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Version du 28 mars 2017 à 09:01
Sommaire du numéro
n°282 de avril 2012
- Edito
- RENCONTRE
- Rencontre avec Joanna Fernandez, porte-parole de Mumia Abu-Jamal
- DOSSIER 40e ANNIVERSAIRE DE LA LOI DE 1972
- Loi de 1972… 40 ans déjà
- Une loi qui honore la république
- ÉDUCATION
- Semaine d’éducation contre le racisme: bientôt 30 ans !
- Expos MRAP contre le racisme
- GENS DU VOYAGE
- Rencontre avec le défenseur des droits
- Une place égale dans la société française ?
- Brèves
- ÉCHOS DES COMITÉS LOCAUX
- Échos divers de l’hexagone
- IMMIGRATION
- L’échec scolaire chez les enfants d’immigrés
- MÉMOIRE
- Interventions de la famille de Mehdi Ben Barka
- L’actualité de Frantz Fanon
- Itinéraire d’un gamin de la cité noire
- Auschwitz : journée de la mémoire de l’holocauste
- INTERNATIONAL
- Les peuples face aux multinationales
- Maaveerar Naal
- Le drapeau de Palestine flotte sur l’UNESCO
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Texte brut du numéro
Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples ifférences iiffféfreénrceesnces N°282 Avril / Mai / Juin 2012 LOI DE 72 40 ans déjà ÉDUCATION Racisme : comprendre pour agir ROMS Une place égale dans la société ? IMMIGRATION L’échec chez les enfants d’immigrés scolaire 4 0 e a n n i v e r s a i re d e l a LO I 1 9 72 2 SOMMAIRE Le MRAX, cousin belge du MRAP, a demandé à rencontrer le MRAP le 17 décembre 2011 lors de sa visite à Paris de la Cité de l’immigration. Une quarantaine de militants belges ont été reçus par Martine Doucouré, Michèle Fougeron et Agnès Cluzel : l’échange, trop court, a porté sur la montée de toutes les formes prises par le racisme dans nos pays, notamment sur l’*islamophobie* (racisme anti-musulmans - laïcité/ islam) ; la *xénophobie* et les régressions en matière de droit des étrangers*(régression du droit à la nationalité - recul en matière de droit au regroupement familial) ; le rejet des Roms. Les 31 mars et 1er avril, le MRAP réunit son Congrès à la Bourse du travail à Bobigny. Il aura pour tâche de fi xer les orientations d’action du MRAP pour les 3 années à venir. Il installera le nouveau Conseil national composé des représentants des comités locaux et des fédérations et élira le Bureau exécutif qui mettra en oeuvre ces orientations. Rencontre du MRAX à Paris Congrès national 2012 Tous les trimestres avec « Différences », nous traitons les grandes questions nationales et internationales. « Différences » : un outil aux services des acteurs, des ami(e)s de l’antiracisme un outil pour les comités locaux Je souhaite faire connaître « Différences » ou m’abonner Je téléphone au 01 53 38 99 99 J’écris : MRAP abonnements 43 boulevard de Magenta, 75010 Paris ou j’adresse un mail à : accueil@mrap.fr Faites découvrir « Différences » à vos ami(e)s, collègues, familles… « Différences » 43, bd de Magenta - 75010 PARIS Tél.: 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 Directeur de la publication : Jean-Claude Dulieu Rédaction : Jean-Claude Dulieu Assistante de rédaction : Michelle Fougeron Administratrice : Marie-Annick Butez Conception/Impression : Marnat - Tél.: 01 56 80 09 19 Dépôt légal : Juillet 2007 3 - Edito RENCONTRE 4 - Rencontre avec Joanna Fernandez, porte-parole de Mumia Abu-Jamal DOSSIER 40e ANNIVERSAIRE DE LA LOI DE 1972 5 - Loi de 1972… 40 ans déjà 11 - Une loi qui honore la république ÉDUCATION 13 - Semaine d’éducation contre le racisme : bientôt 30 ans ! 14 - Expos MRAP contre le racisme GENS DU VOYAGE 17 - Rencontre avec le défenseur des droits 18 - Une place égale dans la société française ? 19 - Brèves ÉCHOS DES COMITÉS LOCAUX 20 - Échos divers de l’hexagone IMMIGRATION 24 - L’échec scolaire chez les enfants d’immigrés MÉMOIRE 26 - Interventions de la famille de Mehdi Ben Barka 28 - L’actualité de Frantz Fanon - Itinéraire d’un gamin de la cité noire 29 - Auschwitz : journée de la mémoire de l’holocauste INTERNATIONAL 30 - Les peuples face aux multinationales 30 - Maaveerar Naal 31 - Le drapeau de Palestine fl otte sur l’UNESCO Hommage à notre amie Christiane GUENNETEAU Intervention de Bernadette Hettier, coprésidente du MRAP Au nom du collège de la présidence du MRAP, je tiens à vous dire la profonde tristesse que nous ressentons toutes et tous - qui avons bien connu Christiane sur les nombreux fronts de son engagement - de voir que cette admirable et courageuse militante nous a quittés. Christiane aura été une infatigable combattante contre le poison de l’antisémitisme en France. Elle y aura investi une grande force morale, une infl exible volonté, qui la faisait continuer à marcher, même lorsque son état de santé lui rendait l’effort diffi cile et douloureux. Je me rappelle aussi personnellement l’époque où la commission Immigration du MRAP, particulièrement vivante, bénéfi - ciait de l’apport de nombreuses personnes, dont Christiane, très énergique, d’un dévouement presque sans limite. Nous savions qu’elle répercutait sur place, dans sa région, les initiatives collectives, qu’elle animait des permanences d’accueil à Creil.... Le départ d’une telle personnalité va laisser un vide dans notre histoire partagée dont elle a contribué à écrire une page de courage, d’abnégation et d’engagement. Veuillez accepter nos condoléances attristées, dans la fi délité à sa mémoire. Mumia Abu-Jamal est sorti du mitard ! C’est la nouvelle qu’annonça Johanna Fernandez après s’être entretenue avec le responsable de la prison de SCI Mahanoy. Mumia rejoint donc pour la première fois, depuis sa condamnation en 1982, la population générale. C’EST UNE VICTOIRE ! Jusqu’alors Mumia était victime d’un chantage : il coupe ses dreadlocks ou il reste au mitard. Nous mesurons bien le symbole de résistance et de combat que représentent ses dreadlocks. Le combat pour sa libération continue et le MRAP y tiendra toute sa place. Une journée d’action avec un rassemblement unitaire à Washington aura lieu le 24 avril, date de son anniversaire. Le combat pour sauver Mumia Abu Jamal a marqué profondément les 20 dernières années du MRAP. Il s’inscrit dans la poursuite de l’engagement de notre Mouvement pour tenter d’arracher Julius et Ethel Rosenberg, puis Angela Davis à leurs bourreaux. Mumia Abu Jamal, journaliste afro-américain, a été condamné à mort en 1982 à l’issue d’un procès raciste dont l’iniquité est mondialement reconnu. Le 2 mai 1995, l’État de Pennsylvanie, après un moratoire de 33 ans, reprenait les exécutions. Le 1er juin, Thomas Ridge, élu gouverneur, signait l’arrêt de mort de Mumia, l’exécution étant fixée au 17 août. Le MRAP immédiatement alerté, mettait toutes ses forces dans la bataille : en pleine période estivale, nous avions 78 jours pour arrêter la main du bourreau ! Le MRAP appelait à la création d’un collectif : sortie d’un communiqué par jour pour informer des démarches juridiques et appeler à la mobilisation, appel à un rassemblement quotidien devant l’ambassade des États-Unis, lancement d’un appel de personnalités. En un mois, nous avons recueilli la signature de plus de 100 personnalités parmi lesquelles des élus, des universitaires, des artistes, des écrivains. Le 7 juillet ce premier appel était publié par le journal l’Humanité, le 18 juillet le collectif payait une page du Monde, d’autres signataires illustres s’y étaient associés notamment Jacques Derrida, Président du Parlement de écrivains. Le 7 août, 10 jours avant la date prévue pour l’exécution, le juge Sabo est contraint une première fois à un sursis à exécution. « A tous ceux qui se sont mobilisés, j’exprime ma plus profonde gratitude. Je n’aurai jamais pu imaginer une telle lame de fond. » Mumia Abu Jamal, 10 aout 1995. Depuis, la « lame de fond » n’a fait que s’enfler, Mumia Abu Jamal devient le symbole de la lutte pour l’abolition de la peine de mort aux États-Unis. Il est au coeur du premier Congrès contre la peine de mort qui s’est tenu à Strasbourg les 21/22/23 juin 2001. A ce congrès, l’invité d’honneur du MRAP est Robert Meeropol, l’un des fils des époux Rosenberg, symbole du lien qui unit les deux grands combats du MRAP. En séance plénière, la voix de Mumia nous parvient « en direct du couloir de la mort » : « Amis, camarades, vos luttes dynamiques contre la peine de mort représentent un phare pour l’ensemble du monde et nous sommes nombreux à tendre l’oreille pour entendre vos voix, nous qui habitons la prison d’entre les prisons ». Depuis 1995, la mobilisation n’a jamais faibli, le MRAP continuant de jouer pleinement son rôle : pétition signée par plus de 300 000 personnes, rassemblements hebdomadaires devant le consulat, plus d’un million d’euros récoltés pour assurer sa défense, un collectif regroupant plus de 70 organisations, des réunions publiques, des meetings, manifestations, organisation de délégations se rendant à Philadelphie, diffusion des livres de Mumia traduits en français et de celui de Claude Guillaumaud Pujol, universitaire, membre du MRAP Un homme libre dans le couloir de la mort. 19 villes ont fait de Mumia leur citoyen d’honneur dont Paris. En 1999, un nouveau mandat d’exécution est signé, une fois encore la mobilisation empêche le crime. Le Congrès de 2001 du MRAP décidait à l’unanimité de proposer à Mumia d’être membre d’honneur de notre Mouvement; c’est Mouloud Aounit, secrétaire général qui lui a fait part de cette décision lors d’une visite dans le couloir de la mort. Comme tous ceux qui lui ont rendu visite « en enfer », Mouloud sera impressionné par la dignité de cet homme debout, qui ne parle jamais de lui mais toujours des autres, du racisme, de ce châtiment barbare qu’est la peine de mort, de l’actualité du monde. « Georges Bush est un homme très dangereux », devait il dire à Mouloud, il ne s’était pas trompé ! Souvent, on nous demande : « Pourquoi tant d’efforts pour un homme, alors que rien qu’aux États Unis, il y en a des milliers dans le couloir de la mort ». A cette question, nous répondons par une autre question : « Pourquoi tant d’acharnements contre un homme? Parce que la réponse aux deux questions est la même : parce que nous défendons des valeurs universelles de justice, d’égalité, Mumia est l’un des nôtres ; pour ses ennemis, il faut faire taire celui qui est si dangereux pour un système qui nie l’être humain et qui n’a d’autres valeurs que l’argent, il faut faire taire la voix des sans voix ». Qu’importe s’il est innocent et s’il faut pour cela accumuler tous les dénis de justice. Après des années, d’appels en appels, de procédures honteuses bafouant la justice, le 7 décembre dernier, la justice de Pennsylvanie a renoncé à exécuter Mumia Abu-Jamal, commuant ainsi sa sentence en peine de prison à vie. C’est une première victoire, mais le MRAP ne saurait s’en contenter.
- il ne peut y avoir d’autre justice que sa libération.
Elle est désormais un objectif de lutte à notre portée. Combien de messages de remerciements Mumia a-t-il fait parvenir à se défenseurs? Mais c’est nous, Mumia, qui te remercions : merci de nous avoir appris à ne jamais renoncer, merci de nous avoir appris comme le poète palestinien Mahmoud Darwich qu’il existe un mal incurable qui s’appelle l’espoir. Pour reprendre le slogan américain des défenseurs de Mumia : « Brique après brique, mur après mur, nous détruirons sa prison et libérerons Mumia Abu Jamal ». Plus que jamais, le combat continue. Renée Le Mignot, Co-présidente du MRAP Mumia Abu Jamal a quitté le couloir de la mort : le combat continue EDITO 3 IMMIGRATION 4 RENCONTRE Le 7 décembre dernier, la justice de Pennsylvanie (États-Unis) a renoncé à exécuter Mumia Abu-Jamal, commuant ainsi sa sentence en peine de prison à vie. Depuis sa sortie du couloir de la mort, quelles sont ses conditions de détention ? Johanna Fernandez. L’État de Pennsylvanie punit Mumia pour sa victoire contre la peine de mort : en mesure de rétorsion, il est confiné à l’isolement. Dans son mitard, les lampes restent allumées jour et nuit. Il n’a accès ni à la radio ni à la télévision. Il n’a pas non plus sa machine à écrire. Ce qui pour un journaliste est une forme de torture. Il n’a le droit qu’à huit enveloppes timbrées et huit feuilles de papier par semaine. Il ne bénéficie que d’une visite d’une heure par semaine et d’un seul coup de téléphone de dix minutes. Durant les visites, les contacts physiques lui sont interdits. Lorsqu’il sort de sa cellule, il est constamment enchaîné et ce, même pour prendre sa douche ! Ses conditions de détention sont donc pires que celles qu’il a connues dans le couloir de la mort. Désormais, les autorités exercent un chantage : s’il veut rejoindre les autres prisonniers, il doit couper ses dreadlocks. Or, ses dreadlocks sont le symbole de son combat, et plus généralement le symbole de la lutte contre le racisme aux États-Unis. En exigeant qu’il coupe ses cheveux, l’État veut lui prendre son identité. Les prisons sont historiquement connues pour déshumaniser les détenus, comme le prouvent Guantanamo et Abu Ghraïb. Pourquoi un tel acharnement ? Johanna Fernandez. Parce qu’ils n’ont pas pu le faire taire ! Lorsque les prisonniers refusent de s’avouer coupables, l’État cherche alors à se venger. Dans le cas de Mumia, il a non seulement toujours crié son innocence mais, qui plus est, il a défié les autorités, en faisant éclater l’injustice dont il est victime. Il dénonce, à travers ses chroniques à la radio, la guerre, l’impérialisme américain et le règne de l’argent. D’où son surnom : la voix des sans-voix. Il ne faut jamais oublier qu’il a été condamné pour avoir soi-disant tué un policier blanc, Daniel Faulkner. Aux États-Unis, cela relève du péché originel. Mumia est perçu comme un Afro-Américain qui défie l’autorité des Blancs. Y a-t-il une chance que Mumia puisse sortir de prison ? Johanna Fernandez. La seule voie à un nouveau procès serait d’obtenir des faits nouveaux et flagrants à même de prouver son innocence. Ce qui est très difficile. Mais, compte tenu de l’émoi suscité par l’exécution de Troy Davis, de l’importance du mouvement Occupy Wall Street, et du fait que l’on incarcère de manière massive, nous pensons que les conditions existent pour demander sa libération. La pensée politique est en train de bouger aux États-Unis, et nous voulons profiter de ce nouveau contexte plus favorable. La Cour suprême des États-Unis n’at- elle pas affirmé que la condamnation de Mumia était anticonstitutionnelle ? Johanna Fernandez. Tout à fait. Si vous prenez les conclusions de la Cour suprême et de la Cour fédérale, vous constaterez que Mumia a été condamné de façon arbitraire. L’opinion publique doit savoir qu’en 1979, le FBI a commandité une enquête sur la corruption de la police à Philadelphie. Les agissements de celle-ci à l’encontre des Afro- Américains et des Latinos étaient si effrayants que le FBI a reconnu que cela «choquait les consciences». Sur les 35 policiers impliqués dans l’enquête sur le meurtre de Daniel Faulkner en 1981, 15 d’entre eux ont été condamnés pour avoir falsifié les preuves. Or, les jurés qui ont prononcé la sentence contre Mumia ne savaient pas que les policiers étaient des corrompus, puisque leur condamnation est survenue quinze jours après la condamnation de Mumia. Des faits nous prouvent son innocence, mais la Cour n’a jamais voulu les prendre en considération. Le fait, le plus important mais méconnu, est qu’il y avait une quatrième personne – Kenneth Freeman – sur les lieux du crime. Les témoins interrogés l’ont reconnu comme étant le meurtrier. Or, le procureur n’a jamais voulu en tenir compte durant le procès de Mumia. C’est d’autant moins compréhensible, que durant le procès du frère de Mumia, Billy Cook, qui se tenait parallèlement, son procureur a, lui, reconnu la présence de cette quatrième personne sur les lieux du crime. Qu’est devenu Kenneth Freeman ? Johanna Fernandez. La même nuit, en 1985, où la communauté Move de Philadelphie a été bombardée, on a retrouvé le corps de Kenneth Freeman, les mains attachées, et bâillonné, dans une voiture de police. Sa mort a été travestie comme d’autres. Le 24 avril, date d’anniversaire de Mumia, sera un jour de mobilisation. Quelle forme prendra-t-elle ? Johanna Fernandez. Ce jour-là, nous lancerons une campagne d’occupation du département de la justice qui prendra la forme d’un mouvement civique de désobéissance civile qui pourrait rassembler un millier de personnes dont des personnalités comme Angela Davis. Nous exigerons la libération de Mumia mais également la fin de l’incarcération massive et de la peine de la mort aux États-Unis. La communauté internationale peut nous aider, au titre des conventions internationales relatives à la torture. Comment agir en faveur de Mumia ? Johanna Fernandez. Nous aimerions que les citoyens, les syndicats, les journalistes, les élus écrivent aux autorités pénitentiaires de Pennsylvanie pour dénoncer ses conditions de détention. Nous souhaiterions qu’une délégation française vienne nous soutenir, le 24 avril, à Washington, afin de demander une entrevue à Eric Holder, le procureur général des États-Unis, afin qu’il se positionne sur la libération de Mumia. Son agent littéraire, Frances Goldin, qui est une militante extraordinaire, très active dans le mouvement Occupy Wall Street, a déclaré : « De quelle preuve les autorités ont besoin pour libérer Mumia ? C’est leur affaire. Nous disons : libérez-le. » Entretien réalisé par Cathy Ceïbe « Des conditions de détention pires que celles du couloir de la mort.» Interview de Johanna Fernandez(1), porte-parole de Mumia pour le réseau étranger de ses soutiens, réalisée par Cathy Ceïbe pour le journal l’Humanité, publié le 19 janvier 2012. (1) Johanna Fernandez est écrivaine et réalisatrice. Elle enseigne l’histoire des mouvements sociaux et l’histoire afro-américaine au Baruch Collège de New York 5 DOSSIER DOSSIER I- LA LOI FRANÇAISE CONTRE LE RACISME, SA NAISSANCE ET SES ÉVOLUTIONS Rappeler l’historique de la loi française contre le racisme, c’est en premier lieu l’occasion de rendre hommage à toutes celles et tous ceux qui, dans le MRAP (alors : Mouvement contre le Racisme, l’Antisémitisme et pour la Paix, créé officiellement en 1949 et devenu en 1977 Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples) et autour du MRAP, se mobilisèrent en plusieurs étapes pour qu’une telle loi puisse voir le jour. C’est aussi saluer l’oeuvre collective d’écriture - par tous les juristes militants, membres et sympathisants du mouvement – de l’ouvrage « Chroniques du flagrant racisme » sous le nom d’auteur du « Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples » et préfacé par le grand juriste au nom de plume de Casamayor (Éditions La découverte, 1984) (1). C’est enfin reconnaître l’admirable travail en cours sur les archives du MRAP – de Droit et Liberté à Différences – entrepris par notre ami Charles Louvard de Paris. Un CD-Rom spécial, qui marque en 2012 le 40ème anniversaire de La loi de 72, illustre l’évolution historique de la loi. De « l’impérieuse nécessité » évoquée dans Droit et Liberté n°3, de novembre 1949, par un article de Me Georges Sarotte en 1958, jusqu’au N° spécial de Différences n°241_242 – juin-juillet 2002, marquant le trentième anniversaire. Les chevilles ouvrières en furent le premier président du MRAP, l’avocat André Blumel, puis le premier président honoraire de la Cour de Cassation, Léon Lyon-Caen, qui lui succéda en 1957 à la présidence du MRAP, avec son collègue de la cour de cassation Robert Attuly et l’avocat Georges Sarraute. Ces premières mobilisations répondaient au « vide juridique » existant en matière de lutte contre le racisme. En effet, le 21 avril 1939 avait été pris le décret Marchandeau (du nom du Garde des sceaux de l’époque), bientôt abrogé par Philippe Pétain, puis rétabli à la Libération, sans pour autant répondre aux besoins de la lutte associative contre le racisme. En effet, il fallait prouver l’existence d’une « diffamation » juridiquement caractérisée, « apporter la preuve que l’auteur de l’écrit ou du propos raciste était inspiré non par l’antipathie, l’aversion, le mépris, mais par la volonté d’exciter à la haine ». En outre, la diffamation devait viser « un groupe » et non certains membres en particulier de ce groupe. Seuls le procureur de la République ou le groupe de personnes lésées par une publication raciste pouvaient engager des poursuites. Dans les archives du MRAP, citées dans les Chroniques du flagrant racisme, ne figuraient que deux applications du décret précité – entre 1945 et 1949 – contre des articles antisémites de la revue Aspects de la France. LA LOI FRANÇAISE HISTORIQUE DU 1er JUILLET 1972 CONTRE LE RACISME ET L’ÉVOLUTION DES DISPOSITIONS ANTIRACISTES ET ANTIDISCRIMINATOIRES AU COURS DES 40 DERNIÈRES ANNÉES LOI DE 1972 40 ANS DÉJÀ (1) De nombreuses citations de cet article en sont tirées 6 DOSSIER Entre 1958 et 1959, l’équipe d’éminents juristes avait achevé la rédaction de deux avant-projets de lois