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Sommaire du numéro

n°76 mars 1988

  • Bavure en jugement
  • SIDA: la délation monte en gare
  • Vaincre le système de la haine, Apartheid: boycott, interview de Dulcie September par Cherifa Benabdessadok
  • Min fin belt? Occupation des territoires palestiniens par René François [moyen-orient]
  • Un bon racisme? (club de l'horloge) [extrême-droite]
  • Bloquer le starter (candidature Le Pen)
  • Les femmes-courage de l'immigration par Rabha Attaf et Marie-Jeanne Berna
  • Cinémas féminins (festival de Créteil) par Christiane Dancie
  • L'oasis parisienne (ouverture de l'Institut du monde arabe) par Yves Thoraval
  • Rideau sur Rido Bayonne (musique)

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, foyer sur 5 est ~ adhérent à France Loisirs • un catalogue trimestriel gratuit • plus de 400 livres reliés, des disques, des jeux • des prix exceptionnels -des achats «à la carte» par correspondance ou dans nos 190 librairies et boutiques près de chez vous FRANCE LOISIRS - SERVICE 1000 - BP 6 - 75759 PARIS CEDEX 15 - TEL. : 45 .67.35.32 Pitm Panf BIS Président d'honneur du MRAP, Pierre Paraf publie ses mémoires. Homme de lettres et de radio, il raconte sur un ton courtois et plein d'humour une vie rythmée par les événements du siècle. De l'affaire Dreyfus au combat antiraciste d'aujourd'hui, Pierre Paraf se révèle d'une infatigab e ardeur. Mes rendez-vous avec le siècle, . de Pierre Para!, aux éditions Messidor. 95 F. Deux poids, deux mesures L'affaire Zouaoui devant le tribunal de Paris, l'affaire Do vero à Marseille. Deux bavures soldées de deux morts. Zouaoui Benelmabrouk, abattu, fit vingt lignes dans la presse. Personne ne bougea - sauf ses proches, ses amis et les antiracistes . Christian Dovero tué scandaleusement d'une balle en pleine tête fait la une des journaux et l'on se mobilise. Ce n'est pas trop, c'est juste et nécessaire. Pour que cela n'arrive plus, la presse joue enfin son rôle, dénonce les pressions du ministre de la Justice sur le parquet, la remise en liberté du meurtrier ... Pourquoi pas à chaque fois? S'est-on habitué à ce point à voir flinguer les jeunes Beurs ou, peutêtre, ne s'émeut-on que lorsque tombe un jeune Français dit de souche ? La banalisation des bavures an ti-arabes n'ouvre-telle pas la voie à d'autres bavures? Il n 'y a pas de frontière entre ce qui est acceptable pour les uns et inacceptable pour d'autres. Les « bronzés» meurent aussi et le silence autour de ces morts autorise les fous de la gachette à aller toujours plus loin. Si nous réagissions comme il faut à chaque bavure? Zouaoui et Christian ne seraient pas morts. 0 'Différences MARS .... .l .U.. 5 Bavure en jugement U Zouaoui Benelmabrouk a été tué ce en mai 1984 par balle. Le gardien de la paix Holtz a été inculpé. Depuis, l'affaire traîne en justice. La 17" Chambre correctionnelle du tribunal de Paris vient de statuer. 6 Apartheid Boycott Représentante de l'African National Congress en France, Dulcie September explique pourquoi il faut boycotter l'apartheid. CHERIFA BENABDESSADOK 12 Le racisme et l'opinion Le Pen est le seul homme poli tique français à avoir été condamné pour racisme. Une raison supplément aire et suffisante pour que le MRAP appelle tous les élus à lui refuser leurs signatures. ABONNEMENTS 1 an: 200 F. 1 an à l'étranger: 220 F. 6 mois: 120 F. Etudiants et chômeurs, 1 an : 150 F. 6 mois: 80 F (joindre une photocopie des cartes d'étudiant ou de pointage). Soutien : 300 F. Abonnement d'honneur: 1 000 F. Algérie: 15 dinars. Belgique : 140 FB. Canada: 3 dollars. Maroc: 10 dirhams. Publicité au journal Photocomposition PCP, 17, place de Villiers, 93100 Montreuil. Tél. : 42.87.31.00 Impression Montligeon. Tél. : 33.83.80.22. Commission paritaire n° 63634 1SSN 0247-9095. Dépôt 7égal : 1987-12. La rédaction ne peut être tenue pour responsable des photos, textes et documents confiés. Magazine créé par le MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples), édité par la Société des éditions Différences 89, rue Oberkampf, 75011 Paris. Tél. : (1) 48.06.88.33. ~ 16 lU Les femmes-courage - de l'immigration fn fn Au-delà des clichés, des souffran- Ct ces et des différences, la solidarité c:II et le courage des femmes immigrées sortent de l'anonymat. RABHA ATTAF et MARIE-JEANNE BERNA lU 24 Cinémas féminins . ~... Les femmes cinéastes du monde . ... odinxt alnesu.r Ufens tpivanalo ràa mCraé dte'oilù d éempueirs- U gent humour et maturité. CHRISTIANE DANCIE l..U.. 30 L'oasis parisienne ~ lU L'ouverture de l'Institut du monde - arabe confirme Paris dans sa vo- Ct cation de capitale de la création U arabe contemporaine. lU c:II YVES THORA V AL DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Albert Lévy REDACTION Rédacteur en chef René François Secrétariat de rédactionmaquettes: Véronique Mortaigne 1conographie Joss Dray ADMINISTRA TlON/GESTION Loïc Le Guernigou PHOTO COUVERTURE Emmanuelle Barbaras ONT PARTICIPE A CE NUMERO: Robert Pac, Rabha Attaf, Chérifa Benabdessadok, Yves Thoraval, Laure Lasfargues, Gérard Coulon, Souad Belhaddad, Marie-Jeanne Berna, Christiane Dancie. SIDA: LA DELATION MONTE EN GARE Le chemin de l'exclusion se nourrit de tout. Du racisme, du mépris du droit, de la marginalisation des pauvres, de l'ignorance. Aujourd'hui, les malades atteints du SIDA sont dans le collimateur. Le scandale a éclaté au grand jour avec l'affaire du salarié de la société Burke Marketing Research installée dans la région parisienne. Au mépris - assumé - de la loi, un jeune employé de vingt-huit ans est invité par la direction à « mettre fin de lui-même à son contrat de travail ». Au mépris du droit, le secret médical a été violé. Une longue note de service a été servie chaude « à l'intention de tout le personnel ». « On raconte les pires choses sur 1110n compte. Tout cela est odieux », s'exclame le salarié. Nous sommes à une époque et dans un pays où le culte du chef d'entreprise et du battant conduit à la substifution des fonctions. Le médecin du travail a certifié que le malade, après plusieurs mois d'arrêt et de traitement, était apte à reprendre sa fonction. Cette position a été corroborée par l'un des plus grands spécialistes français, le Pr Rozenbaum, lequel est le coresponsable de l'équipe ~ qui a découvert et isolé l'un des deux virus du SIDA. L'OMS (Organisation mondiale de la santé) considère, pour sa part, dans l'état actuel des choses, inefficace un éventuel dépistage systématique. Elle préconise une « vision globale de l'impact du SIDA », et consacrera pour l'année en cours soixante-six millions de dollars à l'application de ce programme. Et cela pour les raisons scientifiques que l'on sait: modes de transmission, délais de déclaration de la maladie, concentration forte sur les populations dites à risque, nécessité de mobiliser les moyens sur la recherche afin d'aboutir à une véritable thérapeutique. Malgré cela, le directeur général de Burke Marketing a décidé de trancher. A la place des autorités compétentes. Pour lui, l'employé« n'est plus capable de remplir ses fonctions de chef d'équipe ». Une question fondamentale s'impose: « Qui a violé le secret médical et pourquoi ? » Si dans ce cas de figure, la réponse n'arrive pas sur la place publique, c'est une conception policière de la médecine qui risque de se mettre progressivement en place. Bachelot, le tristement célèbre médecin du Front national, ne rêve-t-il pas d'une méthode susceptible de tester les gens à leur insu? Pourtant le propos du ministre délégué à la Santé et à la famille, Michèle Barzach, est assez clair : le dépistage doit être libre et consenti, il ne doit en aucun cas, s'ensuivre une exclusion du p:avail. Mais la société Philips, comme la mairie de Paris (sic) sont passées elles aussi outre en refusant l'embauche de personnes séropositives. Alors? Ces « exceptions » tendent, en plus de leur caractère discriminatoire, de leur gratuité, à semer la confusion, à provoquer la panique que redoutent précisément les scientifiques et les chercheurs. Il serait plus judicieux de leur faciliter la tâche que de faire monter la délation en gare. 0 .....~ ,.... ..... ........ "'/Ii:~ ;

