Origines du MRAP
Xénophobie et antisémitisme en France
Depuis le XIXe siècle, la France a fait appel aux migrants européens (Espagnols, Italiens, Belges, Allemands, Polonais) qui travaillent dans l'industrie minière,
le bâtiment, l'agriculture et l'artisanat. Les manifestations de xénophobie jalonnent le XIXe siècle et le début du XXe.
Par exemple, à Aigues Mortes en août 1893, une dizaine d'ouvriers italiens employés dans des salines sont lynchés par des ouvriers français qui leur reprochent de leur voler leur travail.
Depuis le XXe siècle arrivent régulièrement des femmes et des hommes qui fuient les persécutions : des Arméniens après le génocide de 1915,
des juifs d'Europe de l'Est victimes de massacres en Pologne, en Roumanie, en Russie dans les années 20 et 30, des Espagnols en 1939 à la suite de la victoire franquiste sur les Républicains espagnols.
Dès les années 20, des travailleurs immigrés se regroupent dans la "Main d’œuvre immigrée" (MOI) dans le cadre de la CGTU (Confédération générale du travail unifiée).
Très tôt sont prises des mesures pour contrôler les étrangers : la loi du 10 août 1932 établit des quottas d'étrangers dans les entreprises et les département;
elle permet de refuser les séjours d'étrangers sur des critères arbitraires.
Dès lors, les contrôles, les refoulements, et les expulsions se multiplient.
Parmi les immigrés fuyant les persécutions, les juifs d'Europe de l'Est sont estimés à environ 200.000 en 1936.
Faibles numériquement, ils font pourtant l'objet de violentes attaques antisémites. La presse d'extrême-droite, Gringoire, L'Action française ne se prive pas pour dénoncer une « invasion ».
Le bref épisode du Front populaire influe peu sur la politique vis-à-vis des étrangers. A la veille de la deuxième guerre mondiale, la xénophobie et l'antisémitisme en France sont virulents.
Les origines du MRAP
Les documents utilisés ici sont principalement issus du fond du Musée de la Résistance Nationale qui nous en a très aimablement autorisé la reproduction et que nous tenons à remercier.
La clandestinité et la résistance
Le MRAP est né dans la clandestinité et la résistance au nazisme et au fascisme .
L'invasion de la France par l'armée allemande en mai 1940 permet à Philippe Pétain de se faire accorder tous les pouvoirs.
Les mesures à l'encontre des juifs sont parmi les premières prises par le gouvernement de Vichy. Elles inaugurent une politique de persécutions systématiques : de juin à décembre 1940, 46 décrets, lois et ordonnances sont promulgués contre les juifs, qui sont exclus de la fonction publique, qui n'ont plus le droit d'exercer des professions libérales, et qui sont dépossédés de leurs entreprises ; des numerus clausus sont institués dans les universités. Ce dispositif s'accompagne d'une propagande antisémite relayée par les médias et les discours politiques.
Face aux mesures antisémites prises tant en zone occupée qu'en zone non occupée, se développe un mouvement de résistance juive, issu principalement de la section juive de la MOI (Main-d'œuvre immigrée) qui crée le mouvement « Solidarité » en 1940.
Tract de l'organisation « Solidarité » : (voir le document)
Par des récits de témoins directs, le mouvement de résistance prend peu à peu conscience de l'effroyable réalité, que tentaient de maintenir secrète les autorités tant allemandes que françaises : les « camps de travail » sont des camps d'extermination.
Dans le but de diffuser les informations, de dénoncer les crimes, d'aider la population juive à se protéger et d'élargir le mouvement de résistance se constituent le MNCR (Mouvement National Contre le Racisme) puis l'UJRE (Union des Juifs pour la Résistance et l'entraide).
Récit du traitement infligé aux familles juives : (voir le document).
A l'occasion des 30 ans du MRAP, Droit et Liberté publie une interview de Alfred Grant (Simon Cukier, Alfred Grant dans la résistance) retraçant cette période:
"Le M.N.C.R. n'est pas parti de rien . Il existait avant-guerre des organisations, associations et mouvements créés et dirigés par des progressistes et communistes juifs. Ces juifs étaient essentiellement d'origine étrangère. On y trouvait des Polonais, des Russes, des Lituaniens, des Roumains, etc .. . Ils parlaient le yiddish, possédaient un quotidien dans cette langue, «Naie Presse », appartenaient à des organisations syndicales. des associations de femmes, de jeunes, de patronage, de solidarité, de culture, de sports. Tous ces mouvements avaient pignon sur rue. Mais, contrairement à ce que vous pourriez penser, ce n'est pas au moment de l'arrivée des Allemands à Paris qu'ils ont été interdits, mais bien avant, le 26 septembre 1939, après la signature du pacte germano-soviétique. C'est à cette date que le mouvement progressiste juif est entré dans la clandestinité sous le gouvernement Daladier. Nous avons alors constitué une organisation de résistance qui s'appelait Solidarité en novembre 40, et qui allait plus tard donner naissance au M. N.C.R. Cette organisation faisait partie du mouvement de résistance des immigrés connu sous le nom de M.O.I. (main d'oeuvre immigrée)."