antiracistes complémentaires (l’un modifiant la loi sur la presse et l’autre concernant les actes de discrimination, à introduire dans le Code pénal) et les avaient envoyés à chaque député. Plusieurs dizaines d’entre eux, notamment des groupes communiste et UDR, manifestèrent au MRAP leur intérêt pour ces projets. La demande du MRAP fut cependant déclarée « classée sans suite » car des députés avaient pris personnellement le relais et directement saisi de projets la commission des lois de l’Assemblée. Ces projets furent repris à chaque législature successive – 1962, 1967, 1968 – avec renvoi à la commission des lois et nomination d’un rapporteur. Dans le même temps, le MRAP poursuivait sa pratique de « procès test ». Plusieurs plaintes furent classées sans suite tandis que d’autres connaissaient quelques avancées en première instance avant revirement négatif des Cours d’Appel. Le MRAP parvint en outre, au moyen des premiers « testings », à mettre en évidence dans une grande brasserie des refus de service à l’égard de personnes à la peau noire. Plainte fut déposée et le propriétaire de la brasserie fut condamné le 1er février 1966, puis en appel. Ces actions sensibilisèrent l’opinion publique à l’urgente nécessité d’une loi antiraciste. Rappelons qu’à la même époque, les Nations Unies avaient mis en chantier et fait adopter par les États membres, tout d’abord le 20 novembre 1963, une « Déclaration sur l’élimination des discriminations raciales », puis ce qui allait devenir la « Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (CERD) ». Cette dernière, après plusieurs années d’efforts collectifs, fut votée et adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 2106 A(XX) du 21 décembre 1965 (ouverte à signature et à ratification le 7 mars 1966). Elle entra en vigueur le 4 janvier 1969(2), fut ratifiée le 28 juillet 1971 par la France qui précisa alors la portée de son interprétation de trois articles spécifiques de la convention : « En ce qui concerne l’article 4, la France tient à préciser qu’elle interprète la référence qui y est faite aux principes de la déclaration universelle des droits de l’homme ainsi qu’aux droits énoncés dans l’article 5 de la même Convention comme déliant les États parties de l’obligation d’édicter des dispositions répressives qui ne soient pas compatibles avec les libertés d’opinion et d’expression, de réunion et d’association pacifiques qui sont garanties par ces textes. » « En ce qui concerne l’article 6, la France déclare que la question du recours devant les tribunaux est réglée, en ce qui la concerne, selon les normes du droit commun. » « En ce qui concerne l’article 15(3), l’adhésion de la France à la Convention ne peut être interprétée comme impliquant une modification de sa position à l’égard de la résolution visée dans cette disposition. » Le vote par la France de cette Convention internationale impliquait l’obligation d’en assurer la transposition en droit interne. Par deux fois, en 1971 et 72, lors de débats parlementaires, les représentants du gouvernement affirmèrent qu’il n’était pas besoin de modifier la législation française, en matière de lutte contre le racisme, pour que la convention soit directement applicable dans le droit national
- le 15 avril 1971 : « Notre appareil répressif actuel est compatible avec les obligations prévues par la convention » ; - le 8 janvier 1972 : il n’est « pas utile de susciter l’adoption de nouveaux textes en matière de discriminations raciales, puisque les faits qui s’y rapportent – et qui demeurent exceptionnels en France - peuvent être réprimés par les textes en vigueur ». Le MRAP retint de la nouvelle convention, conforme à ses attentes, deux de ses recommandations majeures pour en saisir de toute urgence le monde politique : - interdire la « discrimination raciale » par tous moyens appropriés, « y compris, si les circonstances l’exigent, par des mesures législatives », - « déclarer illégales et interdire les organisations ainsi que les activités de propagande organisée […] qui incitent à la discrimination raciale et qui l’encouragent, et (à) déclarer punissable par la loi la participation à ces organisations ou à ces activités ». Le 15 janvier 1971, une délégation du MRAP - composée de son président Pierre Paraf, de ses vice-présidents Charles Palant, l’abbé Jean Pihan et Fred Hermantin, de son secrétaire général Albert Levy, ainsi que d’Alfred Kastler et André Chamson, membres de son comité d’honneur – est reçue par Jacques Chaban- Delmas à l’hôtel Matignon. Elle lui réitère par une note sa double demande d’une ratification de la convention et d’un débat à l’assemblée. Le MRAP s’adresse également au président de la République Georges Pompidou qui a déclaré en 1971 – première année des Nations Unies contre le racisme - dans un discours à l’Union Interparlementaire : « Le racisme, fléau du XXème siècle, forme la plus désolante du mépris de l’homme, continue ses ravages, même s’ils sont camouflés… ». Peu à peu, la France politique doit se rendre à la réalité et à la raison, sous les pressions des militants antiracistes : entre le 3 mai et le 7 juin 1972 ont lieu les derniers arbitrages qui aboutissent à faire retenir les propositions et demandes du MRAP pour le débat public. Le 7 juin à l’Assemblée Nationale, sous présidence de séance de Roland Nungesser, le rapporteur Alain Terrenoire dénonce le racisme sous toutes ses formes, « ce mal hypocrite, discret mais quotidien […] dont nous avions l’illusion de croire qu’il avait disparu après les folies hitlériennes ». Il souligne que le racisme s’est transformé et touche désormais les ouvriers étrangers d’Afrique du Nord, d’Afrique noire et d’autres contrées lointaines qui, par leurs conditions de logement et de travail, « constituent l’exemple vivant du sous-prolétariat » ; « Avec ces travailleurs émigrés, ballotés de métro en meublés, la tentation du racisme est à notre portée et l’acte raciste devient banal, quotidien ». Après de longs débats, la loi est adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale. Le texte ayant été transmis au Sénat, le débat en séance publique s’ouvre le 22 juin 1972. Le rapporteur Pierre Mailhe déclare : « Le texte qui nous vient de l’Assemblée est excellent en tous points » et Gaston Monnerville(4) se félicite également de ce texte « tant attendu par les militants de la pensée humaniste et de l’antiracisme ». À son tour, le Sénat adopte le projet de loi à l’unanimité. La loi promulguée prend effet le 1er juillet 1972 et comporte trois volets : (2) <http://treaties.un.org/pages/ViewDetails.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=IV-2&chapter=4&lang=fr> (3) Article 15 1. « En attendant la réalisation des objectifs de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, contenue dans la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies, en date du 14 décembre 1960, les dispositions de la présente Convention ne restreignent en rien le droit de pétition accordé à ces peuples par d’autres instruments internationaux ou par l’Organisation des Nations Unies ou ses institutions spécialisées. » 7 DOSSIER - modification de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse : « Toute association régulièrement déclarée depuis au moins 5 ans à la date des faits, se proposant par ses statuts de combattre le racisme, peut exercer les droits reconnus à la partie civile ». Sont également visés « la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée », selon différents moyens (discours, écrits, vente, exposition…) ainsi que « les délits de diffamation et d’injure racistes », - répression des « discriminations raciales », en particulier dans l’emploi et le logement (y compris refus de vente, de service, d’embauche, licenciement), mais aussi les discriminations, abus d’autorité de la part des personnes dépositaires de l’autorité publique, - dissolution et interdiction des groupes pratiquant et favorisant le racisme. Dix ans plus tard, au début de la décennie 80, apparaîtront clairement les insuffisances de la loi proprement dite ainsi que de son application en matière de violences racistes. Ces dernières prennent la forme de nombreux meurtres racistes, tant par des citoyens ordinaires que par certains membres des forces de police. Le MRAP, comme divers auteurs ou journalistes, en tient des « listes noires ». Le MRAP a réclamé sans succès au ministère de la justice l’initiative de créer une incrimination spécifique créant des circonstances aggravantes pour les violences, coups, blessures, homicides inspirés par des mobiles racistes. Du 11 mai au 4 juillet 1987, le procès de Klaus Barbie à Lyon démontre l’importance de la défense, par des associations, des intérêts et de l’honneur de la Résistance (loi du 2 février 1981) autant que de la poursuite des crimes contre l’humanité et la dimension pédagogique de telles interventions. A cet égard, il faut rappeler l’importance de la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discriminations raciales (CERD), ratifiée par la France le 28 juillet 1971. Elle lui fait obligation d’incriminer spécialement les délits et crimes de violences racistes. Or, dans la continuité des années 70, la décennie 80 connaît une terrible explosion de crimes racistes touchant massivement des victimes immigrées, essentiellement maghrébines (pic, notamment, à l’été meurtrier de 1983). Ils sont le fait de « citoyens ordinaires » mais aussi de policiers, en particulier en région parisienne et dans le sud-est. A tel point que le 3 décembre 2003(5) (jour de l’arrivée à Paris de la « Marche pour l’égalité et contre le Racisme », partie 1 mois plus tôt de Marseille sous la bannière de « l’égalité des droits, contre le racisme »), Georgina Dufoix, secrétaire d’État aux travailleurs immigrés, annonce une initiative législative dans le sens prévu par la convention onusienne. En France, c’est le 1er Juillet 1990 que sera votée, sur proposition de Jean- Claude Gayssot, député communiste de la Seine-Saint-Denis, la seconde grande loi contre le racisme : Loi 90-615 – tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe(6) (désormais dite « Loi Gayssot »). (4) Président du Sénat de 1958 à 1969, il avait notamment déclaré «Tous les mouvements de liberté et de démocratie, à travers les temps et les pays, revêtent la même forme : l’instauration ou le respect de la loi». (http://www.senat.fr/histoire/associations/index.html). (5) Radio Pluriel « La Marche pour l’égalité et contre le racisme : 25 ans après... » : (http://www.mediascitoyens.org/La-Marche-pour-l-egalite-et-contre.html ) Et 1992 - «Douce France, la saga du Mouvement Beur», de Mogniss H. Abdallah et Ken Fero, 52 mn., co-production avec Migrant Media pour Channel 4 (G.B.) : http://www.agence-immedia.org/spip.php?article2 (6) http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000403928&dateTexte= 8 Elle réaffirme dans son article 1 le principe selon lequel « toute discrimination fondée sur l’appartenance ou la non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion est interdite. L’État assure le respect de ce principe dans le cadre des lois en vigueur ». L’article 2 stipule que « le 21 mars de chaque année, date retenue par l’Organisation des Nations Unies pour la Journée internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Commission nationale consultative des droits de l’homme remet au Gouvernement un rapport sur la lutte contre le racisme. Ce rapport est immédiatement rendu public ». L’ensemble des dispositions de la loi est intégré au Code pénal et à la loi de 1881 sur la presse, notamment l’article 9 sur le délit de contestation publique des crimes contre l’humanité. Ses différents articles prévoient des sanctions spécifiques pour : - « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence, à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée », - « refus de fournir un bien ou un service à raison de l’origine ou de l’appartenance de celui qui le requiert », - « provocation « à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée », - diffamation […] ou injure « envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée »… Par la loi du 29 janvier 2001 et son article unique, la France reconnaît publiquement le génocide arménien de 19157. La loi du 21 mai 2001, dite « Loi Taubira », reconnaît officiellement l’esclavage et la traite négrière(8). Son article 1 affirme que « La République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l’océan Indien d’une part, et l’esclavage d’autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l’océan Indien et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l’humanité », tandis que l’article 2 prévoit que « les programmes scolaires et les programmes de recherche en histoire et en sciences humaines accorderont à la traite négrière et à l’esclavage la place conséquente qu’ils méritent » et l’article 3 ajoute que sera introduite auprès des organisations internationales une « requête en reconnaissance de la traite négrière transatlantique ainsi que de la traite dans l’océan Indien et de l’esclavage comme crime contre l’humanité ». La Loi du 3 février 2003, née d’une proposition de loi d’origine parlementaire, présentée par les députés Pierre Lellouche et Jacques Barrot le 7 novembre 2002, vise à renforcer le droit pénal, au motif qu’« une vague de violences ouvertement racistes, sans précédent depuis les années sombres de l’entre-deux-guerres et de l’Occupation, a déferlé sur la France ces dernières années […] Pour lutter contre cette situation intolérable, une volonté politique forte est indispensable […] Notre droit pénal ne sanctionne pas, en tant que telles, les agressions à caractère raciste contre les biens, les personnes et même les lieux de culte […] La présente proposition, sans créer de nouvelles incriminations dans le code pénal, vise à prendre en compte l’intention raciste, et dès lors à aggraver lourdement les peines encourues par les auteurs d’atteintes à la personne humaine et aux biens lorsqu’elles ont un caractère raciste ». La loi, votée le 3 février 2003, est publiée au Journal Officiel le 4 février 2003. II- Les obligations internationales de la France en matiÈre de lutte contre le racisme et les discriminations DOSSIER (7) http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000 000405369&dateTexte= (8) http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT00 0000405369&dateTexte= 9 DOSSIER A- Dans le cadre des Nations Unies : Outre la « Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale - CERD » ratifiée par la France le 28 juillet 1971, évoquée précédemment, plusieurs textes internationaux lient la France dans le domaine de la non-discrimination : - Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP)(9), fait à New-York le 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976, ratifié par la France le 4 novembre 1980 : Article 2 1. Les États parties au présent Pacte s’engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ». - Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC)(10): fait à New-York le 19 décembre 1966, entré en vigueur le 3 janvier 1976, ratifié par la France le 4 novembre 1980 : Article 2 2. Les États parties au présent Pacte s’engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire, et relevant de leur compétence, les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. » - Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE)(11) du 26.01.1990 : faite à New York le 20 novembre 1989, ratifiée par la France le 7 août 1990, complétée par deux protocoles facultatifs du 25 mai 2000, ratifiés par la France le 5 février 2003 : Article 2 1. Les États parties s’engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre de l’enfant ou de ses parents ou représentants légaux, de leur origine nationale, ethnique ou sociale, de leur situation de fortune, de leur incapacité, de leur naissance ou de toute autre situation. 2. Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour que l’enfant soit effectivement protégé contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique, les activités, les opinions déclarées ou les convictions de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres de sa famille ». - C onvention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, du 18-12-199012, entrée en vigueur le 1er juillet 2003 : cette convention, qui n’est ratifiée à ce jour par aucun des pays membres de l’Union Européenne, compte 33 pays signataires(13), appartenant aux catégories de pays d’origine et pays de transit de migrants. Article 1er 1. A moins qu’elle n’en dispose autrement, la présente Convention s’applique à tous les travailleurs migrants et aux membres de leur famille sans distinction aucune, notamment de sexe, de race, de couleur, de langue, de religion ou de conviction, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale, ethnique ou sociale, de nationalité, d’âge, de situation économique, de fortune, de situation matrimoniale, de naissance, ou d’autre situation. » B- dans le cadre européen : Le Conseil de l’Europe : - Charte Sociale Européenne(14) ouverte à signature le 18/10/1961 ainsi que ses protocoles additionnels, aboutissant à la Charte Sociale européenne révisée de 1996(15), signée par la France le 18/10/1961, ratifiée le 9/3/1973 et entrée en vigueur le 8/4/1973 : Article 19 Droit des travailleurs migrants et de leurs familles à la protection et à l’assistance » - Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (telle qu’amendée par les Protocoles n° 11 et n° 14(16)) Article 14 Interdiction de discrimination La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. » Protocole N°12(17) : Article 1 Interdiction générale de la discrimination 1. La jouissance de tout droit prévu par la loi doit être assurée, sans discrimination aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. 2. Nul ne peut faire l’objet d’une discrimination de la part d’une autorité publique quelle qu’elle soit fondée notamment sur les motifs mentionnés au paragraphe 1. L’Union Européenne(18) (9) http://www2.ohchr.org/french/law/ccpr.htm (10) http://www2.ohchr.org/french/law/cescr.htm (11) http://www.droitsenfant.org/convention/ (12) http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000405369&dateTexte= (13) http://treaties.un.org/pages/ViewDetails.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=IV-13&chapter=4&lang=fr (14) http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/socialcharter/Presentation/TreatiesIndex_fr.asp (15) http://conventions.coe.int/Treaty/fr/Treaties/Html/163.htm (16) http://conventions.coe.int/treaty/fr/treaties/html/005.htm (17) http://conventions.coe.int/treaty/fr/treaties/html/177.htm/ (18) http://www.no-discrim.fr/web/?/articles/Les-discriminations-raciales-au-travail10 10 DOSSIER - Traité d’Amsterdam de 1997, entré en vigueur le 1er mai 1999 : il inclut des mesures contre les « discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle ».(19) - Directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 20 relative à la mise en oeuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique : Article 1er - Objet : La présente directive a pour objet d’établir un cadre pour lutter contre la discrimination fondée sur la race ou l’origine ethnique, en vue de mettre en oeuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement. » - Directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000(21) « portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail qui vise à combattre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en matière d’emploi et de travail »(22) Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 18 décembre 2000 (23) Article 21 Non-discrimination 1. Est interdite toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle. 2. Dans le domaine d’application des traités et sans préjudice de leurs dispositions particulières, toute discrimination exercée en raison de la nationalité est interdite. » Le texte ci-dessus a repris et remplacé, en l’adaptant, la Charte proclamée le 7 décembre 2000 et l’a remplacée à compter du jour de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne ( 1er décembre 2009). Transposition des deux directives de l’UE en droit interne français : Loi du 16 décembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations NOR: MESX0004437L : Version consolidée au 31 décembre 2004 I. - L’article L. 122-45 du code du travail est ainsi rédigé : Art. L. 122-45. Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son patronyme ou, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II du présent code, en raison de son état de santé ou de son handicap. » Loi n°2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE). Article 1 (abrogé au 1er mai 2011 par la LOI n°2011-334 du 29 mars 2011 - art. 22 ) « Il est institué une autorité administrative indépendante dénommée Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité. La haute autorité est compétente pour connaître de toutes les discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi ou par un engagement international auquel la France est partie. » Le 1er mai 2011 ont pris effet les lois instituant le nouveau « Défenseur des droits »(24) regroupant quatre des anciennes Autorités Administratives Indépendantes (Médiateur de la République, HALDE, Défenseure des enfants, Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité) : - Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République portant création d’un Défenseur des droits dans l’article 71-1 de la Constitution(25) - Loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits(26) - Loi n° 2011-334 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits(27). L’arsenal législatif antiraciste national et international a très largement progressé depuis la fin de la seconde guerre mondiale. De la vigilance et de l’engagement des associations et des citoyens ne cessera de dépendre l’issue des combats antiracistes, tant juridiques que politiques, du XXIe siècle. Bernadette HETIER (19) http://eur-lex.europa.eu/fr/treaties/dat/11997D/htm/11997D.html (20) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:32000L0043:fr:html (21) http://eur-lex.europa.eu/fr/treaties/dat/11997D/htm/11997D.html (22) http://antidiscrimination-syndicat.org/definir_directives%20europeennes.html (23) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2010:083:0389:0403:FR:PDF (24) http://defenseurdesdroits.fr/ (25) http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000019237256 (26) http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000023781167&dateTexte=&categorieLien=id (27) http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000023781252&categorieLien=id 11 DOSSIER Treize années ! Il aura fallu treize année de lutte acharnée des militants du MRAP pour que vienne enfin sur le bureau de l’Assemblée Nationale et du Sénat, les deux propositions de loi relatives à la lutte contre le racisme élaborées par les avocats et magistrats de notre Mouvement aux premiers rangs desquels Léon LYON CAEN, Premier Président Honoraire de la Cour de Cassation et Président du MRAP qui avait commenté dans le numéro 180 de « DROITS ET LIBERTE » daté du 31 mars 1959, cette initiative de la manière suivante : « Préoccupé depuis longtemps de l’insuffisance de notre armature législative dans la lutte, plus que jamais nécessaire, contre le racisme et l’antisémitisme le M.R.A.P., qui compte plusieurs juristes en son sein, a élaboré au cours de l’an dernier le texte de deux avant-projets, destinés l’un par la réforme du décret-loi Marchandeau, à rendre plus efficace la répression de la propagande et des menées racistes, l’autre à sanctionner pénalement certains actes de discrimination raciale. » Cette loi, promulguée le 1er juillet 1972, fut saluée par tous et votée – chose rarissime dans l’histoire de la cinquième République - à l’unanimité des parlementaires. « L’expression raciste n’est pas une opinion : c’est un délit » Combien de fois avons-nous utilisé depuis quarante ans cet argument pour combattre tel homme politique qui croyait « en l’inégalité des races », ou tel journaliste qui prétendait valider le droit à la discrimination à l’emploi d’un candidat, à raison de son origine ou de la couleur de sa peau, ou encore tel individu qui contestait la réalité des chambres à gaz, etc… C’est cette loi qui définit les frontières du permis et de l’interdit et qui autorise les associations constituées depuis plus de cinq ans et ayant pour but la lutte contre le racisme, de poursuivre les auteurs d’expressions racistes devant les tribunaux. C’est cette loi qui aujourd’hui, plus que jamais, est combattue par l’extrême droite et une partie de la droite traditionnelle. Eric Zemmour, « ulcéré » par sa condamnation pour provocation à la haine raciste, n’a pas manqué de stigmatiser devant un parterre de parlementaires de l’UMP « des législations liberticides » et « une pénalisation croissante des opinions ». Applaudi à tout rompre par les députés et sénateurs de l’UMP, ce nostalgique des temps anciens a déploré « quarante ans de miasmes égalitaristes et communautaristes ». Quel contraste avec les débats parlementaires quarante ans plus tôt, de la droite et la gauche confondue qui se félicitait de cette loi votée à l’unanimité ! Force est de constater que certains hommes politiques aux plus hautes fonctions de l’Etat, ont pris l’habitude – surtout à l’approche d’élections - de substituer à des problématiques sociales et économiques, une grille de lecture ethnique. Ainsi, pour Claude Guéant, ministre de l’intérieur, c’est la communauté Comorienne qui constitue l’essentiel de la délinquance à Marseille ! A cet égard, il serait urgent de supprimer la Cour de Justice de la République et sa commission des requêtes, véritable juridiction bananière composée pour l’essentiel de politiques qui protègent les ministres des poursuites même lorsque les délits sont à l’évidence constitués. La liste serait longue d’hommes et de femmes politiques que l’on pourrait citer, gourmands de ces petites phrases assassines qui sacrifient sur l’autel de leurs tactiques politiciennes, le vivre ensemble et la cohêsion nationale. D’aucuns pourraient légitimement considérer que notre arsenal législatif est bien insuffisant pour combattre efficacement le racisme et que les peines d’amendes prononcées sont trop clémentes pour assurer un rôle dissuasif. Qu’on ne s’y trompe pas ! Même si des améliorations doivent impérieusement être apportées à ce dispositif législatif, les condamnations prononcées par les tribunaux - fussent elles symboliques -, marquent du sceau de l’infâmie les auteurs d’expressions racistes. Pierre Mairat Avocat du MRAP UNE LOI QUI HONORE LA REPUBLIQUE « Une chose n’est pas juste parce qu’elle est loi. Mais elle doit être loi parce qu’elle est juste. » Montesquieu La loi n’a pas qu’une fonction judiciaire. Elle a aussi une fonction éducative. Je voudrais donner quelques éléments d’expérience et de réflexion à partir de la pratique acquise dans le comité MRAP de Moselle ouest. Nous introduisons l’examen de la loi de 1972-90 dans les écoles primaires grâce à notre Jeu de la Loi. L’objet à découvrir est assez simple : voilà dix situations où il y a une discrimination caractérisée, il faut la décrypter et savoir que c’est interdit, qu’on peut porter plainte et faire condamner. Avec les adolescents, nous utilisons aussi les panneaux de ce jeu qui représentent des situations, mais en les montrant l’un après l’autre pour caractériser des types de discrimination raciste et les commenter (en précisant bien qu’ils sont extraits d’un jeu pour les écoles, pour que les jeunes ne se sentent pas infantilisés). Précisons en outre que notre public est souvent celui des stages de citoyenneté de la PJJ, qui a donc une expérience particulière de la justice et de la loi. Une loi légitime ? Même quand la question n’émerge pas spontanément, nous la provoquons (plusieurs panneaux du jeu y incitent) : pourquoi cette loi ? Ne contredit-elle pas la liberté de pensée et d’expression, droit démocratique que nous défendons farouchement par ailleurs ? Je ne reprends pas ici l’argumentaire, qui mériterait un article à lui seul, mais évoquer cette question est indispensable. Sinon, la loi risque d’être vécue comme une simple interdiction, plus ou moins arbitraire et supportable. D’ailleurs nous, nous savons bien que cette légitimité est discutée dans le mouvement antiraciste lui-même, surtout l’ajout de 1990, débat récemment relancé par la nouvelle loi sur les génocides. Cette question apparaît parfois directement, mais aussi parfois visiblement refoulée par la crainte de se mettre en faute devant le « monsieur du MRAP » ! Et, plus profondément, on a souvent, de façon schématique, le dialogue suivant : « Pourquoi le racisme c’est mal ? » - « Parce que c’est interdit ! ». C’est-à-dire une perception exactement inversée de la place du délit et de sa condamnation … C’est pourquoi nous ne faisons une séquence sur la loi qu’en deuxième étape (sur une demi-journée ou deux jours différents), la première ayant été consacrée au racisme et à la discrimination en action dans la société, par exemple à l’aide des « 12 courts métrages » utilisés par beaucoup d’entre nous. Quelle juste place pour la loi ? Evidemment, on a régulièrement à faire à des réflexions désabusées : « Tout ça, ça sert à rien. On peut jamais gagner ! ». La première bataille est donc de combattre ce scepticisme, qui domine chez ceux qui n’ont pas souvent vu la loi être de leur côté. Les jeunes de la PJJ en particulier connaissent essentiellement son côté répressif, il faut donc leur faire comprendre que son autre versant est le côté protecteur, même pour eux dans certains cas. Il est donc indispensable d’avoir un stock d’exemples de procédures qui ont abouti à des condamnations réelles. Elles peuvent venir soit de l’expérience des comités, ou simplement de collecte d’extraits de presse. Mais la loi peut aussi, à l’inverse, être perçue comme la panacée à tous les problèmes. Lorsqu’on projette les « 12 courts métrages », après le décryptage de situations très évidemment racistes, on en vient à la question : que peut-on faire ? Et on a souvent dans le groupe une affirmation victorieuse : on peut porter plainte ! Hélas ! Il faut finalement constater que presqu’aucune de ces situations n’est susceptible d’une issue judiciaire (faute de délit explicite, de preuve ou de témoins)… Et il faut alors expliquer la juste place de la loi, parfois utile, à titre dissuasif ou répressif, mais bien loin de régler (comme toutes les lois …) l’ensemble des rapports humains et sociaux où le racisme est impliqué. Mais sans doute y a-t-il d’autres expériences de la transmission éducative de cette loi. Leur mise en commun serait bien utile… Jean-François Quantin Moselle DOSSIER 12 13 Le MRAP s’efforce d’agir auprès des jeunes pour les convaincre qu’un raciste est quelqu’un qui se trompe de colère. La semaine d’éducation contre le racisme s’articule autour du 21 mars. Proclamé en 1966 par l’Assemblée générale des Nations Unies « Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale », le 21 mars commémore les violences contre la communauté noire qui manifestait pacifiquement contre les lois relatives aux laissez-passer imposés par l’apartheid en Afrique du Sud : la police ouvrit le feu et tua 69 personnes le 21 mars 1960 Sharpeville. C’est en 1984 que la Semaine d’éducation contre le racisme fut créée en France. Un collectif s’organisa, qui comprenait des associations contre le racisme et pour les droits de l’homme, des mouvements de jeunes et d’éducation populaire, des syndicats d’enseignants. Le ministère de l’Éducation nationale apporta un soutien relatif à cette initiative jusqu’en 2004. Les crédits alloués au CIDEM, centre de ressources, pour créer et diffuser des supports de sensibilisation (journal, affiche) s’amenuisèrent jusqu’à disparaître totalement en 2011. Le MRAP et ses comités locaux n’en ont pas moins poursuivi leurs actions pour la prévention et la sensibilisation des jeunes contre ces fléaux que sont le racisme, la xénophobie et les discriminations. Beaucoup d’établissements scolaires, de maisons de jeunes, de centres sociaux s’adressent au MRAP pour louer une exposition ou une vidéo ou demander l’intervention d’un militant. Cela impose de renouveler les supports : en 2011 une exposition sur les Roms a vu le jour, une autre a été actualisée : Racisme et discriminations : comprendre pour agir. Un projet sur l’esclavage est en préparation. Une évolution apparaît de plus en plus nette ces dernières années : l’éducation contre le racisme s’étend bien au delà de cette semaine. La multiplication des journées mémorielles amène les établissements scolaires à solliciter des interventions tout au long de l’année. Journée de la mémoire des génocides et de la prévention des crimes contre l’humanité (27 janvier), Journée mondiale des droits de l’Homme (???), Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition (10 mai), Journée des droits de l’enfant (???), Journée mondiale du réfugié (???), 17 octobre… autant d’occasions pour le MRAP de rencontrer des jeunes et de les sensibiliser à la lutte contre toutes les formes de racisme. La participation à un Forum des associations, des interventions en classe ou par regroupement d’élèves, avec des enfants ou des jeunes entre 4 et 18 ans, sont des activités très courantes pour les comités locaux qui utilisent des supports divers (films, vidéos, expositions, affiches, publicités) : les collèges sont les plus demandeurs. Parfois, les rencontres se renouvellent chaque année. Le thème mis en avant est souvent l’éducation à la citoyenneté : l’établissement sollicite les militants parce qu’un événement s’est produit, que le climat s’est détérioré (injures, violences), que certains élèves sont rejetés… On peut prévoir que la campagne sur le harcèlement à l’école que vient de lancer le ministre de l’Éducation nationale va amener de nouvelles sollicitations. Il s’agit dans tous les cas de déconstruire des préjugés, des stéréotypes : mais pour y parvenir, il faut que les jeunes puissent prendre la parole et s’exprimer librement. La parole du MRAP n’est pas une parole moralisatrice, elle s’appuie sur la déconstruction des idées reçues. De plus en plus, les interventions lient racisme, sexisme et homophobie qui relèvent des mêmes processus de rejet : ignorance, peur et sentiment de supériorité. Par exemple, dans un collège de l’agglomération dacquoise, une intervention du MRAP 40 présente 4 courts métrages de Pas d’histoire, la séquence de testing dans une boîte de nuit extraite du film du MRAP Discriminations, ouvrons les yeux, une vidéo sur la discrimination homophobe : un riche débat en perspective. Mais Quelques initiatives sont innovantes : un 8 pages spécial du journal Ch’titoyen, édité par la Fédération Nord-Pas de Calais, s’adresse tant aux éducateurs qu’aux jeunes et propose au sommaire : - Éducation à la citoyenneté et contre le racisme - Comment combattre les idées reçues sur l‘immigration - Des initiatives, des outils pédagogiques pour comprendre et lutter contre les idées racistes - Une loi et des moyens d’action contre les discriminations un projet sur le camp d’internement des « nomades » à Rennes de 1940 à 1945 : une classe de 1ère a étudié les documents des Archives nationales et départementales, des interviews des Gens du voyage recueillent les souvenirs des camps : cela va aboutir à une brochure Histoire et Mémoire du camp d’internement des nomades de Rennes – 1940/1945, mais cela a aussi permis des rencontres entre lycéens et Gens du voyage, avec les Rennais à travers une conférence, la projection d’un film, une intervention au Conseil municipal, dans les media locaux… Des initiatives sur Sport et Racisme : dans les Landes, dans les Bouches du Rhône, dans la Fédération Nord-Pas de Calais, le Rallye de Paris… Des créations artistiques en partenariat et dans la durée : - Concours de BD du MRAP 66 sur le thème des discriminations, après un concours de poésie - Paroles d’enfants à Vitrolles : créations artistiques et quiz imaginés en ateliers (24- 28 octobre) ; brochure éditée en février. - Après Couleurs Femmes, l’exposition « Le fond de l’air effraie », initiative du fanzine Cafzic de Mont-de-Marsan soutenue par le MRAP 40 Et combien d’autres initiatives des comités locaux? Elles sont source d’idées nouvelles pour les militants. Différences doit servir de lien entre toutes ces initiatives. Une rubrique régulière accueille des articles relatant ces actions éducatives, présentant les outils élaborés... comme dans ce numéro. Michelle Fougeron Cadre MRAP EDUCATION SEMAINE D’ÉDUCATION CONTRE LE RACISME : BIENTÔT 30 ANS Le site du MRAP présente dans la rubrique Éducation tous les outils pédagogiques disponibles au MRAP : expositions, vidéos, affiches, jeux du MRAP et des associations amies. Les comités locaux qui ont créé un site y présentent leurs réalisations. EDUCATION 14 Une exposition pour faire comprendre ce qu’est le racisme, la discrimination, et comment on passe du préjugé à la discrimination. Comprendre que le racisme est un délit sévèrement puni par la loi tout comme la discrimination. Comprendre comment agir lorsque l’on est témoin ou victime d’actes racistes ou discriminatoires. Avec des exemples de discriminations. Avec des exemples de condamnations. Les possibilités d’actions en justice. Faire connaître le MRAP, son origine, ses luttes, son combat au quotidien, ses activités. Illustrations�de Charb et de la bande dessinée «�Moi, raciste�?!�» de la Commission européenne. Une réalisation�: du MRAP76, de la Commission discriminations et du MRAP national. RACISME, DISCRIMINATIONS COMPRENDRE POUR AGIR EXPOS MRAP 1 mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr Racisme, discriminations Comprendre pour agir Depuis la loi du 1er juillet 1972, le racisme et la discrimination sont des délits. Ils sont sévèrement sanctionnés par la loi. 1 Panneau 1 Depuis la loi du 1er juillet 1972, le racisme et la discrimination sont des délits. EXPOSITIONS DU MRAP Racisme, discriminations Comprendre pour agir mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - www.mrap.fr Exposition de 9 panneaux pour les collèges, les centres sociaux, les maisons de quar tier, les centres culturels, les bibliothèques... 15 EDUCATION EXPOS MRAP RACISME, DISCRIMINATIONS COMPRENDRE POUR AGIR mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr Racisme, discriminations Comprendre pour agir Il peut se dé�nir comme une idéologie fondée sur l’idée qu’il existe plusieurs races humaines et qui a�rme la supériorité d’un groupe racial sur les autres. C’est aussi un ensemble de comportements et d’attitudes amenant à la dévalorisation et au rejet d’individus ou de groupes en raison de leur origine, réelle ou supposée, et plus directement de toute une série de caractéristiques sensibles qui peuvent servir à classer une «�race�». Ces caractéristiques sensibles sont�: la nationalité, la religion, l’ethnie ou la «�race�». Le racisme, ça peut être : - une injure�: quand une personne tient des propos blessants ou méprisants qui visent une personne (ou un groupe de personnes) en raison de son ethnie, de sa nationalité, de sa «�race�» ou de sa religion (articles 29-2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et R 624-4 du Code pénal) - de la di�amation�: quand une personne a�rme des faits faux, mais présentés comme vrais qui portent atteinte à la dignité d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de son ethnie, de sa nationalité, de sa «�race�» ou de sa religion (articles 32-2 de la loi du 29 juillet 1881 et R.624-5 du Code pénal) - de la provocation à la haine et à la violence racistes, à la discrimination raciste�(incitation à la haine raciale) : quand l’auteur de propos ou d’écrits cherche à susciter une réaction de rejet, d’hostilité ou de violence à l’encontre d’une personne (ou d’un groupe de personnes) en raison de son ethnie, de sa nationalité, de sa «�race�» ou de sa religion (article 24-8 de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 ou R.625-7 du Code pénal) - de l’apologie des crimes contre l’Humanité�: quand l’auteur incite à porter un jugement de valeur morale favorable à de tels crimes, comme le génocide, la déportation, l’esclavage, la torture (article 24-5 de la loi du 29 juillet 1881). Qu’est-ce que le racisme ? 