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Sommaire du numéro

n°253 de janvier 2005

  • Vu à la télé, racisme et média: la représentation de l'autre est au cœur du racisme par R. Verlaque
  • Gens du voyage: Rom et Forum par Didier Daeninckx
  • Réunion des PST: islamophobie? Par Alain Gresh
  • Congrès du MRAP:
    • intervention de Mouloud Aounit
    • Mondialisation-immigration: compte-rendu de l'atelier coanimé par B. Hétier et J.M. Bourquin
    • Projet de motion de l'atelier mondialisation-immigration
    • Le MRAP, la mondialisation et la constitution européenne
    • Évolution du racisme compte-rendu de l'atelier coanimé par J.C. Dulieu et I. Sirot
    • Racisme anti-arabe, enjeux, problématique et pertinence du concept d'islamophobie
    • La Laïcité compte-rendu de l'atelier coanimé par M. Lellouche et M. Carrel
    • Les moyens de l'antiracisme: compte-rendu de l'atelier coanimé par M.A. Butez, L. Lainé et G. Kerforn
    • International: compte-rendu de l'atelier coanimé par R. Le Mignot, E. Benaroche et A. Vocaturo
  • Rwanda: le devoir de mémoire par R. Le Mignot
  • Europe forteresse
  • Peine de mort, raison d'état et discriminations économiques, culturelles et politiques: intervention de M. Mendès-France
  • 55e anniversaire du MRAP: les fêtes du Nord


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Texte brut du numéro

MOUYIMENT CONTltE LE aACISME ET POIla l'AMinE ENTItE ln PEUPln ) "'- dt • Diff~rtnttS • V(IUS prrscnk srs mtilkurs voeux -. :::..~~ .~.. , , , • 1, , 2 Sommaire Edito International Dossier Immigration Discrimination Education Kiosque Illustration de couvenure Hassan Musa est peintre, illustrateur et écrivain. Diplômé en peinture de l'Ecole des Beaux-Arts de Khartoum au Soudan, il a obtenu un doctorat en Histoire de l'Art à l'université de Montpellier en France. Ses oeuvres ont été exposées dans de nombreux pays d'Afrique, du Moyen-Orient, d'Europe et aux Etats-Unis. Il nous a fait le plaisir, pour la nouvelle année, d'offrir une gravure à Différences. Merci, Hassan! Edito Gens du vovage • Rom et forum Nouvelle année • Meilleurs voeux Réunion PST • Débat: islamophobie 1 Dossier • Intervention de Mouloud Aounit • Mondialisation-immigration • Evolution du racisme 3 4 5 6 1 • La laïcité • Les moyens de l'antiracisme • International International • Rwanda: le devoir de mémoire .1 nternationa 1is ation Europe • Europe forteresse En bref ... • Les fêtes du Nord: 55e anniversaire du MRAP Année 2004 " Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - Janvier-février-Mars 2005 26 28 29 30 de Mouloud Aounit « Différences» 43, bd de Magenta 75010 Paris Téléphone: 01 53 38 99 99 Télécopie: 01 40 40 90 98 6€ le numéro Abonnement: 21 € (4 numéros/an). Collectif de direction: • Directeur de publication: Mouloud Aounit • • Directeur dè rédaction C') : J.-c. Dulieu jcd.mrap@wanadoo.fr • Responsable productions C') : S. Goldberg • Administratrice (') : M.-A. Butez Imprimerie: Impressions J·M. Bordessoules Téléphone: 05 46 59 01 32 Commission paritaire n° 0108H82681. (') - Bénévoles Edito Edito ! International ! Dossier ! Immigration ; Discrimination i Education 1 Kiosque Le 4 et 5 décembre à Bobigny restera comme une date importante dans la vie de notre mouvement. Ce Congrès fut un moment attendu par tous pour que le Mouvement se retrouve, analyse, dissèque le long et rude chemin parcouru depuis 200l. Pour servir, façonner et construire l'avenir commun qu 'est la défense, la promotion du respect sans exclusive du droit à l'égale dignité des hommes et des peuples. Pour donner un sens, une visibilité, un quotidien à cet objectif cardinal du MRAP

agir et faire émerger l'impérieuse nécessité d'oeuvrer collectivement à ce combat contre tous les

racismes sous toutes ses formes. En un mot: donner sens et vie à l'universalité par l'indivisibilité du droit au respect de tous les hommes et de tous les peuples. C'est notre réponse à la haine et à ce poison mortel pour nos valeurs qu'est le communautarisme, véritable danger pour le devenir du vivre ensemble. La période écoulée a été pour tout le MRAP une exaltante et rude épreuve. Le libéralisme sauvage, brutal, sans conscience, a généré non seulement des inégalités de plus en plus insupportables, mais a libéré violence, haine, guerre et aggravation des facteurs de production du racisme dans le monde. En France, les dégâts du 21 avril, la montée de toutes les formes de racisme et surtout les passages à l'acte, les attentes angoissantes des demandeurs d'asile, des sans papiers, victimes expiatoires d'une Europe forteresse, ont amené le MRAP à être au rendez-vous de toutes ces exigences dans des conditions matérielles particulièrement difficiles. C'est à ces exigences de solidarités et à ce devoir d'agir et d'éclairer sur les causes de ces malheurs humains qu'il convenait de répondre. Ce congrès a été et demeurera porteur de plusieurs leçons importantes que nous nous devons collectivement de savoir lire, et encourageantes pour l'avenir de notre raison d'être. Tout d'abord, la maturité et l'exigence qu'ont exprimé les congressistes à travers l'abondance, la diversité et la richesse des motions et contributions mises en débat. Puis l'échange sans tabou sur des sujets d'actualité qui ont passionné, passionnent et troublent notre société, qui ont soulevé et soulèvent débats, incompréhensions, besoins de clarification à l'intérieur même du mouvement, à savoir l'évolution profonde des manifestations du racisme dans le contexte actuel des sociétés Européenne et Française, que ce soit sur la laïcité, tout particulièrement la résurgence sous des formes anciennes et nouvelles de l'antisémitisme, la persistance du racisme colonial et post-colonial avec son prolongement de l'islamophobie, le racisme anti Tsiganes et anti Rrom ; ajoutons le besoin exprimé avec exigence d'explication du mandat conféré à la direction sortante, d'un effort renouvelé d'information, de communication et de compte rendu à l'égard de tout le mouvement et de chacun de ses militants. Dans le combat et dans l'épreuve, le MRAP a gagné, non sans une certaine difficulté, une victoire d'opinion reconnue, celle d'avoir posé l'exigence d'une reconnaissance et d'une mobilisation collective de tous contre le racisme sous toutes ses formes et qui fait du MRAP aujourd'hui une des références incontournables dans l'espace antiraciste français. Il nous appartient demain comme hier de nous employer à le faire vivre avec l'ensemble des citoyens et des organisations démocratiques qui partagent nos valeurs. Ce congrès a ainsi renouvelé le fait que le MRAP est un mouvement d'action qui obéit à un antiracisme de contenu, exigeant: la nature même des débats, leur intensité ont révélé à l'opinion cette réalité. Certes, des expressions plurielles se sont exprimées tant sur les questions vécues comme brûlantes de l'islamophobie et de la laïcité notamment. Les différences visibles des approches, des analyses, ne constituent pas, en tant que telles, un obstacle ou un handicap. Elles révèlent plutôt le nécessaire approfondissement que le mouvement doit faire sur ces sujets pour mieux servir la cause de l'égale dignité de tous les êtres humains. Ces différences doivent être considérées comme des éléments utiles pour la construction permanente d'un antiracisme exigeant et efficace. Ce Congrès doit ainsi avoir des lendemains qui prolongeront et approfondiront, par la réflexion, le sens, le contenu, et les priorités à retenir pour demain. Enfin et surtout, outre la solidarité envers toutes les victimes de toutes les formes du racisme, il reste le défi central qu'est la nécessaire mobilisation des consciences individuelles et collectives pour, sinon extirper, du moins priver de tout fondement et délégitimer, dans les têtes et dans les faits, ce poison mortel du racisme. Cette responsabilité pèse désormais sur les épaules de chacun d'entre nous. " Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - Janvier-f évrier-Mars 2005 3 4 Edito International Dossier Immigration Discrimination Education i<iosque Gens du voyage Par Didier Daeninckx * Depuis des siècles, des hommes, des femmes, sillonnent l'Europe, franchissent les frontières, soulèvent les rideaux, même s'ils sont de fer, s'installent là où leur vie le demande. " Médecins du Monde" attirait l'attention des pal1icipants au Forum Social sur ces mangeurs de vent en projetant, à Saint-Denis, le film Gadjo Dilo de Tony Gatlif qu'on peut trad uire par l'étranger fou. Tous ceux qui ont vu cet hymne musical à la libel1é partagent un secret : Tony Gatlif est l'un des cinéastes les plus importants de cette époque et nul doute que cela finira par se savoir. Ils savent aussi la sensualité de la chanteuse rock manouche Rona Hartner, l'éclat de son sourire, la neige illuminant son corps. Au moment où de nouveaux dispositifs sécuritaires visent La camp transformé en plateau de tournage exotique. Tout fut rasé après la dernière prise. les gens du voyage, il était important que lors du Forum, le regard se pOl1e aussi sur eux. On se souvient assez peu que les premiers camps ouvel1s en Allemagne, dès 1933 furent les camps municipaux destinés à regrouper les Tsiganes, comme à Cologne, à Dusseldorf, afin d'assainir la ville et de pelmettre une meilleure surveillance policière. Puis, en toute logique, on stérilisa hommes et femmes, on affama, on extermina. En France, le régime de Vichy organisa plusieurs dizaines de lieux d'internement, comme la Saline Royale d'Arc-etSenans, Montreuil-Bellay, Argelès, Rivesaltes. Dans le dépal1ement de la Manche, où s'édifiait le Mur de l'Atlantique, il n'y eut pas moins de trois camps : Barenton, Tourlaville et Valognes la secrète. Toute trace en a été effacée et des non-oublieux qui pensent que seule la mémoire a de l'avenir se battent pour que des plaques signalent au passant dans quels pas il place les siens. C'est que l'histoire ne se laisse pas aussi facilement abolir: comme un Petit-Poucet, elle prend soin de baliser le parcours.Pour preuve : l'un des plincipaux camps se situait en Camargue, Saliers. Un champ nu aujourd'hui transformé en rizière. P0lll1ant, un film perpétue, sans que ses millions de spectateurs le sachent, le souvenir du lieu concentrationnaire. En 1953, alors que les bâtiments se dressaient encore, le cinéaste Henri-Georges Clouzot, l'auteur du Corbeau, y installa ses caméras. Il fit transformer les baraquements en bidonville mexicain pour y tourner un chef-d'oeuvre, Le salaire de la peur, où s'illustrent Yves Montand et Charles Vane!. Lorsque l'on sait cela, d'autres images se superposent à celles qui s'agitent sur l'écran. Le cinéma, parfois, donne à voir l'invisible. (') - Didier Daeninckx est écrivain reconnu pour révélel; à t/'Civers l'univers préférentiel du roman noil; les injustices qu i poussent à la révolte. Il nOLIS est procbe parce qu'il dit • les bommes multiples contenus dans la même enveloppe bU111aine ·. Aujourd'bui, il nous fait l'amitié de nous confier un te.xte écrit pour les citoyens du voyage, ci l'occasion d'un fo ru. m social. De lui, pensez à découvril; entre autres romans, " La l'oUle des Roms • et un incontournable comme · Meurtres pour mémoire •. « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - Janvier-février-Mars 2005 a A l 'heure des voeux pour l'année à venir, en tant que Directeur de rédac tion , je fais , pour le MRAP et son journal « Différences », le voeu d'une volonté et d'une capacité ré ité rée et renforcée de profiter à l'interne de nos diversités. Ce n'est que fort de la multiplicité et de la diversité de ses affluents que notre Mouvement pourra se montrer à même de poursuivre efficacement et de mener à bien ses nobles combats. Plus que jamais, à l'heure où le racisme ne se cache même plus pour s'exprimer, où l'on n'hésite plus à évoquer l'existence d'une prétendue" guerre des civilisations ", où les cimetières et les Edito International Dossier Immigration Discrimination Education ' Kiosque cc lieux de culte tendent à devenir les exutoires d'une population n'ayant plus que la haine comme repère , où la p eur de l'a utre semble être la dernière valeur partagée par tout un chacun, le MRAP est nécessaire et ses luttes sont d'utilité publique. Or, notre combat pour l'amitié entre les peuples et pour la promotion des métissages a précisément besoin d'un MRAP fort de ses diversités, capable de les faire fructifier plutôt que de tenter de les opposer. Pour l'efficacité de notre lutte, faisons en sorte que cette revendication d'unité dans la diversité ne demeure pas un voeu pieux en 2005. Jean Claude Dulieu Remerciements: dessins d'Eric Tourne/ ire, plasticiell marseillais, qui a dessiné . Un lion ail pôle Nord " albllm~/elll1esse sur le tbème de la rencontre des Cl/ltures. Il BULLETIN D'ABONNEMENT PROMOTIONNEL DE « DIFFÉRENCES» • International Juridique • • Dossier Immigration • • Educat ion Histoire ... Renvoyez ce bulletin d'abonnement à l'adresse suivante: Différences, 43 bd cie Magenta, 75010 PARIS Je souscris 4 numéros pour 12 € seulement! o Oui, je profite de l'offre de la revue Différences. Je recevrai les quatre numéros à l'adresse suivante : NOM : . PRÉNOM: . PROFESSION : . ADRESSE : o Ci-joint mon règlement de 12, € par chèque à l'ordre de Différences. « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - Janvier-février-Mars 2005 5 6 Réunion PST Edito i International ' Dossier ' Immigration 1 Discrimination 1 Education 1 Kiosque Par Alain Gresh * (rédacteur en chef du « Monde diplomatique )J) L'usage du mot islamophobie a suscité un légitime débat, car beaucoup se demandent s'il ne viserait pas à interdire toute critique de l'islam comme religion? Et si chaque déclaration hostile à l'islam n'est pas forcément « islamophobe ", ne vaut-il pas mieux éviter toute ambiguïté, et préférer l'usage du terme de « racisme " (anti-arabe, ou anti-maghrébin) ? Il faut revenir sur les origines de l'emploi de ce mot. Si on le trouve dans un texte de ... 1925, son usage reste rare jusqu'au Il septembre 2001. C'est Soheib Bencheikh, souvent présenté comme le porte-parole d'un islam libéral, qui introduit le terme en France en 1998 comme titre d'un chapitre de Marianne et le Prophète (l), dans lequel il écrit que l'islam suscite en France « un sentiment de rejet quasi unanime, implicite dans les discours, et assez catégorique dans l'imaginaire collectif des Français ». Après les attentats de New York et Washington, « islamophobie " est devenu d'usage courant dans tous les pays d'Europe, sans que cela pose problème. C'est que le terme répond aussi à une conjoncture internationale. Depuis le 11 septembre 2001, l'administration républicaine impose une nouvelle doctrine: l'Occident est confronté à un nouvel ennemi, aussi dangereux que l'étaient en leur temps le nazisme et le communisme. Fleurissent alors des ouvrages sur la " troisième guerre mondiale ", au moment même où l'administration Bush met en oeuvre une stratégie militaire et politique d'intervention et d'hégémonie, notamment dans le monde arabe et musulman, une « guerre contre le terrorisme " derrière laquelle s'inscrit en filigrane un choc entre civilisations. • Réunion des PST (présidents, secrétaires et trésoriers des structures de proximité). En France, cette vision simplificatrice s'est heurtée à nombre de résistances qu'ont traduites la position du gouvernement contre la guerre en Irak, comme les mouvements de solidarité avec les peuples palestinien et irakien. Pourtant, dans le même temps, grandit dans l'opinion une inquiétude nouvelle, qui met un signe d'égalité islam, islamisme et terrorisme. Certains souvenirs de la période coloniale refont surface. Et, désormais, le racisme s'abrite plus souvent derrière les « différences " culturelles ou religieuses, qui mettraient en danger l'identité de la France ou la solidité de la République. Dès la fin des années 1980 émerge l'argument selon lequel l'obstacle à l'intégration serait avant tout religieux et culturel. Enfin, dans ce débat, on ne peut négliger que le terme « islamophobie " est ouvertement revendiqué. Claude Imbert, fondateur du Point, se déclare « un peu islamophobe (2) ". Il résume ainsi sa vision: « L'islam, dans son messianisme - dans sa volonté spécifique de diriger non seulement les âmes, mais les moeurs et les lois -, n'est pas, ne peut pas, ne veut pas être une religion comme les autres (3) ». Autrement dit, les musulmans croyants ne sont pas, ne peuvent pas être, ne veulent pas être, des citoyens comme les autres ... Critiquant l'usage du terme « islamophobie " (4), la Licra prétend qu'il « n'est pas sûr, voire peu probable, qu'il y ait un rejet (en France (de l'islam, mais (qu'il y a (plutôt un rejet des pratiques intégristes ». Pourtant, le rapport 2003 de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme souligne (5) : « Un élément nouveau est apparu, écrit-il, dénotant une confusion croissante entre l'hostilité à l'immigration maghrébine, prédominante dans les années 1990, et une hostilité à l'islam, aux musulmans, avec des amalgames avec la délinquance dans les quartiers dits sensibles, avec le fondamentalisme ou le terrorisme », que « les clichés sur l'islam sont largement répandus» et que « l'islam est dans une certaine proportion assimilé à l'islamisme ». Quand on interroge les Français sur les mots qui correspondent le mieux à l'idée qu'ils se font de cette religion, on constate que, pour 46 %, c'est le « rejet des valeurs occidentales», et pour 50 % le « fanatisme ». « C'est l'islam, quelle que soit la manière dont la question est formulée, qui a l'image la plus négative» (par rapport aux autres religions ou à la laïcité). Aucun terme, aussi précis soitil, ne peut définir cette réalité complexe, pas plus le terme « islamophobie " qu'un autre. Mais ce dernier a le mérite, avec les limites soulignées ici, de mettre en lumière des phénomènes inédits aussi bien en France qu'en Europe. 1 - Soheib Bencheikh, «Marianne et le Prophète ", Grasset, 1998. 2- LCI, 24 octobre 2003. Ces propos ne susciteront aucune levée de bouclier. Pour l'une des rares voix discordantes, lire Daniel Schneider Mann, «L'islamopbobie d'un patriarcbe ", Libération, 31 octobre 2003. 3 - «Le Point ", 12 décembre 2003. 4 - « Islamopbobie et violences à l'égard de l'islam ", Le Droit de vivre, décembre 2003. 5 - Commission nationale consultative des droits.de l'Homme, 2003. La lutte contre le racisme et la xénophobie, La Documentation française, 2004. (*) - Alain Gresh, auteur de If L'Islam, la République et le monde ", Fayard, 2004. « Différences» - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - na 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 Edito International ' Dossier Immigration i Discrimination i Education ; Kiosque 3-4-5 Des applaudissements nourris après l'intervention de Mouloud Aounit. Chers amis, chers camarades, chers invités, Je voudrais tout d'abord saluer nos amis et nos compagnons de lutte ici présents avec lesquels nous avons, sur ces trois dernières années, ensemble cheminé, non sans difficultés, mais avec plaisir et enthousiasme pour résister, faire vivre et construire ces défis d'humanité que sont l'action en faveur de l'égale dignité des hommes, des peuples et du respect de leurs droits et de leurs libertés, sans discrimination de territoire, de nationalité et d'origine. Le rapport moral.que j'ai l'honneur de vous présenter est le bilan d'activité politique de la direction sortante dont les membres, au cours de ces trois dernières années, n'ont ménagé ni leurs efforts ni leur disponibilité pour servir avec loyauté et responsabilité notre raison d'être et le mandat que vous leur avez confié. Leur dévouement est d'autant plus méritoire que leur mandat a été exercé dans des conditions difficiles tant vis-à-vis d'une abondante et stressante actualité, que dans des conditions matérielles particulièrement précaires. On ne mesurera jamais assez le prix de cet engagement. Lorsque, avec lucidité et objectivité, je regarde le chemin que nous avons parcouru, plusieurs sentiments m'animent. C'est d'abord la fierté d'appartenir à un mouvement né de la résistance à la barbarie nazie, marqué par celles et ceux qui ont soutenu les luttes d'indépendance des peuples, et le combat contre toutes les guerres coloniales, aussi bien que le combat contre l'apartheid. Fierté d'assurer la continuité et la fidélité aux fondamentaux qui motivent chaque position et action de notre mouvement, à savoir la lutte sans concession, en toute indépendance et avec ténacité contre le racisme sous toutes ses formes et pour la défense des droits des peuples. Fierté de ce que nous avons réalisé et que nous revendiquons dans des conditions inédites, où nous avons été amenés à affron- 1 ter à la fois les défis anciens et - faire face à des problématiques nouvelles tant sur le plan national qu'international. Pour autant, l'autosatisfaction n'est pas de saison. Nous connaissons tous les insuffisances, les maladresses, les malentendus, les incompréhensions qui jalonnent notre difficile combat. Comment pourrait-il en être autrement devant les sollicitations quotidiennes, permanentes et l'exigence de résultats que les situations nationales et internationales nous ont imposées. Nous attendons de ce congrès une réflexion commune et les contributions de tous et de chacun(e) pour y remédier. Cette présentation tire sa substance du rapport moral de la direction sortante qui, pour la première fois, a été diffusé à chaque adhérent. Dans un premier temps, il met en perspective et en convergence les actions de notre mouvement à l'aune de nos principes fondamentaux. Ensuite, je m'arrêterai sur quatre thèmes qui ont une place importante dans la vie de notre mouvement; j'en préciserai le sens, la cohésion, et les soumettrai à votre jugement. Enfin, je m'attellerai au cadre du débat attendu par tous sur le thème " quel MRAP voulons-nous ". La période qui vient de s'achever depuis notre dernier congrès reste marquée par deux dates clés qui ont marqué d'une empreinte durable tant la politique internationale que nationale : le Il septembre 2001 et le 21 avril 2002. Lors de notre dernier Congrès nous avions souligné la vision idéologique de Samuel P. Huntington sur le Choc des civilisations, cadre de pensée que l'on veut nous imposer. Nous avons condarrmé les horribles attentats du Il septembre, et compris le climat passionnel qui a suivi cette tragédie. Dans le même temps nous avons refusé l'instrumentalisation qui en a été faite, et qui a ouvert une voie inquiétante à la diffusion et à la mise en oeuvre de cette théorie de Choc des Civilisations, une théorie aux répercussions considérables et aux dégâts déjà repérables dans le vivre ensemble national et international. Elle a fourni son substrat idéologique à l'intervention de l'administration américaine en Afghanistan et en Irak. Cette politique de confrontation des civilisations constitue la négation même du concept d'amitié entre les peuples. C'est précisément sur ces bases que le MRAP a exprimé son opposition résolue. La promotion de ce prisme maléfique de la vie du Monde, sa mise en pratique par l'emploi de la force non légitimée par le droit international, le mépris des droits des peuples dans cette guerre permanente ne font que renforcer les extrêmes et nourrir les intégrismes, les terrorismes et les fondamentalismes, qu'ils soient d'Etat ou d'ordre religieux. « Différences" - Mouvement contre le racisme et pour ['amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 7 8 Edito International ' Dossier : Immigration 1 Discrimination ' Education · Kiosque Les répercussions de cette idéologie ont contaminé l'ensemble des sociétés, les rapports sociaux, les oppositions politiques, et altéré les relations entre les peuples. Les clivages idéologiques et économiques ont disparu au profit d'une lecture ethnique ou religieuse des relations entre les peuples, assignant les citoyens à résidence au sein de leur communauté supposée, à moins qu'il ne s'agisse de " repli" consenti, sous la pression d'un sentiment d'insécurité, dans l'espoir de retrouver au sein d'une" communauté" une identité mise à maL Cette situation constitue un vivier idéal pour tous les populistes, des extrémistes aux fondamentalistes radicaux de tous poils. Ainsi, la théorie du choc des civilisations alimente ce poison qu'est le développement des communautarismes. Si au plan international le choc du 11 septembre a engagé le monde dans une période historique inédite, en France le 21 avril a fait l'effet d'un véritable séisme. Cette date a souligné que les idées du FN étaient durablement installées dans les mentalités et emacinées dans le paysage politique français. Je n'entrerai pas aujourd'hui dans une analyse des conditions politiques qui ont permis le surgissement de cette catastrophe! Mais une chose est sûre: d'abord la déception - pour une bonne part - des attentes de justice sociale d'un électorat populaire confronté à des inégalités persistantes liées à un réalisme politique et économique de gauche, mais aussi le manque de volonté politique, l'abandon des promesses, le manque de rupture visible, voire l'immobilisme face aux attentes et aux revendications sur le terrain des droits - qu'il s'agisse du droit de vote des étrangers hors Union Européenne, de la régularisation des sans-papiers, de l'abrogation de la double peine, de la lutte contre les discriminations, - ce sont là aussi autant de renoncements qui ont préparé, voire favorisé, l'avènement de cette tache brune. Certes, il y a eu ce sursaut, et nous n'avons pas à rougir de nos positions, ni même de notre place dans les mobilisations: ainsi avons-nous pris l'initiative, avec nos amis de la Ligue des droits de l'homme, de la première grande manifestation de riposte qui a rassemblé plus de 150 000 personnes dans les rues de Paris le 27 avril 2002. Mais ce sursaut - qui a été présenté comme un grand moment de cohésion nationale, de réconciliation autour des valeurs universelles et de la démocratie, élan partagé par les citoyens de tout âge, de toute condition, de toute origine - a pu faire croire à une dynamique qui allait ouvrir des horizons nouveaux. Et pour ceux qui voulaient se bercer d'illusions, le réveil allait être brutal. L'assoupissement des consciences a favorisé la mise en place de mesures qui ont épousé certaines thèses du Front National: qu'il s'agisse des lois sur l'immigration ou de l'ultra sécuritaire de Sarkozy, des politiques démagogiques d'expulsions de plus en plus massives de sans papiers - notamment de Rroms - de la condamnation pour " délit de solidarité" de militants des droits de l'homme, de la mise en place d'obligation de résultat dans le domaine sécuritaire, ce qui a abouti à l'explosion des bavures policières. Ainsi, le 21 avril s'est-il refermé comme un piège; ses effets sur les esprits, ses conséquences sur la vie sociale, et plus particulièrement sur celle des plus démunis, sont malheureusement inscrites dans la durée et bien présentes dans la vie quotidienne. S'il y a un thème qui a cheminé dangereusement sur cette dernière période, ici et ailleurs, c'est bien celui de l'insécurité et son corollaire la peur, avec son instrumentalisation. Insécurité du monde pour justifier les interventions militaires en Afghanistan, en Irak ; insécurité comme prétexte à la construction d'un mur d'annexion en Palestine; insécurité pour justifier le massacre du peuple tchétchène par les soudards de Poutine. Insécurité, thème majeur développé par le Front National. Réfléchissons à ce terme et à ce thème qui permet tous les amalgames et qui justifie toutes les répressions et toutes les atteintes au droit. Peur des étrangers amalgamée à la peur du terrorisme, peur de tout ce qui est différent, mais aussi peur du lendemain dans un monde en mutation, sans repères visibles. Comment déconstruire ces peurs, comment aborder et traiter les véritables causes de l'insécurité autrement que par celles couramment proposées: l'exclusion, la domination, le racisme et la xénophobie? Refuser les oppositions et les hiérarchisations, qu'elles soient d'ordre culturel, edmique ou religieux, mettre en échec le communautarisme, poison pour le vivre ensemble, qui replie en fait l'individu sur lui-même au lieu de l'ouvrir aux autres. Montrer l'unicité de la race humaine, mais aussi la valeur et l'apport de chaque individu sans le réduire à ses appaltenances réelles ou supposées, favoriser les nécessaires solidarités et les combats communs entre tous ceux qui ont à souffrir des mêmes difficultés, ces réalités constituent des principes fondamentaux qui restent plus que jamais d'une réelle actualité et qu'il nous faut rappeler et défendre. Tout comme il faut sans cesse rappeler, éclairer, agir et faire agir, contre les exclusions sociales, les relégations géographiques, les discriminations ethniques. Le racisme se développe le plus souvent sur les effets produits par l'injustice et les inégalités. Pour combattre le racisme, il est donc nécessaire d'inverser la logique d'une organisation du monde qui produit toujours plus d'inégalité. C'est dans cet esprit qu'il est de notre devoir de nous investir dans les forums sociaux nés de la dynamique de Porto Alegre. Notre combat universel contre le racisme est fondé sur des valeurs de justice, de droit, de dignité, pour toutes les femmes et tous les hommes en France, en Europe, pour tous les peuples dans le monde. A cet égard, le racisme est par nature même fondamentalement opposé à tout esprit d'universalité, il est un agent d'exclusion, il se traduit sous forme d'inégalité, il casse les valeurs de solidarité et détruit les dignités. L'universalité progresse au fur et à mesure de l'extension des droits. L'histoire a souvent démontré que ceux-ci progressent par les luttes, les combats, au rythme des prises de conscience des peuples et des citoyens. Cependant l'avancée des droits peut être discriminante quand ceux-ci sont modulés selon la nationalité et le statut. Ainsi les travailleurs étrangers ont-ils souvent des rémunérations inférieures à celles des citoyens autochtones, ou sont victimes de discriminations dans le travail ou le logement: ils ont un statut d'infériorisation. Quand il s'agit de réfugiés en quête de protection, de sans papiers, d'anciens colonisés, on est encore plus éloigné de l'égalité des droits. Ces derniers, sans droits, sont exposés aux pires conditions de vie: on parle à juste titre d'une " criminalisation " de l'immigration qui est au fondement même des politiques de la " Forteresse Europe ". Ces anciens colonisés existent " en creux ", " en négatif " dans la société. Et s'ils sont musulmans, et plus encore depuis le 11 septembre 2001, ils sont trop souvent réduits au stéréotype de fanatiques. Sous l'effet d'une mondialisation libérale, l'universalité des droits semble de plus en plus en recul: sans doute n'est-ce pas un phénomène nouveau, mais il est de plus en plus prégnant. Quand des réfugiés venaient naguère des pays d'Europe de l'est, ils étaient accueillis favorablement en ce sens qu'ils provenaient d'un monde combattu, au temps de la guerre froide, de l' " équilibre de la terreur ". Les réfugiés viennent aujourd'hui pour l'essentiel du monde des pauvres, de la misère, des conflits, des droits de l'homme bafoués. Leur présence même constituerait une menace aux frontières de l'Europe. Ce regard discriminant est encore renforcé s'ils ont le malheur de venir d'un pays arabe ... Sur le plan national, c'est dans le respect de ces principes que le MRAP s'est efforcé de faire face à des défis à la fois anciens et nouveaux qui ont bousculé nos consciences et, à juste titre, interpellé notre société. Ils nous ont contraint à nous remettre en question, à porter l'analyse plus avant pour être en mesure d'y répondre. Ils sont au nombre de quatre : le débat sur le racisme anti-musulman ou « islamophobie ", son corollaire qui a pris la forme du débat sur la laïcité, l'antisémitisme et enfin les discriminations. Chacun sait que nous n'avons jamais pris à la légère la recrudescence des manifestations antisémites de ces dernières années. Le racisme antisémite a fait l'objet des principales interventions publiques du MRAP ces trois dernières années. Je tiens à rappeler ici, avec force, que durant les années 2001, 2002, 2003, l'antisémitisme est le problème contre lequel nous nous sommes le plus exprimé publiquement en termes de communiqués. Cependant, malgré ces prises de positions claires, nous avons dû subir des attaques ignobles et infâmantes venant de divers horizons qui ont osé salir notre histoire, nos militants, et notre éthique. Pourquoi ces attaques ? Il suffit de prendre la dernière en date pour comprendre. Clément WeilRaynal, au nom du CRIF, a diffusé un rapport qui a pour ambition de répondre à la question de savoir si le MRAP lutte encore contre l'antisémitisme. C'est du moins ce qu'annonce le titre de cette étude, car son contenu aborde la question " Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 sous le prisme des prises de position du MRAP vis-à-vis du conflit israélo-palestinien : « Comment, se demande Clément Weil-Raynal, expliquer qu'une organisation dont le but est de lutter contre le racisme et de militer pour l'amitié entre les peuples ait concentré depuis plus de quatre ans l'essentiel de ses attaques contre Israël? )). La problématique, pour Clément Weil-Raynal, consiste à savoir si, derrière les prises de position du MRAP contre la colonisation israélienne des territoires dédiés par le droit international à l'Etat arabe de la Palestine mandataire, se cachent des « motivations moins avouables qui restent à déterminer ». Cette ligne et cet argumentaire salissant a été entretenu et alimenté durant plusieurs mois tant par des associations, voire des radios communautaires, que par certains intellectuels. Le simple fait de considérer l'antisémitisme à travers le prisme du conflit israélo-palestinien est déjà en soi la marque de la mauvaise foi des personnes qui avancent une telle analyse, mais il est surtout la marque d'une inquiétante dérive de la pensée. Ainsi, tout antiraciste devrait soutenir inconditionnellement tous les gouvernements israéliens successifs, faute de quoi il s'exposerait à une campagne de dénigrement où la mauvaise foi le dispute au nationalisme le plus étriqué. Ce qui arrive au MRAP est déjà arrivé à d'autres, même si le MRAP est particulièrement visé malgré son combat inlassable contre le racisme antisémite. Daniel Mermet, Pascal Boniface, Charles Enderlin, l'AFP, la LDH, et j'en oublie, ont eu à subir les assauts de ces dangereux extrémistes. En accusant en creux des organisations comme le MRAP d'être antisémites, ceux qui mènent l'offensive n'ont qu'un objectif: faire taire toutes les personnes qui ont l'outrecuidance de critiquer la politique israélienne de colonisation dans les territoires occupés. L'antisémitisme n'est plus, aux yeux de ces per~ onnes , un mal à terrasser, mais il devient l'affront ultime à lancer à la face de ceux qui ont le malheur de critiquer la politique israélienne. Cette instrumentalisation de l'antisémitisme exige toute notre attention et nous devons la combattre sans faiblesse pour éviter de voir l'antisémitisme perdre peu à peu de sa force infâmante. En accusant des gens d'antisémitisme au seul motif qu'ils critiquent la politique criminelle du gouvernement israélien, Edito 1 International : Dossier 1 Immigration : Discrimination ! Education ' Kiosque ces militants nationalistes dévoient un combat qu'il convient de protéger de toute banalisation. La question de l'islamophobie nous a interpellé suite au Il septembre, où l'on a vu que la peur du fondamentalisme musulman a pris une ampleur irrationnelle au point de faire considérer tout musulman comme un terroriste potentieL Cette vague atteint sa plus forte proportion aux USA mêmes, avec l'adoption des procédures d'exception de la Loi dite " Patriote" du 26 octobre 200l. En Europe, c'est le 11 septembre qui a poussé Oriana Fallaci à commettre un brûlot haineux contre tous les musulmans, sans aucune distinction entre les extrémistes et le reste de la population musulmane. Cette lente suspicion à l'encontre de TOUS les musulmans a trouvé un paroxysme en France dans l'affaire du bagagiste de Roissy. Une autre affaire est venue nous interpeller sur ce drame qui a touché toute la population musulmane

