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Sommaire du numéro

n°194 de mars 1998

  • Edito: Agir par Mouloud Aounit
  • Dans deux mois le congrès du MRAP: questions pour aller de l'avant
    • Racisme, crise, identité par Paul Muzard
    • Faisons évoluer l'antiracisme par J.C. Dulieu
    • Mondialisation et amitié entre les peuples par B. Hétier et J.J. Kirkyacharian
  • Le Mrap s'associe aux comités citoyenneté lancés par la Fédération Léo Lagrange par Alain Callès
  • Les français et la lutte contre le racisme par Laurent Canat
  • Contre le racisme dans le monde du travail: élaborer de nouveaux savoir-faire par C. Benabdessadok
  • L'Europe, le racisme et le Droit par Jean-Marc Candella
  • Quelle citoyenneté par J.J. Kirkyacharian
  • Affiche jointe au numéro: agir contre l'extrême-droite avant qu'il ne soit trop tard

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Texte brut du numéro

Mars 1998 - W 194 Cl SOMMAIRE Dans deux mois le congrès du MRAP Partenariat Avec Loo Lagrange Alain Callès Sondage Les Français et la lutte contre le racisme Laurent Canal Le racisme au travail Elaborer des savoir-faire 4 5 6 oESTIONSP 0 ALLER E LIAVANT Chérifa Benabdessadok Europe Textes choisis Jean-Marc Candella Bibliothèque Notes de lecture Aurélie Cucco el Chérifa B. Expo et cassette-vidéo Chrono Juliette Rennes el Chérifa B. Débat Quelle citoyenneté? Jean-Jacques Kirkyacharian Concert 7 9 9 10 12 Les textes que nous pUblions ici ont pour objet d'expliciter les questionnaires de préparation au Congrès rédigés par un groupe de travail (lire composition page 3) et adressés fin décembre 1997 à l'ensemble des comités. Ces développements ne sont pas à considérer comme un carcan, mais comme une aide. Nous invitons chaque comité à reformuler librement les questionnements qui ont pour objet de nous faire collectivement aller de l'avant. Il est indispensable que la réflexion aille de l'expérience du comité local à la définition d'orientations nationales et Inversement, chacune se nourrissant de l'autre. Tarif réduit pour Serge urgé-Royo 12 Le congrès devra être un temps fort pour évaluer nos recherches, nos avancées ou nos lenteurs et peaufiner nos stratégies. Paul Muzard cr pages 2, 3 et 4 Agir Les sondages créditent de 16 % les intentions de vote pour les toutes prochaines élections régionales. Ce chiffre est effrayant. Il yale vote dit de protestation émanant d'électeurs fragilisés et abîmés par la crise. Pour eux, l'immigré est responsable de leurs propres difficultés. Dans ce cas de figure, la haine de l' Autre est un peu une haine de soi, générée par le vécu de l'exclusion. D'autres électeurs vivent loin des conséquences de la crise et des lieux de résidence des immigrés. Ce type de vote est un acte d'adhésion idéologique. C'est immensément grave. Fort d'un soutien aux ressorts divers, le Front national muiliplie provocations verbales et physiques. Il appelle sans retenu au racisme et le met en acte. Il intimide et menace des représentants des autorités et bafoue les principes constitutionnels. Nous ne pouvons cacher notre profonde inquiétude pour le devenir de notre soc iété et les valeurs républicaines qui la fondent. L'urgence d'un sursaut collectif s'impose: la lutte contre le racisme est indissociable de la défense de la démocratie. Tolérer, s'accoutumer à l'expression politique du racisme qu'est le Front national s'apparente à ce qu'il convient d' appeler non-assistance à démocratie en danger. L'expérience de la gestion des villes du Front national donne, si besoin est, la mesure du danger. Là les libertés indi viduelles et collectives sont muselées. Droit associatif, droit syndical et liberté d'expression sont corsetés. La culture est mise sous surveillance idéologique, les prestations sociales sont soumises à la préférence nationale. Face à cette réalité, le MRAP vient d'éditer un matériel de mobilisation et de sensibilisation pour faire barrage aux idées du From national: trois affiches, des autocollants, un argumentaire som à la di sposition de chacun d'entre nous. L'heure n'est plus à la réaction mais à l'action commune, ces outils sont là pour réduire l'indifférence et combattre cette négalion de la France incarnée par le Front national. Servez-vous en ! • Mouloud Aounit Il Congrès du MRAP 11111 E. IIIIE. IIEIIITI Notre époque est marquée par des doutes ou des interrogations sur l'avenir qui traversent toute la société. Beaucoup de gens ont peur de l' avenir

ceux qui sont au chômage, ceux qui

ont peur d' Y tomber, ceux qui ont peur pour l'avenir de leurs enfants, ceux qui ont peur devant les dégradations sociales - insécurité, appauvrissement, développement du racisme au quotidien, développement du sida, etc ... Le mot crise n'est pas réductible à un sens strictement économique. En effet les conséquences de la crise tendent à faire oublier ou à bouleverser les racines ou les repères. Quels sont les effets de ce contexte sur le MRAP ? Le racisme de la crise est lié aux conséquences du chômage; sommes-nous d'accord avec cette analyse sur la financiarisation de l'économie qui se fait au détriment de l'investissement et donc de l'emploi ? ou bien faut-il y voir d'autres causes? La question de l'identité du MRAP estelle pertinente ? Peut-on dire que le MRAP vit des désorientations parce que le racisme a changé? Mais le racisme a-t-il changé? Si oui comment? Comment comprendre ou anal yser l' effritement de certains comités ? l'abandon de certains membres de comités? est-ce le problème de ceux qui s'arrêtent? est-ce celui aussi du MRAP lui-même dans ses dimensions locale et nationale? Le MRAP est-il entraîné à avoir des doutes ou des hésitations sur son identité? sur FlllllllllllEI l111T111111 E PREMIÈRE PARTIE Face à l'évolution du racisme et de la xénophobie, à leur banalisation et à leurs expressions multiples, à leur développement et à la pénétration des thèmes du FN dans des espaces de plus en plus importants, le MRAP se doit d'engager une réflexion nouvelle sur