Différences n°232 - septembre 2001

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Sommaire du numéro

n°232 de septembre 2001

  • Mouvement: échos alsaciens
  • octobre à Paris
  • Logorrhée raciste à Pointe-à-pitre
  • Dossier: Premier congrès mondial contre la peine de mort
    • Pour une abolition universelle par R. Le Mignot et M.A. Butez
    • L'appel de Strasbourg
    • La peine de mort nuit gravement à … l'image des états-unis d'Amérique
    • Pour que l'abolition entre dans la réalité de nos vies par Mumia Abu-Jamal
    • Déclaration finale du congrès
  • L'esclavage: un crime contre l'humanité

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Texte brut du numéro

Mouvement oontre le racisme et pour l'amitié entre les peuples Septembre 2001 - W 232 Premier Congrès mondial contre la peIne de mort Mouvement , Echos alsaciens Lors du Premier congrès contre la peine de mort (lire dossier pages suivantes), le Mrap a disposé d'un stand dans la salle du centre de Strasbourg où se tenaient les débats. Un moment ,important dans la vie associative de la capitale alsacienne. Echos des comités de Bouxwiller-Saverne et de Strasbourg. LE Comité départemental du Mrap créé en 1997 a rapidement essaimé en trois comités locaux: Bouxwiller-Saverne, Niederbronn et Strasbourg. Chacun fonctionne selon son autonomie mais ils s'associent le cas échéant pour tel ou tel événement. A Bouxwiller-Saverne, pour inscrire le combat contre le racisme dans la proximité et le quotidien, nous avons décidé d'ancrer particulièrement nos actions de sensibilisation et de prévention sur le terrain local en collaboration avec des partenaires divers: • Présentation d'expositions du Mrap et interventions dans divers collèges ou lycées du secteur. • Projections de films (exemple comme la série de courts-métrages « Pas d'histoires» suivies d'une discussion (collège de Wingen). • Présentation (à Bouxwiller et Ingwiller) avec l'Observatoire régional de l'Intégration et de la Ville d'un film sur l'intégration de la population immigrée dans la région, suivi d'un débat. • Réunionspubliques(Saverne,Bouxwiller) sur des thèmes comme la discrimination au travail ou à l'embauche, le droit de vote des étrangers, les crispations identitaires, les mariages mixtes. Immigration ACCÈS À L'EMPLOI ET NATIONALITÉ. Plus de vingt associations oeuvrant dans les domaines des droits de l'Homme et de soutien aux immigrés, ont adressé, une lettre au Premier ministre dans laquelle elles lui demandent de prendre les décisions suivantes: - utiliser ses pouvoirs réglementaires pour abroger les textes qui soumettent à condition de nationalité nombre d'emplois dans les entreprises publiques, les organismes de sécurité sociale, les professions judiciaires et une série de professions privées, pour se conformer aux dispositions de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen assurant l'égalité de tous. - Abroger les conditions de nationalité concernant des concessions de service public, certaines professions judiciaires, du transport maritime et d'autres, découlant de textes législatifs contraires aux engagements internationaux de la France, notamment la Conven- 2 Différences nO 232 Septembre 2001 • Participation depuis plusieurs années à la Fête du Monde de Saverne (manifestation multiculturelle ). • Interventionsponctuelles auprès d 'éluslocaux quand nous sont signalés des cas susceptibles de relever de la discrimination raciste. • Rencontre avec les dirigeants de la Ligue alsacienne de football pour les sensibiliser à la prévention du racisme tant sur le terrain que dans les gradins. • Interventions (dans la presse, auprès des autorités préfectorales, auprès des élus locaux) pour arrêter la vague de xénophobie qui s'était manifestée à La Hoube-Dabo après le rachat par une association islamique du Home St Léon. Les grands axes de l'activité du comité de Strasbourg: • Le travail juridique se fait en lien avec un réseau d'avocats et le suivi médical grâce à un collectif de médecins sous la forme d'un « parrainage ». • Le Comité local a également ouvert un CCP pour soutenir l'action des Roms de Zamoly, ces quarante-sept personnes arrivées de Hongrie il y a un an et demandant l'asile à la tion européenne des droits de l'Homme. - saisir le Parlement pour permettre l' ouverture des professions de santé (médecins, chirurgiens- dentistes, sage-femme, pharmaciens, vétérinaires ... ), judiciaires (avocats), comptables et financières, des pompes funèbres, etc. Le Mrap fait partie des signataires, coordination assurée par le Gisti. AVENANT FRANCO-ALGÉRIEN. Le Il juillet dernier, les gouvernements français et algérien ont signé un nouvel avenant à l'accord bilatéral de 1968 qui fixe le régime particulier des immigrés venus d'Algérie. Ce texte entrera en vigueur une fois ratifié par les deux Parlements. Jusque-là les Algériens continueront à ne pas bénéficier du régime de droit commun: pas de titre de séjour pour les ressortissants entrés avec un visa inférieur à trois mois, pas de carte pour les retraités, pas d'autorisation de résidence pour les pa- France. Une partie de ces Roms a obtenu l'asile depuis quelques semaines. • Dansledomainedesdiscriminations,leCL suit actuellement plusieurs dossiers. La création d'un lieu d'accueil pour les personnes discriminées a été évoquée lors de nombreuses réunions et la structure strasbourgeoise a choisi de rejoindre un projet déjà existant qui devrait voir le jour cet automne. • Le comité est également en contact avec la Cellule Jeune de la mission locale du centre ville et rejoint Ras l'Front Strasbourg sur des actions communes. • Semaine d'éducation contre le racisme: organisation de rencontres dans les établissements scolaires, débats sur le racisme, interventions de conteurs ... • Et depuis sa création, le CL est présent et fidèle au soutien à Mumia Abu-Jamal. Régulièrement les adhérents et sympathisants à la cause se retrouvent devant le consulat des Etats-Unis pour demander sa libération. Des séances de signatures de pétitions et des rencontres sont organisées à Strasbourg permettant d'évoquer la situation inhumaine dans laquelle se trouvent Mumia et de nombreux condamnés aux Etats-Unis. La mobilisation dans les rues de Strasbourg lors de la manifestation contre les exécutions capitales a montré qu'une fois de plus les Alsaciens étaient soucieux des droits de l'Homme. rents d'enfants français. La réforme devrait apporter de nombreuses améliorations dont on citera: - la création du certificat de résidence d'un an pour les scientifiques et les professions artistiques; - la création du certificat d'un an mention « vie privée et familiale» ; ainsi, les conjoints de Français pourront dès la première année de mariage obtenir un titre de séjour temporaire s'ils sont régulièrement entrés en France. Les parents d'enfants français pourront prétendre à la régularisation. Les Algériens justifiant d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans (et non plus quinze ans) auront droit à un titre de séjour. On peut regretter que le droit au séjour de certaines catégories de personnes (telles que les anciens combattant dans l'armée française) n'ait pas été abordé. Octobre à Paris DE NOMBREUSES activités vont marquer la commémoration du 17 octobre 1961. A l'heure où nous mettons ce numéro sous presse, le collectif national prépare une manifestation nationale qui devrait comme à l'accoutumé aboutir au pont Saint-Michel tandis que des démarches sont entreprises auprès de la mairie de Paris pour la création d'un lieu de mémoire en hommage aux victimes. Par ailleurs, il faut signaler la parution d'un livre sous la direction d'Olivier Le Cour Grandmaison aux éditions La Dispute (recension à venir) - « Un crime d'Etat à Paris» - auquel ont notamment collaboré Etienne Balibar, Jean-Luc Einaudi, René Gallissot, Nabil Farès, Benjamin Stora, et bien d'autres. Le Forum des Images proposera du 16 au 21 octobre une série de documents cinématographiques ainsi que des rencontres. Un nouveau documentaire «Dissimulation d'un massacre », réalisé par Daniel Kupferstein sera projeté en avant-première le 16 octobre puis les jours suivants. Toujours au Forum, ce même jour, un spectacle de Mustapha Aouar avec Sapho. Signalons enfin que le groupe communiste du Sénat a déposé une proposition de loi tendant à la reconnaissance de la répression de la manifestation à Paris le 17 octobre 1961. Dans l'exposé des motifs les sénateurs soulignent