l'explosion de l'usine AZF

a été attribuée, dans une hystérie médiatique incroyable, à de mystérieux intégristes, et notamment à un employé de l'usine d'origine musulmane. C'est pourquoi, dès janvier 2003, le MRAP a dénoncé ce double délit de faciès et de religion

un nom ou un visage à consonance

maghrébine était aussitôt assimilé à un " musulman ", et par glissement, à un " terroriste ". La rumeur a tenu lieu de certitude et les noms à consonance maghrébine ont été livrés au lynchage public. Dans le même temps, le MRAP était confronté sur Internet au déferlement sans précédent de milliers de messages déversés par la nébuleuse sos-racaille attaquant exclusivement les populations arabes et maghrébines. La violence de ces propos consistait à montrer que l'islam était une religion de haine afin de montrer que tous les musulmans supposés n'étaient pas capables de vivre en France et n'avaient pas les mêmes valeurs que les autres populations. Ces appels au lynchage et au rejet de tout musulman supposé a été dénoncé par le MRAP au début de l'été 2003 dans deux rapports qui ont été salués et qui ont fait du MRAP une référence dans le combat contre le racisme sur Internet. Le colloque sur l'islamophobie que nous avons organisé en septembre 2003 à l'assemblée nationale est venu confirmer le sentiment qu'il ,existait bien en France une hostilité contre les musulmans, prenant Leila Shahid salut les militants du MRAP pour le combat pour le respect de l'homme, contre le racisme et pour la paix (nous publierons sont intervention dans le prochain numéro de « Différences ». ses racines dans la colonisation et trouvant soudain à s'exprimer au grand jour dans le sillage du Il septembre. Ce rejet de toute une population en raison de son appartenance réelle ou supposée à une religion se devait d'être dénoncée par le MRAP. Je voudrais m'arrêter un instant sur les raisons qui ont fait que cette question est soudain devenue problématique malgré l'interpénétration de ce combat et des autres actions du MRAP. Le MRAP a subi une violente campagne de dénigrement au sujet de son combat contre le racisme frappant les musulmans, ceci tant à droite qu'à gauche. Les attaques venant d'une partie de la droite étaient motivées par un fond plus ou moins conscient d'islamophobie

nos détracteurs de droite,

obsédés par l'équation et l'amalgame " arabe - musulman - terroriste - banlieues ", entretenaient la suspicion à l'endroit des musulmans, et notre combat contre l'islamophobie, qui appelait tout le monde à considérer les musulmans comme des citoyens comme les autres, à égalité de droits et de devoirs, les empêchait de jeter la suspicion sur cette population. Les attaques venant de certaines mouvances de la gauche étaient motivées par une forme de fondamentalisme séculaire: nos détracteurs de gauche, de tradition historique laïque, revendiquaient la liberté de critiquer toutes les religions dans l'objectif assez classique de voir s'estomper et disparaître le " religieux " de la société française. Le combat mené par le MRAP contre le racisme anti-musulman - condamnant toute utilisation de la critique de l'islam pour stigmatiser et rejeter L'ENSEMBLE d'une population - a été présenté par eux comme une volonté de faire taire toute expression critique visà- vis de l'islam. Cette revendication de pouvoir critiquer l'islam, au même titre que les autres religions, a d'ailleurs été le point commun de nos détracteurs de droite comme de gauche. Soyons clairs, et disons-le une bonne fois pour toutes : nous avons toujours réaffirmé que nous ne nous battions pas contre la critique des religions, mais contre l'utilisation d'une critique de l'islam en tant que paravent à l'expression d'un racisme qui s'est banalisé après le 11 septembre. Lorsque l'on dénonce Oriana Fallaci pour avoir stigmatisé TOUS les musulmans en les présentant comme des êtres inférieurs, c'est le racisme exprimé dans cette généralisation stigmatisante pour toute une population qui est dénoncée et non la critique de telle religion. Lorsque l'on dénonce Claude Imbert pour avoir déclaré que l'islam était une religion débilitante, c'est pour souligner le fait que Claude Imbert considère tous les musulmans comme étant archaïques, voire débiles, qui est dénoncé en tant que stigmatisation d'une population et non la critique de l'islam. Lorsque l'on dénonce Alexandre Del Valle pour avoir argumenté sur le caractère intrinsèquement mauvais et irrécupérable de l'islam, montrant par là que tous les musulmans sont des terroristes en puissance, c'est pour son insupp01'~ ablc stigmatisation de tous les musulmans, et non pour sa critique de l'islam. Lorsque l'on dénonce l'utilisation d'un texte stigmatisant toutes les populations musulmanes sur la base d'une prétendue critique de la religion musulmane, nous dénonçons non pas la critique d'une religion, mais la stigmatisation d'une population. L'utilisation d'un teÀ1e raciste " Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 9 10 Edito ' International ! Dossier ! Immigration 1 Discrimination ! Education ! Kiosque dans un tel concours participe de la banalisation du racisme. Soyons clairs : le MRAP n'a pas à se prononcer sur l'appréciation d'une religion, comme on le voit dans nos prises de position sur l'islamophobie, où nous avons pointé du doigt la stigmatisation de toute une population et non la critique d'une religion. A émergé sur cette dernière période, dans l'espace politique et public français la question du foulard, et ce, dans un contexte marqué par un racisme anti-musulman que je viens de décrire. Je voudrais à cet effet rappeler quelques principes fondamentaux du MRAP. Nous pensons que la loi de 1905 impose à l'Etat d'être laïc, de ne pas affirmer ses liens à une religion quelconque, mais elle n'impose pas aux usagers de l'Etat d'être laïcs. Nous pensons que les élèves dans l'Ecole sont des usagers d'un service public de l'Etat, et invoquer la loi de 1905 pour imposer aux usagers ce qui s'impose à l'Etat et à ceux qui le représentent, non seulement n'est pas acceptable, mais pervertit l'esprit de la loi de 1905. Par ailleurs, nous avons eu comme fil conducteur de nos prises de position l'exigence du dialogue, de la médiation, et du droit sacré à l'éducation contre l'exclusion. Par ailleurs nous pensons que la stigmatisation des jeunes filles portant le foulard à l'école a été une réelle discrimination en ceci que des jeunes filles étaient mise à l'index du système éducatif en raison de leur croyance. Nous militons pour une laïcité ouverte, qui doit donner une chance à tous de se construire en tant que citoyens; le port du foulard comme tout fait social est complexe. Derrière chaque foulard on trouve un individu, une femme à qui on ne peut assigner une seule identité, la religion. Qu'avons-nous fait? Les questions concernant le port du foulard à l'école ont continué à se poser dans les établissements scolaires. Nous avons estimé et continuons à croire que l'action de proximité était la réponse la plus adéquate; des compromis ont pu être trouvés. Nous pensons qu 'il eut fallu surtout développer des moyens pour renforcer cette médiation et le dialogue plutôt que de recourir à une loi qui de fait ruine ces possibilités. Le MRAP s'est déclaré non favorable à cette loi qui exclut de l'école publique, discrimine, favorise le développement des écoles confessionnelles, voire du communautarisme et renvoie aux musulmans, essentiellement issus de l'immigration, un message symbolique de stigmatisation supplémentaire. Seule l'école, sans discriminations ni ghettos, peut permettre la formation de l'esprit critique, le développement de la citoyenneté et du mieux vivre ensemble. C'est la voie de l'émancipation pour les filles et les garçons, la voie des choix librement consentis. La pire des solutions, c'est l'exclusion. Au delà du débat entre partisans et adversaires du foulard, reste une question centrale : pourquoi des milliers de jeunes filles françaises qui jamais n'ont vu leur mère porter le foulard le revendiquentelles, l'affichent, le défendent? Pourquoi nombre d'enfants des marcheurs de l'égalité d'il y a 20 ans trouvent-ils une raison d'exister ou un refuge, dans la religion? En tant que laïque et respectueux de cette liberté fondamentale qu'est la liberté de conscience, il ne m'appartient pas ici de décliner l'ensemble des causes qui expliquent le phénomène. Mais l'une d'entre elles doit mériter notre attention toute particulière. En effet, ce que nous observons n'est-il pas la conséquence directe de cette déliquescence dans ces quartiers entiers de villes qui souffrent de relégations sociales, ethniques, et des discriminations qui structurent ces ghettos? C'est surtout et avant tout signe de l'abandon par l'Etat de ces lieux de souffrance. Comme cela vient d'être confirmé dans un récent rapport officiel, c'est l'absence d'une vraie politique publique d'immigration et d'" intégration" ainsi que les dénis permanents de citoyenneté qui poussent une partie de la jeunesse à trouver un refuge et des repères dans l'espace religieux. Quand il n'y a plus d'espoir, quand les discriminations sont enracinées dans l'espace social, comment voulez-vous que ces jeunes ne soient pas séduits, confrontés à leur enfer quotidien, par les sirènes de ceux qui leur apportent le paradis sur un plateau? Cette question est centrale. C'est sur ce désert qu'ont prospéré et que prospèrent les intégristes, qu'ils soient religieux ou politiques. Le nécessaire combat contre le danger intégriste, bien réel aujourd'hui, ne pourra trouver d'issue que par le traitement de la question sociale. Si il Y a un sujet fondamental pour le devenir de notre société et qui est au coeur des violences, qui génèrent et structurent des comportements agressifs, fabriquent des ghettos, alimentent les haines, entretient les intégrismes et les communautarismes, c'est bien le sujet des discriminations. Cette volonté que l'autre n'existe pas, dans l'entreprise, le logement, les loisirs, dans l'espace politique, dans les médias et la haute fonction publique, nous révèle le fossé béant entre l'affirmation au sein de la République de droits formels et leur réalité vécue. Réalité d'autant plus insoutenable qu'elle exclut non seulement les immigrés, mais aussi jette dans les angles morts des droits que la république devrait leur garantir, des enfants français appelé hier" les potes ", les « beurs ", et aujourd'hui les" issus de ". Qu'est-ce d'autre que du racisme à l'état pur que cette préférence nationale au faciès, au patronyme? Cette terrible et éprouvante réalité nous révèle combien les dégâts de ces crampes mentales que notre société génère, font terriblement mal à des centaines de milliers d'individus. En effet, au lendemain du vingtième anniversaire de la marche des beurs, comme le rappelait l'un d'entre eux, qui eut cru possible que leurs enfants de 20 ans vivraient et subiraient la même relégation, les mêmes humiliations que leur parents et grands-parents ? Notre société dans ce domaine ne stagne pas, elle régresse. Certes, nous n'avons pas à rougir de ce que nous avons fait : la période écoulée depuis 2001 a amené une mobilisation particulière de la direction du mouvement pour la recherche des conditions et des moyens matériels et financiers pour impulser une campagne nationale contre les discriminations. Cette campagne, qui a permis la création de plus de 70 permanences d'accueil, formé des centaines de militants, façonné des outils en faveur des militants pour l'accueil, l'évaluation et le suivi des victimes, est à prolonger. Ceci étant, et avec le recul du temps, on ne peut que déplorer l'absence d'une véritable politique publique, volontariste exigeante pour éradiquer ce mal, et cela quels que soient les gouvernements de droite et de gauche confondus. D'une manière générale, force est de constater, à la lumière des bilans, le caractère inopérant, inadapté mais surtout inefficace de ces structures que sont les Codacs, le 114, et les Codee. Que dire aussi, alors que nous étions très favorables au projet, de la configuration de cette haute autorité HALDE qui devrait prochainement voir le jour? En l'état, ce qui nous est proposé est extrêmement insatisfaisant. C'est une véritable coquille vide sans réels moyens matériels, financiers, sans indépendance et sans réel pouvoir d'investigation et d'enracinement local. Dans le projet de cette Haute Autorité, on nous parle de privilégier la médiation. Bien sûr? Mais cela ne peut se faire au détriment de cette exigence attendue des victimes, à savoir retrouver leur dignité par le droit et la justice et rétablir les exclus du droit par le droit. On nous dit qu'il faut faire émerger et soutenir développer les actions de bonne conduite : notre réponse est toujours oui, mais sans oublier la sanction sévère des mauvaises conduites. C'est une bataille politique que le mouvement doit entreprendre pour exiger une réelle et visible rupture avec les mesurettes et les bricolages qui durent depuis de nombreuses années dans ce domaine. C'est une obligation de résultat qui doit s'imposer aux pouvoirs publics et à l'Etat. Soyons clairs, la discrimination, c'est d'abord et avant tout une rupture du principe d'égalité: l'Etat doit en porter la principale responsabilité. Remédier à cette insécurité suppose une réelle volonté politique, sans nous absoudre de notre rôle. Quand le gouvernement s'est doté d'une politique déterminée contre une autre insécurité, l'insécurité routière, il n'a pas fait appel aux associations d'automobilistes pour mettre les radars. Ce combat contre la discrimination ne peut non plus s'absoudre aussi d'une mobilisation contre cette autre discrimination qu'est celle du droit de vote des étrangers. A propos du débat inédit qui traverse et secoue le débat public antiraciste français , la direction sortante a été amenée à gérer une situation qui a généré interrogations, malaises, troubles, tant dans l'opinion publique qu'à l'intérieur même de nos rangs. Je me dois dans un souci de clarification, de porter à votre connaissance et à votre jugement collectif, la ligne et le positionnement que nous avons " Différences» - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 adoptés et qu'il vous appartiendra de valider, d'amender, ou de rejeter. Si avec nos amis de SOS-Racisme et de la LICRA, j'en témoigne, il existe des relations courtoises et amicales sur le terrain, il reste qu'au niveau national des approches différentes se sont faites jour, tant sur le constat, l'ampleur, l'analyse et les causes, que sur la nature des réponses. Sur le constat, nous avons eu en commun le partage d'une réalité inquiétante et inédite qu'est celle de la montée des violences antisémites. Jamais nous n'avons sousestimé le rôle des idéologies de l'extrême droite dans ce passage à l'acte, ce que nos amis de SOSRacisme, de la LICRA et du CRIF ont par ailleurs trop rapidement sous estimé. Le point de divergence profond provenait des causes et des auteurs de ce regain de violences antisémites. Nos amis, avec le CRIF, ont maladroitement fait porter la majeure partie de la responsabilité de cette déferlante antisémite sur l'ensemble d'une population en stigmatisant les banlieues, et notamment les populations issues de l'immigration et d'origine arabo-musulmane