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Marcel Devilaine, chez lui, et la note affichée dans son entreprise. ........................ -.~ ....... - ..... --, . ...... II)WW._ ...... ..." ... -..-._ '""""---...... _~. PROCES EN ASSISES L'AFFAIRE ZOUAOUI : LA LEGITIME DEFENSE EST REJETEE « Tout ce que je demande c'est que justice nous soit rendue. Mais pour obtenir ce droit, il faut à chaque fois remuer ciel et terre. »Telle fut la première réaction de M. Benelmabrouk - le père de Zouaoui - au tribunal de Paris, le 12 février dernier. Des bavures, des annes, des procès à la conclusion incertaine. Jusqu'où? Ce jour-là, il ne cachait pas sa satisfaction. La présidente de la 17e chambre correctionnelle, Mme Marie-Claude Duvernier, a en effet rendu un jugement allant dans le sens d'une justice impartiale: le brigadier Holtz, qui avait tué le jeune Zouaoui Benelmabrouk (alors âgé de 23 ans) dans la nuit du 6 au 7 mai 1984, à Paris, est désormais inculpé sous la qualification criminelle de « coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner » au lieu d' « homicide involontaire ». « La nuance est de taille, expliquait Leila Benelmabrouk. Ce jugement si- gnum tiré par le gardien Gé- famille Benelmabrouk. Pour gnifie qùe les policiers ne bé- rard Holtz. eux, il ne s'agit ni d'une léginéficient plus d'un privilège, et Elle a traversé la lunette ar- time défense ni d'un homicide qu'ils ne sont plus couverts.» rière, avant de se loger dans le par imprudence, mais d'une Quatre ans auparavant, place thorax du conducteur, qui dé- volonté de blesser. de la Porte-d'Auteuil, vers mi- cédera quelques instants après. Aussi ils ont demandé à la prénuit, trois policiers à bord La semaine suivante, cinq sidente de la 17e chambre cord'une 4L banalisée immobili- cents personnes avaient fait rectionnelle de renvoyer l'afsent une 504 Peugeot qui leur une marche silencieuse à Mon- faire devant la cour d'assises en a été signalée par radio : ses trouge. Pour tout le monde, se déclarant incompétente. occupants, trois jeunes ban- « Zouaoui avait été tué par la Leur requête a été entendue, et lieusards de Montrouge, vien- police ». Le brigadier Holtz le brigadier Holtz sera jugé nent d'avoir une violente alter- avait, quant à lui, été muté à pour crime . Mort naturelle '1 La Liberté du Morbihan a fait état, dans son édition du Il janvier, de la mort d'un Algérien de 3S ans dans un hôtel de Lanester; une mort qu'il plaçait sous le signe du point d'interrogation: mort naturelle ou assassinat l Le SAMU a conclu à une mort naturelle, une première autopsie aussi. Mais ni les amis de la victime ni le consulat algérien ne se satisfont de ces résulats. Comment expliquer le sang coagulé autour des lèvres, comment expliquer le sang coagulé autour du nez et du bras droit ? » Et ce bras a été cassé. Comment l La thèse de la chute paraÎt un peu légère au consul qui a demandé qu'une contreexpertise soit faite en Algérie où le corps a été rapatrié. Une des photos prises montre, selon la Liberté, « une large plaie au bras droit ... un nez défoncé et une main gauche meurtrie ... » ; entre mort naturelle et assassinat, le De bien étranges stigmates cation avec un automobiliste. sa demande à Nice, la ville Une première victoire, pour ltis Les gardiens de la paix en ci- dont il est originaire. Il tra- parents de Zouaoui, même vil entourent la voiture, l'arme vaille depuis dans un bureau, s'ils savent au fond d'euxau poing. L'un d'entre eux et plus sur la voie publique. mêmes que la bataille de protente de prendre les clefs sur le Inculpé seulement d'homicide cédure est loin d'être terminée tableau de bord de la voiture involontaire, il comparaissait et que le passage du brigadier lorsque celle-ci effectue un donc libre le 8 janvier dernier, Holtz devant un jury d'assise brusque marche arrière. Le po- devant la 17e chambre correc- sera une autre paire de manlicier est alors entraîné sur une tionnelle du tribunal de Paris. ches. localier indique que « la dizaine de mètres et roulera en- Lors de cette audience, il a in- Mais à l'heure où le garde des sse'icmopnodsee rh ycphoatqhuèes ejo suerm ubnl e suite sur la chaussée tandis que diqué qu'il avait tiré afin de Sceaux, Albin Chalandon, en peu plus ... » Pourquoi le la voiture amorce un demi- protéger son collègue, « pour est encore à donner les instruc- consul n'a-t-il pas eu le tour. stopper le véhicule », en sou- tions pour couvrir pes fonc- résultat d'autopsie l Puis la voiture repart en mar- tenant que la voiture était per- tionnaires de police criminelle Pourquoi les RG sont-ils che avant, vers le gardien de la pendiculaire à lui, sans exp li- - après l'affaire Malik Ous- passés voir un militant du paix étendu sur le sol. Ses col- quer comment, dans ce cas, la sékine, la bavure de Marseille MRAP pour le faire « se lègues ouvrent alors le feu, et balle qu'il a tiré a pu toucher n'est qu'un exemple de plus - dégonfler », en lui lui-même, en se relevant, tire l'arrière. nous sommes en droit de nous expliquant que « la victime à six reprises en direction de la «Hoftz a tiré sur une voiture demander ce que vaut la peau mn'éartagiitn arli,e nu nq up'auunm é? ». 504. Une seule balle a atteint qui fuyait », ont estimé d'un Arabe ou de n'importe Intervention qu'une mort la voiture, provenant de l'uni- Mes François Serre et Jean- quel citoyen de ce pays. 0 « naturellement naturelle» Il ~q~u~e_c_o_u~p_ de_ _re ~·v~0_I~v~er _3_ 57~M~a-___p_ i_e_rr_e_M~ig~n_a_r_d~s,~c_o_n_s_ei_ls~d_e~la~ ___________________R_ ._A_.~ -~a u~ra i~t~r:e:nd:u:e~m:u:t:iI:e.~~0:J Différences - n" 76 - Mars 1988 .. APPLIQUONS LE BOYCOTT Afin d'en finir avec le!17 janvier 2012 à 14:14 (UTC)~e, i~~P!!.CharlesS!.~ ~!leZis~r~ur17 janvier 2012 à 14:14 (UTC)! Noirs. Que et obligatoires contre l'Afrique du Sud. Dulcie September, représentante de l'African National mier personnage noir d'Afri- les fruits sud-africains conti- Lorsque des Sud-Africains blancs, gavéS de bonnes affaires et de dollars, représentants du régime en place, se font aussi porte-paroles des travailleurs noirs qu'ils exploitent férocement, cela parait quelque peu suspect. C'est pourtant ce qui se passe régulièrement. Ce fut le cas en . octobre dernier lorsque une délégation de l'Association des Chambres de commerce d'Afrique du Sud (ASSOCOM) est venue négOCier en Europe de juteux contrats. La délégation en question en profita pour exposer à ses interlocuteurs le danger des sanctions qui seraient, disaient-ils, « contre-productives ". toutes leurs voix. baiUonnées, auprès de la communauté interna· tionale des sanctions globales et obligatoires, est·i1normal de ne pas les entendre? Est-il normal que l'argent continue à n'avoir aucune odeur? Est-il normal, humain. politiquement défendable et éthiquement valable que la France compte parmi les huil premiers partenaires commerciaux de Pretoria? Congress explique 'pourquoi. Et aussi la filiation très explicite entre les lois sud-africaines et le que du Sud et cela lui con- nuent d'arriver en Europe vient; nous, nous voulons li- alors que nos enfants meurent régime nazi. bérer tout le peuple de ce de faim ou de sous-aliAPAR END CONSCRIPTION CAMPAIGN, UN TOUT RECENT MOUVEMENT DE JEUNES BLANCS OBJECTEURS DE CONSCIENCE. Dulcie September : Le racisme est la base même de l'apartheid. Ce système fait référence à la Bible pour poser comme postulat la supériorité de la race blanche sur les autres, considérant les Noirs comme la « sous-race» par excellence. Les idéologues de l'apartheid ont des références: l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste. Le parallèle est clair, par exemple dans le domaine des sports. L'amour du sport n'est pas axé sur l'épanouissement et la compétition amicale mais sur l'affirmation virile et supérieure de l'homme blanc. L'éducation est envisagée dans une conception par étapes : les Blancs au premier plan, puis les métis, puis les Indiens et enfin les Noirs. La bantoustanisation entre aussi dans cette discrimination institutionnelle qui confine au génocide: les Noirs sont obligés de vivre sur 13 0,10 des terres les plus sèches et les plus pauvres du pays. Les Noirs comme les juifs, hier, vivent dans des ghettos. Différences : Les enfants et les adolescents sont de plus en plus les cibles privilégiées de l'armée et de la police sudafricaines. Comment expliquez-vous ce phénomène? D. S. : Les enfants, plus encore que les adultes, réagissent spontanément contre un système qu'ils ne comprennent pas et qu'ils n'acceptent pas. Ils n'ont pas peur des forces militaires, policières. Les jeunes Blancs sont dramatiquement formés à haïr l'homme et la femme noirs, à ne les considérer que comme des statistiques, et non comme des personnes humaines. La vie des Noirs ne vaut pas cher. A mon avis, il noùs faut agir très fort avant qu'ils n'aient l'idée de construire des chambres à gaz ou quelque chose d'équivalent. Différences: Les jeunes Blancs sont-ils malgré tout sensibles à la lutte du peuple noir? O.S. : Oui, il y a de plus en plus de jeunes gens qui refusent de rentrer à l'armée. Ils mentent et se font réformer. Ils ont même créé il y a trois ans un mouvement qui s'appelle End Conscription Campaign (ECC). Ils deviennent objecteurs de conscience pour des raisons politiques ou religieuses. Différences : Depuis plusieurs semaines maintenant, ce qu'on appelle les conflits interraciaux ont fait de nombreuses Dulcie September : Réflexion victimes, notamment entre les militants et sympatisants de l'UDF et le mouvement de Buthelezi, l'Inkatha.Cette violence paraît insensée face à l'ampleur et à la priorité du combat contre l'apartheid. O.S. : Il faut vous dire que les informations qui présentent le problème comme un conflit racial entre Noirs sont fausses, la plupart du temps fournies par la police sud-africaine. Buthelezi est un fantoche très riche et de surcroît financé par les racistes au pouvoir. Il est du côté des racistes contre l'ANC et l'UDF. C'est absolument L-__________________________________________________ scandaleux. ~ ___ ------________ __ régime. Quand l'ANC a été mentation. Que les armes concréée en 1912, son objectif, qui tinuent à être livrées par les est toujours le même au- grandes puissances et en parjourd'hui, était clairement dé- ticulier la France qui occupe la fini : former une nation et une deuxième place en la matière. seule pour tous les Sud- Cela ne peut pas durer ainsi, Africains quelle que soit la c'est humainement indéfendacouleur de leur peau quelle que ble. Les organisations antirasoit leur race ou leur ethnie. cistes, le peuple français doiDifférences: Néanmoins, Bu- vent boycotter les produits thelezi se base sur des réalités sud-africains. Nous sommes ethniques et sur les divisions prêts à nous sacrifier pour requi existent, et qui existeraient couvrer demain notre liberté. en dehors de lui... Il faut passer à des mesures efO. S.: Oui, mais Buthelezi ficaces, par exemple jeter à la sème la confusion. Il veut se mer les marchandises sudprésenter comme un homme africaines qui arrivent dans les respectable alors que ses posi- ports de France. tions politiques sont floues. Différences: Existe-t-il un raLors des événements de 1985, cisme an ti-blanc en Afrique du semblables à ceux qui ont eu Sud? lieu au début de cette année, le O.S.: Oui, il existe, comment Daily News de Durban titrait: voulez-vous qu'il n'existe pas, « Les patrouilles de l'lnkatha mais c'est très minoritaire et aident à rétablir la paix dans nous à l'ANC nous nous batles townships. » Cela voulait tons contre. Nous voulons simplement dire que l'armée. construire un pays pour tout le privée de guerriers de Buthelezi monde, cela est contenu dans prête main forte aux forces de notre Charte de la liberté. l'ordre gouvernementales. Nous ne pouvons pas nous Buthelezi sème la confusion battre contre un racisme pour quand il arbore les couleurs vouloir en installer un autre. noir, vert et jaune de l'ANC et Ce serait insupportable. notre hymne pour nous impu- Différences: Les forums antiter des violences dont nous ne apartheid, comme il y en a eu sommes pas responsables. Il l'an dernier à Dakar et à Ouaest contre les sanctions parce gadougou, sont-ils réellement que précisément, intégré dans utiles part votre combat ? le système de l'apartheid, cela O.S.: Oui, c'est très imporle toucherait directement dans tant. Notamment parce que les ses affaires. Blancs d'Afrique du Sud sont Différences: Certains arguent mal informés de la réalité de qu'une application réelle des vie des Noirs qu'ils ne voient sànctions économiques porte- pas et de la philosophie de norait atteinte aux conditions de tre lutte. Cela nous permet de vie et de travail des Noirs. parler avec eux, de les inforO. S. : Nous le disons et le ré- mer, de les rencontrer. pétons, il faut des sanctions A Lusaka, et ailleurs, des globales et obligatoires. Les Blancs sont venus clandestineNoirs souffrent d'un régime ment rencontrer des membres inique. Et nous préférons ou des dirigeants de l'ANC. Et souffrir un peu plus en hâtant cela est très important pour la la fin de ce régime inique que lutte aujourd'hui, mais aussi A Paris, on les écouta anentivement. les délégués de l'apartheid furent reçus non seulement par des hommes d'affaires, mais . aussi par des représentants du gouvernement. Lorsque les Noirs d'Afrique du Sud réclament de . MANGER, BOIRE, FUMER FraltS En ce mois de mars, où nous al· Ions célébrer la journée Internationale contre le racisme, il serait souhaitable que tous les an· tiracistes, il tilre individuel et au titre de leurs organisations, prennent des initiatives pour boycotter les produits sud-africains. Nous publions Ici la liste mise au point et diffusée par le MRAP des produits dont nous sommes sûrs qu'ils proviennent d'Afrique du Sud. Boyconons-Ies le plus massivement possible 1 0 Oranges, citrons, pamplemousses : Dulspan. Avocats : Westphalla. Pommes Granny Smith, prunes, poires Beurre Bosee et Packham, raislns: Cape. Conserves Ananas: Sun Dor, Go/d Dish, Singora ou Majestlc. Salades de fruits : Ubby's, Reg/na, Singora, OC, IXL ou Sun Dor. Pêches: Gold Dish ou Sun Dor. olres : Southem Pr/de, Singora ou Sun DOT. Raisins : Bayerwa/d. Autres marques sud-africaines: Gold Reef, Sllver Leaf, Summll, Kco. Armour, Kloof, Pear/. Frans et splrlt_x Fleurs du Cap, Pearl, Sainsbury. Slellenbosch. Huguenot Heritage. confiseries Rowntree's. Bière Lion. Tabacs Rothmans. LES BANQUES DE l'APARTHEID C'eslla quasi-totalité du système bancaire français qui est engagée dans le soulien à l'apartheid. Chacun peut donc demander à sa banque des comptes à ce sujet. Mais il en est quatre qui méritent particulièrement d'être signalées, celles figurant parmi les douze premières banques du monde qui font le plus d'affaires avec l'Afrique du Sud. Dans l'ordre: la Compagnie financière de Par/bas, la Compagnie fi· nancière de Suez, /e Crédit Commercial de France, la Société Générale. LE CARBURANT DE LA PRESSION De nombreuses compagnies pétrolières alimentent la machine éco· nomlque de l'apartheid. Total a le Iriste privilège d'être le fournis· seur anitré de la pOilee et de l'armée sud-africaines, qui se livrent quotidiennement il la répression féroce que ,'on salt (1 500 morts en 20 mois, soit en moyenne près de 20 par semaine). Pensez·y en faisant le plein de votre voiture. . d'attendre indéfiniment dans pour la compréhension qui TRANSPORTS POUR BOTHA la misère, les ghettos et les banj doit régner demain entre les toustans. Aujourd'hui, nous communautés. 0 La seule compagnie aérienne française qui organise régulièrement constatons que Total distribue des liaisons avec l'Afrique du Sud est UTA. Elle transporte notaml'essence qui sert à l'armée Propos recueillis par ment, il des tarifs préférentiels, les fruits sud-africains. 0 pour réprimer les révoltes et les Chérifa BENABOESSAOOK • --D~if~fér-en-ce~s -~n~° 7~6 ~- ~Ma-rs- 1-98-8 ------------~~--------------------------------~ _ USA: ANTISEMITES _I.'APARTHE'" FRAPPE A NOS PORTES vés) du département ». L'information (la collaboration 1) consistant pour ceux-ci à déposer une demande auprès de l'organisateur du service (la Commission départementale des transports). En somme, le relais sera ainsi assuré entre ceux qui savent l'origine d'un enfant et le transporteur qui aura ainsi le loisir de laisser sur le trottoir l'élève nonconforme. Le MRAP a adressé à l'heure où nous mettons sous presse, un courrier au préfet du Morbihan, au ministre de l'Intérieur, et à l'inspection académique, afin de protester contre « cette violation flagrante de la loi fr(Jnçaise contre le racisme du 1er juillet 1972 ». 0 La ligue de défense juive B'nai B'rith a indiqué, mardi à New York, que les actes de violence antisémite, principalement ceux de vandalisme, ont augmenté de 21 % aux EtatsUnis, au cours de l'année 1987, avec un bond de 121 % en Californie où l'implantation de skinheads, sectateurs du nazisme, est particulièrement nette. C'est à New York, où réside une forte communauté juive, que les actes de vandalisme et de profanation antisémites restent les plus nombreux. Qu'est-ce qui différencie un élève qui monte de plein droit dans un transport scolaire d'un autre qui n'y aura plus accès que sous condition 1 Question à mille francs, à laquelle répond, en tout apartheid hexagonal assumé, le président du Conseil général du Morbihan. II rappelle dans une lettre datée du 12 novembre dernier, à l'inspecteur d'Académie une décision prise par le bureau du CG, le 9 décembre 1985. Lors de cette séance, ces super-élus avaient « assimilé (sic) les déplacements des élèves de nationalité étrangère au transport des usagers autre que scoaires ». Ce qui signifie, précise l'historique missive, que les « intéressés » - les gamins - paieront le prix fort (139 F par mois) et qu'ils « ne peuvent être admis dans les véhicules que dans la limite des places disponibles, sans modification de la consistance du service ». A quand les bords de mer réservés aux Français? D SEPT PAGES! Amnesty international vient de publier un document sur la situation des droits de l'homme en Europe occidentale. Un rapport de vingt pages qui en consacre sept à la France. Expulsions, extraditions de réfugiés basques, répression des objecteurs de conscience ... le dossier est lourd. On attend avec intérêt les déclarations et les actions de Claude Malhuret, secrétaire d'Etat aux Droits de l'homme. On peut trouver ce dossier à Amnesty, 4, rue de la PierreLevée, 75011 Paris. 0 Non, nous ne sommes pas à Joannesbourg, mais ... « Il me serait agréable, termine le brave décideur du Morbihan, que vous puissiez diffuser cette information auprès des chefs d'établissement (publics et pri- PROVOCATEURS On trouve actuellement dans le métro parisien nombre de _ LE PASQUA RETROACTIF EST ARRIVE graffiti antisémites. Beaucoup La loi Pasqua continue de d'entre eux font allusion à la frapper aveuglément. Pire son répression israélienne dans les application devient rétroactive. territoires occupés: « Sales Le Conseil d'Etat a annulé un iuifs, les Arabes se vengeront », « iuifs nazis ». « Egor- arrêt du tribunal de Lyon geons les iuifs » ... Certaines rendu le 1 er avril 1987 qui, faide ces inscriptions se rée/a- sant jusrisprudence, ne perment même de l'OLP. mettait pas la rétroactivité de Outre que ces mots d'ordre la machine pasqualienne. La ne sont ni ceux des Palesti- fabrication in vitro des étranniens. ni de ceux qui luttent gers expulsables va passer à contre la répression en Israël une vitesse supérieure. et dans les territoires, leur caractère antisémite est odieux. Un cas parmi d'autres: fils C'est une politique d'Etat, ce- d'un ancien combatttant de lui d'Israël, qui est à l'oeuvre l'armée française, Khaled, 22 contre le peuple palestinien. ans, tunisien, a été conduit à Se tromper (volontairement 1) l'aéroport à la sortie de la pride cible, et en des termes son de Belfort où il purgeait odieux, ça n'est ni aider le une peine de prison de quatre peuple palestinien, ni oeuvrer mois pour des faits qui remonpour la recherche de solutions tent à 1985 ! Bien qu'il se soit justes. C'est agir en provocateurs que d'employer ces tenu tranquille depuis cette mots. Qui donc a intérêt à date, qu'il ait toujours vécu en go voir la haine et /'incompréhen- France, qu'il ne parle pas un sion perdurer 1 0 mot d'arabe, qu'il n'ait pas de ~--~------------------------------------ famille susceptible de l'accueillir, on ne lui reconnaît pas le droit de vivre ici, ni de s'amender. Tu as fauté, dégage ! La loi du talion vue et corrigée par nos khomeynistes locaux ! Khaled n'a pas voulu partir. II s'est débattu et insulté les policiers. De l'aéroport, on l'a emmené au tribunal où il est jugé pour ses insultes aux représentants de l'ordre. C'est à se demander qui trouble l'ordre de quoi... 0 _JAUNE EGALE BLANC Quand un homme d'affaires japonais se présente au pays de l'apartheid, dans quelle « couleur » le classe-t-on ? Mansuétude sonnante et trébuchante oblige, Pretoria lui applique un traitement de faveur : il est considéré comme un « blanc honoraire» et de ce fait... autorisé à habiter dans les quartiers réservés aux Blancs. Malgré ses dénégations de surface, l'Empire du Levant s'est sali la face: le Japon est le premier partenaire, client et fournisseur, de l'Afrique du Sud. Huit cents hommes d'affaires japonais y sont installés. Tokyo n'a pas d'ambassadeur à Pretoria, refuse tout échange sportif et culturel, mais cela n'empêche pas Toyota et Nissan de monopoliser 60 % du marché automobile sudafricain. 0 MIN FIL BEIT? Les conséquences de la révolte des territoires occupéS et de la répreSSion brutale contre les Palestiniens agissent en ondes de choc. En Israël, bien sûr, mais aussi dans toutes les communautés juives. Et d'abord dans la plus grande, aux Etats-Unis. Les troupes israéliennes dans les territoires occupés viennent de se voir distribuer un lexique en arabe. Pas dans le but de discuter et promouvoir les échanges, ni pour tenter d'apaiser les tensions

Min fil beit (qui est à la

maison) ? Iftah el bab (ouvre la porte) ! Irfa aydek (mains en l'air)! Kazzeb (menteur) 1... n y en a long comme ça, et le tout situe bien le climat de l'intervention de l'armée israélienne face aux Palestiniens désarmés. Pour beaucoup, ce vocabulaire rappellera celui en vigueur pendant la guerre d'Algérie où l'armée française fit de ses hommes des soudards. La dérive des militaires israéliens est aussi inquiétante, toutes proportions gardées. On tirera moins, désormais, sur les Palestiniens, ça fait mauvais effet devant l'opinion internationale. « Cassez leur les os ! », demandent donc les dirigeants israéliens qui ont compris qu'au-delà d'un certain nombre de fractures, il devient difficile à un Palestinien de continuer à manifester. Mais les matraques, ça casse sur des peaux aussi dures, aussi habituées à encaisser. Alors, l'armée vient de commander dix mille matraques neuves, d'urgence. II se trouve que le menuisier chargé de la commande emploie des ouvriers palestiniens. Les matraques, ils ne les feront pas, bien sûr. Face à cette politique des dirigeants israéliens, soutenus par une large part de leur opinion publique chauffée à blanc, il y a pourtant des voix différentes. Plusieurs dizaines de milliers de citoyens israéliens ont manifesté pour la paix à TelAviv contre la répression antipalestinienne et pour une Conférence internationale. Ils étaient 40 000 selon le quotidien israélien Haaretz, 30000 - n° 76 - Mars 1988 Arabes d'Israël se réunissant, eux, à Nazareth. A l'échelle du pays, c'est énorme, sans précédent depuis les manifestations contre l'invasion du Liban en 1982. Tous les slogans insistaient sur ce qui est de l'intérêt même des Israéliens d'évacuer les territoires : « L'occupation pourrit Israël, libérons-nous des territoires occupés ... » Par ailleurs, trois cents jeunes soldats auraient refusé de servir en Cisjordanie et Gaza. En 1982, d'autres avaient refusé d'aller faire la guerre au Liban. Autrefois isolés, ces« refuzniks » sont encore montrés du doigt, peu nombreux, mais leur mouvement pose question