2 ê! Parler de «�races�» pour les êtres humains est inapproprié, car il n’existe qu’une seule «� race� »� : la race humaine à laquelle nous appartenons tous. L’habit ne fait pas le moine (1/7) mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr Racisme, discriminations - 10�000 euros d’amende pour provocation à la haire raciale / jugement du Tribunal correctionnel de Paris con�rmé par la Cour de Cassation - 3 mois de prison avec sursis et 5�000 euros d’amende pour contestation de crime contre l’Humanité / Tribunal correctionnel de Lyon. - 2� 000 euros (et environ 10 000 euros de dommages et intérêts à des associations représentant les victimes du racisme et des discriminations) en février 2011 pour un journaliste de télévision connu. L’intéressé avait a�rmé, en 2010, que la discrimination à l’embauche était une chose «�normale�», qu’elle «�fait partie de la vie�», et que les employeurs devaient pouvoir la pratiquer en toute liberté. Il avait également a�rmé qu’un contrôle «�au faciès�» était lui aussi tout à fait normal, puisque « la plupart�des dealers sont des Noirs et des Arabes�». Le tribunal a considéré qu’il y a bien délit d’«�incitation à la haine raciale�». Du préjugé à la discrimination Comprendre pour agir 3 L’habit ne fait pas le moine (2/7) Racisme, sexisme, homophobie reposent sur les préjugés Exemples de condamnations pour racisme mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr Les discriminations désignent l’ensemble des traitements inégaux et défavorables aux victimes appliqués à des personnes ou à des groupes de personnes, placées dans des situations comparables, en raison de motifs qui ne devraient pas être pris en compte; elles peuvent porter sur l’emploi, l’éducation, le logement, la santé, les loisirs... L’article 225-1 du Code pénal dé�nit la discrimination et énonce les critères interdits�: «�constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée�». Les critères soulignés ci-dessus sont ceux de la discrimination à caractère raciste. C’est donc le motif illégal et injustifié qui caractérise la discrimination. L’article 225-2 précise les sanctions encourues�: La discrimination dé�nie à l’article 225-1, commise à l’égard d’une personne physique ou morale, est punie de 3 ans d’emprisonnement et de 45�000 euros d’amende lorsqu’elle consiste à�: - refuser la fourniture d’un bien ou d’un service - entraver l’exercice normal d’une activité économique quelconque - refuser d’embaucher, sanctionner ou licencier une personne - subordonner la fourniture d’un bien ou d’un service à une condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1 - Subordonner une o�re d’emploi, une demande de stage ou une période de formation en entreprise à une condition fondée sur un des critères interdits. Lorsqu’elle est commise par une personne dépositaire de l’autorité publique, elle est plus sévèrement réprimée. La peine est portée à 5 ans de prison et 75�000 euros d’amende. (article 423- 7 du Code pénal). Racisme, discriminations Comprendre pour agir Qu’est-ce que la discrimination ? 4 L’habit ne fait pas le moine (3/7) mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr - un patron de bar refuse de servir des clients homosexuels - un propriétaire immobilier refuse de louer un appartement à une personne handicapée ou exige que son locataire ne reçoive pas chez lui des personnes de couleur - une entreprise limite l’évolution professionnelle des carrières des femmes - une prime exceptionnelle est versée à tous les salariés d’une entreprise, à l’exception de ceux ayant une activité syndicale - un maire exige que le personnel de la mairie soit adhérent à son parti politique - un employeur refuse de recruter des femmes mères de famille Racisme, discriminations Comprendre pour agir Études de cas Discrimination liée à l’origine ethnique Domaine de l’emploi Dans plusieurs a�aires impliquant des salariés de Renault, jugées depuis 2003 devant le Conseil des prud’hommes de Boulogne-Billancourt, puis devant la Cour d’appel de Versailles, l’entreprise a été condamnée à de fortes indemnités pour discrimination raciste dans l’évolution de carrière. Domaine des loisirs Dans une a�aire concernant une boîte de nuit située à Tours, le «� Pym’s� », les tribunaux (con�rmés en 2002 par la Cour de cassation) ont condamné l’établissement pour avoir refusé l’accès à une certaine clientèle, pour des motifs discriminatoires interdits. Les juges ont aussi validé la méthode dite du «�testing�». Discriminations liée à l’âge Domaine de l’emploi en 2007, un cabinet de recrutement a été condamné à 500 € d’amende pour discrimination à l’embauche sur critère d’âge non justi�é. Discrimination liée à l’activité syndicale Domaine de l’emploi La première a�aire a été celle de la condamnation de Peugeot, en 1995 : les militants syndicaux avaient connu - comme les juges pouvaient le constater - une évolution de carrière nettement plus longue (et une rémunération plus basse) que leurs collègues non syndiqués. 5 L’habit ne fait pas le moine (4/7) Exemples de discriminations Exemples de condamnations Panneau 2 Qu’est-ce que le racisme ? L’injure. la di�amation, la provocation à la haine et à la violence racistes, la discrimination raciste, l’apologie des crimes contre l’humanité. Panneau 3 Du préjugé à la discrimination. Racisme, sexisme, homophobie reposent sur les préjugés. Exemples de condamnations pour racisme. Panneau 5 Études de cas. Exemples de discriminations. Exemples de condamnations. Panneau 4 Qu’est-ce que la discrimination�? En raison de l’origine, de l’appartenance, ou la non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une “race” ou une religion déterminée. Les di�érents types de discriminations. 16 EDUCATION mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr Racisme, discriminations Comprendre pour agir Que faire ? 7 Ne pas rester silencieux, que l’on soit victime ou témoin ! Le témoignage constitue un élément essentiel de la construction de la preuve. L’e�cacité des actions qui peuvent être intentées est directement liée à la mobilisation des témoins. Témoigner est un acte grave comme le rappelle la motion qui l’accompagne : «�j’ai conscience que ceci est un témoignage susceptible d’être produit devant la Justice et, que je m’expose à des poursuites en cas de faux témoignage�» La loi vous protège si vous portez plainte ou si vous apportez votre témoignage lors d’une situation de discrimination ou de harcèlement. Avant d’intenter une action en justice, il est important de s’assurer que : - les faits dénoncés sont prévus et sanctionnés par la loi, - vous êtes dans les délais pour mener l’action, - la preuve des faits que vous souhaitez dénoncer peut être apportée. Vous pouvez saisir la justice en portant plainte La plainte doit être di�érenciée de la main courante. Cette dernière consiste à consigner les faits dans les registres du commissariat de police ou de la gendarmerie. Contrairement à la plainte, elle n’est pas transmise au Procureur de la République. Elle ne peut pas donner lieu à des poursuites. ê! L’habit ne fait pas le moine (5/7) Racisme, discriminations Comprendre pour agir Actions en justice 8 Action pénale mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr Le JUGE PÉNAL Peut être saisi pour refus d’embauche, d’accès à un bien ou à un service pour un motif discriminatoire ou pour injures ou violences racistes. Au TRIBUNAL CORRECTIONNEL, l’action vise à obtenir la condamnation de l’auteur à une peine de prison et/ou à une amende. Dans l’action pénale, le principe de la présomption d’innocence fait reposer la charge de la preuve sur le plaignant. La preuve doit établir la réalité de ce que vous dénoncez et l’intention raciste de l’auteur du comportement. Action civile - Le JUGE CIVIL peut être saisi pour refus de location ou de vente d’un logement. Au TRIBUNAL D’INSTANCE OU DE GRANDE INSTANCE (selon l’importance des sommes en jeu), l’action vise à obtenir la condamnation de l’auteur et le versement de dommages et intérêts. - Le Juge prud’homal peut être saisi pour tout ce qui concerne l’emploi (secteur privé) : embauche, accès à un stage, formation, carrière... Au CONSEIL DES PRUD’HOMMES, l’action vise à obtenir l’annulation d’une décision et le versement de dommages et intérêts. Dans l’action civile ou prud’homale, la charge de la preuve est partagée entre la victime (qui doit apporter des éléments précis et concordants), et l’auteur de la discrimination présumée (qui doit prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs). - Le Juge administratif peut être saisi si la plainte vise une administration ou une collectivité publique. Pour toute démarche et suivant votre situation, vous pouvez faire appel à un syndicat, une association compétente, ou au Défenseur des Droits; ce dernier a pris le relais de l’ex- HALDE (Haute Autorié de Lutte contre les Discriminations et pour l’Égalité) et est compétent pour enquêter sur les cas de discriminations quel qu’en soit le critère. Toute personne peut adresser un dossier au Défenseur des Droits (08 1000 5000), par courrier ou à un de ses correspondants locaux. L’habit ne fait pas le moine (6/7) mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr Racisme, discriminations Comprendre pour agir Le MRAP 9 Association créée en 1949, le MRAP a pris ses origines dans les combats de la résistance contre l’idéologie raciste, antisémite, xénophobe de l’occupant nazi et du Gouvernement de Vichy. Depuis plus de 60 ans, le MRAP, avec ses comités locaux, lutte contre toutes les formes de racisme et de xénophobie, antisémitisme, racisme colonial, esclavage, rejet des gens du voyage, des immigrés et de leurs enfants, des étrangers ou supposés tels. Ses engagements En faveur des droits de l’Homme et du citoyen, le MRAP participe à la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme, à des réseaux européens contre le racisme, à de nombreuses commissions internationales dans le cadre de l’ONU. Le MRAP milite pour�: - la justice et l’égalité des droits - le développement de la citoyenneté - le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et la Paix - l’amitié entre les peuples. Ses activités De proximité Dans les permanences pour l’accès aux droits, des militants écoutent et accompagnent des victimes de discrimination, mais aussi des demandeurs d’asile et des sans-papiers De sensibilisation Les campagnes, en particulier contre les discriminations, encouragent de fortes mobilisations pour l’égalité, la citoyenneté et la justice et aussi en faveur du droit de vote des résidents non européens. L’éducation à la citoyenneté En tant que mouvement d’éducation populaire, le MRAP propose des animations auprès des jeunes et des adultes, avec de nombreux supports (�lms, expositions, jeux, DVD …). Et auprès de structures variées (établissements scolaires, centres de loisirs, centres sociaux, services enfance/jeunesse…). La solidarité internationale Le MRAP, avec d’autres organisations, alerte l’opinion par des campagnes de presse, des manifestations, pétitions, et crée ainsi une pression internationale. Illustrations�: remerciements à Charb pour le dessin «�la cravate�» - Bande dessinée «�Moi, raciste�?!�» – Commission européenne 1998 Conception�et réalisation : MRAP 76 - Commission discriminations - MRAP national L’habit ne fait pas le moine (7/7) Tous pas pareils, tous égaux ! mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples 43 boulevard de Magenta - 75010 Paris - Tél. : 01 53 38 99 99 - Fax : 01 40 40 90 98 - accueil@mrap.fr - http://www.mrap.fr Racisme, discriminations Comprendre pour agir Exemples de discriminations Les discriminations peuvent prendre di�érentes formes. Elles peuvent être volontaires ou non, directes ou indirectes. Certaines discriminations sont autorisées par la loi. Par exemple, pour intégrer certains postes de la fonction publique, la condition de nationalité française peut être exigée. Bien souvent, ce sont des préjugés et des stéréotypes qui nourrissent les discriminations. C’est l’ensemble de toutes les représentations que l’on a en tête. Et ce n’est pas facile de nous en rendre compte parce qu’elles sont transmises par notre éducation, qu’elles font partie de notre culture et que donc la société française en véhicule un certain nombre. 6 RACISME, DISCRIMINATIONS COMPRENDRE POUR AGIR EXPOS MRAP Panneau 6 Exemples de discriminations. Discriminations volontaires ou non. Directes ou indirectes, légales ou illégales. Panneau 7 Que faire�? Ne pas rester silencieux, que l’on soit victime ou témoin� ! Vous pouvez saisir la justice en portant plainte. Précautions à prendre. Panneau 8 Actions en justice. Action pénale. Action civile. Panneau 9 Le MRAP. Son origine. Ses luttes. Son combat au quotidien. Ses activités. 17 ROMS A sa demande, le Défenseur des droits a reçu une délégation(1) du MRAP le 6 janvier 2012. Lors de cette rencontre, pour laquelle il était accompagné de Mme Lyazid, son adjointe à la lutte contre les discriminations, M. Baudis a tenu à rassurer : le regroupement des différentes Autorités (Médiateur de la République, HALDE (compétence toujours limitée aux discriminations), Commission de déontologie de la sécurité, Défenseur des enfants) en une Autorité constitutionnelle indépendante, le « Défenseur des droits », représente pour lui un progrès certain puisqu’au pouvoir de recommandations s’ajoute désormais un pouvoir d’injonction. En outre, il a affirmé sa volonté qu’aucun de ces différents secteurs de responsabilité ne soit sacrifié. Parmi les gros dossiers devant être résolus, il a précisé que pour les mineurs isolés étrangers - dont le MRAP a souligné la situation catastrophique à Paris même, en Seine-Saint-Denis et dans le Calaisis aussi bien qu’outre-mer -, il se rendrait prochainement en Guyane et à Mayotte, territoires de la République où existent de multiples atteintes aux droits : situation du Centre de rétention de Mayotte, discriminations à l’emploi en Guyane, tensions sociales et de maintien de l’ordre lors des mouvements sociaux à Mayotte... Il entend effectuer un travail global sur tous les Outre-mers en 2012. La visite du MRAP a été l’occasion de préciser certains points : la saisine peut être faite par la victime ou par une association ; les correspondants locaux de l’ancien Médiateur de la République et des anciennes Autorités Indépendantes sont maintenus et formés pour répondre aux demandes des victimes dans les quatre secteurs ; les requêtes portant sur la déontologie de la sécurité doivent être adressées directement, sans qu’il soit nécessaire, comme précédemment, de les transmettre par l’intermédiaire d’un parlementaire. En matière de lutte contre le racisme et les discriminations, le MRAP a tout d’abord évoqué certaines de ses préoccupations majeures locales et nationales, en particulier : le peu d’existence réelle des COPEC, le trop grand nombre des classements sans suite des plaintes ou signalements aux parquets, ce dernier point ayant également été traité dans le cadre de la CNCDH(2), lors de l’audition des représentants du ministère de la Justice qui attend une réelle amélioration de la situation par la mise en place d’un nouvel outil informatique dans les juridictions. Le MRAP a rappelé ses modes d’action en matière de lutte contre le racisme et les discriminations : - accueil et écoute des personnes victimes dans ses permanences et soutien à la constitution d’un dossier de plainte ou de médiation - approfondissement de la réflexion au sein des structures d’accueil et partage d’expériences - participation aux instances nationales et locales pour éclairer la prise de décision (CNCDH, COPEC, schémas départementaux d’accueil des Gens du voyage…) - action éducative et de sensibilisation contre le racisme, la xénophobie, les discriminations et les préjugés qui les sous-tendent (expositions, colloques, débats, interventions dans les établissements scolaires, etc.) Le MRAP engage actuellement un travail de réflexion sur les discriminations multicritères, notamment origine et genre, origine et territoire. Pour améliorer la connaissance par les citoyens de la lutte contre le racisme et les discriminations, le MRAP travaille actuellement à la mise en ligne de ses archives de plus de soixante ans, en accès libre aussi bien pour ses membres que pour l’ensemble des citoyens, et tout particulièrement les chercheurs. Le MRAP a également exprimé ses principaux sujets d’inquiétude : - les difficultés d’accès au DROIT et à la JUSTICE pour les victimes, en raison de multiples difficultés, en particulier financières et culturelles ; - le s réticences à porter plainte renforcées du fait que les condamnations et les dommages et intérêts prononcés par les tribunaux ont un caractère peu dissuasif à l’égard des auteurs poursuivis ; - les cas des discriminations multicritères sont peu prises en compte pour les deux types de critères, car la loi ne le prévoit pas : les difficultés sont liées aussi à l’administration de la preuve du caractère raciste intentionnel, qui entraine souvent la mise en avant de l’autre critère ( genre ou âge) ; - banalisation des propos racistes et actes de haine inquiétants (ex : profanations de cimetières de toute confession) - ghettoïsation des quartiers populaires et enfermement social de leurs habitants : de nombreuses mesures n’ont qu’un caractère homéopathique ; - sentiment croissant de rejet des personnes qui se voient renvoyées à leur « origine », ce qui entraine des replis communautaires ; - Gens du voyage : les recommandations du Défenseur des droits vont dans le bon sens (les droits civiques et l’accès aux énergies(3)), mais le taux de réalisation des aires d’accueil reste scandaleusement bas, 12 ans après la 2e Loi Besson : cela entraine des discriminations lourdes de conséquences dans l’accès à l’éducation, à la santé, aux droits sociaux (habitat, logement, accès au fonds de solidarité logement, pack énergie). Ces questions ont semblé être entendues par le Défenseur des droits. Le MRAP a également précisé que ses requêtes ne concernaient pas la seule lutte contre les discriminations, mais aussi le Défenseur des Droits des enfants, notamment pour les mineurs isolés, les enfants en CRA, les enfants Roms, et la déontologie de la sécurité. D. Baudis a proposé que ces questions soient l’objet de nouvelles rencontres avec ses autres adjointes, Mme DERAIN pour la Défense des enfants et Mme MOTHES pour la déontologie de la sécurité. Ces rencontres ont eu lieu le 26 janvier 2012.(4) Le MRAP a rencontré Mme Mothes pour la déontologie de la sécurité : il a fait valoir qu’il partage l’indignation du Défenseur des droits contre des violences policières qui entraînent la mort, comme dans le cas de procès Hakim Ajimi à Grasse, par compression mécanique(5), ou des blessures dues aux flash ball ou au taser. Mais le MRAP considère que ces actes s’inscrivent dans la logique des dérives quotidiennes et jamais sanctionnées par la hiérarchie ou la justice : propos injurieux, contrôles au faciès, palpations humiliantes dans les lieux publics, mises à nu lors de gardes à vue… L’attitude des polices spécialisées (police des transports, polices municipales ou privées) a été également dénoncée. Quelques dossiers précis ont été présentés. Peu de réponses ont été apportées par Mme Mothe. La rencontre avec Mme Derain, en charge de la Défense des enfants, a paru constructive. Le MRAP a signalé différents traitements indignes dont Mme Derain a affirmé être préoccupée : - l’accueil des Mineurs Isolés Etrangers (MIE) : Jean Michel Centres a pu exposer très complètement les manques à Paris : accueil dégradé, insuffisance de l’hébergement, manque de suivi social et éducatif des jeunes, absence de fiabilité des tests osseux dénoncée par les scientifiques… La situation d’autres départements (93 et 35) a été aussi évoquée ; - les traitements indignes des enfants de familles de migrants : le placement d’enfants en Centre de Rétention Administrative (condamné jusqu’à présent en vain par la CEDH, (notamment dans son récent arrêt du 02/02/2012(6), ) comme traitement inhumain et dégradant) ; le non hébergement de familles avec enfants en demande d’asile ; la sortie des Centres d’Accueil pour Demandeurs d’Asile (CADA) des familles déboutées et le caractère néfaste de la précarité des hébergements d’urgence, le plus souvent limités à 5 jours maximum ; - les expulsions des familles Roms très traumatisantes
- santé et éducation des enfants sont mises
