Différences n°139 - mars 1993

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Sommaire du numéro

n°139 de mars 1993

  • Edito: l'élan par Mouloud Aounit
  • Le mot race est-il de trop dans la Constitution française : interview de Simone Bonnafous
  • Manifestation du 6 février: interview d'Alain Callés secretaire général adjoint du MRAP recueilli par C. Benabdessadok
  • SOS Kurdes
  • Mémoire juive en Soissonnais par Dominique Natenson
  • Elections législatives: la politique du MRAP
  • Enquête sur l'excision par I. Avran

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) ) 1993 N o 139 10 F ED 1 T 0 L'ÉLAN Malgré une "conspiration" du silence des grands média audiovisuels autour de la date du 6 février 1934. dans une France dépressive, atteinte de morosité, engluée dans une campagne électorale oil les affaires et les inculpations de 10US ordres occultent le débat d'idées et de propositions face aux insatisfactions quotidiennes du plus grand nombre, la manifestation du 6 février 1993 avait quelque chose de réconfortant. Cette foule joyeuse réchauffait le coeurella conscience de ceux qui. id ct ailleurs. souffrent des ravages insupportables de la haine de l'autre. Le mt me évènement ne peUl jamais se reproduire 11 l'idenliquecar les condilions de mobilisation, leoonlexle. nese renouvellent jamais. Certes, nous étions lOOOOOle 25 janvier 1992 pour condamner la Loi Marchand. Le 6 février 1993 ne se voulait surtout pas une initiative commémorative. Les 50 000 antiracistes ont semé sur le pavé parisien les graines d'un antiracisme de "contenu" et donné un sens à notre combat qu'il nous faut savoir apprécier. JI était temps que résonnent ces voix souterraines porteuses de solidarité vraie, humaine, qui refuse la haine de l'aut re comme fatalité, l'injustice et l'exclusion comme phénomênes irréversibles. Elles portaient le rejet des Q,iscriminations institutionnelles (double peine, restrictions du droit d'asile ... ), de l'exclusion économique, sociale et civique. Nous nous devions aussi, à notre manibe, d'exprimer notre révolte et notre refus de tous ces évènements qui, depuis un an, en Europe, débouchent sur l'horreur, de prolonger les chafnes de lumiêre qui se manifestent sur notre continent. Ce 6 février 1993 marque une prise de conscience réelle du nécessaire sursaut dcvant les risques que le racisme fait peser sur les fondements de nosdémocraties. Il illustre aussi une volonté farouche de se défendre contre les mauvais coups qui se préparent contre le code de la Nationalité, le droit de vivre en famille et le droit d'asile. Des voies nouvelles s'ouvrent pour l'action antiracistc, intimemcnt liée à la lutte contre les exclusions et les discriminations, à la mobilisation pour [a promotion de l'égalité des droits. Les chemins de la mobilisation future passent par la quête d'une citoyenneté 11 dimensions multiples, une citoyenneté qui doit s'ancrer dans la vie quotidienne. dans [a vie personnelle, dans la vie internationale, une citoyenneté qui reconnaisse à chacun [e droit d'être, de vivre dignement. d'être respecté dans ses droits naturels. Ce 6 février est aussi stimulant. Il nous fait obligation de prolonger cet élan par une dynamique concrète, quotidienne, de terra in, qui doit faire converger les refus de mal-vie, des quotidiens abîmés, du chômage insupportable, des logements dégradés, ces légitimes colbes qui sedétoument trop soUYent sur l'autre: l'é tranger. Cela suppose que les dirigeants d'aujourd'hui et ceux de demain s'engagent résolument et concrètement à extirper les causes de ce mal. Le racisme est le symptÔme majeur d'une société sans lien_ La réponse passe inéluctablement par la construction col1cctive du "mieux vivre ensemble dans l'égalité", pour vivifier une idée chère iii Braudel pour qui '-La France n'esl que des Fronce conçues ensemble". MoulOild Aounit. Controverse LE MOT "RACE" EST-IL DE TROP DANS LA CONSTITUTION FRANÇAISE? Après avoir réagi - à l'instar du MRAP - à la promulgation d'un décret, toujours en vigueur, autori· sanl, dans certaines circonstances, l'archivage informatisé des "origines raciales" des personnes, des universitaires ont organisé le 28 mars 1992 un colloque intitulé: "le mot "race" est· il de trop dans la Constitution française? Une controverse". Ce colloque, dont les actes viennent d'êlre publiés par la revue Mots, élargit le s ujet au-delà des seuls fichiers informatiques. Il pose, sous plusieurs angles, le problème des pré-supposés induits par l'ut ilisation du mot "race" dans la Constilution et les textes législatifs, y compris les lo is antiracistes. Les points de vue exposés dans le compte rendu du colloque sont positiveme nt contradictoires. Certains souhaitent sa suppression d 'autres défendent son mainlien. Tous s'accordent à penser que le mot " race", dont la science dit aujourd'hui qu'il n'a aucune consistance, fait problème. Le numéro spécial de la revue Mots, dont nous publions le sommaire intégral lève le voile sur un certain nombre de ques· tions qui concernent directement les militants du Mrap e t les lecteurs de Différences, dans la mesure où le mot " race" existe dans les lois antiracistes. Il n'est pas dans notre propos de trancher un débat complexe mais d'inciter nos lecteurs à prendre connaissance des arguments présentés sur une série de questions qui concernent l'antiracisme dans sa réflexion comme dans sa pratique. Dans cette inte ntion, nous avons interviewé Simone Bonnafous, coordinatrice du colloque avec Bernard Herszberg el Jean-Jacques Israel. Différences consacre son dossier du mois à la question posée, en partant du constal que "race" est à la rois un mot et un concept dont on sait désormais qu'il ne recouvre aucune réalité biologique pertinente mais qui cominue à travailler les identités et les imaginaires collectifs. Lire suite pages 6 el 7 SOMMAIRE O"' ......... ... _. __ ..... _ ..... p 2 ..... olew .. AllIo CA_ .. __ . __ . ,4/5 .1. ....0..._ ". "."..'. •........ _.. .... .-.- ... .. ... .. ..............• ' La_ ................... ~.~.~, ...... 7 MbrhjIM.Slbll Ù .... _ ....... . Lépillher:IIs .. ! ..... ~ .... ~ .. ' ~_r_._. __ . __ 'I1/U REPÈRES TOUVIERET BOUSQUET: CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ Le 28 avril, le dossier de Touvier, poursuivi -notamment pour le massacre de Rilleux-la-Pape- pour complicité de crime contre l'Humanité, sera examiné par la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Versailles. René Bousquet, lui, Haut fonctionnaire de l'Etat français sous Vichy mais aussi des années qui ont suivi, homme d'affaire et de banque, devrait passer en cours d'assises plus de 50 ans après la rafle du Vel d'Hiv., pour crimes contre l'Humanité. Chef de la police du Gouvernement de Vichy d'avril 1942 à décembre 1943, il est à l'initiative des rafles par la police française de milliers de juifs à Paris et en zone libre, dont plusieurs milliers d'enfants, déportés, et pour beaucoup exterminés, à la suite d'un accord concocté en juillet 1942 avec l'occupant nazi et avalisé par Vichy. Le compte-rendu de cette réunion de juillet sert aujourd'hui de principale pièce d'accusation. En 1949, Bousquet n'était poursuivi "que" pour trahison. Il l'est aujourd'hui pour crimes contre l'Humanité, imprescriptibles. TOGO: DICTATURES "SOS-DÉPANNAGE" Le 25 janvier, l'armée du Président- dictateur en place depuis 26 ans, le général Eyadéma, réprime dans le sang à Lomé une manifestation pacifique organisée par l'opposition. Au-moins vingt morts, peut-être cinquante, et des dizaines de blessés. Ce 25 janvier, les ministres de la ccopération français et allemand, Marcel Debarge et Helmut Schaeffer visitent le Togo. Ils condamnent vivement le massacre, au grand embarras d'un gouvernement français qui, comme ses prédecesseurs, continue à apporter son aide au régime togolais... Les tueries se pursuivent durant les jours suivants, contraignant à l'exil vers le Ghana et le Bénin plusieurs centaines de miliers de Togolais. La Cee suspend son assistance économique à Lomé, le 8 février, la France et l'Allemagne organisent à Colmar une "conférence de la dernière chance" qui échoue faute d'un accord sur le retour de l'armée dans les casernes. Le 11, la France suspend sa coopération civile, tandis qu'Eyadéma annonce le retour de l'armée dans les casernes et appelle ... à une "réconciliation nationale". RWANDA 7-21 janv.: une commISSIOn d'enquête internationale découvre plusieurs charniers de Tutsis (ethnie minoritaire au Rwanda), massacrés par des Hutus au pouvoir (certains charniers sont découverts dans des jardins préfectoraux). De nouveaux massacres reprennent alors, visant Tutsis et opposants politiques. Plusieurs dizaines de morts en quelques jours. 8 fév., le Front Patriotique du Rwanda déclenche une offensive contre les forces gouvernementales. Plusieurs dizaines de milliers de Rwandais fuient les massacres. HAITI: CLINTON Clinton avait promis, au nom du respect des droits de l'homme, de revenir sur la politique de son prédecesseur, en laissant entrer aux Etats-unis les réfugiés haïtiens victimes de la répression depuis le renversement en (sept. 1991) du Président élu, Aristide. Le 14 janv. : avant son investiture (20), il revient sur sa promesse : les boat-people (des milliers d'Haïtiens sont morts en mer) seront rapatriés. Mais Washington intervient directement pour un plan politique à Haïti: retour d'Aristide mais amnistie des militaires-tortionnaires (sauf éventuel départ du chef de l'armée, le général Cédras). Le 18, à l'appel de l'opposition: boycott massif des "legislatives partielles". Le 10 fév., Bazin, qui dirige de fait Haïti depuis le coup d'Etat, accepte l'envoi d'observateurs internationaux. IRAK: BOMBARDEMENTS A la suite d'incursions irakiennes au Koweït, raid des Etats-unis le 13 janv. contre l'Irak. Nouveaux bombardements le 17 qui touchent un hôtel à Bagdad. Washington accuse la DCA irakienne d'avoir détourné le Tomahawk. Cessez-le-feu déclaré par l'Irak le 20. L'embargo, en revanche, se poursuit. ASILE Dans une interview au Monde du 16 janv., la Directrice du HCR pour l'Europe assure que la moitié seulement des 6000 détenus recensés en BosnieHerzégovine ont été accueillis au titre de l'asile politique. UN PONT SUR LE RHIN Manifestation anti-raciste de 2 CHRONO plusieurs milliers de personnes le 17 janv. à Strasbourg sur le Pont de l'Europe reliant la France et l'Allemagne. LIGUE LOMBARDE En Italie, la Ligue lombarde qui a obtenu à Varese 37,3% des voix aux municipales (déc.) y dirige la mairie (18 janv.). Contre la démocratie-chrétienne, détrônée après près d'un demi-siècle de pouvoir, elle obtient le soutien du PRI (républicains) et des ex-communistes du PDS contre la promesse de la non privatisation des services municipaux et de la non mise en oeuvre de mesures défavorables aux immigrés. PALESTINE Le 19 janv., le parlement israélien abroge la loi de 1986 interdisant aux citoyens d'Israël tout contact avec l'OLP. Le 22 janv., la télévision israélienne passe un message de Yasser Arafat "au peuple et au gouvernement d'Israël": il en appelle à "une rencontre des braves pour une paix des braves". Le premier ministre israélien refuse cependant de négocier officiellement avec la centrale palestinienne, et d'appliquer la résolution 799 de l'Onu, qui exige le retour des 415 déportés palestiniens dans leurs foyers. La cour suprême d'Israël confirme cette décision (28 janv.). Face au risque de "pressions internationales", prônées pour la première fois par le secrétaire général des Nationsunies, Israël, avec l'aval des Etats-unis, propose non d'appliquer la résolution de l'Onu mais de rapatrier le quart des déportés, qui refusent cette demi-mesure. Dans les territoires occupés, la hausse du nombre de victimes civiles palestiniennes tuées par balles par l'armée israélienne, inquiètent certains élus, officiers, et deux ministres israéliens. Plusieurs maisons de "suspects" de résistance détruites aux missiles anti-char. ANGOLA: GUERRE CIVILE 29 et 30 sept., l 'U nita (partiellement lâchée par ses principaux bailleurs de fonds) avait refusé de reconnaître sa défaite aux élections législatives. 