ils se déclarent prêts à

défendre Israël contre toute agression (et ils l'ont fait dans le passé), mais refusent de faire du maintien de l'ordre colonial hors des frontières. Certains font de la prison, perdent le bénéfice de leur année universitaire, restent incompris de leurs proches. Ils continuent, pourtant, avec le mouvement « Il y a une limite» de se battre pour que leur pays ne soit plus oppresseur et que leur armée ne soit plus une milice d'occupation. D'autres Israéliens - juifs et intellectuels pour la plupart - ont publié une pétition dans les journaux israéliens: «Pendant toutes ces années, on nous a appris à nous boucher les oreilles, à étouffer tout sentiment, à faire comme si tout cela ne nous concernait pas... On nous a amené à vivre dans la crainte, la peur, la violence et le racisme ... » C'est triste! Les répercussions, dans l'opinion publique internationale des violences commises par l'armée en Palestine, n'ont pas pu ne pas avoir d'écho dans la diaspora juive. Si en France, on en est le plus souvent resté au «Mon Dieu que c'est triste », voire à l'utilisation de la violence physique et verbale contre les juifs manifestant pour des négociations devant l'ambassade d'Israël à Paris, il en va différemment aux EtatsUnis. Plusieurs journalistes de renom, et jusqu'ici sans états d'âme devant les violences commises, ont émis des réserves parfois assez dures sur la politiques actuelle du gouvernement israélien et son affirmation de vouloir réprimer jusqu'au bout. La réaction la plus percutante fut celle du cinéaste Woody Allen.« En tant que partisan d'Israël et en tant que l'un de ceux qui ont toujours été révoltés par les hor- Manifestation de La paix maintenant, à Tel-Aviv, fin janvier reurs infligées à cette petite nation par ses voisins( .. . ), je suis horrifié par le traitement infligé par les juifs aux Palestiniens émeutiers, a-t-il déclaré. Dites! les copains, est-ce que vous déconnez ? La bastonnade des gens par des soldats pour en faire un exemple? Briser les mains des hommes et des femmes afin qu'ils ne puissent plus lancer de pierres ? Comprenez bien, s'il vous plaît, que je n'ai pas de sympathie pour la manière dont les Arabes ont traité les Israéliens. ( ... ) Mais, est-ce que je lis les journaux correctement ? A-t-on bloqué l'approvisionnement en nourriture et en médicaments pour rendre une communauté rebelle « mal à l'aise» ? A-t-on d'abord tiré de vraies balles pour contrôler les foules, et des balles en plastique seulement après que les Nations unies eurent protesté ? Parlons-nous de brutalité et même de tortures entérinées par l'Etat ? ... «Peut-être, pour tous ceux d'entre nous qui sont enracinés dans la volonté qu'Israël doit continuer à exister et à prospérer, l'obligation est de parler ouvertement et d'utiliser toute méthode de pression - morale, financière et politique - pour porter un coup d'arrêt à ce cheminement pervers. » De telles réactions, nul doute que le régime israélien y soit attentif, car ce qui meurt aussi dans les rues de Gaza, c'est une conception idéale d'Israël, jusqu'ici largement partagée. Et l'on n'a sans doute pas encore fini d'encaisser, en Israël, le choc d'une politique gouvernementale de répression aveugle qui divise la société israélienne et fissure chaque jour plus largement le consensus international dont bénéficiait le pays. 0 RENE FRANÇOIS • '1 UN BON RACISME l Le Club de l'Horloge, c'est la boîte à idées de l'extrême droite et d'une grande partie de la droite. Quand il parle d'antiracisme, autant y aller. Et l'on assiste alors à un gala de perversion des mots et des concepts. Plus de 200 personnes assistaient le week-end du 23-24 janvier au XIV· colloque du Club de l'Horloge intitulé Antiracisme et Identité. Selon les orateurs, l'antiracisme ne relèverait que d'une supercherie sémantique au service de ces «professionnels de l'antiracisme » que sont le MRAP, la LICRA, SOS-Racisme ... Après avoir posé le racisme comme un fait incontournable (l'homme est et sera toujours un loup pour l'homme), l'antiracisme est à son tour disqualifié comme utopique. Il ne saurait être qu'un racisme travesti. Resterait donc seulement à choisir quel racisme on veut promouvoir. La démarche antiraciste se voit alors partagée entre deux camps : il y aurait un antiracisme «instrumentai » forgé par « les lobbys de l'immigration» et un « antiracisme légitime », celui du Club de l'Horloge et d'un certain nombre de Français. L'antiracisme instrumental, type MRAP, est qualifié de «racisme antifrançais », puisqu'il serait une tentative de subversion de la culture française par des cultures allogènes (essentiellement musulmanes, préciseront la plupart des orateurs) au nom de la valorisation de toutes les cultures. Ce serait le racisme de certains Français contre d'autres Français, une nouvelle forme de complot ou de guerre civile. A cet antiracisme instrumental le Club de l'Horloge oppose un antiracisme légitime - ou o LILLE: LE RECTEUR EST UN BON Après divers incidents racistes. dont des distributions de tracts antisémites. aux portes d'établissements scolaires. les autorités de tutelle ont réagi_ Dans une lettre-circulaire. le recteur de Lille souhaite. Jean-Yves Le Gallou, du Club de l'Horloge. racisme légitime - prônant lui aussi le respect des différences, c'est-à-dire, pour le Club de l'Horloge, la reconnaissance pour chaque culture d'un territoire particulier - à l'image des bantoustans d'Afrique du Sud. A son avis, la société multiculturelle ne saurait être qu'un leurre (voir le Liban, le Sri Lanka, l'Inde ... rappelleront les orateurs) : c'est le lieu de conflits mortels pour chaque culture. L'Inde des castes avait su gérer, selon Michel Leroy se fondant sur les travaux de l'indianiste Alain Danielou, les différences culturelles par l'instauration d'une hiérarchie entre les hommes, de spécialisations héréditaires et d'un principe de répulsion entre les castes ... Le racisme, affirme-t-il, ne surgira en Inde qu'avec la fin des formes anciennes de hiérarchie et avec l'idéologie éga- « Vis-à-vis des élèves d'origine étrangère et de leurs parents, un comportement chaleureux, attentif et compréhensif ». Le rectorat demande que les enseignants soient vigilants contre tout « risque de développement d'idéologies racistes et antisémites ... de rejets, d'exclusion ou a fortiori de violences basées sur des considérations litaire. Revenir à un système profondément inégalitaire apparaît ainsi comme essentiel pour le Club de l'Horloge pour lutter contre les conflits culturels. Autre moyen de lutter légitimement contre le racisme : la suppression de la Loi Pleven de 1972 et le retour à la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. S'il n'est plus de bon ton de parler de « différences raciales », le Club de l'Horloge résout la difficulté en leur substituant les «différences culturelles ». Il s'agit aussi pour lui d'aider certaines nations européennes à se déculpabiliser d'un passé trop lourd. « L'Occident n'a pas le monopole de la discrimination », affirmera Michel Leroy, secrétaire général du Club. C'est bien là que voulait en arriver ce XIV· colloque : justifier et fonder un « bon racisme ». d'opinion, d'origine, de couleur ou de religion ». Il affirme enfin que l'école doit « former de futurs citoyens responsables... avec la volonté de respecter la personnalité de chacun et de nous enrichir mutuellement de nos différences ». C'est le minimum, mais par les temps qui courent, ça fait plaisir à entendre. 0 • MALIK: LE « PETIT CASSEUR» ET LES CRAPULES « On se souvient de la mort du petit casseur gauchiste nommé Malik Oussékine. Malgré sont état de santé lamentable, il n'avait pas hésité à attaquer en pleine nuit les forces de police chargées du maintien de l'ordre et de la sécurité... Le monde politico- médiatique avait insisté sur la nationalité française du petit casseur. Or, s'il a été dispensé du service militaire, ses frères ont tous, sans exception, choisi de faire le leur en Algérie ... » Ce texte bas, mensonger et raciste, a été publié par le Front national dans son hebdo National-83. Un véritable appel au meurtre posthume. « Des Français comme Malik Oussékine, on peut facilement s'en passer », poursuit ce torchon haineux écrit à la matraque. Que ces marchands de haine se rassurent: des matraqueurs à moto se sont déjà chargés du sale boulot. Les crapules les justifient. D • METRO: COMMERCANTS ARABES, OUT! Quarante-quatre commerçants vendant des fruits et légumes dans le métro parisien, et qui ont l'inconvénient d'être tous arabes, sont condamnés au chômage. La société Prometro, mandataire exclusif de la RATP, en a ainsi décidé. Celle-ci se base sur un cahier des charges dont les intéressés n'ont pris connaissance qu'un mois avant le « verdict ». Et cela, malgré le caractère totalement légal de l'activité de ces travailleurs. Les personnes pressées, bien contentes de pouvoir acheter sur leur trajet des mandarines ou des kiwis, en feront les frais. L'Association des commerçants des transports souterrains (ACTS 2, rue de l'Exposition, 75007 Paris), a entamé une action pour exiger l'annulation de la mesure, ainsi que l'ouverture de négociations entre les commerçants 1I~ ~~et~la~RA~T~P~.~D~ ______ ~ • L'AFFAIRE PAPON CONTINUE Dans l'affaire Papon, ancien préfet poursuivi d'une plainte pour « crimes contre l'humanité » pour son rôle dans la déportation de juifs sous l'occupation, le tribunal de Bordeaux vient de rejeter la demande du Parquet d'une « expertise historique ». Le ministère public avait invoqué le besoin de resituer l'affaire dans son cadre pour mieux comprendre le rôle de l'ancien préfet, sous l'occupation nazie. Pour les parties civiles (MRAP, LICRA, LDH et victimes), on considérait que cette demande était une manoeuvre de procédure destinée à retarder encore d'éventuelles inculpations. Déjà, en 1982, la procédure avait été annulée, tout se passant comme si Maurice Papon ne devait jamais être jugé. Avec la décision de Bordeaux, les choses reprennent leurs cours. D'autant que le magistrat instructeur a déclaré qu'il allait maintenant aborder « une phase active d'instruction » avec convocation des parties civiles. Il serait temps : les trente et une victimes de déportations qui ont porté plainte contre Maurice Papon, restent à ce jour, inculpées de « dénonciation calomnieuse ». Depuis 1985 ! o PREMIERE MANCHE :GAGNE Soutenu par un large collectif - dont le MRAP - le Comité des résidents du foyer Bisson a remporté la première manche du bras-de-fer qui l'opposait depuis plusieurs mois au BAS (Bureau d'aide sociale) de Paris. Celui-ci avait assigné en justice l'ensemble des résidents dont il demandait l'expulsion. Le tribunal administratif a tranché courant février: le BAS a été débouté. Bénéficiant de la solidarité des autres foyers pour s'opposer à la politique d'exclusion et d'expulsion de la Mairie de Paris, de la présence de plus de 500 personnes lors de la manifestation Différences - n° 76 - Mars 1988 ~----------B~P----------~ Toutes les époques, tous les champs de la recherche historique accueillis dans une grande série de référence. La «BHP» s'impose d'ores et déjà comme un outil de travail de premier ordre pour le chercheur, l' enseignant, l'étudiant; comme pour le lecteur éclairé, que les nouvelles approches, les méthodes et le dynamisme des disciplines de l'Histoire ont rendu exigeant. Doris BENSIMON LES GRANDES RAFLES Julls en France 1940-194/6 Au lendemain du procès Barbie, une synthèse réalisée à partir des sources les piuS récemment disponibles. 1 vol. 13,5x21, 148 pages, 85F. Michèle SALINAS L'ALGERIE AU PARLEMENT 1958-19S2 Quatre années de débats parlementaires sont analysées dans ce livre qui offre une lecture originale et neuve du conflit algérien. 1 vol. 16x21,5, 256 pages, 135F. LGÉRIE 1\RLEMEN 1\ ', 1' BIbliothèque historique PrIvat Jean-Noël MARCHANDIAU L'ILWSTRATION 1843-19"" Vie et morl d'un journal Voici l'histoire d'un magazine enfanté dans la joie, en 1843, et mis à mort en 1944. Un siècle d'Histoire vécu au quotidien dans la salle de rédaction d'un organe de presse à plus d'un titre exemplaire de cette période. 1 vol. 17,5x 24,5,344 pages, 160 illustrations, 168 F. Je:m-\oi.'l \larch.mdiau \/1' FT \tORT DT\ JOl K\AL Bibliothèque historique Privat CHEZ VOTRE LIBRAIRE ou Privat 14, rue des Arts, 31068 Toulouse Cedex. Tél. 61 230926 de soutien du 23 janvier, les travailleurs immigrés du foyer Bisson poursuivent leur revendication. Le BAS introduira probablement un recours. Après la disparition en l'espace de dix ans de huit foyers gérés par le BAS, la tentation est trop grande de poursuivre une bien mauvaise tradition. D Privat o JUIFS d'URSS: REÇUS A L'AMBASSADE Le Comité de solidarité avec les juifs d'URSS nous informe que sa présidente, Aviva Koutchinsky, sera reçue chaque mois à l'ambassade soviétique de Paris. La présidente du CSJU, qui sera à chaque fois accompagnée de personnalités françaises, s'est déclarée satisfaite de la décision soviétique. Elle a cependant souligné que son association continuerait son action pour l'ouverture des frontières aux juifs d'URSS. D 1111 BLOQUER LE STARTER Le Pen candidat ? Bien sûr, la déclaration d'intention est affichée, encore lui faudra-t-il réunir les cinq cents signatures nécessaires. Le leader de l'extrême-droite dispose d'environ trois cent cinquante mandats de ses députés, Conseillers généraux et régionaux. Il lui faut donc débaucher près de deux cents élus non inscrits au Front national. Et c'est tout le sens de la démarche du MRAP que d'empêcher cela. Le MRAP a choisi de s'adresser à tous les maires de France, en leur demandant de refuser leur paraphe à un candidat ouvertement xénophobe et qui tient des propos racistes. . .. « Il est normal, dans une démocratie, que des opinions très diverses s'affrontent et aucune ne doit être censurée. Mais le racisme s'est pas une opinion,. il est condamné par la loi comme un délit ou comme la composante de certains crimes. Or, M. Le Pen est l'unique prétendant à la candidature présidentielle, le seule dirig~ant d'une formation politique qui ait été condamné pour racisme par la justice française ... La propagande désignant les immigrés comme responsables de tous les maux dont nous souffrons, et prônant leur rejet, ne peut qu'encourager les violences à leur encontre. qui ne fait que les bafouer. On notera que dans un certain Quoi qu'il arrive, ne craigneznombre de cas, les auteurs de vous pas, si vous donnez votre meurtres racistes sont des signature à M. Le Pen, que adeptes du Front National (à votre nom reste associé à ses Menton, Chateaubriant, Hau- entreprises périlleuses d'aubourdin, Cannes, Albertivlle). jourd'hui, peut-être de Dès lors que les problèmes éco- demain?.. Nous voulons nomiques, sociaux et politi- croire que vous refuserez ques sont abordés en terme d'accomplir un geste préjudid'intolérance et d'exclusion, il ciable aux idéaux de liberté, y a danger pour la démo- d'égalisté et de fraternité, qui cratie ... » fondent la tradition, les luttes Cette candidature à la pré si- et les espoirs de notre dence de la République accroÎ- peuple.» Ces dessins sont extraits de l'Album de Pat, édité avec la collaboration du MRAP-Dreux. Qu'e:ST_ CE QU' .l'Ai Pu CHAAl6E,. ou trait ses moyens pour répandre Signeront? Signeront pas? sa propagande mensongère et Personne ne pourra dire qu'il donnerait à l'étranger une a accordé son aval, son parraiimage négative de la France. nage à Le Pen sans savoir: le Peut-être, sans approuver le MRAP fait également circuler discours et les méthodes de M. un dossier très complet sur les Le Pen, pensez-vous que c'est déclarations racistes et les conaux électeurs qu'il revient de se damnations de Jean-Marie Le prononcer. Mais on ne peut Pen. Un raciste en course? Il assurer les valeurs républicai- faut tout faire pour bloquer le ~ L-n_e_s_e_n _s_ o_u_t_en_a__n t_ u_n_ _h _o_m_ m _e __s _t_ar_t_er__,_D_ ___________________________________________________________________ ~ • ET DE DEUX! Condamné fin septembre 87 par le tribunal de Nanterre pour ses déclarations sur les chambres à gaz, Le Pen avait fait appel de cette décision. Plaidant la « liberté d'expression » face aux avocats des parties civiles (MRAP, LICRA, Tsiganes ... ), les défenseurs du Front national n'ont pas eu plus de succès devant la 14" Chambre d'appel de Versailles. Mieux encore, les juges d'appel ont ajouté à leur condamnation le versement de mille francs à chacune des douze parties civiles. L'arrêt rendu par la Cour stipule que les «propos litigieux (le point de détail...) portant atteinte à des valeurs aussi fondamentales que le souvenir des victimes des génocides, le culte des morts et les convictions profondes et respectables de la quasi-unanimité de l'opinion publique, ont été tenus au cours d'une émission de radiodiffusion à grande audience, sans que la contradiction ait pu être immédiatement et efficacement apportée ». Me Wagner, l'avocat de Le Pen avait, lui, défendu que la liberté d'expression devait jouer « sans contrainte, surtout lorsqu'elle repose sur une recherche historique, la critique étant indispensable à la liberté de penser dans une démocratie véritable ». En clair : Le Pen persiste et signe, continuant aussi de considérer que les thèses des « historiens » révisionnistes, qui nient l'existence des chambres à gaz ont une quelconque crédibilité. 'L'avocat du chef du' FN a d'ailleurs annoncé son intention de se pourvoir en cassation. 0 • LE PEN: LES REPUBLICAINS S'INTERROGENT Le Parti républicain va sortir un livre sur La question Le Pen, avec des contributions d'intellectuels et de journalistes, comme Philippe Sollers, Serge Klarsfeld, Jean-Edern Hallier, Jean-François Kahn, Guy Sorman... et d'autres encore. Côté politique, c'est à Jean Lecanuet, Jean-Claude Gaudin, Michel Noir ou Bernard Stasi que le parti de François Léotard a fait appel. 0 Le Pen reçu pour la quatrième fois à L 'heure de vérité, et voilà le travail: des inscriptions racistes et antisémites faites la nuit même sur les murs du centre commercial de Saint-Denis. Le Pen président? Voilà le programme que les skins qui le suivent voudraient lui voir appliquer ... Le comité de Saint-Denis du MRAP va porter plainte contre les auteurs de ces inscriptions. REVUE(S) Le Courrier de l'ACAT (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture), nO 82 publie un dossier sur Droits de l'homme et médias: la désinformation, les risques du métier, la déontologie de la presse, les agences ... vingt pages utiles et simples. 25, rue Saint-jacques, 75005 Paris. Hommes et migrations n° 1 109 présente une reprise partielle du rapport Hannoun sur le racisme et les discriminations en France. 40, rue de la Duée, 75020 Paris. Le Mexique en treize pages dans le Bulletin du CITIM (Coordination-information tiers monde). Beaucoup d'éléments sur la situation économique et politique du pays. 70, rue de Bayeux, 14000 Caen Lendépendans, organe de l'UPLG (Union populaire de libération de la Guadeloupe) donne régulièrement une autre image des Antilles: celle d'un quotidien pas facile à vivre. BP 40, .petit-Bourg, Guadeloupe. Royaliste, le journal de Bertrand Renouvin publie deux pages sur « Devenir français? ». Une réflexion sur le rapport de la Commission des sages, jugé positif mais insuffisant. 1 7, rue des Petits-Champs, 75001 Paris. Celsius nO 4, outre de nombreuses informations sur l'extrême droite internationale, publie une réflexion d'Yves Plasseraud : « Droit à la différence ou société métisse ». « Vaincre le racisme », c'est le dossier de Croissance des jeunes nations dans sa livraison de mars. Un numéro spécial à la veille des élections. 163, bd Malesherbes, 75859 Paris cedex 1 7. La résolution du Parlement européen sur les langues et cultures des minorités régionales et ethniques est intégralement publiée dans le Peuple breton de janvier. BP 30 " 22304 Lannion cedex. Les acteurs beurs font la une et le dossier d'Actualité de l'émigration (nO 117). Dixhuit pages où se croisent Adjani, Souad Amidou, Smaïn et beaucoup d'autres .. 2A (Autogestionl'Alternative) vient de sortir son nO 200. Au sommaire, une interview d'Alain Bensa, chercheur et enseignant, sur la Nouvelle-Calédonie. Les bavures policières, c'est le titre du numéro spécial d'Article 31 sous-titré Police et extrême droite. On y rencontre aussi les polices municipales, les milices patronales, les groupes fascisants dans la police. Le mensuel publie aussi la liste (interminable) des victimes de bavures. Article 31 toujours avec, dans sa livraison de janvier, des articles sur RadioCourtoisie, les VRP de l'apartheid et le club de l'Horloge. BP 423, 75527 Paris cedex Il . Les tsiganes sont trop souvent rejetés. Mais qui les connaît? Les Etudes tsiganes abordent régulièrement les problèmes et la culture de cet important groupe de population. Le dernier numéro (87/4) contient aussi une très longue discographie du jazz tsigane. 2, rue d'Hautpoul, 75019 Paris. Peuples en marche annonce la publication d'une série d'articles consacrés aux droits de l'homme tout au long de l'année en cours. La « une » de janvier est placée sous le signe de l'alerte, avec en illustration cette phrase de Saint-Exupéry: « Mais voici Nous, magazine de la CSF, a qu'aujourd'hui, le respect de consacré deux pages de son l'homme, condition de notre numéro 92 aux gens du ascension, est en péril. )} voyage et quatre aux réfugiés. 10, rue Lanterne, 69001 lEI L:Charles:::: ~ ~~ 17 janvier 2012 à 14:14 (UTC)3~,~r~u:e~RCharlesu~e:t,~7~5~0~/~9Charlesa~n~s __ ~L~y~o~n~.~T~é/~.