ils ont pris sans discernement

une responsabilité non seulement dans la stigmatisation, mais aussi dans la démobilisation de l'opinion publique faisant cheminer l'idée selon laquelle le combat contre l'antisémitisme relevait d'un strict conflit entre juifs et arabes. Par ailleurs, sur l'ampleur du phénomène, nous ne répéterons jamais assez que nous ne sousestimons pas la gravité de la situation. Quotidiennement je mesure par mes contacts permanents avec celle-ci en banlieue, l'angoisse, la peur que ce climat génère. La disponibilité et la volonté politique, la mobilisation des pouvoirs publics, - justice, police - pour agir contre l'antisémitisme ont permis une bonne connaissance de l'ampleur et de l'étendue de ces violences antisémites ainsi que l'accompagnement des victimes, le tout dans le but de combattre ce fléau. On ne peut cependant que déplorer l'absence d'une telle volonté politique et d'outils adéquats pour le recensement, l'accueil, l'évaluation, et l'accompagnement des autres victimes. Que ce soit l'ensemble des violations et agressions dont font l'objet les tziganes et gens du voyage, non seulement à propos du stationnement mais aussi pour Edito : International 1 Dossier 1 Immigration 1 Discrimination i Education: Kiosque ce qui est des agressions verbales et physiques. Que ce soit celles touchant aussi des populations victimes de ce racisme de tous les instants que sont les discriminations dans le domaine de l'emploi, du logement, des loisirs. Ou que ce soit, celles touchant les populations musulmanes. Deux conceptions sur la nature des réponses s'affrontent, l'une estimant que le combat contre tous les racismes ne peut trouver d'efficacité que par une mobilisation exclusive sur l'antisémitisme. Selon ce point de vue, c'est en terrassant l'antisémitisme que l'efficacité sera au rendez-vous des autres victimes du racisme. L'autre conception, que nous avons défendue, est de penser qu'il ne peut y avoir d'efficacité, y compris dans le combat contre l'antisémitisme, sans une mobilisation unitaire et solidaire des victimes du racisme sous toutes ses formes et, bien évidemment en harmonie avec l'opinion publique. C'est dans le cadre de réciprocité et de solidarité que le combat antiraciste, à nos yeux, peut prendre de l'efficacité. Toute tentative d'instrumentalisation ou de hiérarchisation, de fait, porte atteinte au combat antiraciste et le délégitime. Reste qu'un mal peut être la condition d'un bien, et je reviens en deux mots sur la manifestation du 7 novembre dernier. Je dois vous le dire ici, même si la mobilisation n'a pas été à la hauteur de nos espérances et des attentes de toutes les victimes du racisme, que nous avions eu raison d'en appeler à l'unité de tous et à une expression publique solidaire, en oubliant nos divergences de fond, devant cette montée sans précédent de violences racistes. Durant plus de 5 mois, nous n'avons eu de cesse de rester ouverts et disponibles à nos amis de la Licra et de SOS Racisme pour qu'ils prennent leur place légitime dans ce combat. On ne peut que tristement déplorer qu'ils se soient mis à l'écart générant un trouble légitime dans l'opinion publique qui ne comprend pas l'absence d'unité du mouvement antiraciste dans la période actuelle. Reste que le bilan que nous tirons de cette expérience est porteur d'espoir par l'unité retrouvée du mouvement associatif, syndical, et politique. Ce vouloir collectif d'agir dans le refus de tout fata< lisme avec la présence de plus de 130 organisations qui, ensemble, ont travaillé durant 6 mois, est en soi encourageant et réconfortant pour l'avenir. La dynamique collective que cette manifestation a générée a permis de faire prendre conscience, avec honnêteté, du travail à accomplir dans le mouvement associatif et syndical pour éradiquer les différentes formes de racisme existantes. Par ailleurs, ensemble, nous avons estimé comme un besoin, dans un souci d'efficacité, de prolonger la réflexion collective, tant sur les formes nouvelles de racisme que sur la nature des réponses collectives à apporter. Nous sommes convenus que ces objectifs seront poursuivis dans le cadre de rencontres locales décentralisées dans les prochaines semaines. Je ne peux fermer ce chapitre sans évoquer deux actions cardinales contre le racisme que représente l'important travail que nous avons déployé sur le terrain des mentalités. A cet effet, qu'il me soit permis de rendre un hommage appuyé à tous les militants qui, sur le terrain, égrènent, par leurs interventions dans les établissements scolaires, les MJC, les services municipaux de la jeunesse, cette action en faveur de la modification du regard sur l'Autre. La richesse, la diversité des productions, des expériences, au niveau des matériaux pédagogiques, expositions, fiches techniques, projets éducatifs, et la vivacité de la commission éducation est à saluer. Regarder l'autre comme son égal suppose reconnaître ce qu'il nous a apporté. Cet objectif a été aussi au coeur de nos préoccupations durant ce mandat. A cet effet, s'il y a un domaine où notre mouvement peut tirer une fierté d'un travail inaccompli mais reconnu, c'est bien celui sur le terrain de la mémoire. On ne reconnaîtra jamais assez ce que Paul Muzard dans ce domaine, notamment ses contributions décisives, intelligentes, tenaces pour faire émerger l'exigence de la reconnaissance de l'apport des immigrés dans notre patrimoine historique. Que ce soit pour la dette de sang, à laquelle il a consacré plusieurs ouvrages, notes, dossiers dont vous avez pu mesurer la rigueur et la qualité, que le combat qu'il a mené pour la récupération des droits des anciens colonisés pour qu'ils bénéficient de l'égal traitement des pensions qui ont été amputées depuis la décolonisation. A Paris, c'est la ténacité de notre mouvement qui permet aussi à des familles, des proches, de faire enfin le deuil de ces oubliés de l'histoire que furent les victimes de la ratonnade du 17 octobre 1961. Nous pouvons être fiers de ces dix années d'action en faveur de la reconnaissance de cette date. C'est parce que l'amnésie, le refoulement, l'occultation volontaire de cette guerre taraude durablement le racisme antimaghrébin que nous nous sommes fortement engagés sur ce sujet. C'est pour extirper les logiques de revanche que le MRAP s'est investi sur ce terrain, et cette oeuvre est loin d'être achevée. Parce que, avant de tourner cette sombre page de l'histoire de France que fut la guerre d'Algérie, il faut l'écrire, la reconnaître. C'est tout le sens de notre campagne actuelle pour l'ouvelture de l'ensemble des archives pour une plus grande prise en compte dans les manuels d'histoire de ce triste épisode de l'histoire de France. C'est dans cet esprit que nous sommes aujourd'hui mobilisés pour la reconnaissance de la torture commise au nom du peuple de France par les plus hautes autorités de notre pays. Comment ne pas, là aussi, saluer l'infatigable et précieux combat de notre ami Henry Pouillot, qui a été témoin de ces pratiques barbares et moyenâgeuses qu'a été la torture en Algérie et qu'il combat aujourd'hui avec nous. L'action internationale répond au second versant des buts du MRAP : l'amitié entre les peuples ne peut se concevoir que dans le respect des droits fondamentaux de tout peuple, dans le combat pour la paix et pour un monde plus juste et plus égalitaire où la force du droit remplacerait le droit de la force. L'international a constitué une préoccupation importante du MRAP. Il a suscité un investissement conséquent. Que ce soit la lutte contre la peine de mort raciste aux Etats Unis par notre mobilisation en faveur de Mumia Abu Jamal, la campagne contre la lapidation d'Amina Lawal, pour les droits du peuple kurde, notre condamnation de la guerre barbare menée contre le peuple tchétchène, et notre récente campagne contre les mollahs d'Iran avec j'association des femmes iraniennes. Sur toutes ces questions, c'est le respect du droit qui a guidé la position du MRAP : respect du droit d'asile, refus de l'ingérence d'un autre Etat dans la justice française, respect du droit pour des réfugiés de continuer leur combat pour la démocratie dans leur pays dans le respect des lois du pays d'accueil, respect des conventions « Différences» - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 11 12 Edito 1 International ' Dossier ' Immigration ' Discrimination ' Education ' Kiosque internationales. Aujourd'hui, devant l'état du monde et les désastres dont nous sommes les témoins, pour beaucoup oeuvrer en faveur de l'amitié entre les peuples relève d'une utopie. Cette utopie est pourtant nécessaire. Sans rentrer dans le détail du rapport moral qui couvre l'ensemble des activités internationales, trois sujets de préoccupation majeurs ont eu des répercussions dans notre quotidien. La guerre contre l'Irak. Il est vrai que, sur la période septembre 2002/ mars 2003, la mobilisation contre la menace de guerre contre l'Irak a été la priorité du secteur international, mais cette priorité a été le fait non seulement de l'ensemble des organisations françaises, mais aussi la priorité majeure des peuples du monde. Cette mobilisation est source d'espoir: jamais dans l'histoire de l'humanité les peuples ne se sont mobilisés avec une telle détermination et une telle ampleur pour tenter d'empêcher une guerre. Le MRAP a pris sa place dans ce formidable élan. Si cette coalition pacifique mondiale n'a pu empêcher la guerre, elle a eu le mérite de la rendre illégitime non seulement au regard du droit international mais également au regard des valeurs qui sont les nôtres. Sur la question du Proche et du Moyen Orient, sur le conflit israélo palestinien, avant toutes choses il convient de lever une ambiguïté majeure. La première : certains nous reprochent d'importer le conflit israélo-palestinien sur le sol de France; notre réponse est sans appel : en effet, comment ce conflit qui est une tragédie pour le peuple palestinien, un enjeu cardinal pour la sécurité de la région, qui est aussi au coeur des crispations des relations entre continents, n'aurait-il pas des répercussions sur le sol de France où vivent des populations qui peuvent, à tort ou à raison, avoir un lien affectif ou une identification? Nous devons le réaffirmer ici haut et fort : nous ne sommes ni propalestiniens, ni anti-israéliens. Nous sommes guidés par le seul et strict souci du respect du droit et de la justice pour le peuple palestinien, du droit et de la justice pour le peuple israélien. Chaque goutte du sang d'un civil versé en Israël et en Palestine est une goutte de sang de trop. A cet égard, qui peut hiérarchiser voire sélectionner la douleur d'une mère palestinienne et celle d'une mère israélienne qui toutes deux ont perdu un enfant ? Récemment, certains, y compris dans nos rangs, souhaiteraient un rééquilibrage du positionnement du MRAP sur ce conflit ou un abandon de certaines prises de position. Rééquilibrage, dans quelle direction ? Aujourd'hui, il y a d'un côté un peuple avec un Etat légitime, celui d'Israël, et de l'autre un peuple exsangue, humilié dans ses droits et libertés fondamentales, sans Etat. Comment peut-on parler d'équilibre quand il y a de fait un peuple colonisé d'un côté, et un Etat colonisateur de l'autre? Notre engagement sur cette question ne signifie pas une quelconque hiérarchisation : le conflit, la souffrance d'un peuple est la même, quel que soit ce peuple. L'amitié entre les peuples ne peut se concevoir sans le droit des peuples, de tous les peuples à disposer d'eux mêmes. Nous sommes les premiers à dénoncer la politique des "deux poids, deux mesures". Les peuples kurdes, sahraouis, tchétchènes ont les mêmes droits que le peuple palestinien. Mais le conflit israélopalestinien sert de prétexte aux extrémistes des deux camps pour inciter en France au repli communautaire, à la montée de l'antisémitisme comme du racisme anti-arabe ou anti-musulman. Ce n'est pas un hasard si justement les tenants de ces discours de haine qui exacerbent les tensions veulent transformer un conflit qui est une guerre de colonisation en un affrontement entre Juifs et arabes. Accuser d'antisémitisme ceux qui revendiquent la destruction d'un mur d'annexion, le respect du droit international, la reconnaissance d'un Etat palestinien viable avec comme capitale Jérusalem-est à côté d'un Etat israélien, le retrait d'Israël des territoires occupés, la fin de la colonisation et le démantèlement des colonies, l'envoi d'une force internationale de protection des populations, revendications tout simplement de justice, de droit, ce n'est pas seulement une question de diffamation, c'est banaliser l'antisémitisme de l'extrême droite, c'est contribuer à la montée de l'antisémitisme. Le MRAP a toujours privilégié le dialogue et a donné la parole aux jeunes Palestiniens et Israéliens pour la Paix. J'en viens à mon dernier point: quel MRAP voulons nous? Nous revendiquons haut et fort un antiracisme politique. Nous ne nions pas qu'en France l'antiracisme a pu revêtir plusieurs formes tout aussi légitimes les unes que les autres. L'antiracisme animé par la bonne conscience, l'humanisme. Il y a eu aussi dans les années 80 l'émergence de l'expression d'un antiracisme moralisateur arc bouté sur la pitié, la commisération. Notre antiracisme aujourd'hui se veut être un antiracisme politique au sens où il plonge ses racines dans les luttes d'émancipation humaine ici ou ailleurs, dans la lutte contre le nazisme, contre la guerre d'Algérie et ses effets sur le sol de France, ses actions contre l'apartheid. Cet antiracisme d'aujourd'hui est infatigable en faveur de la citoyenneté qui a comme condition l'égalité effective des droits pour tous. Ce n'est certes pas un aspect nouveau; mais il a émergé avec l'enracinement des populations issues de la colonisation et qui continuent d'être stigmatisées et traitées en étrangères; la création de l'Union Européenne n'a pas fait avancer les choses, les étrangers de l'UE arrivés récemment en France, bénéficiant de droits refusés aux résidant étrangers venus depuis longtemps du tiers monde et toujours racisés dans notre pays. Les campagnes pour le droit de vote se heurtent toujours aux incompatibilités invoquées par les gouvernements. Rude combat que celui de l'accueil des sans papiers, de tous ces demandeurs d'asile qui affluent de tous côtés et en particulier de cette Afrique épuisée, labourée par les dominations coloniales et par les endettements programmés par les pays riches. Le combat contre le racisme est toujours devant nous; il doit s'adapter aux formes nouvelles que le racisme génère; l'antiracisme doit non seulement combattre mais aussi anticiper ces mutations vénéneuses, prévoir les conditions de son développement, et ajuster les modalités et les moyens d'y répondre. Parce qu'il n'y a pas une réponse au racisme, mais des réponses (économiques, sociales, éducatives, juridiques, politiques, etc.) notre antiracisme doit poursuivre l'objectif de créer les conditions d'une dynamique collective. Tourné vers la citoyenneté, il lutte pour générer des droits nouveaux, jamais pour les réduire. La citoyenneté demeure un concept révolutionnaire. Pour être en capacité de poursuivre ce combat antiraciste, le MRAP doit demeurer une force attractive par son identité, par les signes à quoi on le reconnaît. Nous prenons appui bien sûr sur ce patrimoine que constitue notre histoire qui nous a été léguée par les anciens, sur l'expérience de luttes qu'ils ont livrées; ce n'est pas une situation nouvelle que de devoir nous adapter; comme les anciens, les défis auxquels nous sommes confrontés sont inédits, mais comme eux nous sommes mis en mesure de réparer toute fracture qui pourrait se trouver sur notre route. Pour ce faire nous prenons appui sur les mêmes repères que naguère ; et à cet instant où nous faisons référence à notre histoire, permettezmoi d'adresser un signe affectueux de reconnaissance à Charles Palant, à Albert Lévy, durement éprouvé par la maladie, réconfortés que nous sommes par la fidélité de Bertrand Bary inlassablement présent. Ils sont nos points d'appui pour notre engagement pour les droits de l'homme, de tous les hommes. Un autre de nos points d'appui, c'est aussi notre pluralisme et tout ce maillage constitué par nos comités locaux, par cet enracinement de notre combat antiraciste dans le paysage politique. Nous sommes pétris des aspirations et des luttes pour la conquête d'une humanité appelée à se libérer; un Congrès est le lieu où nous prétendons être unis dans le même combat antiraciste et où nous prétendons être fédérés par une Amitié entre nous, gage de notre combat pour l'Amitié entre les Peuples. Car tout se tient. Notre existence publique nationale, notre visibilité résultent de la capacité de la direction sortante à agir, produire, réagir aux défis de l'actualité nationale et internationale et de son articulation avec la dynamique des comités locaux. Cette visibilité agace, dérange, perturbe mais, je peux en témoigner, elle est aussi, dans certains milieux, chez certaines victimes, reconnue, attendue, respectée. Enfin, on a vu des soutiens importants avec des organisations, des syndicats, des personnalités. Et par ailleurs, ce n'est un secret pour personne, jamais le MRAP n'a travaillé autant en partenariat avec les représentants des mouvements associatifs et syndicaux. Rarement enfin avons-nous été entourés d'autant d'intellectuels. C'est sur la base de tous ces appuis qui nous rapprochent, qui multiplient nos engagements que nous sommes mis en situation de construire l'avenir, c'est sur la base de ces appuis qu'on devrait nous reconnaître comme les militants du Mouvement contre le racisme et pour l'Amitié entre les Peuples. Mouloud Aounit " Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 Dossier Edito i International : Dossier i Immigration 1 Discrimination i Education 1 Kiosque Compte rendu de l'atelier co-animé par B. Hettier et J.-M. Bourquin Un document d'introduction à l'Atelier (" 4-pages ,,) a présenté la totalité des motions reçues sur les thèmes de l'Atelier des Fédérations 44 (Loire Atlantique), de Paris (75) et 94 (Val de Marne), des comités locaux de Chartres (Eure et Loir), Lyon 1e'-4e (Rhône), de la commission Immigration, plus une contribution émanant de trois militants et trois contributions individuelles. L'Atelier Mondialisation Immigration s'est tenu le 3 décembre 2004 de 19 h 30 à 22 h 00, en présence d'une cinquantaine de congressistes de toutes les régions qui ont participé activement aux échanges. Deux thèmes essentiels ont été traités : - les politiques Française et Européenne d'asile et d'immigration, avec analyse de leurs causes à rechercher en premier lieu dans les phénomènes globaux liés à la mondialisation néo-libérale; - le projet de Traité constitutionnel de l'UE et la future Constitution européenne, examinée sous le même angle. Sont intervenus des représentants des comités locaux de Nantes (44), Trappes (78), Dijon (21), Toulouse (31), Nice (06), Grenoble (38), Epinay (93), Paris-Se-13e, Gennevilliers (92), Saint-Denis (93), Clermont-Ferrand (63), La Tour du Pin (38), Vitrolles (13) ainsi que des représentants de la commission Immigration. Sur la question des politiques d'asile et d'immigration, il est très vite apparu qu'elles faisaient l'objet d'un vaste consensus dans le MRAP. La proposition émanant de la salle a été que l'ensemble des interventions soient incorporées par le rapporteur dans le projet de motion déjà Il construit" présenté par la commission Immigration. C'est ce qui a été fait sous la forme d'une introduction reprenant l'ensemble des questions fondamentales. Le dispositif de la motion été complété pour tenir compte de l'ensemble des motions présentées par les différentes fédérations et les différents CL, tout en tenant compte des membres individuels. Ce texte constitue l'une des deux motions émanant de cet Atelier. Cette motion, bien que formellement « ratifiée " par un congrès sur le départ dans ses derniers instants, devrait faire l'objet d'un traitement plus attentif par le nouveau Conseil National. Sur la question du Projet de Constitution Européenne, qui a suscité plus de débat, un groupe de travail a été constitué à partir des Comités et militants qui avaient présenté des propositions spécifiques à ce sujet. Le groupe de travail a élaboré un projet de Motion qui n'a pu, faute de temps, faire l'objet d'une harmonisation avec la première. Le projet est donc également présenté ci-dessous. Il a été lu par le rapporteur de groupe de travail à la plénière qui n'a pu le débattre et son adoption a été renvoyée au nouveau Conseil National. L'une et l'autre motion méritent une particulière attention car, loin des débats houleux du congrès, elles dessinent pour l'avenir l'un des terrains les plus fondamentaux de l'engagement quotidien des comités locaux. Projet de motion consolidée de l'atelier mondialisation-immigration (3/12/04), ratifiée par la plénière du 5/12/04 Pour unaluDa _nia raciI __ inlèln .a _n _ni. an. _ de la .0IIIIiaIiIa1ion néo-li11éra18 81 pour la ... 1181_ 1181 étranII8rI, •• iIIéS 81 rélUIIiéI- Fra_ et. Eor •. Principes fondamentaux qui doivent animer l'action du MRAP: « Le droit de l'être humain et sa dignité sont notre ligne directrice. Quelle que soit la couleur de leur peau, leur origine, leur culture, il n'est pas acceptable que les êtres humains soient victimes des discriminations qui créent des 'sous-hommes' n'ayant pas le droit de travailler, considérés comme clandestins, condamnés à vivre dans des conditions parfois proches d'un" esclavage moderne '. De Schengen au « Plan de la Haye " et aux projets d'externalisation des camps d'étrangers sur les marges extérieures de la « Forteresse Europe", de graves atteintes ont été portées aux droits des étrangers - immigrés et réfugiés - en France et dans l'UE. Au point que l'on doit aujourd'hui lancer un cri d'alarme: le droit d'asile va-t-il disparaître? Le droit à la libre circulation - libre installation, affirmé par le dernier , congrès du MRAP' reste plus que jamais un leurre. Les injustices économiques et sociales atteignent toutes les sociétés mondiales en proie au spectre du chômage généralisé et sans cesse resurgit la question de la " fermeture des frontières " des pays développés. La présence des sans papiers et demandeurs d'asile, au coeur même de l'Union Européenne, nous interroge, non pas sur la légitimité de l'ouverture de nos frontières, mais sur la responsabilité de la France et de l'Europe dans la poursuite du pillage voulu et organisé des pays pauvres de la planète qui comprend l'augmentation exponentielle du poids de leur Dette vis-à-vis des bailleurs de fonds mondiaux. Qui sont ces réfugiés économiques et politiques qui préfèrent risquer la mort aux frontières de nos pays? D'où viennent-ils? Pourquoi viennent- ils ? Ils fuient des régions sinistrées par les effets de la mondialisation néo-libérale qui creuse les inégalités, exacerbe la pauvreté et maintient les dictatures et leur cortège de graves violations des " Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 13 14 Dossier Edito ' International ! Dossier 1 Immigration 1 Discrimination i Education 1 Kiosque droits humains. La France, tout au long de son histoire, a eu sa part de responsabilité dans l'évolution des problèmes mondiaux et elle se doit de l'assumer. Face à une telle situation, le congrès du MRAP réaffirme solennellement que l'ensemble des problèmes mondiaux de ce début de 21ème siècle ne peuvent être résolus que sur la base du respect absolu des droits fondamentaux de la personne humaine : droit à la vie, droit à la dignité, droit à la santé, droit au travail et au logement, droit de circuler librement à la recherche d'une vie meilleure. C'est dans ce contexte que doit se situer, en premier lieu, le constat de l'évolution intolérable des politiques de l'Union Européenne et de la France en matière de : - réglementation de l'immigration légale qui doit avant tout servir les intérêts et besoins économiques et démographiques de l'Union Européenne; - lutte contre l'immigration « illégale ", restriction du droit d'asile et coopération « sous condition" avec les pays d'origine ou de transit des réfugiés et immigrés, pour les rendre co-responsables de la fermeture des frontières. La question essentielle est plus que jamais celle de la lutte contre les diverses causes du racisme et non contre ses effets. Les lois françaises sur l'immigration et l'asile de 1994 à 2003 - lois Pasqua, Debré,Chevènement, Villepin et Sarkozy - n'ont cessé de globalement réduire les droits des étrangers, comme c'est également le cas des lois Perben et Sarkozy sur la justice et la .sécurité intérieure qui criminalisent l'immigration. Elles doivent être abrogées. L'élargissement vers l'est de l'Union Européenne laisse entière la question du racisme anti-Rrorns qui les pousse à fuir leurs pays de nationalité, alors qu'ils sont objet de harcèlement, d'évictions brutales et d'éloignements forcés en France, même si nombre d'entre eux, de nationalité roumaine, y jouissent d'un droit théorique de « libre circulation " Schengen. Le congrès national du MRAP, réuni à Bobigny les 3, 4 et 5 décembre 2004, décide de faire de la défense des droits des étrangers et exilés, en France et en Europe, l'un des domaines prioritaires de mobilisation du MRAP. A cette fin, il réaffirme que: 1) Les politiques de coopération et de co-développement avec les pays pauvres de la planète ne doivent pas être promues par l'UE dans le but de rendre impossible la liberté de circulation et d'installation; 2) S'il serait illusoire de croire qu'une plus grande justice économique et sociale, y compris la disparition du chômage, entraînerait la disparition du racisme, elle contribuerait néanmoins fortement à le faire reculer. 3) Il est urgent de conforter les droits des étrangers des pays non communautaires qui doivent comprendre: a) La régularisation des sans papiers et des déboutés du droit d'asile, dans la dynamique des opérations de régularisation massive qui ont eu lieu dans les pays d'Europe du sud, notamment de celle actuellement en cours en Espagne. Le MRAP doit, dans ce contexte, participer activement aux campagnes associatives en cours en Europe et mener des campagnes d'explication et de sensibilisation de l'opinion publique en soutien au mouvement des sans papiers, avec l'ensemble des partenaires et des soutiens. b) La garantie effective de l'égalité des droits, en particulier à la libre circulation, à l'égard des Rroms européens qu'ils soient citoyens des nouveaux pays membres ou des pays candidats à l'adhésion à l'Union Européenne aussi bien que des pays hors UE; ceci comprend le plein respect de leurs droits fondamentaux, en particulier le droit à l'éducation des enfants et la garantie - par l'Etat et les collectivités territoriales - de conditions de vie humaines et dignes. c) L'égalité des droits entre citoyens de l'Union Européenne et résidents des pays tiers, en particulier la reconnaissance du droit de vote et d'une « citoyenneté européenne de résidence" liée au statut de « résident de longue durée ", ce qui doit impliquer en particulier la suppression de la « double peine ". d) Le plein respect du droit d'asile et de la convention de Genève de 1951 et le rejet résolu, notamment: - de l'abus des protections « subsidiaire " et « temporaire" au détriment du statut de « réfugié ", ainsi que des procédures « accélérées" qui bafouent les droits des demandeurs; - de 1'., externalisation " des procédures d'asile et des camps de réfugiés aux frontières de l'Europe Forteresse ; - des notions d' «asile interne" et de pays tiers ou d'origine « sûrs" ; - des « accords de réadmission ", imposés par l'Union Européenne aux pays d'origine et de transit, qui ont pour effet de reporter sur les pays pauvres l'essentiel de la charge de protection des frontières européennes et de conditionner l'aide économique de l'Union à l'acceptation de telles relations léonines ; - des pratiques de plus en plus radicales d'expulsion des personnes « en situation irrégulière " vers le pays d'origine ou le dernier pays tiers « sûr" de transit... e) La défense des droits de tous les immigrés, ce qui passe nécessairement en France par l'abrogation de l'ensemble des lois sur les étrangers des dix dernières années ainsi que des lois sur la sécurité quotidienne, la sécurité intérieure et la Justice qui criminalisent l'immigration; la garantie d'un droit au séjour stable, le droit de vivre en famille, le droit à la santé (contre le démantèlement de l'AME et de la CMU) , la protection des droits des travailleurs saisonniers, notamment en France dans l'agriculture provençale, la régularisation des demandeurs d'asile déboutés présents sur le territoire, en particulier des familles, et leur logement dans des conditions de dignité. D L'ouverture d'une véritable réflexion pour la mise en oeuvre d'une nouvelle législation qui tourne le dos à la « police des étrangers ", pour la mise en oeuvre d'une véritable loi de promotion de l'égalité des droits et du droit d'asile, avec la reconnaissance du droit au travail des demandeurs tant que durent les procédures de demande, du droit au logement, à la santé et à tous les droits fondamentaux. L'ensemble du mouvement, aux niveaux local, fédéral et national, devra s'efforcer de favoriser la circulation de l'information sur les initiatives prises et la mise en commun des outils militants issus des comités locaux et des commissions existantes, en particulier la rédaction de tracts sur les grands sujets prioritaires (lois racistes d'immigration, Egalité des droits, droits de vote ••. ) En outre, le Congrès décide, en particulier, de renforcer l'engagement effectif du MRAP à tous ses niveaux dans les campagnes en cours suivantes: - campagne pour la ratification par la France de la Convention des Nations Unies « sur les droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille" (annexe 1); - campagne « Votation Citoyenne " en faveur de la pétition du « Million " et de la citoyenneté européenne de résidence " (annexe 2) ; - campagne pour la signature de l'Appel citoyen pour l'accès des Rroms aux droits fondamentaux, lancée par le collectif ROMEUROPE (annexe 3). Anoaxes campagne pour la ralifiC8Uon de la convention Inlernationale sur les IravaWeurs mlgranlS (1990) Groupe de travail de la campagne « Demain le Monde - les Migrations pour vivre ensemble ». « Convention de Nations Unies sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants ». Responsables .'ATMF et GISn. Contact.' Julie Savary - Campagne «Demain le Monde ... ». Tél . .' 01 4535 0282 - E-mail .' demain-le-monde@clubinte1' l1etjr La campagne européenne comprend déjà la participation de : Belgique Wereldsolidariteit, December 18 vzw ; Danemark mix Europe ; France Agir ici, Gisti ; Irlande: Migrant's Rights Centre Pays Bas: Stichting Oikos ; Espagne: Caritas Barcelona ; Grande Bretagne: Joint Council for the Weifare of Inunigrants; Coalition incluant: JCWI, AntiSlave!)' International, Oxfam, Office on Refugee; Policy of the Catholic Bishops' Conference. UNISON, Transport and General Workers Union. Europe: FIOH-AE ; Enunaus International; CCME; PICUM (Platform for International Cooperation on Undocumented Migrants); Coordination européenne pour le droit des étrangers à vivre en famille. Toutes informations sur la Plateforme Européenne pour la ratification de la convention sont disponibles sur le site bruxellois : hnp:! /w\\'W.decemberI8.netif-L'Nconvention. htm Pélllion du don http.//wwwjidh-ae.org/ petition-million.htm Tous Egaux! Tous citoyens! Un million de signatures pour une citoyenneté européenne de résidence 200 associations, organisations syndicales et politiques de 12 pays de l'Union européenne appellent à signer une pétition pour accorder la « Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 citoyenneté de l'Union à tous les résidents selon la formulation suivante : « Possède la citoyenneté de l'Union toute personne résidant sur le territoire d'un État membre ou ayant la nationalité d'un État membre "_ Les signatures seront recueillies sur les marchés, la voie publique ou lors de réunions à Paris et dans de nombreuses villes de France et d'Europe. Elles peuvent être envoyées directement via Internet. Ces signatures seront adressées aux instances européennes pour qu'elles prennent une initiative en ce sens. La pétition du • million . a été mise en ligne sur internet. Elle est consultable et signable à l'adresse :http://www. fidh-ae.org/petition-million.htm A ce jour, près de 200 organisations des 12 pays européens soutiennent cette campagne : Allemagne (5), Autriche (1), Belgique (19), Espagne (49), Finlande (I), France (87), Grèce (5), Irlande (5), Italie (16), Pays-Bas (3), Portugal (4) et Royaume-Uni (1). Associations internationales et européennes soutenant la pétition : Fédération internationale des droits de l'Homme (FIOH), Association européenne de défense des droits de l'Honune (FIOH-AE) et United for intercultural action. Paris, le 7 mai 2004 la , Exposé des motifs Le MRAP doit prendre position au congrès sur les aspects néfastes de la constitution européenne en matière d'immigration. La montée du libéralisme économique avec son volant de chômage a pour corollaire l'exclusion et le racisme. La forteresse Europe et la France en particulier se replient sur leurs frontières pour empêcher une « invasion d'étrangers" Il y a déjà tout un arsenal répressif dans chaque pays d'Europe que la nouvelle constitution va officialiser et pérenniser. Avec d'autres associations européennes, NOUS défendons les sans papiers avec la plus grande énergie, mais trop souvent nous combattons les effets sans nous attaquer suffisamment aux causes. Pourquoi tant d'immigration en Europe? Pour fuir parfois les violences policières de leur pays mais plus souvent pour fuir la misère. Le pillage économique des pays en voie de développement entraîne Edito 1 International i Dossier ! Immigration ! Discrimination : Education ! Kiosque APPel cnovea 1lOIII' l'accès des lInHnS aux drOIts hHIdaBIeRt8U http.//www.medecinsdu monde.org/ En Europe les Rroms subissent des discriminations depuis longtemps. Leur situation est particulièrement préoccupante en Roumanie, où elle a été dénoncée à plusieurs reprises tant par les Nations Unies (rapport du PNUD) que par diverses ONG (rapport de septembre 2003 Médecins du Monde / Fédération Inte1'l1ationale des Ligues des Droits de l'Homme) : l'accès à l'emploi, l'accès aux soins, l'accès à l'école pour les enfants leur sont dans les faits refusés. Chassés par le racisme et la misère, quelques milliers de ces Rroms ont trouvé refuge en France. La France a le devoir d'anticiper l'intégration de ces Rroms qui dans une Europe en élargissement seront prochainement nos concitoyens. Au lieu de cela, tout l'appareil d'Etat, à commencer par le Ministre de l'Intérieur, est mobilisé dans des opérations systématiques et médiatisées de répression brutale contre les familles Rroms. Sur ordre des Préfets, des familles entières, avec femme et enfants, sont jetées à la rue. Aucun dispositif n'est prévu pour les accueillir. Leurs abris sont ensuite détruits au bulldozer avec toutes leurs affaires personnelles à l'intérieur. Faute de pouvoir les expulser aisément, l'Etat et ses représentants, hélas souvent aidés par certains une paupérisation des peuples. La misère est le terreau rêvé pour entretenir la haine et la violence donc le racisme et les guerres. En Europe la violence économique que nous subissons maintient un volant de chômage et de précaires. (En France 10% de la population vit sous le seuil de pauvreté). La disparition du chômage contribuera fortement à faire baisser le racisme. le MRA' conlinue d'inscrire sa démarche dans le refus • D'une Europe foncièrement marchande qui s'est définie avant tout comme « Respectueuse d'une économie de marché ouverte où la concurrence est libre et non faussée » (formule répétée 66 fois afin d'en faire Le Droit Fondamental). • De la mondialisation néolibérale, porteuse d'inégalités profondes et de guerres. Ce que nous refusons pour la France et pour l'Europe, nous le refusons aussi pour le monde. maires, font tout ce qui est inhumainement possible pour leur rendre toute vie impossible. Nous n'acceptons pas que les pouvoirs publics continuent à commettre en notre nom, ces exactions! En ne prenant pas en compte leurs situations sociale, économique et administrative, l'Etat français est complice du développement de pratiques mafieuses qui exploitent ces populations sans toit ni droit. Des élus conunencent à manifester leur solidarité avec les Rroms rejoignant ainsi des centaines de personnes qui leur ont apporté une aide. Nous prenons acte de cette prise de conscience. Nous demandons: • Que cessent immédiatement les expulsions des terrains, de squats où se sont réfugiées les familles, ainsi que les reconduites à la frontière et les charters. • La régularisation de la situation administrative des Rroms qui en font la demande, • La mise en place d'un plan d'insertion au niveau national et l'obtention rapide d'un titre de séjour • La mise en place de moyens d'urgence permettant d'accueillir les familles dans des hébergements en dur, où elles pourraient disposer d'eau, de chauffage, d'électricité, de sanitaires. • L'accès gratuit aux soins pour tous. • La scolarisation de tous les enfants avec une aide de l'Etat aux communes pour les fournitures scolaires, la cantine ... Le MRAP s'inscrit dans la perspective d'un autre monde solidaire et pacifique, sans domination ni exploitation, ni oppression et surtout sans discrimination. Les discriminations racistes et ethniques renforcent les dynamiques guerrières existantes quand elles ne sont pas à l'origine du conflit. A cette fm le MRAP continue de participer aux forums sociaux locaux, régionaux ou mondiaux dans le respect de son orientation. Motion Le congrès national du MRAP, constate que la Constitution européenne proposée à l'approbation des peuples et à la ratification des 25 pays membres de l'Union: 1) Constitutionalise les politiques migratoires des Etats européens mis en oeuvre depuis 20 ans, non dans l'intérêt des populations migrantes et des pays dont elles sont originaires, mais dans le seul intérêt des politiques libérales des pays européens; • L'application de la loi, permettant la dom,iciliation des Rroms dans les CCAS nécessaire à l'obtention de la CMU, de l'AME ou à la scolarisation des enfants. • L'organisation très rapide (et avant la fin de l'hiver) de tables rondes régionales réunissant les Préfets et maires concernés, les services sociaux, les représentants associatifs et les représentants des Rroms, pour mettre en place un plan global d'insertion de ces familles. C'est ainsi que pourront être résorbés les bidonvilles, dans la dignité et le respect des droits. • L'intervention, au plan européen, pour que cessent les discriminations et que soit défini un plan d'aides aux pays concernés. • La lutte contre les stigmatisations par la reconnaissance de l'identité culturelle rromani en tant que partie intégrante du multiculturalisme européen. Nous considérons que si la responsabilité de la mise en place de telles mesures incombe d'abord à l'Europe, à l'Etat et aux Collectivités territoriales, nul n'est dispensé du devoir de solidarité. Pour signer cet appel citoyen vous pouvez: renvoyer un exemplaire avec vos nom, prénom, fonction et coordonnées (si vous le souhaitez) à Identité Rrom, 7 avenue Gambetta, 94700 Maisons Alfort ou utiliser le courrier électronique : identite. rrom@wanadoo.fr 2) Ne reconnaît pas le titre de citoyen européen avec les prérogatives locales, régionales, nationales et européennes qui s'y rattachent aux résidents des pays tiers; 3) Restreint de façon drastique les politiques d'asile; 4) Inclut dans son titre II la Charte des droits fondamentaux de l'Union, en très net retrait par rapport à la Convention européenne des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (950) et ses protocoles additionnels que l'Union européenne n'a ni votés ni ratifiés. 5) Encourage les pays européens à augmenter leurs crédits militaires, mettant en danger la paix. 6) Que toute révision de cette Constitution est rendue quasi impossible par les conditions exigées dans ce but; Considère en conséquence que ce texte sur la constitution va à l'encontre des buts poursuivis par le Mouvement contre le racisme et pour l'Amitié entre les peuples. « Différences» - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n" 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 15 16 Dossier Edito International Dossier Immigration Discrimination Education Kiosque Compte rendu de l'atelier co-animé par J.-C. Dulieu et 1. Sirat L'Atelier connut un grand succès non seulement par la nombreuse assistance mais aussi par la qualité de la réflexion et des questions soulevées pour l'avenir. Nous avons comptabilisé 45 interventions. Tous les comités locaux ont eu l'occasion de s'exprimer sur chacun des thèmes de l'atelier. Ce document voté en séance plénière à la quasi unanimité est le fruit du débat sur la base du texte présenté en introduction de l'atelier enrichi de l'apport des interventions. Inlroduction " Le MRAP a pour objet de combattre le racisme, quelles qu'en soient les formes et les victimes, sans la moindre hiérarchie. Le racisme est « un et indivisible ».n nous appartient d'observer avec attention toutes les formes de racisme, leur évolution et la manière dont elles s'inscrivent dans l'histoire et dans un contexte international» (motion 1*). Il est aujourd'hui une réalité facile à constater: l'évolution du racisme et de ses expressions. En effet, ce qui caractérise notre époque est sans aucun doute, certes la poursuite des expressions anciennes du racisme, mais aussi l'émergence de causes et d'expressions nouvelles de racismes ainsi que le développement de ses manifestations violentes. Comme l'indiquent nos amis de Chartres (extrait) : « Nous devons refuser la hiérarchisation des racismes. » Le MRAP se doit d'analyser ces évolutions s'il veut se montrer à même d'adapter ses réactions au phénomène raciste et d'optimiser son action. Nous nous devons par ailleurs de réaliser une très large mobilisation contre ce fléau qui taraude notre société. Tel fut l'objectif des militants qui ont oeuvré, par exemple, au rassemblement des forces syndicales, politiques et associatives le 7 novembre dernier. Ces manifestations avaient notamment pour objectif de réagir contre toute forme de hiérarchisation du racisme comme contre toute tendance à la communautarisation du combat antiraciste. Nous y avons rappelé avec force " l'unicité du racisme ", une conception chère au mouvement comme en a témoigné le congrès de la fédération de Seine St Denis qui a " réaffirmé l'unicité du racisme et la nécessité de combattre le racisme sous toutes ses formes sans en privilégier aucune. Le congrès de1976 définissait " un racisme global aux cibles multiples selon les lieux et les temps se traduisant dans tous les cas par des conceptions, des attitudes et des effets de même nature ". Un racisme aux expressions multiples, chacune basée sur des spécificités

