Différences n°179 - novembre 1996
Sommaire du numéro
n°179 de novembre 1996
- Edito: Agir pour la paix et la justice (Moyen-Orient) par J.J. Kirkyacharian
- Sans-papiers: pour une autre politique des flux migratoires entretien avec Jacqueline Costa-Lascoux par C. Benabdessadok {immigration]
- L'été africain: actions locales en faveur des sans-papiers par Eric Lathière-Lavergne
- Gens du voyage: vers une nouvelle réglementation par Bertrand Bary
- L'école menacée (menace du Front National) par Liliane Lainé
- Sankofa; un film à voir par C. Benabdessadok
- Miroir des activités locales par J.C. Dulieu et Eric Lathière-Lavergne
- Mieux légiférer contre le racisme par Laurent Canat [législation]
- Contre le racisme, l'Eglise de France prend parti par Bertrand Bary
- Conférence nationale du MRAP: préambule par J.J. Kirkyacharian
- Campagne Mumia Abu-Jamal par M.A. Combesque
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o SOMMAIRE Voyageurs Novembre 1996 - N" 179 Sans-papiers Veta une nouve/le loi? 6 Bertrand Bary Ecole POUR UNEAU E Le FN menace 6 Liliane lainé Cinéma Sanko~ 6 llTI E ES Ch6rifaS. Activités locales 8 Introduction Jean-Claude Dulieu FLUX IGRATOIRES Panorama Eric L-Lavergne Justice Mieux légiMrer 8 Pierre Mairet Livres 9 La mobilisation des sans-papiers et des militants qui les soutiennent a permis de faire émerger l'idée d'une autre politique concernant les migrations internationales. Nous y consacrons Odile Barral et Laurent Canat Conférence nationale Préambule 12 Jean-Jacques Kirkyacharian Mumla Abu-Jamal Le point 12 un modeste dossier: entretien avec Jacqueline Costa-Lascaux, chercheur au Cevipof - Centre d'étude de la vie politique française, et membre du collège des médiateurs; aperçu sur ,'action de solidarité des comités locaux du MRAP et texte d'une plate-forme Marie-Agnès Combesque commune à dix associations. " page 2 Agir pour la paix et la justice L'aggravation de la situation au Proche-Orient est très préoccupante: on perçoit le risque d'une guerre qui, sur ce petit bout de terre si chargée d'Histoire, conduirait à des massacres dont nul ne peut prévoir les répercussions. L'objectifaffiché de l'actuel gouvernement israélien est de substituer au processus de paix issu d'Oslo une pseudo-négociation où le partenaire palestinien n'aurait de choix qu'entre plusieurs fonnules de capitulation. Cette politique suscite la protestation de tous ceux qui veulent une véritable paix, inséparable de lajustice et de la réconciliation. Le colloque organisé ce mois par le MRAP au Sénat à l'occasion du 50- anniversaire du procès de Nuremberg rencontrera forcément cette question. La conférence d'Alben Lévy sur le négationnisme, éditée sous forme de brochure, éclaire aussi très bien cette idée qu'il faut que la mémoire assume jusqu'au bout la significationdecequi fut, pour pouvoir envisager d'en surmonter les conséquences. L'interminable conflit entre Israêlet la PaJestine, c'est aussi la mémoire du MRAP : c'est pourquoi notre Mouvement demande d' intensifier l'appui aux organisations antiracistes et pacifistes qui militent activement des deux côtés. L'attitude des autorités françaises et leurs efforts pour faire redémarrer le processus de paix dans la reconnaissance des deux légitimités est à saluer sans réserve. Cette attitude est d'autant plus crédible que le président Chirac avait. avec éclat. reconnu officiellement la responsabilité de la France dans la rafle du Vel' d'Hiv. Reconnaître ce qui a été, c'est rendre possible et nécessaire d'aller vers d'autres horizons. La leçon vaut pour tous y compris pour le 17 octobre 1961. Un véritable effort d'intelligence et de lucidité est demandé aux peuples et à leurs dirigeants, actuels ou futurs: la reconnaissance de l'autre commence par là. Si tu veux la paix, agis pour lajustice .• Jean-Jacques Kirkyacbarian Président-délégué, chargé des questions internationales Il Entretien avec Jacqueline Costa-Lascoux POUR UNE AUTRE POliTIQUE DE l'IMMIGRATION Différences: Quels sont les enseignements que l'on peut tirer aujourd'hui du mouvement des sans-papiers? Jacqueline Costa-Lascoux : Le premier mouvement des sans-papiers a rendu perceptible la situation dramatique des personnes qui se retrouvent dans l'illégalité sans l'avoir voulu à cause de décisions incohérentes des préfectures et par l'application de lois d'une complexité inextricable. Les sans-papiers ont eu le courage d'exposer en pleine lumière la situation dans laquelle ils se trouvaient, de se désigner aux administrations. Ils ont ainsi amené l'opinion publique à faire la distinction entre sans-papiers et clandestins. Il faut rendre hommage à leur capacité de mobilisation, une mobilisation qui s'est faite avec le soutien permanent des associations. Le concours des syndicats et des partis politiques a été tardif mis à part les syndicats CFDT de cheminots qui les ont hébergés à Pajol et ont continué à les aider par la suite. En quoi ce mouvement vous paraît-il exemplaire? Les sans-papiers ont su tirer parti de tous les moyens d'expression, ont su argumenter sur la base des critères des médiateurs avec les préfectures, avec les personnalités politiques et les fonctionnaires au plus haut niveau; ils ont également travaillé sur le long terme avec les associations sans céder aux tentatives de manipulation que certains petits groupes onttenté d'imposer. Et surtout, ils ont défendu leurs situations particulières tout en invitant à une analyse plus globale. C'est ce qui a permis à leur combat d'avoir un écho au niveau national. S'il ne s'était agi que de régulariser quelques familles, les choses auraient été plus simples - il y a toujours eu des régularisations au cas par cas. La force du mouvement a été de révéler la conditions de nombreuses familles immigrées et de poser le problème dans son ensemble. Ça s'est pourtant assez mal terminé ... Malheureusement, tout ce travail de clarification et de négociation a été anéanti par un communiqué de presse du ministre de l'Intérieur rendu public au moment même où les médiateurs étaient reçus à Matignon. Ce fut le premier coup de force qui interrompait la logique des mois précédents: les dossiers étaient en cours d'instruction à la préfecture de police de Paris sur la base des critères des médiateurs. Bizarrement, ce communiqué de presse comportait une erreur juridique: on y confondait parents d'enfants français et parents d'enfants nés en France! Une erreur qui a conduit trois mille Chinois à déposer leurs dossiers au Secours catholique croyant qu'ils étaient concernés. Cela s'est finalement terminé par l'évacuation à coup de masse contre les portes de l'église Saint-Bernard .. Les sans-papiers ont été reçus par des députés européens Oui, leurs délégués ont pris contact avec la Commission et le Parlement européens et ils ont ainsi étendu le mouvement à plusieurs pays de l'Union. Cela a permis aux médiateurs de dénoncer le fait que l'Europe s'enfonce dans la répression. Des lois prises depuis 1993 aux Pays-Bas, en Belgique, en Allemagne, en Grande-Bretagne, adoptent la même logique répressive à l' encontre des immigrés non communautaires. On s'accorde désormais à dire que la thèse de l'immigration zéro est une mystification. EUe tient pourtant lieu de politique depuis longtemps. Ce slogan repose sur l'illusion de la maîtrise d'un phénomène international par la seule vertu d'un décret. Le pire est qu'il semble fonder un certain consensus de la classe politique, laquelle est décidément très éloignée des réalités. Depuis 1974, « l'arrêt de l'immigration» est devenu un leitmotiv, y compris à gauche. Or, chacun sait que cela est impossible et serait anticonstitutionnel. Les sociétés européennes ne sont pas des forteresses avec des pontlevis qu'il suffuait de lever. Elles reconnaissent le principe de la liberté de circulation. De plus, nous vivons dans un monde de mobilité internationale croissante. Cette mobilité concerne les capitaux, les biens, les idées mais aussi les hommes. Si on ne veut pas que la mobilité soit une occasion Différences n° 179 novembre 1996 supplémentaire de renforcer les déséquilibres du développement inégal et d'accentuer la précarisation du marché du travail, toutes les personnes doivent jouir de la liberté de circulation. N'oublions pas que plus de deux millions de Français vivent à l'étranger. Les migrations ne sont pas à sens unique. Le cas des Portugais est exemplaire
- quand ils étaient dans la situation