les réponses antiracistes à apporter. Parce qu'il n'y a pas de réponse unique, notre efficacité sera forcément liée à une « multithérapie ». Le profil du raciste va du raciste militant, à celui qui se trompe de colère parce qu'il souffre, en passant par les gens fragiles, déçus de la persistance de la crise et perméables à toutes les confusions, à tous les amalgames. Ainsi de l'amalgame immigré ou étranger = chômage = échec scolaire = insécurité = déficit de la sécurité sociale, des caisses de retraite etc. Certaines expressions se traduisent par la haine ou par un rejet allant jusqu'au souhait de voir partir les immigrés. Il apparaît finalement normal à beaucoup (conforme à une norme) que les immigrés aient moins de droits que les Français. Ces idées envahissent notre quotidien, elles arrivent même à pénétrer, parfois à gangrener, des forces politiques, syndicales ou associatives. Ces dérives graves nous interpellent: sur la citoyenneté à reconquérir, en faisant progresser les droits de l'homme, notamment dans le débat pour une politique d'immigration qui rompe avec une logique marchande, répressive et de suspicion; sur la critique politique des thèses du Front national, principal outil politique du racisme et de programme de discrimination institutionnalisée, comme la notion de «préférence nationale» ; sur le développement de notre combat selon trois axes de travail: formation des militants, élaboration d'un argumentaire et lancement de campagnes nationales avec un matériel de soutien ;. Différences n° 194 mars 1998 ses stratégies ? sur sa capacité à mener une action spécifique? cette interrogation estelle valable? Le manque de perspectives du monde actuel, l'angoisse liée par exemple au nombre de suicides, les conflits en Algérie ou en Afrique, par les progrès apparents de la pédophilie, par les avancées du Front national, par la domination insolente des marchés financiers qui accaparent les richesses, sans oublier le chômage, constituent-ils un éléments pour expliquer certaines démobi- 1isations ? Quels peuvent-être les supports de notre « dynamisation» ? Les actions de nos comités sont-elles conduites en fonction de choix élaborés ou selon des opportunités? par exemple les permanences juridiques ont-elles des prolongements d'action politique ou se limitent-elles à résoudre des cas individuels qui occupent tout le temps disponible? Comment apprécier le choix? Les collectifs visent-ils une efficacité dans le cas d'actions nécessitant une expression large et avantageusement plurielle, par &" sur notre responsabilité en matière éducative, d'abord par l'école qui peut être un terrain de tensions, d' inégalités, de discriminations (sociales ou ethniques), d'échecs, mais surtout lieu privilégié de la construction citoyenne, de l'apprentissage du vivre ensemble dans la diversité, donc de sa propre liberté; au-delà de l'école, l'éducation à la citoyenneté est un combat à mener au quotidien dans les lieux culturels, socioculturels, ' sociaux, dans les collectivités locales, syndicats, comités d'entreprises; l'éducation doit participer à une action d'antiracisme de proximité; sur nos stratégies politiques, parce que le racisme est l'une des exclusions peutêtre les plus radicales - générées par la crise, avec le chômage, la mise en pièces du Code du travail, la privation de logement, l'impossibilité de se soigner, etc ... , le partenariat est l'une des voies déjà préconisées lors du précédent congrès. La stratégie est aussi le développement du MRAP. L'efficacité antiraciste est une affaire de détermination, d'objectifs, mais aussi de coordination nationale et de nombre d'adhérents. Bien évidemment, l'action du MRAP à mettre en oeuvre est à décliner dans sa &" exemple pour s'opposer à l'extrême droite? Ou ont-ils parfois tendance à s'institutionnaliser au point de noyer l'identité de ses composantes? La question se pose-telle en termes d'espaces d'actions propres au MRAP? Identité et certains aspects du racisme d'aujourd'hui. Le racisme au quotidien, le racisme des « braves gens» - est une donnée évidente aujourd'hui; cette forme de racisme relève- t-elle d'une lutte qui devrait être prise en compte de façon spécifique ou privilégiée par le MRAP ? Y a-t-il des expressions du racisme qui relèvent plus du MRAP que d'autres? L'antiracisme: une dimension pédagogique? Quelle place tient dans nos actions l'approche pédagogique? Est-ce l'une de nos caractéristiques? Si l'approche pédagogique va de soi auprès des enfants ou des jeunes où tout est conçu sous le signe de l'éducation, qu'en est-il pour les publics adultes qui votent FN, mais qui ne vivent dimension nationale et dans sa dimension locale, au ni veau d'une orientation de l'ensemble du Mouvement, et au niveau des pratiques locales adaptées au contexte et au rapport de force. DEUXIÈME PARTIE. Comment précisément vivons-nous cette action dans nos comités et que proposonsnous pour la voir évoluer dans l'ensemble du Mouvement? - La présentation ou description générale ci-dessus vous paraît-elle pertinente ou non? Que proposez-vous de modifier ou de compléter? Pensez vous que le racisme au quotidien est une réalité et que des campagnes, comme celle de Vitrolles sur la préférence nationale ont un écho dans les mentalités? Comment sur ce thème, cité parmi d'autres, et qui peut être retourné en une préconisation de discriminations justifiées, conduire une action à la citoyenneté? Nous avions proposé un antiracisme de proximité, lors du dernier congrès, mais encore? Pensez-vous que le MRAP a respecté l'engagement pris également au dernier congrès de faire de l'éducation l'une des priorités? Comment cette priorité pourrait- elle être mieux appliquée? Notre édupas forcément avec les immigrés ? Le renouvellement: une question éclairante? Que nous apprennent, sur notre identité, les gens qui adhèrent aujourd'hui au MRAP, ou qui créent de nouveaux comités (18 en 1997) ? Le danger du racisme, bien sûr! Mais pourquoi choisissent-ils le MRAP comme cadre de