antisémitisme, racisme

anti-arabe, logique de bouc émissaire, discriminations envers les immigrés et les jeunes Français de parents étrangers, racisme arabomusulman, racisme sur internet, gens du voyage ... Une unicité qui en appelle une àutre, celle de l'antiracisme. La majorité des intervenants dans l'atelier se sont exprimés favorablement sur l'unicité du combat antiraciste et sur le refus de le hiérarchiser. Gens du VOyage Durant cette dernière période, le racisme envers les gens du voyage n'a cessé de s'accroître. Preuve de ce racisme et de sa banalisation, (extrait motion de la commission nationale) « l'échec des pouvoirs publics quant à l'élaboration des schémas départementaux, en août la prolongation de deux années pour leur réalisation, et la loi « sécurité et liberté» en mars 2003 qui n'a fait que réduire les liberté de stationnement des nomades ... ». Nous invitons le congrès à renforcer notre activité dans ce domaine comme le préconise la commission « Il serait souhaitable qu'un véritable dialogue s'instaure avec nos amis de province ... des échanges sur les différentes actions locales favoriseraient la connaissance des gens du voyage ... » et amélioreraient inévitablement l'efficacité de nos intelventions. Il est demandé aux comités locaux un état des lieux de la signature des schémas départementaux des gens du voyage, ainsi que de la mise en oeuvre de ceux-ci. Anlisémilisme Le MRAP réaffrrme fermement que le combat contre ce poison extrêmement pernicieux qu'est l'antisémitisme reste plus que jamais une des priorités de notre combat. En effet, les actes antisémites violents, connaissent une véritable explosion depuis l'année 2000 : 119 actes en 2000, 32 en 2001, 195 en 2002 , 123 en 2003 et d'après les chiffres du Ministère de l'Intérieur et du rapport Ruffin, 166 actes pour le premier semestre 2004. Ces actes antisémites violents représentent à eux seuls 57,6 % de l'ensemble des actes racistes violents de 2003 (synthèse des chiffres de la CNCDH et du Ministère de l'Intérieur). Comme il a été dit dans l'ateliet; « restons prudents dans l'utilisation des statistiques! » Il est aujourd'hui reconnu par tous que nous assistons à l'émergence d'un nouvel antisémitisme. Un débat s'est toutefois instauré sur l'identité de ses acteurs: 1) Extrait de la motion de la commission nationale du MRAP contre l'antisémitisme : « Ces manifestations sont le fait de groupes ou plutôt de groupuscules (d'où la difficulté de les localiser) d'inspiration diverses. Il est certain que la dégradation de lieux de cultes est l'oeuvre de l'idéologie d'extrême droite néo nazie. On ne peut oublier que ces profanations touchent également des tombes musulmanes et des mosquées ainsi que des sépultures chrétiennes. n est non moins . certain que le conflit israélo- palestinien est à l'origine de nombreux actes inadmissibles d'hostilité, d'incivilités, voire de violences vis-à-vis de la population juive. On sait que la plupart sont le fait de certains jeunes issus de l'immigration, sensibles aux prêches intégristes, qui s'identifient à la cause palestinienne et font l'amalgame entre Israël et des citoyens français de religion ou d'origine juive ! Le MRAP doit défendre une position claire. Attention aux confusions ! - nous disons non à l'équation proclamée par certains inconditionnels du gouvernement israélien : « critique de la politique israélienne= antisionisme= antisémitisme ». - d'un autre côté, l'équation du verdict de Durban