de « sous-développés» en Europe, ils venaient vendre leur force de travail selon la dynamique classique des flux migratoires, comme actuellement ceux des pays du tiers-monde. Désormais, les Portugais ont le choix d'aller et venir dans tous les pays européens. Résultat: ils se déplacent mais reviennent chez eux plus volontiers. Pourquoi cela ne serait-il pas possible à l'avenir avec les pays du Maghreb? Pourquoi ne pas imaginer une coopération intelligente et juste qui permettrait à des Maghrébins de venir en Europe pour une formation professionnelle, pour des études, pour un contrat de travail, pour seulement respirer parce que ça ne va pas bien dans leur pays? Les Algériens, qui vivent une situation très difficile, ne demandent pas à venir s' installer en France ou à devenir Français, ils demandent un temps de répit. Une bonne façon d'encourager la démocratie en Algérie est d'accueillir des démocrates algériens momentanément contraints à l'exil. En somme, nous devons prendre conscience que nous avons changé d'époque. Il n'y a pas de raison de ne pas penser les conditions de séjour à partir du principe de la liberté de circulation: poser les libertés fondamentales en premier et voir comment les conditions de leur exercice n'y portent pas atteinte. Si on reconnaissait le droit de vivre en famille y compris, par exemple, en permettant des allers et retours avec les pays d'origine, on ne forcerait pas certains à s'installer ici dans n'importe quelles conditions et on aurait une autre politique d'accueil et de logement social. Plus on opte pour des réglementations tatillonnes, plus on favorise des situations d'irrégularité et plus on fait le jeu des trafiquants. Je témoigne de ce que m'ont dit des trafiquants en détention avec lesquels je me suis entretenue: ils « remercient» nos législateurs de faire des réglementations restrictives parce que cela leur permet d'augmenter les prix des faux papiers et des passages clandestins; cela leur donne des moyens de pression encore plus grands sur les immigrés qui sont obligés de recourir à leurs services. On a observé le même phénomène avec l'immigration interne en Italie: plus le Nord se montrait restrictif à l'égard des Italiens du Sud, plus les mafias prenaient en charge l'organisation des filières de travail pour les Siciliens ou les Calabrais cherchant à louer leur force de travail dans le Nord de la Péninsule. Que pensez-vous de l'idée d'introduire des quotas, qui permettrait notamment de reconnaître le fait migratoire comme une réalité? L'instauration de quotas par nationalité est par essence discriminatoire: j 'y suis opposée. Avec quelle balance mesurera-t-on le poids et l'utilité de telle ou telle nationalité? Certains pensent à des quotas par métiers: je n'y crois pas. Les besoins du marché sont aujourd'hui très difficiles à prévoir. Or, pour que les quotas aient un minimum d'adaptation au marché du travail, il faudrait qu'ils soient déterminés par secteurs d'activités et géographiquement localisés car le besoin dans une région n'est pas forcément le même dans une autre. Autre argument de fond: quel type d'emploi et de contrat? Des quotas par branches, des quotas par niveaux de qualification, locaux, nationaux, européens? S'il s'agit de «grands travaux publics », autant recourir à l'appel d'offres. A mes yeux, les quotas s'inscrivent dans une logique néo-coloniale et c'est une absurdité au regard de notre connaissance du marché du travail Cela conduirait à des conflits locaux, régionaux, voire entre pays européens, et à accentuer la concurrence. Ils seraient contre-productifs. C'est dans l'échange qu'il faut inventer un avenir plus juste. Le lien entre la circulation des personnes et l'extension des marchés économiques est inévitable. Mais que cherche-t-on en réalité? A renforcer davantage encore la subordination des travailleurs aux patrons? Pourquoi continuer d'ignorer que les causes des migrations internationales ne sont pas seulement économiques mais aussi politiques et culturelles? Que pensez-vous du nouvel avant-projet Debré? Cet avant-projet consacre implicitement le succès du mouvement des sans-papiers. Il reconnaît l'existence de situations inextricables, la nécessité de clarifier la loi et il propose d'en régulariser certaines. Mais il Migrations internationales reste dans la logique habituelle de la répression et de la fermeture. Il renforce les moyens policiers qui vont encore une fois s'avérer inefficaces : le constat de cette inefficacité apportera de l'eau au moulin de l'extrême droite. Il y a fort à parier que la majorité parlementaire durcisse encore le texte. Je crois vraiment qu'il est temps de se battre pour un changement radical de logique à propos des politiques migratoires. C'est manifestement le but des Assises que le coUège organisera dans le courant du mois de novembre. Il s'agit de réfléchir collectivement à une autre politique nationale concernant les flux migratoires et d'envisager d'autres modes de coopération internationale. La philosophie est celle des droits fondamentaux de la personne humaine et de la Convention européenne des droits de l'Homme. Comment, par exemple, parler sérieusement d'aide au tiers-monde quand on sait que seulement 16 % des crédits de la coopération vont au développement? Voilà le genre de question qu'il faudra soulever. Une autre politique de développement ne peut pas être à sens unique. @"page 4 l'ÉTÉ AFRICAIN Eric Lathière-Lavergne présente ici un bref panorama des actions locales en faveur des sans-papiers. L 'ETE, qui fut incontestablement ce lui des sans-papiers, a mobilisé toutes les forces attachées aux droits de l 'Homme. Tous les comités, de Brest à Menton, en passant par Lille ou Montpellier, se sont engagés dans la solidarité avec eux. Flash-back sur l'intense activité locale de ces derniers mois. Après les manifestations du 15 juin contre le projet Debré et pour l'abrogation des lois Pasqua, l'été s'engageait sur une bonne voie: la préfecture de Lille lâchait du lest et faisait preuve de bon sens. A l'issue de 14 jours de grève de la faim, cette préfecture délivrait des cartes de résidents ou des récépissés aux parents d'enfants français, en cas d'avis favorable de la commission de séjour. Plus de 250 dossiers ont été traités au cas par cas. C'était un bon début qui ne présageait en rien la violence du 23 août. Après l'expulsion de Saint-Bernard, on a manifesté, et souvent en nombre. A l'appel de collectifs marseillais, lillois ou messins, et partout en France, nombreux étaient les militants à former les cortèges de la manifestation internationale des sanspapiers le 28 septembre. Les actions ont revêtu des formes variées : le « numéro zéro» du journal du MRAP de Montpellier a vu le jour en de telles circonstances alors que Roland Lamet, président du CL de Saint-Nazaire, soulignait que les« sans droits ne sont pas seulement les sans-papiers » et élargissait le débat aux « sanslogement » et aux« sans-travail ». Dans le même temps, Nice rappelait que sa permanence d'accueil, tenue notamment avec Différences n° 179 novembre 1996 l'aide de la CIMADE, existait depuis 1991. Ces dernières années, sa périodicité s'est accélérée: elle est bi-hebdomadaire. Les résultats ne se sont pas fait attendre puisque sur 72 dossiers introduits auprès de la préfecture, 30 récépissés ont été délivrés. D'ailleurs, à propos de deux dossiers présentés à la commission de séjour, « le juge s'est irrité et s'en est pris à la préfecture en s'étonnant que ces personnes n'avaient pas reçues de récépissé ». « Pour que soient régularisées les conditions de séjour et de travail des exilés algériens en France » : tel était le mot d'ordre du comité de Besançon qui mettait à profit la commémoration du 17 octobre 1961 pour rappeler au préfet du Doubs et au Premier ministre, en manifestant dans la rue, que la lutte des sans-papiers n'était pas terminée. Toutes les formes d'expression ont été utilisées : communiqués de presse comme à Valréas, démarches auprès de députés à Privas, rédaction d'un poème d'un militant du MRAP du 20ème arrondissement de Paris, dédié à Madjiguen Cissé à la manière du célèbre « 1 have a dream » du pasteur Martin Luther King. Nous n'avons pas pu évoquer ici l'ensemble des actions, mais il nous faut ajouter le message d'un adhérent vivant à Madagascar nous rappelant dans son courrier le propos d'Elie Wiesel, prix Nobel de la paix: « Un être humain est libre, non quand l'autre ne l'est pas, mais quand l'autre l'est aussi. » • Eric L.