~:~7:8~.2~9~.6~7~.9~9~. ______ J Différences - n" 76 - Mars 1988 • PITEUSE AFFAIRE Les expulsés iraniens arrivent à la base militaire d'Evreux, de retour du Gabon où ils avaient été expulsés. Sept d'entre eux sont autorisés à demeurer en France; les autres, parmi lesquels trois Kurdes de Turquie, sont accueillis par l'Espagne. M. Pasqua avait pourtant juré ses grands dieux que rien ne le ferait revenir sur sa décision! (14 janvier). • DECES. Décès de Sean MacBride à Dublin, à l'âge de 83 ans. Cet avocat fut ministre des Affaires étrangères de son pays au lendemain de la guerre et, treize ans durant, président d'Amnesty International et doublement honoré pour son action en faveur de la paix par le prix Nobel en 1974 et par le prix Lénine en 1977 (15 janvier). Nantes rejette la requête de M. Henri Roques tendant à ce que soit rapportée l'annulation de la soutenance de sa thèse qui tend à nier l'existence des chambres à gaz pendant la Seconde Guerre mondiale. Depuis l'annulation de sa soutenance de thèse, en juillet 1986, M. Roques ne peut plus se prévaloir du titre de docteur de l'université de Nantes (18 janvier). Le 24 janvier, en Afri- L'AMBASSADEUR la sympathie des cercles que du Sud, se dérou- politiques sud-africains. laient les obsèques de Comme tous les autres Percy Qoboza, rédac- ambassadeurs, Edward teur en chef de City E'I'AIT J. Perkins, qui est le Press, l'hebdomadaire Il premier ambassadeur le plus lu par les Noirs noir en Afrique du Sud, de ce pays, et critique a sa résidence officielle virulent de la politique dans une banlieue bourde ségrégation, mort geoise blanche de Jod'une maladie de coeur. NOIR hannesburg. La police avait interdit Il n'était là que depuis drapeaux et pancartes '--__________ -' novembre 1986 et déjà, ainsi que tout discours en octobre 1987, ses sans son autorisation préalable. Au VOISlDS menaçaient d'engager des premier rang des participants au ser- poursuites légales contre lui. Le leavice funèbre, on a remarqué la pré- der de l'opp'osition du voisinage afsence d'Edward J. Perkins, l'ambas- firme que l'ambassade a été conversadeur des Etats-Unis en Afrique du tie en country club. Sud. Sa nomination, en 1986, avait été beaucoup critiquée, tant aux Etats-Unis qu'en Afrique du Sud, parce qu'il est noir. Les week-ends, le bruit émanant des cours de tennis, de la piscine et des piques-niques vous mettent les nerfs à bout. A une occasion, un orchestre des Marines a même joué du jazz dixieland à tout rompre pendant toute une après-midi ! 0 Il s'est avéré qu'il a su remplir son rôle tout en gardant ses distances avec les appareils de l'apartheid. Ce qui, en plus de sa couleur, ne lui a pas valu • CHEZ LE PROCUREUR. Trente jeunes de la cité HLM de Villiers-le-Bel (Val-d'Oise) et leurs familles manifestent au Palais de justice de Pontoise pour exiger du procureur de la République que soient reçues leurs plaintes après la véritable chasse aux jeunes et aux immigrés à laquelle se sont livrés contre eux les policiers dans la soirée du 23 décembre. • EXPULSION. Daby Pradeep-Kumar, d'origine mauricienne, ancien journaliste à la Bourgogne Républicaine à Dijon, disparaît lors d'un contrôle d'identité. A la suite de ce contrôle, il fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière (15 janvier). • EMIGRATION. Le dissident juif soviétique, lossif Begun, quitte l'URSS pour Israël, en compagnie de six membres de sa famille (18 janvier). • L'HONNEUR D'ISRAEL. Une trentaine d'Israéliens manifestent devant l'ambassade d'Israël à Paris contre la répression dans les territoires occupés de • MORTALITE INFAN- Cisjordanie et de Gaza TILE. La mortalité infan- (19 janvier). tile est dix fois plus élevée • LA LIE REMONTE. Un chez les bébés noirs de mouvement fondé en démoins d'un an que chez cembre dernier à l'occales Blancs, en Afrique du sion du rassemblement à droite, à l'exception de Raymond Barre et du candidat gaulliste. » (24 janvier). . • ANNIVERSAIRE. Le Comité Olympique du sport non racial en Afrique du Sud (SANROC) fête son 25e anniversaire (24 janvier). • ENCORE 1 Un policier d'Echirolles, dans la banlieue de Grenoble, tue un jeune Gitan de 18 ans d'une balle dans le cou. Selon la sûreté urbaine de Grenoble, le policier a tiré en état de légitime défense (24 janvier). • MISKITOS. A la tête d'une délégation Miskito de neuf personnes, Brooklyn Rivera, dirigeant du mouvement indien au Nicaragua, arrive à Managua pour engager des pourparlers de paix et pour négocier l'autonomie des Miskitos avec les dirigeants sandinistes (24 janvier). • SALIM RETROUVE. Salim Mammeri, le jeune homme de 17 ans, fils d'un couple franco algérien qui a refusé de rentrer en Algérie après avoir passé ses vacances de fin d'année en France chez sa mère, déclare qu'il est prêt à retourner voir son père à condition d'avoir la« garantie» de pouvoir revenir en France . Le non-respect des engagements pris de Selim risquait de freiner le mouvement des visites transfrontières (26 janvier). • REPARATIONS. On apprend de plusieurs sources à New York que la République démocratique allemande mène actuellement des conversations avec les dirigeants des organisations juives américaines sur l'octroi de possibles réparations aux juifs victimes de l'Holocauste (26 janvier). Cinq jeunes avaient été mordus par un chien policier et une jeune fille avait eu le coude brisé (15 janvier). Sud. pied-noir de Marseille, Fi- Et le pays dépense sept délité et Renouveau, re- • EMIGRATION. Le ma- • TRANSFERT. La SO- fois moins pour l'éduca- vendique comme objectif thématicien Naum Mei- NACOTRA, organisme tion d'un Noir que pour de « réhabiliter l'OAS et man, « refuznik» depuis celle d'un Blanc, selon le d fi' At 1 d e ans est autorl'se' a' ganisées à Paris et dans toute la France contre Jean-Marie Le Pen qui passait le même soir à l'émission télévisée L 'heure de vérité (27 janvier). • HISTOIRE TELEVISEE. Un jeune Noir de Soweto qui avait raconté récemment, au cours d'une émission de télévision, comment il avait été torturé par la police durant sa détention, est retrouvé mort avec une balle dans la tête cinq jours après avoir été interrogé par la police au sujet de sa prestation à la télévision (27 janvier). • LE RETOUR DE LA FANE. Relevé dans le Journal officiel du 27 janvier 1988: « Par décision n° 67 077 du 26 juin 1987, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé le décret du 24 janvier 1985 portant dissolution de l'association Fédération d'action nationale et européenne (FANE). » Eh oui, il s'agit de l'ancien groupuscule néo-nazi qui signa notamment l'attentat contre le siège du MRAP le 26 juin 1980. Son dirigeant, Marc Fredriksen, fut auparavant membre du Front national de Jean-Marie Le Pen (27 janvier). • ARRETE. Le meurtrier d'un ouvrier algérien, tué le 9 janvier dernier à Béziers (Hérault) est arrêté : Pierre Castain, un peintre en bâtiment de 36 ans a déclaré avoir agressé deux Maghrébins pour les voler (30 janvier). • IMMIGRATION. Le Comité intergouvernemental sur les migrations de Genève indique que 658 Juifs soviétiques ont été autorisés à émigrer en janvier, ce qui est le chiffre le plus bas depuis neuf mois. Mais le Comité déclare qu'il est trop tôt pour dire que le chiffre reflète une nouvelle politique visant à diminuer le nombre des autorisations d'émigrer (1er février). de gestion de foyers pour e Glre reconnGl re e ouz , les travailleurs immigrés, Comité de l'ONU contre b·le n-Jio n de' d e son ac- qUI' tter l'URSS pour Is - • VETO. Aux Nations envisage de transférer une l'apartheid (16 janvier). tion ». raël (26 janvier). unies, les Etats-Unis oppartie de ses services à des Le mot d'ordre avancé posent leur veto à un proj sociétés privées (15 jan- • THESE ANNULEE. Le par ce mouvement est le • ASSEZ 1 Enorme suc- jet de résolution (adopté 1 Il vier). tribunal administratif de suivant: « Pas d'ennemi cès des manifestations or- les 14 mem- I~~--------Charles----------------------------17 janvier 2012 à 14:14 (UTC)~ • Le bateau de l'amitié, qui devait ramener cent trente-trois Palestiniens en Israël, ne partira pas. Le ferry Sol phryne, pressenti pour le voyage, a été gravement endommagé par une charge explosive le 15 février. bres) condamnant la répression dans les territoires occupés par Israël (1 er février). • MEURTRIERS RACISTES. A Mobile (Alabama) s'ouvre le procès de deux membres du Ku Klux Klan accusés du meurtre d'un adolescent noir de 19 ans (2 février). • PASQUA EN REPERE. Neuf ressortissants des îles du Cap-Vert dont quatre avaient été expulsés de France vers le Sénégalle 31 décembre dernier, alors qu'ils étaient en possession de visas, assignent en référé le ministre de l'Intérieur devant la première Chambre du tribunal de grande instance de Paris (2 février). • AGRESSION LEPENISTE. Des membres de la Jeunesse du Front national (FNJ), armés et casqués, agressent des étudiants de l'université de Paris 1 Tolbiac. Une vingtaine d'étudiants sont blessés dont trois grièvement. Après le lycée Corot à Savigny-sur-Orge et le lycée Balzac à Paris, c'est la troisième agression du genre en l'espace d'une quinzaine (3 février). République à l'Opéra pour protester contre la répression en Cisjordanie et à Gaza (3 février). • AH BON 1 Le chancelier Helmut Kohl indique que la RFA condamnait toujours l'apartheid malgré la visite que vient d'effectuer le chef de la CSU Franz-J osef Strauss en Afrique du Sud (4 février.) • VOLTIGEURS. L'organisation du peloton voltigeur moto porté impliqué dans la mort de Malik Oussekine en décembre 1987 pourrait être revue et corrigée. Le préfet de police de Paris confirme qu'« une nouvelle adaptation des moyens et des méthodes, de cette unité très spéciale, était à l'étude ». (4 février). • EMBARGO. Le Comité spécial des Nations unies contre l'apartheid exprime sa préoccupation face au développement du commerce entre le Japon et l'Afrique du Sud (14 0/0 d'augmentation de 1986 à 1987) (5 février). • PAS DE VISA. Pretoria refuse d'accorder un visa d'entrée au poète afrikaner Breyten Breytenbach, • MANIF. Des milliers qui vit en France et voude Parisiens défilent de la lait retourner dans son Différences - n° 76 - Mars 1988 Depuis le début de 1988, les Australiens célèbrent en grande pompe le bicentenaire de leur installation sur le continent austral. il y a cependant des habitants de l'Australie qui ne participent pas à cette liesse et qui, même, y apportent une fausse note retentissante. Ce sont les aborigènes, ceux qui occupent l'Australie depuis 40000 ans, ceux dont les convicts débarqués il y a deux cents ans ont bouleversé l'existence. ils sont 160000, soit 1 % de la population. Depuis le début de l'année, les militants indigènes proclament véhémentement leur qualité de premiers occupants du continent. Dès le 1er janvier, ils ont conspué le Premier ministre, Bob Hawke. Le 20 janvier, un millier de personnes ont manifesté à Adélaïde. A Sydney, le 26 janvier, plus de 4 000 aborigènes ont manifesté pendant la parade navale au cours de laquelle les Anglais ont fait don aux Australiens du bateau Endeavour, le premier navire britannique ayant abordé en Australie. Aux cris de « Deux cents ans de meurtres» ou « l'Australie blanche a une histoire noire », les aborigènes appellent la communauté internationale à reconnaître leur droit de souveraineté sur l'Australie qui, affirment-ils, leur a été volé par les colons européens depuis deux cents ans. 0 pays natal pour y être fait docteur honoris causa de l'université du Cap. (8 février). • SHOA A MOSCOU. Le film de Claude Lanzman, Shoa, est présenté à la Maison des cinéastes, dans le cadre du Festival du film français de Moscou, en présence de l'auteur. C'est la première projection en URSS de cette oeuvre (8 février). • MENTEUR. Dans son rapport de 200 pages remis au gouvernement de Vienne, la commission des historiens chargée d'enquêter sur le passé du président autrichien Kurt Waldheim, reconnaît une « certaine culpabilité» de celui-ci, « ne serait-ce que par le simple fait d'avoir été au courant des violations des droits de l'homme commises sur les lieux où il était engagé» et dans la mesure où «par manque de courage », il n'a pas rempli « son devoir humain d'intervenir contre l'injustice ». Or, Kurt Waldheim a toujours nié avoir été au courant de ces crimes. Ce rapport divise profondément la coalition gouvernementale (8 février). Agenda réalisé par ROBERT PAC Dossier réalisé par RABHA ATTAF et MARIE·JEANNE BERNA FEMMES .... A PART Différences - 'n" 76 - Mars 1988 Femmes de l'immigration ... les questions ne manquent pas. Double handicap, double richesse, double courage? Qui le sait? Ces femmes sont à part. De fait. leur insertion se fait plus lentement, elles passent souvent à côté des grands mouvements sociaux - féministes en particulier et elles ont pourtant un rôle essentiel. Dans leur famille, dans l'avenir de leurs enfants - nos concitoyens - et dans le quotidien. Différences ne pouvait manquer cette différence-là. Femmes, immigrées, elles ont fait bouger la société, bousculé des archaïsmes et des poncifs. Le premier d'entre eux, en ce qui les concerne : ni plus ni moins dominées que vous et moi dans leurs rapports aux hommes. Différentes. Chantal est animatrice dans un centre social. Elle a participé, il y a une dizaine d'années, à des luttes féministes, elle se rappelle: Il Au début, j'étais persuadée que les femmes immigrées, maghrébines en particulier, avaient un statut épouvantable au sein de leur communauté: soumises, dominées, exploitées. Il n'en est rien. Elles ont au contraire un pouvoir énorme, central. Pas toujours reconnu, mais omniprésent. En fait elles sont très fortes. Il Force, vitalité ce sont des mots qui viennent spontanément quand on demande à des femmes françaises ce qu'elles pensent des femmes immigrées. Quelquefois, ces mots arrivent après un flottement, un court balancement où tanguent encore un certain nombre de clichés. Même point de vue chez Christine, militante au Planning familial: Il Ces femmes vivent parfois dans des conditions très très dures, déplorables et elles tiennent bon, alors que nous, on est amenée à craquer plus facilement. Elles ne baissent jamais les bras. Il Qu'est-ce qu'elle pense avoir gagné auprès d'elles? La réponse est nette : Il La couleur, le rythme, elles ont brisé une Il Il 1111 Dames respectables de souche polonaise, jeunes Beurres lycéennes: les femmes immigrées apportent de la couleur, de la force, de l'entêtement, des traditions riches. certaine froideur, une grisaille générale. C'est vrai à un niveau concret, les tissus, la forme des fringues, les bijoux, les coiffures, la musique, l'expression corporelle, là elles ont tout bouleversé. Mais, encore plus à un niveau profond, souterrain, elles ont agi comme un révélateur.1I Christiane hésite, cherche ses mots. « L'identité française, c'était pour moi quelque chose de plat, de neutre, d'uniforme. Les femmes, maghrébines et africaines surtout, ont mis en évidence une différence que j'avais enfouie. Ça a l'air idiot, mais, un jour, je me suis rappelée que ma grand-mère était italienne. C'est une chose que je ne "voyais" plus et qui m'a fait chaud au coeur. Du coup, j'ai regardé autour de moi, j'ai découvert que je n'étais pas la seule. Ça a profondément modifié mon rapport aux gens. Comme si la France se peuplait de couleurs, d'odeurs, d'individus, au lieu d'être une masse informe, homogène. Il Toutes ne voient pas les choses de manière aussi positive. Selon Anne Zelenski, présidente de la Ligue des droits de la femme s'il y a eu « un rendez-vous manqué, c'est bien celui des féministes et des femmes immigrées Il. En 1979, au tout début de la révolution en Iran, elle faisait partie des dixhuit femmes qui se sont rendues là-bas pour soutenir la cause des Iraniennes. « Une opération de promotion pour certaines d'entre nous, reconnaît-elle aujourd'hui. Pourtant, d'autres y croyaient fermement. Il Mais au cours d'une visite à un ayatolah, la polémique éclate. Doivent-elles se couvrir d'un tchador en sa présence? Le faire c'était prendre le risque de perdre sa radicalité, la teneur même du message de solidarité que les féministes voulaient faire passer. Mais ne pas le faire, n'était-ce pas afficher un certain mépris inacceptable de la part de femmes occidentales? Le Comité ne se remettra pas de ce dilemme. Il ne verra jamais le jour. Pas plus qu'en France n'existera de grand mouvement regroupant féministes et femmes immigrées. Les premières - trop paternalistes? - se sont pourtant précipitées au-devant de ce qu'elles croyaient être de nouvelles troupes. Les autres ont reculé devant les avances qui leur étaient faites. « Elles se trompaient d'histoire d'amour, on n'est pas celles que vous croyez, résume avec humour Halima qui milite dans une association de quartier à Montrouge. Et on n'a pas envie de vous ressembler, de copier un mode de fonctionnement qui ne nous concerne pas. Il Un restaurant à Paris. un moulin à mil à Sayamanna, des poteries au Brésil : voici les cc tontines » de Fémin'autres Pour elle, « la société française évolue vers un effacement des rôles masculin-féminin, soi-disant asexué, en fait profondément masculin. C'est un cheminement qui convient peutêtre à un mode de vie occidental, mais qui n'est pas du tout adapté aux cultures africaines, du Nord au Sud. Dans ces pays, le statut de la femme devra se modifier, mais à nous d'inventer, de chercher comment. On ne peut pas plaquer un modèle de lutte qui partait d'une situation précise, la place de la femme dans le monde occidental, sur une réalité radicalement différente Il. Elle rappelle aussi qu'en France aujourd'hui il y a une priorité communautaire, « lutter pour affirmer son identité, l'éga- ) cc Le féminisme 1 On ne peut pas plaquer un modèle occidental sur une réalité radicalement différente, le champ de réflexion et de luttes est entièrement ouvert. )) lité des droits, une place équivalente dans la société Il. Le reste, son propre statut à l'intérieur de son groupe, c'est en quelque sorte une affaire interne à régler, pour commencer, entre soi. Si le Comité international des femmes, féministe pur et dur, n'a pas vu le jour, d'autres réseaux qui dépassent les frontières se sont créés, tissés patiemment par des femmes qui n'avaient à donner ni conseils ni analyses ou modèles, rien d'autre que leur solidarité. Des femmes françaises et immigrées qui partent de ce qu'elles vivent quotidiennement, une certaine dépendance économique, et qui décident de s'unir pour créer leur propres moyens de production. Elles ont adopté le système de crédit africain « des tontines ». C'est un procédé d'épargne si important en Afrique, qu'au Sénégal, par exemple, il fait concurrence aux banques. Un groupe, la famille élargie, le village, des dizaines et des dizaines de personnes, se réunissent une ou plusieurs fois par mois et chaque membre décide à chaque réunion d'apporter une certaine somme d'argent, remise à tour de rôle, à une seule personne. « La tontine Il s'arrête le jour où chacun des membres du groupe s'est vu remettre l'argent. Une somme parfois considérable. Les Fémin'autres, une association loi 1901, ont adapté le système. Plusieurs femmes se réunissent, amènent chacune une part, fixée à 500 F, mais, au lieu de les distribuer, les épargnent jusqu'à obtenir l'argent nécessaire pour financer le projet d'une femme. C'est ainsi qu'elles ont participé à la création du restaurant Mansouria(l) à Paris, tenue par des femmes maghrébines, qu'elles ont aidé des Brésiliennes qui ont créé leur propre coopérative d'artisanat au Brésil, et des Maliennes à acquérir, pour leur village de Sayamanna, un moulin à mil. Elles travaillent en ce moment avec le CERF A, Différences - n° 76 - Mars 1988 Parlement Européen Avoir ses propres papiers Le 14 octobre 1981, le Parlement européen a adopté une résolution sur la discrimination à l'égard des femmes immigrées. Cette résolution, inspirée par le rapport Heinrich (députée de l'lI11iance verte-alternative européenne) sur « la discrimination des femmes dans les dispositions relatives à l'immigration Il concerne principalement le droit au séjour autonome des femmes immigrées. Cette résolution est importante car elle bat en brèche les dispositions en matière d'immigration appliquées par certains pays européens et, notamment, celles concernant le regroupement familial. D'où la demande expresse du Parlement européen à l'adresse de ces pays - comme la France - de réviser leur politique en la matière. RéafÏl1'mant le droit de réunion des familles, souligné dans plusieurs traités et conventions internationales (Traité de Rome, résolution du 11 juin 1986 contre le racisme et la xénophobie ... ), les dispositions prises par le Parlement européen sont principalement axées sur les points suivants : - Les conjoints suivant leur famille - en règle générale des femmes - pourront recevoir un permis de travail et le cas échéant bénéficier d'aides sociales, y compris les conjoints arrivés avec seulement un visa touristique. - L'autorisation de faire venir la famille d'un immigré (ou d'une immigrée) ne sera pas tributaire du fait de disposer d'un logement. - Le Parlement européen condamne certaines pratiques qui visent à contrôler l'existence d'un mariage entre un citoyen de la Communauté européenne et un ressortissant de pays tiers, et en particulier les interrogatoires, les enquêtes de voisinage et les contrôles à domicile. - Droit au séjour indépendant des autres membres de la famille comme le conjoint ou les parents. - Renouvellement automatique de la carte de séjour, sans que l'on puisse opposer au ressortissant européen ou non européen les conditions de l'emploi, etc. Au nombre de 40, ces dispositions sont bien sûr consultatives. Mais elles n'en sont pas moins importantes dans la mesure où si elles sont appliquées par les pays de la Communauté européenne, et notamment après l'acte unique européen de 1992, le statut des femmes et des jeunes mies étrangères - dont la majorité sont arrivées après leur conjoint - ne sera plus lié à celui de leur mari. En cas de décès de celui-ci, de séparation ou de divorce, les femmes ne seront plus menacées d'expulsion, comme c'est couramment le cas aujourd'hui. 0 R. A. une des plus grosses et remuantes associations d'Africaines sur un projet de formation pour les femmes qui désirent rentrer dans leur pays d'origine. Pour Julia qui a participé à une « tontine Il cette solidarité internationale est essentielle. « Peut-être le meilleur de ce que les femmes immigrées ont apporté, l'ouverture à d'autres mondes. Grâce à elles, on a pu regarder ailleurs. Il Elle insiste