lutte? Ces choix révèlentils d'une identité reconnue au MRAP ou attendue de lui? En quoi sont-ils susceptibles de nous conforter ou de nous apporter un plus? Comment font les comités qui se renouvellent par les adhésions nouvelles chaque année? Réflexion et formation. Pour y voir clair dans notre identité, dans nos choix, dans nos stratégies, donnonsnous du temps à la réflexion ? La préparation du Congrès est-elle considérée comme un temps de formation? Ou la formation sans être considérée comme secondaire est-elle parfois perçue comme superflue? En particulier parce que, compte-tenu des actions, de la pression des activités au quotidien, on ne sait pas où la caser dans un cation à la citoyenneté s'adresse-t-elle à l'ensemble de la population ou est-elle dirigée exclusivement vers l'école? S'agissant de nos stratégies qui se traduisent en campagnes (pour les sans-papiers, contre le Front national, antérieurement contre les lois Pasqua ou Debré, etc ... ), celles-ci ont-elles été conçues et réalisées en visant l'efficacité? En quoi pouvonsnous dire que nous avons pu faire reculer le racisme? Quelle est notre évaluation ? - Pour ce qui concerne l'efficacité organisationnelle' quel regard portons-nous sur les collectifs? Parlons nous de la même chose en invoquant les collectifs ou le partenariat ? La coalition des luttes contre le chômage, contre la privation de logement, d'une manière générale contre la privation de droits, et contre le racisme est-elle une 8,9 et 10 mai 1998 emploi du temps? Et que l'action est primordiale par rapport à la pensée? Ou encore parce qu'on ne sait où trouver les moyens de formation et que le national joue, à cet égard un rôle insuffisant? Donnons- nous du temps à l'évaluation de ce que nous faisons ? N.B. L'intérêt pour la formation amorce en fait le chapitre suivant qui a trait aux réponses antiracistes du MRAP : formation, citoyenneté, éducation, antiracisme de proximité et développement du MRAP .• Paul Muzard Le groupe de travail auquel il est fait référence en page une était composé de Jean-Jacques Kirkyacharian, Jean-Claude Dulieu, Renée Le Mignot, Alain Callès, Bernadette Hétier, Liliane Lainé et Paul Muzard. Faites parvenir au plus tôt vos rapports d'activité au secteur Développement réalité en partenariat dans la mesure où la crise est la cause essentielle de l'ensemble de la dégradation sociale? ou suffit-il de mener des luttes successives? - L'organisation interne du MRAP (comités, fédérations, Conseil national, commission) permet-elle de dynamiser et d'amplifier l'action? Qu'est ce qui serait à améliorer, à modifier ou à changer ? Qu'est-ce qui marche bien? Qu'est ce qui ne fonctionne pas? Le développement du nombre de comités locaux et de celui des adhérents est-il devenu une priorité? Ou en passe de le devenir? En définitive, comment pouvons-nous spécifier, parmi d'autres organisations, la lutte du MRAP contre le racisme? • Jean-Claude Dulieu Demandez le nouveau matériel du MRAP Dans le cadre de la campagne contre l'extrême droite, 3 autocollants et 3 affiches viennent d'être édités: ils sont disponibles auprès du comité local de votre ville ou auprès du siège national. Les autocollants portent les mots d'ordre suivants: « Non au F-Haine », « Eteindre le feu avant qu'il ne soit trop tard », « Le F-Haine ne passera pas par moi ». Les affiches ont trait au « détail» avec la reproduction d'une photographie d'un charnier prise à la libération du camp de Mathausen, et à l'offensive du FN contre la culture. D'autres outils sont en cours d'élaboration. Différences n° 194 mars 1998 • Il Congrès du MRAP IIIIILIIITIII ET EITIE LEI PEUPLEI ITII MIGRATIONS, SOLIDARITÉ ET DÉVELOPPEMENT Depuis pas mal de temps déjà, nous disons que ce que les politiques qualifient de « problème de l'immigration », en France, en Europe et dans les pays développés, est à l'étape actuelle, l'effet de cette fameuse mondialisation dont on parle tant, qui met en mouvement les marchandises, les capitaux, les forces de travail, au profit des uns et au détriment des autres. La « crise» prolongée que vivent les sociétés européennes débouche sur une rupture des équilibres préexistants et sur de profondes transformations économiques, sociales, culturelles ... qui trouvent leur écho dans les bouleversements des pays du Sud et de l'Est. Partout en Europe la peur accompagne la précarisation et la misère et favorise les représentations fantasmatiques et la recherche d'explications et de solutions simplificatrices. Comme le proclamait la plateforme de huit associations, dont le MRAP, « Pour la régularisation des sanspapiers et pour la révision radicale des Partenaires politiques d' immigration » (18-11-1996), les politiques suivies depuis quelques vingtcinq ans par la France en la matière, « reposant sur la pensée unique de la fermeture des frontières et sur le mythe de l'immigration zéro, s'avèrent, à l'ère de la mondiali sation, irréalistes et dangereuses ». Selon la même plateforme, tout nouveau projet « doit viser à apporter des solutions aux problèmes mondiaux qui contraignent à l'exil des millions de réfugiés politiques et économiques. Elle doit aussi assurer une coopération qui reconnaisse pleinement le rôle des migrants comme partenaires et acteurs de développement» . Ainsi, après le bilan des échecs passés et l'analyse des enjeux, voilà désignées les deux orientations majeures indispensables à l'élaboration de politiques radicalement nouvelles : 1 - Quelles solutions la France et l'Europe avec l'ensemble de la communauté internationale, doivent-elles apporter aux causes géostratégiques des déplacements massifs de populations à travers le monde, à commencer par ceux des régions qui, pour des raisons historiques et géographiques évidentes, touchent de plus près la vie et la conscience européennes : le monde méditerranéen, l'Afrique, l'Europe de l'Est et de la nouvelle CEL. ? 