«Depuis peu le voile se lève et les

études se multiplient. Il est temps, comme cela se fait sur l'utilisation de la torture durant la guerre d'Algérie, cette dernière reconnue depuis peu, d'établir la vérité et de rendre hommage aux victimes ». Les auteurs de la proposition de loi « proposent donc, que la France, par la voix de son Parlement, reconnaisse, quarante ans plus tard, cette tragique journée du 17 octobre 1961. » Logorrhée raciste à Pointe-à-Pitre LE MRAP ainsi que le Gisti et la LDH sont parties civiles dans une affaire d'incitation à la haine « raciale» qui défraie la chronique à Pointe-à-Pitre. Le déroulement des faits est assez stupéfiant: animateur d'une télévision privée, Canal 10, et conseiller régional, Simon Ibo profère quotidiennement des propos violemment racistes à l'encontre des immigrés, tout particulièrement des Haïtiens et des Dominicains. Et cela semble-t-il depuis plusieurs mois, voire des années. Ainsi, selon un article du Monde (daté du 18 août) « une militante féministe, George Tarer, figure de la gauche à Pointe-à-Pitre, avait porté plainte en avril 1997. Elle a fini par la retirer en décembre 2000, devant les lenteurs d'une procédure judiciaire ». Pourtant, cet homme pour qui « Jean-Marie Le Pen est un petit écolier en cours préparatoire », n'hésite pas à appeler la population française à chasser les étrangers hors de Guadeloupe en les qualifiant de « vermine », « racaille », « d'indésirables », de «bêtes à diable », de« nègres », « couillons », « paresseux » et« incapables », « qu'un chien a plus En très bref ______ _ De l'Indochine à l'Algérie, pratiques et idéologies des mouvements de jeunesse, c'est le thème d'une colloque qui se tient les 27, 28 et 29 septembre à l'Ecole normale de Paris. On s'y intéressera, entre autres sujets, aux Scouts musulmans d'Algérie vus par les serde valeur qu'un haïtien », etc. Le CSA a bien été alerté dès mars 2000 par le maire et député (app. PC) de Saint-François, Ernest Moutoussamy, mais sa réaction est resté étonnamment molle: il s'est contenté de relater les faits dans sa Lettre d'Information en notant que la chaîne "s'est retrouvée au centre d'une polémique mettant en cause son animateur- vedette, Ibo Simon, pour défaut de maîtrise de l'antenne et propos racistes". Au cours de l'été, des violences ont succédé aux propos; ainsi, une famille originaire de la Dominique a échappé de peu à un lynchage tandis que la vice-consul de la Dominique s'est fait agresser à la sortie de son domicile par une femme qui, en la frappant, lui a reproché d'être une« salle Blanche qui s'occupe de sales nègres ». Un collectif d'associations haïtiennes de Pointe-à-Pitre intitulé« Appel contre la barbarie » a déposé le 20 juillet une citation directe visant l'animateur et la chaîne pour « provocation et incitation à la haine raciale ». La première audience initialement fixée au 5 septembre a été reportée au 14 novembre. vices de renseignements et à la « fabrication» du nouveau héros par la guerre de libération algérienne. T : 06 874405 71. A Niort, Peuples d'Ici et d'Ailleurs, le Mrap et l'Unesco organisent conjointement le 22 octobre une conférence intitulée « Pourquoi une identité culturelle? ». , Editorial 17 octobre 1961/2001 Le 17 octobre prochain, quarante ans se seront écoulés avant que cette ratonnade d'Etat, en plein coeur de Paris, sorte enfin des oubliettes de l'Histoire. Nos efforts tenaces, déployés chaque année depuis dix ans, trouvent aujourd'hui enfin quelques aboutissements. Lors du premier rassemblement le 17 octobre 1991, nous n'étions qu'une poignée de militants à déposer une gerbe de fleurs au pont SaintMichel d'où furent jetés des Algériens venus manifester paCifiquement en faveur de la paix et du respect de leur dignité. Il n'est pas loin le temps où notre demande d'entrevue pour l'ouverture des archives trouvait comme seule réponse le mépris ostentatoire de la préfecture de police de Paris. La mobilisation obstinée de quelques associations, d'historiens et de personnalités, de certains élus politiques, parfois soutenus par leur parti, a permis de faire avancer la quête de vérité. Désormais les langues se délient, justice reconnaissance sont exigés, témoins et victimes racontent, les anciens bourreaux s'expriment... Une immense aspiration vient soutenir l'indispensable condamnation de la torture tandis que la reconnaissance par l'autorité pol itique des exactions commises au nom du peuple de France devient une exigence. Celle-ci permettra de rendre justice aux victimes, à leurs familles et à leurs proches et de reconnaître ceux qui à l'époque résistèrent, parfois dans un grand isolement, au nom de valeurs forgées souvent dans une autre guerre, dans la Résistance ... Le devoir de mémoire participe de la construction d'un avenir commun entre le peuple algérien et le peuple français. Il reste un élément incontournable pour que les jeunes Français issus de l'immigration algérienne se sentent pleinement membres de la communauté nationale. Car ce qui donne le sentiment d'appartenir à un peuple c'est la conscience de vivre une communauté de destin, enracinée dans une histoire commune qui doit être reconnue dans toutes ses dimensions. Enfin, dans la persistance du racisme anti-algérien se profilent le non-dit et le refoulement. C'est aussi pourquoi la reconnaissance de ces événements d'octobre 1961, comme la lecture de cette page tragique qu'est la guerre d'Algérie, constituent un levier puissant pour tous les antiracistes. Mouloud Aounit Différences n° 232 Septembre 2001 3 DOSS ER Pour une abolition générale et universelle La ville de Strasbourg a accueilli les 21, 22 et 23 juin le premier congrès mondial contre la peine de mort organisé par l'association Ensemble contre la peine de mort et de très nombreux partenaires. Les grandes lignes de cet important événement par Renée Le Mignot et Marie-Annick Butez. LA MORT n'est pas lajustice »: le pre- « mier congrès mondial des abolitionnistes s'ouvrait à Strasbourg le 21 juin 2001 sur cette déclaration de Michel Taube, président de l'association Ensemble contre la peine de mort. A ce jour, plus de la moitié des Etats de la planète a renoncé à exécuter des condamnés à mort. Chaque année de nouveaux pays rejoignent le camp des abolitionnistes, le dernier en date étant le Chili. L'abolition de la peine de mort est en voie de devenir une revendication forte de l'opinion internationale, comme faisant partie intégrante des droits de l'Homme au même titre que la condamnation de la torture. Ainsi que l'a déclaré la présidence suédoise de l'Union européenne « la peine de mort est la forme ultime de traitement cruel et dégradant ». Jamais la peine de mort n'a été dissuasive, elle ne fait qu'absoudre le crime. Pourtant il reste de puissants verrous qui freinent le mouvement irréversible vers l'abolition universelle, parmi lesquels l'obstination des Etats Unis et de la Chine à poursuivre la mise à mort légale. L'objectif du premier Congrès abolitionniste est de faire pression sur les pays qui pratiquent toujours la peine de mort et de soutenir les abolitionnistes qui luttent dans des conditions souvent difficiles. Et puis, comme tout progrès de l'Humanité, aucune conquête n'est définitivement acquise : la vigilance s' impose. Dans les pays qui ont aboli, parfois contre la majorité de l'opinion publique, il faut continuer le travail pédagogique. De la même manière que nous ne pouvons accepter le« je ne suis pas raciste mais ... », nous ne pouvons tolérer le« je suis contre la peine de mort sauf pour les crimes les plus odieux» de l' ambassadeur des Etats-Unis en France en réponse au courrier qui lui a été' adressé au nom du collectif Ensemble Sauvons Mumia. Non, Monsieur l'ambassadeur, vous n'avez pas raison et de surcroît dans votre pays, la peine N de mort n'est pas appliquée pour les crimes ~ les plus odieux ou alors cela signifie-t-il que ~ le fait d'être noir, d'être pauvre constitue§ « l'un des crimes les plus odieux» ? Le cri- ~ me le plus odieux qui puisse être commis est ~ bien celui qui reçoit la qualification de «cri- @ 4 Différences nO 232 Septembre 2001 me contre l'Humanité ». Or, les deux Tribunaux internationaux (celui de La Haye concernant l'ex-Yougoslavie et celui d'Arusha sur le génocide rwandais), qui jugent actuellement des responsables de crimes contre l'Humanité, ont décidé que la peine maximale requise serait de trente ans de prison. Quel que soit le crime pour lequel elle sera désormais requise, au regard de cette décision la peine de mort n'aura plus aucun sens. C'est l'esprit de la déclaration émouvante faite dans l' enceinte du Conseil de l'Europe par le prince Norodom Ranariddh, président de l'Assemblée nationale du Royaume du Cambodge: « Représentant d'un pays qui a souffert, à un degré encore jamais atteint jusqu'à ce jour, des abus et des horreurs de la mort infligée systématiquement par les détenteurs momentanés de l'autorité publique, je m'associe sans réserve, au nom du peuple khmer cruellement éprouvé, à vos efforts pour une abolition générale et universelle de la peine capitale ». Le Conseil constitutionnel du Cambodge a garanti le bénéfice de l'interdiction du recours à la peine de mort y compris pour les dirigeants Khmers rouges responsables du génocide. Quelle leçon pour le monde entier! Le Congrès de Strasbourg a été un rendez-