« C'était comme une bouffée d'oxygène dans un air

qui se raréfiait. On avait trop le nez sur notre nombril. Il 0 (1) La Mansouria, rue Faidherbe, 75011 Paris. MARIE·JEANNE BERNA IIIIII~ 1 BOUZOUARI · PARIS En regardant de ses 66 ans la vie qu'elle a menée jusqu'à l maintenant, Fatéma reste songeuse. C'est que cette femme aux yeux noirs et vifs cernés de khôl ~n a fait du chemin depuis qu'elle a quitté son douar natal. Installée confortablement dans sa salle à manger dont le décor est à la fois un mélange de « style HLM» et de bibelots souvenirs ramenés du pays, cette mère de famille arabe raconte sa vie d'une voie grave et nostalgique, s'interrompant par moment d'une gorgée de thé brûlant. Elle est née en 1932 à Bouzouari, en Algérie, un petit village perché dans la montagne, non loin de la frontière marocaine. A l'âge de seize ans, elle s'est mariée, traditionnellement, avec son cousin germain. Elle a eu ensuite deux premiers enfants - des garçons, Mohammad et Amar. Jusque-là, elle menait une vie bien tranquille, partagée entre ses enfants, la corvée d'eau et de bois, le pain qu'il fallait faire quotidiennement au lever du soleil, et bien sûr les visites régulières à la belle famille. Puis, la guerre éclata. C'était la Seconde Guerre mondiale. Son mari, qui avait alors à peine 20 ans fut enrôlé de force par l'armée française et alla se battre sur le front, en France et en Italie. Il a eu plus de chance que d'autres de ses camarades Il qui tombaient comme des mouches en première ligne Il, et a commencé à travailler en France après l'armistice. D'abord dans les mines du Nord comme mineur de fond, puis en région parisienne, comme ouvrier à la tâche dans le bâtiment. Il a été embauché ensuite par les papeteries de la Seine, à Nanterre, où il a travaillé jusqu'à l'âge de sa retraite. (( Je me souviendrai toujours de cette époque, raconte Fatéma.j'ai été sans nouvelle de mon mari pendant sept ans, prisonnière du bon vouloir de ma belle-mère - que Dieu ait pitié de son âme - qui n'avait qu'une idée en tête, me renvoyer chez mes parents car elle me rendait responsable de l'absence de son fils. Il Malgré cela, elle est restée, invoquant tous les soirs Allah pour qu'il lui rende son mari. Elle avait aussi pris l'habitude de faire un pèlerinage dans la montagne, pour se recueillir dans le mausolée de Moulaï Abdelkader. La légende voulait que les voeux soient exhaussés par ce marabout qui (( habitait » encore les lieux. Ce qui fut effectivement le cas: son mari débarqua un beau matin au village pour ramener en France sa petite famille. C'était son premier voyage, elle allait enfin découvrir d'autres horizons ... Quelle fut alors sa déception lorsqu'elle découvrit le bidonville de Nanterre où son mari avait élu domicile. Bien sûr, sa vie avait changé. Les enfants grandissaient (trois filles et deux autres garçons sont nés en France) et les deux aînés allaient à l'école communale. Elle pouvait désormais sortir, faire les courses et aller chercher ses enfants à la sortie de la classe. Son mari lui laissait quotidiennement de l'argent et de fil en aiguille elle apprit à gérer le budget familial. En 1960, en pleine guerre d'Algérie, la famille au complet s'est installée dans la cité des Potagers - où elle habite depuis -, une cité de transit (( construite exprès pour eux Il. A l'indépendance de l'Algérie, son mari pari acheter une maison au pays Pour Fatéma, c'était le grand luxe. Elle était enfin déchargée de la corvée d'eau et n'avait plus à se soucier du chauffage de la maison pendant l'hiver. Ses enfants avaient leur chambre et pouvaient étudier dans de meilleures conditions. Le 17 octobre 1961, elle a même eu son heure de gloire en manifestant au pont de Neuilly avec toutes les femmes de la cité accompagnées de leurs enfants. L'indépendance de l'Algérie fut proclamée et son mari est parti en Algérie pour acheter une maison. Ils caressaient ensemble le désir secret de rentrer au pays lorsque leurs qnfants seraient mariés. (( Je croyais que mes filles allaient fonder leur foyer, explique-t-elle, les prétendants ne manquaient pas et venaient régulièrement frapper à la porte. Il Elle fut déçue, et a dû affronter la colère de son mari qui n'acceptait pas que ses filles continuent leurs études ou se mettent à travailler. L'aînée, Malika, vient à peine de terminer son droit et les cadettes, Houria et Aïcha travaillent, l'une comme secrétaire et l'autre comme animatrice. Il avait tout de même fini par se résigner. Après tout, ses filles réussissaient là où ses fils avaient échoué. (( Et puis, me dit Fatéma, c'est mektoub, toutes les filles aujourd'hui étudient, travaillent ... et sortent de la maison. Il En prononçant ces derniers mots elle s'est levée pour aller chercher une photo de sa petite dernière. Elle parlait maintenant de la voix de ceux qui essaient de ravaler leurs sanglots, et avait du mal à dissimuler ses larmes avec le foulard qui retenait ses cheveux. (( Regarde, me dit-elle en me montrant la photo de sa fille. C'est par elle que le scandale est entré chez nous. Il Deux ans auparavant, Houria était en effet partie de la maison familiale pour s'installer à Lyon, avec son petit ami français. Il paraîtrait même qu'elle a eu un enfant. (( Quand mon mari a appris la nouvelle j'ai eu très peur pour ma fille, poursuit Fatéma. Il s'est rasé la moustache et s'est enfermé dans sa chambre. Il ne voulait plus voir personne et parlait même de la tuer et de se tuer ensuite. Alors il est parti en Algérie - et j'ai bien cru qu'il nous avait abandonnés. Mais il est revenu au bout de quatre mois et tout est rentré dans l'ordre. Il ne voulait tout simplement plus que l'on parle de Houria. Pour lui, elle n'existait plus Il. Je l'écoutais, attentive à sa douleur. (( Dis-lui, dis-lui ma fille qu'elle peut venir à la maison, me dit-elle en saisissant ma main. Son père est vieux maintenant et ne veut pas mourir avant de les avoir vu, elle et son fils. Il Alors je l'ai rassurée en lui disant, que si Houria lisait ces lignes, elle viendrait certainement leur rendre visite ... Inch Allah. 0 RlJbha ATTAF LE REGARD DU ROMAN (( Sans un geste et presque sans un mot, Ateba dit que la femme devrait arrêter de faire l'idiote, qu'elle devrait oublier l'homme et évoluer désormais dans trois vérités, trois certitudes, trois résolutions. Je les connaissais: revendiquer la lumière, retrouver la femme et abandonner l'homme aux incuries humaines ... Il Celle qui parle ainsi s'appelle Ateba, elle a dix-neuf ans et elle vit dans le QG, le quartier le plus misérable de la ville d'Awu, quelque part en Afrique. C'est le personnage central du premier roman de Calyxte Beyala, vingt-sept ans, écrivaine camerounaise. En 174 pages qui se lisent d'une traite, son héroïne s'insurge: comment les femmes africaines peuvent-elles accepter le joug de l'homme? Pourquoi le désirent-elles obstinément? Comment peuventelles accepter des traditions sclérosées? Elle cherche, en aveugle, une lumière qui ne peut venir que des femmes. Seul, le meurtre d'un amant de passage la délivrera de la nuit où elle est enfoncée. Un meurtre exécuté en trois lignes (( Je vois la femme déployer ses ailes, cracher le sperme aux pieds de l'homme, lui balancer un lourd cendrier sur le crâne. Il Alors Ateba peut avancer: (( Vers la clarté diffuse à l'horizon, la lueur vive tapie dans les eaux des femmes à venir Il. Un livre violent, brûlant, dérangeant: une femme africaine m'aborde dans le métro, elle a vu ce que je lisais, sa réaction est viscérale: (( Cette histoire n'engage qu'elle, c'est un cri personnel, ça ne concerne pas les femmes africaines Il. cc Vers la clarté diffuse à l'horiZon, la lueur vive tapie dans les eaux des lemmes à venir » Un peu plus tard, je rapporte l'incident à Calyxte Beyala. Elle sourit, se passe la main dans les cheveux, mi-braquée, mirésignée. (( Je sais, je comprends cette femme, elle a été touchée elle s'est sentie déshabillée, dévoilée. De toute façon, je ne prétends pas parler au nom des femmes africaines. Mais je dis ce que j'ai vu, ce que j'ai pu observer. Il - C'est un roman autobiographique? - Non. C'est l'histoire d'Ataba, pas la même. Mais beaucoup de choses sont vraies. J'étais une enfant seule, sans parents, donc relativement libre, j'ai beaucoup regardé. Autrefois, j'en souffrais, aujourd'hui je m'en réjouis. Et ce que j'ai vu c'est la trame de mon roman. Il décrit une réalité. - Quelles réactions a suscitées votre roman dans la communauté africaine? Je n'ai eu que de bons échos. Des femmes, très nombreuses, m'ont écrit, téléphoné. Beaucoup m'ont dit: (( j'aurais aimé écrire ce livre Il. Je n'ai eu qu'une seule réaction négative. Une lettre d'injure d'un homme. Mais, dans l'ensemble, ils ont bien réagi. Elle s'est levée et me montre, parmi d'autres, une lettre écrite par l'un d'eux: (( Ce qui m'a marqué, c'est comment vous montrez que l'Afrique survit grâce aux femmes. Cela est tout à fait vrai, car je me rappelle comment ma mère se battait comme un lion blessé, juste pour nourrir la famille. C'est grâce à elle que j'ai pu faire mes études. Mon frère aussi. Il n'y a pas qu'elle. Dans la plupart des villages et sociétés africaines, c'est la femme qui gère la famille et je crois comme vous que les mentalités devront évoluer en Afrique pour reconnaître la position de la femme. Il - Si il n'y a aucun lien entre Ateba et vous, qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre ? - Rien. Je me suis levée un matin j'ai pris une feuille et je me suis mise à écrire, ce n'était pas une obsession. C'était là sans que je le sache. Je voudrais que les femmes appren- Différences - n° 76 - Mars 1988 nent à s'aimer. Ce n'est pas un livre contre les hommes, même si je critique certains de leurs comportements, c'est un livre pour les femmes, qu'elles se découvrent, prennent conscience de leur force. Dans les villages, c'est elles qui ont le pouvoir économique et ce qu'on appelle (( le pouvoir de l'oreiller Il. Elles décident. Mais, à l'extérieur de leurs maisons, elles n'ont pas de place. En France, les femmes africaines prennent davantage conscience de cette situation. - Ces femmes, quand elles rentrent dans leurs pays d'origine pensez-vous qu'elles font changer les mentalités? - Non. Pas encore. Malheureusement, elles redeviennent ce qu'elles ont toujours été. Elles s'enferment à nouveau dans les traditions. Le cheminement sera long. Et il faudra que nous en trouvions un qui ne soit pas copié sur le modèle occidental. L'Afrique ne bougera pas comme l'Europe. Bien sûr, il n'y aura pas de MLF en Afrique. D'ailleurs, dès qu'il y a un groupe tout est faussé. Je ne demande pas aux femmes africaines de descendre dans la rue manifester. Seule compte la prise de conscience individuelle. Mais la souffrance des femmes est partout pareille, elle se dit (( Aie Il, en français, en arabe ... Et c'est la même souffrance, l'aveu d'un ratage complet qui nous unit toutes. Les femmes arabes, françaises, africaines, doivent s'apprendre l'amour. 0 M.·J. B. Le soleil qui m'a brûlée, de Calyxte Beyala. Ed. Stock. L v R E s D ICI ET D AI LLEURS GUIDES. Le GISTI (Groupe d'information et de soutien des travailleurs immigrés) jouit d'une longue tradition dans l'élaboration de textes, brochures, et documents indispensables à la connaissance des problèmes juridiques, notamment des travailleurs migrants et de leurs familles. L'association vient de publier deux ouvrages que tous les militants antiracistes de terrain doivent avoir dans leur bibliothèque: le premier est un Guide des étrangers face à l'administration, le second concerne plus particulièrement les jeunes étrangers en France. D Editions La Découverte, coll. Cahiers libres, 1, place Paul-Painlevé, 75005 Paris. ECOLE SAHRAOUIE. Organiser une structure scolaire tout en menant une guerre de libération, alors que la population est largement touchée par l'analphabétisme et pour partie nomade, ce n'est pas simple. C'est pourtant le pari tenté par les Sahraouis

celui d'adapter l'institution scolaire

aux besoins d'une société soumise à nombre de difficultés : douze années de guerre, quatorze instituteurs seulement au départ, les handicaps ne manquaient pas. Christiane Perregaux dans son livre nous fait découvrir aussi un peuple qui l'hébergea longtemps et qu'elle connaît bien. Elle nous fait connaître les Sahraouis, leur vie, leurs besoins, leur ingéniosité et leur courage. D L'école sahraouie: de la caravane à la guerre de libération, de Christiane Perregaux. Ed. l'Harmattan. Indispensable : deux guides pour les étrangers en France, édités par le GISTI. ANTIRACISME INSTRUMENTAL. Comment démontrer que l'antiracisme et le racisme ne sont qu'un leurre, une escroquerie intellectuelle? C'est la tâche à laquelle se livre Yann Moncomble dans son dernier ouvrage, les Professionnels de l'antiracisme, attaquant d'un chapitre à l'autre, tantôt le MRAP, tantôt la LICRA ou SOS Racisme ... L'antiracisme y est défini comme « instrumental » au service d'un pouvoir occulte, briguant la mainmise sur la planète tout entière. On connaissait le protocole des Sages de Sion, le complot des francmaçons, celui des communistes ... Aujourd'hui, il faut ajouter à la liste celui des antiracistes, qui a le mérite d'être la synthèse des trois autres! Ainsi, le MRAP serait à la solde du Parti communiste français, lui-même à la remorque des Soviétiques. Pour l'auteur, certains discours du MRAP« frisent l'antisémitisme », même si, à une certaine époque, la lutte contre l'antisémitisme figurait parmi les objectifs de l'association. La disparition du terme «antisémitisme» dans « Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples » correspondrait « à une intention précise ». C'est du côté de la Ligue des droits de l'homme que l'on retrouverait l'essentiel des franc-maçons. Le protocole des Sages de Sion semble avoir, pour sa part, cédé la place à la « colossale organisation » juive des B'nai B'rith, veillant à « la promotion des intérêts du judaïsme » dans le monde. Si les « professionnels de l'antiracisme» ne sont que de sombres tacticiens au service d'un pouvoir occulte, leurs accusations et analyses ne se justifient plus ... et les racistes n'ont plus à se « culpabiliser» : le racisme est la chose du monde la mieux partagée. CQFD ! D G. O. c N E M A D'AUJOURD 'HUI s STEVE BIKO RESSUSCITE. Au coeur de la plus longue des humiliations collectives de notre temps, l'apartheid, un homme a vécu une vie digne. Une vie d'homme libre. Il s'appelait Bantu Stephen Biko. Les racistes de Pretoria l'ont arrêté puis assassiné dans sa prison. C'était il y a dix ans. Steve Biko, fondateur du mouvement de la Conscience noire, avait trente ans. Il entrait ainsi dans la légende et la mémoire historique. Un autre homme, dans le même pays, au même moment, sort de son ghetto doré. Donald Woods, journaliste de profession, et « libéral» par ignorance, va à la rencontre de Biko par défi. Une profonde amitié unit dès les premiers instants l'homme du ghetto noir et celui du ghetto blanc. Woods découvre les townships, et la vraie nature du régime en place qu'il croyait réformable de l'intérieur. Cry Freedom, un très beau film de Richard Attenborough C'est cette histoire que raconte le film de Richard Attenborough, Cry Freedom (le Cri de la liberté) (1). Le réalisateur anglais - auteur de Gandhi qui a été vu à ce jour par cent millions de personnes à travers le monde - n'a pas lésiné sur les moyens : vingt millions de dollars ont été investis, dont 19 0,10 alloués par le gouvernement du Zimbabwe. Vingt mille figurants animent la scène centrale du film qui montre l'enterrement du martyr. Tout est central dans ce long métrage de deux heures et demie: les premières images qui s'ouvrent sur le portrait de Nelson Mandela, la défense de Biko devant des juges grassement butés sur leur bêtise, la scène de la morgue où Donald Woods et son confrère prennent des photos d'un corps défiguré par la torture, les enfants noirs abattus dans le dos par une armée que l'on juegera un jour, il faut l'espérer, pour crimes contre l'humanité. Cry Freedom est aussi un film traversé par des sentiments humains : la tendresse, l'humour, l'amitié, l'étonnement, l'engagement. .. Tout n'est certainement pas complètement fidèle à la réalité. Attenborough a romancé, changé des détails, choisi ses plans, en un mot construit un film grand public. On lui reprochera probablement d'avoir axé toute la seconde partie sur le personnage de Woods, lequel s'exile en Angleterre pour faire publier (2) l'histoire dramatique qu'il a vécue, dont il est le témoin direct. A l'heure où la question de l'apartheid est banalisée par la diversité de l'actualité mondiale et l'indifférence de beaucoup trop de gouvernants, Cry Freedom sonne comme une victoire. Celle de la vérité sur le mensonge. Celle de l'amitié entre les Vidéo-cirque. Nominé aux Oscars 88, un perit dessin d'animation produit par Folimage et réalisé par JacquesRémy Girerd. En dix minutes, vous allez faire vivre à des enfants le Petit cirque de toutes les couleurs, une fqble poétique autour du thème des . échanges multiraciaux et de l'amitié. Ça nous changera de Goldorak. La cassette vidéo est disponible auprès de Fo/image, 25, rue A.-Thomas, 26000 Valence. peuples, tous les peuples. Une question pour finir cette trop brève présentation : faudrait-il que chacun d'entre nous vive l'aventure exceptionnelle de Donald Woods pour que finisse en Afrique du Sud le régime intolérable de l'apartheid? D CHER/FA B. (1) Sortie en France le 23 mars prochain. (2) Donald Woods a publié deux livres: Biko en 1978 (toujours interdit en Afrique du Sud) et Asking for trouble en 1980. IMAGES DE FEMMES, DIXIEME ... Kira Mouratova, interprète principale d'un de ses premiers films, Brèves rencontres. Une rétrospective très attendue à Créteil. Le Festival international des films de femmes a dix ans. Porté à ses débuts par un mouvement féministe solide, il en reflétait les espoirs, les sectarismes et les luttes. Beaucoup de films de fictions militantes, sur le viol, l'avortement, les femmes battues ... Mais aussi des oeuvres originales, un cinéma dont les auteurs étaient des femmes. D ,puis dix ans, on a pu voi, à Créteil les films d'Helma Sanders Brahms, ceux de Margareth von Trotta, une rétrospective de l'oeuvre d'Agnès Varda ou de Larissa Chepitko. La dixième édition du Festival international du film de jeunes, du 12 au 20 mars, permettra, avec trente films en compétition, de faire le point sur le cinéma de femmes aujourd'hui. Est-il un cinéma militant? Ou bien se donne-t-il comme urgence première la recherche formelle, le développement d'une imagerie féminine, en circuit fermé? Business as usual de la Britannique Leslie Ann Barrett (Pendant les travaux, la vente continue pourrait être le titre français) fait partie de la compétition. C'est un petit chef-d'oeuvre d'humour, de souci de la lutte des femmes. L'action se déroule aujourd'hui à Liverpool. Un magasin de confection en transformation : le patron harcèle constamment une des jeunes vendeuses antillaises. Celle-ci s'en plaint au manager, une femme, et lui demande d'intervenir auprès du patron, qui prendra le premier prétexte venu pour lui signifier son renvoi sur-le-champ~ A cette volonté de « restructuration » s'oppose bientôt, à l'extérieur, un piquet de grève et, à l'intérieur, une résistance aux changements venus d'en haut. Glenda Jackson, une des plus grandes actrices britanniques du moment, joue la manageress licenciée et réintégrée ; si vous ne deviez voir qu'un film de la compétition, ce doit être celui-là. Une section, très utile dans ce festival, regroupe des films passés en 87 dans les salles, certains trop rapidement car les grands circuits ont leurs lois impitoyables