2 - Quelles voies nouvelles la France et l' Europe devraient-elles explorer pour devenir partenaires de co-développement avec les pays pauvres de la planète, tout particulièrement les pays d' origine des immigrés ? L'objectif global doit être de construire un partenariat d'une nouvelle nature avec les pays appauvris. Ce partenariat peut mettre en oeuvre de nouvelles et fortes solidarités - sur les plans économique, social, éducatif et cu!turel - qui profitent à toutes les parties, par exemple en facilitant les échanges en devises locales entre pays complémentaires, ou encore en créant des unités de production au Nord pour des équipements spécialement conçus pour le développement du Sud, etc ... • Bernadette Hétier et Jean-Jacques Kirkyacharian LI _RA' S'ISSICII III Clllllés clllllllllé Illcés Plr Il Fédérllili Lél Lllrlill LA CITOYENNETÉ est au coeur de notre démarche contre le racisme, les discriminations et l'exclusion. C'est à la fois un moyen indispensable dans la lutte contre le racisme et un objectif d'organisation et d'action des hommes dans la Cité. Il Y a un an, la Fédération Léo Lagrange, organisation d'éducation populaire, a pris l'initiative de développer un réseau de Comités Citoyenneté ainsi qu'une campagne « j'agis pour nos droits " . Les partenaires de Léo Lagrange pour cette campagne et l'animation des Comités Citoyenneté sont des organisations de défense des droits de l'homme et des acteurs sur des secteurs de la vie sociale comme l'ADRI, la Cimade, la Confédération Générale du Logement, les maisons des potes., la Ligue des Droits de l'Homme, le Mouvement Français pour le Planning Familial, Service Civil Information. Dans le contexte actuel de déficit d'éducation populaire et citoyenne qui favorise le dépérissement des droits, le développement des injustices et des exclusions, le MRAP s'associe pleinement à la campagne en cours et à l'action des Comités Citoyenneté. Il est important que localement le MRAP participe aux initiatives par les Comités Citoyenneté et y apporte la spécificité de son regard et de son expérience. Ces comités s'engagent pour: la lutte contre l'extrême droite, la défense du droit du sol, le droit de vote des résidents étrangers aux élections locales et l'inscription des jeunes aux élections locales, l'accès aux droits pour les plus démunis et l'information et la participation des citoyens. Ces comités sont ouverts à tout les partenaires locaux qui s'inscrivent dans ces objectifs et défendent les droits au quotidien. Le domaine d'intervention est vaste et c'est un combat qui ne se gagnera pas en un jour. La pluralité des approches pratiques et théoriques des organisations partenaires et leur rapprochement dans le cadre de cette campagne favorisent l'enrichissement réciproque par sa diversité et renforcent la lutte contre les exclusions par la promotion de la citoyenneté . • Alain Callès Différences n° 194 mars 1998 LEI FIIIÇIII ET LI LUnE CIITIE LE IICII E Ce mois, la Commission nationale consultative des droits de l'homme remettra son rapport annuel sur l'état du racisme en France au Premier ministre, lequel utilise entre autres sources d'information ou de connaissance les résultats d'un sondage. Laurent Canat présente ici quelques données relatives à ce sondage exclusif pour CSA Opinion, le Service d'information du gouvernement et la CNCDH. Ce sondage a été effectué au domicile des interviewés, auprès de 1040 personnes, par la méthode des quotas, avec répartition géographique métropolitaine, du 26 novembre au 6 décembre 1997. Les indications comparatives + ou - sont en référence au sondage de l'an dernier, sauf autre mention. Pour les sondés, le racisme n'apparaît plus comme une des menaces qui pèsent aujourd' hui sur le monde: seuls 17 % des sondés le placent parmi les trois principales menaces, contre 35 % en 1996. Il n' apparaît plus non plus comme une des menaces qui pèsent aujourd'hui sur la société française : seuls 20 % des sondés le placent parmi les quatre principales menaces, contre 35 % en 1996. Les principales victimes du racisme et de la xénophobie en France sont toujours, de l'avis des sondés, les Maghrébins et les jeunes d'origine maghrébine. Mais cette perception d'une discrimination est en très nette baisse - 75 et 63 % contre 83 et 71 % en 1996, alors que les juifs et les Européens de pays d'Europe centrale sont en nette progression (respectivement + 3 et + 5 points) : cette évolution rend compte des effets du message fronti ste, nettement orienté cette année sur l'antisémitisme. Mais le groupe maghrébin est toujours le plus stigmatisé : ainsi à la phrase « Diriezvous qu'en France il y a trop ou pas trop de ... », les réponses sont majoritairement « trop » pour les « Arabes» et « Musulmans » (56 et 42 %), très minoritairement pour « Noirs » (27 %), « Asiatiques» (21 %) ou« Juifs» (15 %). 35 % des sondés estiment que le racisme est une chose très répandue en France (41 % en 1996). L'éloignement de la menace raciste est réaffirmé à cette occasion, les opinions modérées (<< plutôt répandu», « plutôt rare») croissent. Cette modération se retrouve dans l'apport des immigrés à notre pays, jugé de moins en moins négativement. 49 % des sondés considèrent ces travailleurs « plutôt comme une charge » (en baisse de 8 points) et 68 % (+ 13 points) sont « plutôt d'accord » avec l'assertion « Les travailleurs immigrés doivent être considérés ici comme chez eux puisqu' ils contribuent à l' économie française» Pour 54 % (+ 8 points) « La présence d' immigrés en France est une source d'enrichissement culturel» 46 % (+ 6 points) sont en désaccord avec l' assertion « Aujourd'hui en France, on ne se sent plus chez soi comme avant ». Mais seuls 28 % s'accordent avec l'opinion « La France ne fait pas assez d'enfants, l'immigration est une chance pour elle ». Immigration, nationalité La France n'apparaît plus comme le creuset apte à intégrer, et une majorité de sondés estime que « Les gens auront tendance à se regrouper en communautés en fonction de leurs origines » (52 %). Le discours dominant sur la maîtrise des flux migratoires, dans le respect de la