-L. • Il Cela suppose des propositions à trois niveaux: national, européen et international. Poursuivre le système du parachutage d'une aide qui profite surtout à des fonctionnaires corrompus et inonder les marchés de produits de consommation, c'est continuer à jouer sur la pauvreté des autres et accroître leur dépendance. Nos Etats ne peuvent pas persévérer dans l'exploitation de la main-d'oeuvre clandestine tout en tenant un discours sur l'Europe sociale: ça sonne faux! Il n'y aura pas d'Europe sociale tant que l'on continuera à se satisfaire d'une gestion policière des flux migratoires sous le prétexte de lutter contre l'immigration clandestine. L'avenir des échanges est un avenir contractuel : il ne réside pas dans l'imposition de règles rigides et injustes. Le contrat signifie des obligations réciproques entre des parties qui se reconnaissent à égalité. Quelle est votre méthode de travail pour préparer ces Assises? Nous avons demandé aux partis, syndicats, associations, experts de formuler leurs propositions quant à une nouvelle philosophie des migrations internationales. Nous en présenterons une synthèse autour de trois grands axes: le niveau législatiffrançais, la politique européenne et les moyens de la coopération internationale .• Propos recueillis par Chérifa Benabdessadok Les Assises auront lieu le 18 novembre à Paris. Des responsables nationaux du MRAP ont été auditionnés par des membres du collège des médiateurs. Jacqueline Costa-Lascoux est l'auteur de plusieurs ouvrages dontLes trois âges de la laïcité paru cette année chez Hachette. ---Agenda--- De nombreuses initiatives sont annoncées pour ce mois de novembre. Avec notamment: • La rencontre européenne de soutien aux sans-papiers, préparée par un groupe d'associations issues de l'immigration les 16 et 17 novembre. • Une manifestation nationale le 30 novembre. Pour la régularisation Pour une révision radicale des politiques d'immigration Dix associations de solidarité se sont regroupées dans un collectif appelé « groupe des dix» afin de lutter plus efficacement aux côté des sans-papiers. Nous publions le texte de la plate-forme commune. La longue lutte des sans-papiers, à laquelle le gouvernement oppose fins de nonrecevoir et brutalités, pose publiquement la question, toujours éludée, des conséquences de vingt-cinq ans de législations successives supposées fermer les frontières. Ces politiques, reposant sur la pensée unique de la fermeture des frontières et sur le mythe de l'immigration zéro, sont, à l'ère de la mondialisation, irréalistes et dangereuses: - elles désignent l'étranger comme responsable principal du malaise social et de la crise (chômage, insécurité, etc ... ), ce qui permet d'occulter l'absence de projet politique apte à s'attaquer aux causes réelles de la misère et de l'inégalité sociale, aux plans national, européen et international; - elles génèrent et accroissent cette inégalité sociale et les injustices; - elles participent à la remise en cause des droits sociaux et du droit du travail en alimentant le travail illégal; - elles déstabilisent et fragilisent les étrangers en situation irrégulière, ainsi que les Français originaires des DOM-TOM et d'origine étrangère; - elles favorisent le racisme et la xénophobie; - elles sapent ainsi les fondements de la démocratie en stigmatisant les étrangers, leurs proches et les Français qui les soutiennent. Face à cette situation, les organisations signataires (1) invitenttous les acteurs de la vie sociale, syndicale et politique, à une large réflexion pour l'élaboration d'une nouvelle politique fondée, en matière d'immigration, sur le respect des principes de justice sociale, d'égalité des droits et de libre circulation. Une telle politique doit viser à apporter des solutions aux problèmes mondiaux qui contraignent à l'exil des millions de réfugiés politiques et économiques. Elle doit aussi assurer une coopération qui reconnaisse pleinement les migrants comme partenaires et acteurs de développement. Dans l'immédiat, les associations signataires demandent la régularisation, dans les plus brefs délais, de tous les sanspapiers en France victimes: - des atteintes au droit de vivre en famille (parents d'enfants français, parents d'enfants nés en France, conjoints et concubins de Français, conjoints et concubins d'étrangers en situation irrégulière, jeunes entrés en France en dehors des procédures du regroupement familial, étrangers ayant un proche parent résidant en France) ; - des atteintes au droit d'asile (déboutés du droit d'asile entrés en France avant le 1er janvier 1993, déboutés et exilés dont le retour dans leur pays d'origine comporte des risques pour leur vie ou leur liberté) ; - des exclusions suscitées par la réglementation (étudiants en cours d'études, étrangers atteints d'une pathologie exigeant la continuité des soins médicaux, étrangers ayant une bonne insertion dans la société française ou justifiant d'une relation de travail, étrangers auxquels le titre de séjour n'a pas été renouvelé faute de domicile, victimes de la double peine : prison assortie d'une mesure d'éloignement). (1) Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), Comité des sanslogis (CDSL), Droits Devant, Emmaüs France, Fédération des associations de solidarité avec les travailleurs immigrés (FASTI), Groupe d'information et de soutien des travailleurs immigrés (GISTI), Ligue des droits de l'Homme (LDH), Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP), Secrétariat de la Pastorale des migrants, Service oecuménique d'entraide (CIMADE) A SIGNALER: un excellent numéro de Plein droit (n032, juillet 1996), la revue du GISTI, consacré en bonne partie aux sans-papiers. On y trouve nombre de documents tels que les textes du collège des médiateurs, une chronologie détaillée de l'action des sanspapiers, une analyse signée Jean-Pierre Alaux sur l'idée de l'ouverture des frontières, et des éléments de jurisprudence. Différences n° 179 novembre 1996 VERS UNE NOUVEllE RÉGlEMENTATION Le gouvernement semble sur le point de légiférer à nouveau sur le stationnement des gens du Voyage. Bertrand Bary explique ici en quoi ce projet est inquiétant. L E MINISTRE de l'Intérieur a annoncé qu'une « réglementation adaptée» serait mise au point d'ici le mois de décembre pour permettre aux municipalités d'accueillir dans les meilleures conditions possibles les gens du Voyage. Il faut, a-t-il déclaré, «donner aux maires les moyens de faire respecter la réglementation. Il s'agit d'un problème extrêmement difficile et complexe. Nous essayons avec les parlementaires de trouver les moyens d'accueillir ces gens, mais aussi de faire en sorte que ceux ou celles qui ne respectent pas la réglementation puissent être expulsés ». Ce dispositif devrait être présenté à l'Association des maires de France. Depuis 1990, l'article 28 de la Loi Besson a été très peu appliqué. Peu de départements ont mis en place un schéma d'accueil (saluons le Val-d'Oise et de l'Oise qui viennent d'en établir). Bien peu de communes de plus de 5000 habitants se sont dotées d'un terrain (1). Un certain nombre de propositions de loi ont surgi pour modifier cet article 28, presque toujours pour donner plus de pouvoir aux maires et sanctionner plus efficacement les Voyageurs en infraction,jamais pour sanctionner les municipalités qui n'appliquent pas la loi. Aussi n'est-ce pas sans quelque inquiétude que nous attendons ce nouveau dispositif. Des deux soucis affichés (accueil dans de meilleures conditions et renforcement des pouvoirs des maires), lequel prédominera: accueil ou répression? Bertrand Bary (1) Notre brochure-enquête: «L'habitat et le stationnement des gens du Voyage )) est toujours à la page ... Si vous ne l'avez pas encore, commandez-la vite! 20 francs l'exemplaire. 10 francs en nombre aux comités et associations. Sankofa, un fIlm à voir Sankofa raconte une histoire dont la toile de fond est l'esclavage aux Etats-Unis.Une jeune mannequin est possédée par les esprits au cours d'une séance de poses photographiques à Cape Coast au Ghana. La forteresse qui s'y trouve servait de lieu de rassemblement des futurs esclaves avant leur déportation. Cette femme, Mona, pénètre dans les dédales du château et va se muer en un autre personnage, l'esclave Shango. C'est le point de départ d'un récit tragique, celui de Shango et des personnes avec lesquelles elle vit dans la plantation. On y voit fonctionner le système esclavagiste, naître et se développer le désir de liberté. Un désir diversement partagé par les différents esclaves, ou carrément rejeté par ceux qui en tirent un profit aussi minime soit~il, tel« l'esclave en chef)) qui semble ne pas comprendre pourquoi d'autres, y compris sa propre mère, se révoltent. Ce film transcende la frontière classique entre documentaire et fiction. Il déploie de nombreuses qualités: une grande beauté esthétique dans le traitement de l'image et de la musique; l'absence de compromis à l'égard des Africains qui participèrent à l'organisation de la traite; un réel talent de conteur, de très bons comédiens. Le réalisateur, Haïlé Gerima, est éthiopien et Sankofa est son sixième film. Un film à