si les entrées en première semaine

n'atteignent pas un certain seuil, le film disparaît de l'affiche. Il y a pire, vous vous rendez dans une salle où le programme officiel, l'affiche indiquent que l'on y donne le Moine et la Sorcière, de Suzanne Schiffman, et l'on vous signifie à la caisse que le film ne se donne plus. Dans les salles du palais des Festivals de Créteil, vous pourrez voir ce premier film d'une collaboratrice de François Truffaut. D'autres films en fuite de 87 : Miss Mary, de l'Argentine Luisa Bemberg, ou le film le plus joyeusement féministe de l'an dernier, l'excellent Chant des sirènes, de la Canadienne Patricia Rozema. Humour en ennui Kira Mouratova est soviétique, elle fait des films depuis plus de vingt ans et Glastnost oblige, ils ne sont montrés que maintenant. A Créteil, ils seront tous là et leur réalisatrice aussi. Ce sont des films pleins d'humour, pleins de l'ennui et des rêves de chaque jour. Brèves Rencontres a été tourné en 1967. La réalisatrice interprète le rôle féminin principal. Une employée du service municipal du logement à Odessa. Un jour, est passé dans sa vie, un géologue. Vladimir Vissotski, jeune débutant, joue cet homme, « symbole, dans ces années-là, de l'aventurier romantique, moderne », nous a expliqué Mouratova. 'Le personnage du film voyage pour son travail. Cela fait de lui un citoyen privilégié car, en Union soviétique (la réalisatrice y fait allusion dans le film et nous l'a répété au cours de l'entretien), il faut un passeport intérieur pour se rendre d'une ville à l'autre. Cet homme qui se déplace mobilise les femmes sur son passage, il a d'autant plus de charme que ses élans amoureux, généreux, sont à éclipse, les nécessités du travail sont parfois bien utiles pour se libérer des prisons où veulent l'enfermer ses belles. L'entêtement situations. On voit des futurs locataires envahir de manière insistante un appartement inachevé, où notre héroïne est en train de se battre et se débattre pour qu'on exécute correctement les installations de plomberie. Mouratova aime bien cet entêtement des femmes qui fait avancer le monde, mais qui, ses personnages nous le démontrent, peut être fichtrement casse-pieds. Le départ du fils Dans Longs Adieux, une femme ne peut se résoudre au départ prochain de son fils. Celui-ci voudrait rejoindre son père. Elle ouvre son courrier, tente de soudoyer l'employée des postes pour qu'elle lui rende compte des appels téléphoniques du fils ... Pour interpréter le rôle du fils, Mouratova a choisi une élève de terminale et non un acteur professionnel. Cela produit une impression de naturel, de légèreté insouciante, on jurerait que la réalisatrice a caché sa caméra pour surprendre un adolescent dans ses jeux, ses rêveries. Quant on s'en étonne, elle vous répond: « C'est le travail du metteur en scène. Tous les dialogues sont écrits. Les jeux de mots sont de l'invention de ma coscénariste ... Parfois, jefais des rencontres, un homme, une femme, dont le visage ou un détail de la personnalité me plaÎt. Alors, j'essaie d'inventer une scène, une ligne pour les faire jouer dans mes films. » En parcourant le vaste monde et Parmi les pierres grises, les deux derniers films sont, eux, en couleurs. On y retrouve le même goût du concret, de l'épaisseur des choses, de la matière. Le premier a pour cadre un chantier : boue, briques, béton, Mouratova aime« les contrastes, les possibilités infinies qu'offre l'espace chaos du chantier ». «Les pierres grises, dit quelqu'un dans ce film - qui a subi beaucoup de coupes irrémédiables puisque les négatifs ont été détruits -, sucent le sang. »Pierres d'un édifice en ruine, qui abrite dans ses souterrains une population misérable, exclue par le maître des lieux, lui-même condamné à exercer un pouvoir devenu ruine car il ne reste rien des splendeurs passées. Comme dans la Cerisaie, de Tchekhov, nous sommes dans les dernières années du XIX· siècle. Il suffit à Mouratova de quelques expressions sur des visages d'enfants, d'un simple geste (le jeune fils du juge lance une pomme à la fillette pauvre) pour suggérer immédiatement la subversion des rôles et le côté dérisoire d'un jeu d'enfants. 0 CHRISTIANE OANCIE }'estival du film de femmes de Créteil, du 12 au 20 mars. Il y aura également un portrait de Dominique Sanda en douze films, une sélection sur les femmes dans le cinéma arabe et des tables rondes, il faudrait plusieurs vies pour tout voir dans ce festival! Pour faire une sélection, il le faudra tout de même! Demandez le programme détaillé au 42.07.38.98. Si vous venez de loin, il est possible de trouver un hébergement sur place. Ce serait dommage de ne pas venir souffler ces dix bougies ! De longs adieux, de Kira Mouratova. Une femme qui ne peut se résoudre au prochain départ de son fils. Débordante. Autant les rêves d'amour de l'héroïne s'accompagnent d'évasion, dans le passé, dans les souvenirs, autant son quotidien est fait de répétitions, de piétinements. Elle va d'un immeuble à l'autre pour son travail, inspecte, court après des employés du bâtiment plus rapides à accepter les 1·1 pourboires qu'à contrôler les finitions. Kira Mouratova ne fait pas un cinéma pesant, la gravité de la crise du logement 1 transparaît davantage dans le cocasse des fi ·""-D~iffi:;:é;-:re-:-n-:-:c-:-es---n::-" :;76;---:M:";a-'-s-:j:;;9';;'88;:;------------------------------------_1 Il III 81DEA 8100 BAYONNE Rido Bayonne s'inscrit indéniablement parmi les plus grands compositeurs de musique noire à Paris. Dire qu'il vient du Congo n'est pas prioritaire, mais préciser qu'il vit dans la capitale depuis vingt-cinq ans explicite davantage son travail. En février, il jouera aux Halles avec vingt musiciens, dont trois cuivres et un violoniste: un son calculé, des rythmes précis, un afro-jazz ouvert. Entretien sous forme de récit de son exil musical. Je me produis de nouveau sur scène après un break d'un mois dont j'avais besoin pour changer de formule . Ça veut dire me remettre en question, être toujours à la recherche d'une couleur nouvelle, d'un son nouveau. Je suis très exigeant, j'ai toujours peur d'être en retard sur l' avenir. Il y a souvent un moment où l' artiste stagne. Je veux éviter d'en arriver là. Faire un break, c'est réapprendre à chaque fois. Sans cesse se remettre en question Le but, mont but, c'est d 'apporter le maximum à un public. Or, je suis toujours très angoissé, je me pose régulièrement comme un grand amateur : plus j'apprends, plus je mesure ce que je ne sais pas encore. C'est vital de ne pas décevoir un public, ne pas décevoir les musiciens et moi-même. La France n'est pas musicale Je ne me revendique pas comme un musicien africain. Je suis musicien tout court. Comme on peut être médecin, point. Il ne s' agit pas du tout de renier mes origines. Mais je suis un déraciné. Je ne suis plus apte à représenter l'Afrique. J'ai une composante africaine comme occidentale, et pourquoi pas asiatique .. . Mes bases sont africaines, ma composition occidentale et l' accompagnement américain. Indéniablement, il y a en moi une âme africaine et un coeur parisien. Mais la musique que j'écris est noire. Ça ne me semble même pas utile de le mentionner. Mon écriture n'est pas blanche, dans le sens de la conception, de l'interprétation. La France n' est pas un pays musical: un musicien n'est pas quelqu'un qui a un métier. En Afrique, c'est un peu pareil, mais c' est plus toléré parce que le corps est très investi musicalement. Les musiciens blancs souffrent avec ma musique. Ce n'est pas de la musique de Blancs, alors ils se cassent parfois les dents sur les cuivres. Il y a souvent un problème de rythme qui se pose parce que, en Occident , ce n'est pas un élément majeur tandis qu'en Afrique si. C'est difficile d'apprendre le rythme, on l'a ou on l'a pas. Mais de toute façon, le mélange m' est très important. Non pas que j'y tienne, mais ça me semble une nécessité, une exigence de la musique elle-même. Je vis, je bois et je mange en français, donc au bout de vingt-cinq ans ici, ma satisfaction musicale aboutit à travailler avec les gens avec qui je vis. Sinon, je n'ai qu'à aller en Afrique et bosser avec des musiciens africains puristes. Mais je vis à Paris et c'est une ville cosmopolite. Je choisis mes musiciens en fonction de leur talent, pas de la couleur ou la nationalité. De toute façon, je préfère un musicien correct qui arrive à l'heure aux répétitions qu'un excellent musicien africain toujours en retard. Le métissage se fait involontairement; il ne s'établit pas par rapport à l'histoire extérieure (mode des musiciens black ou autre ... ) mais par rapport à l'histoire de la musique. Exigeant au point d'en être tyrannique Je travaille tout à fait seul; je suis compositeur

j'écris, j'arrange, je dérange ...

