qu'elle soit mieux appliquée et qu'elle sorte du cadre de la loi sur les délits de la presse pour être rendue plus facilement applicable. Le MRAP, dans le Comité de vigilance contre l'extrême droite, doit jouer un rôle moteur dans les initiatives prises par cette structure unitaire indispensable. Pour cela, il doit chercher, avec tous ceux qui le souhaitent, à élaborer une stratégie de lutte contre le FN. Le MRAP se trouve souvent en position motrice dans les comités de vigilance - au niveau national- il faut qu'il prenne des positions claires sur des stratégies de lutte à impulser prioritairement au sein de ces comités. Il est également nécessaire de poser le problème de la responsabilité des médias dans la promotion et la banalisation du Front national. Le Front national, développant son offensive sur le champ culturel, il est nécessaire que dans le cadre de partenariat le MRAP définisse des actions culturelles réhabilitant la vie citoyenne (concerts, théâtres, Centre du théâtre de l' opprimé en prolongation de ce qui a déjà été fait dans le cadre du week-end de formation contre l'extrême-droite à la fin 97). Dans notre lutte contre le Front national, nous ne devons pas nous focaliser strictement sur l'organisation FN mais également sur ses satellites, groupes ouvertement néonazis, et sur des franges de partis républicains qui reprennent une partie de ses thèses. Les congressistes ont attiré l'attention sur l'utilisation du sigle du FN dans nos outils. Ils ont exprimé la nécessité de poursuivre et d'approfondir le travail sur l'argumentaire. L'éducation est un des moyens primordiaux pour promouvoir la citoyenneté et lutter contre les thèses du Front national. Sur l'éducation, les remarques suivantes ont été faites par les congressistes : • lutter pour la citoyenneté c'est faire de l'enfant sur son lieu scolaire un acteur citoyen de sa propre vie; • nécessité de veiller au contenu pédagogique des cours, notamment en LEP (livres) et des programmes. En particulier, le MRAP doit porter une attention particulière à la relation qui est faite de la guerre d'Algérie tout comme il devra oeuvrer pour que l'Histoire enseignée prenne en compte l'apport de l'immigration à la société française; • il a été mentionné aussi le fait que les enseignants assurent en général le travail antiraciste auprès des élèves. Mais le MRAP devrait aussi s'occuper des enseignants et impulser une réflexion sur le contenu de la formation des maîtres en matière de citoyenneté notamment dans les quartiers en difficulté où les maîtres s'interrogent sur leurs missions. Tout comme l'accent doit être mis sur les IUFM où l'éducation à la citoyenneté ne semble pas occuper une place suffisante; • la nécessité d'un lien citoyen entre l'école et l'environnement car il y a interaction entre l'école et l'environnement notamment le quartier; • de maintenir des liens entre toutes les structures qui permettent l'exercice de la citoyenneté (associations de parents d'élèves) ; • d'éviter le cloisonnement entre le MRAP et le système éducatif, ce qui implique d'être à l'écoute et de s'insérer dans un projet éducatif élaboré en fonction des besoins. Cette approche permettra de réduire la difficulté pour certains comités de pénétrer dans les établissements scolaires ; • l'institution scolaire étant le reflet de la société, elle aussi peut générer des comportements racistes et discriminants notamment de la part des enseignants (si la société est injuste, inégalitaire, l'institution scolaire sera elle aussi injuste et inégalitaire). Dans le même esprit, les stagiaires, en raison de leur origine, ne parviennent pas à effectuer les stages obligatoires en entreprise et sont victimes de la préférence nationale. Rappelons la situation des étudiants étrangers (et des maîtres auxiliaires étrangers) qui subissent des conditions d'inscriptions discriminatoires et l'arbitraire des préfectures. Il ne faut pas oublier dans notre démarche d'éducation, les médias qui sont des acteurs sociaux importants. Notre regard doit être vigilant sur ce qu'ils véhiculent mais nous devons aussi nous efforcer d'avoir une attitude pédagogique envers ces acteurs. Il est important de demander des moyens supplémentaires, la lutte des enseignants 93 l'a illustré. Le MRAP a d'ailleurs établi une motion de soutien aux enseignants du 93 qui révèle un problème national. On ne peut pas citer ici toute la richesse des expériences menées par les comités locaux du MRAP tout au long de la Semaine de l'éducation, et bien au-delà de cette semaine. L'éducation est un levier intéressant pour un partenariat (centres de loisirs, centres sociaux). Tout comme nous ne devons pas oublier que les jeunes ne sont pas tous des étudiants et qu'une partie non négligeable n'est pas scolarisée. L'éducation ne se fait pas qu'à travers la structure de l'Education nationale. Le MRAP aussi a un rôle à jouer dans ce cadre . L'éducation s'adresse aussi aux adultes et n'est pas réservée auxjeunes scolarisés .• Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP 1 ~ Il Thème 3 MONDIAliSATION ET AMITIÉ ENTRE LES PEUPLES MIGRATIONS ET IMMIGRATION Texte' d'introduction Présenté par Jean-Jacques Ki rkyacharian La formule un peu suave, un peu consensuelle, a un léger parfum de stalinisme, de l'époque où on proclamait d' autant plus solennellement les principes qu'on était essentiellement occupé à les violer. Cependant notre nom, pris en bloc, a un grand mérite, il établit un lien direct entre les contradictions internationales, avec leur corollaire: haines ancestrales, guerres, génocides, et la question du racisme que nous avons vocation, selon nos statuts, à faire disparaître. Les temps ont beaucoup changé depuis que le MRAP a choisi de traduire par « amitié entre les peuples» les deux dernières lettres de son sigle. L'apartheid a disparu, mais aussi l'URSS, le socialisme réel, et dans les pays nouvellement libérés de la dépendance coloniale, le néo libéralisme a chassé l'enthousiasme des années héroïques. Il n'y a plus beaucoup de gens pour parler d'options révolutionnaires - sans même que soit évoquée ici la perspective socialiste. Les accords d'Oslo ont suscité un immense espoir vite déçu : ils demeurent une référence lointaine, un peu magique comme le sont les mirages. L'Europe? Certains pays de l'Est ont opéré