« sionisme= racisme » doit être

combattue avec la même vigueur. Il faut nous démarquer des extrémistes qui, au nom de la légitimité de la lutte du peuple palestinien, militent pour la disparition de l'Etat d'Israël et justifient les actes d'antisémitisme comme dans notre pays » ou encore CL Chartres « un an ti-sémitisme de jeunes désoeuvrés lié aux problèmes du Moyen-Orient et à la question israélo-palestinienne » ... 2) Il serait grave de refuser de voir dans les agressions anti-juives commises ces derniers temps le signe d'un nouvel antisémitisme. Toutefois, il convient d'analyser avec la plus grande objectivité les sources de ce nouveau phénomène pour le moins complexe. Dans le rapport moral, nous lisons à cet égard : « le mouvement a poursuivi son combat ancien contre le néo nazisme et son pendant le négationnisme ... mais n'avonsnous pas sous-estimé cette forme classique d'antisémitisme? ». Sans nier, loin s'en faut, les répercussions du conflit Israélo-Palestinien dans le développement des actes antisémites en France, ne devons-nous pas en effet nous montrer attentifs aux propos de Dominique Vidal (parus là encore « Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - janvier-Février-Mars 2005 Il ) dans le rapport moral) selon lesquels « Pour l'antisémitisme comme pour les autres formes de racisme ... le principal terreau de la violence ce sont ces ghettos de chômage, de misère, d'exclusion, de manque de repères, de perspectives et d'espoir en l'avenir, de centaines de milliers de personnes, de jeunes défavorisés au premier rang desquels les jeunes issus de l'immigration » comme à ceux de Théo Klein qui parle à cet égard de " violence sociale " ? ou de la fédé de la Haute Vienne" le " mal être " d'une partie de la société française trouve sa source dans le chômage, les aspirations insatisfaites, l'exclusion, la marginalisation ... Quelques chiffres (fournis par le rapport Ruffin) pour notre analyse: sur les 166 actions violentes antisémites, Il sont attribuées à l'extrême droite, 50 relèvent d'individus d'origine " arabo-musulma ne " mais les plus nombreux, à savoir 99, obéissent à des motivations floues. Ce flou majoritaire autorise tous les fantasmes. Quels sont donc ces habits neufs de l'antisémitisme? Ruffin déclare dans son rapport: « le schéma classique aujourd'hui, c'est de dire que l'antisémitisme vient de moins en moins de l'extrême droite et de plus en plus des jeunes issus de l'immigration, en particulier maghrébine. En fait, ce n'est pas du tout ça. Quand on regarde le profil des auteurs, on découvre qu'un certain nombre seulement est issu de l'immigration maghrébine. Il s'agit de jeunes déclassés privés de repères. Leur antisémitisme est le fait d'influences ». Comme chacun peut aisément le constater, il existe actuellement des différences d'analyses importantes quant à l'existence et à l'importance de tel ou tel nouvel acteur de l'antisémitisme. Il est important de tenir compte de cette diversité, afin d'élaborer la meilleure stratégie d'intervention, la riposte la mieux adaptée possible et afin d'éviter les raccourcis danger,eux. tJ est nécessaire d'engager une analyse de fond sur l'émergence et sur la riposte de ces nouvelles expressions. Il a été noté le traitement médiatique inégalitaire quant aux actes antisémites, selon l'origine idéologique de leurs auteurs ... ce que nous rejetons totalement. Tous les actes antisémites sont condamnables. « Tout en refusant l'instrumentalisation de l'antisémitisme ainsi que toute forme de communau- Dossier Edito 1 International ' Dossier ' Immigration ' Discrimination ' Education 1 Kiosque tarisme et de hiérarchisation de l'antiracisme » comme l'indique notamment la motion de Chartres, nous appelons, dans le cadre de l'unicité de notre combat antiraciste, à une mobilisation générale des militants contre l'antisémitisme qui gangrène notre société (voir en annexe les 4 recommandations de la commission nationale.) Motion Paris 14-15 : nous invite « Le MRAp, réuni en Congrès national à Bobigny les 3,4 et 5 décembre 2004, tient à réaffirmer solennellement son enracinement historique dans la lutte contre la barbarie nazie et plus particulièrement dans la lutte contre l'extermination des juifs et contre l'antisémitisme ... Dans le rapport moral présenté par la direction sortante, il est écrit dans le préambule: « Nous savons que les premiers membres du MRAP, essentiellement le CNR, ont lutté contre les nazis, ont aidé à la sensibilisation des juifs qui ne mesuraient pas tous les dangers qui les menaçaient ». Ce sont les seules lignes sur les origines du MRAP (alors que nous fêtons son 55e anniversaire) et elles nous paraissent pour le moins maladroites car nous refusons de cautionner ce qu'un grand nombre de pseudo-historiens, d'hommes politiques, d'écrivains ont affirmé sur la prétendue passivité des juifs, faisant ainsi porter aux victimes la faute des bourreaux. C'est la barbarie nazie qui a organisé le silence sur les camps d'extermination ..... » Pour différents intervenants, il a semblé important, compte tenu de campagnes qui se développent dans la société française, que le MRAP rappelle qu'il fallait refuser toute démarche qui tend à rendre .les victimes de l'antisémitisme responsables de leur oppression. Annexe 1 1) La manifestation du 7 novembre a plutôt été un échec. La profanation du cimetière juif de Brumath (à ajouter à une liste déjà longue) n'est pas une raison suffisante pour faire sortir des dizaines de milliers de personnes dans la rue. On fera reculer le fléau du racisme et de l'antisémitisme non pas avec des slogans et des pancartes, mais grâce à une action en profondeur dans le domaine de l'éducation et de l'information. 2) Il serait souhaitable de retrouver un langage commun avec SOS Racisme et la LICRA au sujet de l'antisémitisme et d'oeuvrer avec les associations comme .. une autre voix juive .. , .. pour Jérusalem .. en vue d'actions mieux ciblées. 3) Nous devrions redéfinir l'antisémitisme dans le contexte politique actuel, et montrer sa spécificité par rappOlt aux autres formes de racisme. Discriminalions Nous trouvons dans le rapport moral un historique de l'engagement du MRAP face aux discriminations et sur l'ampleur du phénomène, (motion de Chartres « La liste est longue de ces discriminations que l'on tait, voire que l'on cache: exploitation, chaîne des préjugés, du mépris, de l'indifférence qui produisent injustices , inégalités, exclusion .... Dans les quartiers, au travail, dans nos villages, lutter contre ce racisme, contre ces violences, toutes les violences imposées aux exclus du travail, du logement, des loisirs, de la santé, de l'éducation, devient difficile voire impossible .... ») ainsi qu'un bilan de notre activité en ce domaine depuis trois ans. Lors des congrès locaux et départementaux, cette question fut largement abordée même si peu de motions ont été votées sur ce sujet. La fédé 44 a insisté dans deux motions sur les discriminations à l'emploi et surtout sur celles dites « légales » (emplois interdits aux étrangers -principalement secteur public, et aussi privé -). Fédé 59 (extrait) « Aujourd'hui, où va être créée la Haute autorité de lutte contre les discriminations et où les CODAC vont se muer en COPEC, il nous semble pertinent de faire une analyse de notre participation à la lutte institutionnelle contre les discriminations et de nous interroger sur les meilleurs moyens de participer efficacement dans l'avenir aux prochains dispositifs tout en gardant notre statut de mouvement revendicatif Nous ne pouvons nous satisfaire de l'énumération des différentes interventions que nous avons pu faire dans ce cadre, aussi importantes soient elles. 1) Nous demandons qu'un groupe de travail soit mis en place par la future direction afin de faire cette évaluation en liaison avec les CL mobilisés sur cette question. 2) Nous ne partageons pas la proposition incluse dans le rapport moral à savoir « il nous appartiendra de nous organise," en fonction de ce nouveau dispositif Cette nouvelle instance nous amènera à adapter notre action de lutte contre les discriminations ». Ne devons-nous pas plutôt réfléchir à une stratégie nouvelle basée sur les enseignements de nos expériences et sur les spécificités de la HALD ? Plus que jamais la question du « devoir de résultat» envers les victimes est posée ». Fédé 94 « se battre contre les discriminations: Ce combat est indissociable de la lutte pour l'égalité des droits, seul moyen politique d'empêcher les discriminations racistes.Si nous agissons en proposant des lieux d'écoute pour les victimes des discriminations, nous savons bien que c'est seulement par des mobilisations massives associant français et étrangers que nous pourrons obtenir :L'égalité des droits sociaux, civiques et politiques entre résidents français et étrangers. Un titre de séjour équivalent pour les Français et les étrangers: une carte de résident de 10 ans pour tous les étrangers « Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - nO 253 - janvier-Février-Mars 2005 17 18 Dossier Edito : International i Dossier 1 Immigration ' Discriminati on ! Education ! Kiosque qui désirent résider en France, de durée identique à la carte nationale d'identité pour les Français. Le droit de vote des étrangers à toutes les élections , comme le permettrait la dissociation d'une citoyenneté égale pour tous, de la nationalité Interdiction des discriminations, en particulier dans la fonction publique, qui doit donner l'exemple ... ». Lors des échanges de l'atelier, des propositions ont été exprimées : " Ne pas négliger d'autres formes d'aide aux victimes ; la politique de la ville " : " les permanences permettent une ouverture sur le terrain social ". " Cohésion à promouvoir / droits civils - droits sociaux ". ' La future direction est invitée à pousser la réflexion dans ce domaine. Améliorer le dialogue comités / fédérations/ nationa " " Devons-nous considérer l'antiracisme comme objet exclusif de notre combat ? Ou faut-il au nom de l'égalité des droits, lutter contre tous les rejets qui mettent en jeu des mécanismes discriminatoires identiques (sexisme, homophobie, discriminations à l'égard des handicapés ... ) ". " Il importe à une future commission d'aider la direction à se positionner sur cette problématique. " Discriminations au travail " On y est souvent confronté, mais le MRAP n'a pas de réseaux, et devrait développer des relations avec les syndicats sur cette problématique. Proposition : organiser des formations en interne ". Accords binationaux " Ils peuvent être facteurs, au quotidien, d'une amplification des discriminations ". " Nécessité de faire un état des lieux du racisme et des discriminations à l'Ecole ". La question de l'islamophobie fut, ces derniers mois, une des questions de fond les plus problématiques pour notre mouvement. Rappelons à ce sujet que le CN du 8 mai a « décidé de ne plus Le mouvement confirme son engagement contre les discriminations racistes (racisme en acte) et de mener ce combat dans toutes ses dimensions. lune contre l'extrême droite En France, le FN est installé dans le paysage comme la troisième force politique du pays. Aux dernières élections, il a confirmé son enracinement en homogénéisant son implantation locale. En Europe, de plus en plus d'électeurs soutiennent des idées populistes et xénophobes de la droite extrême ou de l'extrême droite nationaliste. Le 21 avril 2002, Le Pen est arrivé au second tour de l'é lection préside ntielle, en rassemblant 5 471 739 électeurs au premier tour des élections présidentielles et 5 525 032 voix le 5 mai 2002. Après le second tour, la mobilisation contre ce parti d'extrême droite est retombée. Nous avons refoulé le 21 avril, pour mieux l'oublier et tout a repris comme avant. Pourtant, le fait d'être présent au second tour a donné une " légitimité ", pour certains, à ce parti xénophobe. Les mobilisations citoyennes , comme au lendemain du 21 avril, font effectivement reculer électoralement le FN. Cette forme de résistance immédiate est indispensable et permet de limiter l'influence du FN. Mais parallèlement, hors danger immédiat, un travail de fond doit être mené pour réfl échir à une meilleure riposte car inexorablement l'extrême droite gagne du terrain. Dans ce contexte quel utiliser publiquement cette expression jusqu'au congrès, jugeant qu'il appartiendrait aux militants de se prononcer sur le caractère judicieux ou non de cette locution lors de ce rendez-vous ". doit être le rôle d'une association de lutte contre le racisme comme le MRAP ? Le MRAP a été très actif en réaction au 21 avril 2002. Une commission s'est montée, mais la lutte contre l'extrême droite n'est pas un enjeu majeur actuellement. Pourtant, c'est un «fondamental » du MRAE Motion Haute Vienne : " la nécessité pour le MRAP de combattre le Front national impose qu 'il soit aussi un Mouvement d 'éducation Civique. Le traumatisme du 21.4.02 où le F.Nfut présent au deux ième tour de l'élection présidentielle a rappelé aux militants et aux CL qu'ils devaient engager toutes leurs f orces, lorsque les circonstances l'exigent, pour expliquer ce qu'est la Démocratie, le système électoral, et inciter les électeurs à prendre part au vote. » Motion de la commission de lutte contre l'extrême droite (extrait) : « Nous demandons que notre association re-considère la lutte contre l'extrême droite comme un de ses axes politiques prioritaires. Depuis le dernier congrès, il y a eu le 21 avril 2002 ! Le MRAp, doit s'investir de nouveau dans la lutte contre l'extrême droite, il doit invente1; créer et construire, une nouvelle forme de riposte plus volontaire et plus adaptée. Elle ne peut rester comme actuellement une lutte qui ne devient prioritaire que quand le danger est immédiat. Nous proposons de créer un collectif national au sein du MRAP où chaque comité local, chaque fédération, chaque militant qui y participe, travaille sur ce thème. Nous devons créer une riposte au quotidien. Elle nécessite localement une vigilance de tous les jours et une connaissance assez Afin de faciliter les débats sur cette question, nous vous proposons des extraits du rapport moral et surtout de plusieurs motions qui illustrent les différents points de vue, au sein de notre mouvement, sur ce thème fine des actions menées et des discours de l'extrême droite. Pour cela, chaque comité local, chaque fédération doit pouvoir s'investir dans cette lutte. Chaque fédération (ou CL) pourrait élire un correspondant qui travaillerait sur ce thème et serait en contact régulier par mail avec les correspondants des autres fédérations. Nous pourrions également organiser des réunions ou rencontres au moins une fois par an entre correspondants. Une association comme le MRAP n'a pas les forces militantes nécessaires pour lutter seule contre cette machine de haine que représente l'extrême droite. La riposte doit nécessairement être unitaire et collective au niveau local, national et européen. Ces correspondants auraient pour rôle de faire vivre (réactiver, réanimer) un collectif réunissant d'autres associations de vigilance. La commission de lutte contre l'extrême droite doit participer à des collectifs au niveau français et européen. » Motion CL 1/4 DE LYON : « RACISTES VICTIMES : .... aller vers cette population victime et précarisée par le système économique et qui est perméable aux discours populistes du FNAller vers l'électorat FN Aller à la rencontre des racistes .. .. ». Proposition de la commission antisémitisme : « Afin de clarifier la position du MRAP sur le problème de l'antisémitisme et de la rendre plus cohérente, à la fois vis à vis de ses militants et de l'opinion publique, une rencontre avec les deux Commissions (<Extrême Droite ii et « ProcheOrient ii s'avère indispensable, au moins deux fois par an » voir autres propositions en annexe. Etat des lieux des actes racistes La CNCDH consacre une partie importante de son rapport de 2003 au thème de l'intolérance et des violences à l'égard de l'islam « Différences » - Mo uvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ] anvier-Févrie r-Mars 2005 dans la société française et pose la question de l'islamophobie, ceci au regard des chiffres suivants (chiffres de la CNCDH et du ministère)

le racisme anti-maghrébin

représente à lui seul 64 % des 59 actes racistes violents (hors antisémites) en 2003. : Par ailleurs, dans un sondage de BVA pour la CNCDH, pour 48 % des personnes interrogées " les valeurs de l'Islam ne sont pas du tout ou plutôt pas compatibles avec les valeurs de la République française ", 39 % des personnes pensent même qu'il y a trop de musulmans en France. Analvse du phénomène plusieurs analyses se font jour au sein de notre mouvement à propos de ce phénomène et cela implique inévitablement des désaccords sur la question des modalités de lutte. Il est donc d'une importance capitale que le congrès se prononce sur cette question comme l'y invite le CN du 8 mai. • Motion 5 : « depuis le 1 1 sept 01, et la campagne lancée par G Bush sur le thème de la « croisade du bien contre le mal, une nouvelle forme de racisme s'est développée : la diabolisation des musulmans [. .. ] Nous observons effectivement un déchaînement de l'hostilité envers les musulmans au niveau des médias, de l'édition [. .. ] ce climat a eu des répercussions concrètes; incendies de mosquées, profanations de cimetières ii. • Motion 1 : « Il est de notre rôle de dénoncer les textes et idéologies religieux, quand ils sont porteurs de haine et d'oppression de l'autre, du fait de sa religion, de son origine, de ses moeurs ou de son sexe. La critique de l'Islam n'est ni un racisme anti-arabe, ni un racisme anti-musulman [ .. .] Le MRAP décide de ne plus faire de l'islamophobie un axe SPécifique d'inte1~ vention. Cette expmssion confond la phobie de la religion et la phobie du musulma,n. Elle engendre de la confusion et devient une opportunité pour les groupes fondamentalistes religieux qui ne poursuivent pas un combat pour des valeurs universelles mais s'inscrivent dans une conception communautaire de la société. Le MRAP combat le racisme à l'encontre des populations arabo-musulmanes au même titre que toutes les formes que prend le racisme, dans un pays qui n'a pas encore assumé son passé colonial ii. Dossier Edito ! International ! Dossier 1 Immigration ! Discrimination f Education 1 Kiosque • Motion 2 : « Il faut refuser la pression communautaire qui essaie de mettre en avant le clivage entre religieux et non religieux. La ligne de fracture n'est pas là, elle est idéologique et politique, entre progressistes de toutes origines et intégristes de toutes les religions .... Personne ne peut nous convaincre qu'il faut abandonner aux islamistes le contrôle d'une prétendue « communauté ii musulmane et que défendre les droits individuels contre la pression du groupe serait un signe d'ethnocentrisme. C'est le communautarisme et non la défense des droits hwnains universels qui renforce le ghetto et l'exclusion ... nous considérons que le MRAP n'a pas à défendre l'islam, pas plus qu'il ne lui appartient de défendre le catholicisme, le judaïsme ou tout autre religion ii. • Motion 7 : « ... rejeter en conséquence le concept trompeur d'islamophobie qui nous a placés dangereusement sur un terrain religieux et communautaire au lieu du terrain social et politique qui doit rester le nôtre ; en parlant plutôt de racisme anti arabo-musulman, on ne nie pas la composante religieuse possible de ce racisme mais on la relativise comme seconde et surajoutée ... ii. • Motion 3 : « S'il est vrai que souvent la mise en cause de l'islam et des musulmans ne cache en réalité qu'un racisme antiarabe, il n'en demeure pas moins vrai que ce racisme anti-arabe ne peut recouvrir l'ensemble des manifestations de racisme. Ainsi ni les Iraniens, ni les Turcs ou les Kurdes ne sont arabes et ils ne sont pas pour autant épargnés par le racisme. C'est donc bien en fonction de leur religion qu'ils sont montrés du doigt. Le débat sur l'entrée de la Turquie dans l'Europe prouve bien que pour beaucoup, c'est l'islam qui fait peur. A ce niveau, le concept de racisme anti-arabe est inopérant, il s'agit bien là en l'espèce d'un racisme ayant pour objet la religion et là le concept d'islamophobie devient pertinent ii. • Motion 4 : « Pourtant, de même que l'inst1'umentalisation du terme antisémitisme pour empêcher toute critique de la politique de l'Etat d'Israël ne remet pas en cause son existence et la nécessité de la combattre, de la même manière, l'utilisation abusive du terme Islamophobie par des extrémistes et autres, pour faire taire la critique de l'Islam n'en exclut pas l'utilisation [. .. ]Aujourd'hui sous couvert de critique de la religion, on stigmatise toute une communauté, renvoyée à sa supposée « identité ii musulmane, qui serait « naturelle ii , « biologique ii [. .. ] En revanche, ce serait une erreur de réduire le racisme anti-arabe à l'islamophobie . Il ne faut pas faire de ce mot un usage « exclusif ii, les termes de « racisme ii , « discrimination ii, restent d'actualité. Par ailleurs, le terme « islampohobie «, utilisé très ponctuellement jusqu'au Il septembre 2001, est devenu d'usage courant, non seulement en France mais aussi aux Etats-Unis et dans tous les pays européens. Il semble donc répondre à une conjoncture nouvelle. Toute réalité doit pouvoir être nommée. C'est une nécessité (.). Nous tenons à ce que le MRAP demeure un mouvement de lutte contre tous les racismes et toutes les discriminations. Nous tenons donc à rendre hommage à la direction pour avoir tenu bon face aux campagnes médiatiques et aux ragots diffusés en milieu militant, visant à nous faire renoncer à certains de nos combats: la lutte contre l'islamophobie, le refus de l'exclusion des élèves voilées et la critique de la politique israélienne ... ii. Invitation du rappon moral « Plus généralement, il faudra se poser la question de savoir comment appliquer les lois antiracistes, qui interdisent toute hostilité envers un individu ou un groupe de population fondée notamment sur la religion ii. Tel est un des principaux défis à relever pour notre congrès. (La motion 1 émane de quatre membres du eN, la motion 2 Marseille ,la motion 3 du congrès local de Menton et la motion 4 des congrès local 19/20 et départemental de Paris, motion 5 Seine ST Denis, motion 7 Grenoble). La plupart des interventions sont venues renforcer le contenu de ces différentes motions. Toutefois, nous tenons à mentionner quelques propos complémentaires