5 janv. : premières offensives contre les forces armées de l'autorité élue. Prise de la ville pétrolière de Soyo le 20 janv., la guerre civile menace de nouveau de durer. AUTRICHE 200 000 Autrichiens manifestent le 23 janv. bougie à la main contre la xénophobie, à la veille du lancement par le leader d'extrême droite Joerg Haïder de sa pétition nationale contre l'immigration et contre les droits des immigrés. Espérant recueillir un million de signatures, il n'en a obtenu "que" 417 300. 100 000 lui suffisent cependant pour que son projet xénophobe soit examiné au Parlement. EX-YOUGOSLA VIE 22 janv.: offensive croate contre les milices serbes dans la Krajina (sud-ouest de la Croatie) pour désenclaver la région au sud du pont de Maslenica. Combats entre Croates et Bosniaques en Bosnie, les forces croates prétendant intégrer les forces bosniaques dans les régions que le plan de l'Onu prévoit de leur attribuer. Reprise des négociations le 23, ajournées le 30. Les négociations reprennent à New-York, la nouvelle administration américaine annonce un plan en six points (10 fév.): nomination d'un émissaire américain, pressions en faveur de négociations, pressions économiques accrues contre la Serbie, respect de la zone d'exclusion aérienne audessus de la Bosnie, participation américaine à une force de maintien de paix en cas d'accord, tribunal de guerre sous égide des Nations-unies. UGUR MUMCU ASSASSINÉ Militant de gauche, emprisonné au début des années 70, militant de la laïcité, le journaliste turc U gur Mumcu est assassiné le 24 janv. Attentat revendiqué par deux mouvements islamistes. Des dizaines de milliers de Turcs lui rendent un dernier hommage lors de ses funérailles. FICHIERS Sept. 1991 Serge Klarsfeld découvre dans les archives du Ministère des Anciens combattants un fichier de juifs qu'il affirme être celui de la population juive de la Seine établi par Vichy (voir Diff nO 138). La Commission nationale de l'informatique et des libertés demande une enquête selon laquelle existeraient d'autres fichiers de juifs, d'étrangers, de francs-maçons et de communistes (communiqué du Ministère de la culture du 26 janv.). DU MOIS PROVOCATION C'est au cours d'une cérémonie officielle le 26 janv. à la Sorbonne à la mémoire d'étudiants morts pour la France que Le Pen s'est cru autorisé àjouer les invités, accompagné de quelques gros bras. Des incidents l'ont opposé à des étudiants dénonçant la présence d'un leader qui "prône une France négation même de toute l'Université". Le Pen, lui, a fustigé "des éléments violents dont plusieurs étaient à l'évidence d'origine (sic) étrangère" PROFANATIONS Neuf lycéens, accusés d'avoir profané en nov. dernier 58 tombes de soldats musulmans à Mulhouse, sont arrêtés le 27 janv .. Ils espéraient mener une "virée anti-arabe", puis ont préféré profaner le cimetière. Ils risquent de deux à quatre mois de prison mais ont tous été remis en liberté. EXCLUSION DU FN Serge Boudot, troisième de liste du FN dans le Doubs, aux régionales, derrière Roland Gaucher - de son vrai nom Gaudillot -, vient d'être exclu du FN pour avoir osé protester contre celui-ci, ayant appris son passé. Gaucher était bien un ancien dirigeant du RNP de Déat, parti collaborateur avec l'occupant nazi. Aujourd'hui élu FN et directeur de National Hebdo, il accuse Boudot de participer à la "campagne christo- marxiste" engagée contre lui. "RACKET" Conseillère régionale RhôneAlpes du Front National, Germaine Burgaz, ancienne-vice présidente du front, assure (27 janv.) avoir été écartée du FN après avoir refusé de lui signer une reconnaissance de dette de 180.000F., représentant une rente mensuelle sur plusieurs années. Ce "racket" est pratiqué, ditelle, de façon générale auprès des élus. Elle affirme aussi que le courant du "nationalisme exacerbé" s'est renforcé au sein du FN depuis l'entrée en force des troupes du GRECE. DÉMOCRATIE Le Mrap proteste dans un communiqué (28 janv.) contre un neuvième passage de Le Pen à "l'Heure de vérité", tandis que, dans leur pluralité, les mouvements anti-racistes, eux, ne sont pas invités. ZAIRE Violente mutinerie à Kinshasa de soldats non payés de l'armée de Mobutu. Pillages, centaines de morts dont le nouvel ambassadeur français, Philippe Bernard (28 janv.). La France, la Belgique et les Etats-unis, finissent par lâcher Mobutu, soutenant le "gouvernement de transition", dont Mobutu renvoie le premier ministre Tshisekedi le 6fév. ACADÉMIE UNIVERSELLE Chercheurs, artistes, écrivains ... de différentes nationalités participent à la fondation de "l'Académie universelle des cultures", le 29 janv., au Louvre. Parmi ses membres, mais toujours en résidence surveillée en Birmanie: Aung Suu Kyi, prix Nobel de la Paix. L'Académie entend organiser rencontres et réflexions sur le XXlème siècle "métissé" à venir... ALLEMAGNE: ANTINAZIS Plusieurs centaines de milliers de manifestants anti-nazis dans toute l'Allerp.agne, contre le racisme, à l'occasion du 60ème anniversaire de l'accession d'Hitler au pouvoir, le 30 janv. Nombreux autres rassemblements chaque semaine depuis plusieurs mois contre les violences de l'extrème-droite. Le 9 janv., un nouveau foyer d'étrangers est incendié à Obisfelde (ex-Rda), ainsi que la maison d'un Turc à Müllheim. Plus de 17 personnes tuées par des bandes de néo-nazis en 1992, et plus de 1000 attentats racistes perpétrés en déc. par l'extrême-droite. Début fév., plusieurs projets de loi ont été présentés visant à réformer le code de la nationalité, permettant entre autres que le droit du sol succède au droit du sang actuellement en vigueur. FRANÇAIS À L'ÉTRANGER Selon la Direction de la population et des migrations, 1,3 millions de Français vivaient à l'étranger au 1er janvier 1992, principalement en Europe (51,6%, avec 40% dans la CEE) et en Afrique (20,9%). 60% de ces émmigrés français sont inactifs. KANAKY: MI-PARCOURS 2 au 4 fév. : quatrième réunion de suivi des accords de Matignon (juin 1988), avec les indé- 3 pendantistes du FLNKS, et les anti-indépendantistes du RPCR. Bilan à mi-parcours jugé positif, mais l'essentiel du "rééquilibrage" reste encore à faire, selon le FLNKS. Réuni en congrès les 16 et 17 janv., il a décidé de poursuivre le "processus engagé", son objectif demeurant "l'indépendance kanake socialiste". SUSPENSION Dans un communiqué du 15 jan. le Mrap, "qui avait condamné la mollesse de la sanction prononcée à l'égard de Bernard No tin " , exprime "son indignation devant la réintégration du négationiste à l'Université de Lyon III". "C'est la crédibilité de l'Université qui est atteinte". Le Mrap demande aux étudiants de boycotter les cours de N otin. A la suite d'une manifestation de l'Union des étudiants juifs, du Mrap et de la Licra, le 30 janv., l'université de Lyon III annonce le 2 fév. la suspension des cours de Notin. CONFÉRENCE ISLAMIQUE Réunie au Caire jusqu'au 21 janv., la Conférence internationale islamique dénonce les "déviations des concepts authentiques de l'Islam, tels que la violence", prône le dialogue entre courants d'idées différents dans le monde islamiql!e, propose la mise en place d'une cour de justice islamique, et d'une force de défense en cas de conflits. AFRIQUE DU SUD A la suite des grèves de chauffeurs de taxis, violemment repnmes, le gouvernement sud-africain déclare (2 fév.) Johannesburg "zone d'insécurité" et attribue à la police des pouvoirs accrus. Nombreux prisonniers, plusieurs morts et blessés. VICTIMES DE VICHY "Il est institué une journée nationale à la mémoire des victimes des persécutions racistes et antisémites commises sous l'autorité de fait dite "gouvernement de l'Etat français" (1940- 1944). Cette journée est fixée au 16 juillet, date anniversaire de la rafle du Vélodrome d'Hiver à Paris si ce jour est un dimanche, sinon, elle sera reportée au dimanche suivant". Art. 1er du décret signé par François Mitterrand (JO 4 fév.) Le Mrap salue ce geste, "condamnation explicite de ce que fut la réalité R EPÈRES du régime de Vichy". Il demande la fermeture des librairies diffusant de la propagande négationniste, l'exclusion de la fonction publique ou parapublique d'enseignants condamnés pour révionnisme, la dissolution d'associations négationistes. MARIAGE MIXTE Najat Haffai, enceinte, et Mohamed Sebri veulent se marier. Naturel? Sans doute, mais pas facile pour autant: elle est Française et lui Marocain, sans titre de séjour. Depuis juillet dernier, Dominique Baudis, maire de Toulouse, refuse de les marier, parlant de "risque" de mariage blanc. Le 7 fév. seulement, le mariage est célébré, après accord du procureur de la République. Une réponse du Parquet attendue plus de six mois. ABSTINENCE C'est ce que prône le pape Jean-Paul II pour lutter contre le fléau du Sida, lors de son voyage en Ouganda. Au Soudan, il rencontre (10 fev.) le général Omar el Bachir (l'homme fort de la junte islamiste qui, ayant pris le pouvoir en juin 1989, a mis fin au processus démocratique et au processus de paix avec le sud), et plaide en faveur de la paix entre chrétiens et musulmans. LÉGISLATIVES ET IMMIGRATION L'opposition (9 fév.) présente son "Projet d'Union pour la France". Il prévoit en matière d'immigration, des contrôles et des reconduites plus strictes aux frontières , la chasse aux mariages blancs, aux demandes d'asile jugées infondées ... , une révision de la législation visant notamment à restreindre le regroupement familial, une réforme du code de la nationalité une école non du "multiculturalisme", mais de "la transmission d'une morale, de valeurs et d'une culture communes" ... MOUSSA TRAORE Après 23 ans de pouvoir dictatorial, près de deux ans après la répression de la manifestation du 22 mars 1991 qui avait fait 200 morts et des centaines de blessés, la Cour d'assise de Bamako, qui juge Moussa Traore depuis le 26 nov. le condamne à mort le 12 fév. Chronologie établie par I.A. MANIFESTATION DU 6 FÉVRIER INTERVIEW D'ALAIN CALLE" S, secrétaire Différences: Pour quelles raisons le 6 février - qui rappelle le cortège de l'extrême-droite de 1934 - at- il été retenu par les 5 associations (Fasti, Cai!, Licra, SOS Racisme, Mrap) pour faire date en tant que deuxième manifestation nationale antiraciste des années 90 ? Alain Callès: Nous n'avons pas été insensibles à la connotation historique que donnait la date du 6 février Gour où les ligues factieuses s'attaquèrent aux fondements de la République), lorsque nous avons choisi le jour de cette manifestation, même si les critères de choix ont été principalement techniques (suffisamment éloigné des élections législatives afin de n'être pas trop perturbé par la campagne électorale et d'éventuelles pratiques politiciennes, avant les vacances scolaires, etc ... ). Cette manifestation, française dans son organisation, est toutefois l'affirmation de notre volonté d'avancer une Europe des droits face à celle de tous les racismes que l'on voit progresser aujourd'hui: "nettoyage ethnique" prôné par la Ligue lombarde en Italie, "purification ethnique" en ex-Yougoslavie, cadavres rejetés sur les rivages en Espagne, verdict raciste d'acquittement, crimes et ratonnades en France. Notre réponse doit tenir compte de la pédagogie que nous apporte l'Histoire quand, à l'ombre des nationalismes et des discours sécuritaires, s'effrite la pratique d'une citoyenneté politique mais aussi sociale. Le 21 mars a été choisi par les antiracistes pour manifester en Europe. En France, ce seront les élections. Plutôt que de chercher à faire date, nous avons jugé urgent de réagir et de reprendre l'offensive sur le