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@ vous politique - appel solennel lancé au Parlement Européen par vingt présidents de Parlements venus de tous les continents (lire cicontre), militant - colloque international organisé au Conseil de l'Europe par les ONG, citoyen - avec la marche de cinq mille abolitionnistes de différents pays le samedi après midi dans Strasbourg. Des abolitionnistes des cinq continents ont pu se rencontrer, échanger leurs expériences, définir ensemble des stratégies pour que de nouveaux pays abolissent la peine de mort dans un avenir proche. Élaboration de stratégie, réflexion, témoignages se sont succédé. Moment d'émotion intense lors du témoignage de familles de victimes opposées à la peine de mort: celui d'une mère qui déclare « Je ne veux pas que l'on tue au nom de mon enfant », ceux d'anciens condamnés à mort innocentés tel Michael Pardioux, un Américain qui a passé trente et un ans dans le couloir de la mort pour un crime qu'il n'a pas commis, et qui, une fois innocenté a été condamné à la prison à vie pour tentative d'évasion! Défendu par Thomas Lemaire, il est aujourd'hui en liberté conditionnelle jusqu'en 2006 et son visa pour Strasbourg lui a été refusé. A la moindre infraction (stationnement interdit par exemple), il re- La manifestation silencieuse du 23juin a rassemblé cinq mille personnes tourne en prison à perpétuité! Moment d'émotion aussi lorsque du fond de l'enfer qu'est le couloir de la mort nous parvient la voix emegistrée de Mumia Abu-Jamal saluant les congressistes (pages 8 et 9) ou encore celle de Robert Meerepol, fils cadet de Julius et Ethel Rosenberg remerciant de la tribune le Mrap pour son combat au coté de sa famille. Plusieurs initiatives ont été lancées à Strasbourg: l'appel solennel des congressistes (texte page 10) va être repris pour devenir une pétition internationale, la proposition d'une journée mondiale officielle contre la peine de mort ... Walter Schwimmer, secrétaire général du Conseil de l'Europe, a conclu cette importante rencontre par cette phrase

« le combat contre la peine de mort est

avant tout un combat pour l'inviolabilité et l'universalité du droit à la vie ». C'est pour cela que c'est aussi l'un des combats du Mrap . • Renée Le Mignot et Marie-Annick Butez représentantes du Mrap à Strasbourg « un combat pour l'inviolabilité et l'universalité du droit à la vie ». Walter Schwinmer, Secrétaire général du Conseil de l'Europe ____En semble cont!e_/oJ'eine L'Appel de Strasbourg N OUS, présidents des Parlements nationaux et internationaux, signataires de cet appel Sommes convaincus que la peine de mort viole le plus fondamental des droits de la personne humaine - le droit à la vie - un droit que reconnaissent les instruments régionaux et internationaux de protection des droits de l'Homme. Parce que son application est irréparable; Parce qu'aucun système de justice pénale ne saurait exclure le risque de condamner des innocents. Parce qu'en outre son application est souvent discriminatoire; Parce qu'il n'est nullement établi que cette peine soit plus dissuasive que d'autres; Nous considérons que la peine capitale constitue une sanction inadéquate, d'autant qu'il existe des moyens pour combattre la grande criminalité tout en respectant les droits de l'Homme. Nous soutenons le vaste mouvement en faveur de l'abolition de cette peine, qui a conduit à sa disparition dans plus de la moitié des Etats de la planète. L'Europe a, dans ce combat, fait preuve de la plus grande détermination. Le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ont conduit des actions et adopté des instruments juridiques marquants, et en particulier: - le protocole n° 6 à la Convention européenne des droits de l'Homme, visant l'abolition de la peine de mort en temps de paix -l'appel à l'abolition universelle de la peine de mort contenu dans la Déclaration finale du Deuxième sommet de chefs d'Etats et de Gouvernements du Conseil de l'Europe en octobre 1997 ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, proclamée à Nice le 7 décembre 2000, qui confirme que nul ne peut être condamné à mort ni exécuté; - les « orientations pour une politique de l'Union européenne à l'égard des pays tiers en ce qui concerne la peine de mort », adoptées en juin 1998 par le Conseil des ministres, en faveur de l'abolition universelle et inconditionnelle de la peine de mort, Nous nous réjouissons de voir se former et s'étendre un consensus politique à l'échelle universelle en faveur de l'abolition de la peine de mort, ce dont témoignent, entre autres: - le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, - les résolutions récentes de la Commission des droits de l'Homme des Nations Unies de 2001, appelant, entre autres, les Etats qui appliquent la peine de mort à réduire le nombre d'infractions passibles de la peine capitale et à établir un moratoire sur les exécutions, Pour toutes ces raisons, considérant le rôle et la responsabilité qui incombent aux Parlements et aux Gouvernements nationaux dans le processus d'abolition de la peine de mort Convaincus que l'abolition universelle de la peine de mort est une contribution essentielle au respect de la dignité humaine et des droits de l'Homme, lij Nous appelons tous les Etats à instaurer, dl sans délai et partout dans le monde, un tl moratoire des exécutions des condamnés '§ à mort, et à prendre des initiatives visant ~ à abolir la peine de mort dans leur législa.~ tion interne.

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@ Différences nO 232 Septembre 2001 5 DOSSIER Nuit gravement à ... 'limage des Etats-Unis dlAmérique Un atelier consacré aux aspects discriminatoires de l'application de la peine de mort a été organisé par le Mrap le samedi 23 juin. Extraits des interventions sélectionnés par Marine N ibodeau. • Diarapha DIALLO-GIBERT « un système coté en Bourse» « Avec plus de deux millions de prisonniers en 200 1, les Etats-Unis sont désormais en tête des sociétés occidentales en matière d'incarcération