voir très rapidement car il ne sort que dans une salle à Paris : au 7 Parnassiens. Le 15 novembre. Chérifa Benabdessadok Différences n° 179 novembre 1996 Actualités -L'école- , menacee Après la police, la RATP et les HLM, le Front national conduit une nouvelle offensive en direction des établissements scolaires. En saisissant l'occasion des élections de représentants de parents d'élèves, il tente de s'infiltrer dans les conseils d'établissements scolaires. Du simple point de vue administratif, la démarche est possible. En effet, des associations de parents d'élèves hors FCPE ou PEEP existent et lors du scrutin d'octobre 94, elles avaient obtenu dans les écoles primaires 47,4 % des sièges, devant la FCPE - 32,04 %, et la PEEP - 7,32 % (les résultats diffèrent sensiblement dans les lycées et collèges). La menace est donc sérieuse car le rôle des parents au sein de ces conseils n'est pas négligeable. Ils peuvent faire entendre leur voix sur le budget et sur toutes les questions relatives aux conditions matérielles et morales de la scolarité des élèves (projet d'école, rythmes scolaires, sécurité, activités périscolaires, etc ... ). Dans les lycées et collèges, ils siègent au sein de la Commission Permanente, dans les conseils de discipline et les conseils de classe. Dans un milieu peu réceptif aux thèses de l'extrême droite, c'est sous l'étiquette du« Mouvement pour un enseignement national )) (MEN) que se dissimulent ses candidats (cf, dans Différences numéro 176, l'article sur le caractère ambigu du sigle et le ton feutré du discours). Arrêter le processus Cette année, le phénomène n'est pas massif (à notre connaissance une dizaine de listes a été recensée) mais c'est précisément au début qu'il faut arrêter le processus. Dans l'école de la République, il ne saurait y avoir la moindre place pour le racisme et la xénophobie. C'est pourquoi le MRAP a immédiatement demandé au ministre de l'Education nationale d'interdire les listes se recommandant directement ou indirectement du FN, notamment les listes du MEN. Cependant, aussi longtemps que le système d'éducation n'aura pas trouvé de solution pour s'adapter aux exigences nouvelles de sa mission, il existera un terreau favorable pour le FN. Sur ce terrain-là aussi, nous devons nous engager avec les enseignants et les parents. Liliane Lainé • Il Dévelop Ilnfo L'EFFICACITÉ DU COMBAT LA LUITE DES SANS-PAPIERS a ouvert le débat sur l'immigration : aujourd' hui, cette question tend à être reconnue comme un véritable enjeu de société. Mais nous pouvons constater sur ce thème, ainsi que sur celui du racisme, une évolution très contrastée depuis quelques mOlS. D'un côté, soutenant la revendication légitime des « sanspapiers », condamnant les lois Pasqua et la politique de l'immigration menée depuis vingt ans, de nombreuses voix s' élèvent pour réclamer l'élaboration d'une nouvelle politique. C'est d'ailleurs le sens des Assises sur l'immigration proposées par les médiateurs du collectif de Saint-Bernard. De l'autre côté, nous assistons à une double radicalisation: celle du gouvernement à travers ses mesures répressives, celle de Le Pen à travers un discours encore plus ouvertement musclé. Les sans-papiers ont su créer un mouvement de sympathie dans l'opinion. Lamanifestation du 28 septembre et les six cents scientifiques qui à l'initiative du MRAP ont signé le texte du professeur Jacquard ne font que conforter cette impression. Relever le défi Dans ce contexte, l'enjeu est de taille pour le développement de notre Mouvement: s'il veut véritablement relever le défi et répondre d'une manière offensive, il doit réussir à mobiliser l'ensemble des forces et des bonnes volontés. En d'autres termes, alors que les militants sont toujours plus sollicités, les structures locales doivent être réellement capables de « tenir le choc ». Et nous savons tous que cette capacité d'action et de réaction dépend inévitablement du nombre de militants actifs. Ce qui pose avec acuité la question du renouvellement des cotisations, de l'adhésion, de la circulation de l'information par Différences, la Lettre du secrétariat ou les publications locales ... Où en sommes-nous aujourd'hui? Grâce aux actions multiples des comités locaux et aux campagnes nationales, notre Mouvement attire de plus en plus de sympathie; cela se traduit par des adhésions nouvelles (très souvent liées au désir d'agir concrètement), la création de nouveaux comités et des demandes de documentation en progression très sensible. Quant au taux de renouvellement des cotisations, il était fin octobre de 94 %. Un résultat intéressant mais qu'il faut néanmoins nuancer: de fortes inégalités entre comités locaux indiquent que de nombreuses cotisations ne sont pas remontées au national ou ne sont pas renouvelées. Cela doit nous amener, dans le courant de ce dernier trimestre, à apporter une attention toute particulière à la relance des cotisations et à la traduction de ce courant de sympathie en adhésions. Il nous paraît déterminant de consacrer partout l'énergie et le temps nécessaire, dans chaque comité local, à cette question. Le développement du MRAP et donc l'efficacité de notre combat collectif qui sont en jeu. • Jean-Clande Dulieu Secteur développement et formation interne ,-----------------1 Faites connaître le MRAP et Différences dans votre entourage Renvoyez-nous l'encadré rempli et nous ferons parvenir à la personne de votre choix (parent, ami, voisin, collègue ... ) une documentation sur le MRAP. Nom: ........................................................................ . Prénom : ............................................................. . Adresse: .............................................................. .. L _________________ ~ Différences n° 179 novembre 1996 IROIR Arrêtés municipaux anti-Olendicité Plus de quinze mairies, de gauche et de droite, principalement du Sud de la France, ont pris des arrêtés «anti-mendicité ». De « l'occupation abusive des rues» aux « troubles à l'ordre et à la salubrité publiques» en passant par l'interdiction des « regroupements de chiens », les raisons invoquées pour justifier leurs décisions n'ont pas manqué. Au-delà de la quiétude perturbée des vacanciers et de la menace à l'ordre public mentionnées par les maires, ces arrêtés posent la question de la destruction du tissu social français et de l'absence de réelle volonté politique pour lutter contre la misère : la pauvreté ne s'interdit pas. • A Périgueux, environ 150 personnes ont manifesté le 3 juillet dernier devant 1'H ôtel de Ville et Jean-Michel Duretête, responsable de la Fédération de Dordogne, a expliqué que « cet arrêté ne sert à rien, il est antidémocratique et il est déjà prévu dans l'arsenal judiciaire la répression en ce qui concerne la violence ou l'abus d'alcool ». • Alors que le secrétaire d'Etat à l'Action humanitaire, Xavier Emmanuelli, soulignait « le rôle de l'Etat et des associations dans le traitement au cas par cas des exclus dans les municipalités» (Le Figaro du 12 juin), le MRAP et les associations niçoises de défense des droits de l'Homme introduisaient un recours pour excès de pouvoir et« atteintes aux libertés individuelles» alors que les SDF de Nice étaient expulsés , DES ACTIVITES LOCALES par autobus à 12 kms du centre ville. • Situation identique àPau et Menton où le MRAP dans un communiqué estimait que l'arrêté anti-SDF participait «d'une logique d'exclusion inacceptable et dangereuse ». Le Pen àla Grande Motte • Dèsjuillet,unemobilisation avait lieu contre l'université d'été du FN. Ainsi, le 5 juillet notamment, entre 250 et 600 personnes, selon les sources, battaient le pavé grand-mottois à l'appel de plusieurs dizaines d'organisations dont le MRAP de Montpellier. On sait ce qu'il advint du rassemblement du FN : un tonitruant propos sur « l'inégalité des races ». • On notait dans le bulletin Info mrap 13 de juillet édité par la Fédération des Bouches-duRhône, l'échange de correspondances entre le comité de Vitrolles et Bruno Mégret, du bureau politique frontiste. Extraits. Mégret : « J'ai le plaisir de vous annoncer que les' élus du groupe FN ( ... ) ont voté la subvention de fonctionnement que vous aviez sollicitée de la Mairie ( ... ). » Et Mégret de poursuivre sur l'importance de la vie associative qui est d'une « grande utilité sociale ». Enfin, en conclusion, « C'est Monsieur Anglade (maire de Vitrolles) et son équipe qui diminuent aujourd'hui de façon considérable l'aide de la municipalité aux associations ( ... ). Je souhaiterais d'ailleurs qu'une rencontre puisse être organisée entre vous et un membre de mon équipe, afm d'éviter dans l' avenir tout malentendu sur les positions et les choix qui sont les