Avec les musiciens, je travaille toujours séparément: d'abord les rythmiques, les deux bassistes, puis guitare, batterie, claviers et choristes. Enfin, tous ensemble, mais après plusieurs semaines de répétitions en solo. Parce que chacun doit se chercher, se concentrer sur ce que je lui demande. Les autres, à ce moment-là, ne sont pas indispensables. La communion ne se fait que lorsque je décide que deux ou trois doivent jouer ensemble. Je travaille ainsi par que je sais parfaitement ce que je veux d'eux et je leur demande à chacun des choses différentes. Mais en demandant le maximum, mon intention peut me dépasser : je les forme pour qu'ils soient les meilleurs. Leur évolution me rend orgueilleux. Sans doute aije toujours gardé l'image du père de famille, que j'ai dû avoir en Afrique, comme rôle à assumer aussi dans ma musique. Cela me rend très exigeant. Au point d'en être facilement tyrannique. Quand un musicien se trompe en jouant, je souffre terriblement, j'en deviens intransigeant. Je ne supporte pas qu'un public qui vit une souffrance journalière qu'il vient suspendre pour écouter un concert reçoive COSM 0 PO LITES M u s QUE s FLAMENCO EN PARIS! Pomelo se bat pour la diffusion de la culture espagnole. La vraie. Et en musique, ça commence par le flamenco, ou plutôt les flamencos, tant il existe de styles, de variétés différents. Le 29 janvier, c'était l'andalou et ses influences arabes. Sur le plateau du Cirque d'hiver, El Lebrijano, l'orchestre anda- Différences n° 76 Mars 1988 n'importe quoi comme musique. La musique doit être parfaite, sans erreur. S'il ya erreur, c'est que le musicien a décroché de la musique. Il en est impardonnable, même si c'est humain ... La musique comme raison d'existence La musique, c'est mon unique raison d'exister. Il n'est pas question de refaire la musique mais de la faire, la jouer seulement, le plus possible et le mieux possible. Je ne saurai rien être d'autre que musicien. Cesser la scène? Peut-être ... , pour former des gens. Mais ma vie, c'est la musique parce que la musique, c'est la vie. C'est précisemment ce que je lui demande: me garder vivant. Longtemps. Pour la jouer, je donne à la musique ce qu'elle me demande. Si je conçois si bien le métissage dans ce que je fais, c'est parce que la musique l'exige. Actuellement, je voudrais un violon joué par une femme, parce que la musique, c'est en rapport avec ma mère, ça c'est sûr. Quand j'avais quatre ou cinq ans, je l'ai entendu dire qu'elle était sûre que je deviendrai musicien, parce que lorsque j'étais dans son ventre elle battait la mesure. Et moi, j'ai toujours été à la recherche de sons: celui d'un oiseau, du chant des femmes dans les champs, tous les sons originaires de la brousse. C'est pour ça que mon père a décidé de m'envoyer en France pour faire du droit. Pour rompre cette attirance pour la musique. Mais c'est clair que je joue pour ma mère ... Elle est omniprésente malgré sa mort, et trouver un violon femme, c'est nouer le cordon ombilical. Mais pas question pour autant de représenter les cocotiers ou les bananiers, pour moi. Je fais seulement de la musique selon la façon dont elle me sollicite . • P;opos recueillis par SOUAO BELHAOOAO Rido Bayonne. A partir de fin février, salle du Sentier des Halles. lou de Tanger et trois danseuses firent longuement jubiler le public. Musique de sensualité, de peine, de colère ou de révolte, le flamenco est aussi un appel constant à l'émotion. Bref, tout ce laïus pour vous annoncer, les 23,24 et 25 mars prochain, au Cirque d'hiver, la venue d'un exceptionnel spectacle de Camaron de la Isla, Juana dei Revuelo et « la Tati », une des grandes danseuses du moment. 0 Flamenco: au Cirque d'hiver. Rens. " Pomelo, 42.77.17.08. " Gheffo back scène, groupe plus parisien qu'africain désormais, Ghetto Blaster reparaît sur scène. Voilà un an qu'il ne se produisait 1 plus sur scène. Telle une femme coquette, il se préparait avant de faire une belle entrée: l'attente valait la peine. Ghetto Blaster, groupe from Nigeria mais désormais cosmopolite, fait très fort dans sa reprise avec le public. Après un concert au New Morning, plusieurs dates vont se décider pour d'autres soirées. Avant d'être un groupe de musique, Ghetto Blaster, c'est d'abord l'histoire d'un film, dont le .principal narrateur s'appelle Martin Meppiel (acteur manager du groupe). En 1983, il part au Nigeria avec son frère, et une idée: monter un groupe pour un film. Deux ou trois musiciens qui ont approché Féla, d'autres également professionnels et le film donne un bébé nommé Ghetto Blaster. Mais hic, à la fin du tournage, le groupe ne veut pas en rester là. Papa Martin les emmène sous le bras et joue efficacement la maman et le manager: un maxi 45, Preacher man en 1984, et un album People en 1985. Puis un break, question de se reconstituer un peu. Quelques changements de musiciens qui ne font plus tous dans le black. La qualité musicale après ce break découle sans auccun doute de ce nouveau mélange. Il semble qu'à Paris, depuis peu, la musique noire revendique d'être désormais cosmopolite et de puiser une richesse particulière dans ce fait. Mais qu'on reste mesuré: le pilier du groupe, c'est indéniablement Willie, le chanteur à la voix très, très black music ... Sortie du prochain album cet été. En attendant, dès la première annonce d'un concert, courez-y! ... Ça balance à mort .... S. B. COM/C. Raoul Petite, le plus tumultueux de nos comic'bands, nous offre les meilleurs moments de sa quinzaine au Casino dè Paris dans un album live, Vivant, en bon français. Les Raoul Petite aiment la France profonde, même s'ils la tournent sans cesse en dérision. Ainsi, ils seront le 5 mars aux Fourgs, dans le Jura, à l'occasion des championnats internationaux du chien de traîneau. La fête promet de tourner les têtes. Pour un avant goût, voir le Live. Vivant: de Raoul Petite. Disques Ariola. Il A'ENBA .ABS -1 Jusqu'aù 26. L'Autre d'apres Andrée Chedid, au théâtre de la cité internationale. Une mise en scène de Jean Made Boucaret. Un dialogue entre des différences que tout sépare. 21, bd Jourdan, 75014 Paris. Rens. : 45.89.38.69, 2 Jusqu'au 6, Les Trois Soeurs d'Anton Tchekhov et du 10 au II mars, CatulltlS, de Milan Füst. Avec ces deux spectacles en langue hongroise, le théâtre de l'Europe inaugure sa cinquième saison. Durant 4 mois, neuf pays européens y seront présents, célébrant de cette manière la naissance, en 1987, de l'Union des théâtres de l'Europe (et la création, dans chacune des villes de Milan et Madrid, d'un théâtre de l'Europe. Au théâtre national de l'Odéon. Tél. : 43.25.70.32. 8 Au théâtre des Amandiers à Nanterre, puis du 24 mai au 12 juin au TNP de Villeurbanne (et au Festival d'Avignon cet été) : Le Conte d'hiver, de William Shakespeare. Mise en scène par Luc Bondy. La jalousie, l'amour, le temps. Théâtre des Amandiers, tél. : 47.21.22.25. 1 ONUit d'amour, mise en scène par Gabriel Garan, au Théâtre international de langue française (au Théâtre 13, tél. : 45.88.16.30). Une pièce écrite par deux jeunes auteurs belges et primés en 86. Un père, un fils, une jeune femme ~ deux écorchés vifs et une exclue. Naufrage, violence et érotisme. 1 0 L'Orchestre nationale de Lille et Los Cantores de Burge ouvrent à 20 h 30 les Semaines Chorales de Tourcoing sous la direction de Thomas Sanderling. Au programme : le Requiem allemand de Brahms, en l'église Notre-Dame·desAnges. 1 0 Au Caf'Omja d'Aubervilliers, à 21 h et pour deux jours, c'est de la musique brésilienne qu'il s'agira, avec le groupe Parioca. Rens. : 48.34.20.12 1 0 A :S~lfort, ~e Cent~e ~es cultures medlterraneennes mVlte Juliette Minces pour une conférence sur La femme dans la société méditerranéenne. Rens. : 84.38.10. DANSE-THEATRE SPECTACLES Ayti : l'Île oubliée En 1492, Christophe Colomb découvre l'île d'Ayti, un million d'habitants y vit tranquille, dans un paysage luxuriant. Ce peuple sera massacré; et Anacaona, sa dernière reine, brûlée vive par les envahisseurs. Jean Métellus, poète et romancier haïtien, vit à Paris depuis trente ans. Sa pièce Anacaona, a été mise en scène par Antoine Vitez. Une écriture aussi belle et colorée... que violente. Jean Metellus Différences: Anacaona signifie Fleur d'or. Cette femme, vous en faites une demi-déesse ? Jean Métellus : Son prestige était réellement grand. Elle était très écoutée et respectée. J'ai voulu, en effet, créer un mythe et, à travers Anacaona, évoquer les origines oubliées d'Haïti. Et rendre hommage à la femme et au poète. A sa puissance et à son verbe. Tous les Haïtiens connaissent et aiment Anacaona. Dès l'école primaire, nous apprenons son histoire et celle de notre peuple. Vous savez, quand on découvre à cinq ans que le samba (le poète) le plus réputé en 1492 était Anacaona, ça marque. Elle faisait d'ailleurs l'admiration du poète espagnol Lope de Vega. Le peuple haïtien, aujourd'hui noir à 95 070, est très attaché à ses ancêtres, les Indiens. C'est dans leur coeur, bien sûr, car, en réalité, les premiers esclaves noirs amenés par les Espagnols, à partir de 1503, n'ont croisé qu'un peuple décimé. J. M. : On ne peut pas avoir des propos doux quand on connaît tout le sang versé. C'est vrai qu'à travers ces images, j'exprime ma rancoeur. J'avais la claire intention de dénoncer le génocide des premiers habitants connus de l'île, ceux que l'on a appelé les Peaux-Rouges. C'est donc bien une volonté politique. J'ai montré comment ils ont été abusés lâchement. C'est ma manière d'homme du XXe siècle de venger les Incas. A ce titre, je me sens proche de Dessalines, ancien esclave noir, qui a fondé en Haïti la première République noire au monde. Il avait appelé l'une de ses armées « l'aimée des Incas », pour venger la mémoire des Indiens. Différences : On a écrit que votre pièce était une réponse au Soulier de Satin de Claudel, pièce dans laquelle Christophe Colomb est un conquérant sans reproche ••• J. M. : Oui, j'ai voulu répondre à Claudel, à sa vision occidentale de conquérir le monde. Je ne souhaitais pas polémiquer. Simplement lui dire : plutôt que de conquérir le monde, il faut l'aménager. Sans une exploitation indigne de l'homme. Les conquistadores ont traité le peuple d'Ayti et les esclaves noirs en soushommes. Quand je décris le cynisme des religieux espagnols, je dénonce aussi le fanatisme. Les chrétiens ont été très loin avec leurs épées et leurs canons. Différences : Le présage des Dieux (les Zénés) annoncé au début de la pièce, plane tout au long du drame vécu par Anacaona et son peuple. C'est en cela que l'on peut parler de tragédie? J. M. : « Ton royaume résistera longtemps, mais tu périras en croyant charmer. » Quoi qu'elle fasse, Anacaona marche vers sa mort, fait attention de respecter le présage céleste, mais ne peut échapper à son destin. Pour Antoine Vitez, c'est ce qui en fait une tragédie au sens échylien. Les présages et les oracles étaient pour le peuple d'Ayti une façon de se guider et de vivre en harmonie avec la nature. J'utilise ce contexte historique pour créer une fiction. Dans cette pièce, on ne voit pas l'action. On parle de ce qui s'est fait, de ce qui va se passer. D Propos recueillis par LAURE LASFARGUES 1 2 Jusqu'au 26 mars, Le Réveil Différences: Quand vous mettez dans la écrit et mis en scène par Pascal bouche du guerrier Camalo, le mari Anacaona, jusqu'au 23 avril, en alterRambert. Une pièce cruelle, drôle: un d'Anacaona: «Jurons de boire le sang nance avec le Misanthrope. Théâtre najeune metteur en scène à suivre. de ces envahisseurs, de tannerleurs peaux lional de Chaillot, tél. " 47.27.81.15. (Une l!If!I (Théâtre Paris-Vilette. Tél. : pouI r en fali re des ~amlacs?», vous dissi- eXPOSi!ionèslur des .obJd·ets d'AYlltèildu xv)e iii L4-2_.0_3._02_.5~ 5). _____________~ ~m u _ez_ m_a_ _v_ot_re_ r_ev_o_ te_ •_ __________et_ X_V_Ie_ s_i _ce_ s_'y_ t_ie_n _r_a _pa_ra_ __em_e_n~ t. BLOC-NOTES YVES THORAVAL YIDDISH. Quelle bonne idée ont eu Charles Dobzynski de mettre à jour sa classique et quasi unique en français Anthologie de la poésie yiddish,' Le Miroir d'un peuple, et la collection Domaine yiddish des éditions du Seuil de la rééditer ! Si le « peuple» qui parlait et écrivait cette langue a presque entièrement été assassiné par les Nazis, si peu de jeunes l'apprennent, ce n'est pas une raison pour la laisser mourir dans les mémoires, d'enterrer un patrimoine qui appartient à toute l'humanité. Plus de 90 poètes de Pologne, de Lituanie, de Russie, de France, des Etats-Unis et d'Israël, sans parler des autres de tous les coins du monde, sont présents dans cette anthologie par près de 600 poèmes : une bibliothèque entière, l'écho puissant d'un monde englouti! VIDEOTHEQUE. Un nouvel équipement de choix vient de s'ouvrir aux Halles, en plein coeur d'un Paris cruellement meurtri par la spéculation immobilière. La Ville de Paris a décidé la création, sans doute une première mondiale, d'un formidable outil de conservation et de consultation des archives audiovisuelles concernant la capitale : sur 4 000 m2 de locaux équipés d'un matériel informatique et robotique dernier cri, « servi» par 60 documentalistes, sont déjà conservés 2 500 films et 1 200 heures de son sur Paris, accessibles à tous les publics. Scolaires, documentalistes, historiens, curieux de tout poil peuvent consulter à la carte ces documents en salle de lecture ou en salles de projection. B RESIL - 100000 LIVRES. Sous l'égide de la Maison d'Amérique latine et de l'Alliance française, une initiative intéressante, qui devrait être répétée pour d'autres pays: une collecte auprès des éditeurs, des bibliothèques, des particuliers, a permis d'envoyer gratuitement au Brésil, où la demande est très forte pour la culture française, 100 000 livres partis du Havre pour Santos. Masque d'Antilope en bois (Côte-d'Ivoire) techniques du métal chez les Senoufos, à travers une centaine d'oeuvres, dans une approche à la fois ethnographique et esthétique. Pendant la duré.J!.-de l'exposition, un atelier d'enfants, consacré à cette technique, fonctionnera au musée. D CINEMA DU REEUAN X. Une des plus importantes manifestations internationales concernant le film documentaire, le Festival-Cinéma du réel, patroné par la. Bibliothèque publique d'information (BPI) a 10 ans. Cette année, elle présente des films des pays nouvellement entrés dans la CEE (Grèce, Espagne, Portugal), une dominante sur les Celtes partout où ils se trouvent en Europe, un panorama mars • . L~"$J'f!m~m~~ la rencontre .. "'·'. ... T .. i,.,.., .... efMoll · ,t"lalnd~ers. '-"'Uu'!;' Jç dé!;esp~()ir et l'injustice •: deux époques.« La. Resserre», cité '. internationale unîversitair~(24, bd •.. Jourdan. 75014 Paris). . 14 ~4si::û~i~ t:~i' ::Charles 17 janvier 2012 à 14:14 (UTC)l~ au une création fantaisie, un conte bizarre, au théâtre du Campagnol. Mise en scène par Jean-Claude Penchenat à Châtenay-Malabry. Tél.· ; 46.61.14.27. 18 t:s C;:i:i:Charlesu~~l ChantiUy ; l'Asie à travers le Pacifique. Deux journées d'études et de conférences sur une région et . une culture mal connues. Rens. :44.57.24.60. 1· 9 Journée exposition sur les pays . . de l'Afrique du Nord et de l'Ouest. Vêtements, objets de décoration, bijoux; recettes de cuisine. Dans lasaUe du foyer Picoulet. 59, rue de la Fontaine-au-Roi, 75011 Paris. 2 4 Eclatez-vous de flamenco avec El Camaron de la Isla, de retour au Cirque d'hiver. De son vrai nom Jose Monge Cruz, le « gitan magique» représente toute l'ardeur créative de jeunesse espagnole. A la guitare: Tomatito. Rens. : Pomelo 42.77.17.08. du cinéma du réel français (1986-87) et, en avant-première, le très JAZZ·ROCKEN QUATRE 1 Quatre important The Journey du britannique mois de festival jazz-rock, c'est la Peter Watkins sur la paix, le racisme, promesse d'Art Scénique 78 (et les le désarmement, la manipulation de vieilles dentelles alors ?) qui annonce l'information tourné dans 13 pays quatorze COmmunes, vingt-sept (durée 14 h ... en plusieurs fois). concel'ts et trente groupes étalés sut D'une manière générale, Cinéma du totis les week-ends jusque fin juin. Le réel est à suivre, car c'est la seule tout avec le soutien de l'antenne du manifestation de ce type en France, un Printemps de Bourges. forum pour découvrir et acquérir des Rens. 34.85.89.04. 0 films impossibles à voir ailleurs. Vidéothèque de Paris: Porte Saint- PHOTO CAPITALES. Le Prix Air Eustache, 75001 Paris. Tél. " France Ville de Paris peut être 40.26.34.30, Grande Galerie. remporté par tout photographe Cinéma du réel: BPI/Centre professionnel ou amateur prése:q.t~par Pompidou. Tél. " 42.77.12.33. son club de photo et désireux Musée des Arts africains. Tél. " d'effectuer un reportage photo sur une 43.43.14.54. capitale d'Europe, de l'Ouest comme Paris-Audiovisuel: 35 rue La Boétie, de l'Est. .. 7.'5008 R . 'T'ël 43 5933 6 Pour cela il faut constituer un dossier S 0 0 ans. 1 •• ,' • • • 1. Prix . EN UF . Paroles de devin,' la P.L. Weil/er. Institut de France,' accompagné d'un: choix qe ses propres fonte à cire perdue chez les 23 quai Conti, 75006 Paris. photos et l'adresser à Paris. Senoufos de Côte d'Ivoire. Ce titre Audiovisuel avant le8 avril. A Erratum: Le Prix P.L. Weiller, que mystérieux ne cache pas le canular j'annonçais le mois dernier ici, concerne cette l'acceptation du projet, Air France d'anciens étudiants de Lévi-Strauss, année la sculpture et non la peinture et est offrt: le billet d'avion et une semaine mais c'est le titre d'une exposition ouvert également à des oeuvres non réalisées dans la capitale choisie et les lauréats présentée jusqu'au 9 mai au Musée en France. Deux prix de 10000 F sont verront leurs oeuvres exposées en 1989 attribués à des sculpteurs de moins de 35 ans '-'";d~es-;:;:;-A_r_ts_a_fr_ic-::-a-:::in;,;,s_et;-;-o_ce_'a ;::n;-;;ie:;;-n_s_,_q_U_i_s_e _et_ u_n_G_r_a_nd_p:,.rix_.de_30_O_OO...:..,..F_à_u_n_ e_ _a_rt_is_te_ _. i.....,;à_._l'_E. S..P ... a _C.. e.. . .P. ... h _.O... t _o.. g... .r..a _.p..h .. .. i. q. u... e_d.. .e... ...p _.ca.. . i..s. .. .. _....J j 'I veut une initiation aux arts et sans limite d'âge. Mea Culpa ! 0 Différences - n° 76 - Mars 1988 L'Institut du monde arabe Paris est devenu, au fil du temps, la capitale de la création arabe. L'ouverture de l'Institut du monde arabe confirme cette réalité. Yves Thoraval nous invite à une visite gUidée dont on sort désireux d'en savoir plus ... Après cinq ans de préfiguration, et toujours suspendu aux arriérés non payés d'une partie de ses membres, l'Institut du monde arabe a ouvert les portes de son superbe bâtiment conçu par Jean Nouvel, sur ses 27 000 m2 consacrés à la culture arabe et à la civilisation islamique. La nef de verre de la façade en moucharabiehs (dont les milliers de diaphragmes d'acier mobiles se meuvent selon la luminosité) avec sa proue formée de la Tour des livres, est devenue un point de repère du paysage parisien. Fiché au coeur historique de Paris, l'IMA symbolise les liens séculaires de la France et du monde arabe, ainsi que la présence d'une importante composante arabe de la ~osaïque démographique française. Créé en 1980 par dIXneuf Etats arabes (à l'époque) et la France, sans l'Egypte, exclue pour cause de paix avec Israël, une exclusion bien embarrassante quand on songe au poids déterminant de ce pays dans la culture arabe passée et présente, l'IMA ne veut être ni un mini-UNESCO étouffé par la bureaucratie ni une caisse de résonance des querelles et des pressions interarabes, pourquoi l'IMA ? Pourquoi une institution unique en son genre, basée dans un projet bi-culture~ et bilingue destiné d'abord au public européen? PourquOI à Paris? Par sa place de première puissance méditerranéenne, par l'histoire, depuis les Capitulations, les Lumières, Bonaparte en Egypte, par sa présence coloniale non seulement au Maghreb mais aussi au Liban et en Syrie, tout cela accompagné et suivi d'un rayonnement linguistique et c~lturel indéniable jusqu'aux années 50, la France a un role majeur à jouer comme truchement entre l'Europe et le monde arabe. UNE OASIS AU COEUR DE PARIS Et puis, un fait nouveau a surgi: sans parler de la qualité de ses chercheurs « branchés » sur le monde arabe, Paris est dev~nue la capitale de la création arabe contemporaine, celle des Maghrébins certes, mais aussi de nombreux Libanais depuis l'assassinat de Beyrouth et d'Egyptiens, depuis qu'une chappe grise tend à assombrir la vie culturelle de leur pays. Ils trouvent ici une atmosphère de création, de cosmopolitisme, de liberté intellectuelle et de vie privée, qui font, hélas, cruellement défaut dans la plupart des pays arabes où les contraintes sociales, politiques, les « traditions », sans parler de l'intolérance de plus en plus bruyante, ne leur sont guère propices. Des écrivains, des cinéastes, des artistes, des journalistes majeurs du monde arabe sont venus s'installer à Paris, qui héberge parmi les meilleurs périodiques publiés en arabe, parmi les meilleures galeries d'art dirigées par des Arabes ou promouvant les artistes de ces pays, ainsi que d'excellentes librairies. Et puis, deux millions et demi d'Arabes ou leurs descendants, sans doute quatre millions de musulmans, vivent en France et Paris ne pouvait dire non à un projet, à une utopie devenue réalité, destinée à ce que les deux communautés se connaissent mieux. Un outil de développement des relations euro-arabes On peut gager que l'IMA sera pris d'assaut autant par des Français et des Européens que par des Arabes résidant en Europe ou citoyens des pays européens. L'IMA sera l'instrument non seulement de la connaisssance et de la compréhension du monde arabe mais également un outil du développement des relations euro-arabes, dans un dialogue d'égal à égal. Chercheurs, étudiants, spécialistes, certes, viennent en premier lieu y chercher leur manne mais également des curieux, des amateurs de tout poil, des touristes, des groupes, des enfants et des scolaires particulièrement choyés car c'est d'eux que viendra un changement de mentalité. Le musée, tout d'aluminium bleuté, offre sur 4 400 m2 et sur plusieurs niveaux (entrée au 7e étage et sortie au ... so~s-sol), un choix de plusieurs centaines de pièces (200 acqUIses sur le marché des dons et près de 400 dépôts du Louvre, du Musée des A:ts africains et océaniens, des Arts décoratifs) illustrant les principaux arts et techniques de la civilisation araboislamique (1) : céramique, miniature, instruments scientifiques anciens, tapis, tissus, bijoux, dans une conception novatrice et suivant une pédagogie raffinée. Cette collection illustre les grandes étapes de la civilisation née de l'islam arabe, depuis l'Arabie du Sud (anté-islamique) aux créations artistiques les plus contemporaines et d'avantgarde réalisées par des artistes arabes. Trois grands chapitres se partagent le panorama : une introduction à la civilisation arabo-islamique, les développements historiques de l'Islam (premiers califes, Omeyyades, Abbassides, mouvement scientifique), la variété du monde musulman (du Maroc à l'Inde et à l'Asie centrale). Puis une section plus ethnographique, Arts et Société Arabes introduit le visiteur à la connaissance, de l'intérieur, des sociétés arabes contemporaines (1ge et 20e siècles) ainsi qu'à la musique traditionnelle et moderne. La section d'art moderne est un véritable enchantement. Des ateliers initient les enfants à la calligraphie, au conte, à la danse, à la musique, à la poterie, complétant un ensemble remarquable plus par la qualité de ses pièces et de son personnel que par un amoncellement quantitatif. Un centre de documentation sur les arts fonctionne pour les chercheurs, les enseignants, les experts eL .. tout un chacun. La bibliothèque est le deuxième fleuron de l'IMA, très ouverte et fréquentée même si son fonds actuel de 35 000 volumes en français, arabe et anglais, (100 000 plus tard), appartiennent plus à la lecture spécialisée qu'à la lecture publique. La bibliothèque possède également sept cents collections de périodiques, des cartes, des atlas, des micro-documents, des didacticiels. Quant à la fameuse« tour des livres », elle abrite plus de trois mille volumes pour le prêt, tous les autres étant en accès libre dans les salles de lecture (tranquilles et calmes !), et couvrant tous les types de documents dans tous les domaines des sciences humaines et sociales, de l'histoire, de la religion, de la politique, de la littérature, y compris enfantine, des arts ... Enfin, un logiciel maison, bi-alphabétique latinarabe, est consultable par les lecteurs, à partir de 25 terminaux permettant d'effectuer des recherches indifféremment dans la langue choisie, avec ou sans l'aide du personnel présent (Minisis). L'IMA innove avec sa médiathèque, complémentaire d'ailleurs de la bibliothèque, selon une tendance, Dieu merci !, de plus en plus courante. Elle est divisée en plusieurs sections qui favorisent aussi bien la documentation personnelle que la rencontre: d'abord, une salle d'actualité (comme au Cen- L'Espace image-son du département audiovisuel est certainement le joyau de l'IMA, pas seulement pour son spectaculaire Mur des télévisions arabes, (vingt-deux télévisions des pays membres plus deux canaux de programmes IMA), fenêtre ouverte sur l'inédit aussi bien pour les Français que pour les Arabes souvent plus mal informés que nous sur ce qui se passe dans les pays frères, mais également pour son fonds documentaire hors-pair: quinze mille diapositives (plus tard cinquante mille), trois mille tirages sur papier de gravures et de photos, deux cents films documentaires (six cents à mille dans l'avenir), six cents heures de son sur disques et cassettes (trois mille prévues). Dix postes de consultation sont à la disposition du public, servis par des robots et un système de vidéodisques La place manque ici pour tout dire sur l'IMA : nous reviendrons sur ses activités au fil des mois. Signalons qu'un important département des Relations culturelles conçoit la programmation de Ciné-IMA, une importante et très publique initiative pour initier un vaste public à tous les cinémas arabes et pour stimuler des débats sur de grands thèmes : « La femme dans le cinéma arabe », «Le cinéma colonial », «Omar Charif », « Orient, mythes et réalités », etc. Par ailleurs, ce département a un rôle actif d'aide à l'édition (traductions de grands textes contemporains arabes), de conception d'expositions qui tournent en France, en Europe, dans le monde arabe, etc. Il faut fréquenter l'IMA : c'est une chance pour nous Français et pour les Arabes: pour se rencontrer, pour se connaître, du stade de l'initiation à celui de la spécialisation. A une époque où l'inflation documentaire et la complexité des activités intellectuelles demandent une information sûre et rapide, l'IMA a une grande vocation