le système carcéral américain est

devenu une ressource économique importante puisque cotée à Wall Street; d 'ailleurs aujourd'hui, on construit plus de prisons que d'écoles. » « 54 % des prisonniers sont noirs bien qu'ils ne représentent que 12 à 13 % de la population globale. La prison fait d'ailleurs partie de la vie du ghetto puisque un Africain-américain sur trois entre 18 et 30 ans est soit en liberté conditionnelle soit en détention. Dans un pays qui compte plus de magasins d'armes que de McDonalds, est-ce à dire que les minorités sont criminelles? Sur les 3 700 condamnés à mort que compte l'Amérique aujourd'hui, 40 % sont noirs. Ils sont pour la majorité d'entre eux accusés d'avoir tué un blanc. En effet, lorsque la victime est blanche, le procureur requiert la peine de mort dans plus de 80 % des cas. D'ailleurs, aux Etats-Unis, les procureurs, qui ont un pouvoir discrétionnaire dans l'application de la peine de mort, sont blancs à 98 % ». Philadelphie: ville de l'amour fraternel? « En Pennsylvanie, par exemple, où notre association Just Justice milite pour un droit à un procès équitable pour tous depuis 1992, il n'y a aucun procureur noir ou hispanique pour 67 procureurs blancs. La population noire de cet Etat est d'environ 11 % mais 60 % des condamnés à mort sont noirs. Plus de la moitié des condamnations à mort proviennent de la ville de Philadelphie. D'ailleurs, dans un article du New York Times de 1995, le pro cu- Diarapha Diallo-Gibert présidente de l'association Just Justice de Tours 6 Différences nO 232 Septembre 2001 reur de cette ville, une femme, a été surnommée « la plus meurtrière des procureurs» ainsi que la « reine de la mort» et on pourrait ajouter la plus raciste puisque 83 % des condamnés à mort à Philadelphie sont des Africainsaméricains et qu'une analyse portant sur dix ans (entre 1983 et 1993) démontrait que la probabilité pour un noir d'être condamné à mort était 3,9 fois plus élevée que pour toute autre personne accusée d'un crime et ayant des antécédents similaires. De même, en 1997, lors de la campagne électorale du procureur de Philadelphie, on découvrit qu'un des candidats avait produit, alors qu' il était assistant du procureur, une cassette vidéo pour jeunes recrues dans laquelle il leur expliquait comment exclure du jury les jeunes femmes noires et les noirs des ghettos pauvres car ceux -ci étaient moins enclins à condamner. La cassette enseignait aussi aux procureurs en herbe à évincer les membres du jury qui ne convenaient pas, tout en cachant la motivation raciale. Ces exemples ne sont pas des cas isolés de préjugés raciaux, ce sont les symboles d'un racisme et d'une discrimination systématiques dans l'application de la peine capitale. » «je me sens moralement et intellectuellement obligé de reconnaître que l'expérience de la peine de mort est un échec» et que « la race continue à jouer un rôle majeur quant à déterminer qui doit vivre et qui doit mourir» Harry Blacknum, juge à la Cour Suprême Le cas Herrera où la perversité de tout un système. « Quand au cas Herrera, au Texas, il révèle les dérives de l'application du principe de Common Law qui est la pierre angulaire du système juridique américain. En 1993, juste avant l'heure programmée de l'exécution de L. Herrera, un américain d'origine mexicaine, de nouvelles informations qui l'innocentaient furent apportées mais la Cour Suprême des Etats-Unis refusa de les entendre et de suspendre l'exécution. Herrera fut donc exécuté selon le principe de priorité de la cho- ~ se jugée, et sur le fait que la forme prévaut Il sur le fond, fût-il la vie. » Il Une lueur d'espoir.« Aujourd'hui, 40 % des ! Américains se déclarent contre la peine de mort, d'après Le Courrier de l 'Unesco d' octobre 2000 ; de plus, neuf anciens ambassadeurs dont l'ex-ambassadeur en France ont écrit à la Cour Suprême, le vendredi 8 juin 2001 , pour demander l'arrêt de l'exécution des handicapés mentaux, arguant que la peine de mort nuit gravement à l'image des EtatsUnis et à leur "prétention à un leadership moral dans le domaine des droits de l'Homme dans le monde" ». • Marina RAJEWSKI « la discrimination est raciale, économique et sociale» 22 juin 2001 : 721 ème exécution depuis 1976 « Les gouvernements démocrates et républicains ont instauré un Etat pénal en établissant des lois de plus en plus répressives et en donnant tout pouvoir à la police et à la justice. Le résultat est sans équivoque: 2 exécutions en 1976, 16 en 1989 et enfin 98 en 1999, infligées dans 38 Etats qui donnent la mort par pendaison, chaise électrique, gaz mortel, fusillade ou injection létale. Mais qui sont les personnes que le gouvernement américain envoie à la potence au nom de la justice? Les études menées à ce sujet montrent que les condamnés à mort sont des pauvres issus de différentes minorités ethniques, bien qu'on trouve en majorité des Africains-américains et des Latinos, et que 85 % de la population des couloirs de le mort a été inculpé pour le meurtre de personnes blanches. [ ... ] Discrimination raciale. Depuis 1608, le gouvernement américain a à son actif plus de 16 000 exécutions dont seules 31 concernant une personne blanche condamnée pour le meurtre d'une personne noire. Dès lors, l'utilisation du terme discrimination raciale s 'impose, d'autant qu'il a été reconnu par la Cour Suprême des Etats-Unis en 1972 par un arrêt interrompant les exécutions. Quatre ans plus tard, cette même Cour a fait usage de son pouvoir discrétionnaire pour suspendre cet arrêt et relancer la machine à tuer. [ ... ] La discrimination raciale est un des exemples les plus probants du caractère arbitraire de l'administration de cette peine. [ ... ] L'étude Baldus. « En 1983, David Baldus et deux de ses collègues de l'université d'Iowa ont conduit l'étude la plus exhaustive jamais réalisée à ce jour quant à la discrimination raciale dans l'application de la peine capitale. Se basant sur la condamnation à mort de 594 accusés, jugés coupables et condamnés en Géorgie de mars 1973 à juillet 1978,1' étude portait sur l' analyse de 2 484 meurtres. Ses conclusions étaient sans appel: le meurtrier d'une personne blanche avait 4,3 fois plus de risques d'être condamné à mort que le meurtrier d'une personne noire. [ ... ] Aujourd'hui, environ 12 % de la population américaine est noire alors que la population Marina Rajewski est universitaire et responsable de Just Justice/Clermont-;Ferrand Une de Télérama publié en octobre 2000 noire des couloirs de la mort représente 41 %. Depuis que la peine de mort a été réintroduite en 1976, 39,3 % des personnes tuées dans la chambre d'exécution sont noires et 86 % des personnes exécutées étaient inculpées du meurtre d'une personne blanche, même si la moitié des victimes étaient noires. Une étude réalisée par deux spécialistes, Charles Bowers et Glenn Pierce, compare les condamnations des noirs accusés du meurtre de blancs et de noirs dans quatre états: l'Ohio, la Floride, la Géorgie et le Texas. Dans l'Ohio, la probabilité de condamner un noir est 15 fois supérieure, elle est 33 fois supérieure en Géorgie, 37 fois supérieure en Floride et enfin 87 fois supérieure au Texas, Etat alors gouverné par Georges W. Bush, actuel président américain. [ ... ] Juste avant son départ en retraite, le juge à la Cour Suprême Harry Blacknum, fervent partisan de la peine capitale a pourtant affirmé que [ ... ] "la race continue à jouer un rôle majeur quant à déterminer qui doit vivre ou qui doit mourir". Discrimination économique. Ce chapitre pourrait tout aussi bien être intitulé "toute la justice que l'argent peut acheter" et peut être illustré par le seul exemple de l'affaire 0.1. Simpson. Toute la procédure apparaît comme une parodie de justice orchestrée par le seul pouvoir de l'argent mis en jeu par l'accusé pour acheter son innocence et sa liberté. [ ... ] Il faut souligner qu'en quatre mois le procès était ouvert et qu'O.1. était représenté par onze avocats des plus compétents et des plus chers, entourés par une équipe de défense comprenant enquêteurs privés, conseillers veillant à la sélection du jury et plusieurs experts extrêmement bien payés qui contraient systématiquement chaque argument avancé par le ministère public. La singularité de ce