nôtres ( ... ) ». Le bureau du comité de Vitrolles ne l'a pas remercié! Projet d'humour antiraciste • Présence du MRAP Clermont-Ferrand au Forum des Associations les 16 et 17 Novembre. Et à plus long terme ... Exposition de dessins et caricatures de différents pays intitulée «L'humour contre le racisme, du nord au sud» lors de la Semaine nationale d'éducation contre le racisme de mars 1997. Des nouveaux comités • Après deux années de sommeil, le comité de La Verrière (78) va se reconstituer. Il suffit parfois du départ d'une personne pour que l'activité d'un comité décline : cela montre, si besoin est la nécessité d'intégrer, chaque fois que cela est possible, l'ensemble des adhérents dans une logique militante. • Un nouveau comité devrait soutenir dès la fin du mois d' octobre l'implantation du MRAP dans le Tarn. C'est Lavaur, charmant chef-lieu de canton, qui l'accueillera. • Absent depuis trop longtemps de Gironde et de Corrèze, le MRAP devrait faire son apparition à Bègles (33) et à Guérêt (23) avant la fin de cette année; Saint-Clément (89) devrait également développer l'antiracisme et distiller sans parcimonie l'amitié entre les peuples dans l'Yonne. Collectif contre l'extrême droite Dans la Manche, les associations se mobilisent pour contrer le FN. Parce qu'« un parti qui utilise la haine pour arriver au pouvoir est un parti qui mettra en place un régime de haine », les membres d'un collectif contre les idées de l'extrême droite auquel participe le comité de Saint-Lô ont distribué 8 000 exemplaires d'un tract intitulé « Le Front national ment» lors de la foire-exposition de SaintLô début octobre. Semaines de l'éducation antiraciste De décembre à fin avril, des semaines d'éducation contre le racisme auront lieu à SaintNazaire de décembre à avril prochain, pour que « l'antiracisme ne reste pas une idée abstraite ». Dans le n° 37 du trimestriel de la Fédération de Loire Atlantique, Le Pont transcouleur, on pouvait lire cette adaptation du poème attribué au pasteur Martin Niemoller: Quand ils ont arrêté les sanspapiers, Je n'ai rien dit: je n'étais pas sans-papiers. Quand ils ont expulsé les étrangers, Je n'ai rien dit: je n'étais pas étranger. Quand ils ont arrêté les sanslogis, Je n'ai rien dit: je n'étais pas sans-logis. Quand ils ont exclu les chômeurs, Différences n° 179 novembre 1996 Je n'ai rien dit: je n'étais pas chômeur (se). Quand ils ont marginalisé les jeunes, Je n'ai rien dit : je n'étais plus jeune. Quand ils m'ont exclu(e), Il n'y avait plus personne pour me défendre ! Audience du Mouvement Avec les nombreuses manifestations estivales en faveur des sans-papiers, les demandes de documentation ont connu une très forte progression. En effet, en quelques semaines, c'est plus de sept cents demandes qui ont été traitées: au 15 octobre, le taux de retour en adhésions fluctue entre 10 et 20 % .• Eric Lathière-Lavergne Vous pouvez joindre Eric au 0143148358 du lundi au vendredi de 9h à 12h30 et de 14h à 18h. Après le départ de Sabine Giraud, il devient l'interlocuteur des comités locaux. • Il Racisme et justice MIEUX LÉGIFÉRER CONTRE LE RACISME Le projet de loi Toubon destiné à réformer substantiellement la loi contre le racisme a suscité des prises de position très contradictoires. Pierre Mairat, avocat et membre de la présidence du MRAP, a signé un article dans Le Monde que nous reproduisons ici. O VI, LA DIFFUSION des idées racistes tue. C'est au lendemain d'une« fête» organisée par le Front national que deuxjeunes Français d'origine marocaine ont été immolés par des skinheads. C'est encore au cours d'une manifestation organisée par le même parti qu'un jeune Français d'origine maghrébine a été noyé dans la Seine, qu'un autre jeune a été poignardé. L'idéologie raciste foule aux pieds les droits de l'Homme les plus fondamentaux. La combattre exige une action politique qui ne donne pas de contenu ethnique aux problèmes économiques et sociaux et qui ne présente pas l'immigré contre l'exutoire responsable de tous les maux. La loi ne résout pas tout, il n'en reste pas moins qu'elle est un acte politique majeur. Depuis plusieurs années, le MRAP attire l'attention des pouvoirs publics sur l'impérieuse nécessité de modifier l'arsenallégislatif destiné à combattre le racisme et participe dans les rapports annuels de la Commission nationale consultative des droits de l 'Homme à dénoncer les incohérences de la loi. Un double constat Aujourd'hui, à peu près tout le monde s'accorde sur un double constat: - la loi présente de grandes insuffisances; elle est, dans de nombreux cas, inopérante. Il suffit du reste pour s'en convaincre de se référer aux multiples manifestations de racisme restées totalement impunies; - la banalisation des manifestations de racisme s'accroît dans des proportions inquiétantes. ANNONCE DU SERVICE JURIDIQUE DU MRAP La prochaine journée de formation en droit des étrangers se déroulera au siège du MRAP le samedi 7 décembre 1996 de 9h30 à 18h. Programme: - la nationalité - la protection sociale des étrangers - les voies de recours administratifs et judiciaires Il est encore temps de s'inscrire en écrivant à Nina Ventu ra ou à Sophie Pisk. Les raisons qui rendent inefficace la répression des propos ou messages racistes tiennent essentiellement au fait que l' arsenallégislatif est enserré dans le carcan de la loi sur la presse de 1881 destinée à protéger la liberté d'expression. Cette loi dérogatoire au droit commun limite légitimement les infractions attentatoires à la liberté d'expression et impose des règles formelles strictes de mise en oeuvre des procédures. Pour lutter avec une plus grande efficacité contre la diffusion d'idées racistes et xénophobes, on se doit de modifier aussi des règles de procédure totalement inadaptées. Il en va ainsi de la courte prescription de trois mois au-delà de laquelle plus aucune poursuite n'est possible, comme de la qualification juridique des faits, injures ou diffamations - chausse-trappe bien connu des praticiens - qui, en cas d'erreur de la partie poursuivante, annule la procédure. Plus encore, l'auteur des propos diffamatoires peut apporter la preuve de la vérité des faits allégués qui rend alors inexistant le délit de diffamation et renvoie le prévenu des fins de la plainte. Les auteurs des messages racistes utilisent avec perversité ces restrictions pour échapper à la loi pénale. Exemple: les publications racistes gardées sous le boisseau pendant les trois mois de la prescription et diffusées après ce délai à grand tirage en toute impunité. De même, le caractère délibérément abstrait et ambigu des propos racistes de certains hommes politiques rend difficile la qualification juridique des faits alors même que la distinction entre les différentes incriminations ne présente strictement aucun intérêt. Pour lutter avec une plus grande efficacité contre la diffusion d'idées racistes et xénophobes, on se doit, non seulement de modifier les incriminations, Différences n° 179 novembre 1996 mais aussi les règles de procédure totalement inadaptées. Le projet de loi du garde des Sceaux, qui doit nécessairement faire l'objet d'amendements, s'y emploie et on ne peut que s'en satisfaire. Les incriminations doivent être élargies et unifiées. C'est à ces seules conditions que les incitations à la haine, à la violence ou à la discrimination raciale, directes et indirectes, dirigées contre des groupes déterminés ou non seront sanctionnées. Une interprétation trop stricte La loi pénale est d'interprétation stricte. Il y va là aussi de la garantie de nos libertés individuelles; on ne peut pas reprocher aujuge une interprétation restrictive de la loi pénale. Pour ce qui concerne les règles de procédure, certains proposent d'aménager l'actuelle loi de 1881 qui a vocation à protéger la liberté d'expression. Le précédent projet de loi envisageait d'ailleurs l'aménagement des règles dérogatoires contenues dans la loi sur la presse pour ne pas porter atteinte au principe constitutionnel de la liberté d'expression. Ce régime d'exception au régime déjà dérogatoire de la loi de 1881 ne se justifie pas; il est dangereux pour la démocratie, car cela revient à assimiler la diffusion organisée et institutionnalisée des idées racistes dangereuses pour la sûreté publique à une opinion. La manifestation d'une idéologie raciste est un délit, pas une opinion, et plutôt que de précariser la loi de 1881 qui a pour fondement de protéger la liberté d'expression, il suffit de prévoir l'application des règles de droit commun en insérant dans la partie du code pénal consacrée aux atteintes et à la dignité humaine une incrimination regroupant et élargissant le champ d'application des infractions actuelles.