à mal ; les refus trop fréquents d’inscription à l’école par les maires ; - le refus de paiement des allocations familiales par certaines CAF pour les enfants entrés hors regroupement familial ; - les difficultés de la scolarité des enfants du Voyage : manque d’enseignants formés, réticences des collèges à signer des conventions pour l’accompagnement des collégiens inscrits au CNED. Depuis cette rencontre, une des collaboratrices de Mme Derain a contacté Jean Michel Centres au sujet des MIE sur à Paris et d’une saisine éventuelle : elle propose un processus de saisine générale par les associations, permettant d’ouvrir le dossier, et à compléter par des saisines pour les cas particuliers. Bernadette Hétier Jean Michel Centres Michèle Fougeron RENCONTRE AVEC LE DÉFENSEUR DES DROITS ET SES ADJOINTES (1) Représenté par Bernadette Hétier et Michèle Fougeron (2) Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme où le MRAP est activement impliqué (3) http://www.lagazettedescommunes.com/91415/le-defenseur-des-droits-demande-la-treve-hivernale-pourles- caravanes/ (4) délégation du MRAP composée de Bernadette Hétier, Jean Michel Centres et Michèle Fougeron (5) La désormais trop connue « clé d’étranglement » qui avait déjà valu à la France, dans l’affaire SAOUD contre Contre France, une condamnation par la Cour Européenne des droits de l’homme devenue définitive le 09/01/2008 : <http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/portal.asp?sessionId=86087226&skin=hud oc-fr&action=request> (6) http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?action=open&documentId=899911&portal=hbkm&source=ex 18 ROMS PROJET DE STRATÉGIE NATIONALE POUR L’INCLUSION DES ROMS ET GENS DU VOYAGE : « UNE PLACE ÉGALE DANS LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE » ? Le 19 mai, les ministres européens se sont engagés sur la mise en place de stratégies nationales d’intégration des Roms jusqu’en 2020, à travers la réalisation d’objectifs dans les domaines de l’enseignement, de l’emploi, des soins de santé et du logement afin de combler les écarts entre les communautés roms marginalisées et le reste de la population. Les États membres devaient élaborer des stratégies nationales ou des ensembles intégrés de mesures pour la fin 2011. Ce projet de stratégie nationale représente le premier acte de la préparation du budget européen pour la période 2014-2020. Fin décembre dernier, la France a, dans les délais, remis à la Commission européenne un projet. A ce jour, seulement 14 pays sur les 27 ont rendu leur copie. La plupart des textes ont été validés par Bruxelles. Seules les stratégies de la France et de la République tchèque restent à l’état de projet. Le texte français se refuse à un traitement spécifique pour une minorité ethnique et entend réduire les inégalités dans le cadre du « droit commun ». « La tradition républicaine française, qui se traduit par une conception exigeante du principe d’égalité, ne permet pas d’envisager des mesures qui seraient spécifiquement ciblées sur un groupe ethnique. » Mais des mesures spécifiques peuvent tenir compte de leur mode de vie. Ce principe n’est pas contesté par les intéressés qui revendiquent l’égalité des droits, mais déplorent l’inefficacité des mesures prises, pour certaines, depuis 30 ans. Ainsi le paragraphe consacré à « la politique ambitieuse conduite depuis le début des années 1990 en matière de logement » a de quoi déclencher des réactions amères du côté des responsables des associations de Gens du voyage. Désiré Vermersch de l’ASNIT (Association Sociale Nationale et Internationale Tzigane) et Fernand Delage, Vice président de l’UFAT (Union Française des Associations Tsiganes) déplorent le gouffre qui sépare les mots de la réalité. Parler de stratégie nouvelle lorsqu’on est mis devant un patchwork de mesures, existant pour certaines depuis 1990, mais qui ont été très peu mises en oeuvre en particulier pour les aires d’accueil des Gens du voyage, laisse un peu sceptique. Dans le document-projet, le terme « Rom » est à entendre dans son sens générique utilisé par les instances européennes, c’est à dire pas seulement la minorité ethnique venant majoritairement de Roumanie ou de Bulgarie, mais également les Gens du voyage citoyens français. Pourtant en France, en 2012, ces deux groupes présentent des statuts bien distincts, en particulier pour l’accès à l’habitat et pour le travail. Il est fait référence à des actions généralistes à destination des communautés marginalisées. Sur le principe, c’est un progrès, mais il y a une ambigüité constante dans la diversification des réponses. D’autant plus qu’actuellement les droits des Roms migrants, citoyens européens, sont extrêmement limités. À l’avenir leurs droits pourraient-ils enfin être reconnus à l’égal de tous les autres européens ? Entrer dans le « droit commun », c’est bien ce que demandent aussi tous les Gens du voyage qui ont toujours un statut administratif discriminatoire ! Il est dit que « l’État poursuivra le financement de dispositifs d’action sociale en direction de ces populations. Son action doit étroitement s’articuler avec celles des collectivités locales et notamment des Conseils Généraux ». Pourtant ni les collectivités locales, ni les associations n’ont été impliquées dans l’élaboration de cette stratégie, alors qu’il est affirmé que « les acteurs associatifs sont un partenaire indispensable dans la conduite de ces mesures ». Le bilan de l’efficacité et de la pertinence de ces mesures, parfois très controversées, devra être évalué. D’ici avril prochain, les services de la Commission rédigeront un rapport avec les gouvernements. Que cette stratégie accorde la plus grande priorité à la scolarisation des enfants ne peut que nous satisfaire, après les difficiles batailles que nous menons avec le Collectif pour le Droit à l’Éducation des Enfants roms et devant le constat des difficultés de la scolarisation des « enfants du voyage ». Comment sera organisée la concertation avec les élus locaux et les associations de Gens du voyage et de solidarité avec les Roms pour cette stratégie globale ? Il est annoncé qu’ils seront les principaux acteurs des politiques pilotées par l’État, éventuellement avec l’aide des fonds européens. Dans le cadre fixé par l’UE, il faut savoir que les services de la Commission expriment la ferme volonté de ne financer que des dispositifs cohérents et solidement évalués. Rendez-vous en avril prochain, quand les services de la Commission rédigeront un rapport après un travail de dialogue avec les gouvernements. Martine Platel. Voir le document-projet sur le site de Romeurope http://www.romeurope.org/ 19 ROMS Depuis presque un an, quarante familles roms (114 personnes dont 43 enfants) avaient trouvé refuge dans cette ancienne cartonnerie de la rue des Pyrénées (Paris 20e). Des enfants étaient scolarisés. Pour une fois, ce squat était pourvu d’eau et d’électricité. Mais le feu a tout détruit de ce refuge le lundi 24 octobre 2011. Un mort a été retrouvé dans les décombres au lendemain de l’incendie. On ne connaît pas les raisons de ce sinistre, mais nous espérons, cette fois, que l’enquête de la Police judiciaire pourra trouver l’origine de ce départ de feu. Que les causes factuelles soient criminelles ou accidentelles, la vraie raison de ce drame c’est l’extrême précarité dans laquelle le gouvernement actuel maintient ces populations. On leur refuse un lieu de vie décent, on les chasse de terrain en terrain, on les empêche de trouver un emploi et on multiplie les obstacles à leur insertion dans la société française. Le Président de la République et son ministre de l’Intérieur ont fait de ces populations européennes - qui fuient la misère et les persécutions dont ils sont victimes dans leurs pays - les boucs émissaires d’une politique sociale désastreuse. Cela suffit ! - les mesures transitoires limitant l’accès au travail des citoyens européens roumains et bulgares doivent être levées ; - les familles roms doivent avoir accès à des logements décents au même titre que tous les autres mal logés; - des mesures d’accompagnement social doivent être prises pour prolonger les efforts des Roms et de leurs associations de soutien qui s’appuient sur la solidarité pour accueillir ces familles démunies. Le MRAP demande la convocation d’urgence d’une table ronde au niveau de l’Ile-de-France avec tous les partenaires (préfets, élus locaux, associations, intéressés). Deux ans après ses recommandations visant à améliorer les fichiers de police, la mission d’information menée par Delphine Batho (PS) et Jean-Alain Bénisti (UMP) rend un nouveau rapport. L’ensemble constitue une mine d’informations
- réformes législatives en cours,
détails sur chacun des fichiers recensés. Les fichiers de police recensent une partie de plus en plus importante de la population. Ils suscitent de nombreuses interrogations tant sur leur efficacité que sur le droit « informatique et libertés ». (AFP) C’est le sens de ce texte remis le 21 décembre 2011. Ces députés sont devenus spécialistes des fichiers de police depuis leur premier rapport sur le sujet publié en 2009. Ils constatent des progrès très limités et regrettent que l’immense majorité de leurs 61 recommandations n’ait pas été suivie d’effet. Presque la moitié des fichiers de police existants n’ont aucune base légale. Un phénomène qui tient au mode d’apparition de ces bases de données : d’abord elles sont créées, puis le ministère se préoccupe de leur fournir un cadre réglementaire, explique le rapport. Il est précisé toutefois que 86% de ces fichiers doivent faire, dans un avenir proche, l’objet d’un texte réglementaire et d’une déclaration à la CNIL… Lisez l’intégralité du rapport parlementaire http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i4113.asp Les deux rapporteurs ne se sont pas véritablement accordés au sujet de l’existence de fichiers ethniques. Étant donné les procédures judiciaires en cours, ils ont interrogé les services de police et de gendarmerie concernés. Ils constatent que des pratiques d’échanges d’informations pourraient constituer un tel fichier, ils en tirent des conclusions divergentes. La rapporteure estime que ces fichiers existent réellement, alors que le rapporteur est satisfait par les explications obtenues. Les conclusions de la CNIL (Commission Nationale Informatique et Liberté), saisie d’une plainte émanant de plusieurs associations (dont le MRAP), ont indiqué « qu’aucun fichier pérenne et structuré relatif aux Gens du voyage et aux Roms n’a été trouvé ». Cependant, la CNIL a relevé de nombreuses irrégularités au cours de ses contrôles : - Tout d’abord, l’existence d’un fichier, non appréhendé comme tel par les services de gendarmerie, constitué par des messages envoyés par les brigades territoriales au STRJD (Service Technique de Recherches Judiciaires et de Documentation). Ces messages, qui indiquent l’identité, la commune de rattachement, le lieu de contrôle, les dates de séjour et l’immatriculation des véhicules de personnes itinérantes, contiennent ponctuellement les mentions « MENS », « gitan », « roms » ou « tzigane ». Pour la CNIL, « la centralisation de données doit s’analyser comme un seul et même traitement ayant pour finalité le recueil de renseignements susceptibles de fonder un travail de rapprochement criminel sur les “ gens du voyage ” ». - en outre, un fichier d’analyse criminelle non déclaré à la CNIL, ANACRIM, (logiciel et fichier de police judiciaire), est utilisé, dans le cadre d’enquêtes précises, par les forces de gendarmerie de l’OCLDI (Office Central de Lutte contre la Délinquance Itinérante ) et du STRJD. C’est un outil de travail à vocation temporaire. Le caractère temporaire du fichier utilisé ne saurait faire obstacle à ce qu’il soit considéré comme un traitement de données à caractère personnel par la CNIL. - enfin, les personnels de l’OCLDI et du STRJD utilisent le fichier de suivi des titres de circulation délivrés aux personnes Sans Domicile ni Résidence Fixe (SDRF), alors même que ce fichier est strictement administratif et ne peut en aucun cas être utilisé à des fins judiciaires. Au total, sur les 31 recommandations formulées par les rapporteurs en 2009, 8 ont fait l’objet d’une mise en oeuvre complète, 9 d’une application partielle et 14 ont été laissées de côté. (Voir la synthèse du suivi des recommandations dans le rapport). Voir l’article de Dépêches tsiganes qui donne un récit détaillé de l’enquête des députés: http://www.depechestsiganes.fr/?p=2118 PARIS : INCENDIE MORTEL DANS LE 20ème ASSEZ DE MESURES DISCRIMINATOIRES À L’ENCONTRE DES ROMS ! FICHIERS DE POLICE : RAPPORT DE LA MISSION PARLEMENTAIRE 2011 FICHIERS ETHNIQUES, DES DOUTES SUBSISTENT. Echos comités locaux Vaucluse TÉMOIGNAGES DES MAUVAIS TRAITEMENTS INFLIGÉS AUX ROMS SUR AVIGNON 20 ÉCHOS DES COMITÉS LOCAUX Motivations Dans le cadre de son action au sein de l’OVPIV (Observatoire des violences policières illégitimes de Vaucluse), le MRAP a été saisi par des cheminots de la gare d’Avignon, témoins de maltraitances à l’égard de Roms qui y arrivent régulièrement en train. Nous avons recueilli leurs témoignages mettant en cause des agents de sécurité de la SNCF (SUGE), des policiers nationaux et municipaux ; nous avons rencontré le DDSP (Directeur Ddépartemental de la sécurité publique) pour qu’il nous précise les rôles de chaque police. En plus de la stigmatisation dont ils sont publiquement victimes de la part de l’État, notamment par la multiplication des OQTF (obligation de quitter le territoire français) et des raccompagnements via les CRA (centre de rétention administrative), les témoins nous rapportent des comportements discriminatoires de la part de la police. Nous avons donc décidé de les rencontrer. Modalités Nous nous sommes rendus là où ils vivent avec un cheminot, deux interprètes roumaines et notre salariée. Nous avons recueilli les témoignages collectivement, car il était impossible de s’isoler vu leurs conditions de vie; certains ont été présents durant l’heure et demie, d’autres entraient et sortaient pour laisser la place à d’autres récits. Nous avons repris leurs dires quelques jours plus tard en présence d’un membre de la LDH, qui les avait rencontrés quinze jours plus tôt et a pu confirmer plusieurs propros. Dans la gare depuis cet été Le 28 juillet, vers 16 h, un vigile appelle les cheminots pour l’aider à « nettoyer la rame de la présence des Roumains » ; certains acceptent, d’autres refusent. Certains Roms descendus de force montrent leurs billets, ce qui n’empêche pas la mise en place d’un filtrage par la SUGE au départ des trains suivants. Le 11 août à 9 heures, des Roms descendent du train, des policiers municipaux (PM) confisquent leurs papiers, les obligent à reprendre le train sans titre de trasport, en les injuriant, en bousculant une femme âgée et ne leur rendent leurs papiers qu’une fois remis dans le train. Les agents de la SUGE sont intervenus pour calmer les PM : parfois ils réussissent à les convaincre de les laisser tranquilles. Le 1er septembre, à 7h55, la directrice d’escale (DUOEscale) va chercher des agents pour verbaliser des Roms qu’elle a forcés à entrer dans une salle d’attente après avoir confisqué leurs papiers ; parmi eux, il y avait des femmes et des enfants, assez apeurés... Les agents refusent de verbaliser car ils n’ont pas été témoins des faits. Plusieurs témoignages concordent sur les « opérations de bouclage » organisées depuis septembre, effectuées par la PM alors que seule la Police Nationale (OPJ) a qualité pour les effectuer. Les PM tentent de remettre les Roumains dans des trains, sans ticket, et se retrouvent face aux agents SNCF qui s’y opposent en faisant appel à leur hiérarchie. Plus récemment, plusieurs témoignages relatent que les PM les empêchent de rentrer dans la gare, ils saisiraient leurs billets de train et les jetteraient dans les égoûts. Dans la rue à Avignon Les municipaux prendraient leurs papiers, passeports et CNI, les jetteraient par terre pour rouler dessus avec leurs voitures ou leurs scooters, parfois les mettraient dans des poubelles ou des bouches d’égoût. Sept cartes nationales d’identité leur auraient été confisquées par des PM qui leur auraient dit les avoir renvoyées au consulat de Roumanie à Paris (!). Certains passeports seraient retenus depuis 8 mois. Quand ils sont assis par terre dans la rue, ils rouleraient sur leurs pieds avec les vélos et scooters, et parfois pousseraient leur roue avant entre les jambes des femmes. Ils frapperaient aussi leurs têtes avec les clefs des scooters. Ils auraient aussi l’habitude de prendre le gobelet qui recueille les pièces de monnaie et d’en jeter le contenu, soit dans la rue, soit dans les égoûts. Globalement les témoignages rapportent des comportements discriminatoires, violents et humiliants de la part des policiers municipaux, dont voici des exemples s’appuyant sur des témoignages documentés : - le 15 novembre, une femme est fouillée dans la rue, déshabillée par une femme policière, grande, mince et blonde. - mi-novembre, une femme a été frappée par un policier, chauve, 1m70, environ 35 ans, dans la rue, la tête contre un mur, jusqu’à ce qu’elle saigne. Ce policier est aussi coutumier de frapper femmes et enfants sur le crâne avec ses clefs. - à la même période, au commissariat St Roch, un jeune homme, illettré, s’est vu refuser un interprète et a été obligé, après 2 heures de rétention, de signer un document qu’il ne savait évidemment pas lire. - début décembre, vers 10h30, un mineur de 15 ans s’est mis à courir à la vue de la police, il a été immobilisé par un coup de taser dans les jambes, embarqué dans une voiture et battu entre les sièges, puis menotté et à nouveau battu dans les locaux de la PM, sur tout le corps, sauf le visage. Les policiers ont dit vouloir lui faire avouer un vol de carte bancaire datant de janvier (il n’était pas en France). Sa soeur a pu le récupérer à 16 heures. La durée de cette rétention, sans prononcer de garde à vue, dépasse la durée légale, d’ailleurs la PM n’est pas habilitée pour les GAV (garde à vue). - entre le 1er et le 8 décembre, devant la gare, un enfant de 7 ans a été secoué, soulevé puis jeté à terre, sa mère s’est fait giffler, car elle manifestait sa peur. Un homme de 55 ans s’est fait tabasser dans une rue à l’écart, derrière la porte St Roch par un policier en civil. - le 6 décembre, une femme, qui mendie avec son enfant de 18 mois dans les bras, est menacée de se faire enlever l’enfant jusqu’à ses 18 ans. - le 8 décembre, une jeune femme est battue dans le commissariat des halles, en présence de sa mère, par une policère blonde. - le 22 décembre au matin, des policières municipales ont obligé 3 femmes à enlever leurs chaussures et les ont saisies, les obligeant à finir la journée pieds nus. Le même jour, un homme a été arrêté et transféré au commissariat St Roch par la PM. Le délit de «fausse-pétition» Lors de notre entretien, le DDSP nous avait expliqué que c’était le principal délit dont ils étaient coupables. Nous leur avons demandé s’ils faisaient signer des fausses pétitions, puis abusaient de la générosité des signataires
- selon eux, c’est impossible, ils sont
majoritairement illettrés et ne parlent pas français ; d’ailleurs, ils disent connaître ceux qui pratiquent cette technique. Les OQTF Nous n’avons pas eu de témoignages d’OQTF remises en dehors du commissariat St Roch. Pratiquement tous en ont reçu une, le reccord étant de 4 dans l’année, ce qui signifie 3 franchissements de frontière (Espagne, ...). Ce document est une transcription de témoignages, nous ne le commenterons pas. Bernard Senet & Célia Turel 2 Janvier 2012 Nous avons caché volontairement toute identité pour ne pas les exposer encore plus à la police (1)Voir le document-projet sur le site de Romeurope http://www.romeurope.org/ 21 ÉCHOS DES COMITÉS LOCAUX Nous avions pris rendez-vous suite à des témoignages de cheminots concernant certains actes dont sont victimes des Roms d’origine roumaine qui font des allers-retours réguliers entre Arles où ils logent et Avignon. Les témoins rapportent qu’ils sont maltraités en gare d’Avignon par la police ferroviaire (la SUGE), qui les aurait intimidés, bousculés, retenus en salle d’attente, et même remis dans le train. La CGT a rédigé un long tract explicatif à destination du personnel. Avec l’aide de Chantal Mainguy, de la LDH d’Arles, le MRAP a récupéré des témoignages de cheminots et de Roms confirmant les interventions conjointes de la police municipale et de la SUGE. Notre RV avait pour but de faire bien préciser les attributions de chaque police, de questionner sur des pratiques nous semblant discriminatoires et de comprendre le fonctionnement des OQTF (obligation de quitter le terrritoire français), parfois remises dans de curieuses conditions. La rencontre a duré une heure, Mr Sola était seul, relativement accueillant. Il a écouté nos demandes et lu le tract de la CGT qu’il ne connaissait pas. Il a confirmé les fonctions des polices : 1) La SUGE contrôle les titres de transport, relève l’identité en cas de défaut et appelle la police nationale en renfort si : - la personne en est à son douzième voyage sans titre, car c’est alors un délit - il y a refus de présenter une pièce l’identité, ce qui n’a rien à voir avec un titre de séjour. 2) La police municipale n’a pas lieu d’intervenir, notamment dans la gare, sauf en soutien de la nationale et surtout pas d’obliger les gens à reprendre un train. 3) Il a confirmé que des opérations de « bouclage » de la police nationale avaient régulièrement lieu, environ tous les quinze jours, sur réquisition du procureur, là où circulent les délinquants, donc dans les gares ferroviaires, routières et ailleurs. Par délinquants, il entend les trafiquants de stup’, mais aussi les escrocs, notamment les responsables d’escroquerie «à la fausse pétition» (aborder un passant avec une pétition, lui faire signer et récupérer des sous). Il n’a pas partagé notre avis sur le peu de gravité de ce délit qui porte sur de petites sommes (50 affaires cet été). Cela touche surtout les touristes, également victimes de vols à la tire, les touristes asiatiques seraient particulièrement vulnérables. Il a reconnu que les contrôles se faisaient, non pas au faciès, mais spécifiquement en fonction de la délinquance recherchée (!). 