terrain de la citoyenneté et des pratiques démocratiques. Loin de l'expression d'un antiracisme réactif et moralisateur, et contrairement à certains en Allemagne qui ont pu défiler contre le racisme puis quelques jours après proposer pour toute solution des restrictions démocratiques, notre réponse s'est voulue ambitieuse et enracinée dans nos valeurs. Peut-on considérer que cette manifestation "sans passion" augure implicitement de l'institutionnalisation d'une manifestation nationale annuelle? A.C. : Si un qualificatif devait être donné à cette manifestation, ce serait celui d'exigeante. Durant les préparatifs de cette manifestation, le souci des organisateurs, et en particulier du Mrap, aura été de porter haut le niveau des exigences. Il nous aura fallu être extrêmement déterminés pour que le texte commun d'appel exige le droit de vote des immigrés, la suppression de la double peine, et soit signé par 140 organisations. Même si le Mrap peut regretter de n'avoir pas réussi à faire partager toutes ses analyses à nos partenaires et que certains éléments tels que la condamnation de la purification ethnique en ex-Yougoslavie et l'application réelle de la loi contre le racisn:e, soient absents du texte d'appel, notre Mouvement peut être fier d'avoir grandement contribué à rassembler autour de cet appel des organisations d'origines aussi diverses. Le communiqué final exprimait le soutien de tous aux Déboutés du Droit d'Asile et aux mal logés, et demandait que des mesures immédiates soient prises. Ainsi, nous sommes loin de l'institutionnalisation d'une manifestation antiraciste, même si c'est l'image qu'auraient peut-être voulu en donner certains qui bientôt n'auront plus d'autres excuses que d'avoir été victimes ... de surdité. De même, si "sans passion" veut dire en sachant "tête froide garder", alors oui, cette manifestation a su, avec une grande détermination, mais dans le calme et aussi la gaîté, exiger que notre démocratie ose plus de démocratie et en tire les conséquences par la suppression de la double peine, le respect du droit d'asile, une lutte réelle contre les exclusions et l'exercice véritable d'une justice égale pour tous. Si cette manifestation peut sembler répéter certaines revendications qui ont déjà été portées dans d'autres cadres, et en particulier lors du 25 janvier 1992, c'est malheureusement parce que depuis cette date, peu de réponses concrètes ont été apportées et qu'entre temps la situation sociale s'est encore dégradée, rejetant à la marge de notre société un nombre croissant de chômeurs, de sans domicile fixe, de sans repères. Pour cela, il est de notre devoir d'antiracistes de terrain d'éclairer les causes, de montrer les mécanismes d'exclusion et d'interpeller les pouvoirs publics, quitte à sembler parfois nous répéter. 4 L'organisation de cette manifestation a demandé plusieurs semaines de préparation. Le Mrap semble avoir mobilisé ses adhérents avec succès. Quelles leçons en tire l'association pour son activité propre et pour ses actions collectives à venir? A.C. : Dans le contexte actuel, il était urgent de réagir, et le Mrap a décidé de faire de cette manifestation une priorité. Renée Lemignot et moi-même avons assuré la coordination du Comité de pilotage constitué des 5 organisations appelantes et qui, lui, coordonnait le collectif composé par l'ensemble des signataires. Simultanément un groupe de travail du Mrap a assuré la mobilisation du Mouvement à travers les Comités locaux et avec des actions spécifiques pour la Région Parisienne. Sans compter les tirages propres aux Comités, 40000 tracts reprenant l'appel commun et les positions du Mrap ont été diffusés à Paris, 2000 affiches ont été collées, nous sommes intervenus dans la presse et sur les radios ... L'ensemble de ces actions de sensibilisation, le fait que le Mouvement soit un acteur principal pour la réussite sans équivoque de cette manifestation, ont certainement contribué à la mobilisation de nos militants mais aussi des adhérents et des sympathisants. La presse qui nous a d'ailleurs reconnu l'un des plus importants cortèges de la manifestation ne s'y est pas trompée en reprenant largement les slogans portés sur la scène par le Mrap et en reconnaissant à notre Mouvement le sérieux et la crédibilité qui font son autorité, quel que soit le pouvoir en place. Il ressort de ce succès que nous sommes dans le vrai de la réalité que vivent quotidiennement les gens lorsque nous exigeons que le combat contre le racisme soit mené dans la clarté et éclaire les causes réelles sur lesquelles il s'enracine. Dans l'avenir il nous faudra donc poursuivre notre combat dans ce sens, en luttant concrètement contre les exclusions, contre une société duale qui oppose le Nord au Sud, les riches aux pauvres, les jeunes aux vieux, les Français aux immigrés, et mettre ainsi les responsables en face de leur pratique. De même, nous devons partager et faire partager ce combat avec le plus grand nombre. Pour cela, les objectifs doivent être préalablement clairement définis, dans le respect de la spécificité de chacun. C'est ce que nous avons pratiqué dans le cadre du collectif national; la plate-forme commune d'appel a été discutée démocratiquement par tous, les amendements ont été discutés par tous avant d'être intégrés. Il en a été ainsi pour l'ensemble des documents communs (affiche, communiqué, ... ). C'est une pratique démocratique qui permet de fonctionner dans la clarté et qui a permis à chacun de s'investir dans l'action en mouvement. Là aussi, c'est une différence fondamentale avec la préparation du 25 janvier, et même si cela est souvent un peu fastidieux, parfois houleux, on en arrive à des résultats fructueux, pour peu que chacun fasse preuve d'une réelle volonté d'aboutir. Ces pratiques, difficiles à mettre en oeuvre sur le plan national où les enjeux sont d'importance, se réalisent plus facilement localement, dans un cadre plus restreint où chacun se connaît. Ce qu'on appelle désormais au Mrap un "antiracisme de contenu" ou de "proximité" s'oriente sur les vecteurs socio-économiques

logement, emploi, école,

etc. .. Cela ne risque-t-il pas de diluer l'action antiraciste vers des combats dont la nature a jusqu'ici concerné plus directement les organisations politiques ou syndicales? A.C. : Jusqu'à présent, nous étions peu nombreux au sein des organisations antiracistes à mettre l'accent sur les vecteurs socio-économiques qui portent le racisme, et il est encourageant de constater que maintenant nous sommes de plus en plus nombreux à vouloir éclairer les exclusions sociales et économiques comme des causes. L'antiracisme de proximité passe par la nécessité d'analyser ces mécanismes, sans occulter d'autres exclusions dont on parle moins comme les exclusions culturelles et historiques. C'est aussi au concret et sur le terrain que doit s'exprimer notre solidarité, et c'est à travers ce vécu que se forge, dans le réel du quotidien, un antiracisme de proximité et de contenu. Aller au coeur des faits ne saurait être assimilé à de la dilution. Sur ces bases nous pourrons véritablement développer une péda- MANIFESTATION DU 6 FÉV RIER général adjoint du MRAP gogie ayant prise sur la vie, et il est très important que ce travail se fasse en collaboration avec d'autres acteurs sociaux tels que les syndicats ou les organisations de quartier. Longtemps nous avons considéré la citoyenneté sous son aspect civique et politique. Certes c'est un facteur important, et dès 1984 le Mrap demandait l'accès aux droits civiques pour les immigrés. C'est une mesure de simple justice et d'égalité. Mais il ne faut pas pour autant oublier la dimension sociale inhérente au concept de citoyenneté qui se trouve de fait à l'interaction du champ social et du champ politique. L'un ne peut vivre durablement sans l'autre, et l'exigence d'une citoyenneté réelle par les droits (à l'éducation, au logement, à une justice égale pour tous ... ), d'une citoyenneté ouverte et en particulier avec les mêmes droits civiques pour l'ensemble des personnes résidant sur notre sol quelle que soit leur nationalité, d'une citoyenneté active permettant à chacun d'être acteur de sa vie au quotidien plutôt que d'attendre d'hypothétiques résultats à ce qui ne va pas par le truchement des délégations successives de pouvoir, cette exigence, est indivisible. Elle concerne d'autres acteurs sociaux qui sont nécessairement nos partenaires pour interpeller, sans s'y substituer, le monde politique afin qu'il prenne la pleine mesure de ses responsabilités et des actes qui en découlent nécessairement. Commentfaut-il apprécier la présence de délégations d'autres pays d'Europe, essentiellement semblet- il d'Allemagne et d'Angleterre? A.C.: Des délégations d'organisations ou de partis étrangers, parmi lesquels on a pu remarquer des Allemands, des Anglais et des Espagnols ont tenu à venir exprimer leur solidarité aux manifestants de ce 6 février. Certains ont d'ailleurs été invités par le Mrap. On a pu également noter le soutien de l'IMADR (International Mouvement Against Discriminations and Racism) au bureau duquel siège le Mrapet du sous comité sur le racisme, la discrimination raciale, l'apartheid et la décolonisation du Comité spécial des ONG pour les Droits de l'Homme à Genève dont le Mrap fait également partie. S'il est vrai qu'il y a des spécificités propres à chaque pays dans les manifestations du racisme et que tous les événements actuels en France, en Allemagne, en Autriche, en Espagne, en ex-Yougoslavie ou en Italie touchent chacun de nous dans son pays, ils touchent aussi l'ensemble des antiracistes européens. Nous sommes tous directement concernés par ce qui se passe dans les pays voisins. La crise et les exclusions qu'elle engendre frappent l'Europe toute entière et la réponse se situe aussi à ce niveau, ce qui explique le soutien de nos amis des autres pays. L'Europe que nous voulons est celle du droit de vivre dignement pour tous, dans la solidarité et l'Egalité des Droits. Il faut toutefois veiller à ce que le débat à l'intérieur du mur de Schengen n'occulte pas ce qui se , A PARIS passe de l'autre côté, et en particulier de l'autre côté de la Méditerranée. Les solidarités que nous exigeons nécessitent une nouvelle répartition des richesses et des modes d'échanges et ne se contentent pas de charité, fût-elle médiatisée. Las des spectacles où les comédiens s'invitent à tour de rôle pour mieux se gargariser de l'immensité de leur ego, nous affirmons qu'il est urgent que soient engagés des actes politiques, ce qui peut nécessiter du courage politique, par ceux qui en ont les responsabilités. Propos recueillis par Chérif a Benabdessadok Ont notamment participé à la manifestation parisienne, les comités de: Vincennes, Orly, Vitry sur Seine, Bagnolet, Saint Denis, Stains, Pierrefitte, Pantin, Saint Ouen, Epinay sur Seine, Villetaneuse, Aubervilliers, Etampes, Morsang sur Orge, Longjumeau-Chilly Mazarin, Massy-les-Ulis, Boulogne Billancourt, Asnières-Gennevilliers, Bourg la Reine, Chelles, Meaux, Melun-Damarie, Fontainebleau, Versailles, Les Mureaux, Guyancourt, Mont de Marsan, Bordeaux, Agen, Marmande, Tonneins, Pau, Besançon, Belfort, Brest, Nantes, Saint Nazaire, Chartres, Dreux, Orléans, Reims, Nancy, Metz, Saint Avold, Poitiers, Limoges, Tarbes, Albi, Castres, Douai, Roubaix Tourcoing, Saint Lô, Alençon, Crépy en Valois, Marseille, Vitrolles, Tarare, Venissieux, Rouen, ainsi que les fédérations du Vaucluse et de l'Isère. EN PROVINCE Initiatives locales avec la participation du MRAP Dans l'Yonne à Auxerre, manifestation contre le racisme. Dans l'Aude à Carcassonne rassemblement devant le monument de la Résistance. Rassemblement le 5 février, Place de l'Horloge à Avignon. Manifestation organisée localement à Perpignan, le 6 février. A Oloron Ste Marie en soutien à la manifestation à Paris, rassemblementle 4 février devant la Mairie. A Orthez en solidarité avec la manifestation à Paris, dépôt de gerbes et intervention le même jour au mémorial de la Résistance et de la Déportation. Manifestation locale à Sète, place de la Mairie. Manifestation locale à Béziers, place de la Révolution devant le monument Casimir-Péret. Manifestation à Montpellier le 6 février ou déplacement collectif à Paris. Rassemblement à Nice le 6 février, place de la Libération. Place Pasteur, à Besançon rassemblement le mercredi 3 février et départ en car le samedi 6 février pour Paris. Rassemblement le mercredi 3 février au monument du Déporté à Saint Etienne. A Aubenas, rassemblement Place du Château. A Privas, rassemblement Place de l'Hôtel de Ville. 