tradition d'accueil de la France, rassemble plus des deux tiers des sondés, seule une minorité (7 %) estimant qu'« Il faut ouvrir les frontières, la France doit être un pays d'accueil ». Les propositions du gouvernement en matière de nationalité sont plébiscitées par 60 % des sondés, contre 30 % pour le droit du sol intégral, avec manifestation de volonté devant donner lieu à un acte symbolique. Les conditions de naturalisation devraient être plus sévères pour 51 % des Différences n° 194 mars 1998 Sondage sondés, qui par ailleurs, ne connaissent pas et minorent le chiffre réel des naturalisations (100 000 par an en moyenne, alors que 40 % des sondés l' estiment à moins de 50000). Sans-papiers: 21 % des sondés ne souhaitent aucune régularisation, seuls 14% demandent que 120 à 140 000 (soit l'ensemble des demandes) soient régularisées, 27 % ne se prononcent pas. Les critères de régularisation sont très largement approuvés pour les célibataires installés de longue date, les conjoints de Français, les demandeurs d'asile et les étudiants (72 à 84 % d'approbation), moins largement pour les jeunes et les conjoints de résidents (65 et 84 % d'approbation). La lutte contre le racisme La lutte contre le racisme relève d'abord de l' action gouvernementale, les associations antiraci stes apparaissant au sixième rang des acteurs de référence, derrière l' enseignement, les partis politiques, les médias et les élus locaux. Dans leur ensemble, tous les moyens de lutter contre le racisme paraissent utiles, mais par rapport à novembre 1996, les sondés accordent moins d' intérêt aux politiques d'expulsion des étrangers condamnés (- 2 points), ou des irréguliers (- 5 points). Une majorité considère que les opinions sur l'inégalité des races ne devraient pas être autorisées dans les médias et lors des campagnes électorales : baisse très nette (- 10 points en général) par rapport au résultat de l'an dernier sur la même question. La préférence nationale à l'embauche est partagée par un tiers des sondés (- 6 points par rapport à 1991, dernière année où cette question fut posée), et 25 % trouvent normal de préférer un Français à un étranger en période de chômage. Si 70 % des sondés considèrent l' assertion « Il y a une inégalité entre les races» comme un propos raciste, seuls 19 % l'estiment pour l'assertion «Les noirs sont de meilleurs sportifs », et ils sont partagés (46 contre 49 %) à reconnaître comme raciste la phrase « Il y a trop d'étrangers dans l'équipe de France de football ». Si 80% trouvent raciste d' « interdire l'entrée d'une boite de nuit à de jeunes beurs ou à des noirs », seuls 26 % jugent raciste de « raconter des histoires drôles sur les noirs, les Juifs ou les Arabes par exemple » . • Laurent Canat • Il Contre le racisme dans le monde du travail ILIIIRER lE IIIIElII IIIIIR-FIIRE Les recherches et manifestations engagées par la CGT et la CFDT, tout comme l'élaboration d'un certain nombre de textes et rapports européens, conduisent à penser que la xénophobie tend à devenir l'une des caractéristiques du marché du travail. Incursion dans une réalité peu connue. LES MANIFESTATIONS du racisme dans le monde du travail sont, d'après un certain nombre de travaux, d'articles et de déclarations de syndicalistes, aussi diverses que nombreuses. Quelques exemples extraits de documents parus ces tout derniers mois. • Dans une grande entreprise métallurgique de l'Est de la France, un responsable syndical s'est entretenu avec des adhérents de son organisation qui lui ont révélé qu'ils « sabotaient chaque fois qu'ils le pouvaient la prière du vendredi des musulmans en détruisant du matériel qui sert au rite, ou en gênant l'accès à la mosquée, par exemple en bloquant les points d'eau qui servent à la préparation de la prière» (1). Le plus souvent, la haine ou les préjugés racistes s'expriment dans l'anonymat des tags, graffitis hostiles ou dessins obscènes ... inscrits dans les toilettes ou placés dans les vestiaires et sur les postes de travail des syndicalistes connus pour leurs convictions antiracistes. • Philippe Bataille cite le cas d'une entreprise de 600 employés où lorsque la CFDT a procédé à un affichage annonçant la réalisation de son enquête sur les discriminations (2), « les affiches ont en quelques heures été souillées de graffitis insultants et méprisants à l'égard des Maghrébins, mais aussi de la CFDT, dès lors assimilée "au syndicat des Arabes" » (1). • Dans un grand magasin d'ameublement de la région parisienne, les « employés de couleur », étrangers ou Français, «jusque-là présents dans tous les domaines d'activité du magasin, ont un jour été déplacés des postes de contact avec la clientèle pour être dirigés vers des tâches de manutention et de gestion des stocks. Cela a prioritairement concerné les employés les moins qualifiés » (1). • En 1992, le PDG d'une société japonaise, installée à Créteil (Val-de-Marne), décide de licencier un directeur commercial à cause de son origine. Il envoie une télécopie à la maison- mère au Japon, dans laquelle il écrit: « Comme je vous en ai déjà informé, il n'est pas qualifié pour le poste de directeurcommercial. Il n'est qu'un bon élément parmi les commerciaux ... Quant à moi, je pense qu'il n'est pas bien pour le long terme d'employer un ressortissant d'une ancienne colonie française -l'Algérie - pour diriger une équipe constituée de Français. » Le cadre en question a contesté son licenciement pour faute grave et a réussi à se procurer cette télécopie qui a permis de traduire la société devant la justice et de la faire condamner. Le MRAP s'était constitué partie civile (3). • Le 30 octobre dernier, les employés d'un magasin Leader Price se mettent en grève (4) avec l'appui de la CGT, du MRAP et d'élus municipaux. Parmi les problèmes mentionnés dans leur préavis figurent notamment« le refus d'un syndicat » par la direction, « le refus de certaines candidatures », et « le racisme». Au sixième jour de grève Selon un article publié après que les salariés eurent