4) Concernant les OQTF, il a assuré que les contrôles ne se faisaient pas systématiquement quelques jours après leur délai d’exécution, mais que la fréquence des bouclages expliquait que les Roms soient adressés au CRA (centre de rétention) à intervalles courts; il n’a pas voulu commenter un document dans lequel la préfecture du Loir-et-Cher rend prioritaires les reconduites d’étrangers sans titre de séjour pour la deuxème moitié de l’année 2011, mais il a semblé gêné. Il nous a rappelé que le défaut de titre de séjour autorise la retenue de l’étranger au maximum 4 heures au commissariat; ce qui explique leur « diligence » pour obtenir du service préfectoral dit « de l’éloignement » un fax avec l’OQTF qu’ils remettent à la personne avant de la libérer. Elle a alors un mois pour quitter le territoire par ses propres moyens sinon elle risque d’être placée en rétention lors d’un contrôle ultérieur. Bernard Senet (MRAP) Serge et Annie Charton Tél / Fax : 04 90 86 80 31 - mrapvaucluse@orange.fr Echos comités locaux Vaucluse COMPTE-RENDU DE LA RENCONTRE AVEC LE DDSP (DIRECTEUR DÉPARTEMENTAL DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE) LE JEUDI 8 DÉCEMBRE 2011 22 ÉCHOS DES COMITÉS LOCAUX Une centaine de personnes, dont M. le Consul d’Algérie, l’historien Gilles Manceron, de la Ligue des Droits de l’Homme, Jacqueline Fraysse, députée, ont participé vendredi 20 janvier 2012 à la soirée Maurice AUDIN à l’Agora de Nanterre. La qualité du film de François Demerliac, Maurice Audin, la disparition(1), les témoignages et les analyses des intervenants ont permis de montrer l’actualité de l’action de l’Association Maurice Audin, qui continue d’agir pour que la vérité soit enfin reconnue officiellement par les autorités de l’État. Maurice Audin, jeune professeur de mathématiques à l’Université d’Alger, membre du Parti Communiste Algérien, a été torturé, puis déclaré, contre toute vraisemblance, « évadé » par l’armée française, en 1957. Une des nombreuses « disparitions », qui constituent la pire cruauté que l’on puisse faire aux proches des suppliciés, privés d’une sépulture permettant de faire leur deuil. Le film démonte les mensonges d’État, donne la parole à des combattants de la guerre d’indépendance, à Josette Audin, épouse du « disparu » qui, depuis plus de cinquante ans, n’a jamais cessé de saisir la justice et les gouvernements, à Henri Alleg, auteur de La Question(2), soumis lui aussi à la torture, a sans doute été un des derniers à voir Maurice Audin encore vivant… Ces deux témoins, ainsi que Sylvie Thénault, historienne, chargée de recherche au CNRS(3), Gérard Tronel, de l’Association Maurice Audin, François Demerliac et Jean-Pierre Raoult, organisateur et animateur de la rencontre, Geneviève Pastor, présidente du comité local du MRAP, ont débattu avec une salle émue et passionnée. Ils ont apporté de précieux éclairages sur la guerre coloniale, sur le rôle de l’armée qui encore aujourd’hui s’oppose à ce que la vérité soit reconnue, sur la responsabilité des politiques au moment où les pleins pouvoirs ont été votés à Guy Mollet, sur les rapports difficiles entre les communistes algériens et le FLN(4), sur la suite des carrières d’officiers tortionnaires, qui, pour certains, ont continué leurs crimes en Afrique ou ailleurs ; quelques-uns ont publié des livres dans lesquels on trouve plus souvent de l’autojustification, voire de l’amertume de ne pas avoir pu gagner la « sale guerre », que de la repentance. André LANDRAIN MRAP - Nanterre Un enregistrement du débat, sera prochainement disponible. En attendant, 8 courtes vidéos témoignent de sa richesse : http://vimeo.com/album/1811777. 1 - www.virtuel-production.com/Audin/index.htm 2 - www.leseditionsdeminuit.fr 3 - Sylvie Thénault vient de publier Violence ordinaire dans l’Algérie coloniale, éditions Odile Jacob, janvier 2012. 4 - La BDIC (Bibliothèque de Documentation Internationale Contemporaine), située sur le campus de l’université de Nanterre, organise prochainement un colloque sur l’histoire des communistes algériens, avant et après l’Indépendance. A partir du 24 janvier, la BDIC est à l’initiative de « La guerre d’Algérie, images et représentations » : conférences, films, photographies… au Forum des Images (Paris, Les Halles) - www.bdic.fr Le jeudi 2 février au CCO à Villeurbanne le MRAP Rhône avec la Compagnie du Pied Levé (compagnie de théâtre forum) a proposé une soirée de théâtre forum sur le thème du racisme. Le théâtre forum est une forme de théâtre participatif, pour sensibiliser un public à un problème de société, tel que le racisme ou la discrimination. Après une courte saynète mettant en évidence une situation de racisme, un débat fut lancé dans la salle : comment lutter pour que cela change ? Dans un deuxième temps, le spectateur est devenu alors «spect’ acteur». Il est monté sur scène pour essayer sa proposition. L’objectif : chercher ensemble des solutions pour faire évoluer nos mentalités. Le but est de créer un outil pédagogique participatif de lutte contre toute forme de racisme et de discrimination. A terme, le MRAP Rhône souhaite proposer aux écoles et centres sociaux cette forme ludique de théâtre, pour que chacun puisse prendre conscience au plus tôt dans la vie du fait d’être discriminé et/ou discriminant... Echos comités locaux Nanterre SOIRÉE MAURICE AUDIN À NANTERRE Echos comités locaux Rhône LE MRAP ET LA COMPAGNIE DU « PIED LEVÉ » © Maurice Audin par Ernest Pignon ÉCHOS DES COMITÉS LOCAUX 23 29 novembre 2011, Saint-Denis-Bobigny Le 31 août 2011, à 6h45 du matin, la police expulsait brutalement une centaine de personnes qui vivaient sur un terrain à Saint-Denis (93) et les emmenait, par une rame du tramway spécialement affrétée, de Saint-Denis à Noisy-le-Sec où elle ne les abandonna qu’après s’être assurée que tous avaient pris le RER pour aller plus loin. Réquisition, arrangement local ? Les déclarations divergent sur la manière dont se sont passées les choses. Quoiqu’il en soit, la mise à disposition d’une rame par la RATP pour l’exécution des basses oeuvres de la police, comme aux temps de l’occupation allemande ou de la guerre d’Algérie, provoqua de nombreuses réactions, notamment de la part de syndicats de travailleurs de la RATP. A l’initiative de la Plateforme 93 de soutien aux Roms occupant des terrains, dont le MRAP 93 est membre, des organisations écrivirent au PDG de la RATP, lui demandant de se démarquer clairement de cette action policière et lui proposant d’organiser ensemble une opération médiatique sur le thème : «Un tramway pour les Droits de l’Homme, contre les discriminations et le racisme». Il lui était demandé de mettre à la disposition des associations une rame de tramway pour promouvoir les Droits de l’Homme et l’égalité de traitement, pour l’accès de tous aux droits fondamentaux. En l’absence de réponse, les signataires de la lettre, rejoints par d’autres associations, collectifs, partis politiques... (1), ont organisé eux-mêmes cette opération. Le 29 novembre, dès 9h du matin, avec des Roms de Saint-Denis, équipés de pancartes, nous avons distribué, dans le tramway et à différents arrêts un tract expliquant la situation des Roms de Roumanie et de Bulgarie en France, et rappelant les exigences de la Plateforme 93 envers l’État (en résumé : arrêt des destructions des terrains et du harcèlement policier, fin des expulsions du territoire français, du régime transitoire qui empêche les ressortissants de Roumanie et de Bulgarie d’accéder à l’emploi, arrêt des discriminations et accès aux droits fondamentaux, utilisation de tous les fonds disponibles au niveau européen) et les collectivités locales (engagement aux côtés des Roms menacés d’expulsion, concertation au niveau régional et recherche d’engagements et financements de l’État et de l’UE, services minimums assurés aux familles, scolarisation des enfants, accès aux soins dans des structures de droit commun, domiciliation, recherche de solutions locales en collaboration avec les familles concernées, participation des Roms à tous les aspects de la vie des communes, afin de favoriser leur expression culturelle et de faire reculer les préjugés racistes). Nous avons aussi entamé avec les passagers de nombreuses conversations, dont certaines ont peut-être ébranlé des forteresses de préjugés. La plupart des personnes rencontrées étaient dans une totale ignorance des mesures interdisant aux Roumains et aux Bulgares de travailler. Comme le problème fondamental est bien celui des expulsions, avec ou sans tramway, c’est devant la Préfecture de Seine-Saint-Denis que la matinée s’est achevée par un rassemblement, où étaient présentes des familles Rroms de Bobigny qui font l’objet d’un harcèlement policier quasi quotidien et où des élus (Aline Archimbaud, sénatrice EELV et Gille Garnier, conseiller général PCF) ont exprimé leur refus de la politique du gouvernement actuel à l’égard des Roms. (1) Les Alternatifs 93, ATMF, CCFD Terre solidaire - Equipe de St Denis, Centre International des Citoyens du Monde, CGT Educ’action 93, Collectif Romeurope Ile de France, Collectif Roms et Bulgares de Bobigny, Comité de soutien aux Roms de Noisy-le-Sec, Ecodrom 93, EELV 93, FASE 93, Gauche unitaire 93, LDH 93, MRAP 93, «Réseau 1427» Saint-Denis, NPA 93, Parti de Gauche 93, PCF 93, RESF 93, SNUASFP-FSU93, Terre des Hommes – France, Union syndicale Solidaires 93, La Voix des Rroms. Le 22 février 2012 au Bartas, la sortie du livret « Paroles d’enfants » fut fêtée. Ce recueil de photos et de textes témoigne des ateliers d’octobre 2011, conduits par le MRAP-Vitrolles et Raphaël Bianchi, photographe militant, en centre de loisirs (Pétunia et Bartas), sur l’article 31 de la Convention internationale des droits de l’Enfant. Evelyne Verlaque, présidente MRAP-Vitrolles Echos comités locaux Fédération de Seine-Saint-Denis (93) UN TRAMWAY POUR LES DROITS DE L’HOMME, CONTRE LES DISCRIMINATIONS ET LE RACISME Echos comités locaux Vitrolles « PAROLES D’ENFANTS » Disribution à La Courneuve, Photographie Jean-Claude Saget Les familles roms de Bobigny sont présentes devant la Préfecture Photographie Jean-Claude Saget 24 IMMIGRATION Bulletin de la Fédération CGT de l’Éducation, de la Recherche et de la Culture Tout occupé à reconquérir l’électorat lepéniste qui avait fait le succès de l’élection présidentielle de Sarkozy en 2007, le ministre de l’Intérieur développe un discours xénophobe et stigmatisant. Récemment, il ciblait les étrangers comme fraudeurs aux prestations sociales. En mai dernier, il imputait l’échec scolaire aux enfants d’immigrés, en contradiction totale avec les analyses publiées par le ministère de l’Éducation nationale. Nous avons interrogé Annick KIEFFER, sociologue, ingénieure au CNRS, qui a particulièrement étudié, avec Yaël BIRNBAUM, maître de conférences à l’université de Bourgogne, la question des performances scolaires des enfants d’immigrés. Elles ont publié le fruit de leurs recherches à ce sujet dans Éducation et Formation (n°72, septembre 2005) et dans Population 2009, la revue de l’INED n°3. Le Lien : Que vous inspirent les déclarations de Guéant, ministre de l’Intérieur, imputant l’échec scolaire aux enfants d’immigrés, au printemps dernier ? « Contrairement à ce qu’on dit, l’intégration ne va pas si bien que ça : le quart des étrangers qui ne sont pas d’origine européenne sont au chômage, les deux tiers des échecs scolaires, c’est l’échec d’enfants d’immigrés », affirme Claude Guéant, ministre de l’Intérieur, le 22 mai 2011. « Ces chiffres sont tout simplement ceux que donnent tant l’INSEE que l’OCDE » déclare-t-il pour se justifier. Enfin, à l’Assemblée nationale il modifie son attaque : « C’est vrai qu’il y a deux tiers des enfants d’immigrés qui se trouvent sortir du système scolaire sans diplôme ». Il glisse ainsi de l’imputation de l’échec scolaire en France aux enfants d’immigrés, avant tout à ceux qui ne sont pas d’origine européenne, à la dénonciation de l’ampleur de l’échec scolaire parmi les immigrés. Les propos de M. Guéant sont d’autant plus graves que le ministre occupe une position d’autorité. Ils révèlent, outre le glissement de son argument au fil des réactions, son inculture statistique et plus généralement, les dangers des comparaisons chiffrées entre populations, fondées uniquement sur une caractéristique (sexe, âge, origine migratoire) oubliant que ces populations diffèrent par leurs structures sociodémographiques. Le Lien : Quelles conclusions avez-vous tirées dans vos travaux sur les performances des enfants d’immigrés ? Il faut d’abord définir la population concernée. Est considérée comme immigrée toute personne née étrangère à l’étranger qui réside habituellement en France. L’étude menée avec Yaël Brinbaum concerne la seconde génération, soit la population des élèves nés en France dont les deux parents sont nés étrangers à l’étranger et qui ont effectué toute leur scolarité en France, ce qui permet de comparer les scolarités et les performances selon l’origine des élèves. Nous avons utilisé le panel des élèves entrés en 6ème en 1995, produit par le ministère de l’éducation. Lorsque l’on s’en tient uniquement au critère d’origine migratoire, les enfants d’immigrés réussissent moins bien leur scolarité que les élèves français d’origine. Au total, 9% des élèves entrés en 6ème en 1995 sont sortis du système éducatif sans diplôme. Ce taux, plus faible pour les Français d’origine (7%) s’élève à 18% chez les élèves d’origine immigrée, 15,5% parmi L’ÉCHEC SCOLAIRE CHEZ LES ENFANTS D’IMMIGRÉS 25 IMMIGRATION les élèves d’origine portugaise et 18,5% parmi les élèves d’origine maghrébine. Surtout, l’écart entre les garçons et les filles est très élevé : les garçons sortent presque deux fois plus souvent que les filles, quelle que soit l’origine, mais l’écart est le plus grand parmi les élèves d’origine maghrébine : 28% des garçons d’origine maghrébine sortent sans diplôme contre 9% seulement des filles de même origine. 17% des enfants d’origine immigrée obtiennent un diplôme professionnel (soit deux points de moins que les élèves français d’origine) et 58% un baccalauréat, soit 10 points de moins que les Français d’origine. Cette proportion de bacheliers est la plus faible chez les élèves d’origine portugaise qui privilégient la filière de l’apprentissage
- ils sont d’ailleurs les plus nombreux
à obtenir un baccalauréat professionnel (14%), les élèves d’origine maghrébine obtenant surtout un baccalauréat technologique (27%). Pour conclure, si l’on considère la contribution des élèves d’origine immigrée aux sorties sans diplôme, elle est élevée, un peu plus de 30%, mais loin d’atteindre les proportions avancées par M. Guéant (2/3). Pour comprendre ces écarts, il faut prendre en compte la structure socioprofessionnelle des deux populations d’élèves. Or, 74% des élèves d’origine immigrée ont deux parents ouvriers, employés ou inactifs et seulement 8% au moins un des deux parents cadre supérieur. Ces taux sont respectivement de 89% et 1% chez les élèves d’origine maghrébine, 77% et 1% chez les élèves d’origine portugaise, mais de 43% et 22% chez les élèves français d’origine. De plus, les niveaux d’éducation des parents diffèrent fortement : 70% des mères étrangères et 64% des pères étrangers ont au plus un brevet, contre 38% des mères françaises et 32% des pères français. A cela, il faut ajouter les effets négatifs de la ségrégation résidentielle. Ainsi 7% des élèves français d’origine sont scolarisés en ZEP contre 30% des élèves d’origine immigrée (12% des élèves d’origine portugaise, mais 37% des élèves d’origine maghrébine). Lorsque l’on compare maintenant les scolarités en tenant compte des facteurs sociaux et du contexte résidentiel, les différences s’estompent (qu’il s’agisse des notes aux évaluations en 6ème ou au brevet) et l’on constate même de meilleurs parcours scolaires des jeunes d’origine maghrébine (orientation vers une filière générale ou technologique et obtention d’un baccalauréat). Les différences sont donc avant tout sociales. Le Lien : Comment peut-on expliquer cette meilleure réussite des enfants d’immigrés à catégorie socioprofessionnelle égale ? Les résultats sont meilleurs alors que les parents sont dépourvus des ressources permettant d’aider leurs enfants : faible connaissance, voire ignorance du système éducatif par exemple. Nous expliquons ce résultat par les aspirations fortes des parents, au principe même de la migration. En effet, l’espoir d’une réussite économique et sociale est à l’origine de la décision de quitter son pays pour s’installer dans un autre. Ceci explique les ambitions scolaires élevées pour leurs enfants. Ainsi, parmi les ouvriers ou employés, les Maghrébins expriment des aspirations scolaires plus ambitieuses pour leurs enfants que les Français ou Portugais d’origine. Ouvriers non qualifiés dans leur majorité, ils connaissent la dureté des conditions de travail des ouvriers, les dégâts du chômage et les ravages de la discrimination qu’ils subissent sur le marché du travail ; l’investissement scolaire est sans doute pour eux la seule alternative pour que leurs enfants échappent à ces perspectives. Les mères se sentent dépassées pour aider les enfants, surtout à partir du collège. Elles surveillent les devoirs, mais peuvent difficilement aider. Elles mobilisent alors toutes les ressources dont elles disposent : les aînés, les voisins, la famille, le soutien scolaire notamment. Portés par les aspirations parentales à une scolarité générale longue, les enfants d’origine maghrébine se distinguent par leur volonté d’échapper à une orientation vers le professionnel. Or, ils obtiennent rarement l’orientation de leur choix, notamment à l’issue de la seconde indifférenciée où ils sont plutôt orientés vers les filières technologiques. Ils vivent très mal cette orientation imposée et éprouvent alors un fort sentiment d’injustice. Le Lien : Comment se traduit cette situation dans la poursuite d’études, notamment dans l’enseignement supérieur ? Globalement le taux de bacheliers des jeunes d’origine immigrée est de 10 points de pourcentage inférieur à celui des Français d’origine (respectivement 68% et 58%). De ce fait ils accèdent moins à l’enseignement supérieur : 46% des jeunes d’origine maghrébine et 39% des jeunes originaires d’Europe du Sud contre 56 % des jeunes français d’origine. Cependant, toujours à origine sociale comparable, leur chance d’obtenir un baccalauréat et d’accéder à l’enseignement supérieur est plus élevée. Ces deux mesures de leurs performances prises ensemble témoignent de leurs parcours scolaires difficiles et de leur persévérance. Ainsi, titulaires surtout d’un baccalauréat technologique, les étudiants d’origine maghrébine se détournent des filières technologiques au profit des universités
- 22% préparent un BTS ou un DUT
contre 27% des jeunes français d’origine (1). Les grandes écoles leur sont fermées en raison de leurs résultats modestes en moyenne dans le secondaire. La concurrence est alors rude car ils sont confrontés dans les universités à des étudiants de milieux sociaux bien supérieurs à eux. Nous ne connaissons pas encore les diplômes qu’ils y obtiennent, tous n’ayant pas encore terminé leur scolarité. (1) Ces taux sont calculés sur l’ensemble des jeunes qui étaient entrés en 6ème en 1995. 26 MÉMOIRE Je vous remercie d’être comme chaque année fidèles à ce rendez-vous pour la vérité, la justice et la mémoire. Je remercie toutes les associations, tous les partis politiques, toutes les personnalités et vous tous militants et simples citoyens qui êtes, année après année, partie prenante de cette manifestation. Au-delà du nécessaire hommage à la mémoire de Mehdi Ben Barka, ce rassemblement nous réunit pour marquer notre volonté commune : - à poursuivre le combat pour la vérité et la justice ; - pour exiger avec force que toute la lumière soit faite sur l’enlèvement et l’assassinat de Mehdi Ben Barka, ses assassins identifiés, sa sépulture localisée et toutes les responsabilités, qu’elles soient étatiques ou individuelles, établies