Droit et Liberté n°380: (voir le document).
La naissance du MRAP dans la clandestinité est également évoquée dans l'ouvrage:"Chronique d'un combat inachevé" édité à l'occasion des 50 ans du MRAP.
Extrait de l'ouvrage: (voir le document).
Le MNCR
Dans le courant de 1941 se constitue, à l'initiative des résistants membres des Francs-tireurs et partisans - Main-d'œuvre immigrée (FTP-MOI), le Mouvement national contre la barbarie raciste, qui devient le Mouvement National Contre le Racisme. Il est actif en zone occupée, à Paris, et en zone non occupée dans de grandes villes de province : Lyon, Marseille, Toulouse, Grenoble, Nice.
C'est un mouvement dont la vocation est de réunir des résistants juifs et non-juifs pour des actions à caractère humanitaire : cacher des enfants qui risquent la déportation, organiser des évasions et le passage des frontières, fabriquer des faux-papiers...
Le MNCR cherche à élargir à l'ensemble de la population le rejet de la barbarie raciste, il publie des tracts, des journaux et des brochures.
« C'est de cette volonté de défendre nos libertés, de maintenir les traditions séculaires de la France et de lui conserver sa place à la tête de la civilisation qu'est né le Mouvement National Contre le Racisme. Groupant tout ceux qui sont décidés à défendre le patrimoine commun, sans distinction de situation sociale, d'appartenance religieuse, de conception philosophique ou de tendance politique » (extrait de la lutte contre le racisme, brochure du MNCR).
« Et c'est l'âme de toute la France, vendue mais non vaincue, qui s'exprima alors dans la protestation quasi-unanime contre les persécutions racistes. C'est de cette protestation qu'est né le Mouvement National Contre le Racisme.
Il tendait vers deux buts essentiels: dénoncer les crimes et aider les persécutés à échapper aux bourreaux.
Alors que se taisaient la presse et la radio vendues, "J'Accuse" en Zone nord, "Fraternité » en Zone Sud, au milieu des vicissitudes de la vie illégale et clandestine, malgré la Gcstapo et la Milice de Darnand, firent connaître par tout le pays, les crimes honteux et inhumains commis sur notre sol même, comme à travers toute l'Europe occupée. Dans le même temps, avec ces deux journaux d'informations générales, "Lumières", "Combat médical", "Clarté", plus particulièrement destinés aux intellectuels. aux médecins et aux jeunes, démontrèrent sans se lasser· le mensonge et le leurre des théories racistes. » (extrait de : Le MNCR, ses buts, son action)
Le MNCR, ses buts, son action : (voir le document)
Une présentation du MNCR éditée début 1945: (voir le document)
Des tracts du MNCR :
Sauvez 100 enfants : (voir le document)
Appel aux français : (voir le document)
Drancy :(voir le document)
Février 1943 :(voir le document)
Mars1943_1 :(voir le document)
Mars1943_2 : (voir le document)
Mars 1943_3 : (voir le document)
Circulaire de juillet 1943 : (voir le document)
Début 1944 : (voir le document)
Mars1944 : (voir le document)
Mars1944 _2: (voir le document)
J'accuse
N° spécial mai juin 1942 : (voir le document)
N°1 octobre 1942 : (voir le document)
N°2 20 octobre 1942 : (voir le document)
N°3 novembre 1942 : (voir le document)
N°7 25 décembre 1942 : (voir le document)
N°8 janvier 1943 : (voir le document)
N°9 février 1943 : (voir le document)
N° spécial février 1943 : (voir le document)
N°14 juin 1943 : (voir le document)
N° spécial novembre 1943 : (voir le document)
N°20 mai 1944 : (voir le document)
N°32 août 1944 : (voir le document)
Fraternité
Première parution : (voir le document)
N°6 avril 43 : (voir le document)
Mai 1943 : (voir le document)
14 juillet 1943 : (voir le document)
Juillet 1943 : (voir le document)
Juillet43 2 : (voir le document)
1er août 1943 : (voir le document)
08 août 43 : (voir le document)
Août 1943 spécial : (voir le document)
Septembre 1943 : (voir le document)
Octobre 1943 spécial : (voir le document)
15 novembre 1943 : (voir le document)
25 novembre 1943 : (voir le document)
Mai 1944 : (voir le document)
Juillet 1944 : (voir le document)
Août 1944 : (voir le document)
Août 1944 section des alpes : (voir le document)
Après la libération :
N°1 Novembre 1944 région de Marseille : (voir le document)
Clarté
Avril 1944 : (voir le document)
Lumière
Juillet 1944 : (voir le document)
Le combat médical
Mars 1943 : (voir le document)
Activité du groupe médical : (voir le document)
Des brochures du MNCR
La lutte contre le racisme : (voir le document)
Le mensonge raciste : (voir le document)
Témoignage d'un rapatrié, juillet 44 : (voir le document)
Une brochure du MRAP sur le MNCR (2005)
L'UJRE
L'union des juifs pour la résistance et l'entraide se constitue au début de 1943, à l'initiative principalement de Charles Lederman, prolongeant l'action des groupes Solidarité.