5 SOS KURDES Des travailleurs kurdes, onglnaires de Turquie et résidant en plusieurs pays européens, ont entamé à Bruxelles une grève de la faim. Ils veulent par cette action attirer l'attention sur la terreur exercée par l'Etat turc dans les provinces de l'Est et du Sud-Est de l'Anatolie. Malgré tous les démentis, malgré l'invocation perpétuelle de la responsabilité des guerillos du PKK qualifiés de terroristes, malgré la diffusion à une grande échelle de commentaires lénifiants sur le nouveau code de procédure pénale adopté en Turquie, la répression politique et militaire ne fait que s'aggraver: arrestations en masse, assassinats de journalistes et de militants des droits de l'homme, destruction de villages entiers, voire de villes, rien n'est épargné à la population dont le désir n'est que de vivre en paix et d'accéder enfin à la liberté par l'autodétermination. Les militants du Mrap connaissent beaucoup de travailleurs originaires de cette région, et ils soutiennent les revendications de leurs organisations. Instruit par la douloureuse expérience des guerres coloniales, le Mrap affirme qu'il n'y a aucune autre solution au problème posé dans les "13 vilayets" que celle de l'autodétermination. La répression ne fait que renforcer la guérilla, et elle aboutit à creuser un fossé de plus en plus profond entre les populations kurde et turque de cette région. Seuls l'arrêt de la répression, le rétablissement des libertés publiques, permettront de rétablir la paix et la sécurité. Dans cette région comme dans toutes les autres, la France doit prendre énergiquement position pour les libertés, pour la démocratie, contre la répression militaire des aspirations légitimes du peuple. La défense de la démocratie et des droits de l'homme ne se divise pas. Aucune considération de stratégie géopolitique ne peut ici prévaloir, pas plus qu'au Maroc, au Zaïre, au Togo et dans d'autres pays d'Afrique. Nous constatons avec tristesse que le gouvernement français ne suit pas ce chemin. Au contraire, des perquisitions et des arrestations ont eu lieu récemment à Marseille, sous le prétexte d'une recherche d'armes. A notre connaissance, une vigilance égale ne s'exerce guère à l'encontre des agents de l'extrême-droite turcs infiltrés parmi les travailleurs immigrés, qui dans le passé ont commis des crimes en France et en Allemagne. Le Mrap demande au gouvernement français de clarifier enfin sa position et aux démocrates français de renforcer leur solidarité. Communiqué du Mrap 01.02.1993 INTERVIEW DE SIMONE BONNAFOUS LE MOT "RACE" EST-IL DE TROP DANS LA CONSTITUTION FRANÇAISE? suite de la page 1 Différences: Pour quelles raisons tenez-vous à affirmer dans le préambule des actes du colloque qu'il ne devait pas être assimilé à un "énième colloque contre le racisme"? Simone Bonnafous: Cette formule concerne les modalités de l'intervention des scientifiques dans le champ du racisme et de l'antiracisme. Je voudrais rappeler qu'avant ce colloque, le conseil d'administration de l'université Paris XIIVal- De-Marne avait décidé en 1990, à la suite de la profanation du cimetière de Carpentras, de réaliser une brochure intitulée "Contre le racisme : arguments et réflexion". Dans cette brochure dont la réalisation avait été rendue possible grâce à un vote politique de l'Université, notre travail a consisté à réunir des contributions d'universitaires appartenant à des spécialités scientifiques diverses. L'objectif était bien sûr de contribuer à la lutte contre le racisme mais en adoptant d'autres modalités que celles du tract syndical ou politique. Nous avons fait parvenir cette brochure aux 18000 étudiants de notre Université, ce qui représentait un coût et un engagement non négligeables. C'est de là qu'est née l'idée d'un colloque pluridisciplinaire? S.B. : Oui, nous avons voulu éviter ce qui nous apparaît comme le défaut des colloques généralistes sur le racisme. Ils regroupent souvent les mêmes personnes et on peut les répéter indéfiniment. De plus, on n'en voit pas les effets pratiques. Notre recherche méthodologique consistait à trouver un mode d'entrée dans la question raciste qui soit original et qui puisse avoir des effets auprès des responsables du monde politique, administratif... Une proposition nous a été faite par Bernard Herszberg qui est président de l'association "Galilée 90" (1) . La question posée par la Charte Galilée 90 nous apparaissait pertinente par son caractère pratique. Cette entrée en matière offrait la garantie que ce colloque ne se diluerait pas dans des perspectives trop hétérogènes. Poser une seule et même question à tous les chercheurs permettait de concentrer le débat et d'espérer avancer plus loin qu'on ne le fait généralement quand le sujet est trop vaste. Quels effets attendiez-vous? S.B. : Nous n'attendions pas tous les mêmes effets parce que nous ne partagions pas le même point de vue. Pour B. Herszberg et les militants de "Galilée 90", ce colloque devait fonctionner comme une caisse de résonnance pour ce qu'ils réclament: la suppression du mot "race" de la Constitution. En ce qui me concerne, bien que je sois du même avis que Herszberg, il s'agissait de faire prendre conscience de l'importance du vocabulaire et de la terminologie, en particulier dans les textes législatifs. Le but était de créer un débat. Ce débat a, me semble-t-il, pénétré les milieux juridiques, qui étaient représentés au colloque. Olivier Duhamel (2) a, lors de l'exposé de synthèse, proposé la suppression du mot "race" et son remplacement par une formule plus universelle, par exemple celle- ci: "la République assure l'égalité devant la loi sans discrimination de quelque nature que ce soit". Tout le monde semble s'accorder à reconnaître que l'utilisation du terme "race" pose problème. Mais quant à sa suppression, les divergences sont importantes et laissent le lecteur profane dans l'embarras ... S.B. : Pierre Fiala et moi-même, qui avons travaillé de près sur le texte de la Constitution en linguistes, restons très nuancés. Nous proposons des formules de substitution mais nous nous opposons fermement au remplacement de "race" par "ethnie". Toute tentative d'euphémisation paraît vouée à l'échec et repousser la solution du problème à plus tard. Comme Olivier Duhamel, nous avons envisagé des énoncés qui ne poseraient pas la nature de la discrimination mais qui la condamneraient en tant que telle. On renouerait de ce fait avec la déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen de 1789. Le problème posé par la formulation de la Constitution est que non seulement le mot "race" y est inscrit mais sans même des guillemets de distanciation. Il faudrait pour le moins "guillemeter" le mot. Je pense néanmoins qu'il serait plus sage de supprimer ce mot et de condamner toutes les discriminations. Cela dit, la position d'Etienne Balibar qui considère que supprimer le mot entraînerait la disparition des traces des discriminations bien réelles est un argument important. Ce qui signifie que le mot "race" est porteur d'une histoire et d'une mémoire qui risqueraient d'être occultées avec la disparition du mot des textes législatifs. S.B. : Oui, cet argument est fort. Mais je continue à penser qu'il y 6 aurait d'autres façons d'interdire la discrimination raciste dans le texte constitutionnel; par exemple "condamner toute discrimination fondée sur l'existence prétendue de race" me paraît pouvoir à la fois condamner la discrimination et ne pas reprendre le pré-supposé de l'existence des races. Il y a là un vice profond, porteur d'effets sur l'ensemble des textes administratifs, qui peut justifier la croyance naïve dans l'existence des races. Vos critiques touchent-elles aussi l'énoncé des lois antiracistes? S.B. : Non, si elles n'emploient pas le substantif "race" ou l'adjectif "racial". Je vous renvoie à l'article de B. Herszberg paru dans le Monde , concernant les fichiers informatiques (3), où il était fait mention de l'intégration d'éléments d'information relatifs à l'origine "raciale". Le terme "racial" est-il raciste? S.B. : "Racial" et "raciste" ne sont pas synonymes. Si l'on compare l'expression "violence raciale" et "violence raciste", la différence tient au point de vue adopté sur le même événement évoqué. Selon l'étude que j'ai menée, quand le journal "Minute" l'utilise, il est clair qu'il analyse les violences qu'il commente comme dues à des différences de races dont il admet l'existence, même sous une forme très floue, et il considère que ces différences sont fondatrices de violences. Dans ce contexte, la violence est expliquée par la rencontre d'individus porteurs de différences "biologiques". En revanche, si vous parlez de violences racistes, vous expliquez ces violences par des préjugés sur les races qui font que les personnes qui se sont confrontées se perçoivent comme de races différentes et s'affrontent au nom de ces différences. Dans le cas de "racial", le locuteur prend à son compte le pré-supposé de l'existence des races et la différence de races comme fondement de violence; dans le cas de "raciste", le locuteur analyse la violence comme induite par un préjugé. L'existence du mot "racial" dans des textes législatifs est très grave car le législateur semble reprendre à son compte le pré-supposé de l'existence des races. Quels effets attendez-vous de cette controverse auprès des associations antiracistes? S.B.: Je souhaite que ce numéro de Mots soit lu par le plus grand nombre de militants du MRAP. C'est maintenant aux militants antiracistes de s'emparer du débat. Il serait souhaitable que le MRAP exprime sa position. Car la difficulté est qu'il n'existe pas de position scientifique tranchée sur les effets de l'utilisation du mot "race". La réponse est en fait d'ordre politique. Etienne Balibar le démontre amplement dans sa contribution. En effet, les termes d'une Constitution n'ont pas à être fondés scientifiquement. On peut, par contre, s'interroger sur les effets politiques et moraux d'un texte constitutionnel. De ce point de vue, la parole est en définitive aux militants et non pas aux universitaires. Débattre, réfléchir, écrire, n'est-ce pas une position confortable tandis que ceux qui se définissent comme militants se "coltinent" la réalité? Ils doivent agir et réagir sans attendre que les problèmes philosophiques ou linguistiques soient tranchés. S.B. : Ce que nous avons fait à l'Université de Paris XII est un effort de convergence. Envoyer notre publication contre le racisme à 18000 étudiants n'est pas un acte strictement universitaire. L'organisation de ce colloque relève de cette même double position. Nous ne refusons pas d'aller à des questions concrètes. La façon dont nous avons abordé le sujet "race" n'est pas du tout classique. Je suis très impatiente de savoir comment les militants du MRAP ressentiront ces travaux. La pluridisciplinarité du colloque a forcé tous les intervenants à parler un langage clair: c'est là une forme d'engagement militant. Interview réalisée par Chérifa Benabdessadok (1) Cette Association constituée en mai 1990 a pour but unique la suppression du mot "race" de la Constitution. Plusieurs dizaines de chercheurs, en particulier généticiens et biologistes, dont Albert Jacquard, ont souscrit à cette initiative. (2) Ure le sommaire du numéro spécial de la revue Mots ci-joint et notamment l'intitulé de l'article de M. Duhamel. (3) Il s'agit en particulier du décret N° 90-115 du 2 février 1990, signé par le Ministre de la Justice de l'époque, M. Arpaillange, qui stipule dans son article 1: "Les juridictions de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif sont autorisées ( .. .) à mettre ou à conserver en mémoire informatisée les données nominatives ( .. .) qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ( ... ) des parties au litige, "Journal officiel, 4 février 1990". On pourra se reporter au numéro 1 02 de Différences, d'avril 1990, dans lequel nous avions publié deux articles sur cette question dont un argumentaire de Maître Didier Seban, avocat du MRAP, sur les raisons de la requête du MRAP auprès du Conseil d'Etat à propos de ce même fichier. Cette requête a été rejetée (18 novembre 1992). SANS DISTINCTION DE ... RACE LE SOMMAIRE Présentation: le mot race est-il de trop dans la Constitution française? Une controverse. Simone Bonnafous (professeur de sciences de l'information et de la communication, Université Paris 12), Bernard Herszberg (professeur de biophysique Paris 12, praticien à l'hôpital Henri Mondor) et Jean-Jacques Israel (professeur de droit public Paris 12) LA RACE COMME MOT Est-ce à dire que la race en présuppose "existence? Simone Bonnafous et Pierre Fiala (maître de conférences en linguistique à l'ENS Fontenay/SaintCloud) Dire non au sophisme de l'appartenance à la race. Antonia Soulez (maître de conférences en philosophie Université Paris 12) Eloge de la bâtardise. Paul Mengal (professeur d'histoire de la psychologie Université de Paris 12) De l'usage historico-politique de race entre 1680 et 1820 et de sa transformation. Daniel Teysseire (maître de conférences d'histoire moderne Université de Paris 12) Le mot race au tournant du siècle. Madeleine Rebérioux (professeur d'histoire contemporaine Université Paris 8) Usages théoriques et usages banals du terme race. Colette Guillaumin (chargée de recherche en sociologie au CNRS) Races (humaines) et manuels scolaires. Pierre Dariu (directeur de recherche en anthropologie génétique au CNRS) Repérage de quelques chaînes signifiantes en relation avec la question posée. Bernard Herszberg Diversité, différences, multitude: comprendre la proposition qui nous est faite de retirer le mot race de la Constitution. Gérard Huber (chercheur en psychanalyse et charge de mission à l'association Descartes) LA RACE COMME CONCEPT La notion de race en anthropologie physique: évolution et conservatisme. Albert Ducros (directeur en anthropologie biologique au CNRS) De quelques fonctions génétiques du concept de race. Pierre Darlu L'histoire génétique des populations: est-ce que les races existent? Alberto Piazza (professeur de génétique humaine à l'Université de Turin) Race, racisme, génétique et eugénisme. Josué Feingold (directeur de recherche en génétique des populations médicales Université de Paris 7) Le poids des mots, le choc des idées. André Langaney (professeur en génétique des populations Muséum d'histoire naturelle) Races, gènes et cultures. Henri Atlan (professeur de biophysique Université Paris 12) Mystification raciale et inégalités socio-économiques à Tahiti. Michel Panoff (directeur de recherches en ethnologie au CNRS) La "race", inanité biologique, mais réalité symbolique efficace. Jean-Luc Bonniol (professeur en anthropologie Université Aix-Marseille 3) RÉPONDRE À LA QUESTION POSÉE Les questions de mots sont sérieuses. Yves Duroux (chef du Département des sciences de l'homme, Ministère de la recherche et de l'espace) Du racisme au mot "race": comment éliminer? Sur les premiers débats et les premières déclarations de l'Unesco (1949-1951) concemant la "race" et le racisme. Pierre-André Taguieff (chargé de recherche en sciences du politique au CNRS) Le mot race n'est pas de trop dans la Constitution française. Etienne Balibar (maître de conférences en philosophie Université Paris 1) Pertinence de l'énonciation du mot race dans la Constitution. Chantal Milion-Deisol (maître de conférences en philosophie Université Paris 12) Quescexa, les "origines raciales" ? Propos sur la législation antiraciste: le ver est dans le fruit. Bernard Herszberg la race: une catégorie juridique? Danièle Lochak (professeur de droit public Université Paris 10) Le mot race dans les Constitutions françaises et étrangères. François Borella (professeur de droit public Université Nancy 2) La relativité des mots et la prégnance des faits. Jacqueline Costa-Lascoux (directeur des sciences du droit au CNRS) L'appréhension du racisme par le code pénal. Danièle Mayer (professeur de droit pénal Université Paris 10) La perception par le Conseil d'Etat du concept de race. Jean-Paul Costa (conseiller d'Etat, professeur associé Université d'Orléans) La non-discrimination raciale dans les textes consitutionnels français: présence ou absence. Jean-Jacques Israel la révision constitutionnelle : problématique et enjeux. Olivier Duhamel (professeur de droit public Université Paris 1) Pour recevoir ce numéro de MOTS, prix spécial de lancement 128 francs (au lieu de 160) jusqu'au 30 juin 1993 : chèque à adresser à la Fondation nationale des sciences politiques, 44 rue du Four 75006 7 EN BREF ON VOYAGE OU ON S'ARRETE? Dans la collection "Les dossiers du Mrap" paraissait en 1987 la pochette : Tsiganes et Gens du Voyage, dont la couverture d'un beau bleu s'ornait de deux "bulles" : "Tu sais, mon frère, on dirait que ça les dérange de plus en plus qu'on voyage". "Oui, et ça les dérange de plus en plus qu'on s'arrête". Cette pochette, bien présentée, très pratique, nous a valu pas mal de compliments. Et elle a reçu récemment une consécration

citation à "La marche du

Siècle" ! Mais depuis 1987, il s'est passé bien des choses. Oh, les deux phrases de la "bulle" restent, hélas, de brûlante actualité. Mais il y a quand même eu du positif: l'article 28 de la loi du 31 mai 1990 (Loi Besson). Son application est bien timide et sporadique. Mais enfin, il existe, il faut le faire passer. Mise au point juridique donc. Mais aussi actions concrètes. Expériences nouvelles pour la scolarisation... L'actualisation s'imposait. La brochure actualisée est à votre disposition - 50 pages - au prix de 20F + port. (20 F net pour ceux qui ont déjà souscrit et payé). Et pour ceux qui n'auraient pas la pochette 1987 : 60 F le tout + port. Précipitez vous et faites de la pub! Merci. Bertrand Bary LA ZONE INTROUVABLE L'Association Nationale d'Assistance aux Frontières pour les Etrangers (ANAFE), dont le Mrap est membre, a tenu les 10 et 11 avril 1992, au Palais du Luxembourg à Paris, un colloque sur "le statut de la zone internationale". Cette zone dite aussi "de transit" est le "sas d'entrée" où peuvent être retenus par la police les étrangers non admis sur le territoire et les demandeurs d'asile. Ce colloque se déroulait alors même que le gouvernement préparait un nouveau projet de loi -adopté le 6 juillet 1992- pour tenir compte de la décision du Conseil constitutionnel qui avait conservé "l'amendement Marchand". Les actes de ce colloque co-édités par l'Anafe et l'Harmattan sont intitulés: "Frontières du droit, frontières de droit: l'introuvable statut de la zone internationale". Prix: 120 francs, à commander au siège du Mrap PLUS JAMAIS ÇA Mémoire juive en Soissonnais Comme nous l'annoncions dans notre dernière publication, Dominique Natanson, président du comité local de Soissons, a obtenu le prix Corrin qui récompense chaque année la meilleure oeuvre pédagoqique sur la mémoire de la Shoah. Nous publions ici des extraits du discours prononcé par l'auteur lors de la remise de ce prix à Paris. Je me dois d'adresser tant de remerciements que vous me pardonnerez si je ne respecte pas tout à fait les règles de préséance, car après avoir remercié chaleureusement pour ce prix Annie Corrin et le Fonds qui a été créé par son mari au sein du Fonds Social Juif Unifié, je souhaiterais d'abord rendre hommage à mes élèves, ceux qui sont là aujourd'hui et aussi ceux qui ne sont pas là.( ... ). Je voudrais ensuite exprimer ma gratitude à tous ceux qui m'ont aidé à réaliser ce projet. Au premier rang de ceux-là, il y a Robert Attal, historien soissonnais, qui fut le premier à travailler sur ce sujet, dans une indifférence quasi-générale. Son travail de pionnier fut à l'origine de ma découverte du nom même de Maurice Wajsfelner. C'est après avoir lu sa brochure "Soissons-Auschwitz, un aller simple", parue en 1985, que j'ai fait la proposition de dénomination du Collège de Cuffies. Son travail a été réédité dans la première partie de l'ouvrage "La Mémoire juive en Soissonnais". Je souhaite donc que son nom soit aujourd'hui associé au Prix Corrin. Merci Robert Attal. Ce livre n'aurait pas pu voir le jour sans Jean-Marie Chevallier. Depuis le début des années 80, l'association "Mémoires" dont il est président, a effectué un travail systématique de recueil de la mémoire populaire selon l'idée quun vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle". Ces recherches ont porté sur les souffrances des populations civiles du Sois sonnais durant la guerre 14-18, à l'époque de la reconstruction, durant l'Exode de 1940 aussi. Le recueil de la mémoire populaire sur l'année 1936 a donné lieu, à une première expérience éditoriale avec la parution des "Moissons Rouges" qui évoquaient les grèves d'ouvriers agricoles du Soissonnais durant le Front Populaire. La technologie du recueil de témoignage est issue d'une longue collaboration entre le Collège et cette Association. Ce sont ces techniques qui ont été utilisées avec mes élèves lors du recueil de témoignages sur la Shoah. Je dois aussi me féliciter de la présence dans cette salle de mon ami, le peintre Adek qui a fourni les toiles qui illustrent "La Mémoire juive en Soissonnais", qui a fait plus que cela: il est venu avec deux de ses toiles dialoguer avec des élèves du Collège sur cet étrange lien qui unit l'artiste juif à la mémoire douloureuse de la Shoah. Je tiens à lui exprimer ce soir ma reconnaissance. Durant tout le processus de dénomination du Collège, les chefs d'établissement successifs, Jacques Specque, Sylvette Calloni, Bertrand Cagniart ont toujours fourni leur appui efficace pour que les projets éducatifs bâtis autour de cette éducation de la mémoire aboutissent. De son côté, la Municipalité de Cuffies, et le Syndicat des communes du secteur scolaire, qui se sont représentés aujourd'hui, ont toujours appuyé ces projets. Que JeanMarie Paulin, le maire de Cuffies, soit remercié pour sa constance tranquille. D'autres ont permis la réalisation matérielle de ce livre et, si je ne peux tous les citer, je me dois de dire que les Municipalités de Crouy, de Soissons, l'Education Nationale, mes collègues de Cuffies, la DRAC de Picardie, l'imprimerie Limonaire, ont participé à cet effort d'éducation de la mémoire. Car il s'agit bien d'éducation de la mémoire. Ce n'est pas seulement une démarche d'Histoire qui est ici mise en oeuvre mais plus large- 8 ment, une démarche de Mémoire. Au delà des travaux historiques - indispensables à l'heure des négationnistes - il s'agit pour nous d'une stimulation de la conscience, d'un éveil de la s:;nsibilité. C'est pourquoi "La Mémoire juive en Soissonnais" comporte non seulement le travail historique de Robert Attal, non seulement une recherche documentaire effectuée par le Collège, mais aussi des témoignages recueillis avec les élèves, parce que cette parole vivante joue un rôle essentiel dans la transmISSIon du souvenir. "La Mémoire juive en Soissonnais" contient aussi des nouvelles et