une transition pacifique, parfois comme sur du velours vers l'Europe de l'Ouest, avec ses mérites et ses tares, dont le racisme. Le tableau pourrait être beaucoup enrichi, mais de toutes façons un tableau ne décrit que la face publique, apparente, de l' histoire, il ne révèle pas grand chose des forces qui agissent aujourd'hui dans le présent, et avec lesquelles nous aurons à compter demain. La vérité, c'est la mondialisation du marché, dont Marx n'avait pas pu imaginer qu'elle revêtirait les formes génératrices de précarité aggravée et de misère que nous observons aujourd'hui. Marx pensait que les contradictions du développement inégal à l'échelle du monde conduiraient rapidement à une rupture, àla rupture. Or, il y a eu beaucoup de ruptures, beaucoup de cassures et de cataclysmes en cent ans, et nous assistons maintenant à une sorte de triomphe de l'inégalité structurelle, dont les conséquences sont tellement énormes qu'une organisation officielle comme le PNUD est contrainte, rapport après rapport, d'en dénoncer le scandale. Il y a donc une première idée du rapport entre les deux parties de notre nom, entre antiracisme et amitié entre les peuples. Nous pouvons la résumer ainsi. Le racisme est la forme la plus aiguë et la plus complète de l'inégalité sociale, il crée des espaces croissants de non-citoyenneté, qui sont l'envers de la démocratie, allant jusqu'à porter atteinte au simple droit à la vie. Cette inégalité structurelle tend à régir la vie de la planète entière, engendrant les conflits, les servitudes, les dénuements, les tragédies migratoires, qui, à leur tour, nourrissent le racisme. Il faut ici faire un effort de clarification, le mot de mondialisation est trompeur. C'est si vrai que Le Pen et d' autres utilisent ce mot comme un épouvantail, agitant le spectre de la misère du monde pour susciter l'essor d'un racisme mondial, l'hitlérisme de l'an 2000. Car la mondialisation, prise « en général» n'est pas un concept, c'est un mythe. Il fait signe vers une réalité qu'immédiatement il occulte dans des images rebelles à toute analyse. Nous devons donc tout faire pour empêcher l'opinion démocratique (ainsi que ceux qui prétendent la représenter) de s'en tenir à ce type d'approximation, pour les porter à chercher ce qui est derrière ce mot. La mondialisation du marché c'est une chose très précise, qui signifie l'internationalisation de la précarité en même temps que du capital. On ne peut donc pas se borner à dénoncer les conditions de vie et de travail dans les pays en voie de développement. L'Europe de l'Euro participe elle aussi à la mythologie, dans la mesure où certains voudraient faire croire que &> Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP l'instrument monétaire créerait par lui -même les conditions de la prospérité. L'instrument monétaire ne fait que représenter la valeur des marchandises et tout particulièrement de cette marchandise qu'est la force de travail. A quelles conditions l'Euro pourrait-il créer un environnement favorable à la prospérité? que faut-il supposer pour que cela ait un sens? Les congressistes sont assez grands pour y réfléchir par eux-mêmes, en tant que citoyens. Mais en tant qu'antiracistes, ils ne peuvent pas tolérer que l'obscurité préside à ce qui va être la vie de plus de 300 millions de personnes dont 12 millions au moins sont des non-Européens, l'équivalent d'un 16éme Etat! Je dois dire que quelques eurocrates ont senti qu'il y avait là un os, et c'est pourquoi ils ont estimé devoir donner un coup de pouce dans le sens de la lutte contre le racisme. Grâce aux ONG, en particulier les ONG françaises, il leur est impossible de soutenir qu'il n'y a pas de rapport entre« racisme» et« politiques d'immigration ». Le « réseau des ONG européennes antiracistes », s'il voit le jour, sera comme un aiguillon, et le MRAP devra y apporter le poids de son expérience et ses analyses, de même que dans ses rapports avec« l'Observatoire européen des phénomènes de racisme» qui vient d'être fondé à Vienne. Encore un peu de sémantique: « le mondialisme ». Ce terme n'est qu'une resucée polie des anciennes expressions racistes, fascisantes: le cosmopolitisme, les Juifs apatrides, les judéomarxistes, etc. Il n'y a pas de mondialisme, il y a la conscience grandissante des solidarités. Cette conscience avance par des chemins obliques, elle n'est pas donnée d'avance, ce n'est pas une idéologie. Chacun peut découvrir par expérience qu'il y a un rapport entre l'ordre imposé par le FMI, les exigences de la Banque Mondiale, l' Arena au Mexique, et notre propre contestation d'un ordre présenté comme « objectif », par conséquent nécessaire, qui refléterait la victoire du « moderne» sur « l'archaïque ». Là-dessus aussi, il faut être clair. Un exemple. Un nouveau thème est apparu récemment dans la propagande en faveur de la modernité: il s'agit d'une sorte particulière de négationnisme, puisqu'il est affirmé que finalement la déportation de millions d'Africains aux Amériques a été un bien pour tout le monde: ces Africains ont échappé à un sort forcément misérable, celui de l'arriération, ils ont été projetés dans la vie moderne, développée, démocratique. Le président Clinton n'a pas craint de pousser lui aussi cette chansonnette: les thèmes de la Nouvelle Droite circulent bien au-delà des cercles où ils se forgent. Et n'oublions pas que les démagogues fascistes choisissent soigneusement les thèmes susceptibles de flatter des sensibilités .. Par exemple: l' incapacité des Africains, ou encore des Latinos. Les Africains ne sont bons qu'à se faire la guerre, grâce aux armes que nous leur vendons. Les Latinos, eux, ne sont bons que pour le narcoterrorisme, et les maîtres du marché de la drogue, où sont-ils? Qui blanchit leur argent sale? Qui protège les gouvernements corrompus, les Contras? Je laisse de côté d'autres exemples, qui pourtant tiennent fortement à coeur, entre autres celui de la Palestine. Il me faut Texte de synthèse Rapporteur: Bernadette Hétier INTERNATIONAL Défendre toutes les causes? Dans l'un des groupes, on s'est interrogé, à propos de l'objectif d'amitié entre les peuples: le MRAP doit-il décider d'intervenir dès que se produit une violation des droits de l'Homme ou bien existerait-il une spécificité des causes pour lesquelles le MRAP devrait se mobiliser? Il