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C'est du reste ce qui a déjà été fait dans le cadre de la lutte contre le tabac ou l'alcool, sans que cela soulève des réserves. La diffusion des messages encourageant la consommation d'alcool et de tabac, qui pourrait être pour certains - au même titre qu'un message raciste - une opinion, est réprimée par les règles de procédure de droit commun. L'article XI de la Déclaration universelle des droits de l'Homme qui considère que la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme, en énonce de la manière suivante la nécessaire limite: «Sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». C'est aux seules conditions d'élargir l'incrimination de l' incitation à la haine, à la violence et à la discrimination raciale, ainsi que d'appliquer les règles de procédure de droit commun, que l'on pourra sanctionner cet abus .• Pierre Mairat Le droit à la dignité humaine L'Observatoire international des prisons publie le premier guide sur les droits des détenus
- Le guide du prisonnier
(1). Tous les aspects de la vie carcérale sont étudiés, du secret de la correspondance au fonctionnement du parloir. Ce guide de 350 pages se présente sous la forme de 550 interrogations simples. Un travail minutieux et utile du point de vue de l'Observatoire qui se veut «le regard du citoyen pour qui la dignité n'est pas affaire de luxe, mais affaire de respect, donc de droit». (1) Bernard Bolze, JeanClaude Bouvier, Patrick Marest et Eric Plouvier, Editions de l'Atelier, 95 francs El Nouvellesduracisme ordinaire. Daniel Zimmermann, Editions du Cherche Midi, en co-édition avec la Ligue des droits de l'Homme et la Ligue de l'enseignement. Le racisme est une des choses les mieux partagées, pourraiton dire à propos du livre de DanieIZimmermann, « Nouvelles du racisme ordinaire ». L'auteur décline cette réalité en quelques pages ou en quelques lignes à propos de nombreuses formes de racisme ou d'ostracisme
- rejet des« autres », des
Juifs, des Arabes, des Noirs, des homosexuels, des handicapés ... L'écriture parfois cinglante de Zimmermann nous rappelle que tout un chacun peut être victime mais aussi auteur de ce« racisme ordinaire » ; le récit épingle la moue réprobatrice de la caissière afticaine à l'égard des clients maghrébins, les phrases assassines du style « s'asseoir dans le bus à côté d'un Noir, non merci !, sans être raciste, ce sont eux qui ont apporté le Sida en France) et quelques détours du côté des enfants : « maman m'a dit que si je continue à donner la main à Yamina,je vais devenir tout noir comme elle» ... Parmi ces scènes du quotidien, prend place une suite logique de faits qui alimentent la chronique judiciaire
- mort de Toufik à neuf
ans, meurtre de Djamel Chettoub tué par des vigiles, meurtre de Habib Grimzi tué par trois légionnaires dans le train Bordeaux-Vintimille et tant d'atures, que nous connaissons trop bien au MRAP. Comme point d'orgue, Carpentras dont Zimmermann rappelle les imitations en d'autres lieux telle que la profanation du cimetière juif d'Herrlisheim ponctuée par l'inscription: « Carpentras, c'était bien. Ici, c'est mieux. » Un livre à lire, pour découvrir ou mieux connaître le style et l'humour de Zimmermann, entre autres des« Nouvelles de la zone interdite », autour de la guerre d'Algérie, et des « Malassis », nouvelle sur une cité « achélème ». Odile Barral, Toulouse o Aux sources du populisme nationaliste L'urgence de comprendre Toulon-Orange-Marignane. Sous la direction de Jean Viard, Editions de l'Aube, 1996. Issu des premières séances des Rencontres de Châteauvallon, et réalisé par la Coordination toulonnaise pour la défense des valeurs républicaines, cet ouvrage rassemble des études de chercheurs connus. Sami RENDEZ-VOUS Livres et agenda N aïr, dans «La place de l'étranger dans la dérive des lois», souligne que l'assimilation, en tant qu'acceptation « des valeurs organisatrices du modèle républicain français» est un comportement public qui ne s'oppose pas à l'expression de la singularité de chacun dans l'espace privé. Il analyse la politique de l'immigration de ces vingt dernières années autour de trois pôles de: l'émergence de la «question immigrée» (1974-1981), l'intégration-fermeture (1981-1993), l'exclusion comme politique nationale (depuis 1993). Concluant sur les conséquences des lois Pasqua- Méhaignerie, il écrit:« Jamais, depuis le vote des lois contre les citoyens français de confession juive en 1940, on n'était allé aussi loin en France dans la persécution. C'est un véritable tournant xénophobe dans la loi française. » Notons aussi les textes de Pascal Perrineau : « Le FN 95 : une question de droite posée à la gauche» , de Daniel van Eeuwen : «Toulon, Orange, Marignane, le Front national au pouvoir: un maléfice méridional ? » ; d'Etienne Balibar : « De la «préférence nationale» à l'invention de la politique: comment lutter contre le néofascisme? ». Laurent Canat Une journée d'étude autour du thème« l'intégration, une mission pour l'école?Les enfants de l'immigration à l'école)) est organisée au Sénat le 22 janvier 1997, à l'instigation de Education et Devenir en association avec les CRAP (Cahiers pédagogiques), la FCPE, la PEEP, la FOEVEN et le MRAP. Au programme? des conférences de Bernard Charlot de Paris VIII et de Martine Abdallah-Pretceille, une table-ronde regroupant des praticiens et un débat au cours duquel deux responsables politiques confronteront leurs points de vue. Cette rencontre est parrainée par Hachette qui en éditera les actes. Pour toute information complémentaire et inscription (impérative) avant le 20 décembre, contactez le secteur éducation du MRAP. Différences n° 179 novembre 1996 • Il EN BREF • Alain Juppé déclare le 19 septembre, lors d'une visite à Montpellier, que M. Le Pen est « profondément, je dirai presque viscéralement, raciste, antisémite et xénophobe . • Cinq partis politiques - Les Verts, MDC, PCF, PS et PRS - ont décidé le 27 septembre de créer un comité national de vigilance élargi aux syndicats et aux associations qui sera chargé de définir des propositions d'actions. CHRONO PO UR MÉMOIRE Disparition de Sabine Zlatyn L'ancienne directrice de la maison d'enfants d'Izieu est décédée au mois de septembre. Cette femme qui avait accueilli et sauvé des enfants juifs de la déportation durant l'Occupation avait conservé la mémoire de ceux qui n'en sont pas revenus. La maison d'Izieu avait été transformée il y a deux ans en mémorial. Le MRAP rappelle que « la figure de Madame Zlatin demeurera parmi celles qui se dressent contre le mensonge et l'inhumanité du racisme. » Amalgame suspendu Manifestation à l'appel du Front national le 14 septembre à Marseille le jour des obsèques d'un jeune garçon dont le meurtrier est un Français d'origine étrangère. Le parti de Le Pen en a fait un thème de campagne raciste. Le sens de la manifestation était parfaitement clair dans le message diffusé sur une ligne téléphonique organisée pour la circonstance par le FN : amalgame habituel entre l'acte d'un délinquant et son origine. LeMRAPetlaLDH de Marseille ont saisi le juge des référés qui leur a donné raison et Maurice Gros, secrétaire départemental du FN, a été condamné à 1 