des toiles d'Adek, parce que l'Histoire, est, d'une certaine façon, défectueuse pour rendre compte de cette gigantesque catastrophe que fut la Shoah. En effet, toute recherche sur ce sujet, pour nécessaire qu'elle soit, pour éducatifs que puissent être ses buts, ne comble pas l'immense vide qu'elle crée par ellemême. On aura beau retracer dans le détail l'itinéraire des disparus, on n'aura fait qu'accuser le vide. Tout se passe comme si l'historien de la déportation courait après les vies perdues: plus il les retrouve, plus il les perd. Car, nous restons là, les bras ballants, décontenancés par l'horreur de nos trouvailles dans les archives, essayant de comprendre et ne comprenant pas, malgré la rigueur de la démarche historique. Alors, que peut donc apporter une telle recherche? Il ne s'agit pas seulement, à nos yeux, d'une mémoire du passé mais aussi d'une ardente obligation à la vigilance ( ... ). Je voudrais saluer le rôle de toutes les organisations de défense des Droits de l'Homme qui participent de cet effort d'éducation par leurs interventions en milieu scolaire, rendre hommage au rôle de toutes les organisations antiracistes et saluer en particulier la présence dans cette salle du secrétariat national du M.R.A.P. (Mouvement contre le Racisme et pour l'Amitié entre les Peuples) : Mouloud Aounit, son secrétaire général, Norbert Haddad et Charles Palant, ancien déporté qui est venu apporter à Cuffies son témoignage, lors de la cérémonie de dénomination du Collège en 1990. La Shoah nous dicte une ardente obligation de vigilance sur toutes ces questions. Et pour nous, enseignants du collège qui porte ce nom d'un enfant juif, l'obligation se mue en un devoir impératif. En premier lieu, nous devons être particulièrement attentifs à toute remontée de l'antisémitisme, à tous les retours nauséabonds de l'idéologie nazie. Mais le nom de Maurice Wajsfelner doit nous maintenir en éveil sur toutes les violations des droits de l'Homme, d'une façon générale. Nous voulons former des citoyens capables de s'indigner ! Nous voulons qu'ils puissent entendre quon crie partout" comme le dit la dernière phrase du film "Nuit et brouillard". Nous voulons que la question des Droits de l'Homme devienne une préoccupation essentielle des jeunes gens qui sont passés par le Collège, qu'il s'agisse des Noirs d'Afrique du Sud, des Indiens d'Amérique Centrale, des Palestiniens des Territoires occupés, des Kurdes de Turquie, d'Irak ou d'Iran ou des Bosniaques visés par l'odieuse "épuration ethnique" ... Cette vigilance ne doit jamais nous quitter, c'est notre tâche principale d'éducateurs. Dominique NATANSON Pour se procurer le livre primé "La Mémoire juive en Soissonnais" (200 pages, nombreuses illustrations et documents), écrire à Dominique Natanson, 21 rue de l'Echelle du Temple, 02200 Soissons. Joindre un chèque au nom de "Mémoires" de 120F. (Port compris). 1 ELECTIONS LÉGISLATIVES La politique du MRAP Le MRAP ne donne aucune consigne de vote. Il se préoccupe tout de même du traitement de la question des Droits de l'Homme et de l'égalité des droits proposé par les programmes politiques des candidats. Au moment où ce numéro est fabriqué, un questionnaire du Mrap est parvenu aux Présidents ou Secrétaires Généraux des partis politiques du RPR, de l'UDF, du PR, du CDS, du Parti Radical, du MRG, du PS, du PCF, de Génération Ecologie, des Verts, de l'Arev, de l'ADS, de LO et de la LCR. L'ensemble des réponsesferont l'objet d'une communication publique et seront portées à la connaissance des adhérents et sympathisants du Mouvement. Par ailleurs, les responsables locaux du MRAP solliciteront les différents candi- dats de leurs circonscriptions. Par manque de place, nous ne pouvons publier l'exposé des faits introductifs de chaque question. Voici cependant l'ensemble des questions dans leur intégralité. -1- Que pensez-vous proposer et faire pour que notre pays remplisse mieux son devoir de solidarité à l'égard des populations obligées de fuir leur pays à la suite des guerres civiles, des coups d'Etat ou de la misère et de la famine ? - 2 - Quelles consignes et quels moyens prévoyez-vous de donner à l'OFPRA pour qu'il remplisse son devoir d'accueil et de protection des demandeurs d'asile? - 3 - Quelles propositions comptez-vous faire pour modifier le Décret du 4 décembre 1984 dans le sens des règlements et directives de la Communauté Européenne afin que l'exercice du droit de vivre en famille soit effectivement garanti à tous les travailleurs étrangers résidant régulièrement en France ? - 4 - Quelles propOSItIOns comptez-vous faire adopter pour limiter au strict minimum nécessaire les interruptions du droit à la résidence qui conduisent certaines communautés immigrées à se trouver gravement marginalisées? - 5 - Quelles propositions comptez-vous faire pour que l'article 25 de l'Ordonnance de 1945, définissant les catégories d'étrangers protégés contre l'expulsion du territoire, soit effectivement respecté par le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire ? - 6 - Que comptez-vous faire pour: - améliorer et faire appliquer la législation sur le logement des populations à revenus modestes ? - Dégager les crédits nécessaires pour engager la construction de nouveaux logements sociaux et la réhabilitation des logements anciens sans expulsion des populations qUi y habitent ? - Faire respecter les lois qui interdisent la discrimination raciale? - 7 - Etes-vous résolu à prendre les mesures nécessaires pour que soit respecté l'article 28 de la Loi du 31 mai 1990 (Loi Besson) concernant le droit au stationnement-habitat des Tziganes et Gens du Voyage? - 8 - Où en est ce schéma dans votre département ? Etes-vous prêt à intervenir pour contribuer à sa mise en oeuvre rapide et effective? - 9 - Etes-vous prêt à envisager, en particulier, un assouplissement des Pos (préconisé par M. Hubert Prévot), partout où il n'y a pas préjudice réel à l'environnement? -10 - Etes-vous prêt à contribuer à tous les efforts pour combattre ce rejet, à favoriser sur tous les problèmes la concertation et la prise de parole des Gens du Voyage eux-mêmes? 9 -u. -Que comptez-vous faire pour que soient respectés par les élus, les textes tant nationaux qu'internationaux concernant le droit à la scolarité de tous les enfants? -12 - Que comptez-vous faire pour assurer aux enfants non-francophones l'enseignement spécifique, dispensé par les maîtres qualifiés qui les aidera à s'intégrer à notre société? - 13 - Quel sort votre parti compte-t-il faire aux Zep ? Quels moyens en financement, en postes et en formation spécifique des enseignants, en recherche pédagogique, pensez- vous mettre en place pour combattre les inégalités qui frappent chaque jour davantage les couches défavorisées de la population dès la petite enfance, pour éviter que ne s'installe dès l'école une société à plusieurs vitesses? - 14 - Comment comptezvous promouvoir une telle éducation ? (formation des enseignants aux textes juridiques, au travail inter-disciplinaire, aux méthodes actives seules capables de donner chair et corps à des principes qui doivent être d'abord vécus; programmes, etc.). - 15 - De même, l'enseignement de l'Histoire ne devrait-il pas prendre en compte plus largement la dimension universelle de notre culture, de nos savoirs (apports de tous les peuples à travers le temps et l'espace à l'évolution commune) ? -16 - N'est-il pas nécessaire, face à la banalisation des idées racistes et intolérantes, du rejet de l'autre, de garder vivante la mémoire du génocide nazi, mais aussi celle des guerres coloniales et singulièrement de la guerre d'Algérie (l'une des sources incontestables du racisme anti-maghrébin) par l'apport de connaissances plus complètes, plus objectives (exemple: sur le 17 octobre 1961) ? - 17 - Etes-vous favorable à une réforme législative visant à détacher les dispositions de la loi de 1972 modifiée actuellement insérées dans la loi sur la presse du 29 juillet 1881 pour les rattacher au droit pénal commun et la rendre ainsi plus efficace ? -18 - Seriez-vous favorable à l'établissement d'une sanction d'inéligibilité en matière de provocation à la haine raciale et à l'extension de son champ d'application au délit d'injure, diffamation raciste et de négation de crime contre l'humanité? - 19 - Quelle est votre position à l'égard des luttes menées pour l'égalité, la fin des discriminations, l'éradication des racismes et des xénophobies dans toutes les parties du monde ? Pensez-vous que les intérêts géostratégiques doivent jouer contre les revendications de tels ou tels groupes (les Kurdes de Turquie par exempie) A quoi vous engagez-vous dans ces domaines ? - 20 - Allez-vous agir pour que la France d'abord, puis la C.E.E., signent et ratifient la Convention Internationale des Droits des Travailleurs Migrants et de leurs familles? Allez-vous, en conséquence des recommandations de cet instrument international, agir pour que le droit de vote aux élections locales et régionales soit accordé à tous les résidents étrangers et pour l'émergence d'une citoyenneté plus large, plus concrète que celle qui se fonde sur la seule nationalité? - 21 - Allez-vous agir pour une transformation radicale des rapports Nord-Sud, pour l'abolition de la dette, le relèvement du prix des matières premières, le transfert de ressources financières, intellectuelles, techniques vers le Sud, comme le commandent à la fois l'intérêt et la justice? FEMMES Plusieurs procès contre l'excision ont défrayé la chronique ces dernières semaines. Mais de quoi s'agit-il vraiment? Enquête, notamment avec des femmes africaines qui, dans des foyers ou des PMI, luttent contre ces mutilations. Cour d'assises. Paris, lundi 11 et mardi 12 février 1993. Deux femmes passent en jugement. Toutes deux maliennes, toutes deux accusées d'avoir fait pratiquer l'excision sur leurs fillettes. Elles comparaissent pour "coups et blessures volontaires et mutilation sur mineur de moins de quinze ans". Histoires singulières, sans aucun doute. Celles de ces petites filles, d'abord, mutilées dans leur chair et, irrémédiablement, dans leur future intégrité de femmes. Et celles de leurs mères, ayant décidé que leurs filles, comme ellesmêmes, comme leurs mères et leurs grands-mères, subiraient naturellement cet acte considéré comme normal, ne mt-ce que par tradition. Vies singulières. Procès, pourtant, qui ressemble en bien des points à d'autres. Des pères, soutenus en cela par leurs épouses, assurent que l'excision est "une affaire de femmes" et que, même s'ils sont défavorables à l'excision de leurs filles, ce sont les mères qui en ont pris la décision, qui l'ont fait pratiquer, en leur absence. Un interprète traduit l'intégralité des questions posées aux mères, leurs réponses, et rien d'autre. Les avocats de la Défense, tout en condamnant la pratique de l'excision, plaident l'intention bienveillante des mères à l'égard de leurs enfants, leur volonté de ne pas les mettre à l'écart de leur société, les pressions sociales qui s'exercent sur elles. Ils rappellent le poids des traditions, soulignent aussi à quel point, par exemple, des familles africaines jugeraient monstrueux "d'abandonner" des personnes âgées dans des foyers, pratique courante dans d'autres sociétés comme la société française ... Ils ajoutent qu'à leurs yeux, une éventuelle peine de prison, vécue douloureusement par les enfants eux-mêmes, n'aurait guère d'efficacité pour mettre un terme à ces pratiques. La partie civile ne l'entend pas ainsi. Maître Linda Weil-Curiel, qui représente l'association SOSFemmes Alternative, insiste sur la responsabilité des mères et veut démontrer qu'elles connaissaient l'interdit. Il faut se placer du côté de l'enfant, de la victime, nous dira-t-elle. Alors, toutes les perspectives changent. L'enfant, sur qui l'on pratique l'excision, souffre