est évident qu'on ne peut faire le tri entre les violations de droits fondamentaux. Cependant, il faut établir un « état» de nos priorités pour guider l'action. De plus, nous nous devons de ne pas attendre d'être sollicités car certaines victimes ne peuvent prendre la parole (par exemple les femmes afghanes). Embargo Le MRAP doit se prononcer contre tout embargo touchant les populations civiles, exemples: Irak, Cuba, mais résolument pour l'embargo sur les ventes d'armes, quels qu'en soient les pays destinataires, notamment la Turquie et les pays d'Afrique. La Palestine L'ensemble des groupes estime indispensable une motion du congrès sur la Palestine. Dans l'un des groupes, il a été souligné que l'application des accords d'Oslo a deux ans de retard. Il est donc très urgent de relancer le processus de paix devant aboutir à la création d'un Etat palestinien. Il est proposé que le MRAP en appelle à l'ONU pour adopter une nouvelle résolution qui donne enfin force contraignante aux résolutions précédentes restées lettre morte. Un projet de motion sera élaboré en tenant compte de ces propositions pour être présenté à la plénière du Congrès. L'Algérie Un groupe a proposé que le congrès confirme la motion du Bureau et du Conseil national sur l'Algérie. Un autre groupe a souligné l'enjeu décisif que représente le rôle de la femme en Algérie, menacée une fois de plus par une nouvelle mouture du code de la famille. Un projet de motion sera présenté à la plénière du Congrès sur toutes ces questions. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • 1 Il (suite de la page 27) avant de conclure faire encore une distinction, entre « analyse d'ensemble» et« globalisation ». Rien ne serait plus contraire à nos objectifs que la globalisation hâtive: il ne s'agit pas de traiter toute situation de racisme à la sauce de l'inégalité de développement, ni de nous précipiter pour signer tout appel en faveur de telle ou telle cause, isolée du reste de nos actions. Rien ne serait plus dangereux qu'une telle attitude. Elle ferait de nous une secte, un groupement de sensibilités, exactement tel que l'extrême-droite le dénonce. Nous avons une vue d'ensemble, mais nous travaillons sur les cas concrets. Nous ne substituons pas les abstractions aux réalités. Loin de la globalisation hâtive se trouve le débat nécessaire, concret sur ce qui est appelé parfois« l'ouverture des frontiè res ». Le mouvement des sans-papiers, à lui seul, résume bien le caractère concret. On oppose souvent liberté de circulation à liberté d'installation. On admet assez aisément (mieux depuis quelques mois) la première, mais la seconde provoque l'horreur chez beaucoup. Pourtant la démographie est là : comment, sans recours à l'immigration, financer dans 15 ans les caisses de retraites? Le débat public a fait quelques progrès, qu'il faut saluer: on voit mieux aujourd'hui qu' il n' y a pas de corrélation statistique entre chômage et immigration. Les centrales syndicales (CGT et CFDT) font de grands efforts pour faire avancer les idées vraies. Sur« la liberté d'installation» il est peu probable que nous soyons aujourd'hui àmême de conclure, d'autant que la question déborde largement les compétences du MRAP. Mais sans le MRAP, le débat progresserait plus difficilement sur la place publique. Ne nous défaussons pas sur« la société dans son ensemble» : ce serait admettre la fatalité du racisme. Soyons parmi les premiers à exiger que ce débat ait lieu sans hypocrisie et qu'il admette, parmi ses préalables, la fin des ventes d'armements, l'abolition de la dette, le renversement complet des politiques dites d'aide au développement. Il est vain, il est hypocrite de chipoter sur l'ouverture et la fermeture des frontières, tant que ces conditions préalables n'auront pas été remplies. Nous ne sommes pas des experts économiques, ni même des sociologues: mais nous cherchons à nous instruire. Un militant doit savoir aussi être un écolier. Nous ne sommes pas un parti tiers-mondiste, mais nous cherchons et chercherons à mieux lier les inégalités qui surgissent dans notre environnement immédiat, en France, et un peu audelà, dans l'espace européen au problème mondial de l'inégalité. Nous ne sommes pas comptables de toute la politique internationale, mais nous savons que la citoyenneté d'aujourd'hui est déjà en prise sur une citoyenneté plus ambitieuse. Nous devons faire progresser le mouvement antiraciste, à commencer par notre Mouvement, vers une idée plus claire des solidarités réelles, vers l'idée difficile parce que rationnellement fondée, de l'amitié entre les peuples . • Synthèse thème 3 (suite de la page 27) Esclavage Il est demandé que le MRAP ait une actions spécifique relative aux pays où sévit l'esclavage sous forme directe aussi bien qu'indirecte, particulièrement en Mauritanie. Afrique Le MRAP doit exiger du gouvernement français un changement radical de politique vis-à-vis des pays d'Afrique et notamment l'arrêt du soutien aux dictatures. En France Il est indispensable de réfléchir à toutes les répercussions que peuvent avoir des conflits internationaux sur le plan du racisme et de la xénophobie: ainsi, la guerre du Golfe qui a contribué à faire monter un sentiment anti-arabe. D'autre part, quels que soient les problèmes internationaux, le MRAP doit s'efforcer d'obtenir qu'il puisse exister une information complète sur les événements à la fois dans les médias (exemple : présentation du génocide au Rwanda comme une simple« guerre tribale») et dans les livres d'histoire qui façonnent la mémoire. MONDIALISATIONËMIGRATION, CODEVELOPPEM NT 1- Mondialisation , migrations et immig ration Sémantique. Des questions subsistent quant à la pertinence de termes tels que celui de mondialisation, dont la définition n'est pas très précise. De plus, il a été demandé de ne pas promouvoir, sans précaution, l'idée de nation qui peut être porteuse d'un repli identitaire bien que le concept de nation « n'a pas épuisé toutes ses potentialités ». A propos de mondialisation. Un grand nombre d'interventions ont porté sur l'urgence de l'annulation de la dette, le rejet de l'ensemble des politiques qui directement issues de l'esclavage, se sont nourri du colonialisme et du néo-colonialisme pour aboutir aux formes actuelles du libéralisme sauvage. C'est pourquoi il est si