celle d'être à l'avant-garde des grands centres spécialisés

dont nous aurons de plus en plus besoin, sur chaque grand domaine de la pensée et de l'activité humaine. YVES THORAVAL 1. Voir La formation de l'art islamique, par Oleg Grabar, traduit de l'anglais par Yves Thoraval, éd. Flammarion, 1987. IMA-MODE D'EMPLOI tre Pompidou) où le visiteur peut, installé confortablement, Institut du monde arabe: 23, quai Saint-Bernard, 75005 Paris, (méconsulter les documents les plus récents sur le monde arabe tro : Sully-Morland, Jussieu. Tél. : 46.34.25.25 (y compris Ciné-IMA). ou bien assister à de multiples formes d'animation: rencon- Tél. : visites groupes et scolaires: 46.34.15.20. tres avec des créateurs, débats, expositions « légères », concerts avec initiation à la musique; ensuite, un centre de do- Laissez-passer annuel: 75 F. cumentation extrêmement précieux, car il permet l'accès à mille ouvrages de références, à des statistiques, des annuai- Heures d'ouverture: Espace audiovisuel, musée, expositions tempores, des guides, des ouvrages de généralités, à mille cinq cents raires, salle d'actualité: tous les jours, sauf le lundi, de 13 h à 20 h. dossiers de presse thématique et à une centaine de périodi- Bibliothèque: du mardi au samedi inclus, de 13 h à 20 h. Centre de ques d'intérêt général, ainsi que l'accès à plusieurs banques documentation: idem, de 14 h à 18 h 30. III ~d~e~d~o~n~n~ée:s~t~h~é:m~a~t~iq~u~e:s~su~r~le~m~o~n~d~e~ar~a~b~e~' ________________ ~:::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::J Différences - n° 76 - Mars 1988 Mouvement Le MRAPest là, toujours, partout où il faut réagir au racisme. On le voit en tête des manifestations, il se porte partie civile pour faire condamner les auteurs des crimes racistes. Quand des paroles ou des écrits provoquent au mépris ou à la violence, calomnient un groupe - immigrés, juifs, Arabes, Noirs ou tsiganes -, quand un droit est refusé à quelqu'un à cause de son origine, là encore, il fait jouer la loi de 1972, cette loi qu'il a élaborée et fait voter après treize années d'efforts par le Parlement unanime. Le procès Barbie, l'affaire du Bordeaux-Vintimille, celles de Menton, du Puy, de Châteaubriant, les poursuites contre Papon, Faurisson ou Le Pen sont des illustrations parmi les plus notoires, de son action judiciaire ... On lit ses communiqués dans la presse ou sur le minitel. On connaît ses tracts, ses affiches, ses badges et ses autocollants, son mensuel Différences, ses brochures, ses dossiers pédagogiques, ses documents qui servent de référence dans maintes campagnes nationales, par exemple, contre la réforme du code de la nationalité ou les mesures antiimmigrées de M. Pasqua. On consulte ses permanences juridiques lorsqu'on a un problème de papiers, un conflit entre voisins ou dans son travail, si on est victime d'une injure ou d'une bavure. On sait qu'il organise des réunions d'information, des débats, qu'il intervient dans les lycées, qu'il propose des expositions, des films, des vidéocassettes. Avec ses quelque trois cents comités, on le rencontre sur le terrain, dans les quartiers, sur les marchés du dimanche, aussi bien que dans les préfectures et autres organismes officiels où il peut faire entendre sa voix contre l'injustice, pour l'égalité. Des personnalités célèbres signent ses pétitions, accompagnent ses démarches. Il y a aussi les fêtes de l'amitié, et tout ce qu'il acomplit pour que les gens différents se rencontrent, se comprennent, agissent ensemble. On apprécie son combat contre l'apartheid et l'ensemble de ses Son engagement quotidien, sa vigilance semblent aller de soi. Le MRAP est entré dans les moeurs. Et l'habitude fait qu'on ne se demande même pas comment il s'y prend pour réaliser tout ça. On ne pense même pas à l'aider. Puisqu'il s'affirme, obstiné, debout malgré les attaques, quels que soient les changements politiques et sociaux, pourquoi s'inquiéter ? On ignore ainsi ce que nécessitent de travail, de dévouements, de moyens, cette polyvalence et cette omniprésence. Et si, un jour, il s'arrêtait? Et si Différences, comme tant d'autres publications disparaissait ? Précisément, le Conseil national du MRAP, à sa réunion du 30 janvier, a examiné les graves diffi-. cuités financières qu'affrontent le mouvement et son mensuel : cotisations, abonnements et dons bien au-dessous des besoins et des possibilités, chute des subventions, ressources publicitaires médiocres, manque d'adaptation aux méthodes nouvelles de soutien (sponsoring, coproductions, médiatisation, mécénat, etc .) dont dépend de plus en plus la vie associative. Il a lancé un cri d'alarme. Il s'adresse à tous les amis, à tous les antiracistes : activons les rentrées de cotisations, recrutons de nouveaux membres et abonnés, offrons et collectons des dons personnels (donnant droit à une réduction de 1 % dns les déclarations d'impôts), diffusons Différences, faisons adhérer des « personnes morales» (associations, syndicats, municipalités, sociétés, comités d'entreprises, centres culturels, etc.), avec lesquelles diverses formes de coopération pourront s'instaurer. Et surtout, ayons toujours à l'esprit l'indispensable souci d'assurer, de façon judicieuse, le budget de nos initiatives, de nos projets. Ils sont des millions dans ce pays, prêts à riposter au racisme et qui approuvent l'action du MRAP. Ils peuvent l'aider. Il ne peut aller de l'avant qu'avec eux. 0 ALBERT LEVY .ESSONNE: LA FEDE EST NEE. Fin février, les militants de l'Essonne se sont dotés d'une fédération départementale. Pour marquer le coup, Vania, auteur compositeur interprète, a animé le pot, et Pierre Krausz, président de la commission Antisémitisme et néonazisme, a participé au débat qui portait sur la situation des travailleurs immigrés et des gens du voyage dans le département. Avec l'aimable appui de la municipalité de Palaiseau. 0 • MONT -DE·MARSAN. Dulcie September, représentante de l'ANC en France, j.-L. Sagot-Duvauroux, membre du BN du MRAP, un jeune de Sos Racisme (remplaçant un membre du BN empêché), Philippe Labeyrie, sénateur-maire, ainsi que le président du conseil général, ont participé, fin janvier, à une réflexion sur l'action antiraciste et l'apartheid. Trois cents personnes se sont déplacées, la lettre de Charles Palant au P-DG d'Antenne 2 a été largement diffusée. 0 • LIMOGES EN MARS. Une grande fête de l'amitié entre les peuples aura lieu le 19 mars à Limoges. De 16 h à minuit (au moins), la salle municipale des sports (rue des Soeurs-de-la-Rivière) accueillera les adhérents, militants et sympathisants du MRAP, mais aussi tous ceux que les préjugés et la haine indisposent au plus profond d'eux-mêmes. Une grande fête pour discuter, se détendre, ou simplement aller à la rencontre des autres. Réservez cette date. 0 • DREUX: LE SECOND SOUFFLE. Le nouveau bureau et l'ensemble du comité de Dreux ont trouvé un cc second souffle ». Une soirée-débat sur le Code de la nationalité, des affichettes trilingues donnant les numéros de téléphone des militants, une lettre ouverte relative aux expulsions adressées au préfet ont permis de relancer l'action du MRAP local. Avec Dreux Fraternité, l'expulsion d'un Turc d'origine kurde a été empêchée. Un tract sur le procès Barbie a été distribué, rappelant le lien entre le nazisme et les discours de l'extrême droite actuelle. Deux actions sont envisagées, autour de la Nouvelle-Calédonie et du Proche-Orient. Pour les militants de Dreux, «le "régime colonial" continue, cela est une honte et un danger pour la France». Une soirée d'information est prévue à propos du dossier explosif de la Palestine car « il faut arrêter le massacre d'innocents en Terre Sainte ». Un appel est lancé aux gens de Dreux : « même avec nos effectifs en légère augmentation, nous avons besoin de têtes, de bras et ... d'argent». A bon entendeur salut! • DIFFERENCE 88. C'est à l'initiative d'un collectif antiraciste de Pau, un festival musical et culturel qui porte ce nom. Côté musique: Salif Keita, côtè exposition : Vivre ensemble avec nos différences et Quand les Basques étaient des immigrés. Et puis du cinéma, des contes ... Rens. : 59.30. ou 53.33. 0 • INCIDENT. La fédération MRAP du Vaucluse avait saisi le ministre du Travail de discriminations exercées dans les stages de formation professionnelle (cf. Différences de janvier 1988). Le ministre a répondu, admettant le bien-fondé de la protestation. Le directeur de la Population et des Migrations, dans sa lettre, affirme qu'après vérification, «il est exact qu'un travailleur s'est vu refuser l'accès à un stage parce qu'il n'était pas ressortissant d'un pays européen ». « Incident regrettable », dû à une mauvaise information, écrit le directeur, qui annonce que des mesures seront prises pour éviter que cela ne se renouvelle. Dont acte. 0 • CONFERENCE DE PRESSE. Monique Rémond (comité de Chartres), Patrice Alliot (Châteaudun), Gérard Rousseau (Dreux), et Albert Lévy ont animé le mois dernier une conférence de presse à Chartres. L'accent a été prioritairement mis sur l'abrogation de la loi Pasqua, la campagne du mouvement contre les cinq cents signatures pour Le Pen, le droit de vote des immigrés. La presse régionale s'en est {ait Il activités internationales. l'écho. 0 L-__________________________ ~----------------------------------------~ ANNE FRANK : POLEMIQUE L'ambassadeur de France aux Pays-Bas s'est plaint auprès du maire d'Amsterdam, à propos d'une exposition sur la montée du racisme en France, exposition organisée par la fondation qui porte le nom d'Anne Frank. S'appuyant sur quelques lettres provenant de citoyens français, il reproche à la fondation « l'immixtion dans les affaires intérieures de mon pays ». Les lettres des visiteurs français semblent révéler une certaine indignation devant ce que les auteurs considèrent comme un amalgame entre l'extrême droite française représentée par Le Pen et laprésentaUon faite du racisme au quotidien que subissent les travailleurs Immigrés. La fondation persiste et signe. Elle affirme clairement: « Nous ne considérons pas Le Pen comme un homme politique Intègre », et précise: « A la fin de l'exposition, .Ie grand nombre de forces antiracistes de votre pays est mis en relief. » Le MRAP a d'ailleurs été invité en la personne de .$on président, Roland Rappaport, ft un débat org.anisé à l'occasion de la publication par la fondation d'un livre sur le Front national. La fondation a invité le diplomate à venir voir de ses propres yeux la rétrospective, afin de se faire une idée par luimême. Mais l'ambassadeur reste sur le ton du désaccord: « J'al visité la maison d'Anne Frank 1/ y a plus de dix ans. J'y reviendrai lorsque vous aurez renoncé à donner des leçons à /a France. » Question: notre représentant aux Pays-Bas pêche-t·U par na· tionalisme étroit? Déconnexion par rapport aux réalités nationa· les? Un quiproquo l'aurait·Ubuté sur une position pure et dure? 0 • SOUILLURE RACISTE. Un homme, Félix Cadras, a été fusillé par les nazis au Mont Valérien en 1942. Une plaque commémorant l'exécution de ce résistant, membre du Comité central du Parti communiste français, rappelle sa mémoire sur un boulevard du 20- arrondissement de Paris. Cette plaque a été profanée par des inscriptions irréversibles qui tendent à mettre en cause l'identité nationale de l'homme et de son groupe politique. Deux associations d'anciens combattants et de résistants ont appelé à un rassemblement. Des membres du MRAP étaient présents. • ELECTIONS. «Chaque membre du MRAP est libre de participer, selon ses convictions, à la campagne électorale ; mais il ne peut honnêtement le faire qu'à titre personnel et dans un autre cadre que celui du Mouvement Différences - n° 76 - Mars 1988 où militent ensemble des antiracistes aux conceptions politiques et philosophiques les plus diverses. » C'est ainsi que la Lettre du Secrétariat rappelait aux membres du mouvement l'un de ses principes fondamentaux. La Lettre condamnait « l'abus de confiance » d'un membre du mouvement, Patrick Tort, qui, en se réclamant de cette appartenance, appelait au soutien de la candidature de Pierre juquin. • PLURALITE FRANÇAISE. Un colloque international intitulé Notre France plurielle : identités et intégration, s'est déroulé fin janvier, à Paris, organisé par l'association France Arc-en-ciel ( 10, rue Georges-Pitard, 75015 Paris). De nombreuses personnalités y ont pris part, ainsi que des personnalités politiques et des artistes. Le MRAP y était représenté par George Pau-Langevin et Nicole Annoncia de la commission Dom-Tom. Auschwitz, Le Pen et Antenne 2 Contre le quatrième passage de Le Pen à l'Heure de vérité, Charles Palant, - de la présidence du MRAP -, avait adressé au P-DG d'Antenne 2, une lettre de protestation : « Le 27 janvier, soulignait-il, jour de l'émission, est la date anniversaire de la libération d'Auschwitz ». Il ajoutait: cc Se peut-il qu'il ne se soit trouvé personne parmi vos collaborateurs, pour souligner ce qu'il pouvait y avoir d'indécent, de scandaleux, je n'ose dire de provocateur, à recevoir, ce jour-là, sur votre antenne, l'homme pour qui l'existence des chambres à gaz d'Auschwitz n'est qu'un détail, l'homme qui est le seul responsable politique français que les tribunaux ont a plusieurs reprises condamné pour racisme et anisémitisme. ( .. .) Rescapé d'Auschwitz moi-même, ce jour reste pour moi comme pour les rares survivants, celui du souvenir et du recueillement. A Auschwitz, furent gazés ma mère et ma soeur, alors âgée de dix-sept ans. A Auschwitz, furent gazés la mère de mon épouse ainsi que sa jeune soeur de quatre ans. Son père y mourut d'épuisement. Le 27 janvier, ce sera sur votre antenne, une fois encore, l'heure du mensonge et de la haine raciste et xénophobe, l'heure de la démagogie fascisante. » Beaucoup d'initiatives ont répondu à cette lettre-appel. A Saintes, le comité local du MRAP, avec la CGT, la FEN et le PCF, a manifesté, tout comme à La Rochelle. A Besançon, c'est au monument de la déportation que les manifestants se sont retrouvés. Mont-de-Marsan, Reims, Lorient, Vannes égaiement ont eu leurs rassemblement anti-Le Pen. A Saint-Etienne, l'Association culturelle israélite, le MRAP et la Licra se sont associés dans la protestation contre les facilités accordées à l'homme du « détail ». A Saint-Nazaire, la manifestation a coïncidé avec la naissance du comité local du MRAP. A Paris, deux manifestations ont eu lieu en deux jours, l'une à l'appel du MRAP parisien, l'autre à l'appel de plusieurs syndicats et organisations politiques. A Poitiers, 1 000 personnes rassemblées à l'occasion de la venue de Le Pen. Une réaction d'Antenne 2 ? Pensez donc ... Ah, si ! Un téléspectateur de Châteaudun a appelé la chaîne en demandant de diffuser la chanson que Louis Chédid a écrite en hommage à Anne Frank. Réponse de l'interlocuteur anonyme: cc j'adore Louis Chédid, et ne manquerai pas de lui faire savoir qu'il compte au moins un imbécile parmi ses admirateurs ... » Dans la lettre qu'il nous envoie, ce téléspectateur demande : cc Où "commence la lucidité ?» Pas à l'Heure de vérité en tout cas. 0 • ISRAEL-PALESTINE Le MRAP condamne la répression qui ne cesse de s'aggraver dans les territoires occupés par Israël. " demande le retrait des forces militaires, le respect des droits de l'homme, des conventions internationales et des résolutions des Nations unies. La violence ne peut avoir raison d'un peuple qui se dresse pour affirmer son existence et rée/amer la liberté. C'est ce que soulignent, en nombre croissant, les Israéliens soucieux de démocratie et de paix. Convaincu que le conflit israélo-palestinien n'a d'issue que dans la négociation, le MRAP se prononce pour l'ouverture rapide de la conférence internationale, proposée par le conseil de sécurité de l'ONU, qui implique la reconnaissance mutuelle et simultanée des parties en présence. En fonction de ces objectifs, le MRAP s'est associé à la manifestation qui a eu lieu à Paris, le mercredi 3 février, à 18 h 30, place de la République. Il Vitry Sur l'article Le vote des beurs, publié en janvier, le rappel de l'affaire du bulldozer de Vitry nous a valu ce courrier : ... « Votre article, à mon avis, révèle plusieurs choses

une défiance probable

vis-à-vis du PCF, voire une hostilité plus ou moins consciente, et aussi pas mal d'ignorance ... «Savez-vous que les Maliens avaient été « vidés» de SaintMaur par le maire de cette commune et transportés en pleine nuit, avec la participation des forces de l'ordre, dans lefoyer de Vitry qui était alors désaffecté? Quand parle-t-on de ce maire, connaissezvous son nom ou son appartenance politique? « Il y avait un grand rassemblement de communistes ce soir-là à Vitry; après le coup de force contre lefoyer, la colère les afait tomber dans le panneau et, pour faire bien savoir que lefoyer n'était pas en état, ils ont démoli le perron d'entrée avec un bulldozer: c'était une réaction idiote, mais ce n'était pas un acte raciste ... « Ça arrangeait bien du monde (politique) de profiter de cette occasion pour ternir le PCF sur le chapitre "travailleurs immigrés et racisme" ... chacun tentait ainsi de faire oublier un passé peu glorieux... les guerres coloniales où c'étaient pour l'essentielles communistes qui essayaient de s'opposer au départ des trains de soldats et qui ont parlé de sale guerre quand on voulait opprimer un autre peuple au nom des intérêts de la nation .. « Fille d'étranger, déjà au temps de mes parents, il n 'y avait que les communistes pour rappeler qu'il faut s'unir pour défendre ses intérêts de travailleur, qu'on soit français ou étranger, et dénoncer que l'immigration était faite pour mettre en concurrence les salariés et peser sur les salaires et les conditions de travail ... « L'histoire n'est pas finie ... je savoure le bonheur de ne pas me laisser faire ... je vous souhaite de bien vous battre, déjà contre le racisme, ce n'est pas rien; surtout en ce moment. » 0 Chopin S. FLAMENT Dijon et la « francité .. Suite à la lecture du dossier «Intégrez-vous, disent-ils dans Différences de décembre 1987, je me permets de vous adresser une petite remarque qui ne met pas en cause dans son ensemble ce dossier fort intéressant. Il s'agit de la « polonité » originelle de chopin et de sa « francité » de vie que j'ose contester, comme l'auteur me met au défit de le faire. Il se trouve que je connais bien la jeunesse de Frédéric Chopin, car les membres de la branche polonaise (éloignée) de ma famille ont été les protecteurs de la famille Chopin. En effet, le 15 mai 1778, le comte Michel-Joseph Pac, générai en chef des armées lituaniennes, s'installait à Marainville, en Lorraine, après avoir vendu sa « starostie ». Je résume. Son intendant avait affaire souvent avec le syndic du village de Marainville: François Chopin. Retourné en 1783 en Pologne et devenu général-major des armées lituaniennes, le comte rappela auprès de lui son intendant de Marainville qui arriva en Pologne en compagnie du jeune Nicolas Chopin, un des trois enfants de François Chopin, auquel il s'intéressait beaucoup. Nicolas devait devenir professeur de littérature et de langue française au lycée et à l'école militaire de Varsovie. En 1806, il cp ou sait une Polonaise de bonne famille: Justine Krzyzanosska, dont il eut d'abord une fille, Louise, puis, le 22 février 1810, un fils qu'il nomma Frédéric et qui devait devenir l'immortel musicien. Par la suite, le comte MichelJoseph Pac, puis son fils LouisMichel, qui devint le chef du célèbre 15e lanciers polonais avant d'être aide de camp de Napoléon 1 er, protégèrent toujours la famille Chopin. Tout ce long historique pour dire combien il faut se méfier des conclusions hâtives. Car l'auteur de ce dossier aurait dû plutôt parler de la «francité» originelle de Chopin et de la « polonité » de sa vie, au lieu de l'inverse comme il l'a fait. Car Frédéric Chopin, né de père français en exil, est un exemple parfait d'intégration de la deuxième génération. Il fut toute sa vie un patriote polonais actif, même s'il vécut longtemps loin de son pays, en France principalement. Il ressentit profondément les malheures de sa patrie et la douleur qu'il en éprouva a marqué plusieurs de ses oeuvres. 0 ROBERT PAC Paris Les Petites Annonces de Différences Prendre un jour ou plus pr ~ rompre le rythme. Centre d'ac-' cueil à 1 174 m dans la nature. Point de vue excep. Petit prix, silence, beauté. Refuge sanctuaire. 06450 Madone d'Utelle. Tél. : 93.56.90.39 (nO 334). Détente dans un hameau auvergnat. 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Notes

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