En complément de la volonté d'élargissement du MNCR, l'UJRE se veut un mouvement spécifiquement juif, inscrit dans le combat de la Résistance.
"L'Union des Juifs pour la Résistance et l'Entr'aide a relevé le défi jeté par les nazis. Elle organise l'autodéfense des Juifs par un gros effort d'entr'aide et de solidarité. Unir les Juifs en vue de parer autant que possible aux mesures exterminatrices. Voilà le premier but que s'est assigné notre Union."
"Dans les rangs de notre Union prennent place tous les Juifs qui, sans égard pour leurs opinions politiques,trouvent que le premier devoir de chaque Juif est de résister aux velléités exterminatrices des ennemis mortels par tous les moyens y compris la lutte armée."
"Par l'existence de l'Union des Juifs pour la Résistance et l'Entr'aide, les Juifs affirment leur présence dans la lutte du peuple de France pour son indépendance."
L'UJRE publie des tracts et le journal « Droit et Liberté », dont le titre sera donné en 1949 au MRAP.
L'UJRE, ses buts, son action : (voir le document)
Des tracts de l'UJRE
Février 1944 : (voir le document)
Avril 1944 : (voir le document)
Echec aux tueurs d'enfants : (voir le document)
Comité de défense de Marseille : (voir le document)
Frères juifs : (voir le document)
Juifs de France : (voir le document)
Pourquoi ils luttent : (voir le document)
A la communauté juive de France : (voir le document)
Appel : (voir le document)
A tous les juifs de France : (voir le document)
A tous les juifs : (voir le document)
Combattants juifs : (voir le document)
Juifs de Corrèze : (voir le document)
Droit et Liberté
Mars 1944 : (voir le document)
Avril 1944 : (voir le document)
Juin 1944 : (voir le document)
Juillet 1944 : (voir le document)
Novembre 1944 : (voir le document)
L'UJRE existe toujours en 2013, voir le site de l'UJRE : UJRE
La Libération
A la libération, les mouvements clandestins se constituent officiellement :
L'UJRE dépose une déclaration officielle le 13 novembre 1944.
La déclaration d'association du MNCR date du 17 avril 1945 : (voir le document)
Le MNCR publie son historique et son programme : (voir le document)
Une des premières activités du MNCR et d'autres associations, notamment de l'UJRE, est de soutenir les déportés et leurs familles. Une aide matérielle est apportée aux orphelins, et on tente de rendre à leur famille les enfants juifs que les familles d'accueil parfois ne veulent plus rendre. Une aide juridique est apportée aux juifs déportés dont les logements ont été occupés par des « locataires de bonne foi » (il faudra attendre une jurisprudence de 1950 pour que les héritiers des déportés puissent réoccuper les logements habités par leurs parents disparus).
La volonté du MNCR est de constituer un large mouvement antiraciste, en particulier par une alliance avec la LICA qui se reconstitue.
Cette volonté apparaît dans le registre des réunions du MNCR : (voir le document)
Des réunions préparatoires, en vue d'une union des deux mouvements, se tiennent dès décembre 1944 :
1ère réunion : (voir le document)
2ème réunion : (voir le document)
Ces démarches aboutissent en 1946 à la création de l'Alliance Antiraciste. Dont Fraternité devient l’organe.
Déclaration de Fraternité : (voir le document)
Dépôt légal de 1946 : (voir le document)
Le MNCR est dissous le 12 août 1946 pour faire place à l' Alliance Antiraciste.
Récepissé de dissolution du MNCR : (voir le document)