important aujourd'hui d'être sur les différents fronts des luttes contre toutes les formes du néolibéralisme (AMI et autres négociations multilatérales) et de Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP & faire pression sur le gouvernement français pour qu'il exerce des pressions politiques en ce sens. Codéveloppement. Il existe aujourd'hui un brouillage politique de la notion même de codéveloppement. Alors que le terme pourrait se rapporter à toute forme de développement solidaire, la notion est d'une part « rétrécie» et désigne essentiellement les micro-projets que les immigrés réalisent dans leurs pays d'origine, avec le partenariat de la coopération française. D'autre part, dans le contexte de la circulaire du 24.06.97, la notion est récupérée dans le sens d'une aide au retour aux montants dérisoires pour les sans-papiers déboutés. Il a été proposé de promouvoir la création d'un comité de suivi très pluriel en matière de politique de codéveloppement. Liberté de circulation, liberté d'installation. L'ensemble des groupes s'est prononcé globalement sur les trois parties du programme de travail proposé par la commission immigration, mais avec des précisions concernant certains points. En ce qui concerne la liberté d'installation, il a été dit que la liberté d'installation est l'objectif, mais qu'il y a une nécessité urgente d'approfondir le débat sur l'ensemble de ce qu'impliquent ces termes. Dans l'un des groupes, un vote très largement majoritaire a approuvé le point 4 du programme de travail (page 7 des propositions) qui préconise de promouvoir l'idée de liberté d'installation. Les autres groupes étant resté plus divisés sur cette question, il semble nécessaire de dégager une position commune par un vote de la plénière du Congrès. Asile économique. Il a été demandé dans l'un des groupes que les différentes formes de migrations économiques d'aujourd'hui soient reconnues au niveau international au même titre que l'asile politique et fassent l'objet d'un nouvel instrument international qui serait le pendant de la convention de Genève. 2 - Luttes plurielles Il a été souligné qu'il s'agissait là d'une partie du contenu à donner à la notion de citoyenneté discutée dans le thème 2. En effet, cette partie se réfère à la participation du MRAP à toutes les luttes contre les multiples formes d'exclusion et de discrimination, en particulier aux côtés des « sans» logis, « sans» travail et« sans» papiers. Concernant le projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre l'exclusion, le MRAP a participé à une action collective qui est loin d'être terminée. Il est particulièrement nécessaire de ne pas oublier la question des Tsiganes et Gens du Voyage. A ce sujet, les actions présentes et à venir dans le chapitre du programme de travail de la commission TGV sont à intégrer directement dans le programme d'actions. Dans l'un des groupes, il a été demandé que l'action pour l'application de la loi Besson prenne en compte le ministère concerné mais aussi les collectivités territoriales. 3 - Droits des étrangers et immigrés Les lois Il a été demandé l'abrogation des lois Pasqua-Debré et Chevènement et une remise à plat de l'ordonnance de 45 ainsi que la mise en chantier d'une véritable politique d'immigration accompagnée d'un large débat public. A la suite du débat sur l'ouverture des frontières et dans le but de favoriser la libre circulation et la libre installation, il a été demandé que le MRAP se mobilise pour obtenir des instances politiques compétentes une refonte totale de la convention de Schengen. Sans papiers. Consensus sur la motion de la commission immigration sur les sans-papiers avec les aménagements suivants: -Afin d'éviter toute ambiguïté sur la formulation du texte, les mots « contre la loi Chevènement » sont remplacés par« dans le contexte d'une action contre les lois Pasqua-Debré-Chevènement ». A propos de la demande de « régularisation de tous les sanspapiers », une proposition visant à ne demander de régularisation que pour les sans-papiers qui en ont fait la demande n'a pas été retenue. L'un des groupes a adopté la formulation de « tous les sans-papiers présents en France» et les autres « tous les sans-papiers ». L'ensemble des participants a également été d'accord sur les propositions de la commission immigration relatives aux visas, c'est-à-dire de revendiquer le retour à la situation antérieure à 1986 et à la suppression de l'obligation de visa. Cependant, à défaut de l'obtenir à court terme, il serait impératif, pour mettre un terme à cette pratique injuste et inhumaine, d'exiger le respect des engagements pris par le gouvernement actuel lors de la campagne législative de 1997 (abrogation des lois Pasqua, l'admission systématique au séjour en France pour les ressortissants étrangers faisant valoir des raisons humanitaires ne relevant pas de l'asile politique (asile territorial), la renégociation des accords bilatéraux et le retour à la dispense du visa de long séjour. Un débat a eu lieu dans l'un des groupes à propos du statut des étudiants et la possibilité pour eux d'obtenir un titre de séjour. Il a été demandé que des poursuites soient engagées pour nonassistance à personne en danger, auprès de la Cour européenne et d'autres instances compétentes, chaque fois que des éloignements forcés ont entraîné des atteintes graves, des disparitions ou le décès de la personne concernée. Intégration -citoyenneté. Il s'est dégagé un accord global sur le chapitre « Intégration-citoyenneté ». Une formulation du projet de programme de travail qui semblait trop peu explicite a été supprimée pour éviter tout malentendu concernant les difficultés particulières que vivent nombre de jeunes issus de l'immigration en tant que «jeunes musulmans ». Mais cette préoccupation demeure et trouvera mieux à s'exprimer dans le cadre de la lutte contre la discrimination et pour l'égalité des droits. Il a été demandé avec force de ne pas stigmatiser le mot « banlieue » en l'accolant à« violences ». Pour ce qui est du projet ébauché par le MRAP de s'investir plus profondément sur le terrain avec les jeunes issus de l'immigration, il a été décidé de l'intituler« mal-vivre et violences » . • Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP Il Il Les lDotions et déclarations votées par le Congrès • Motion de solidarité avec les enseignants de Seine-Saint-Denis Parce que le combat contre le racisme est indissociable du combat contre toutes les formes d'exclusion, les militants du MRAP réunis en congrès national le 8 mai 1998, se déclarent solidaires des enseignants de la Seine-SaintDenis en lutte depuis plus d'un mois pour que leurs élèves aient les mêmes chances et les mêmes droits que les autres élèves de notre pays. M. Allègre ayant déclaré: « il est plus difficile de manifester que de retrousser les manches. Il y a des agissements irresponsables qui nourrissent le Front national », nous trouvons ces propos scandaleux et indignes d'un ministre de gauche. Contrairement à ce que prétend M. Allègre, ce n'est pas ce combat qui risque de faire progresser le Front national c'est la ghettoÏsation des quartiers et des établissements scolaires, ce sont les renoncements et les promesses non tenues; ce sont les reculs de la citoyenneté et l'abandon des valeurs d'égalité et de fraternité. Le combat citoyen des enseignants de Seine-Saint-Denis qui refuse que leur département devienne un ghetto, leur combat pour l'égalité des droits, pour lajustice entre tous les enfants quelle que soit leur origine est aussi un combat contre le racisme et contre les idées du Front national. C'est ensemble, syndicats, associations, que nous réduirons l'indifférence et une certaine accoutumance aux négations des valeurs républicaines. C'est le sens du soutien qu'apporte le MRAP aux enseignants de Seine-Saint-Denis. • Motion de solidarité avec les grévistes de la faim de Lyon Le congrès du MRAP réaffirme solennellement sa solidarité et son soutien aux 10 personnes nées ou arrivées en France avant l'âge de 10 ans, qui depuis 30 jours sont en grève de la faim à Lyon. Ces hommes, mariés ou célibataires, sont victimes de la double peine, ils sont enracinés en France depuis plus de 25 ans, ont des femmes, des enfants, des parents, complètement intégrés à la société française. Ils sont victimes des lois, entre autre lois Pasqua qui n'ont pas été abrogées par le gouvernement de Lionel Jospin. Ces hommes forcent l'admiration, ils ont notre soutien actif. Leur action avec leurs femmes, leurs enfants pour exiger la régularisation de leur situation est exemplaire. Le congrès du MRAP exige la mise en oeuvre immédiate de mesures législatives et réglementaires afin de garantir définitivement la protection de tous ceux qui sont victimes de mesures d'éloignement. Le congrès du MRAP appelle ses adhérents à multiplier les actions en faveur des victimes de la double peine. Le congrès du MRAP salue chaleureusement les grévistes de la faim, et exige du gouvernement la régularisation immédiate de leur situation. • Déclaration adressée au préfet du Nord Diop Abdoulaye, ressortissant mauritanien, a été arrêté enjanvier 1997 et expulsé en février de cette même année. Arrivé à Nouakchott accompagné de deux policiers, il s'est vu dénié la nationalité mauritanienne par le gouvernement de ce pays et a été ramené en France où il a été condamné à une peine de trois mois de prison pour défaut de papiers ainsi qu'à une peine d'interdiction du territoire. Lors de notre séance de travail concernant les dossiers de régularisation avec votre représentant le 23 avril 1998 à la préfecture du Nord, nous avons abordé le cas de Diop Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP Abdoulaye pour lequel, conformément aux dispositions de la Convention de Genève en matière de droit d'asile, nous avons réclamé le statut d'apatride, compte tenu de la non reconnaissance de sa citoyenneté mauritanienne. Nous venons d' apprendre son arrestation le 5 mai 1998 et sa détention actuelle au centre de rétention de Lesquin d'où vous prévoyez son expulsion pour la Mauritanie le 13 mai 98. Diop Abdoulaye est arrivé en France en 1990 après qu'ait eu lieu à M'Bagne, son village, un massacre ethnique concernant les Négro-mauritaniens. Ces massacres sont confirmés par le HCR, la FIDH, des ONG et des organisations des Droits de l'Homme. Son expulsion est donc inadmissible et le MRAP, réuni ce jour en Congrès national, réclame de ce fait sa libération immédiate et la mise en oeuvre de la procédure de régularisation le concernant dans le cadre de l'apatridie . • Déclaration: La lutte des sans-papiers n'est pas finie! Pour répondre à la lutte des sans-papiers menée depuis deux ans, le gouvernement a choisi de s'engager, par circulaires, sur la voie d'une régularisation partielle des sans-papiers demandeurs d'un titre de séjour. Vont en bénéficier principalement les familles, les célibataires étant les principaux exclus de cette mesure. Le gouvernement laisse ainsi délibérément plusieurs dizaines de milliers de sans-papiers dans l'illégalité, malgré la demande d'un titre de séjour qu'ils ont faites dans les préfectures, alors qu'il sait par ailleurs qu'il n'a pas les moyens de les expulser tous. Il s'accommode ainsi du fait que des milliers de personnes puissent vivre en France dans la plus grande précarité, exclues de tous droits. En instituant une carte d'un an délivrée aux nouveaux régularisés, dont le renouvellement est conditionné par l'emploi et les conditions de vie, le gouvernement ouvre une brèche dans le statut de résident, remet en cause implicitement la carte de 10 ans, et participe ainsi à la précarisation accrue de cette catégorie de population. Le gouvernement a choisi, avec la loi Chevènement, une politique de l'immigration, dans la tradition de celles des gouvernements précédents, qui s'appuie sur le contrôle des flux migratoires, le blocage des frontières, l'expulsion des irréguliers, politique qui ne peut aboutir qu'à la reconstitution progressive du nombre des sans-papiers vivant en France. Le gouvernement prétend aujourd'hui faire partir, voire expulser, les exclus de sa régularisation. Alors que le Premier ministre avait annoncé la fin des charters, on a pu constater que la méthode employée n'était guère différente: c'est bâillonnés, attachés à leurs sièges, encadrés par des policiers, que les expulsés sont reconduits de force. Face aux protestations que cette politique appliquée avec ces méthodes provoque, le gouvernement n'a répondu que par les menaces et la répression: interpellation des passagers qui refusent de telles pratiques, arrestations de