• Certains rejettent le mot, le concept, les alliances qu'il créerait et la perte d'adhérents que ce terme, trop exclusivement mis en avant, aurait engendrée ... Question qui a déchiré le MRAP, mais en 1930 lors de la montée de l'antisémitisme, il aurait été insoutenable de dire " on ne combat pas l'antisémitisme car on risque de perdre des adhérents ". • La langue est vivante, et le terme s'est imposé ... • L'islam politique est à traiter comme un fascisme. C'est un combat politique. On n'a pas à y associer l'islam. • Comment avoir la phobie d'une religion sans avoir la haine de ses adeptes, donc le rejet de j'autre ? • On revendique le droit de ne pas aimer une religion. Il ne faut pas confondre la mise en cause d'une religion et la mise en cause de la religion. • Ce sujet renvoie à l'expression du MRAP, à sa fréquence, au choix des mots à bien peser. • On se bat sur la terminologie pour nier une réalité. • Comment réaffirmer la valeur universelle de l'antiracisme, en dépassant les revendications communautaires et les hiérarchisations ? Quels outils le MRAP doit-il se donner ? • Il paraît indispensable de poursuivre une analyse-riposte de fond sur ces problématiques. Il nous faut aujourd'hui nous décider sur l'utilisation du terme " islamophobie ». Cela reviendrait il à considérer comme nécessaire ou souhaitable de lui consacrer une campagne spécifique ? Ou dans le cadre de l'unicité, de la nonhiérarchisation et du refus de la communautarisation du combat antiraciste, la riposte doit être plutôt identique aux réponses données aux autres expressions de racisme? Le congrès s'est prononcé sur la question de savoir si L'Islamophobie est une nouvelle forme du racisme anti-musulman et par conséquence entrant dans le champ d'activité du MRAP ou est une réalité à simple dimension religieuse? 131 Voix pour l'intervention du mrap ; 83 contre, 46 abstentions. Compte tenu de cette majorité et comme proposé ci-dessus, le congrès devait se prononcer sur le contenu de l'intervention du mrap, dans le cadre de l'unicité du racisme, du refus de tout hiérarchisation et de tout communautarisme. A la question : le MRAP doit il poursuivre le combat contre l'islamophobie dans le cadre de la définition légale de la provocation à la haine raciale? Le vote fut unanime moins 23 abstentions. « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ] anvie r-Février-Mars 2005 19 20 Dossier Edita International · Dossier Immigration Discrimination Education Kiosque Compte rendu de l'atelier co-animé par M. Lelouche et M. Carrel Un grand nombre de contributions et de motions de qualité, une forte affluence à l'atelier, une quarantaine d'intervenants témoignent de l'intérêt pour le sujet. Un document a été fourni (7 pages) faisant la synthèse des motions et des contributions et proposant des thèmes pour faciliter le débat_ Synthèse des motions et contributions qUi enrichissent le rappon moral Loi 2004 sur les signes religieux • Certaines motions et contributions demandent que la position du CN du 08-05-2004 soit reprise par le congrès (Fédé de Paris, Epinay). • D'autres vont plus loin et demandent, que, dans le renforcement du combat laïque, la loi Chirac/ Stasi sur les signes religieux soit abrogée (Fédé Val de Marne). En effet, votée dans un contexte de rejet de l'étranger, sans aucune lutte contre les discriminations, cette loi ne donne comme réponse que l'exclusion, elle représente une discrimination supplémentaire qui risque de renforcer l'influence des religions intégristes auprès des jeunes sans repère, exclus de l'institution scolaire. • Où en est-on aujourd'hui ? Pour les uns, la loi n'épuise pas la question (elle sera évaluée en mars 2005) ; ils s'inquiètent du vécu des jeunes, obligé(e)s de retirer foulards et turbans, du devenir de celles qui ne se sont pas présentées, des ' bavures , qui touchent des mères et des élèves dans le cadre de l'application de la circulaire (plusieurs contributions et témoignages - Fédé de Paris). Cette loi est raciste, ce qui ne veut pas dire que ceux qui la défendent sont racistes, mais qu'un climat général de rejet, de peur, peut permettre toutes les dérives en essentialisant un groupe de personnes avant de les stigmatiser. Pour d'autres, la loi votée très majoritairement est entrée en vigueur en septembre 2004. Le MRAP doit veiller à ce que son application se fasse dans la concertation et le respect des personnes, évitant au maximum les exclusions (cf. Grenoble et manifeste pour l'avenir du MRAP). Il est même préconisé une mise en place de mesures palliatives sur le plan scolaire avec enseignants et parents. La question du port du « foulard , pour les jeunes filles reste complexe, il a de nombreuses significations religieuses ou culturelles et il est traversé par les clivages sociaux (Limoges). Il est également souligné que ces jeunes filles sont aussi dans la modernité, qu'elles veulent faire des études et travailler. Il est important de ne pas les essentialiser, de voir leur diversité ; derrière le ' foulard " il existe un individu (Paris). Propositions pour promouvoir la laïcité • Participer à toute initiative de défense et de promotion de la laïcité contre les offensives intégristes dont elle est l'objet. • Créer un cadre pour poursuivre la réflexion sous la forme d'un groupe de travail transversal sur la loi de 1905, commémorée en 2005. • Créer un groupe de travail transversal pour réfléchir sur la laïcité en Europe avec des associations européennes de défense de droits de l'homme. • Dans le cadre de la nouvelle loi sur l'école en 2005, « intervenir { .. } dans le débat en ce qui concerne la formation des éducateurs à la laïcité, l'app"entissage des droits universels et de la diversité cultu1'elle, l'éducation au savoir vivre ensemble sans racisme ii (Grenoble). Autres points de vue et propositions La loi sur les signes religieux à l'école Pour certains, cette question ne doit plus être prioritaire pour le MRAP car elle est passée au second plan de l'actualité. De plus, elle risque de couper les musulmans, la plupart du temps laïques en France, du reste des citoyens (textes individuels). Le MRAP doit arrêter de se battre contre cette loi (Grenoble). Ce n'est pas une loi raciste. La question principale n'est pas identitaire, mais sociale; la lutte contre les discriminations est alors essentielle. En ce qui concerne les alliances, il faut cesser tout dialogue avec les organisations religieuses et les prédicateurs islamistes même d'apparence modérée (Grenoble, Marseille, Rouen). La laïcité Une autre conception est avancée. « Elle n'est ni nouvelle, ni plurielle, ni ouverte, ni tolérante, ni intolérante, ni fermée ' (texte individuel). Le MRAP n'a pas à défendre une religion, ne doit plus être identifié comme pro voile. Le MRAP ne doit pas apparaître non plus comme le relais de communautés, ni faire du « respect des différences un instrument de maintien des inégalités et oppressions ' . Le MRAP doit défendre la laïcité contre les intégrismes religieux musulmans, le communautarisme et les « nouveaux marchands du temple , (Rouen, Grenoble, manifeste pour l'avenir du MRAP). Des inquiétudes se font jour par rapport à la commémoration de la loi de 1905 : il n'est pas question de revenir sur la loi de 1905 (Fédé Val de Marne). Débat Sur la loi sur les signes religieux à l'école (mars 2004) La laïcité est une question qui déchaîne les passions, particulièrement depuis 1989 où s'est posée la question du port du « foulard « à l'école. Le MRAP a toujours maintenu la même position: il n'est pas favorable au port de signes religieux à l'école mais il s'oppose fermement à l'exclusion des élèves voilées. En juin 2003, le débat a ressurgi, amplifié par les media. , Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - Janvier-f évrier-Mars 2005 1 Dossier Edita ' International Dossier ' Immigration 1 Discrimination ' Education ; Kiosque Mars 2004, la loi interdisant le port de signe manifestant ostensiblement une appartenance religieuse ravive le débat. Ce qui se dégage de la discussion de l'Atelier 6 Laïcité: une majorité semble opposée à cette loi pour les raisons suivantes : les jeunes filles exclues de l'école sont renvoyées à la sphère privée, isolées, stigmatisées, rejetées dans un ghetto communautaire, privées des bénéfices de l'école, du droit à l'éducation. C'est une nouvelle forme de discrimination contre laquelle le MRAP s'élève. D'autres congressistes vont plus loin et demandent l'abrogation de cette loi car elle entre dans le contexte de rejet de l'étranger (loi Perben/ Sarkozy) discriminé et exclu, ou bien réclament une autre loi qui aurait pour objet ' l'intégration , ou bien encore, soulignent le caractère raciste de ce texte. D'autre part, il est rappelé que cette question du voile occulte les problèmes sociaux et politiques bien réels: c'est chez les enfants « issus de l'immigration « que le taux de l'échec scolaire est le plus élevé, ce sont les mêmes qui subiront à leur sortie de l'école les discriminations au logement et au travail. La lutte contre les discriminations est une priorité. Le fait de débattre sur un aspect secondaire laisse dans l'ombre le nécessaire combat dans le cadre de la crise de l'école et de la société. A l'origine de ces discriminations, n'y a-t-il pas un refus de la France d'assumer un passé colonial, une volonté de ' civiliser le sauvage, ? Il est souligné également que cette loi peut avoir pour conséquence des replis communautaires. La solution envisagée là est un travail pédagogique, notamment en direction des livres scolaires, sur les représentations scolaires des populations discriminées. Pour d'autres, le MRAP n'a pas à se positionner sur ces types de questionnements, n'a pas vocation à intervenir sur ces sujets, n'a pas à défendre une religion, doit cesser de combattre cette loi. Enfin, le risque de communautarisation de la société est relevé à plusieurs reprises, l'exemple des USA et de la Grande Bretagne est mentionné. De toute façon, la loi est entrée en vigueur donc le MRAP devra faire appliquer le droit des personnes pour limiter les exclusions, en solidarité avec les victimes. La question des femmes a été largement abordée sous plusieurs angles. Tout d'abord, il est rappelé que les motivations des jeunes filles qui portent le « foulard, sont très complexes: cela peut être un 1 Compte rendu de l'atelier signe de révolte contre la famille, l'école, une société dont elles se sentent rejetées ou l'expression d'une identité religieuse. Des points de vue féministes ont été avancés, dénonçant le « foulard , comme signe d'oppression machiste, mettant en garde contre une régression du statut de la femme et de la démocratie. D'autres insistent sur le fait que les femmes sont toujours vécues comme porteuses de la tradition, facteur d'oppression, y compris dans les démocraties. En plénière, il a été décidé de confirmer la décision du CN du 8 mai 2004 qui correspond à la majorité des points de vue de l'atelier : « le MRAP, attaché à la laïcité et au droit des femmes, n'est en rien favorable au port des signes religieux à l'école dont le «foulard ii qui peut être un signe d'oppression des femmes. Néanmoins, le MRAP continue d'affirmer qu'il est hostile à une loi qui exclut de l'école (un des piliers de la socialisation), qui stigmatise et discrimine, relance des problèmes où ils n'existaient pas, mène au développement d'écoles confessionnelles, voire au communautarisme. Le MRAP s'affirme pour un réel dialogue et le droit à l'éducation, accueille et accompagne les jeunes et leurs familles ii. La question de la laïcité Elle n'a été qu'effleurée, faute de temps. Toutefois, des inquiétudes sont apparues par rapport à la loi de 1905. Pour plusieurs congressistes, le gouvernement prépare son abrogation. L'atelier a proposé: - d'intervenir dans le débat, dans le cadre de la nouvelle loi sur l'école, sur la formation des éducateurs à la laïcité; - de créer un groupe de travail sur la laïcité avec représentation régionale, afin d'analyser la laïcité en profondeur, dans toutes ses nuances; En plénière, cette dernière proposition de l'atelier a été adoptée. La question des alliances Cette question n'a pas été traitée dans l'atelier, faute de temps. En plénière, le Congrès décide de la reporter au prochain Conseil National. En conclusion, il est rappelé que la dimension internationale, la « théorie du choc des civilisations " sous-tend toutes les problématiques qui ont été abordées. co-animé par M.-A. Butez, L. Lainé et G. Kerforn Le Bureau National avait proposé pout; l'animation de cet atelier Marie Annick Butez, Liliane Lainé, et Gérard Kerforn. L'atelier étant simultané avec celui de la « Laïcité" Marie Annick Butez s'est retrouvée seule pour assurer l'animation. Evelyne Verlaque et Béatrice Rougy ont donc aidé à la co-animation. Cette co-animation a été rendue possible car le thème de l'atelier était politiquement moins sensible. L'introduction a été faite sur les grands points du rapport moral à débattre : - éducation à la citoyenneté et discriminations à l'école ; - devoir de mémoire: une orientation de congrès ; - communication externe, interne, Internet; - développement, animation des çomités locaux; - fonctionnement. Certains auraient voulu que ['on parle également: - des interventions dans les entreprises

- des moyens d'intervention juridique pour permettre aux victimes d'actes racistes d'être reconnues. Ces thèmes n'ont pu être abordés. Ce qui a été abordé : • Les questions relatives à l'Education contre le racisme et Discriminations à l'école, • Les moyens de communication externe, interne notamment les communiqués. Education contre le racisme et discriminations à l'école Les différents comités locaux présents dans l'atelier ont partagé leurs expériences, ont exprimé les manques ressentis : «Différences " - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - Janvier-février-Mars 2005 21 22 Edito International ' Dossier 1 Immigra tion Discrimination ' Education 1 Kiosque - les différents modes d'intervention développés: malles de livres contre le racisme, films, Expo, vidéo, concours, sites Internet intéressants (CL de Rouen, Epinay, Vitrolles, Lyon, St Quentin ... ) Interventions en milieu scolaire et extra scolaire dans les quartiers populaires, centres sociaux, centres de loisirs ... ; - richesse d'échanges d'expériences dans les réunions de formation organisées au niveau national et dans les réunions décentralisées (au nombre de 9 l'an dernier). Ces réunions sont considérées comme très motivantes ; - certains comités (Rouen, FD Bouches du Rhône, Moselle .. ) ont démontré l'intérêt des recherches de subventions (FASILD, Conseil Général, Régional, CAF ... ) pour permettre le recrutement d'emplois jeunes, pour assurer l'accueil du public, formation des formateurs, formation de responsables d'associations locales sur la question du racisme, ou de chefs d'Etablissements scolaires ; - l'intérêt du développement du travail en réseau a été noté. Ce que souhaite l'atelier: que l'Education soit un axe prioritaire pour le MRAP d'où: - le développement des réunions de formation et d'échanges qui permettent la circulation de l'information entre CL et National. - la création d'un centre de ressources national des outils MRAP, mais aussi outils de nos partenaires. - le développement des lieux de formation des formateurs. Ce choix de formation est considéré comme prioritaire. - nécessité d'une réelle évaluation des besoins en matière d'éducation. - comment développer nos interventions dans les qualtiers populaires

comment apprendre à convaincre

un public non acquis. - création d'outils pédagogiques ou d'information simples et pas chers (affiches, livres à 1 euro sur nos idées .. ) - outils de vulgarisation sur certaines cultures : valorisation de l'image des pays africains, sur l'esclavage, sur les crimes contre l'humanité, sur la colonisation, sur le devoir de mémoire etc; - l'absence de moyens humains salariés nuit au développement, d'où la demande d'un correspondant au niveau national pour les contacts avec les comités locaux. Les motions de Rouen, Lyon 1 et 4, FD Paris, FD 94, Chartres devaient être présentées en plénière: • L'Education : axe prioritaire pour le MRAP. • La création d'un centre de ressources. • La création d'un poste salarié sur ce secteur. • La mise en place d'un groupe de réflexion transversal ouvert sur la pédagogie de l'Histoire en France, pour toutes les Histoires, même douloureuses, colonisation, esclavage, génocides, gens du voyage, etc. , pédagogie qui pourra amener tous les jeunes à se situer dans l'Histoire et à devenir des citoyens actifs à part entière. • La dimension européenne de la citoyenneté sera prise en compte en prenant contact avec des représentants du mouvement social et des associations européennes des droits de l'homme. • Initier une campagne avec tous nos partenaires, syndicats, associations de parents d'élèves et organisations qui agissent contre les discriminations à l'école. Un questionnaire et un colloque seront le point de départ de cette campagne qui vise à casser ces discriminations en impliquant le ministère de l'Education Nationale et le patronat, notamment pour les stages en entreprises validant des cursus scolaires. VENDRE 018 OCTOBRE 2004 " 20 h Ct ;"f (11'111 ! LA CUF 1 r ',l' , 1>41, AIIc .. _ _ • Poursuivre le travail d'Education antiraciste, le devoir de mémoire • Construire un mouvement militant. Communication Quelle expression publique du MRAP? - Respect de la démocratie - Pas de dictature des médias - Internet Respect de la démocratie Souhait que les décisions prises par l'organe dirigeant du MRAP soient respectées (pas de communiqué différent des positions du CN ou CA). Si le MRAP doit jouer un rôle d' " expert ", certaines positions prises au niveau national ont été prises trop rapidement dans le but d'être médiatiquement portées. La personnalisation des interventions est nuisible au mouvement" lycée d'Aubervilliers ", " l'avocat" du MRAP .. ) Tous les communiqués ne justifient pas une telle vitesse de réponse (Chaîne TV) Sentiment de se faire piéger par les médias qui jouent sur l'événementiel et sur l'affect. Amélioration des outils Comment fonctionne le réseau Internet avec les actuels membres du BN : Les communiqués sur des thèmes nouveaux ou qui ne requièrent pas l'unanimité sont proposés par Internet aux membres du BN avec demandes de réponse et remarques dans les 24 heures. Après ces 24 heures, les remarques sont prises en compte et le communiqué part avec l'assentiment de la majorité. Internet • Nécessité de sécuriser l'accès à nos adresses, de sécuriser nos fichiers pour que ceux-ci ne soient pas détruits ou que d'autres (Extrême Droite) n'aient pas connaissance de nos coordonnées. • Actualisation du site (on y parle toujours du RER). • Diffusion rapide des communiqués avant les médias (quand c'est possible) • Amélioration des envois par Internet (lettre de l'Adhérent ou autre). • Listes: Trop de messages nuisent au message. Peut-être nécessité de créer un espace pour ceux qui veulent" tchatcher " différent de celui des informations générales, peut-être nécessité de créer une commission " média " pour contrer le discours médiatique. Motion qui devait être présentée en plénière: CL 17e /ISe - Création d'un" groupe" chargé de la communication ; - Mise en oeuvre d'un communiqué par ce groupe; - Porte parole des communiqués. « Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 Edito i Intell1ational i Dossier ; Immigration ; Discrimination ! Ed ucation ! Kiosque Compte rendu de l'atelier co-animé par R. Le Mignot, E. Benaroche et A. Vocaturo Pour cet atelier, nous vous communiquons les motions des comités locaux et fédérations ainsi qu'un relevé des débats en atelier sachant que l'ensemble de ces travaux n'ont pu trouvé de traduction complète en séance plénière faute de temps. Le Conseil National nouvellement élu poursuivra les prises de décisions. Motions des fédérations Fédération Val de Marne Nous sommes un Mouvement antiraciste et pour l'Amitié entre les Peuples; c'est à ce titre que nous prenons position, sur la base de nos valeurs sus décrites, sur les questions internationales. Nous sommes bien évidemment pour le droit des peuples à disposer d'eux mêmes, contre le colonialisme et le néocolonialisme qui permet le pillage des pays les plus pauvres au moyen d'une soidisant dette tout à fait éhontée ; nous dénonçons cette dette qui épuise les peuples. Nous dénonçons l'intervention américaine en Irak, nous exigeons le retrait de l'ensemble des troupes d'occupation et nous revendiquons la liberté pour le peuple irakien de décider de son sort sans que lui soient posées des conditions préalables à l'exercice de ce droit à l'autodétermination. La question de la Palestine est singulière car elle condense aujourd'hui au coeur du MoyenOrient, la zone stratégique d'approvisionnement en pétrole de l'Europe et des Etats-Unis, les conflits issus de' périodes coloniales et la nécessité de faire coexister dans la même région des peuples d'histoire et de culture différentes. Aujourd'hui les Palestiniens sont incontestablement un peuple opprimé auquel l'ordre international dirigé par les Etats-Unis refuse dans les faits le droit à l'existence d'un Etat viable. Il appartient au MRAP de rappeler cette donnée. Le MRAP est dans son rôle de défenseur de l'amitié entre les peuples en soutenant et en popularisant les actions conjointes des Palestiniens et de ceux des Israéliens qui s'opposent à la politique d'occupation de leur gouvernement. Il est aussi dans la responsabilité du MRAP de savoir respecter l'unité et la diversité de son mouvement afin de donner encore plus d'autorité à ses prises de position sur cette question. Si aujourd'hui une solution politique pouvait s'ébaucher avec la création d'un Etat palestinien à côté de l'Etat israélien, nous continuerions de souhaiter pour chacun de ces deux Etats, comme nous nous acharnons à le faire reconnaître partout sur la planète, la reconnaissance des valeurs de laïcité, de liberté de circulation et d'installation et de citoyenneté, reposant sur l'égalité des droits. Le MRAP fait aujourd'hui une place particulière aux évènements du Moyen-Orient qui engendrent tant de racisme. Pour autant le MRAP reste préoccupé par les drames que vivent tous les peuples victimes de racisme à travers le monde. Motions votées par la commission internationale Motion Guantanamo : accord de l'atelier Le MRAP condamne la situation de non droit faite aux détenus de Guantanamo et l'absence de statut international de cette base de détention. Aucune cause ne peut justifier le terrorisme aveugle contre des civils innocents. Mais la lutte contre le terrorisme ne peut justifier la torture et la négation des droits élémentaires de tout être humain: droit à un procès équitable, droit à un avocat, respect de la dignité humaine des détenus. Le MRAP exige, pour ces prisonniers exilés de façon illégale, le respect des Conventions de Genève et de la Convention des droits de l'Enfant. Motion Irak: accord de l'atelier Après 12 ans d'embargo qui a coûté la vie à de 500 000 à 1 million d'enfants, la guerre en Irak a été justifiée par des mensonges: présence d'armes chimiques et de destructions massives qui restent introuvables. Elle se poursuit au nom de la "lutte antiterroriste". En réalité il s'agit d'une guerre coloniale d'une forme nouvelle; nous assistons à un massacre de la population civile et à la destruction de toutes les infrastructures irakiennes. Cette guerre est illégale au regard du droit international. L'occupation n'a débouché en aucune façon sur la liberté et de meilleures conditions de vie. Bien au contraire, elle a apporté le chaos et l'horreur. Le MRAP rappelle que selon les Conventions internationales "la puissance occupante doit garantir la sécurité des populations civiles". L'armée américaine est à ce titre coupable de crimes de guerre. Le MRAP demande : l'arrêt immédiat des bombardements, le retrait des troupes coloniales d'occupation, la restitution de la souveraineté du peuple irakien. Il apporte son soutien aux pacifistes américains, en particulier aux jeunes déserteurs de l'armée américaine Motion Tchétchénie : accord de l'atelier Depuis septembre 1999 une guerre coloniale d'une cruauté inouïe frappe la population civile de Tchétchénie. Ce que le Président Poutine appelle "une opération anti-terroriste" consiste en des bombardements massifs de villes et de villages, y compris au moyen de bombes à fragmentation et d'armes chimiques, en des opérations de "nettoyage" au cours desquelles les soldats pillent, violent, tuent, emmènent hommes, femmes, enfants dans des "camps de filtration" où les prisonniers sont torturés en attendant que leur famille verse une rançon aux militaires. Compte tenu de l'ampleur de ces arrestations arbitraires, disparitions, meurtres, il s'agit de crimes contre l'humanité. Le MRAP condamne les prises d'otages sanglantes du théâtre de Moscou et de l'école d'Ossétie qui ont fait des centaines de victimes innocentes mais de telles horreurs prouvent que seule une solution politique dans le respect du droit des peuples peut mettre fin au bain de sang. Le MRAP demande: • Le retrait des troupes russes de Tchétchénie. • L'ouverture de négociations avec le Président tchétchène légitime Aslan Maskadov. • A la communauté internationale, en particulier à l'Union Européenne et à la France, de sortir de leur silence complice et de prendre des mesures pour que le peuple tchétchène puisse enfin choisir librement son avenir. • Le respect du droit d'asile pour les réfugiés tchétchènes et leur accueil inconditionnel. Motion votée par la commission Afrique: accord de l'atelier Depuis les années soixante la France confisque l'indépendance de ses anciennes colonies africaines en soutenant des régimes dictatoriaux et corrompus afin d'y préserver ses intérêts économiques : fournitures d'armes, soutien politique, économique et militaire, gardant le silence face aux exactions commises, et aux élections truquées. Le néocolonialisme de la Françafrique permet de maintenir au pouvoir des dictateurs responsables de massacres des populations africaines et leur maintien dans la pauvreté. Le MRAP dénonce l'ethnicisation des conflits. n demande: • L'annulation de la dette odieuse qui permet de poursuivre le pillage des richesses de l'Afrique. • L'arrêt de la coopération militaire et des ventes d'armes en direction des régimes répressifs. • Un embargo total sur les armes en direction des pays ou groupes qui recrutent et enrôlent des "enfants-soldats" . « Différences» - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 23 24 Edito International Dossier ' Immigration l Discrimination ' Education ' Kiosque • La fin de l'impunité des crimes à l'encontre des populations civiles notamment les violences faites aux femmes, le viol étant une arme de guerre. • La mise en place de mécanismes stricts de contrôle de l'aide et de garantie de son non-détournement. • La fin de relations privilégiées avec des régimes non démocratiques. • Une mobilisation pour le droit à la santé, à l'alimentation, à l'accès à l'eau, à l'éducation pour tous; • Le retrait des troupes françaises des anciennes colonies; • Le respect du droit d'asile et le refus de tout renvoi de ressortissants africains vers des pays réputés peu respectueux des droits de l'homme. Motion Iran: non abordée dans l'atelier Depuis 25 ans, le régime islamique iranien viole les droits les plus élémentaires de la personne humaine. Arrestations sommaires et procès arbitraires sont légion. Le catalogue des peines infligées au nom de l'intégrisme islamique inquiète tous les démocrates: tortures, coups de fouet, exécutions, amputations, lapidations. Dans ce contexte atroce, les femmes sont particulièrement visées. Fragilisées par leur statut, elles sont victimes de nombreuses cruautés. Les tribunaux islamiques n'hésitent pas à les faire exécuter pour" conduite déshonorante ". Les enfants ne sont pas épargnés. Dernièrement, une adolescente de 16 ans, Atefeh Rajabi, a été pendue et une enfant de 13 ans, Jila lzadi, a été condamnée à mort par lapidation sans qu'aucun organe de presse ne se soit fait l'écho de ces ignominies. Le congrès du MRAP : • Décide de lancer une campagne d'information de l'opinion publique sur les terribles violations des droits humains. • Il condamne l'attitude du gouvernement français qui, afin de préserver des intérêts économiques de grandes sociétés (Total, Alcatel, etc.) poursuit les résistants iraniens réfugiés sur son sol et bafouent le droit d'asile • Il réaffirme le droit aux Iraniens de résister et de combattre le régime des mollahs par tous les moyens prévus par le droit international. Motion sur la Turquie et l'Europe: non abordée dans l'atelier La Turquie est un Etat laïc, son entrée dans l'Union européenne n'est donc absolument pas liée à des questions de religion, mais uniquement à une question de respect des droits de l'homme et du droit des peuples. Pour le MRAP cette entrée pourrait être un progrès énorme pour les citoyens turcs, tant pour ceux qui vivent en Turquie que ceux qui vivent en Europe. Mais pour espérer être admise dans l'Union Européenne, la Turquie doit encore faire des progrès dans le domaine des droits de l'Homme et de l'accélération de la démocratie. Certes des avancées ont eu lieu; beaucoup reste à faire. La Turquie doit renoncer, sans délai et dans les faits, aux violations des droits de l'Homme: pratique de la torture, cellules d'isolement, emprisonnement arbitraires, et libérer tous les prisonniers politiques turcs ou kurdes sans aucune exception. Elle doit donner une portée concrète à ses engagements sur le droit des minorités, en particulier le droit des kurdes en acceptant une solution politique négociée avec les représentants de ce peuple. Deux changements impOltants ne peuvent être différés : la question de Chypre et la reconnaissance du génocide arménien. Commission Moyen-Orient: motion conflit israélopalestinien "On n'élabore pas une société humaine sur des monceaux de cadavres" Louis Lecoin. Pour le MRAP, sur cette problématique comme sur toutes les autres, seul compte le respect du droit international et l'application des résolutions des Nations Unies. Dans la guerre qui oppose le gouvernement et l'armée israélienne au peuple palestinien, il y a un occupant et un occupé, un peuple colonisé d'une part, des colons et une armée colonisatrice, d'autre part. Il y a un peuple qui subit tous les jours les humiliations, dont on détruit les maisons, les infrastructures, il y a un peuple spolié de sa terre, de l'eau et pour qui les gestes de la vie quotidienne (travailler, se soigner, aller à l'école, etc .. ) deviennent insurmontables. Il y a de plus un peuple à qui le gouvernement Sharon devait apporter la sécurité et qui aujourd'hui est piégé. La poursuite de l'occupation des Territoires palestiniens et la colonisation génèrent des attentats contre les civils israéliens; ces attentats sont utilisés à leur tour comme prétexte pour la poursuite de l'occupation

ce cycle infernal ne s'arrêtera

qu'avec le retrait des troupes israéliennes des territoires occupés et la reconnaissance d'un Etat palestinien viable à côté de l'Etat israélien. La construction du Mur d'annexion, déclaré illégal par le Tribunal Pénal International et l'Assemblée générale de l'ONU, n'apportera pas la sécurité aux Israéliens. Il ne fait que rendre la paix impossible. Les attentats terroristes contre des civils israéliens sont des actes condamnables