obtenu gain de cause, l'un des grévistes affirmait: «Nous nous sommes battus contre le racisme et pour faire respecter nos droits élémentaires ». «Un bruit courait dans tous les Leader du Val-de-Marne qu'une consigne venue d'en haut exigeait de nettoyer et d'éclaircir tous les magasins, c'est -à-dire d'en licencier tout le personnel d'origine étrangère. Et voilà qu'il y a peu, le superviseur du magasin de Bonneuil-sur-Marne a été remplacé par un type méprisant qui s'est mis à désigner les gens bronzés du doigt, en les appelant "ça", qui refuse de reconnaître et bien sûr de payer les heures supplémentaires, qui ne respecte pas la convention collective et interdit que le magasin ait un syndicat ». (5). Au sixième jour de grève confirme Mathilde Sally Boudé, secrétaire de l'Union départementale CGT, des négociations étaient ouvertes et un protocole d'accord signé. Depuis, ce « superviseur» a été changé. Différences n° 194 mars 1998 Les expériences confiées par les syndicalistes aux chercheurs montrent que leur action n'est pas vaine. Ainsi dans une entreprise francilienne de métallurgie étudiée (pour la CFDT), « il aura suffi d'une intervention des représentants de la CFDT en comité d'entreprise faisant apparaître, statistiques en main, le net déclin des embauches d'étrangers ces dernières années, pour qu'une série de stagiaires voie dans les jours suivants ses contrats à durée déterminée se transformer en contrats à durée indéterminée » (3). La détermination des syndicalistes Une autre expérience très positive est présentée par P. Bataille comme plus exceptionnelle qu'exemplaire, les patrons refusant le plus souvent d'admettre voire même de discuter de l'existence de pratiques ou de comportements discriminatoires. Il s'agit d'une entreprise d'Alès où « l'interpellation syndicale à l'égard de la direction s'est faite à partir de faits dûment établis, et il était absolument impossible de nier les pratiques discriminatoires à l'embauche. De plus, la détermination des syndicalistes était évidente. Ici, la direction s'est montrée accueillante et attentive. » Le directeur de l'une des deux entreprises a participé à une rencontre de présentation des résultats et le directeur général lui aussi ouvert à la démarche a convié les syndicalistes à « lui faire des propositions concrètes pour transformer la situation leur laissant ainsi la responsabilité de l'initiative» (3). Pour les syndicalistes convaincus de la nécessi té d'intégrer la lutte contre les discriminations et comportements xénophobes dans leur activité syndicale, rien n'est facile. Plusieurs facteurs interfèrent dont l'idée très ré- ] pandue que la lutte contre le racisme ou même seulement l'expression antiraciste relèverait du politique et non du terrain syndical. La revendication antiraciste est très vite et très facilement réduite à un combat polémique et idéologique contre le Front national qui s'éloignerait des prérogatives syndicales. En outre, des syndicalistes se sentent démunis, ils ont peur de se couper de leur base et d'affaiblir leur organisation en s'engageant trop explicitement. Enfin, ils avouent leurs difficultés à présenter des arguments suffisamment solides ou convaincants auprès de collègues influencés consciemment ou non par la propagande du FN. « Le fait nouveau, note Philippe Bataille, comparativement à un passé pas si lointain (notamment en région Provence-Alpes- Côte d'Azur), est bien la détérioration du climat social et idéologique qui entoure ces questions et confère une légitimité nouvelle à d'anciennes pratiques patronales» (1). Les chercheurs impliqués dans ce travail d'observation et d'analyse comme les confédérations syndicales CGT et CFDT ont conclu à l'immédiate nécessité de briser le mur du silence. C'était l'objectif de la campagne de la CGT, « le racisme ça se combat» qui se poursuit depuis ce mois de mars par des rencontres régionales et départementales. C'est aussi l'objectif immédiat de la CFDT même s'il est vraisemblable que les présupposés ne sont pas tout à fait les mêmes et que, parfois, la concurrence syndicale ne favorise pas le travail en commun. Philippe Bataille remarque par ailleurs « qu'une discussion sur le racisme dans une section syndicale n'est considérée légitime par le plus grand nombre qu'à condition qu'elle interroge la qualité de la relation de travail et l'organisation de celui-ci. ( ... ) Le syndicaliste ne parvient à ses objectifs que s'il dispose d'une implantation fondée sur la reconnaissance de sa compétence syndicale et s'il relie son intention de lutte contre le racisme dans l'entreprise à des objectifs plus généraux interrogeant le procédé de travail » (3). Antiracisme de proximité, dirait-on au MRAP. C'est donc bien à l'élaboration de savoir-faire nouveaux prolongeant les solidarités anciennes et les idéaux traditionnels que sont conviés les syndicalistes. En somme, l'acteur syndical combine «une vocation spécifique enracinée dans les rapports de travail et une vocation nouvelle qui porte sur l'organisation de l'entreprise, par le refus de voir le racisme et la xénophobie déchirer les travailleurs et faciliter la surexploitation de certains cr L'EUROPE, LE RACISME ET LE DROIT • « Les institutions européennes dans la lutte contre le racisme: textes choisis» (1) se compose, comme le titre l'indique, d'une série de textes procédant du droit communautaire qui ont amené à la proclamation de l'année 1997 « année européenne contre le racisme ». Ces textes - déclarations communes, résolutions du Parlement européen, résolutions du Conseil, conclusions de la présidence, communications, propositions de décision etc-, bien que dépourvus de valeur juridique contraignante, ont une influence sur la ligne politique adoptée par les partenaires européens en matière de racisme. Cette influence est d'autant plus grande que la construction européenne a été en partie motivée par une volonté de lutter contre la résurgence de nationalismes destructeurs. Dans cette perspective, la communauté