000 francs d'astreinte par nouvelle heure de diffuSIOn. Où est passé I"espoirde paix? La situation en Palestine est si grave qu'on peut dire que l'espoir si important de ces dernières années risque de n'être bientôt plus qu'un souvenir. Rien n'est plus urgent que la mobilisation, en Israël mais aussi dans tous les pays, et chez nous, de tous ceux qui, au-delà de leurs opinions politiques, philosophiques, religieuses, veulent la paix dans la justice. Il faut que le gouvernement israélien cesse de jouer avec le feu et s'engage enfin vraiment dans une négociation sans condition préalable, telle qu'elle est prévue par les accord qui lient la parole de l'Etat. Communiqué du MRAP du 27 septembre. FNP : saisie du Conseil d "Etat Selon L'Humanité (27 septembre), le ministère de la Fonction publique a saisi le 11 septembre le vice-président du Conseil d'Etat pour lui demander son avis sur l'attitude à tenir face à la création du Front national pénitentiaire (FNP) dont les statuts ont été officiellement déposés le 10 septembre. (Cf. Chrono numéro précédent). Deux élus FN condamnés En février 1996, dans le bulletin municipalDunkerque Magazine, deux élus du FN publiaient un texte accompagné d'un dessin relevant du délit de provocation à la haine raciale. La Fédération Nord/Pas de Calais et le Comité Local de Dunkerque, représentés par Maître Patrick Tillie introduisaient alors une plainte. Le vendredi 27 septembre, le tribunal correctionnel de Dunkerque a condamné ces deux élus à 5 ans d'inéligibilité, 50 000 F de dommages et intérêts pour le MRAP et à 15000 F d'amende. Kaboul :Ie désordre extrémiste Les Talibans, mouvement extrémiste islamiste, qui se sont rendu maîtres de la capitale afghane en septembre, ont décrété le 27 septembre l'application de la « loi islamique ». Parmi les premières mesures
- l'interdiction faite
aux femmes de travailler et le port obligatoire de la barbe pour les hommes. Guet-apens préfectoral Le communiqué du ministère de l'Intérieur de juin dernier qui confondait parents d'enfants français et parents d'enfants nés en France a conduit dix enfants et leurs parents, Chinois sans papiers, dans les locaux de la police à Bobigny. Informés de ce communiqué, et se croyant régularisables, les parents se sont présentés à la préfecture de Bobigny fin septembre. Là on leur a demandé de prendre rendez-vous et de revenir avec leurs enfants pour constitution et traitement de leurs dossiers. Le jour du rendez-vous, la poli- CONTRE LE RACISME, L'ÉGLISE DE FRANCE PREND PARTI « Affirmer comme une vérité l'inégalité des races» représente un « danger pour l'ensemble de la société ». Tels sont les termes de la déclaration du Comité Episcopal des Migrations, publiée le 17 septembre. Et la déclaration ajoute qu'une telle affirmation «alimente les comportements racistes, le mépris de l'autre, l'exclusion. Elle est une atteinte à l'identité nationale, fondée sur des valeurs acceptées par tous. Pour un chrétien, ces propos sont inacceptables. (L'Evangile nous rappelle que toute personne humaine, quelle que soit son origine ou sa condition, est sujet d'une dignité absolue qui ne saurait être ni violée, ni méprisée). De son côté, Mgr Lustiger qualifie les propos de M. Le Pen de « magnifique résurgence du paganisme le plus cynique ». Dommage qu'à Tours, Jean-Paul 11- qui a célébré la France « terre d'accueil » et proclamé « la dignité ... de chaque être humain )) - n'ait pas appuyé plus explicitement les prises de position des évêques français. Bertrand Bary Différences n° 179 novembre 1996 ce est appelée, adultes et enfants sont placés en rétention dans les locaux de la préfecture. Ils y passent la nuit. Ils ont été relâchés grâce à l'intervention d'avocats du GISTI, et assignés à résidence. Le Syndicat des avocats de France a dénoncé ce guet-apens. Lapeinede mort est abolie Il y a quinze ans, le 10 octobre 1981, paraissait au Journal officiel la loi dont le premier article stipulait: « La peine de mort est abolie. » Votée en septembre par l'Assemblée nationale et approuvée par le Sénat, l'abolition de la peine capitale entrait ce jourlà en application. Mis à part le Front national et le Centre national des indépendants et paysans, aucun parti politique n'en revendique aujourd'hui le rétablissement. Mais comme le rappelle Le Monde (22/ 23 septembre), des propositions de lois exigeant le rétablissement émanent de parlementaires qui agissent de leur propre chef; ainsi celle d'octobre 1993 signée par cent trentesept députés de droite, dont deux ministres actuels, Guy Drut et Eric Raoult. Cette abolition chère à Victor Hugo et à l'ex-ministre de la Justice, Robert Badinter ne peut désormais être remise en question sans dénoncer tout ou partie de la Convention européenne des droits de l'Homme. Une mission à suivre Plusieurs dizaines de chercheurs et d'étudiants ont assisté à un colloque sur le racisme organisé le 10 octobre par des généticiens français et étrangers au musée de l'Homme. Thème central : le racisme n'a rien à voir avec la biologie et la génétique. « Nous avons un problème de communication, a précisé, le généticien français André Langaney. Pour le dissiper, il APPEL DE ne sert à rien de décréter que les races n'existent pas, il faut partir de la perception de la diversité des hommes par les gens. Et leur expliquer ce qu'elle signifie. » Une mission que le musée souhaite poursuivre. Prix Nobel de la paix « Le jury du Nobel vient de décerner le prix de la paix à Mgr Belon et à José Ramos Horta, héros de la liberté du peuple de Timor, occupé depuis plus de vingt ans par la dictature indonésienne. Le MRAP s'honore de compter parmi ses amis proches José Ramos Horta qui, depuis des années, illustre la volonté du peuple timorais et se dépense sans compter pour cette cause à laquelle le MRAP a toujours apporté son soutien. Cette distinction revient aussi à toutes les victimes, vivantes ou disparues, de la sanglante répression indonésienne. Elle porte un coup LA PERMANENCE D'ACCUEIL DE PARIS La permanence d'accueil et d'aide juridique de Paris, qui a démarré en 1993, a besoin de bénévoles. Les militants qui l'animent ont trouvé là une forme d'action humainement très riche. Ils sont peu nombreux par rapport à la demande: 300 dossiers traités par an pour une moyenne de quatre militants tous les samedis. L'activité de la permanence ne nécessite pas de compétence particulière au départ puisque deux niveaux de formation existent: la formation en droit des étrangers qui est assurée par les deux juristes et la formation pratique lors des permanences au cours desquelles les militants expérimentés travaillent avec les nouveaux militants jusqu'à ce qu'ils acquièrent leur autonomie. Les membres de la permanence ont rédigé une « charte )) qui précise les condition d'organisation et de fonctionnement de l'équipes; nous organisons également des réunions mensuelles. Nous souhaitons vivement élargir notre équipe. Pour prendre contact avec nous, vous pouvez venir le samedi matin au siège du MRAP ou me laisser un message. Alain Ribat sévère à la dictature du général Suharto. Elle survient au moment où dans le monde entier, les amis du peuple indonésien opprimé se mobilisent pour obtenir la libération des prisonniers, qu'ils soient timorais comme Xanana Gusmao ou indonésiens ». Extrait du communiqué du MRAP du 11 octobre. 