procès résidait dans les proportions démesurées atteintes à la fin de la procédure. Pendant neuf mois, 45 000 pages de témoignages ont été produites et le coût total de la défense a été estimé entre 6 et 8 millions de dollars. Ceci apparaît d'autant plus incroyable et injuste que la défense d'un condamné à mort, du jour de son arrestation à celui de son exécution ou plus rarement de sa libération, coûte entre 1 et 4 millions de dollars. » « Il est intéressant de faire le parallèle entre les affaires d'O.1 Simpson et Mumia Abu-Jamal. Bien qu'ayant la même couleur de peau, Mumia n'a pas eu les moyens de s'offrir une défense de pointe et a été pris en charge par un avocat commis d'office auquel la Cour n'a alloué que 100 dollars pour assurer la défense du condamné. » [ .. . ] « Le problème de discrimination sociale et économique va souvent de pair avec le problème de la compétence ou plutôt de l' incompétence de certains avocats. Celle-ci se retrouve dans les com- -+ • Robert MEEROPOL « Si nos gouvernements ... » Dans mon pays, le mouvement anti-peine de mort a rallié de nombreuses personnes à sa cause [ ... ] La plupart s'accorde sur le fait que la peine capitale ne laisse aucune place à l'erreur. Mais, puisque tôt ou tard, toutes les garanties [du système] seront épuisées, il est inévitable que des innocents seront exécutés. Même ceux qui, dans mon pays, n'ont pas de scrupules quant à la peine de mort, ne sont pas en faveur de l'exécution d'innocents [ ... ]. La peine de mort est un châtiment qui ne fait que renforcer les divisions sociales. Son abolition peut contribuer à guérir les lignes de faille de la société. Nos sociétés seront plus sûres, plus libres et moins violentes si nos gouvernements refusent de poursuivre ces meurtres ritualisés commis de sang froid et ce, en toute circonstance. La lutte pour l' abolition de la peine capitale contribue à la réalisation de nos plus hautes aspirations. Elle va de paire avec l'évolution de notre humanité. » Robert Meeropol est le fils de Ethel et Julius Rosenberg directeur du Rosenberg Fund for Children Traduction Marine Nibodeau Différences nO 232 Septembre 2001 7 DOSSIER suite de la page 7 ~ portements incongrus d'avocats: dans l' Alabama, un d'entre a été arrêté à la barre pour s'être présenté saoul au tribunal; en Géorgie, un autre a été arrêté pour consommation de drogue et on parle de plus en plus du "syndrome de l'avocat qui fait la sieste" pendant les procès! Quand les avocats se comportent décemment, ils ont tellement peu de d'éléments à apporter pour la défense de leur client qu'un grand nombre de procès sont bâclés en trois jours et que la phase de détermination de la peine ne dure que quelques heures. » Discrimination politique. « La notion de discrimination politique est, au même titre que les discriminations raciale et socio-économique, un problème non négligeable aux Etats-Unis. Le terme de prisonnier politique bien que non reconnu par les autorités américaines, a pourtant bien lieu d'être. De l'extermination du peuple indien lors de la conquête du territoire américain à l'élimination de dissidents politiques, l'Amérique maintient sa tradition de surveillance, répression, incarcération, voire exécutions arbitraires. L'histoire américaine a été marquée par plusieurs affaires politiques importantes: les martyrs de Chicago en 1886, l'affaire Joe Hill et les IWW en 1914, Sacco et Vanzetti en 1920, les époux Rosenberg en 1953 et plus récemment Mumia Abu-Jamal. » • Rendez-vous le 8 décembre La Cour de Pennsylvanie, présidée par Pamela Dembe, a refusé le 17 août de prendre en compte les nouveaux éléments présentés par les avocats de Mumia AbuJamal. Le Mrap a décidé de soutenir une initiative lancée par un groupe de soutien de San Francisco. Il s'agit d'adresser massivement un courrier, dont le texte est disponible au Mrap, au juge Dembe. Il faut souligner qu'une délégation française dont faisaient notamment partie Bernard Birsinger, Pierre Mairat, Julia Wright, Mireille Mendes France, Jacky Hortaut, s'est rendue à Philadelphie pour assister à l'audience du 17 août et a transmis 160 000 signatures de la pétition pour Mumia. Le Collectif national a exprimé sa préoccupation ({ quant à l'acharnement persistant des autorités judiciaires à faire obstacle à la manifestation de la vérité. Les recours s'épuisant, tout laisse à penser que Mumia Abu-Jamal pourrait être rapidement face à un troisième mandat d'exécution. » Le Collectif national appelle à une manifestation le 8 décembre afin de marquer les vingt ans d'incarcération de « cet homme qui, depuis le premier jour, crie son innocence. » 8 Différences n° 232 Septembre 2001 Ensemble contre la peine de mort « Pour que Ilabolition entre dans la réalité de nos vies » A l'initiative du journal L'Humanité, du collectif unitaire national (représenté par Renée Le Mignot) et du Cosimapp (Julia Wright), une rencontre a été consacrée à Mumia Abu-Jamal lequel a fait parvenir au congrès un message enregistré que nous publions quasi-intégralement. Ont également participé à ce débat Angela Davis, Sam Jordan (avocat), Bernard Birsinger et Sylvain Alessandrini. BONJOUR, mes amis du mouvement d'abolition de la peine de mort en République française. [En français dans le texte] Un grand merci à tous, et particulièrement à notre soeur Julia Wright, dont la capacité de travail d'une génération à l'autre constitue un phare et un point d'appui solide pour nos mouvements de libération. Merci ma soeur! Amis, camarades, supporters, vos luttes dynamiques et multiformes contre la peine de mort représentent un phare pour le reste du monde et nous sommes nombreux à tendre l'oreille pour entendre vos voix, nous qui habitons la prison d'entre toutes les prisons. L'appétit vorace pour la mort qui consume l'Amérique est en phase ascendante. La sélection récente de George W. Bush pour remplir la fonction de président des Etats-Unis est de bien mauvaise augure pour les femmes, hommes et adolescents dans nos couloirs de la mort - que ceux-ci relèvent des Etats ou du pouvoir fédéral. Suite à une initiative historiquement inédite, la cour suprême des Etats-Unis a conféré le pouvoir suprême à Bush le Jeune lors d'élections présidentielles âprement disputées. Le règne de Bush en tant que gouverneur du Texas demeure l'un des plus meurtriers dans notre histoire. Sous Bush, les antichambres de la mort dans cet Etat, symbolisé par« l'Etoile Solitaire », sont gorgées de sang. Le Texas détient le palmarès des lynchages légalisés, loin devant les autres Etats américains qui tuent, et ce record macabre a constitué un tremplin important pour l'accession aux plus hautes fonctions politiques. Le gouverneur Bush est donc devenu le Président-Bourreau. Aux yeux des Etats-Unis (que certains de ses critiques français qualifient d'« hyperpuissance »), les lois internationales ne sont que des outils destinés à contrer des nations érigées en adversaires, mais ces mêmes lois sont ignorées dès lors qu'il s'agit de les appliquer aux Etats-Unis eux-mêmes. Plusieurs traités internationaux interdisent l'exécution de jeunes qui étaient âgés de dix huit ans ou moins au moment des faits. Le lynchage légalisé de Shaka Sankofa (né Gary Graham) qui avait dix huit ans à l'époque de son arrestation prouve que pour l'empire américain la législation internationale demeure lettre morte. L'hyperpuissance considère que les lois internationales peuvent être bafouées et violées avec impunité parce que la peur qu'engendre son immense pouvoir« légalise» toutes les violations. De date récente, la presse américaine s'est fait l'écho d'une série d'affaires où des mineurs - certains d'entre eux n'ayant que douze ou treize ans - ont été jugés en tant qu'adultes. Ces enfants ont littéralement été condamnés à des perpétuités chez les adultes; d'autres, âgés de 16, 17 ou 18 ans, attendent en ce moment même la mort aux mains de l'Etat. Comment une nation qui détient le record mondial en matière de population carcérale peut-elle oser s'exhiber comme le parangon des droits humains? Comment la nation qui se fait passer pour l'arbitre de nos traités internationaux peut-elle incarcérer ses femmes à un rythme qui fait croître ce secteur de l'industrie carcérale le plus rapidement