militants dénonçant ces expulsions, dénonciations des associations ou des personnalités qui se mobilisent contre elles. Il prétend instaurer même un délit de solidarité pour ceux qui n'accepteraient pas docilement sa politique et aideraient pratiquement les sans-papiers, faire le tri dans les associations engagées dans le soutien, leur imposer des conditions inacceptables pour ne pas tomber sous le coup de la loi. La lutte des sans papiers n'est donc pas finie. Elle se poursuit aujourd'hui avec l'occupation d'églises, partout en France, par le développement d'un vaste mouvement de solidarité d'associations, de personnalités, de militants, de simples citoyens qui refusent cette politique indigne des droits de l'homme. Le MRAP apporte son soutien total à ce combat. Il exige avec les sans papiers: - La régularisation de tous les sans papiers - L'arrêt des expulsions - Un moratoire sur toutes les décisions judiciaires ou administratives relatifs à la question du séjour - L'annulation et l'exclusion de toutes poursuites, condamnations, à l'encontre de ceux qui aident pour des raisons non lucratives, les étrangers en situation irrégulière à obtenir un titre de séjour - La mise en place, contre la loi Chevènement, d'une politique qui tienne compte • de cette réalité permanente qu'est le besoin d'immigration, • des problèmes qui résultent des échanges inégaux Nord/Sud, • de la nécessité de participer réellement au développement des pays pourvoyeurs de main-d'oeuvre, • du respect d'une liberté fondamentale: la libre circulation des hommes. (Suite des motions et déclarations <:iF) Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • Il • Motion adressée à la coordination des sans-papiers Le Congrès national du MRAP salue la coordination des sans-papiers, rend hommage à la force et la détermination de son action et exprime son actif soutien au combat mené pour le droit à la dignité des hommes par-delà toute considération de race, de religion ou de situation administrative. Nous exigeons, par ailleurs, l'arrêt des expulsions qu'elles soient terrestres, aériennes ou maritimes. • Déclaration sur la Palestine S'appuyant sur la distinction qui existe à l'ONU entre résolutions contraignantes (comme celle visant l'Irak) et résolutions non contraignantes, le Congrès demande qu'une initiative soit prise afin que l'ONU soit saisie d'un projet de résolution à caractère contraignant faisant obligation à l'Etat d'Israël d'appliquer strictement les accords conclus à Oslo et signés à Washington, et de s'abstenir de toute initiative tendant à les rendre caducs, comme par exemple l'implantation de nouvelles colonies en Cisjordanie. (Dès le lendemain, une lettre a été adressée à M. Hubert V édrine, ministre des Affaires étrangères, pour demander que la France prenne l'initiative de proposer cette résolution au Conseil de sécurité.) • Motion sur l'Algérie Le Congrès du MRAP affirme solennellement sa solidarité avec le peuple algérien. Il exprime son soutien aux démocrates algériens qui se battent dans leur pays contre l'intégrisme et pour 1'instauration d'un véritable Etat de droit. Il renouvelle sa demande d'un moratoire des expulsions vers l'Algérie. Il exige qu'on accorde aux Algériens menacés les visas qui leur permettraient d'échapper aux menaces de mort et à tous les Algériens ayant des attaches en France la possibilité de circuler à nouveau librement entre les deux pays. Il demande aux instances nationales d' établir avec le mouvement associatif et syndical les liens nécessaires à ces actions de solidarité. -Motion sur la Mauritanie En Mauritanie, le régime militaire et dictatorial de Ould Taya s'est spécialisé dans la pratique de l'esclavage des Négros-mauritaniens, dans la déportation de ces populations et leur maintien dans des camps de concentration, ainsi que dans une violente répression envers les militants des droits de 1'Homme et anti-esclavagistes. Le Congrès du MRAP condamne ces pratiques et interviendra auprès du président de la République afin que la France condamne et cesse son soutien politique, financier et militaire, au régime raciste mauritanien. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP DÉCLARATION SOLENNELLE DU CONGRÈS DU MRAP Les 8, 9 et 10 mai, s'est tenu le Congrès national du MRAP qui a réuni plusieurs centaines de délégués venus de toute la France. Les congressistes ont constaté que la crise qui perdure se traduit par une décomposition multiforme de la société. Les causes socio-économique sont déterminantes. Elles s'accompagnent cependant de conséquences négatives graves aux plans culturel, philosophique, politique et psycho-sociologique dont se nourrissent les haines xénophobes et racistes. Du« détail de l'histoire », à« l'inégalité raciale» et la préférence nationale, l'extrême droite française et sa principale expression politique, le Front national, structure et exploite ces peurs et ces fantasmes irrationnels, cultive le concept bien connu du bouc émissaire, contribue à développer avec violence l'expression multiforme du racisme. Le Front national, parti politique raciste et xénophobe, dénoncé comme tel par les plus hautes autorités de la Nation, bénéficie cependant du financement public, légitime, accordé aux partis politiques tenus de respecter les principes de la démocratie. Le Congrès national du MRAP considère qu'il appartient à la République, qui a le devoir de défendre ses valeurs, de mettre fin à cet insupportable paradoxe: imposer aux contribuables ce financement des expressions de la haine raciste et xénophobe. Le MRAP a, en son temps, puissamment contribué à doter la France d'un arsenal législatif destiné à combattre le racisme qui reste l'un des plus importants en Europe. Le Congrès se prononce pour l'amélioration de ces textes qui doivent être complétés. Le congrès du MRAP constate que: • Les inégalités insupportables continuent de se creuser entre pays riches et pays pauvres. • Les flux migratoires ont favorisé l'essor économique et culturel des pays développés comme la France dont la richesse s'est, en grande partie, constituée de l'exploitation des ressources et des peuples. Le congrès, en conséquence, appelle nos gouvernants: • As' engager avec audace et résolution dans une politique nouvelle de codéveloppement • A régulariser ceux des immigrés qui vivent sans papiers sur le territoire de la République • A ouvrir plus largement les voies de la citoyenneté et de l'intégration aux étrangers résidant en France. Tandis que la venue et l'installation d'immigrés reste un besoin permanent de notre pays, de sa démographie, de son économie, il faut cesser de traiter les questions liées à l'immigration avec la frilosité d'un autre temps. Il convient de préparer cet accueil, l'établissement et l'intégration dans la citoyenneté. Aux enfants d'étrangers nés en France, doit être restitué le droit à la nationalité dès la naissance. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • Il Les invités Plusieurs dizaines d'organisations françaises et étrangères ont envoyé des représentants au Congrès du MRAP. On peut notamment citer: le SNES-FSU, l'Association française des juristes démocrates, le Front Polisario, le PCF, Femmes solidaires, le Manifeste contre le Front national, le Grand Orient de France, l'ANT, Feyka-Kurdistan, la CGT, la FOL 93, l'Association de défense des droits de l'Homme au Maroc, l'association Gagner, l'AMF, la CADAC, les amis de la Commune, la FETAF, le Comité préparatoire aux congrès internationaux, le Comité de soutien aux déportés mauritaniens, la Pastorale des Migrants, l'AEFTI, les Verts, CAP 94, les Alternatifs, le Syndicat général de la police, le MDC 93 et le Front de libération des Africains mauritaniens. Etaient également présents Albert Memmi, le professeur Minkowski, Jean Brafmann conseiller régional, Serge Guichard (membre du secrétariat national du PCF), Jean-Luc Benhamias (secrétaire général des Verts), Maya Surduts et Christine Thomas (respectivement présidente et secrétaire générale de la Cadat). Une délégation de la coordination des sans-papiers du 93 a également été reçue par le Congrès. Enfin, la mairie de Bobigny et le Conseil général de la Seine-Saint-Denis ont apporté un soutien et une aide irremplaçables à l'organisation de ces travaux. La municipalité a offert une chaleureuse réception à l'ensemble des congressistes. Charles Palant a prononcé un court discours de remerciement; il s'est souvenu que ce fut de la gare de Bobigny qu'il a été déporté vers Auschwitz et souligné combien le travail sur la mémoire est aussi un travail pour le savoir, l'intelligence, la confiance et contre cette arriération mentale que sont le racisme et le Front national. Les Illessages De nombreuses associations, représentées ou non au Congrès, ainsi que des personnalités ont fait parvenir des messages. Extraits. Jocelyne Riou, vice-présidente, Conseil régional d'ile-de-France « Très attachée à l'action que vous menez contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples, ( ... ) je vous assure de mon attachement aux actions ô combien nécessaires que vous menez dans le contexte actuel. » Jean-Claude Gayssot, ministre de l'Equipement, des Transports et du Logement M. Gayssot assure les congressistes de ses « voeux de plein succès pour vos travaux et vous assure de toute sa solidarité pour le combat antiraciste et émancipateur que vous menez en direction des peuples ». L'appel des cent pour la Paix « Dans le monde actuel où le fossé s'élargit sans cesse entre les pays riches et les pays pauvres, nous avons besoin en France d'une association qui lutte à la fois« contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples» « contre le FN et pour une solidarité envers les sans-papiers ». Dans cette bataille, nous nous retrouverons toujours ensemble. » Michèle Sandre et Alain Sauvreneau, secrétaire général de la Fédération nationale Léo Lagrange « A vos côtés dans les combats contre les exclusions racistes et xénophobes, contre les extrémismes, pour l'égalité des droits et la citoyenneté, nous travaillons ensemble notamment au sein du Comité National de Vigi lance contre l'extrême droite et dans le cadre de la Semaine Nationale d'Education contre le racisme ( ... ). Nous sommes particulièrement heureux du partenariat que nous avons noué autour des Comités Citoyenneté, créés à l'initiative de notre Mouvement dans le cadre de notre campagne" J'agis pour nos droits" . A vos militants, à nos militants de se rencontrer maintenant au plan local pour bâtir des actions communes encore plus fortement. » Différences n° 197 juin 1998- spécial congrès du MRAP Patrick Gaubert, vice-président de la LlCRA, ancien chargé de mission au Cabinet du ministre de l'Intérieur, chargé de la lutte contre le racisme « Notre collaboration a toujours été fructueuse parce que vous êtes ouvert au dialogue et à la concertation. Le MRAP est toujours en avant dans la lutte contre le racisme et la défense des droits de l'homme, votre organisation est également extrêmement compétente tant à Paris qu'en province. » Pour le bureau national de l'UNEF-ID, Pouria Amirshahi « Nous tenions cependant à vous faire parvenir un message d'amitié et de soutien dans la mesure où nos deux organisations se retrouvent régulièrement ensemble dans le combat contre le racisme, la xénophobie et leur principal vecteur, le Front national. » Didier Daeninckx « Il y a quelques années,j'ai entendu un enfant dire: "Le racisme, c'est la maladie de peau la plus grave. C'est la maladie des couleurs". Ceux qui en sont atteints n'en supportent plus qu' une . Leur idéal, c'est l'uniformité. Ils ont peur des arc-en-ciel. » Georges Séguy, président de l'Institut d'Histoire Sociale et membre du Comité d'honneur du MRAP Regrettant de ne pouvoir être présent au Congrès en raison de sa participation à des manifestations organisées pour le 30ème anniversaire de mai 68, M. Séguy écrit:« privé du plaisir d'être parmi vous,je serai tout de même dans une ambiance de lutte, de fraternité et de vigilance envers les perversions racistes et xénophobes que ce printemps mémorable stigmatisa. Avec mes souhaits de plein succès à vos délibérations, je vous assure de ma fidèle solidarité. » Fédération des Associations Kurdes en France Feyka-Kurdistan « Nous vous apportons les salutations et les remerciements de toute la communauté kurde de France pour toutes les activités que vous avez pu organiser en faveur de la cause kurde depuis plusieurs années. En effet, la solidarité internationale nous est très précieuse en ces temps difficiles que traverse notre peuple. Le MRAP fut à nos côtés dans tous les moments difficiles