17octobre 1961 Le MRAP national a commémoré le 35ème anniversaire de la répression violente de la manifestation des Algériens en 1961 en organisant le 16 octobre un rassemblement sur le pont Saint-Michel et la projection d'un film documentaire « Une journée portée disparue» réalisé par des Britanniques. La projection a été suivie d'un débat avec Jean-Luc Einaudi auteur de « La bataille de Paris, le 17 octobre 1961» et Didier Daeninckx auteur de « Meurtres pour mémoire ». J-L. Einaudi était également invité par le comité local de Clermont-Ferrand. Simultanément, un quotidien privé algérien daté du 17 octobre et diffusé en France, dont la une était consacrée à ce fait d'histoire, a été saisi par la police des frontières à Lyon. Après protestation de l'association Reporters sans frontières, qui a d'ailleurs diffusé l'article incriminé sur Internet, le ministère a levé la saisie. Eléments d'information rassemblés par Chérifa Benabdessadok Différences n° 179 novembre 1996 EN BREF • Dans sa livraison d'octobre, la revue Alternatives économiques consacre un excellent dossier au thème : « Economie: ce que le Front national veut faire )). • Un des Africains de Saint-Bernard comparaît le 28 octobre en appel. Il a été condamné après l'évacuation à deux mois de prison et trois ans d'interdiction de séjour. Entre-temps il est victime d'un imbroglio kafkaïen: son identité a été changée, il porte le nom d'une femme. • Conférence nationale du MRAP PH BUlE Les adhérents du MRAP pourront participer à la conférence nationale qui aura lieu les 1"et 2 février 1997. Au moment où ce numéro est fabriqué, un groupe de travail se constitue pour préparer le déroulement de ces journées de réflexion. Jean.Jacques Kirkyacharian a présenté un texte au conseil national du 19 octobre dont voici quelques extraits. LA CONFERENCE NATIONALE est un moment de ré· flexion liée à l'action. Cette réflexion, chaque comité et chaque militant la mène pour son compte au fur et à mesure des actions qui se déroulent. Mais il est important de confronter toutes ces réflexions et utile aussi de faire appel àquelques personnes capables d'cnvisager ces questions avec un certain recul. Le recours à des « experts » n'est pas envisagé comme un moment de « révélation » d'une vérité, mais comme une incitation à poser les problèmes de façon un peu plus précise, peut-être un peu plus hardie . Deux thèmes généraux pourraient être étudiés. 1) Quel racisme, quel antiracisme? Le racisme est à la fois toujours le même et toujours changeant. Les conditions dans lesquelles il se développe changent, elles, forcément, puisque le racisme s'adapte démagogiquement aux circonstances. Le problème de l'insertion politique du Front national se pose depuis quinze ans, mais l'aggravation de la crise le rend plus aigu. La question de l'action unie se pose aussi dans des tennes assez inédits, en cette période de reclassement généralisé des forces et des stratégies. L'environnement politique nous pose également problème
- notre Mouvement est-il
capable, tel qu'il est actuellement, de faire face à ses missions? On ne peut pas repenser le monde parce qu'i! change, sans être amenés à se repenser soi-même. 2) Immigration, émigration Indice important: depuis quelques années les politiciens qui CAMPAGNE MUMIA ABU-JAMAL Seize mols de campagne poursauverMumia : un sursis à exécution obtenu le 11 aoOt 1995 ; environ 250 000 francs de dons envoyés au Commlttee To Save Mumla à New York qulservent il financer l'enquête des avocats; un livre, En direct du couloir de la mort diffusé aujourd'hui à 8 000 exemplaires dont près de 2 000 via le réseau MRAP. La campagne française Sauvons Mumla s'est révèlée particulièrement dynamique et opérationnelle. Elle doit aujourd'hui redoubler d'efforts car les mauvais coups portés il Mumla et à ses avocats continuent. Le dernier en date s'est produit le 1- octobre 1996. A sa vindicte habituelle, le juge Saba a rajouté des méthodes d'Intimidation et de coercition dignes d'un pouvoir autocratique. Ce jour-Iii il a fait arrêter en plein tribunal un témoin favorable à la défense pour un délit mineur n'ayant rien à voir avec le cas de Mumia prouvant ainsi sa détennlnatlon il étouffer toute volx contraire à la sienne. Albert Sabo et les autorités de Pennsylvanie sont prêts il faire exécuter Mumla et la nouvelle 101 signée par Bill Clinton au printemps dernier leurfacllite la tAche en réduisant les pOSSibilités légales d'appel pour les condamnés à mort. Afin que la campagne que nous menons ne se transfonne pas en chronique d'une exécution annoncée, Il nous faut plus que Jamais continuer le travail d'Infonnatlon et de solidarité financière. Avis aux comités locaux qui voudraient organiser des réunions publiques, des débats et des conférences sur et autour de Mumla Abu-Jamall Pour la commission « Amériques . , Marie-Agnès Combesque Mumla Abu-Jamal a, par ailleurs, fait parvenir au Comité de soutien aux prisonniers politique aux Etats-Unis un courrier à propos du mouvement des sans-papiers en France dans lequel Il écrit :Après un siècle de méga-exploltation des réglons du Nordet du Centre de l'Afrique, la fi mère patrie» renvoie chez eux les enfants et petits-enfants de ses ex-coionlsés. fi Allez-vous en 1 », hurle-t-elle. Pour les Africains-Américains en butà un apartheid Intérieur, la France était pourtant devenue un asile contre la répression de leur gouvernement: des artistes et des écrivains tels que Mlles Davis, la divine Nina Simone, James Baldwin ou Joséphine Baker purent respirer librement pour la première fols sur le sol français en tant qu'exilés. D'où notre douleur devant la haine et l'hostilité auxquelles sont confrontés nos frères néo-colonlsés au bord de l'expulsion. (Extrait). Différences n° 179 novembre 1996 pratiquent la xénophobie ne manquent jamais de filer quelques couplets sur la nécessité de prendre le problème de l ' émigration << à la source » et de se poser en apôtres de développement du Sud. Les militants du MRAP sont harcelés de questions sur les flux migratoires et ils s'en posentévidemment eux-mêmes. Le mérite de l 'action des sans-papiers, comme de l'initiative des médiateurs - qui se sera déroulée lorsque la Conférence se réunira - est d'avoir clairement mis en évidence cette réciprocité de l'immigration et de l 'émigration. Le MRAP doit non seulement se donner une conception clai re, explicite de cette réciproci té, mais il lui faut envisager quel genre d'action il peut mener pour favoriser une évolution favorable de cette donnée majeure .• Jeao4.cques Kirky.c:b.ri. n 89. ruc Oberkampf 75543 Paris Cedex II Tél.·Ol 43 14 8J 53 Télécopie :0143 14 8J 50 • Directeur de la publication Mouloud Aounit • Gérant WrMvole Martial Le Nancq • Rédactrice en chef Cherifa Benabdessadok • Administration - gestion Patricia Jouhannet • Abonnements Isabel Dos Martires 120 F pour II numéros/an 12 F le numéro • Maquette Cherira Benabdessadok • Impression Montligeoll Tél. :0233858000 • Commission paritaire nO 63634 ISSN 0247·9095 Dépôt légal 1996-11 1
Notes
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