de tous? Le propre d'un empire c'est que la volonté omnipotente y tient lieu de loi. Il n'y existe pas d'autres lois. Nombreuses sont les nations qui sont issues historiquement de luttes contre des élites étrangères, contre l'oppression d'élites féodales et par le fait de leurs activités économiques. L'Amérique plonge ses racines dans l'esclavage. Quand la Constitution fut écrite, des représentants des Etats du nord et du sud ont négocié entre eux ce qu'ils ont nommé « le grand compromis ». Il s'agissait d'un accord qui n'était pas si « grand» que cela puisqu'il offrait en récompense au sud un pouvoir et un poids de représentation au Congrès d'autant plus importants que cette région faisait l'acquisition d'un nombre croissant d'esclaves africains. Aujourd'hui, alors que la guerre civile est terminée depuis des siècles, l'ombre portée de ces débuts profondément antidémocratiques obscurcit la politique intérieure américaine. Peut-on dès lors parler de coïncidence quand nos prisons constituent des réserves pour les laissés-pour-compte (surtout les noirs des ",nrrT"orna anniversaire de 'Abolition de la peine de mort en France Mumia Abu-Jamal a été fait citoyen d'honneur de la ville de Bobigny. Affichette reproduisant sa signature et son matricule du couloir de la mort ghettos urbains) ou que nos couloirs de la mort constituent des enclaves à prédominance africaine-américaine? Pendant les années de l'administration Nixon (1969-1974), notre nation a été saisie d'une boulimie qu'on a appelée la politique de « la loi et de l'ordre », et celle-ci perdure. C'est « la loi et l'ordre» qui a donné naissance au complexe carcéro-industriel et je citerai à l'appui un passage du journal tenu par l'un des plus proches collaborateurs de Nixon, son secrétaire H. R. Holdman, qui nous révèle le sens caché derrière tout le jargon: « Le président Nixon a souligné qu'il faut regarder les choses en face et que le problème fondamental ce sont les noirs. La réponse est de mettre sur pied un système qui solutionne le problème mais sans en avoir l'air». Toutes les initiatives officielles dites de « guerre contre le crime» ont découlé de cette argumentation raciste et tordue, chuchotée par Nixon à son plus proche collaborateur. Les exemples de cette logique abondent depuis l' éviscération du droit ancien à 1 'habeas corpus perpétrée par l'administration de Clinton à la militarisation pure et dure de la police américaine comme en témoigne le bombardement policier, brutal et vicieux, de la communauté MOVE à Philadelphie le 13 mai 1985. Ils ont mis sur pied un système qui est raciste de fond en comble, « mais sans en avoir l'air». [ ... ] , Il ne saurait donc y avoir un Congrès mondial travaillant pour l'abolition de la peine de mort sans un examen attentif de l'expérience qui prévaut à Philadelphie, car nous sommes ici à l'épicentre. Il ne saurait y avoir un Congrès mondial pour abolir la peine de mort sans le constat que tout ce qui dénigre la vie noire - que ce soit la vie d'un accusé ou celle d'un juré potentiel - provient de cet outil raciste dont le but est de survaloriser la vie des blancs et que l'on a coutume de nommer « la suprématie blanche». Il ne peut y avoir ici en Amérique de véritable mouvement contre la peine capitale, à moins de reconnaître que la loi (qu'elle soit internationale ou domestique) est une illusion maintenue pour pérenniser un statu quo de convenance, un trompe-l'oeil dont la raison d'être repose depuis des décennies sur la présupposition que « le problème fondamental, ce sont les noirs », et que le Système doit l'admettre, « mais sans en avoir l'air». C'est ce statu quo qui alimente l'acharnement vampirique de la machine à tuer américaine. C'est ce statu quo que nous devons éliminer si nous voulons que l'abolition entre dans la réalité de nos vies. Merci à vous. Ona MOVE [En avant] Vive John Africa ! Mumia Abu-Jamal, Couloir de la mort de SCI Greene juin 2001 Traduction COSIMAPP A propos des stratégies L'atelier Stratégies a permis aux participants de réfléchir aux outils et aux objectifs à mettre en oeuvre en fonction des différents contextes pour faire avancer la cause de l'abolition. Rapide synthèse d'Hèlène Fossey. • JURIDIQUE. Le constat a été fait que le système européen est à l'avant garde de l'abolition au niveau juridique avec notamment le Protocole n° 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme. Ce protocole abolit la peine de mort dans les pays qui l'ont ratifié mais tolère son rétablissement en situation de conflit armé ou de danger imminent de guerre. Deux autres vont dans le même sens: le Pacte Onusien et la Convention américaine. Ils n'entraînent pas directement l'abolition mais encadrent son application par des garanties légales et procédurales. Une autre stratégie efficace et nécessaire est d'apporter une défense de qualité aux personnes susceptibles d'être condamnées à mort, tout d'abord pour aider les victimes potentielles, souvent démunies, ensuite pour instaurer une jurisprudence. • POLITIQUE. L'incitation à la ratification de certains traités ou protocoles doit être élargi. Ainsi, le Conseil de l'Europe demande aux nouveaux Etats membres de ratifier le Protocole n° 6 de la CEDH. Les ONG ont un rôle à jouer tant au niveau des Etats qu'au niveau international. Les obstacles rencontrés au niveau national sont d'ordre culturel, juridique ou social. Au niveau international, se pose la question de l'opportunité d'une action en faveur d'une résolution à l'assemblée générale de l'ONU, condamnant l'exercice de la peine de mort. C'est un point délicat compte tenu du poids économique important des EtatsUnis et de la Chine. Enfin, l'action en faveur d'un moratoire universel sur les exécutions se poursuit, mais c'est une transition vers l'abolition universelle de la peine de mort. • SENSIBILISATION DE L'OPINION PUBLIQUE. La couverture de l'information par les médias reste soumise au souci majeur: la rentabilité. Ainsi, les pays qui appliquent la peine capitale produisent très peu d'informations sur les exécutions. L'opinion publique n'étant pas sensibilisée, elle ne s'y intéresse pas. Même si ce travail de ~ Différences nO 232 Septembre 2001 9 DOSSIER Déclaration finale du congrès N OUS, CITOYENS ET MILITANTS ABOLITIONNISTES réunis à Strasbourg du 21 au 23 juin 2001 à l'occasion du premier congrès mondial contre la peine de mort organisé par Ensemble contre la peine de mort, déclarons: La peine de mort signe le triomphe de la vengeance sur lajustice et viole le premier droit de tout être humain, le droit de vivre. La peine capitale n'a jamais dissuadé le crime. Elle constitue un acte de torture et l'ultime traitement cruel, inhumain et dégradant. Une société qui recourt à la peine de mort encourage symboliquement la violence. Toutes les sociétés, respectueuses de la dignité de leurs membres, doivent s'efforcer d'abolir la peine capitale. Nous nous félicitons que de nombreux présidents de Parlement aient décidé de lancer à Strasbourg un « Appel solennel pour un moratoire mondial des exécutions de condamnés à mort sur le chemin de l'abolition universelle », le vendredi 22 juin au Parlement européen. Nous demandons l'abolition universelle de la peine de mort. Dans cette perspective, nous demandons instamment aux citoyens, aux Etats et aux organisations intergouvernementales de tout mettre en oeuvre afin que : • les Etats ratifient les conventions et traités internationaux et régionaux en faveur de l'abolition; suite de la page 9 sensibilisation de l'opinion publique est de longue haleine, il est vecteur de changement. Pour parvenir à cette fin, les médias se doivent d'informer sur les réalités de la peine de mort: les conditions d'incarcération et d'exécution qui sont bien souvent inhumaines et dégradantes; les erreurs de jugements et les innocents exécutés; les discriminations dans l'application de la peine de mort; l'absence de corrélation entre la pratique de la peine de mort et le taux de criminalité ... Hélène Fossey Photographie de la couverture: dessin taggé sur les murs de la ville de Lisbonne, mai 2001. Erratum. Deux erreurs se sont malencontreusement glissées dans notre dernière parution: page 3, seconde brève relative aux rendez-vous judiciaires