pour partager notre peine et nos souffrances et lors des grandes fêtes et manifestations en multipliant notre joie. C'est entre autres ce soutien de tous les jours et de proximité qui nous motive pour la suite de nos activités. » Le président de l'Association démocratique des travailleurs de Turquie (ADTT) « Nous tenons à vous saluer au nom des démocrates progressistes, antifascistes, et antiracistes turcs et kurdes qui ont toujours reçu le soutien du MRAP en ce qui concerne les droits des immigrés en France ou lorsqu'il s'agissait des droits de l'Homme en Turquie. Nous regrettons de ne pas pouvoir assister à votre congrès. Nous vous souhaitons plein succès pour votre congrès, dans votre combat contre le racisme, la xénophobie et le fascisme, qui gagnent malheureusement du terrain en France et en Europe. » SNES-FSU «Nous venons régulièrement à vos congrès, car nous agissons régulièrement en partenariat avec le MRAP, comme avec tout un ensemble d'organisations sur ce terrain qui nous est très sensible de la lutte contre le racisme, l'antisémitisme, la xénophobie et pour l' amitié entre les peuples et la solidarité internationale. Cela va de l'édition du livre de Mumia Abu Jamal à la préparation de la Semaine d'Education contre le Racisme en passant par la défense des droits des étrangers et de leur famille, ou le refus des lois Pasqua, Méhaignerie et Debré, non abrogées totalement par les lois Guigou et Chevènement qui restent en-deçà de nos revendications communes. Résolument unitaires, mais vigilants sur notre indépendance, nous intervenons du niveau local au niveau international pour les droits et les libertés. C'est une partie intégrante de notre conception de l'action syndicale, inscrite dans la société et fortement ancrée dans nos réalités professionnelles. Aussi l'éducation est-elle notre préoccupation la plus déterminante. Sur ce terrain, il y a fort à faire tant pour l'éducation contre le racisme et la xénophobie, que pour riposter aux tentatives graves et nombreuses du Front National et de l'extrême-droite d'introduire des contenus et des critères discriminatoires, contraires à nos valeurs et aux droits humains, ceux de l'enfant en particulier. » M. Ahmed, SOS Démocratie aux Comores « Le MRAP a mené des luttes dures et salutaires depuis sa création contre toute forme de racisme, de xénophobie en France. ( ... ) Nous souhaitons développer nos relations avec le MRAP pour défendre les droits de l'homme et faire reculer l'influence des idées racistes en France. » Différences n° 197 juin 1998 - spécial congrès du MRAP • (suite de la page 35) Nicolas Dumont, secrétaire national chargé des relations extérieures, Mouvement des jeunes socialistes ( Conscients de la nécessité absolue de mettre au coeur de notre action - qu'elle soit associative, militante ou politique - la lutte contre le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme et toute autre fonne de discrimination, nous sommes particulièrement sensibles aux questions que vous soulevez ainsi qu'à la manière que vous avez d'oeuvrer pour le rapprochement entre les peuples. Sachez que vous nous trouverez constammcnt à vos côtés pour défendre au quotidien la solidarité et la fraternité entre les peuples et cc, au nom de la tolérance soeur jumelle de la liberté. » Pierre Flament. président d'Action catholique ouvrière « Oui, nous partageons vos convictions. Le développement des peuples, la solidarité avec tous "les sans" nous concernent. Nous sommes de ce peuple. La tolérance ct l'accueil de l'Autre nous pennellent de nous retrouver sur les chemins de lutte ( ... ). » El Hadji Momar Diop, coordination nationale des sans-papiers La Coordination nationale des sans-papiers exprime sa solidarité au Mouvement contre le Racisme et pour l'Amitié entre les Peuples dans son combat indéfectible pour ses idéaux de justice d'égalité, de fraternité, pour le respect des droits des citoyens, nationaux ou étrangers. François Delapierre, secrétaire général de SOS Racisme « Dans la confusion idéologique qui gagne nombre de responsables, alors que le FN impose progressivement ses idées, le mouvement antiraciste doit porter plus que jamais l'exigence d'égalité des droits. Nous savons quc nous nous retrouverons avec vous très prochainement pour mener ce combat, en défendant les victimes d'une politique restrictive et inadaptée, dans J'éducation contre le racisme, dans la mobilisation contre toutes les fonnes d'intolérance. Amitiés antiracistes et bon congrès! » De nombreuses autres personnes n'ont pu assister au Congrès en particulier pour des raisons de calendrier. Le siège national a notamment reçu des courriers d'excuse de la part de : J. Graveleau, directeur de l'association Le Relais. Jean-Pierre Valentin, secrétaire national de la FEN. La Ligue des droits de l'Homme qui tenait son congrès durant le même week-end. Jean-Luc Brustis et Véronique Tessier de la JOC-JOCF. Jean Vrain de l'ASEF (Aide à la scolarisation des enfants Tsiganes-Val d'Oise). Patrick Tort, direction scientifique de 1'1 nstitut Charles Danvin International. Monique Chemillier-Gendreau, Universite Paris Vll.Anne Hauteclocque, secrétariat national aux questions de société du Parti socialiste. Olivier Maguet et Hélène Fauchois, de l'association AIDES. Les Francas. Le comite E. Honecker de solidarité intemationaliste. Le MRAP a également reçu des courriers d'excuse de Jean-Suret Canale, membre du comité d'honneur du MRAP, de Jacques Maheas, sénateur de Seine-Saint-Denis et maire de Neuillysur- Seine, Paulette Fost, maire de Saint-Ouen et présidente de l'ADECR, de Dominique Voynet, ministre, de Gérard Fellous, secrétaire général de la CNCDH, et de Louis Besson, secrétaire d'Etat au Logement. Différences n° 197 juin 1998 - spécial congres du MRAP 43. boulevard de Magenta 750lO Paris Tél.:0\53389999 Télécopie: 01 40 40 90 98 E.mail: mrap@ras.cu.org • Directeur de la publication Mouloud Aounit Gérante bénévole Isabelle Sirot Rédactrice en chef Cherif~ Benabdessadok • Administration - gestion Patricia Jouhannet • Abonnements Éric Lathière-Lavcrgnc 120 F pour II numéros/an 12 F le numéro • Maquette Cherifa Benabdessadok • Impression Montligeon Tél. :02 3385 8000 • Commission paritaire n° 63634 ISSN 0247-9095 Dépôt légal 1998-6 1

Notes

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