- pour dénoncer la complicité des deux États, marocain et français, à continuer à protéger les auteurs et les complices de ce crime odieux, à empêcher des témoins clés de s’exprimer devant la justice, usant et abusant de la raison d’États pour faire obstacle à l’action de la justice et pour bafouer le droit de ma famille à toute la vérité. Ce combat pour la vérité fait partie de celui des familles de victimes de la disparition forcée au Maroc dont le sort est aujourd’hui encore inconnu. Depuis des décennies, ce combat s’est toujours inscrit dans le combat plus large de nos sociétés pour la démocratie, la dignité et la justice. Cette année, notre rassemblement prend donc une signification particulière à la suite de ce qui a été appelé le printemps arabe, qui est en fait la révolte des peuples arabes face au despotisme de leurs dirigeants, face à l’injustice et au mépris dont ils sont victimes. Ces soulèvements ont été marqués, sont encore marqués par le dépassement de la peur et la conviction profonde qu’une mobilisation populaire résolue peut venir à bout des régimes les plus répressifs. Le bilan humain est très lourd, preuve supplémentaire de l’étendue du cynisme et du mépris de ces dirigeants, n’hésitant pas à massacrer leur propre population et à réprimer avec violence les manifestations pacifiques. Je voudrais saluer ici la mémoire de tous ceux qui ont montré par leur sacrifice que le changement était possible, tous ceux qui n’ont pas hésité à s’immoler, poussés au désespoir, tous ceux qui ont succombé au matraquage policier. Aujourd’hui, au Maroc, le combat des familles des victimes des années de plomb pour la vérité et contre l’impunité accompagne celui des familles des victimes de la répression du système sécuritaire pour que justice soit rendue. Les soulèvements populaires dans le monde arabe ont eu des parcours différents, en fonction des spécificités de chaque pays et de son histoire. Après avoir balayé la dictature de Ben Ali, le peuple tunisien vient d’élire son Assemblée constituante. Quelle que soit l’appréciation que l’on peut porter sur les résultats de ce vote, quelles que soient les éventuelles craintes qu’il peut susciter, une chose est certaine : le peuple tunisien a pris son destin en main, et il a démontré sa capacité à surmonter toutes les difficultés pour assoir une réelle démocratie dans son pays. Au Maroc, le mouvement des jeunes du 20 février, dans sa diversité sociale, politique et culturelle a joué un rôle fédérateur dans la revendication d’une véritable démocratie et dans l’exigence de la mise en place d’un processus de souveraineté populaire à travers des institutions démocratiques s’appuyant sur une constitution qui mette fin au système absolutiste actuel, reprenant le mot d’ordre de la revendication de l’élection d’une Assemblée constituante qui date du lendemain de l’Indépendance. La réponse apportée par la dernière réforme constitutionnelle préparée en vase clos est loin de répondre aux exigences institutionnelles, politiques économiques et sociales de la situation. D’autant plus que ce qui est proposé comme une avancée démocratique s’accompagne d’une répression féroce de tous ceux qui continuent à revendiquer plus de citoyenneté, plus de justice, plus de dignité, plus de droit. Les prochaines élections législatives ne pourront en aucune façon occulter la gravité de la situation économique et sociale. Pour sa part, l’IMBB-MV poursuit sa contribution au débat démocratique pour une meilleure connaissance de notre histoire contemporaine en mettant à la disposition du public marocain les écrits politiques fondamentaux de Mehdi Ben Barka. Le dernier en date est la version en arabe de « l’option révolutionnaire au Maroc ». Chers amis, En hommage à Mehdi Ben Barka, le plus emblématique des disparus, le 29 octobre a été décrété « journée du disparu » au Maroc par le mouvement des droits humains. Des rassemblements similaires au nôtre y sont tenus aujourd’hui. D’autres manifestations sont organisées les prochains jours. Notre rassemblement permet d’exprimer notre solidarité pleine et entière avec le combat incessant du mouvement INTERVENTIONS DE LA FAMILLE DE MEHDI BEN BARKA AU RASSEMBLEMENT DU 29 OCTOBRE 2011 À PARIS 27 MÉMOIRE des droits humains, avec les victimes des années de plomb au Maroc et leurs familles, plus particulièrement avec les familles de disparus, pour connaître la vérité sur le sort de leurs proches, qu’ils soient morts ou encore vivants. Les manquements aux promesses faites par l’IER (Instance Équité et Réconciliation) ont accompagné la fin des activités du CCDH (Conseil Consultatif des Droits de l’Homme). C’est pour cela que nous espérons que les nouvelles prérogatives du CNDH (Conseil National des Droits de l’Homme) en place en mars dernier vont lui permettre de répondre enfin à l’attente des familles des victimes et de l’ensemble de la société pour clore par la vérité et la justice tous les dossiers en suspens. Chers amis, L’an dernier je vous avais fait part d’une petite lueur d’espoir de progresser dans notre combat pour la recherche de la vérité. Nous avions appris que le ministre français de la défense venait de décider de lever le secret défense sur une grande partie des documents saisis par le président de la Commission Consultative du Secret de Défense Nationale (CCSDN) au siège des services secrets français (la D.G.S.E.) après que le juge d’instruction Patrick Ramaël eut décidé d’y perquisitionner fin juillet 2010. La CCSDN avait donné un avis favorable à la levée du secret défense sur des dizaines de documents. Au moment où je vous en avais fait état il y a un an, aucun élément ne permettait de savoir si les documents dont allait disposer le juge Ramaël permettraient une avancée significative dans l’éclaircissement des circonstances de la disparition de mon père. Nous le souhaitions bien entendu. Quelques semaines plus tard, nous étions dans le bureau du juge Ramaël (Me Buttin et moi-même) pour prendre connaissance officiellement du contenu de ces documents. A notre grande indignation, nous avons appris que le Ministre de la défense, dans un grand élan de courage politique, n’avait même pas osé entériner la proposition du CCSDN, ce qui était la règle convenue dans ces affaires. Il n’avait en fait levé le secret défense que sur la partie la plus insignifiante des documents, refusant de le faire pour la plus grande part. Voilà où nous en sommes dans la République française en 2011. Excusez cette trivialité, mais il n’y a pas d’autres mots : 46 ans après les faits, l’État se couche devant la raison d’État. Les mêmes blocages au nom de la raison d’État empêchent la progression de la recherche de la vérité au Maroc et continuent de protéger ceux qui seraient impliqués dans l’enlèvement et l’assassinat de Mehdi Ben Barka. Les Commissions rogatoires internationales du juge Ramaël ne sont pas exécutées depuis 2003. Malgré toutes les réponses apportées aux demandes formulées par la justice marocaine pour retarder l’exécution des CRI, rien n’a été fait pour entendre les témoins importants, membres du système sécuritaire, ni pour faire les fouilles nécessaires au PF3 pour y trouver d’éventuelles dépouilles. Tout laisse à penser que le régime attend que la vieillesse vienne à bout de ces témoins pour faire constater son impuissance à répondre à nos légitimes interrogations. Là aussi, voilà une belle preuve de courage politique. Voilà toutes les raisons qui font que nos inquiétudes persistent quant à la réalité de la volonté politique des deux États marocain et français à aider à la manifestation de la vérité dans une affaire d’une haute signification symbolique des relations entre la France et le Maroc. Malgré tous ces obstacles, le combat pour la vérité, la justice et la mémoire continue. Nous le menons avec ma famille, notre avocat Me Maurice Buttin et avec vous, associations, syndicats, partis et aussi citoyens dont le soutien est aussi précieux pour nous qu’il est dérangeant pour ceux qui voudraient bien enterrer définitivement ce dossier. Les prochains scrutins de 2012 semblent être porteurs d’espoirs. Comme lors de précédentes échéances, nous sommes convaincus de la volonté de la gauche à s’engager à mettre fin au scandale de la raison d’État qui entrave l’action de la justice pour qu’enfin la vérité puisse éclater. Contrairement à de précédentes échéances électorales, nous espérons que la raison d’Etat ne fera pas reculer une fois de plus la vérité et la justice. Il y a quelques jours, a été commémoré le 50ème anniversaire du massacre des Algériens du 17 octobre 1961. Pendant longtemps la raison d’État a essayé, mais en vain, d’occulter la réalité des faits et de minimiser, sinon de nier les vraies responsabilités. Aussi bien pour faire avancer le nécessaire travail de mémoire que pour rende justice aux victimes, il est aujourd’hui indispensable de qualifier ces massacres de crime d’État. Il y a quelques mois, Didar Fawzy nous a quittés. Aussi bien dans le cadre des activités de l’association « Mémoire, vérité et justice sur les assassinats politiques en France » que dans la préparation du colloque « De la tricontinentale à l’altermondialisme », elle a toujours personnifié la combativité et la rigueur militantes, toujours vigilante pour aller à l’essentiel. La militante progressiste et anti-impérialiste infatigable du groupe « Solidarité » et surtout l’amie va beaucoup nous manquer. Une autre perte à déplorer fut celle de M’hammed Aouad. Proche collaborateur de Mehdi Ben Barka dans les années 50 pour la mise en place de la presse et des archives du mouvement national, il fut l’ami indéfectible de tous les instants. Avec lui, nous perdons un proche et l’histoire du mouvement national perd un peu de sa mémoire. Pour finir, comme chaque année, je vous donne rendez-vous au 29 octobre prochain pour un autre rassemblement consacré, je l’espère, uniquement à la mémoire. D’ici là, maintenons notre mobilisation toujours plus forte pour répondre à toutes les attaques portées au nom de la raison des États à la vérité, à la justice et à la mémoire. Paris, le 29 octobre 2011 De la Martinique où il est né, et où il a vu à l’oeuvre la domination coloniale, en passant par son engagement dans les Forces Françaises Libres, où il prit conscience que la défaite du nazisme ne signifiait pas la fin du racisme, jusqu’à l’Algérie où son engagement fut total comme psychiatre à l’hôpital de Blida, mais aussi comme acteur de la lutte pour l’indépendance de ce pays – il rejoignit le FLN en Tunisie en 1957 après son expulsion d’Algérie- toute la vie de Frantz Fanon s’est articulée autour de la question coloniale. Expériences précieuses pour étudier les rapports de domination et analyser le lien entre la question coloniale et celle de la violence et du racisme. Les damnés de la terre, ouvrage d’abord interdit avant d’être publié l’année de sa mort en 1961, tout comme auparavant Peau Noire, Masques Blancs (paru en 1952) témoignent d’une profondeur d’analyse qui a marqué toute une génération d’intellectuels et de militants politiques anticolonialistes, jusqu’aux Etats-Unis où nombre de militants des Black Panthers se réclamaient de sa pensée. En effet, si Fanon, qui a révolutionné les pratiques de la psychiatrie en Algérie, pense le monde comme un psychiatre, (pour lui, la colonisation, si elle détruit le colonisé, détruit, certes de façon différente, le colonisateur également) le monde est également pensé en termes marxistes : Fanon a toujours insisté sur le rapport entre colonisateur et colonisé en termes de classes. Chez lui, l’aliénation coloniale est pensée non pas comme une question culturelle mais comme un problème politique dont il ne faut pas sous-estimer la profondeur historique. Militant de la décolonisation totalement engagé dans la lutte pour l’émancipation politique, Fanon est toujours resté un esprit lucide, toujours prêt à analyser les contradictions du réel. Sans doute qu’aujourd’hui ses analyses peuvent aider à porter un regard plus pénétrant sur les soulèvements dans les pays arabes qui méritent une lecture et une profondeur dans la compréhension qui font souvent cruellement défaut. Cinquante ans après la publication des Damnés de la terre, le passé colonial se vit aujourd’hui en présent post-colonial. Alors que les événements de la guerre d’Algérie interpellent à nouveau les consciences longtemps endormies et que la commémoration du massacre du 17 octobre 1961 montre à l’évidence qu’aujourd’hui le déni de mémoire n’est plus tenable, l’oeuvre de Fanon, parce qu’elle se trouve de fait en lien direct avec les préoccupations d’aujourd’hui, retrouve toute son actualité et toute sa pertinence. N’en déplaise à certains esprits, la fin de la colonisation directe n’a pas mis un terme à la question coloniale. Aujourd’hui le refoulé colonial montre encore comment le colonialisme est une maladie dont il est difficile de sortir. Ses conséquences continuent à nourrir des a priori et des postures intellectuelles qui révèlent avant tout l’impossibilité de se dégager d’une vision de l’histoire dont le seul acteur serait le colonisateur. Le discours de Dakar de Nicolas Sarkozy le 26 juillet 2007, dans lequel il déclarait que l’homme noir n’était pas encore entré dans l’Histoire est là pour le rappeler. Les discours sur l’intégration, la loi sur le rôle positif de la colonisation, les débats sur l’identité nationale, les commentaires sur les révoltes des quartiers populaires de novembre 2005, l’instrumentalisation de la question du foulard, l’assignation à résidence ethnique sont autant d’éléments qui montrent que, bien loin d’avoir disparu, la pensée coloniale n’en finit pas de se déployer, de gangrener l’espace public et de structurer une islamophobie qui trouve dans la crise économique des facteurs supplémentaires de se développer. Aujourd’hui, et Fanon l’avait bien vu, la difficulté à s’émanciper, à être pleinement soimême, directement liée à l’oppression coloniale continue à agir de manière plus ou moins consciente ou souterraine avec pour conséquences la mal vie et l’impossibilité faite à bien des jeunes, mais aussi à leurs parents, de pleinement se réaliser dans une société qui se refuse toujours à prendre en charge la part de leur Histoire dans notre Histoire commune. Par ailleurs, dans ce contexte où le discours des opprimés peut emprunter le canal de l’islam, Fanon peut nous aider à mieux appréhender les raisons de ce recours à la religion quand bien même ses écrits plus spécifiquement politiques indiquent que c’est politiquement que se règleront ces questions qui continuent à travailler le corps social. Alors que l’on vient de commémorer le cinquantième anniversaire de sa mort, Fanon garde une actualité incontestable. Et si la tentation est grande d’interpréter sa pensée, se confronter directement à ses écrits demeure un moyen efficace pour déchiffrer la situation actuelle, un passage instructif et stimulant pour penser notre société et agir. Yves Marchi & Alexandrine Vocaturo 28 MÉMOIRE ITINÉRAIRE D’UN GAMIN DE LA CITÉ NOIRE ACTUALITÉ DE FRANTZ FANON Je vous recommande la lecture du livre d’un de nos militants de longue date, Jacques Declosménil, qui vient de publier Itinéraire d’un gamin de la cité Noire. C’est un témoignage, âpre, sans concession, que ce retour sur une trajectoire de vie, sur ses choix, avec ses doutes, ses exigences de transparence, d’un homme qui expose, avec une grande sincérité, 40 ans de militantisme syndical, associatif et politique à Saint-Lô, dans la Manche. Nul doute qu’à Saint-Lô ce livre laisse des traces. Mais ce retour en arrière ne peut que conduire aussi ceux de la même génération à revenir sur la façon dont ils ont vécu ces 40 ans, chacun là où ils étaient. C’est une magnifique incitation à témoigner directement de cette histoire pour les générations qui viennent. L’engagement de Jacques Declosménil avec le MRAP est une partie essentielle de son itinéraire. La violence des luttes locales qu’il évoque (pour les Gens du voyage et la mémoire du camp d’internement de Barenton en particulier, mais aussi contre le racisme et l’extrême droite) résonnent d’une manière particulière pour les militants d’aujourd’hui. Martine Platel Pour commander le livre, s’adresser à Declosmenil Jacques : 138, rue des écuyers 50 000 Saint-Lô. Contact : téléphone : 02 33 57 27 56 ; Courriel : jacquesdeclosmen@ wanadoo.fr L’ouvrage est également disponible à la SARL Declosmenil 151, rue Louis Armand Zone Industrielle de La Chevalerie à Saint-Lô (Tel. 02 33 05 34 97) et à Planet R 2, rue Maréchal Leclerc à Saint-Lô (Tel. 02 33 77 17 77). © Ouest france 29 MÉMOIRE Lors de la conférence des ministres européens de l’Éducation à Cracovie en octobre 2000, l’engagement avait été pris de créer une « Journée de la mémoire de l’Holocauste et de la prévention des crimes contre l’humanité » dans chacun des États membres, à partir de 2003. Pour cette journée de la mémoire, la France a retenu la date du 27 janvier, anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz par les soldats soviétiques, que l’ONU a unanimement proclamée Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste. La libération d’Auschwitz puis des autres camps de concentration révélait au monde entier les indicibles souffrances endurées par des millions d’enfants, de femmes, d’hommes, que le régime nazi et ses sbires de la Gestapo et leurs complices avaient recensés, pourchassés, arrêtés, raflés, marqués, dépouillés de tous leurs biens, d’abord en Allemagne, puis dans tous les pays de l’Europe occupée. Syndicalistes, militants politiques opposés au régime, communistes, socialistes, chrétiens, protestants, catholiques, témoins de Jehova, homosexuels, handicapés, malades mentaux, tsiganes et juifs, tous ont été livrés à l’esclavage et à la mort, broyés par la gigantesque machine à exploiter et à exterminer, mise au point par les hitlériens. Auschwitz était devenu le plus grand complexe construit par les nazis, à la fois camp de travail, de concentration, camp d’extermination. Toutes les méthodes étaient bonnes pour tuer : la faim, la maladie, les expériences médicales, le travail forcé qui alimentait la machine de guerre nazie (une trentaine de firmes privées ou contrôlées par les SS s’y installèrent, attirées par le coût dérisoire de cette main d’oeuvre captive) jusqu’à l’extermination « scientifique » qui tua le plus. Les déportés étaient gazés, leurs corps brûlés ou enterrés dans des fosses communes. Les valeurs, l’or, les bijoux, les lunettes, les vêtements, les dents, les cheveux... étaient récupérés, réutilisés pour des profits gigantesques. Notre propos serait-il alors de banaliser l’horreur ? Nous voulons comprendre, analyser, démonter les mécanismes de mort de l’ensemble du complexe d’Auschwitz, symbole d’une épouvantable machine d’avilissement, monstrueuse machine à tuer. Nous voulons comprendre pourquoi cette machine à tuer n’a pu être stoppée, alors que le monde savait que le régime nazi, dès son arrivée au pouvoir, avait ouvert des camps pour y interner des opposants réels ou potentiels. Le monde connaissait les camps de concentration, les camps d’extermination. « Plus jamais ça ». Comment? Bien connaître le nazisme et ses conséquences relève de la formation historique, mais aussi, pour une grande part, du civisme. La victoire de l’humanité sur le dédale d’un monde infernal organisé par des hommes, reste précaire, jamais acquise. S’il est un enseignement à tirer des crématoires et du génocide, c’est qu’il faut combattre sans concession le racisme sous quelque forme qu’il se manifeste. Car les tentations subsistent, hélas! dans nos sociétés, de recourir aux mêmes méthodes pour faire face aux mêmes difficultés économiques et sociales. En dehors des nostalgiques obtus, il est primordial de savoir déceler les moyens plus subtils, utilisés pour parvenir à des fins semblables. La mythologie politique, le bouc émissaire peuvent changer ; il reste alors l’entreprise visant à diviser pour régner, en alimentant les préjugés, en suscitant l’intolérance et la haine, pour masquer les vrais problèmes et leurs causes réelles, à promouvoir des « chefs » qui pensent, parlent et décident pour vous, à entraîner enfin dans des mouvements irrationnels et inhumains des foules en désarroi. Tout fait, tout événement qui va dans ce sens risque d’être l’une des dents de l’engrenage terrible, dont l’expérience démontre à quelle vitesse surprenante il est capable de broyer la démocratie et les valeurs qui s’y rattachent. « Plus jamais ça ! »… Tel était le serment des déportés survivants, libérés des camps d’extermination. Leur volonté, leur avertissement exigent de nous une mémoire agissante qui se manifeste par une vigilance de tous les instants pour mettre à jour, comprendre, s’indigner, dénoncer, combattre toutes les paroles, tous les actes, toutes les décisions qui ouvrent la voie au mépris de tout ce qui est humain. Le MRAP se félicite des échecs répétés pour bâillonner les formidables paroles d’insurrection et d’espérance de Stéphane HESSEL, ancien résistant, déporté aux camps de BUCHENWALD et de DORA, corédacteur de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948. Son « Indignez-vous », plus qu’une remémoration, bien mieux qu’un ressassement, est un cri d’aujourd’hui, un cri contre les démolisseurs de la démocratie, à l’oeuvre sous nos yeux… « Indignez-vous » 25 janvier 2011 AUSCHWITZ : JOURNÉE DE LA MÉMOIRE DE L’HOLOCAUSTE ET DE LA PRÉVENTION DES CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ L’entrée principale d’Auschwitz - Birkenau / Photo : © Kasia Krempa, fotopedia.com 30 INTERNATIONAL La faim n’est pas une fatalité, il appartient aux hommes de changer le cours de l’histoire Dans son dernier ouvrage(1), le Professeur Jean Ziegler(2) livre une analyse profonde des causes structurelles de la malnutrition et de la faim dans le monde qui frappent près d’un milliard de personnes dans le monde. Le droit à l’alimentation est de loin celui qui subit les violations les plus massives et constantes : 35 millions de morts de la faim et de ses suites immédiates en 2010. Ceci est d’autant plus inacceptable que toutes les études dans ce domaine démontrent qu’une allocation différente des ressources et des moyens de production ainsi que des choix plus judicieux des types et des rythmes de cultures et de distribution de la production pourraient éviter ce massacre. La FAO, agence des Nations Unies pour l’alimentation, affirme qu’il serait possible de nourrir convenablement 12 milliards de personnes, soit près du double de la population mondiale. Cette « Destruction massive » passe toujours inaperçue dans les grands médias qui ne s’intéressent qu’aux manifestations conjoncturelles de la famine, telles que les conséquences directes des inondations ou de la sécheresse. C’est que la petite dizaine de multinationales gouvernant le marché agroalimentaire mondial ont un pouvoir financier et médiatique qui les protège de la dénonciation publique. Fin connaisseur de la Genève internationale (diplomatique, financière et commerciale) qui est devenue le plus grand pôle mondial du négoce de matières premières, Jean Ziegler dénonce le manque de cohérence de la part des États, voire leur cynisme. Ce n’est que tout récemment d’ailleurs, à l’occasion d’un colloque, que le Directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), le socialiste Pascal Lamy, s’est accordé à dire, de concert avec la Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, que les accords commerciaux internationaux peuvent porter atteinte aux droits humains ; notamment les droits économiques, sociaux et culturels. Un tabou a été brisé dans les enceintes internationales. Au fil de son analyse, Jean Ziegler s’appuie sur des cas concrets pour illustrer son propos. Ce sont les études qu’il a menées au cours des missions qui l’ont conduit sur les différents continents