de même notre solidarité

avec le peuple palestinien ne trouvera jamais notre soutien avec ceux dont le seul ressort est la haine des Juifs. Le MRAP est solidaire de tous les pacifistes israéliens et palestiniens qui se prononcent clairement pour la décolonisation et la reconnaissance mutuelle des deux peuples, dans deux Etats viables et souverains. Pour le peuple palestinien en deuil de son Président, le combat pour ses droits continue. Une page se tourne, c'est l'évidence, mais le défi d'une paix juste et durable demeure. La communauté internationale doit permettre le déroulement d'élections afin que le peuple palestinien puisse élire démocratiquement ses représentants. Le MRAP doit oeuvrer pour une perspective de paix basée sur : • La reconnaissance des deux Etats. • La fin immédiate de l'occupation et le retrait d'Israël sur les bases des frontières de 1967. • Le droit pour les Palestiniens de fonder l'Etat de son choix dans les conditions garanties par la Charte des Nations Unies. • La démolition du Mur de l'apartheid qui sépare Israéliens et Palestiniens donnant une vision erronée du monde: à l'est l'axe du mal, à l'ouest l'axe du bien, et qui enferme le peuple palestinien dans une prison à ciel ouvert. • La reconnaissance de l'injustice faite aux réfugiés et exilés palestiniens est une condition essentielle à la paix et à la réconciliation. Le droit au retour doit être reconnu et son application négociée. Israël ne peut continuer à nourrir la guerre, la haine et les humiliations, et à bafouer impunément le droit international. L'UE doit contraindre le gouvernement israélien à respecter les résolutions des Nations Unies ainsi que la Convention de Genève notamment par la suspension de l'accord d'association UE-Israël. Motion: Marwan Barghouti Votée par la commission iVloyen-Orient Parce que l'arrestation, les conditions de détention, le déroulement du procès violent le droit international, le Congrès national du MRAP demande la libération de Marwan Barghouti et des prisonniers politiques palestiniens. Le MRAP s'associe à la campagne menée dans ce sens par le Collectif National "pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens." Motion adoptée par le comité de Menton : élections en Palestine Le MRAP condamne sans réserve les obstacles mis par le gouvernement israélien au déroulement normal de l'élection présidentielle en Palestine. Cette intrusion est injustifiable. Le MRAP rappelle qu'il appartient aux seules autorités palestiniennes de définir les modalités de leur processus électoral tant pour ce qui concerne la constitution des listes des électeurs que pour les conditions de candidatures. En tout état de cause, il n'appartient en aucune façon à la puissance occupante d'intervenir dans le processus électoral. Le MRAP juge, inadmissible et contraire à l'idée qu'il se fait de la démocratie, que les Israéliens s'arrogent le droit d'empêcher les Palestiniens de Jérusalem Est d'exercer leur droit de vote. n est regrettable qu'en l'état actuel de la situation, tous les Palestiniens, y compris ceux de l'eÀ1:érieur, réfugiés pour la plupart dans les pays arabes, ne puissent participer à l'élection, suivant en cela les règles communément admises dans les pays démocratiques, selon lesquelles tous les citoyens, qu'ils soient résidents ou expatriés, participent aux élections. Représentant l'ensemble des Palestiniens, le futur président palestinien verrait son autorité incontestablement renforcée. Inadmissible également l'intrusion d'Israël dans le processus des candidatures, en particulier l'interdiction de quelque candidature que ce soit. Pour le MRAP, tout obstacle mis à l'élection du futur président palestinien, toute manoeuvre du gouvernement israélien auraient pour effet certain de polter atteinte à la crédibilité d'un président dont l'élection s'en trouverait contestée. A un moment, que tout le monde s'accorde à qualifier d'historique pour le devenir de la paix dans la région, le MRAP demande au gouvernement français de tout mettre " Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - Janvier-février-Mars 2005 en oeuvre pour aider les Palestiniens dans l'organisation et le bon déroulement des élections. Le MRAP saisit le gouvernement français pour qu'il intervienne auprès du gouvernement israélien et qu'il lui fasse comprendre qu'il prendrait, par ses ingérences dans le processus électoral palestinien, la lourde responsabilité d'installer la défiance et de fragiliser durablement tout un processus de négociations devant permettre l'établissement d'un Etat palestinien conforme aux aspirations des Palestiniens et aux résolutions des Nations Unies, et garantissant par là même une véritable sécurité pour Israël. Motion proposée par la Fédération des Landes: renouer avec les valeurs universelles de l'amitié entre les peuples. Le congrès du MRAP affirme que l'action pour l'amitié entre les peuples ne saurait s'accommoder d'une hiérarchisation des souffrances subies par les peuples victimes de l'oppression. Si le peuple Irakien et le peuple palestinien requièrent la solidarité active du MRAP pour la reconnaissance pleine et entière de leurs droits, d'autre peuples: ceux de Tchétchénie, du Darfour, du Tibet, du Kurdistan et d'autres ne méritent pas moins de mobilisation que les peuples du Proche-orient. Le MRAP veillera tout particulièrement à une approche équilibrée de l'amitié entre les peuples dictée par les seuls principes universels qui doivent déterminer l'action d'une organisation antiraciste. Il renforcera donc son action de soutien à tous les peuples qui subissent des oppressions barbares. Concernant le peuple palestinien, les souffrances subies ne sauraient en aucun cas justifier l'antisémitisme présent dans les dictatures des pays arabes et de certaines composantes palestiniennes ainsi que le terrorisme contre des civils. Fidèle à ses valeurs universelles, le MRAP s'oppose à tous les racismes qui ne souffrent ' aucune excuse. Cela le conduira donc à dénoncer l'antisémitisme présent dans la société et les médias arabes ou palestiniens, ainsi que le racisme anti-arabe présent dans la société israélienne. Le MRAP continuera sans relâche à dénoncer l'occupation des territoires occupés et le mur de l'apartheid qui génère des bantoustans empêchant la création d'un état viable. Il luttera pour l'existence de deux Etats vivant en sécurité, Edito ' International Dossier Immigration Discrimination : Education : Kiosque Le MRAP agit donc pour les droits fondamentaux des peuples, mais il n'entre pas dans sa vocation de soutenir des fractions politiques déterminées au sein des peuples opprimés. C'est là un champ d'intervention qui relève plus des organisations politiques. Sur des questions aussi sensibles, ce n'est pas aux médias de définir le rythme des déclarations du MRAP, ni à des commissions souvent limitées du fait des difficultés de fonctionnement, de déterminer les contenus de nos positions internationales. L'appréciation de situations internationales complexes nécessitant un débat pluraliste et démocratique; le congrès décide qu'il appartiendra à la future instance élue (CN ou CA), de veiller au respect strict de cette approche universelle de l'amitié entre les peuples. La future instance veillera notamment à ce que toute prise de position pouvant entraîner des divergences notables dans le mouvement fasse l'objet de consultations élargies et contradictoires; c'est une condition indispensable au respect du pluralisme d'un mouvement associatif dont les sensibilités sont diverses. Le MRAP doit concevoir le droit des peuples d'une manière globale. Pourquoi lorsque que le MRAP aborde le droit des peuples d'une manière générale, il a consensus ' pourquoi cela pose-t-il problème lorsqu'il parle de certains peuples? Le droit des peuples est un point majeur de l'engagement du MRAP mais il faut historiser l'approche de ces questions sinon on fait du racisme. Le droit des peuples doit être relié aux questions sociales et économiques; il faut lier ces questions à la mondialisation. On ne peut pas comprendre l'Afrique si on ne prend pas en compte le problème du FMI, de la banque mondiale, de la dette. Les questions internationales trouvent leur fondement sur les questions économiques et sociales. Il convient de les analyser en relation avec les inégalités dans chaque société et au niveau mondial, en rapport avec le déséquilibre Nord-Sud. n est rappelé le problème de l'aide en Afrique: le blé arrive 10 ans après son envoi, il est périmé; les médicaments sont périmés .. Relevé des débats en atelier IL faut dénoncer les risques énormes de l'idéologie du " choc des civilisations" et l'exacerbation des questions ethniques Il est rappelé que l'activité du MRAP ne se résume pas à ce qui se passe à Paris. Les CL s'investissent aussi dans des collectifs locaux et ont leurs propres initiatives. Question sur le rôle du MRAP à l'ONU: on accorde un "strapontin à certaines ONG" mais le MRAP dérange car il aborde le racisme sous l'angle des inégalités économiques et sociales. C'est grâce au MRAP que certaines questions ont pu être abordées. Le MRAP cède son temps de parole à ceux qui ne peuvent l'avoir. Le MRAP doit dénoncer les régimes moyenâgeux de certains pays arabes. Il est demandé l'organisation de journées de formation autour des questions relevant des questions internationales, comme le MRAP en organise dans d'autres secteurs. L'essentiel du débat a porté sur le fait que le MRAP n'a pas les moyens ni en militants ni matériels pour aborder et se positionner sur toutes les questions internationales. Si tout le monde est d'accord sur le fait qu'on ne peut hiérarchiser les souffrances et les droits, deux tendances sont apparues: • Une résumée par la motion de la Fédération des Landes: le MRAP privilégie trop la question palestinienne au détriment des autres causes CTchétchénie, Tibet, Darfour, etc .. ). Le MRAP doit "rééquilibrer". Il faut revenir aux valeurs universelles de l'amitié entre les peuples. Le MRAP se positionne en fonction de l'axe du "mal inversé"; c'est à dire qu'il n'intervient que lorsque les USA ou Israël sont mis en cause. Il ne parle jamais du rôle des pays arabes. A ce propos, il est posé comme question: "revenir aux valeurs universelles" signifierait qu'on les a quittées; quand le MRAP a-t-il quitté les "valeurs universelles'" D'autre part il a été rappelé que lorsqu'une commission saisissait les instances, celles-ci intervenaient par ex. avec les 6 heures pour l'Afrique. Intervenir sur plus de domaines est donc de la responsabilité de tous. Sur l'inversion de l'axe du mal, il est rappelé que le massacre le plus meurtrier en Irak a été commis sous couvert du Conseil de sécurité, par les Etats Unis par l'embargo et la destruction du système d'eau et qui a entraîné entre 500 000 et un million de morts d'enfants : si le 11 septembre est un acte monstrueux que dire d'un 11 septembre tous les mois pendant 12 ans. La vie d'un enfant irakien a moins de prL'S: que celle d'un américain. • Il faut harmoniser vers le haut, pas vers le bas (pas faire moins pour celtains mais faire plus pour tous), seulement ce n'est malheureusement pas possible. Il faut donc établir des priorités ce qui ne signifie pas hiérarchisé. S'il faut "rééquilibrer" c'est autour de 3 axes : axe antiraciste ; axe éducation formation ; axe amitié entre les peuples. Pourquoi la question palestinienne est elle privilégiée' D'abord parce qu'il existe des militants actifs qui s'investissent ; ensuite parce qu'il existe un collectif national dans lequel le MRAP est acteur, ce qui lui permet d'être présent sur cette question plus facilement sur ce sujet. Mais surtout, cela a été rappelé lors de l'intervention de Leila Shahid, parce qu'il ne s'agit pas d'une problématique Israël-Palestine. La question palestinienne condense une série de questions universelles qui ont des répercussions en France et dans le monde entier. Cela n'est pas une invention du MRAP : un sondage de la commission européenne sur "qui menace le plus la paL'S: mondiale" ? réponse Sharon pour 59 % des Européens et 62 % des Français. D'autre part si on n'occupe pas le terrain, d'autres le feront sur la base du communautarisme. On ne peut pas à la fois dénoncer Euro-palestine et dire qu'on n'en fait trop sur la question Palestinienne. Par rapport à la motion des Landes, il est rappelé que le MRAP a été avec la LDH une des premières à vouloir couper les ponts avec la Gapjpo et qu'il n'a jamais soutenu un parti ou une organisation de résistance sauf dans le cas de l'ANC; ce qu'il soutient ce sont les droits des peuples Il est dit que les valeurs universelles sont des valeurs abstraites et que les mouvements de libération ne se définissent pas dans l'abstrait. Les anticolonialistes n'ont jamais dans l'histoire renvoyé dos à dos l'occupant et l'occupé, même s'ils n'approuvent pas tous les actes des occupés. La spécificité du MRAP s'est manifestée autour de la campagne qu'il a mené avec SICO "jeunes palestiniens et Israéliens ensemble contre l'occupation et pour la paix". Le MRAP développe un partenariat avec toutes les organisations israéliennes et palestiniennes qui se prononcent contre l'occupation et pour la reconnaissance de deux Etats viables. A propos de la motion de Menton, il est rappelé qu'il est impossible d'évacuer le problème des réfugiés. Le droit de vote et le droit au retour sont liés. « Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 25 26 • .'..... <, ~ ~ ~, -. ;: ;' International Edito j International ' Dossier ' Immigration' Discrimination j Education ! Kiosque Rwanda Article réalisé par Renée Le Mignot à panir de l'introduction de Louis Bagilishva {*} Il ya 10 ans, le 7 avril 1994, débutait le génocide au Rwanda; en moins de trois mois, un million de personnes (sur une population qui compte 7 millions d'habitants), hommes, femmes, enfants, étaient sauvagement massacrés pour être nés Tutsi ou pour s'être opposés à ce massacre. Cette tragédie n'est pas survenue brutalement comme un orage dans un ciel serein; il ne s'agit pas non plus, comme on a voulu le faire croire, de guerre " tribale " entre Hutus et Tutsis. Il y a derrière cette vision déformée des choses un racisme évident ; rappelons nous une phrase de François Mitterrand " dans ces pays là un génocide ce n'est pas très important ". Les responsables directs de ce génocide sont les Forces Armées Rwandaises (FAR) et les milices dites" Interahamwe " du régime dictatorial de Juvénal Habyarimana. Ils ont laissé un pays ruiné, 300000 orphelins et des traumatismes qui ne peuvent s'effacer. Dans leur fuite ils ont entraîné de force 2 millions de Rwandais dans un exode massif de civils innocents qui succomberont pour beaucoup d'entre eux à la maladie (notamment à l'épidémie de choléra qui se déclenche début juillet) et à la faim. Il y a aussi, dans la tragédie rwandaise, une volonté délibérée de cacher les vraies responsabilités. Or la France porte une lourde responsabilité avant, pendant et après le génocide. Le terrain a été préparé par la colonisation qui a bouleversé et fragilisé la société rwandaise et créé de toutes pièces le clivage Hutus/Tutsis. Alors que le Rwanda n'avait jamais connu de " conflit ethnique" tout au long de son histoire précoloniale, la colonisation allemande et la domination belge (1872/ 1962) ont suivant le principe " diviser pour régner ", posé les germes d'une confrontation entre Hutus et Tutsis en s'appuyant tour à tour sur une des communautés au détriment de l'autre. La colonisation belge a d'abord favorisé une élite tutsi sur des critères purement ethniques ; la violence coloniale est alors symbolisée par les Tutsis ce qui crée un ressentiment qui se transformera en haine. Puis, dans les années 50, pour faire face au mouvement indépendantiste dirigé par l'Union Nationale Rwandaise (l'UNAR) catalogué de " mouvement tutsi" par le colonisateur, celui-ci s'appuya sur une" élite hutu". C'est ainsi que vit le jour le Parti du Mouvement de l'Emancipation des Hutus (PAR. M.E.HUTU) dont les dirigeants encadrés et éduqués dans la propagande de la haine contre les Tutsis par les missionnaires catholiques, accèderont au pouvoir et à l'indépendance en 1962 et instaureront un régime d'apartheid fondé sur l'exclusion des Tutsis. Durant plus de trois décennies, l'apartheid à la rwandaise va se caractériser par un système de numerus clausus, la mention d'" appartenance ethnique" sur la carte d'identité et les massacres récurrents dont est victime la communauté tutsie, en 1963/ 64, en 1967, en 1973. La citoyenneté rwandaise n'existe pas, c'est une vision raciale de la société qui est imposée. Mais en tant que " pays francophone, ami de l'occident" cela ne trouble pas grand monde. Le Rwanda ne sera jamais l'objet d'une interpellation en matière de respect des droits de l'Homme, il sera même auréolé du surnom" Suisse de l'Afrique ". Lorsque le premier octobre 1990 la guerre éclate à la suite d'une attaque armée du Front Patriotique Rwandais, le rideau se lève sur " un autre Rwanda ". La " Suisse de l'Afrique" devient un pays où la propagande raciste de l'incitation à la " conscience ethnique" tient lieu d'éducation civique, un pays où les inégalités sociales sont criantes, un pays qui refuse le droit au retour et à la citoyenneté pour des milliers de Rwandais exilés, dont la plus grande partie sont dans des camps de réfugiés limitrophes depuis plus de 30 ans. Après 3 ans de guerre, la signature des accords d'Arusha (signés en août 1993 en Tanzanie) entre le gouvernement rwandais et le FPR apporte l'espoir de paix et d'une ouverture démocratique qui doit être garantie notamment par les Nations Unies. Mais cet espoir sera trahi par les forces politiques au pouvoir qui refusent le changement. Malgré cela, la France continue d'approvisionner en armes le gouvernement rwandais et forme les milices qui seront le fer de lance du génocide. Comment oublier ces fournitures d'armes? Comment oublier que des éléments de la mission militaire française au Rwanda, sous la responsabilité du colonel Cussac, se sont livrés à des opérations d'identification de civils qui devaient présenter la fameuse carte avec mention de " l'appartenance ethnique" ? Comment oublier que des armes sophistiquées ont été testées au Rwanda par l'armée française? Le 6 avril 1995 l'avion du président Habyarimana est abattu dans un attentat que les extrémistes hutus attribuent à la communauté tutsi. Le génocide commence. Le mystère demeure sur les auteurs de l'attentat mais ce qui est sûr, c'est que cet attentat n'était que le signal du déclenchement des massacres planifiés de longue date. Dès le 8 avril Médecins du Monde lance un cri d'alarme " nous ne recevons pas de blessés, il se passe quelque chose d'anormal et de très grave ". Silence. Le 9 avril les ressortissants français, Madame Habyarimana et plusieurs responsables du régime impliqués dans les appels au génocide sont évacués. Les employés tutsis de l'Ambassade de France, eux, sont abandonnés à leurs bourreaux. Comment oublier que lorsque le génocide commence, la France vote au Conseil de sécurité une résolution demandant le retrait de l'essentiel des Casques bleus dont la mission était la protection des civils, alors que le général Roméo Dallaire, responsable militaire de la mission des Nations Unies avait au contraire demandé des renforts ï Devant les images insoutenables de tueries systématiques à la machette de femmes, d'enfants beaucoup se sont posé la question: comment des êtres humains peuvent en arriver à une telle cruauté ï La réponse est simple : cette cruauté est la cruauté fasciste héritée au Rwanda de la cruauté coloniale. Les autorités françaises ne commenceront à parler du génocide que fin avril début mai. Pendant le génocide la France soutient militairement, fmancièrement et diplomatiquement le Gouvernement intérimaire rwandais (GIR) constitué dans les locaux même de l'ambassade de France. Le 22 juin la France reçoit le feu vert de l'ONU pour" l'opération turquoise ", intervention" à caractère strictement humanitaire ". En réalité, l'opération Turquoise n'aura d'autre rôle que de ralentir l'avancée des forces du FPR et de protéger la fuite des génocidaires qui emmèneront avec eux tous les fonds disponibles, même les devises qui se trouvaient sur des comptes privés. Alors que la France refusait l'asile aux opposants hutus, elle l'accordait à de nombreux responsables du génocide et réarmait les bourreaux dans les camps situés au Zaïre. Le MRAP a reçu un appel d'un coopérant français parce que les autorités françaises refusaient qu'il parte accompagné de son épouse rwandaise: " les coopérants emmènent leurs chats, leurs perruches, moi, on m'interdit d'emmener ma femme parce qu'elle est rwandaise" ! Le 8 novembre 1994, le Conseil de sécurité de l'ONU décide la création d'un Tribunal pénal international pour juger les actes de génocide mais les complicités ne seront pas évoquées. Du 7 au 9 novembre 1994 se tiendra le sommet franco-africain à Biarritz, le Rwanda ne sera pas invité. " Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n" 253 - Janvier-février-Mars 2005 Le FMI refuse d'accorder des crédits au nouveau gouvernement sous prétexte que le Rwanda devait 6 millions de dettes, dettes du régime d'Habyarimana ; il s'appuiera pour justifier ce refus sur " le respect de la législation internationale sur la continuité des Etats " ! Sur intervention de la France, l'aide de 720 millions de francs décidée par l'Union Européenne sera bloquée ! Aucun rwandais n'a pu sortir indemne de cette tragédie. Que dire aujourd'hui aux rescapés ï Que dire aux enfants qui ont participé aux massacres et qui aujourd'hui sont devenus adultes? aux jeunes de 20 ans qui ont vu leur famille exterminée sous leurs yeux ou dont la leur a participé au génocide ? Que dire aux enfants conçus à la suite des viols systématiques utilisés alors comme une arme de guerre? Dès le début du génocide, le MRAP s'est mobilisé: à l'initiative du MRAP et de la FETAF est mis en place dès le mois d'avril un collectif" contre toutes formes d'ingérence et pour Edito 1 International ' Dossier ' Immigration i Discrilnination : Education j Kiosque le soutien au peuple rwandais" qui élabore une plateforme et organise en juillet 94 un concert au Trianon au profit des orphelins rwandais. En septembre le collectif lance une souscription destinée à prendre en charge un orphelinat regroupant 500 enfants hutus et tutsis. Il organise le 19 novembre" 6 heures pour le Rwanda" à la Bourse du travail de Paris sur le thème " Rwanda: le refus de l'oubli, le devoir de solidarité" Ce thème est toujours d'actualité. Un an après le massacre, le collectif dénonce, dans une conférence de presse, l'hostilité du gouvernement français qui bloque l'aide à la reconstruction et le refus d'aider la justice rwandaise, ce qui conduit à l'impossibilité d'instruire le procès des responsables. Nier le droit au peuple rwandais à la justice, c'est nier son droit à la paix. Dans le même temps Human Right Watch et Amnesty apportent la preuve du réarmement des ex-fars et des milices racistes via le Zaïre, avec l'aide du régime de Mobutu. Que faire aujourd'hui? D'abord ne pas oublier pour le Rwanda mais aussi pour tenter de prévenir d'autres génocides qui menacent dans d'autres pays d'Afrique (Darfour, Côte d'Ivoire). Le discours négationniste concernant le Rwanda, comme sur la Shoah est une offense aux victimes, une offense aux rescapés. Le 10 avril 2004, le MRAP appelait à participer à la marche du souvenir organisée à Paris par" Ibuka " . • Dénoncer les responsabilités, toutes les responsabilités: la responsabilité du gouvernement français doit être officiellement reconnue Surtout n'oublions pas que de nombreux pays africains sont" un potentiel Rwanda ". Les mêmes ingérences des puissances occidentales, les mêmes soutiens aux dictatures, la même misère due au pillage des richesses de l'Afrique peuvent conduire aux mêmes horreurs. Il est urgent d'exiger : • Le respect des droits de l'Homme dans les pays africains. • L'annulation de la dette illégitime. • L'arrêt du pillage du continent africain par les pays riches et leurs multinationales, la Banque mondiale et le FMI. • L'arrêt des ventes d'armes notamment aux pays qui enrôlent des enfants soldats. • L'accès de tous à la santé, à l'alimentation, à l'éducation. • Une solidarité nouvelle entre l'Europe et l'Afrique qui passe par un partenariat euro-africain réellement constf!lctif, pour le développement de l'Afrique, pour des élections libres et transparentes pour permettre la démocratie. Ces exigences présentées au Congrès national dans une motion de la commission Afrique ont reçu l'assentiment unanime de l'atelier " paix; droit des peuples ". (') - Lors des 6 heures pour l'Afrique qui se sont tenues à l'initiative de la commission Afrique au siège national le 20 novembre 2004) "Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n" 253 - Janvier-février-Mars 2005 27 28 Europe Ed ito International Dossier Immigration Discrim ination Edu cation ' Kiosque La carte de Migr'Europ, vous montre une Europe qui est malade, une Europe qui a la varicelle. Chaque point rouge est un camp dans lequel sont enfermés des étrangers. Je pourrais vous en rajouter d'autres au Maroc, au Soudan, en Libye, en l'Ukraine. J'aurais préféré vous présenter une autre carte, représentant le monde tel que nous le voulons: un monde de paix, de justice, de personnes qui se déplacent, qui entrent en contact, qui échangent, qui portent au bout leurs désirs. Un monde, une Europe, dans lesquels le mouvement c'est la puissance de la vie, de la liberté, de la nécessité ambitieuse pour les humains d'entrer en 1 Mountjoy Prison & Arbo..,r Htll Prison (Oublinj " Co~ Prison. :) limerick P"$Ofl 4 Abbey Arctl (Gal....-ay) ROYAUME UN! j C3mpsl~ld/Kldl,nglonpfèsd·C»ctordl .2 00yC' 3 Oun9'lV€!(Slr31haven,ScoHand). ~ HJ,mon(!~WOfrh (A~ropo,t d·Hea!tlro .... ). 5 Hasl,lr 6 Lo ngport, 7 MroportdeMarlCheSl€f. 8lindllOime 90akil><;j!0I'l.10 Qu6Efl'sBuildmg, l lTinsley 12Yarl's Wood (C laptl~ m près de St'dIOfd). PAYS SAS \ AérOj)Orl Scl1iphol,2 Ae,oport Rottcrdam 3Ter Açpel,4Tt!burg 8ELGIQUE 1 /,~erllsplas (AMers), 2 Bruges. 3 Vottem (L~e), 4 Lecen:r1l127( t.lelst:roed< ) & le 127 bis (Sleenokkcucel) FRANCE Cenlresde rélenlion:1Boràea.lJx 2 Ca!ais-CoqueHes, 3 Strasbourg - G€ipo!sheim, <1 Hen(la~e, 5 Ullc, 6 Lyon 7 J.l a{~c~kl , 8 Nan!es, 9 tJ!t(!. 10 Rt gion pariSOer,ne (Bobiçny, le Mesnil · Amok>t-Floissy.Nantelfo. " ilJi"S, Ve<"sa~tt'S) 11 RNCo;.a!!C$. 12 Rouen 13 Sain! Louls. H S/!tc, I STOUlou$e Zoncs(faHenlC ' ;leordcauxaéroport 2 (CZI! ais.Ounke,quo).3Stfasbou'g 6lyQfl-Sainl·Exl,lpC' y.7Marsci!!eporlet aerop()rl,8 5;llJ11Nazaire. 9N,ee,IOPMis jAé,opOfts d'Orly et Roissy). 12 Rouen 14S,)lc.15LaAochc1Ie,16TCUIOI't !TAllE 1 Agr.gen!o·San tleneàcuo 2 Bologne - via Mauei. 3 Brifldjsi Restinco 4 CaUanisccl!3. S M,lan·Via COfletli 6 t~~na·lamarmora , 7lameziaTerme 8Lampe(!u$3.,9LceeeRe~rIil?ae<S 10 Rome-Ponte GaUclia I I TUlin·Col50Brul\(!Uesehi 1 2 Tr;Jpani ·Serra ~oVu!p:ua ESPAGW: Océan Atlantique relation les uns avec les autres. Mais cette carte de Migr'Europ nous replace dans la dure réalité. Une réalité mé connue, cachée aux peuples, une réalité dont l'Europe a honte mais qui pourtant existe bel et bien ; pas à la marge, pas comme un avatar, mais comme une matrice de cette construction européenne. Depuis des années, cette Europe se pare de murs de plus en plus hauts, externalise ses frontières, exporte des politiques répressives, militaires, supposées dissuasives, vis à vis des migrants, alors que dans le même temps elle fait de plus en plus appel à de la main d'oeuvre de pays tiers. Politiques honteuses, hypocrites, dangereuses, dites de « contrôles des flux migratoires» qui, en fait, rendent les migrations plus difficiles, plus coûteuses, plus dangereuses, allant jusqu'à mettre à mal le respect de certains droits fondamentaux, tels que le droit d'asile, les libertés individuelles et la libre circulation des personnes. Cette carte fait état des tragédies qui se consomment dans les territoires et a ux frontières de l'Europe. La tragédie de la «forteresse Europe» et de ses milliers de victimes