européenne incite par exemple ses Etats membres à tenter de prévenir le phénomène raciste dans le domaine de l'éducation, en particulier. Ainsi, la résolution du Conseil de l'Europe portant sur la réponse des systèmes éducatifs aux problèmes du racisme et de la xénophobie, adoptée le 23 octobre 1995, déclare en outre que « la qualité des systèmes éducatifs dans un contexte carésolution du parlement européen sur la résurgence du racisme et de la xénophobie en Europe et le danger de la violence extrémiste de droite, adoptée le 21 avril 1994 qui demande aux Etats membres d'établir des codes de conduite des médias, afin que la liberté d'expression et de la La communauté européenne invite à « l'application résolue des lois tendant à prévenir ou à réfréner les actes discriminatoires ou xénophobes et (à) l'élaboration de telles lois par les Etats membres qui ne l'ont pas encore fait. » ractérisé par la diversité, se mesure notamment à leur capacité à faciliter l'insertion sociale de leurs élèves et étudiants. Par conséquent, un système éducatif de qualité doit s'efforcer de favoriser l'égalité des chances. » De même, la communauté européenne s ' est-elle intéressée au rôle joué par les médias vis-à-vis du phénomène raciste. On peut citer à cet égard la presse soit complète, mais responsable (article 18). Enfin, si cette action essentiellement préventive ne produit pas les résultats escomptés, la communauté européenne invite les Etats membres dans un article 2c de la résolution du Conseil relative à la lutte contre le racisme et la xénophobie, adoptée le 29 mai 1990, à : « l'application résolue des lois tendant à prévenir ou à réfréner Différences n° 194 mars 1998 les actes discriminatoires ou xénophobes et l'élaboration de telles lois par les Etats membres qui ne l'ont pas encore fait. » Ces quelques exemples montrent que la Communauté européenne cherche à orienter l'action des Etats afin de lui assurer une meilleure efficacité. Cette orientation des politiques menées par les Etats membres de l'Union devrait se trouver facilitée par la récente mise en place d'un observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes. Elle devrait permettre à la communauté européenne d'accroître la pertinence de ses avis en matiè" re de lutte contre le racisme en discernant mieux les spécificités des problèmes rencontrés par les Etats en cette matière .• Jean-Marc Candella (1) Edition Commission européenne, collection « Emploi et affaires sociales », Direction générale de l'emploi, des relations industrielles et des affaires sociales, 1997 Il Contre le racisme dans le monde du travail (suite de la page 7) d'entre eux sur des critères inacceptables. » Ce travail local et précis n'est pas en contradiction avec la perspective nationale et européenne à laquelle sont attachées les confédérations. Ainsi, des actions sont en cours d'élaboration ou de réalisation. La CGT et J'ISERES - organisme de recherches économiques et sociales créé par la CGT à la faveur des lois Auroux de 1982 - envisagent de mettre au point avec d'autres syndicats européens, notamment espagnols et italiens, un observatoire syndical sur les discriminations qui s'appuierait sur une banque de données. La Fédération des finances de la CGT a, pour sa part, pu obtenir des subsides dans le cadre de J'année européenne contre le racisme pour mener une enquête sur les pratiques discriminatoires dans son secteur d'activité et sur les moyens d'y faire face. Selon François Vourc'h, sociologue universitaire, et Anita Ardura, sociologue à J'ISERES, que nous avons rencontrés, les projets de recherche n'ont pas pour but de « débusquer le raciste mais de démonter les mécanismes ». Les pratiques syndicales étant complexes - que faire quand un collègue raciste est promu? le syndicaliste doit-il soutenir un dossier? -, il s'agit notamment de « lever la culpabilité des militants syndicaux» et de « repérer les pratiques patronales ségrégatives ». En fait, ces projets se présentent comme des outils de connaissance du phénomène permettant d'en éclairer toutes les facettes et de favoriser J'émergence de savoir- faire. Code de bonnes conduites C'est aussi ce que visait une étude de la Fondation européenne pour J'amélioration des conditions de travail sur la « prévention du racisme sur le lieu de travail dans J'Union européenne» dont les résultats ont été publiés en 1996. Après la signature par les quinze pays de J'Union de la Déclaration de Florence (1995) sur la prévention de la discrimination raciale et de la xénophobie et pour la promotion de l'égalité de traitement sur le lieu de travail, cette même Fondation était invitée à réaliser une enquête sur les expériences positives en la matière. Cette enquête a abouti à la rédaction d'un « recueil européen de bonnes pratiques» sur le même thème que celui de la déclaration de Florence. Il y est fait état de 25 études de cas, révélés par les 15 rapports nationaux rédigés des chercheurs - Véronique de Rudder, Maryse Tripier et François Vourc'h pour la France - et synthétisés par John Wrench du Centre danois des migrations et études techniques. Cette synthèse donne à voir la diversité des bonnes pratiques - ou bonnes conduites - et les différences de méthodes et de concepts d'un pays à J'autre, voire d'une expérience à l'autre. Elle montre surtout qu'il est possible de réaliser des expériences pratiques positives même dans un contexte difficile. Ce genre d'étude vise à contribuer à un plus large échange entre les protagonistes des différents pays de l'UE et à promouvoir de nouvelles initiatives en s'appuyant sur une indispensable évaluation des résultats. Nous reviendrons dans l'une de nos prochaines éditions sur ces expériences et en particulier sur le rapport français et les perspectives qui en découlent. • Chérifa Benabdessadok (1) Le racisme dans le monde du travail, Philippe Bataille, Esprit, mai 1997 (2) Laquelle a donné lieu à la publication du livre de P. Bataille, « Le racisme au travail », La Découverte, 