- Niger, Brésil, Bangladesh, Guatemala,
Mongolie, Inde, Palestine, etc. Il partage ainsi avec les lecteurs son expérience de Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, ses voyages, ses rencontres, ses frustrations, ses victoires. Constatant que 80% des victimes des violations au droit à l’alimentation se trouvent dans les zones rurales, il apporte les éléments de compréhension du phénomène en explicitant les mécanismes propres à la concentration de la filière agroalimentaire et des pouvoirs économique et financier qui conduisent à l’expropriation des petits fermiers, au développement des biocarburants, à la spéculation boursière sur les aliments de base. Mais finalement, malgré le constat alarmant, l’ouvrage de Jean Ziegler se veut un message d’espoir. Cet espoir qui vient des mouvements populaires d’Asie, d’Afrique, d’Amérique pour changer le cours de l’histoire et obtenir, avec les moyens démocratiques qui appartiennent aux peuples, une répartition plus équitable et plus efficace des terres, des moyens de production et des productions agricoles. L’amitié entre les peuples exige que l’on soutienne activement ces mouvements populaires paysans , c’est pourquoi tout militant du MRAP se devrait de plonger dans cet ouvrage qui se lit à la fois comme analyse scientifique et témoignage d’un militant engagé pour les droits humains. Gianfranco FATTORINI (1) Destruction massive : géopolitique de la faim (344 p.)– Seuil, 2011 – 20 € (2) Vice-président du Comité consultatif du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, il a été le premier Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation de 2000 à 2008 Alors que le gouvernement de Turquie accroit sa répression à l’encontre du peuple kurde, Eutelsat, dont l’État français est actionnaire, a décidé le 23 janvier, de suspendre la présence de la chaîne kurde de télévision Roj TV sur tous ses satellites. Depuis 2009, quelques semaines après le succès du parti légal pro kurde BDP aux élections municipales, les autorités turques ont emprisonné plus de neuf mille personnes dont plus de cinq mille sont maintenues en détention. Tous et toutes (700 femmes) sont des militants associatifs et politiques, parmi lesquels 6 députés, 18 maires, des centaines d’élus locaux, des cadres du BDP, mais aussi 97 journalistes, une cinquante d’avocats, des personnalités comme M. Muharrem Erbey, Vice-président National de l’association turque des droits de l’homme (IHD), des intellectuels, des écrivains. Le 26 novembre dernier, 33 avocats ont été incarcérés à Istanbul et inculpés de « participation à une organisation terroriste ». Ces avocats font partie du cabinet Asrin qui assure la défense du leader du PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan), Abdullah Ocalan. Le Conseil de l’Ordre des avocats de Paris, dans une résolution, rappelle le principe 18 des Principes de base relatifs au rôle du barreau, adoptés par les Nations Unies, selon lequel « les avocats ne doivent pas être assimilés à leurs clients ou à la cause de leurs clients dans l’exercice de leurs fonctions ». En décembre dernier, le bombardement par l’armée turque d’un village kurde, a tué 40 civils, dont de nombreux jeunes et enfants, dans la région de Sirnak. Cette politique du pire a pourtant montré son échec persistant. En interdisant Roj/TV, c’est la voix du peuple kurde que l’on veut faire taire. C’est une décision politique extrêmement grave contre la liberté d’expression quand on sait que Roj TV est écoutée en permanence par des millions de Kurdes, ceux de l’intérieur, en Turquie, en Irak, en Iran et en Syrie, mais aussi par des milliers de Kurdes exilés dans le monde, principalement en Europe, dont plus de 130.000 en France. C’est pour la communauté kurde en exil le lien culturel et politique avec ses racines. Pour les Kurdes, c’est la voix de l’espoir et il n’est jamais bon de pousser une population au désespoir. Cette décision intervenue après les interventions de Claude Guéant, ministre de l’Intérieur signant à Ankara un accord qui, d’après ses déclarations, « va bien au delà des accords que la France signe habituellement dans le domaine de la sécurité », et d’Alain Juppé, ministre des affaires étrangères qui, dans une lettre à une députée européenne, approuve sans réserve la politique répressive du gouvernement turc en s’abritant honteusement derrière l’argument « anti terroriste ». Mais, les Kurdes de Turquie (25 millions de personnes sur les 70 millions de citoyens turcs) ne réclament rien d’autre que le respect de leurs droits fondamentaux, dans une Turquie démocratique. Une solution pacifique et négociée à la question kurde est indispensable à la stabilisation d’une situation de plus en plus complexe et explosive au Moyen Orient ainsi qu’à une véritable démocratie en Turquie. Le MRAP, solidaire du peuple kurde, « là-bas et ici » rappelle que cela ne pourra se faire que par la voie de la négociation. Renée Le Mignot co-présidente du MRAP. LES PEUPLES FACE AUX MULTINATIONALES LA VOIX DU PEUPLE KURDE NE PEUT PAS SE TAIRE 31 G EI NNTSE DRUN AVTOIYOANGAEL Le 27 novembre 2011, dans le monde entier, les Tamouls de Sri Lanka ont célébré Maaveerar Naal (le Jour des héros). Le 27 novembre 1982, pour la première fois, un combattant tamoul trouva la mort au combat. Il s’agissait de Valvettithurai Sathiyananthan, dit Lieutenant Shankar, âgé de 21 ans. Depuis 1989, cette date est consacrée au souvenir des combattants tués. C’est à la fin des années 1970 que la résistance des Tamouls à des discriminations qui avaient commencé dès la proclamation de l’indépendance de l’île de Ceylan et à la répression violente qui les frappait a pris la forme d’une lutte armée pour la formation d’un État indépendant du Tamil Eelam, conformément à la Résolution de Vaddukodai votée en 19761. Cette lutte a été vaincue par l’armée sri-lankaise en mai 2009, mais, vivant depuis 1948 sous domination d’une majorité cingalaise qui s’est révélée incapable d’établir l’égalité entre les citoyens du pays, constatant qu’après la fin du conflit en 2009, la colonisation des terres s’intensifie, les Tamouls affirment, aujourd’hui encore, leur droit à l’autodétermination sur le territoire du Tamil Eelam, au Nord et à l’Est de l’île. À Paris, 10 000 personnes se sont rassemblées ce 27 novembre au Parc des Expositions. Lors d’une émouvante cérémonie, après avoir assisté à la levée du drapeau du Tamil Eelam, chaque participant a déposé une orchidée rouge et jaune devant l’une des centaines de photographies de Tamouls morts au combat. La journée s’est poursuivie par un spectacle de chants et danses présentés par les élèves des écoles tamoules de la région parisienne, entrecoupé d’interventions où des associations et des élus ont fait part de leur solidarité. Marie-George Buffet, députée de Seine- Saint-Denis, a évoqué une intervention auprès du Président de la République et un «Appel pour la saisine de la Cour Pénale Internationale sur la situation du peuple Tamoul au Sri Lanka» lancé le 3 juillet dernier et signé par une vingtaine de députés de tous les groupes politiques de l’Assemblée nationale(2). Des élus de Clichy-la- Garenne, Évry, Savigny-sur-Orge, Sevran ont aussi exprimé leur soutien. Au nom du MRAP, j’ai souligné le fait que nous attendions de le France et de l’Union Européenne qu’elles exigent la recherche de la vérité, afin que soient jugés les auteurs des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis au Sri Lanka, et qu’elles protègent les demandeurs d’asile tamouls. Crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Un groupe d’experts mandaté par les Nations Unies a remis le 25 avril un rapport concluant à la crédibilité d’allégations de violations des droits de l’homme et du droit humanitaire commises entre septembre 2008 et juin 2009(3). Il constate que des bombardements de civils, y compris dans des zones protégées, y compris ciblant des hôpitaux, des enlèvements, des disparitions forcées, des privations de nourriture et de soins médicaux, des exécutions sommaires, des viols, ont été commis et que la responsabilité du gouvernement sri-lankais est engagée. Ce rapport, qui fait aussi état de violations du droit international du côté du LTTE, appelle à une enquête internationale indépendante, mais une telle enquête ne pourra avoir lieu qu’avec l’accord du gouvernement sri-lankais, ou si elle est ordonnée par une entité intergouvernementale. Le gouvernement sri-lankais s’y refuse et c’est pourquoi une saisine de la CPI est nécessaire. Le gouvernement sri-lankais met en avant le travail d’une « Commission sur les leçons apprises de la guerre et la réconciliation » qui traite de la période 2002-2009 et a rendu ses conclusions le 15 novembre(4). Son travail, selon le rapport des Nations Unies, ne correspond pas aux normes internationales d’indépendance et d’impartialité(5). En octobre 2010, Amnesty International, Human Rights Watch et Crisis Group ont, dans un courrier à son secrétaire(6), décliné une invitation. Aux motifs des experts onusiens (manifestation de soutien au gouvernement de la part de membres de la Commission lors du conflit, recherche insuffisante de la vérité sur les événements de 2009, absence d’enquête systématique et impartiale sur les allégations de violations des deux côtés, méthode ne respectant pas suffisamment la dignité des victimes et ne garantissant pas la protection des témoins), ils ajoutaient le fait que les violations des droits de l’homme n’avaient pas cessé, que rien n’était fait pour améliorer la situation, et que le gouvernement persistait à nier l’existence de victimes civiles. Nous ne serons donc pas étonnés de lire dans le rapport de la Commission, qui minimise le nombre de victimes civiles, mais reconnaît l’importance du nombre de personnes disparues et l’existence de graves problèmes relatifs aux droits de l’Homme, que l’armée sri-lankaise a eu un comportement exemplaire, à l’exception de quelques possibles dérapages individuels sur lesquels il devra être enquêté(7). Ce rapport ne doit pas faire illusion, les crimes relevés par les experts de l’ONU doivent faire l’objet d’une réelle enquête dont le caractère international est d’autant plus impératif que le rapport de la Commission locale démontre sa partialité. Demandeurs d’asile sri-lankais exposés à des retours forcés. En juillet 2010, S. Sinnathamby, demandeur d’asile tamoul du Sri Lanka, s’était pendu à Tours après un refus définitif par la CNDA (Cour nationale du droit d’asile). Aujourd’hui, l’état d’urgence est levé, des prisonniers sont libérés. Sri Lanka veut donner l’image d’un paradis touristique, mais y a-t-il un réel changement ? En mai dernier, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a estimé qu’il existait des facteurs de risque, mais sans pourtant aller jusqu’à conclure qu’un ancien membre du LTTE dont la demande d’asile avait été rejetée par les autorités britanniques était exposé à des traitements contraires à l’article 3 de la CEDH en cas de retour au Sri-Lanka(8). En Suisse, des manifestations ont eu lieu contre de récentes décisions de renvoi. 27 Tamouls, expulsés du Royaume Uni en juin dernier vers Colombo y ont été aussitôt arrêtés. Amnesty International, l’ACAT (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture) soulignent des risques de torture, des disparitions de militants(9). En France, un rapport de mission de l’OFPRA conclut qu’il «reste encore de nombreux progrès à faire pour assurer au quotidien le libre exercice de la démocratie « et que les militants des droits de l’homme, comme les journalistes, courent encore des risques(10). La réalisation d’un enquête internationale indépendante requiert l’action des instances internationales, et la protection des réfugiés Tamouls du Sri Lanka présents en Europe celle des Etats européens. Mais nous savons bien que ces instances n’agiront que si les citoyens sont informés et s’ils en expriment eux-mêmes l’exigence, par exemple Report of the Commission..., p. 129 à propos de combattants qui se sont rendus à l’armée sri-lankaise et ont disparu depuis. (1) Texte dans Guide pratique d’anticolonialisme, Paris, 2011, p. 72-77. (2) Blog de Marie-George Buffet : http://mariegeorgebuffet.elunet.fr (3) Report of the Secretary-General’s Panel of experts on accountability in Sri Lanka, 31 march 2001. Disponible sur le site de l’ONU (www.un.org) dans une version complète et une version abrégée (Executive summary) (4) Report of the Commission of Inquiry on Lessons learnt and Reconciliation. Novembre 2011 (http://www.priu.gov.lk/news_update/ Current_Affairs/ca201112/FINAL%20LLRC%20REPORT.pdf). (5) Report of the Secretary-General’s panel ... : Executive summary, p. V. (6) Human Rignts Watch : http://www.hrw.org. Ce courrier liste un grand nombre de rapports d’ONG sur les faits qui se sont déroulés en 2009. (7) Par exemple Report of the Commission..., p. 129 à propos de combattants qui se sont rendus à l’armée sri-lankaise et ont disparu depuis. (8) 31 mai 2011, Cour Européenne des Droits de l’Homme (Lettre_ADL_ du_CREDOF_-_4_juin_2011) (9) Voir le site de Amnesty International www.amnesty.org et celui de l’ACAT (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture : www. acatfrance.fr (10) Mission effectuée en mars 2011 (http://www.ofpra.gouv.fr/ documents/misSLK_2011.pdf) MAAVEERAR NAAL (LE JOUR DES HÉROS) Création - Réalisation : Studio MARNAT - www.marnat.fr Le 13 décembre 2011, en présence de Mahmoud Abbas, Président Palestinien, Président de l’OLP, au cours d’une cérémonie émouvante, s’est levé à Paris, au siège de l’UNESCO, le drapeau de Palestine. L’initiative palestinienne pour une reconnaissance de l’État palestinien et son admission en tant que 195ème État au sein des Nations Unies, a eu pour mérite de replacer la question palestinienne au coeur du débat international et de placer les différents États devant leur responsabilité. C’est le 31 octobre 2011 qu’a eu lieu le vote pour l’admission à l’UNESCO : 107 États ont voté pour (dont la France), 52 se sont abstenus, 14 ont voté contre (dont les États Unis, le Canada et l’Allemagne). La pression, le chantage au financement, de la part d’Israël et des États Unis pour que les Palestiniens retirent leur candidature, avait pourtant été forte. Les représailles se sont traduites par la suspension de la contribution des États Unis à l’UNESCO, soit 22% du budget annuel, ainsi que de celle d’Israël, soit 3%. « Aujourd’hui nous sommes membres de l’UNESCO et nous espérons que de la même manière notre peuple aura son État indépendant. Un État qui pourra vivre en paix côte à côte avec Israël. Nous espérons que cela ne tardera plus » devait déclarer Mahmoud Abbas. Le 23 novembre, la Commission des Affaires humanitaires, sociales et culturelles de l’Assemblée générale des Nations Unies, a voté pour le droit des Palestiniens à l’autodétermination par 166 voix « pour ». Les seuls pays à avoir refusé ce droit pourtant reconnu par la Charte des Nations Unies de 1945, sont les États Unis, Israël, le Canada, les Iles Marshall et la Micronésie ! Le 5 décembre 2011, le Parlement islandais a voté une résolution reconnaissant la Palestine « en tant qu’État indépendant et souverain » sur la base des frontières de 67. C’est le premier pays européen à reconnaître l’État palestinien. « J’espère que d’autres pays vont faire de même » a déclaré la députée islandaise Amal Tamini. Nous espérons aussi que la France fasse de même. Certes, ces avancées symboliques ne suffisent pas. Elles sont cependant la preuve qu’une écrasante majorité dans le monde soutient la création d’un État palestinien indépendant. Elles doivent s’accompagner de mesures concrètes pour exiger la fin de l’occupation, le démantèlement des colonies et du Mur d’annexion, la fin du blocus de Gaza et de la politique d’enfermement de la Cisjordanie, la libération de tous les prisonniers, la création de l’État palestinien dans les frontières de 1967 avec Jérusalem Est comme capitale, le droit au retour - son application devant être négociée -, c’est à dire le respect du droit international. Renée Le Mignot co-présidente du MRAP. LE DRAPEAU DE PALESTINE FLOTTE SUR L’UNESCO INTERNATIONAL Le Sahara occidental, dernière colonie en Afrique, est occupé depuis 36 ans par son voisin le Maroc. Cette colonisation, décalée dans le temps, loin des intérêts des pouvoirs et des médias, est pourtant lourde de souffrances pour tout un peuple, les Sahraouis. En exil en Algérie, occupés dans leur propre pays, les Sahraouis vivent depuis 36 ans séparés et ne cessent depuis toutes ces années de lutter pour recouvrer leur territoire et gagner leur indépendance. Un mouvement pacifique de révolte ! En octobre 2010, quelques semaines avant le début du « printemps arabe », les Sahraouis installés à El Aïoun, capitale du Sahara occidental occupé, se sont retirés de leur ville, par milliers, pour dire la fin de leur longue patience et leur refus de la présence marocaine. Comme en Egypte ou en Tunisie, ce mouvement pacifique a d’abord été engagé par les jeunes et a vite débordé par son ampleur les prévisions de ses premiers initiateurs. Dans ce camp constitué à 12 km de la capitale, sur le site de Gdeim Izik, des milliers de tentes ont accueilli pendant un mois plus de 20 000 personnes, soit près de 50% de la population sahraouie d’El Aïoun. Mais ce mouvement n’est pas encore victorieux ! Le camp a été démantelé par l’armée et la police de l’occupant, beaucoup de jeunes ont été arrêtés et emprisonnés. Il reste encore aujourd’hui 85 prisonniers politiques dans les prisons marocaines. Écrire pour les libérer ! (1) Les associations des droits de l’homme et toutes les associations solidaires avec le peuple sahraoui, demandent leur libération immédiate car tous ces hommes sont innocents ou seulement coupables de refuser publiquement l’occupation de leur pays. Pour peser pour leur libération, pour interpeller de manière vigoureuse les autorités qui les oppriment, nous avons choisi de leur écrire, de devenir ainsi leurs parrains ou leurs marraines. Des courriers leur sont envoyés régulièrement depuis avril, ils ne sont jamais distribués. Des courriers sont adressés régulièrement aux autorités marocaines et à l’Ambassade de France au Maroc qui n’ont reçu aucune réponse. Aussi nous devons être des centaines, des milliers à écrire pour obtenir la victoire de leur libération. Pour cela, deux méthodes d’action : Vous pouvez démarrer un engagement régulier : Vous vous engagez à écrire régulièrement à un prisonnier et à adresser copie de votre courrier à plusieurs institutions marocaines et françaises. Vous contribuez à un fonds de solidarité - 5 euros par mois - pour venir en aide à leurs familles. Pour vous faire connaître écrivez-nous, vous recevrez un dossier complet, nom et adresse du prisonnier, coordonnées des institutions et modèles de lettres, et vous recevrez aussi une information régulière concernant les prisonniers politiques Sahraouis. Campagne de parrainage « écrire pour les libérer » initiée par l’Association des Amis de la RASD et la Plateforme de Solidarité avec le Peuple Sharaoui (dont le MRAP fait partie). (1) site : www.ecrirepourlesliberer.com - mail : contact@ ecrirepourlesliberer.com AU MAROC ET AU SAHARA OCCIDENTAL OCCUPÉ 85 PRISONNIERS POLITIQUES SAHRAOUIS « ÉCRIRE POUR LES LIBÉRER »