les auteurs du crime raciste du Havre devaient passer

devant la cour d'assises d'Evreux et non de Grenoble; page 7, dans le tableau du Cevipof: c'est le signe - (et non pas +) qu'il fallait lire quant à l'évolution des suffrages de l'extrême droite entre 1995 et 2001 pour la ville de Vitrolles. 1 0 Différences n° 232 Septembre 2001 • les pays, qui n'exécutent plus de condamnés à mort, suppriment enfin de leur législation la peine de mort ; • les Etats, qui condamnent à mort des personnes mineures au moment des faits, mettent fin à cette violation flagrante du droit international , • lesdéficientsmentauxnepuissentêtrecondamnés à mort ; • aucun Etat ayant aboli ou ne pratiquant plus la peine de mort ne procède à des extraditions vers des pays appliquant la peine de mort, dès lors que celle-ci est encourue et ce, quelles que soient les assurances reçues; • les Etats publient de manière régulière et transparente des informations sur les condamnations à mort, les conditions de détention et les exécutions de condamnés. Nous soutenons l'examen par le Conseil de l'Europe de la compatibilité du statut d'observateur des Etats-Unis et du Japon avec leur application de la peine capitale. Nous appelons le Conseil de l'Europe et l'Union européenne à insister auprès de la Turquie, de la Russie et de l'Arménie, pour qu'ils abolissent définitivement la peine de mort pour TOUS les crimes et qu'ils commuent l'ensemble des condamnations à mort. Nous appelons l'Union européenne à poursuivre ses efforts en faveur de l'abolition de la peine de mort dans le cadre de ses relations internationales. Au-delà de ces recommandations générales, nous diffuserons des recommandations précises, pays par pays, qui appuieront l'action des abolitionnistes. Nous nous engageons à créer une coordination mondiale d'associations et de militants abolitionnistes, ayant pour premier objectif d'instaurer une journée mondiale pour l'abolition universelle de la peine de mort. Nous appelons les professions judiciaires et médicales à affirmer l'incompatibilité de leurs valeurs avec la peine de mort et à intensifier pays par pays leurs actions contre la peine de mort. Nous nous associons à l'ensemble des pétitions collectées par Amnesty International, la Communauté Sant'Egidio, Ensemble contre la peine de mort, la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme, Hands off Cain et toute autre organisation et appelons tous les abolitionnistes à signer la pétition internationale suivante: "Nous, citoyens du monde, demandons l'arrêt immédiat de toute exécution de condamnés à mort et l'abolition universelle de la peine de mort". Enfin, nous appelons tous les Etats à prendre toutes les initiatives contribuant à l'adoption par les Nations-unies d'un moratoire mondial des exécutions, dans la perspective de l'abolition universelle. » Strasbourg, le 22 juin 2001 France: vingt ans d'abolition tmmm ASSEM BL ÉE NATIONALE Réunies en « Collectif 2001 », de très nombreuses associations dont le Mrap, Amnesty International, la LDH, l'association française de criminologie, le Barreau de Paris, Ensemble contre la peine de mort, l'ACAT. .. joignent leurs efforts pour organiser célébrer le vingtième anniversaire de l'abolition la peine de mort en France. Le programme, encore à l'étude à l'heure où nous mettons ce numéro sous presse, étalé sur trois jours, du 5 au 9 octobre, devrait notamment comporter une manifestation avec les drapeaux des pays abolitionnistes, un discours d'inauguration par Robert Badinter, des débats (celui du Mrap sera consacré à Mumia Abu-Jamal), projections de films et de reportages, un colloque à l'Assemblée nationale, etc. Pour toute information complémentaire prendre contact avec Hélène Fossey au Mrap. Par ailleurs, les députés Bernard Birsinger, Roselyne Bachelot-Narqui, Maurice Leroy, Noël Mamère et André Vallini ont déposé une proposition de loi ainsi libellée: Art 1er / Une journée nationale contre la peine de mort est créée, le 22 juin de chaque année. Art 2/ Dans tous les établissements d'enseignement, les enseignants consacrent une partie de la journée à des exposés et des discussions sur ce thème, ainsi que sur les valeurs qui fondent l'idée de justice. Art 3 / Avec des moyens appropriés, les services publics, et notamment celui de l'audiovisuel, contribuent dans leur sphère respective aux objectifs de cette journée. Ensemble contre la peine de mort Pour en savoir plus LIVRES o Le cas Move à Philadelphie, 1975/1995, Ed. Septentrion, Presses universitaires, Thèses à la carte, 1999 o En direct du couloir de la mort, Mumia Abu-Jamal, Ed. La Découverte/Poche o L'abolition, Robert Badinter, Fayard (ce livre a reçu le prix Femina 2000, dans la catégorie Essais) o La machine à tuer, Colette Berthes, Bernard Fillaire, Ed. Les Arènes (l'auteur était le président du comité de soutien à Odell Barnes) o Le dernier jour d'un condamné, Victor Hugo, Ed. Gallimard, Folio classique. o Lettre ouverte aux Américains pour l'abolition de la peine de mort, Michel Taube, Préface Henri Leclerc, Ed. L'écart, collection Manifeste, 2001 o La Cour Suprême: Les Grands Arrêts, Marie-France Toinet, Ed. Presses universitaires de Nancy, 1989 o Réflexions sur la guillotine, Albert Camus Robert BADINTER Fayard FILMS o Mon père réalisé par José Giovanni Adapté du livre « Il avait dans le coeur des jardins introuvables» du même auteur, avec avec Bruno Cremer, Vincent Lecoeur et Rufus. Ce film retrace les efforts déployés par le père de l'auteur, José Giovanni, pour éviter à celui-ci d'être exécuté pour un crime qu'il n'avait pas commis, en 1949. o Le pull-over rouge, Michel Drach o La dernière marche, Tim Robbins o Quand l'Etat assassine (30 mn) réalisé par Bernard Debord pour Amnesty International o Arrêts de mort (50 mn), Fabrice Ziolk0wski o Un âge pour les condamnés (48 mn), Liesl Evans o L'exécution à l'américaine, Stephen Trombley SITES INTERNET o Ensemble contre la peine de mort 84 rue de Wattignies, 75012 Paris www.ecart-type.com o Comité international de soutien à Mumia Abu-Jamal et aux prisonniers politiques aux Etats-Unis cio Le Point du Jour, 58 rue Gay Lussac 75005 www.cosimapp-mumia.org o Amnesty International www.amnesty.asso.fr o La peine de mort dans le monde perso.wanadoo.fr/ai288/pdm SÉMINAIRE ASSURÉ PAR JACQUES DERRIDA « Le parjure et le pardon» et « La peine de mort » à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) 54 Boulevard Raspail 75006 Paris T : 014954 25 25. Les séminaires reprennent en décembre, les mercredis de 17 heures à 20 heures. L'ensemble des textes de ce dossier est disponible sur le site du Mrap mrap.asso.fr Kiosque BIRMANIE, MODE D'EMPLOI Balland, guide Un titre à lire a contrario pour cet ouvrage qui tente de dissuader le voyageur de visiter un pays meurtri par l'une des pires dictatures au monde. Co-écrit par des membres de trois associations - Suisse Birmanie, Actions Birmanie (Belgique), Info Birmanie (France)- et un journa liste indépendant Francis Christophe, cet « anti-guide » met en reliefles pièges touristiques tendus par le SLORC, la junte au pouvoir, qui pour redorer son blason sur la scène internationale et redresser une économie exsangue, ouvre ses frontières aux touristes étrangers. De courts paragraphes bien documentés décrivent l' enfer quotidien de milliers de BirÉCRIVAINS/ SANS-PAPIERS Mrap-Bérénice Ecrivains!Sans-papieE:J mans accentué par la mise en place des infrastructures touristiques