atrocement, et les risques médicaux sont considérables: infections, hémorragies entraînant parfois la mort, risques pendant les accouchements surtout en cas de naissances rapprochées ... Les mères, rappelle Linda Weil-Curiel, connaissent ces souffrances comme elles savent ce dont elles privent à vie les fillettes. Linda Weil-Curiel est persuadée du fait qu'elles bravent la Loi en toute connaissance de cause. Elle en veut notamment pour preuve le fait que la circoncision des petits garçons se pratique à l'hôpital, tandis que l'excision des fillettes est confiée à une exciseuse, en dehors de tout contrôle médical. L'excision n'est souvent décelée que plus tard, lors de visites médicales en PMI. Les mères sont donc coupables, dit-elle, quelles que soient leurs motivations. Car, ajoute-telle, en Droit français, on juge l'acte, et l'on ne juge pas à la carte les individus coupables de faits similaires. C'est à la suite de la condamnation pour coups et blessures et mutilation d'une femme française qui avait maltraité, frappé sa fille et était allée jusqu'à l'exciser, que l'excision est jugée en cour d'assises et non au tribunal correctionnel. Et, pour maître Weil-Curiel, c'est là un acquis. Quelles que puissent être les motivations profondes des mères, l'acte demeure criminel et doit être jugé comme tel. Et ses auteurs condamnés. C'est, en Droit, le principe de l'égalité devant la Loi. Peu importe même, à la limite, dit-elle, que les raisons de l'interdiction soient comprises. Maître Weil-Curiel croit à l'exemplarité de la condamnation. Mardi soir, les deux mères ressortaient libres du Tribunal, condamnées l'une et l'autre à cinq ans de prison avec sursis. Linda WeilCuriel accuse: "on les montre du doigt, puis on les libère", dit-elle. Comment, dans ces conditions, rendre crédible l'interdit? Linda Weil-Curiel tient d'autant plus à l'exemple, à la prison ferme, que, dit-elle, il y a urgence pour de très nombreuses fillettes. Enquête sur "ITINÉRAIRES AFFECTIFS" Au-delà de la question récurrente sur la nécessité et l'efficacité ou non des sanctions pénales, d'autres situent d'abord le problème bien plus en amont. Malik N'Diaye, psychologue-clinicien, est animateur d'un centre d'hébergement et de réinsertion sociale par le travail à Paris. Sénégalais, il vit en France depuis 25 ans. Il évoque "la mécanique de la nostalgie" des individus en situation de migration, l'oscillation entre deux réalités culturelles, entre deux réalités vécues en termes d'impossible. "L'insertion", explique- t-il, "est aussi un itinéraire affectif'. D'où l'importance de l'insertion affective, dans le groupe, dans la famille. Malik N'Diaye n'est pas opposé aux sanctions concernant les mutilations sexuelles. Mais il s'interroge sur les éléments susceptibles de sensibiliser la société française en dehors des clichés et des stéréotypes, et par ailleurs de décourager leur pratique. Les mutilations sexuelles, dit-il s'inscrivent dans un rapport de domination et de soumission - c'est-à-dire d'acceptation de cette domination- entre homme et femme. Aussi la circoncision, mutilation elle aussi, ne peut-elle être assimilée à l'excision ou à l'infibulation ne provoquant évidemment pas les mêmes conséquences dans la vie sexuelle de l'adulte ... Les raisons "originelles" de l'excision ou de l'infibulation sont multiples, et diffèrent selon les régions ou les cultures (voir encadré). Mais sans doute faut-il comprendre ce qu'elles représentent dans la perception de ceux et celles qui la pratiquent aujourd'hui. En premier lieu, elles sont vécues comme un "rite de passage", de passageépreuve vers la vie adulte, qui s'inscrit dans ce rapport domination/ soumission (commun, rappelle- t-il, à tant de cultures mais sous de tout autres formes), auquel se greffent des connotations de pureté, ou de certitudes érronées, telles que le risque de stérilité que courraient les femmes non excisées ... Comme tant de femmes et d'hommes de terrain, Malik N'Diaye remarque d'importantes évolutions de la situation aussi bien en Afrique qu'en France. En Afrique, phénomène important mais minoritaire, l'urbanisation est un facteur d'émancipation des femmes, et des pratiques telles que 10 l'excision ont tendance à reculer dans les villes. Mais les femmes, sur qui repose la charge des enfants (éducation, santé ... ), de même qu'une grande part du travail agricole, ne sont pas prioritairement bénéficiaires du développement. .. En France, tandis que la première génération vit plus dramatiquement le "manque" de modes de vie habituels, de traditions ... et les idéalise parfois ou les "fantasme" comme par culpabilité vis-à-vis de ceux qu'elle a "laissés", ou bien comme pour en chercher l'effet thérapeutique (tout le mécanisme du "deuil" se repère ici), la seconde génération, elle, puise davantage ses repères culturels et affectifs là où elle a vécu et où elle vit. Nombreuses sont les jeunes femmes abandonnant l'excision pour leurs filles. D'autres découvrent à quinze ou seize ans leur propre excision avec toutes les conséquences psychologiques que l'on imagine. INFORMER LES MÈRES, LES FAMILLES Il Y a donc effectivement urgence, mais en même temps ce type de réflexion amène aussi, nécessairement, à un travail de longue haleine. C'est ce que font de plus en plus des associations de communautés de villages, qui mènent un difficile travail d'explication auprès des familles, hommes et femmes. Explications de type médical, mais aussi sur des questions d'ordre religieux, rappelant par exemple que les religions musulmane, ou chrétienne (copte) ... ne réclament pas l'excision. C'est aussi la tâche à laquelle se sont attelées des associations de femmes. Le Gams (1) (groupement des femmes pour l'abolition des mutilations sexuelles, section française du comité inter-africain sur les pratiques traditionnelles ayant effet sur la santé des femmes et des enfants) regroupe des femmes africaines et françaises pour la plupart médecins, ou travaillant dans des PMI...Fondée en 1982, elle a le mérite de la clarté: "que cela se passe en France, et l'on s'émeut, le temps d'une brève information dans les média. Et puis le rideau du silence retombe lourdement. Que cela se passe ailleurs, essentiellement dans les pays africains (zone subsaharienne), le relativisme culturel nous autorise à fermer les yeux. Mais peut-on encore parler de J'excision culture quand il s'agit de bébés, de fillettes et de femmes qui sont torturées, niées, abîmées à jamais. Les mutilations ne sont le propre d'aucune culture ni religion: des Animistes, des Chrétiens, des Juifs, des Musulmans les pratiquent. Mais le seraient-elles qu'elles constitueraient toujours une atteinte grave aux droits fondamentaux des femmes et des enfants à la vie, à la santé et à la dignité" affirme Isabelle Gillette-Frenoy, sociologue et directrice du Gams. Le Gams s'est fixé comme objectif de faire connaître le problème de l'excision, par des colloques ou auprès de personnels soignants, mais aussi de s'adresser aux femmes directement concernées. Le travail passe généralement par les PMI. Il s'agit d'une pédagogie d'équipes, explique Coumba Touré de l'association, qui implique des médecins, personnels soignants, ainsi que des femmes africaines qui jouent le rôle de "relais". Les interventions sont nécessairement de type médical, livrets et illustrations à l'appui sur les corps des femmes et des hommes, les organes génitaux, la fécondation, la conception et les risques encourus par la femme comme par le bébé en cas d'excision. Un travail particulier est entrepris avec les femmes enceintes, ou lors des visites médicales à domicile des enfants en bas âge. Mais ces explications restent insuffisantes si elles ne reposent pas sur des discussions avec les familles autour de questions de société que cela pose, telles que: "si je ne fais pas exciser ma fille, elle ne trouvera pas de mari .. . ". Là, le FILMS dialogue est important, les rapports de confiance nécessaires. S'adresser aux familles et aux mères ne suffit pas. Il faut aussi toucher les excise uses. Coumba Touré évoque les résultats positifs généralement obtenus. Des mères ayant fait exciser leur aînée n'excisent pas les cadettes, par exemple. Les familles ne refusent quasiment jamais la discussion. Mais les lieux d'intervention d'une association comme le Gams sont encore bien trop peu nombreux. Un travail est réalisé dans les PMI de Mantes-la-Jolie (où des films et des animations sont prévus le vendredi après-midi suivis d'échanges), des Mureaux, de Meaux, de Plaisir. .. , des interventions s'organisent à Reims, à Bobigny ... Et les "femmes-relais" n'ont toujours pas de statut professionnel reconnu, ce qui limite leurs possibilités d'intervention, et le temps dont elles disposent lorsque'elles travaillent par ailleurs. "Le lien est absolument nécessaire avec ce qui se passe en Afrique", insistent les animatrices du Gams. Ne serait-ce que du fait des relations entre les familles, avec les villages, qui se poursuivent. Lien important pour les familles qui vivent en France, mais aussi travail considérable à réaliser en Afrique même, naturellement d'une autre nature, d'une autre ampleur, essentiellement dans les villages. Le "Comité inter-africain" a aujourd'hui des comités dans 21 pays (2). Mais la mise en oeuvre de projets réellement audacieux ne peut dépendre des seules ONG, Finzan, un fIlm de Cheick Omar Sissoko. Cheick Omar réalise ici le portrait de deux femmes, dans un petit village du Mali -post -colonial- encore sous le joug de Moussa Traoré. Deux femmes, deux itinéraires. Et deux révoltes, la première contre le remariage forcé d'une jeune veuve à son beau-frère, la seconde contre l'excision. Un film militant sur le thème: "la libération de l'Afrique passe par la libération de la femme", où humour et raillerie bon enfant permettent d'échapper à un lourd discours (pédago). Pour Kytia Touré, réalisateur ivoirien, l'excision est loin d'être la seule entrave à la libération des femmes en Afrique, ni même la seule mutilation que peuvent subir les femmes mais aussi les hommes. Elle est loin également d'être pratiquée partout en Afrique comme on aurait tendance à l'imaginer en Occident, dit-il. Lui est favorable à un travail sur le terrain, auprès des femmes et des familles, en Afrique, aujourd'hui largement insuffisant. Il a lui-même réalisé -avec des médecins- plusieurs films d'éducation, fictions de quinze ou trente minutes sur l'enfance, l'allaitement, les grossesses rapprochées, la vaccination, les accidents domestiques, le Sida ... Ses films, repris par les télévisions de plusieurs pays, sont aussi projetés dans certains villages, suivis de discussions. Il faut de l'imagination, dit-il, oser par exemple chercher les moyens de passer ces films dans les salles d'attente des maternités. 11 associations de femmes ... elle doit pouvoir s'appuyer sur un investissement réel des Etats concernés. Certains projets, partiels, ou locaux, ont vu le jour. Au Mali, parallèlement à un travail dans certains villages, la radio diffuse chaque matin des émissions sur ces questions, avec des débats entre femmes concernées et spécialistes. Au Burkina Faso, un programme d'information se met en place avant l'application d'une loi interdisant les mutilations sexuelles ... Mais, jusqu'à présent, face aux problèmes du développement, de l'endettement, de la faim, face aux transitions démocratiques qui tar- FEMMES dent à s'amorcer, la lutte contre les mutilations sexuelles n'est pas encore vécue massivement comme une priorité. I.A. (1) 8, cité Prost, 75011 Paris (2) Egypte, Ethiopie, Gambie, Ghana, Kenya, Libéria, Nigéria, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Tanzanie, pour ce qui concerne l'Afrique anglophone. Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Djibouti, Guinée, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo, pour ce qui concerne l'Afrique francophone. Plus de cent millions Plus de cent millions de femmes et de fillettes sont aujourd'hui victimes, dans le monde, de mutilations sexuelles. L'excision consiste en l'ablation du clitoris et éventuellement des petites lèvres. L'infibulation est une excision à laquelle s'ajoute l'ablation des grandes lèvres, dont les moignons sont rapprochés et cousus, obturant presque totalement le vagin. Les peaux sont décousues lors des accouchements, puis recousues de nouveau après, ce qui est excessivement douloureux autant que dangereux. Certains prônent aujourd'hui la médicalisation de ces pratiques pour éviter les risques médicaux évidents, oubliant la douleur psychologique de ces mutilations, qui privent aussi les femmes d'une grande part de leur plaisir sexuel, et oubliant à quel point elles sont une atteinte à leur intégrité de femme. Selon une étude qui date déjà d'une douzaine d'années(1), en Afrique, l'infibulation est pratiquée en Somalie, à Djibouti, au Soudan parmi les populations musulmanes (et généralement pas au sud du pays) et en Erythrée. En Ethiopie, notamment pour les populations falashas, au Mali et en Afrique centrale, l'infibulation ou l'excision sont pratiquées dans presque toutes les régions. L'excision touche aussi le Kenya (plus de la moitié des femmes, tandis que dans le nord du pays les populations somaliennes pratiquent l'infibulation), l'Egypte (parmi les Coptes se pratique une forme particulière d'excision), le nord de la Tanzanie, une partie de l'Ouganda, certains groupes du Tchad, la majorité des femmes du Nigéria (pratique en régression dans le nord), le nord-est du Zaïre (pratique qui serait en régression également), le nord du Ghana, la région de Sokode au Togo, le nord du Bénin, la majorité des femmes de Côte d'Ivoire, près des trois quarts des femmes du Burkina, la plupart des groupes du Sénégal (à l'exception des Wolofs), de Guinée, de Gambie, du Sierra Léone (à l'exception des Créoles), les régions de Mauritanie proches du Sénégal et du Mali. L'excision se pratique aussi dans la péninsule arabe. En Asie, des formes particulières d'excision se pratiquent en Indonésie et en Malaisie. Les raisons invoquées pour la pratique de l'excision concernent souvent la religion. Il peut s'agir de fausses références au Coran, certains chrétiens d'Afrique font référence aux "temps immémoriaux". L'excision appartient à la cosmogonie de certains animistes, pour qui l'enfant naît androgyne et doit supprimer l'une de ses deux âmes: le prépuce, âme femelle du petit garçon, et le clitoris, âme mâle de la petite fille, qu'il faut rendre à la terre. L'idée de la purification (diabolisation du clitoris) est aussi importante. S'y greffent certaines croyances quant aux conséquences d'une non-excision sur la fécondité, par exemple. Excision et infibulation impliquent un contrôle strict de la sexualité féminine. (1) Fran P.Hosken The Hosken Report - "Genital and sexual mutilations offemales" WinNews, second edition, 1979. CO URRI E RS DIVERGENCES ? Je viens de lire attentivement Dif· férences du mois de décembre. Ce numéro foisonne d'informations que j'apprécie, par exemple les pages sur la législation du racisme en Europe. Malheureusement, j'éprouve un profond malaise en constatant que le drame actuel de l'ex· Yougoslavie n'est pas abordé alors qu'il eSI, me semble-t-i1, au premier plan de tou tes les consciences, bien au-delà des militants antiracistes. Pourquoi ce black out? Même s'il y a des divergences Il ce sujet, et surtout 11 cause de ces dive rgcnoes, il me semble souhaitable, indispensable d'ouvrir le débat. A nne-Marle VELleITE ECII/RQLLES LE SILENCE QUI TUE Après avoir rerust la consitution d'une nouvelle Yougoslavie basée sur le principe confMéral pro~ par toutes les républiques sauf la Serbie et le Monténégro, l'année yougoslave déjà prise en main par les généraux serbes ont mis le feu aux poudres. En se repliant de la Slovénie et de la Croatie vers la Bosnie-Herzégovine. ils on laissé derriè re eux la désolation, la destruction de villes entière$. Je voudrais d'abord rappeler que la Défense territoriale disposait d'un stock d'armes faramineux théoriquement sous les ordres régionales des Républiques, mais la clef du magasin était dans la poche des militaires de l'Armée populaire yougoslave, ce qui a joué un rôle primordial par la suite dans le nettoyage ethnique: les stocks d'a rmes étaient distribués aux Serbes de Croatie, Bosnie-Herzégovine ( ... ). Il faudrait peut-etre un jour savoir pourquoi l'ensemble des associations françaises de solidarité n'a pas ou a peu réagi par rappon li l'épuration ethnique en Croatie et ensuite en Bosnie-Herzégovine, malgré les informations précises venant de là-bas. Des associations du Réseau, Caif, le Mrap, SOSRacisme, Ldh, Fasti : rien que le sîlence. Au Mrap, j'ai présenté la cane du nettoyage ethnique concernant les Bosniaques musulmans et les Croates de Bosnie au mois d'aoUt 1992. Réponse: "la carte tst-elfe version croate '1". Comme si tout ce qui vient de la-bàs était faux! Un communiqué passe-partout est sorti, on ne cite ni agresseur, ni agressé. Comment une association comme le Mrap qui défend les faibles, les opprimb pcut-elle ne pas faire des analyses issues d'un débat démocratique ?Comment se fait-il que l'on ne consulte pas les concernb? De plus le Mouvement s'associe aux débats faits par des associations dans l'orbite du PCF, ce n'est normalement pas un crime, mais pourcequi concerne l'exYougoslavie, le P.C.F. s'est discrédité parce que ses actions n'expriment pas du tout la demandedes peuples de là-bas (à J'exception des Serbes). C'est comme si on débattait pendant deux heures sur la souffrance du peuple palestinien sans citer une seule fois Isra!!1 ! A Nantes, le Mrap a rtcemment organisé un débat sur l'ex.Yougoslavie. Objectif : em~cher une intervention en Bosnie-Hen.égovine. Concernant le Mouvement de la Paix avec lequel le Mrap s'associe dans certains débats pour une non-intervention et contre l'aide humanitaire,je me demande ce que vont penser les femmes, enfants et les hommes, là-bas dans les villes comme Goradze, Srebrenica, Sarajevo, Tmla et autres. bombardées, jour et nuit depuis des mois, quand on va expliquer aux survivants la position de certains pendant qu'ils crèvent. Labas, le peuple en a assez, il avait confiance dans 1"'Ouest·'. 11 ne demande qu'une chose. faire taire les canons des extr~misles serbes autour des villes et faire disparaître les armes de Bosnie-Herzégovine par la force, le reste est du bavardage. Marij an KRCMAR Paris ( ... ) Tu ,~prochaau M,ap d~uftlinou d~ "~dift q~ dn chosu l,à finira/a el piISU'fHlnoW, m 'ml'O)'IIIIllowlt mon· d~ dos" dos. Eh b;m ct " 'nt plU yrai : dOJu l'un d~ tIOJ comntlUtiqub "0'" av"", dil q~ MilOJ~ic porrmf 10 rnponsabilill principalt dt l'uplOJÎO" du hai"n nafiOlUllisltJ. Tu ftp'oches alUsi dt nt paJ p,md,t l'avu du imtrt:ub; mais tu Stras d'accord pour dirt qUt It M'ap doil upri~r /"ayis th l't1l$lmblt dt sU adhl,.,nû, ft Jj ct n 'UI plU pouiblt. dt 10 pllU ,TIU'Itk fHlnit d'entre " ...... Or jusqu 'ici ltufs q~lqUL.J iMJlb Otrf dnnandl qu 'onfllJU aut,., chost,! UrS dirt uaclemt" 1 quoi. 1/ y a U" adh&t"f U'M qui 110"" a mYo~ rouft: unt fHl8t amiUOllft:, pl"" uacft:mtJ1t a"ti ... u. ~h[ Mtritll.% demande qu'on St prononct pou, unt inltrvtJ1tion mililairt. Voilll 10j.IU lu critiqua qUt It Mrap COIIIIIIfl. 011 VtTTa au produlin CmrMiI National, ~ lUI dlbtu lUT ca qUL.JtiOflJ esl pro"ammt. Mais M ct qui,"" conctrm ft maintimdr"; 10 positk n qui a 11110 nlJtn drp..a Jt dlb"" "savoir: J) Il bas 10 puriflaltiOtr tlhlliqut, condq~nN!Ulrlmt du naJiQ· nalismt. 2) Solidaritt avlC ItJ YictÎnKJ, prolUlaûon rom,,, It faiblt namb't dt ,tfu,ill accutillis tJ1 F",nu. J) RtflU dt /"imervtntion miliuû't, qui a""'l'trail trICOT/! 10 Ji/wllion jusqu'" 10 Tt/tdrt pl.., foflt qu'tllt Il ·t!SllIl:rutllemml. Ma conviction c'est q~ dOJu lu COIIfliu dt ct typt, Y compriJ tll Armtllit, ptr. sonne "'esllout b~ tt ct JOIIt /O .. jou~ 12 les civîb.1o lrUlSM du ptuplt, qui fonI la frtili. Pour moi, "les ~rbu", "tu Croolu ~, "lu M""ulmans", "" nt l'tul rim diTt, ça "t dhi,M qut lu y;til/u diviswTI.J tllu haint!S ",cumu/üs ( .•. ). Jtt!lf-Jatquts K/RKY A CHAR/AN Mt,.bn" Jt! Prhldtltu a.. M'Y BOSNJE, UN FUNESTE PRECEDENT A peine ai-je lu le dernier Différences que je m'empresse de réagir à la lett re d'Olivier Lannuzel sur l' intervention en Yougoslavie, que je juge aussi nécessaÎre. Je déplore en effet l'absence de réel débat au sein du Mrapsurcette question (alors faisons le par la plume dans notre journal favori!). La posi tion "officielle" du Mouvement se contente de demander la paix sans en préciser les modalités et sans dénoncer avec suffisam· ment de vigueur le processus de "purification ~thniqu~~, que les négociations de Genève ne faisaient qu'entériner: I"odieux par· tage de la Bosnie sur critère ethnique. essentiellement entre les Croates et les Serbes sans commune mesure avec le poids de leur population respective (cf. article d'Isabelle Avran dans le même numéro de Difflrences). ( ••. ) Si j'approuve l'engagement du Mrap en faveur d'un tribunal international pour juger les crimes de guerre (contre l'humanité?), l'appel à la non-intervention me paraît bien anachronique: faut-il laisser des populations s'entretuer et brandir si haut ce que le Mrap a toujours dénoncé et refusé, à savoir ledroit Md'iliminer l'Autre", cet être gênant aUll" coutumes étrangères? Le Mrap peut-il vrai· ment défendre ses idées sans remettre en cause le sacro-saint droit à la souveraineté nationale pour des dictateurs nullement menacés par le droit au respect des mÎnorités que l'ONU et les ONG s'efforcent de promouvoir? Il est vrai qu'une intervention plus fone des forees de l'ONU pour protéger les populations en danger et désarmer les milices auto-proclamées peut renforcer notre tendance "occidentalt" à dicter nos façons de voir au reste du monde. Mais les droits fondamentaux de l'homme (respect de son intégrité morale et physique) devront-ils être plus longtemps bafoués? (.,,). Vraiment, tout nous pousse à agir sur le terrain, dans le cadre de l'ONU bien entendu, et en essayant d'atténuer la tutelle écrasante des Etats-Unis et une intervention trop "QCcid~ntalisit". Je ne peux que citer l'éditorial d'Ignacio Ramonet dans le Monde Diplomatique de janvier: "si la communal/ti internaTionale se rbign~ à un partage dt fa BosnieHtnlgovint, si tll~ admt t unt t~lIt Tigresslon dt l'esprit el de la raison politique, il s'i labfjrail un funute pricident (. . .). Imervenlr 0111 ( .. .), avtc su/flsamment d'amicipa/ion politiqut pour que lu fragtdies soitnt fi ities tt It recours alO" armes difinitivtmtnt aclu". Sttpltalte DROUET Clamart THAMI SINDELO RepN • • m.nt ct. l'Afrbln NlltkNwI Cong,...., F ... nce ca.ns lM .n ..... 70, T'Mml SIncWo a ...... l'AfI1que du aud dans ... a""" 110, Il aoutfre au)ourd'hul d'h6m~ pl6gle .-t vft ct. c. fait plu. du.-.ment enco ... , de mAma qua .. famil le, ... dtrncuhM quotidien,... du peupla afrl. cain an Afriqua du Sud. I·...acletlon .... "amie de ThemI SlndIIto .. Iancant une c.rnpagne d'akle flnanct6.-. il lIOn Intention, (21 AV, du ..... 1 Leclerc, H380 BIIlntPrix, AdhMIon: 250 'ranca). 89, rue Oberkampf 75543 Paris Cedex Il Tél.: 48.06.88.00 Télécopie: 48.06.88.01 • Directeur de la publication Mouloud Aounit • Gérant b6nevole Maniai Le Nanc:q • Rédactrice en chef Cherifa Benabdessadok • Administrat ion - ge. tlon Patricia Jouhannet • Journalls . Suivi de fabrication Isabelle Avran • Publicité au journal • Abonnemenr. Isabel de Oliveira • Mise en page Kayen - Tél.: 49 37 28 2.'i • Impre •• lon Montligeon Tél.: 33.83.80,22 • Comml .. lon paritaire n~ 63634 ISSN 0247-9095 Dépôtlégal l992. !O

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