en huit ans 4 000 morts,

hommes, femmes, enfants. Aujourd'hui, certains gouvernements et forces politiques, proposent et financent la construction de centres de rétentions, hors d'Europe, dans des pays côtiers de la Méditerranée. Par exemple, le Gouvernement italien négocie des accords avec la Libye dans ce sens. On nous dit qu'il y a en Libye 2 millions de personnes prêtes à migrer et qu'il faut les retenir. Et pour cela on propose la construction de centres de rétention. Une prison pour 2 millions de personnes? Soit un tiers de la population libyenne? Veut-on transformer la Libye en un grand Centre de rétention ? C'est une véritable «guerre" qui est ainsi programmée, faite aux peuples, avec ses armées, ses technologies militaires, ses morts. Ces forces politiques en sont à envisager, avec l'accord Les camps d'étrangers en Europe ) 1 Note méthodologique Si !e réseau Migreurop propose une typologie relativement targe de la notion de ~camps " (voir au dos), face à l'hétérogénéité et à l'importance numérique de ces lieux à l'intérieur et aux frontières de l'espace de Schengen. nous avons choisi pour !'élaboration de cette carte de ne représenter que les lieux physiques d'enfermements des étrangers où ils sont totalement privés de leur liberté de circulation ("camps fermés"). Nous distinguons deux situations d'enfermement : • soit la personne désire entrer sur le territoire (cela concerne les '-;-----------1 demandeurs d'asile ou les migrants dont l'accès immédiat sur le R TCHEOUE 1 8(1Jko',a,2 Ccrven'/ U)('~(I 3 Ffy'dek-mistd.,<l Posmlr>1l S P,aha·RU1.ynll 6 & 7 Vclf,éPnlc:lY!& U. 8VysnllhOly HONGR!E 1 Ba!as"OyJ,mat,2SIl(lapest Aéropor t, 3G\'Of 4 K,skunhaJa5 SNagykan,z$,1 6N';lrb.:l!or 7 Orost>àUl ,8Szomtlat!le!,' SLOVEr~!E PostOJna GRECE 1 AndrO'S, 2 Ct;IO~. 3 Reg>On d E~los. 4 G,!Il,O 5 !erapWa 6 IgOl.lmen'!Sl, 7 K~!am,1HI a Karj$to ~. 9 Kos, 10 Letlos. Il ~.\~ l(Ono5 12 My t,l!?ne· j tO!- L&SbOS, 13Na~o5 1.1 RNhymno, IS Rhed~, 16 SAmo~ 17 Slh3. HI Syros, t9 Zakil'\IIlQS - - SERB!E i r,10NTENEGRO Be!grad/!(1 P<l1,ns~a Skcla& 2mQt.,lp,ts <:lumrx,IAv;!la) "\ territoire en vue d'un séjour ou d'un simple transit est conditionné à l'examen de leurs situations. A la suite de cet examen, il peut y avoir admission sur le territoire ou éloignement), en bleu • soit la personne se trouve en situation irrégulière sur le te rritoire d'un Etal et est en instance d'éloignement (pour les étrangers déboutés de l'asile et/ou du droit au séjour), en jaune. La plupart des lieux cependant, mélangent ces deux fonctions (examen de l'admission/expulsion) et peuvent également servir de sas d'identification (en rouge).Des exceptions ont été faites pour des situations jugées représentatives: c'est le cas, par exemple, pour les "camps ouverts· de Ceuta et de MeWla (où la liberté de circulation est en principe soumise uniquement à des contraintes administratives) sont des symboles d'une frontière qui s'externalÎse Pour certains pays, comme l'Allemagne et l'Irlande, certaines particularités ont été mises en avant: les prisons sonl très souvent utilisées pour enfermer les étrangers. Une carte plus complète des camps d'étrangers en Europe sera disponible d'ici quelques mois sur notre site internet: http://pajo!.eu .org - Pour Ia Fl3nce ,scnl eartogl'aphiéc~!JfliquemefltleszonO'Jd':ment(lqui::.ontcooecméespaf rarr,véedBsdcm:mdi;llrsd'as,~e ,. En A&m~\lrm. It'S Pf~O!lS aya tlt Url(l OIaoe imporhlfl!e datlS le dispos!! i! du rI'I<lintiqn des e(raJlQCfsontêttl C3l kl\lraph~ .-. La dé:enliond't!tang.e ,~(;nYUOdoIeUf r~C\J : emcnta!.O</l'ent~oudansdcsse<:t,onsspOCiales (l't1ilt>i:~scmc;ntspénit(!nllaj(Csord,n<1ifl.'S, LJS\lperflÇ!Cdlllil SU!5~pc,rnt;td' J!id'..cmCnt 6e Carlographier!es 23 !!eu~ CO<lOUS: Appeoz .. ~. Bâ:e (2). 6cm, Crn..r, Ournadl. Einsiedeln, Gampe{en G!a(\,)~. G.rJnocs. MCnd,&io. Ol~n , SaiQncl«ier, Sc~!fha\Jscn, ScI1!ip1hrSm. S.s$<1d1, So~thurn Sursee, ThOOcx, ~·/.onau, Zug, Zùr\(:h (2) L'-.......'J Union européenne o Camp fermé [J Camp ouvert ~ Union e uropéenne élargie C. '-----' (à échéaoce de 2004) ~ - ! Pays candidats àl'Uolon ~ européenne - r;:;~ res de l'espace &hengen O. pour les éllang.ersen vue de l'examen cie leur demande <fadmission au sejour surie territoi re o'un Etat pour les étrangers présents sur !e lerriloire d'un Etat et en Instanoe d'expulsiQn combinant tesdeuKlonctions (examen de la demande d'admission et cfexpulsion) &\u1Qes: Ar~,lnt ~: ....... Charles'l,Bcrtn IE<P"9l'l' : R3PPOf\ dtlCom:4~npoutl, pr/:'."",,:.onclel~IOI!\t,c ~r <ks~C<lII:,I~emcn:$.it\h;.tme,...~<;Y<lt~I $(CPl)i&'lII2OO3i /Fr.moe: ~"derlreb,o;", (~IHo<>q<IO: ~,~ H&~Cotr""'!IC<'_~O,.g.l_ d)lm<t , hu/ Grbol AruelG-du tour"": Eleuth~ 'otypIi'I "" 14-{)7·roo?II::o>~/'h·~"'_~!r:on!.ne{Qr\: .... /lrI.odo' 1fÎ$1>,~luoee ,<>UnCIl1 Il;Oe :S~"""''9-1tJt>') ,~t l"MW.. . ..:edll 31 '5l03.htlpj_.mIg<anIi-f><!l{~a:~,to_CPT_ pdll P<l"J'$ 6:t~:hnpj,. ...~ . ..... cN.rlell()<\.l\(t' ....' Otle s'06~~"Qf-.!!~, IotIImI ,KCW·f!"'\o«wn /f!t~vc T~:N!pJ:lt.-_,mw:r.(;.ljW1l"Ml>trrI! ,Sandnne c",rtoo (2003)l.'tl1$~lul:oo"a4\t<Mdof8 siletnEu(ow ~tale : re>:t"'ll'.etd">llq...o 1991).2ooe-.P~,:..tls.o.1»t&MOIl1(:M<:ro:Gr~4~,G'~ IO, !W-r~ 1 S<>èdo . M9I~~0Il6owd,"'-"-",,,,,,?'\JOI'IS",-erlfol!b~'~and;>lXIrt'nO$ / Suiss<> ;0r~~ d'aÎd9 aux ,eU9"'>~ ... ·N"N.~fh-<Y-"u:I>. <moco 1Ct:Ié<~1 (!~ ' .:lugl<.'s, OIIoe ti!dlir:>! d~ 1:1 ~! :1l;i\I<I, CooIc!,~roe. ces d<~ke$(Id<'!1eIeu .. 6as.cIé93l !ç<I"\Çnt,car.!OniI .... ~)U$Iiro~ ! 1IOl>::e © migreurop novembre 2003 « Différences " - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - no 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 des États-Unis, de remettre en cause le droit maritime, notamment l'obligation d'assistance aux naufragés. L'Europe exporte ainsi ses frontières, ses polices, en négation des acquis du droit international issu de 1949. Nous passons du « droit des personnes à circuler, à quitter leur pays ", droit inscrit dans la charte des droits universels, à l'obligation, l'injonction faite à de nombreux Etats " d'assigner leurs populations à résidence ". C'est un retournement très grave qui vassalise les peuples, justifie des régimes peu démocratiques. Comment ne pas s'indigner et se mobiliser tous ensemble contre ces politiques et tous les prêcheurs de la soi disant " guerre des civilisations" ? Il s'agit de questions déterminantes pour l'avenir. C'est pour une bonne part en fonction des réponses apportées que se dessinera le type de société que nous lèguerons aux générations futures. Comprenons-nous bien, la question dépasse la seule solidarité morale envers les étrangers. Il s'agit toujours d'un engrenage qui commence par les plus faibles pour s'étendre progressivement à tous. Va-t-on accepter une société fondée sur la division et la discrimination , sur l'autoritarisme, le sécuritaire et la mise sous tension de toute la société? , Europe Edito International Dossier Immigration Discrimination Ed ucation 1 Kiosque Ce n'est pas un hasard si les étrangers sont les grands oubliés des commentaires, critiques ou laudatifs, du projet de constitution européenne, des débats médiatiqu es, des débats dans les partis. Le proj et de constitution justement, parlons-en ... Au-delà des grands principes de solidarité et de non-discrimination affirmés, cette constitution confirme les contours des politiques d'asile et d'immigration déjà connus. La reconnaissance, en préambule, des appOtts qu'ont représentés dans l'histoire les vagues migratoires successives, pèse de peu de poids face aux dispositions régressives visant à la mise en oeuvre d'une inunigration triée avec pour seul but celui de répondre pleinement aux politiques patronales libérales, à leurs objectifs d'exploitation. Alors que les luttes et des textes européens avaient ouvert la voie au vote des ressortissants communa u taires , dissociant ainsi nationalité et citoyenneté, la Convention préfère recycler la conception restrictive de la citoyenneté du Traité de Maastricht, la discrimination entre résidents d'États ressortissants de l'UE et résidents ressortissants d'Etats-tiers. Ce proj et institue une sorte d'apartheid, en constitutionnalisant l'exclusion sociale et politique d'une partie de ses rési dents. Si la charte des droits fondamentaux a été intégrée au projet de traité constitutionnel, c'est au prix de réserves qui limitent singulièrement les attentes pouvant naître de cette fusion. Par exemple, si la charte rappelle timidement que" toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale , de se marier et de fonder une famille ", ces droits sont subordonnés aux principes des politiques relatives aux contrôles aux frontières. Le traitement du droit d'asile par la convention est particulièrement éclairant quant aux objectifs et au statut du texte . On aurait pu s'attendre à trouver dans un texte à valeur de loi fondamentale une véritable valorisation du droit d'asile, au sens de la Convention de Genève, son approfondissement sur tout le territoire de l'Europe. Or le projet se contente de compiler l'existant. Il est pourtant notoire, sept ans après Amsterdam, que cette politique est un échec. En France selon le derni er rapport de l'IGAS , 60 000 personnes sont ainsi rejetées dans la pire des précarités, celle de vivre sans papiers et sans droits Le clroit d'asile n'est même pas évoqué dans la partie du texte qui liste les valeurs et les droits fondamentaux. Cette constitutionnalisation des dérives déjà subies par le droit d'asile n'est qu 'un des instruments d'une politique libérale plus globale qui désigne les étrangers comme ennemis de l'intérieur et de l'extérieur. Une fois de plus tout est réduit au principe de la liberté du marché, de la liberté d'exploitation et des intérêts du capital. Ainsi, les dispositions relatives à l'immigration font écho aux articles premiers du projet qui proclament que « dans ses relations avec le reste du monde, l'Union affirme ses valeurs et ses intérêts ". Comme nous le voyons les valeurs fondamentales sont subsidaires à la force des intérêts économiques et financiers. C'est dans cet esprit que sont conçus la politique des visas, l'asymétrie des relations Nord-Sud, la possibilité de nouer des accords de réadmission. Ce type d'accords oblige les pays tiers signataires à reprendre, non seulement leurs ressortissants, mais aussi les migrants d'autres nationalités ayant transité chez eux. C'est l'un des instruments du chantage exercé par l'Union sur ses voisins. Un cynisme qu'on retrouve avec la possibilité de fixer des quotas pour l'accès des migrants au marché du travail. On le voit, l'immigration constitue un sujet majeur et incontournable dans la construction de l'Union européenne La lutte pour le développement des droits et leur application, pour le respect par tous de ces droits, contre toutes les discriminations, doit être au coeur du projet Européen. Le projet de constitution en excluant une paltie des résidents de la communauté européenne menace l'Europe elle-même, la démocratie elle-même. Cette exclusion leur permet de tirer toutes les politiques sociales vers le bas et favorise des comportements de haine et de guerre. Le monde d'aujourd 'hui est celui où s'ouvrent d'immenses possibilités pour la circulation, l'échange, le partage des savoirs, des connaissances scientifiques, technologiques, culturelles, une redistribution des richesses dans l'intérêt des peuples. Nous ne voulons pas que ces potentialités nouvelles, humaines, culturelles, technologiques soient détournées contre les peuples. « Différences" - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n" 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 29 30 Europe '-, Edito International Dossier Immigration Discrimination Education Kiosque Peine Intervention de Mireille Mendès-France L'article 3 de la Déclaration universelle des droits de l'homme affirme que" tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne ". L'article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques - alinéa 1 - confirme que " le droit à la vie est inhérent à la personne humaine ". Cependant, dès l'alinéa 2 cette affirmation se trouve contredite par l'introduction d'une restriction : il est écrit que,pour les " pays où la peine de mort n'a pas été abolie, une sentence de mort ne peut être prononcée que pour les crimes les plus graves ". A ce propos, il est impossible sur le plan des insuuments internationaux de trouver une définition de l'expression " crimes les plus graves ". Le faudrait-il d'ailleurs? Non, cela reviendrait à légiférer sur les causes pouvant justifier la peine de mort. Or il faut affirmer avec force qu'il y a incompatibilité fondamentale à se réclamer du respect des droits de l'homme tout en justifiant - pour quelque raison que ce soit, en quelque temps que ce soit - l'application de la peine de mort dans son ordre pénal ou militaire. Par ailleurs, à l'alinéa 6, il est ajouté qu' " aucune disposition du présent article ne peut être invoquée pour retarder ou empêcher l'abolition de la peine capitale par un Etat partie au présent acte ". Signalons pour mémoire que 149 Etats sont Etats parties. Ici encore, il faut souligner la contradiction entre les alinéas 2 et 6. En effet, l'alinéa 2 suggère qu'il s'agit d'une mesure de nature provisoire pour les Etats parties au moment de leur ratification du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. L'Etat partie est tenu - selon le paragraphe 6 - de ne prendre aucune mesure empêchant l'abolition de la peine capitale, ce qui sur un plan positif doit se traduire par des actes législatifs afin de se conformer à cette obligation internationale. Cela est un aspect que je voulais relever, en matière d'obligations internationales, à propos de l'application de la peine de mort. On peut tout simplement se demander ce qui retarde l'abolition de la peine capitale dans de nombreux pays. Ainsi, si les Etats Unis se mettaient en règle avec les instruments internationaux, les 44 personnes exécutées depuis le 6 janvier 2004 seraient encore parmi nous, les couloirs de la mOit se videraient et notre ami Mumia Abu Jamal, condamné à mort après un procès inéquitable, quitterait sa cellule de la prison de Greene. Mais je voudrais aussi faire une autre obselvation et partager avec vous tous mes réflexions sur les conséquences du non-respect de l'alinéa 6 de l'article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques en ce qui concerne la privation de la vie. Elle a trait à d'auu·es modalités qui sont pouttant d'actualité : ce sont celles qui proviennent des agissements des autorités politiques des Etats. Le vide laissé par ces contradictions juridiques ouvre, en effet, la pOite à une libre appréciation et interprétation des Etats ou des gouvernements, pour peu qu'ils ne soient pas abolitionnistes, et cela n'est pas sans conséquence sur l'appréhension du droit à la vie. En effet, selon les règles de l'ordre interne, c'est l'Etat qui décide de la peine de mort pour celtains types de violation du droit, principalement sur le plan pénal commun. Mais il y a d'autres domaines où s'exerce la privation de la vie, et ainsi d'autres domaines de violation de ce droit élémentaire de tout être humain à la vie: il s'agit de l'application de la mort par décision de nature politique ou pour raisons d'Etat. Aussi cnIelle et inhumaine que la peine de mort elle-même, il y a l'exécution extrajudiciaire. L'objectif de cette réflexion est donc de chercher de nouvelles pistes en allant au-delà du cadre strictement national étatique pénal afm de l'élargir vers des pratiques qui parfois dépassent largement le droit pénal interne, pour se situer dans le camp du droit pénal international. La différence essentielle avec la " peine de mOlt " sanctionnée dans l'ordre interne de certains Etats est que la privation du droit à la vie dans le cas des exécutions extrajudiciaires relève d'un acte d'Etat qui se place dans un contexte où une telle atteinte contre un droit élémentaire est le produit d'une décision consciente et froidement planifiée par les autorité politiques. Elle est exécutée par des forces almées, des forces de sécurité ou des forces agissant sous la couverture ou sous la protection directe ou indirecte de l'Etat. Tout comme la non-abolition de la peine de mort, ces privations du droit à la vie pour raisons d'Etat doivent être considérées comme un manquement d'une extrême gravité au regard des instruments internationaux concernant les règles définies pour le respect des droits de l'homme. Il faut continuer, au cours des journées du 2e Congrès contre la peine de mort et dans notre travail , à dénoncer tous les Etats non abolitionnistes, mais aussi à demander avec insistance, aux pays qui ne font qu'appliquer un moratoire, de mettre fm définitivement - et quelles que soient les circonstances, que ce soit en temps de guerre ou de paix - à ce procédé inhumain et qui est en contradiction avec le respect des droits de l'homme. Il faut ainsi être très attentifs, dans le conteÀ1:e mondial actuel, aux tentatives ou aux pressions exercées par certains qui demandent que soit réinstaurée la peine de mort pour des raisons de sécurité nationale ou internationale, comme viennent de le proposer 49 députés français de la majorité. Notre vigilance ne doit pas cesser de s'exercer, c'est un réel enjeu pour nos démocraties, surtout au moment où des Etats, des gouvernements et des institutions internationales essaient de modifier les règles de la loi. « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - no 253 - ]anvier-Févrie r-Mars 2005 En bref ... Edito 1 International 1 Dossier 1 Immigration i Discrimination : Education ! Kiosque Les fêtes du Nord Dans le Nord, les militants du MRAP ont fêté dignement le 55e anniversaire de notre Mouvement. A l'occasion de deux repas organisés à Lille le 13 novembre et à Valenciennes le 04 décembre dernier , ce sont quelques 400 personnes qui se sont retrouvées pour fêter ensemble cet anniversaire. Débat, projection, concerts, stands associatifs et représentation théâtrale accompagnaient ces banquets multiculturels afin de faire de ces deux dates, non seulement des moments de rencontre convivial, mais aussi des rendez-vous enrichissants pour notre lutte de tous les jours contre le racisme. Une initiative que nous nous sommes promis de ne pas attendre à nouveau cinq ans pour réitérer! « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples - n° 253 - ]anvier-Février-Mars 2005 31 Edito International Dossier Immigration Discrimination Etlucation Kiosque o ifférences ~ e t,y "n, R cis e . r . ~ . t io Jo 0 . ] ui ,i1' mrap :f'f: '-'-- 32 • Difftrences . _ Mou\'ement contre le rad.me et pour l'amitié des peuples - n" 253 - ]an\'ier-Février-Mars 2005

Notes

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