travaux forcés,

déplacement des populations pour laisser place à des quartiers calmes et« nettoyés» et toujours les répressions, la chasse aux élus de la Ligue Nationale pour la Démocratie, qui pourtant ont remporté massivement les élections en 1990) ... Cependant, les retombées économiques du tourisme restent médiocres. Y aller ou pas? Même si certains de nos industriels (Total, Accor) ou de nos politiciens ne semblent pas avoir été embarrassés par la question, le guide propose un judicieux parallèle entre les visiteurs de la narco-dictature aujourd'hui et ceux plus nombreux de l'Espagne de Franco hier: les Français étaient déjà divisés dans les années soixante entre ceux attirés par la Costa Del Sol à bon marché qui pensaient qu'un boycott aurait appauvri encore plus la population et les autres qui estimaient au contraire que les devises étrangères nourrissaient surtout le régime. Il aura pourtant fallu attendre la mort de Franco pour que ce pays revienne à la démocratie. Cet ouvrage est un bel exemple de collaboration entre les associations ! Ce livre intéressant, bien documenté, mérite qu'il soit mis dans beaucoup de mains françaises puisque hélas, nous représentons le contingent de touristes le plus important en Birmanie. Fabrice Verrier Trente quatre nouvelles inspirées par les situations faites aux sanspapiers sont rassemblées dans cet ouvrage qui fait se rencontrer des parcours de vie difficiles et des écrivains engagés. Les parcours décrits ou suggérés sont romancés mais les sans-papiers et ceux qui les aident dans leurs démarches savent que la réalité de la chute dans la« clandestinité» dépasse parfois la fiction. En vente au siège du Mrap. Prix: 100 F (+ 16 F port) Différences n° 232 Septembre 2001 11 Actualités ÉChOS • Femmes immigrées. Les actes du colloque « Femmes etrangères et immigrées en France », organisé par le Comité de suivi des lois sur l'immigration en juin 2000 à l'Assemblée nationale, ont été rendus publics avec une préface de Claudie Lessalier, intervenant au nom du RAJFIRE (réseau pour l'autonomie des femmes immigrées et réfugiées). Ce document, enrichi d'une bibliographie très dense, est un véritable outil de travail pour les militants et tous ceux que ce thème intéresse. Exhaustif. il aborde tous les aspects du combat des immigrées et de leur condition de vie. Il y est rappelé les embQches politiques, juridiques et même idéologiques auxquelles les intervenants doivent faire face pour le droit des étrangères à la dignité. Contacts: Françoise Galland Bureau 8301, Assemblée nationale, 126 rue de l'Université, 75355 Paris Cedex 07 SP ou RAJFIRE cio Maison des femmes de Paris, 163 rue de Charenton 75012 Paris. Mail: rajfire@wanadoo.fr • Scandale. Conçue comme accroche à considérer au second degré ou comme un détournement des thèses négationnistes, l'inscription «L'Holocauste n'a jamais eu lieu» s'étalait en gros caractères sur une affiche censée soutenir une campagne pour le financement du Mémorial dédié aux victimes du nazisme en Allemagne. L'Association de citoyens pour le Mémorial, à l'origine de celle « bavure », a dO la retirer devant la levée de boucliers d'intellectuels allemands et français qui ont demandé « l'arrêt immédiat de celle campagne insensée et lont appelé) à une nouvelle réflexion sur la manière dont il convient de faire connaïtre le Mémorial ». La construction, à Berlin, de ce monument a été décidée par le parlement allemand, en 1999, après une dizaine d'années de controverses au sein de l'opinion publique allemande. • 50000 travailleurs immigrés. Pour combler le déficit en main d'oeuvre dans le pays, la Commission sur l'immigration, créée par le gouvernement allemand, recommande de faire venir cinquante mille travailleurs "étrangers qui seront sélectionnés selon un système de points qui prendra en compte leur é'lge et leurs compétences. • Xénophobie, Le DDP (Parti danois du peuple, extrême droite), dans la bonne tradition nazie, a publié dans Jyllands-Posten, un journal dominical de Copenhague, la liste les noms des 4 743 personnes d'origine étrangère ayant acquis la nationalité danoise cette année ainsi que la liste des partis politiques qui ont voté la loi permettant ces naturalisations. Le DDP représente 12 % du corps électoral du royaume du Danemark. • Plainte. Le Mrap a déposé plainte, le 17 juillet dernier, contre l'association SOS Racaille pour des faits particulIèrement répugnants et dangereux. Cette association, parmi d'autres agissements, appelle sur son site internet et par la diffusion de messages électroniques à l'insubordination des fonctionnaires, après avoir diffusé des listes noi- L'eSclaVage, un crime contre l'Humanité La conférence mondiale contre le racisme de Durban s'est achevée le samedi 8 septembre à l'issue de débats houleux et difficiles, en particulier sur les questions du Proche-Orient et de l'esclavage. Moulaud Aounit (secrétaire géneral) et Bernadette Hétier (secrétaire nationale) y représentaient respectivement le Mrap et le Réseau européen contre le racisme (ENAR). Les représentants du Mrap ont rendu public le 3 septembre un communiqué dans lequel ils prenaient leur distance avec le contenu de la résolution du Forum des ONG consacrée au conflit israélo-palestinien et la façon dont eHe avait été adoptée : ~( Le Mrap rejette l'équation selon laqueHe le sionisme équivaut au racisme. Pour autant, il estime irresponsable celle qui ferait de toute critique des politiques et des pratiques du gouvernement d'Israël une fonne d'antisémitisme. Le Mrap estime par ail leurs que certains aspects des questions débattues par les ONG, notamment le trafic d'êtres humains, le racisme environnemental, la reconnaissance de la Traite atlantique et de l'esclavage comme crimes contre ['Humanité et la réparation pour les Africains et leurs descendants, la question de la protection des droits et libertés fondamentales des migrants, la bioéthique, doivent être entendues par les participants à la Conférence des Etats ». La conférence des Etats a effectivement adopté dans sa déclaration finale le principe selon lequell'esc\avage est un crime contre l'Humanité mais n'aborde pas le sujet des réparations: « La conférence reconnaît que l'esclavage et le commerce des esclaves, en particulier la traite transatlantique ( .. ,), constituent un crime contre l'humanité et auraient toujours dû être considérés comme tel. ( ... )). Dans le programme d'action, la conférence prend acte du fait que (~ certains Etats ont pris l'initiative d'exprimer des regrets ou des remords, ou de présenter des excuses, et appelle tous ceux qui n'ont pas contribué à rétablir la dignité des victimes à trouver des maniéres adaptées pour le faire. »). Nous reviendrons sur ce sujet dans notre prochaine édition. res d'avocats. Parmi les appels à la délation citons : Il Nous sommes à la recherche de tous types de documents pouvant intéresser l'opinion publique, tels: Notes "internes", y compris ~confidentielles", de ta police, des préfectures, des administrations diverses ; listings des bénéficiaires de prestations sociales, de locataires HLM ... Dans une banque, vous observez des comptes bancaires au solde très important, tandis que le titulaire encaisse chaque mois le RMI, envoyeznous une copie d'extrait de compte ... », Dans un communiqué, le Mrap relève que « c'est là une atteinte fondamentale aux libertés publiques et un trouble grave à l'ordre public » et une sanction doit être Il rapide et exemplaire. Il en va, ajoute-t-il de la crédibilité des institutions républicaines pour défendre la sécurité des citoyens et la protection des libertés fondamentales. » • Justice - Droits de l'Homme. Quatorze associations nationales ou fédérations ont créé, le 22 juin 2001, une coordination « Justice- droits de l'Homme ». Parmi les signataires de la convention, outre le Mrap, figurent l'ACAT (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture), le CCEM (Comité contre ,'esclavage moderne), la FIDH (Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme), la FNARS (Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale). Citoyens et Justice, France-libertés, France Terre d'Asile etc. Tout en exprimant des prises de position communes les associations s'engagent à respecter la liberté de chacune. • Tractraciste. Le parquet d'Aix-en-Provence a adressé à Catherine Mégret. maire (MNR) de Vitrolles, une citation à comparaître devant le tribunal correctionnel, le 21 septembre 2001, pour répondre du délit de provocation à la discrimination raciale. L'élue d'extrême droite devra s'expliquer sur le contenu d'un tract diffusé lors de la derniére campagne électorale. Le document intitulé « le programme Bien chez nous' » contenait d'évidentes discriminations: Il reloger dans un autre secteur de la ville les Français du quartier des Pins» présenté comme « une enclave immigrée », ou Il refuser toute aide sociale aux familles de mineurs délinquants» ou encore « inciter les immigrés fauteurs de troubles à quitter la ville ». 43 bld de Magenta 750 1 0 Paris - T : 01 53 38 99 99 Télécopie : 0140409098 - E.mail:joumal.differences@free.fr 13 F le numéro _ Abonnement 135 F (Il nO'/an) Directeur de publication: Mouloud Aounit. Gérante bénévole: Isabelle Siro\. Rédactrice en chef - mise en page: Chérifa Benabdessadok. Directrice administrative: Florence Festas. Abonnements: Isabel Dos Martires. Impression: Montligeon T: 02 33 85 8000. Commission paritaire n063634 0247-9095 Dépôt légal 2001-09 12 Différences nO 232 Septembre 2001 ____________________________________ _

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