1997. Cf. « Syndicats recherchent stratégie », Différences n0191, décembre 1997 (3) Enquête publiée par Entreprise et Carrières n° 418, 19/26 janvier 1998 (4) « Ni Blacks, ni Reubeus, mais Bleu-Blanc-Rouge! », Le Monde, 3 décembre 1997 (5) Echanges, mensuel de la Fédération CGT Commerce, Distribution, Services, décembre 1997, n° 168 ILS ONT ÉCRIT ... ILS ONT ÉCRIT ... ILS ONT ÉCRIT ... ILS ONT ÉCRIT ... « La réponse syndicale qui s'appuie sur une situation objective et connue de tous est souvent plus efficace que celle qui dénonce le racisme de manière diffuse et fait du Front national son principal adversaire. Dans ces conditions, les débats sur la notion de racisme se clarifient, il n'est plus question de s'enliser dans des querelles de définition, mais de dénoncer des pratiques que quelques-unes estiment racistes. L'enjeu de cet effort est d'éviter l'enfermement dans un combat contre le Front national, sans y renoncer pour autant. ( ... ) En s'intéressant de manière renouvelée aux enjeux du racisme et aux situations concrètes de travail qu'il recouvre, en se démarquant du combat proprement idéologique et politique contre le Front national, dont la responsabilité première revient aux partis politiques, le syndicaliste peut construire un message qui le distingue et qui lui permet de faire entendre sa voix. Ainsi, la plupart des discussions que nous avons engagées avec les sections syndicales se sont enlisées ( ... ), sauf lorsqu'un renversement s'opérait parce que des militants dénonçaient en termes très concrets des situations d'inégalité de traitement ou d'exploitation dues au racisme. » Le racisme au travail. Philippe Bataille « Susciter la réflexion, sensibiliser, former, éduquer ... Il est anormal qu'en France, la formation des inspecteurs du travail, de la police, des travailleurs sociaux, des personnels des agences locales pour l'emploi, des personnels pénitentiaires, des personnels d'enseignement et de santé, des cadres syndicaux ... ne comporte pas dans leur programme une sensibilisation particulière au racisme et aux problèmes de discrimination, ne serait- ce qu'en matière de droit. Il y a là une exigence à faire valoir (cela est vrai aussi pour l'enseignement général: cf. programme d'éducation civique très faible sur ces questions). ( ... ) Il existe, dans plusieurs pays européens, des « codes de bonne conduite» adoptés par des entreprises. Celles-ci en tirent un argument de vente, en terme au moins « d'image de marque ". Pourquoi ne pas tenter de promouvoir des actions similaires? ( ... ) Créer un organisme indépendant, spécialisé, doté de pouvoirs relativement étendus. » Extrait de « La prévention du racisme dans l'entreprise en France », Véronique de Rudder, Maryse Tripier, François Vourc'h, in Hors-série de Savoirs et Formation, édité par l'AEFTI, juin 1996 Différences n° 194 mars 1998 IITEIIE LECTIRE Les fondateurs de cette nouvelle entreprise ont voulu combler ce qui représente pour eux les carences du paysage éditorial jeunesse; ils se sont appuyés pour cela sur une souscription aux quatre premiers titres. Il faut signaler parmi ceux-ci« Le grand livre des droits de l'enfant » réalisé dans le cadre de la Décennie des Nations unies pour l'Education aux droits de l'homme (1995-2005) et pour la célébration, en décembre 1998, du Cinquantenaire des droits de l'homme. Le résultat: un livre remarquable, écrit dans une belle langue, une information précise et fournie, accompagnée d'une iconographie soignée et riche (70 photographies notamment). En annexe le texte intégral de la convention de l'ONU relative aux droits de J'enfant. Une belle réussite. o Soumission à l'autori· té. Milgram Stanley. Calmann Levy, 1990. L'auteur de cet ouvrage cherche à comprendre pourquoi l'obéissance, en tant que soumission à une autorité, demeure un trait constant de la condition humaine. A l'origine de cette démarche, se trouve la volonté de Milgram de rendre le phénomène criminel nazi plus intelligible. Une série d' expériences en laboratoire est alors mise en place afin d' isoler les mécanismes et les déterminants de l'obéissance. Sous prétexte d'organiser une enquête sur la mémoire et l'apprentissage, un laboratoire réunit trois individus (un expérimentateur, un élève et un moniteur) pour participer à l'expérience suivante: sous les ordres de l' expérimentateur, un moniteur devra administrer des chocs électriques d'intensité croissante à l'élève en cas d'erreur de sa part. L'étude ne portera que sur le comportement d'obéissance ou non du moniteur, unique personne « naïve », les deux autres étant des complices de l' expérIence. L'inquiétante question est alors posée: jusqu'à quel point précis, les personnes testées suivront les instructions de l'expérimentateur avant de se refuser à faire souffrir l' élèvevictime? Les résultats montreront la propension extrême des adultes à la soumission quasiinconditionnelle aux ordres de l'autorité, malgré la véhémences des plaintes de la « victime ». Selon Milgram, l'intégration d'un individu dans un système social aurait pour effet de faire taire sa conscience au profit de son adhésion à l'idéologie de la structure sociale. Pour l'auteur, il n'existe pas de morale sans actes moraux et la solidarité reste le rempart le plus efficace contre les excès de l'autorité, présents sans exception dans tous les régimes politiques. S'il analyse comment se composent les mécanismes d'obéissance et de refus, il n'explique pas pourquoi une minorité parvient à désobéir. Un livre important qui milite avec force en faveur de l'idée que la réflexion dès le plus jeune âge sur ces questions est indispensable pour ne pas être pris au dépourvu d'un ordre que la conscience rejette. Aurélie Cucco o Le grand livre des droits de l'enfant. Ecrit par Alain Serres, illustré par Pef. Rue du Monde. 1997. Nouvelle maison d'édition, Rue du Monde s'est offert une belle profession de foi: « Nous allons nous moquer du monde là où il le mérite, le montrer du doigt là où il irrite et parler tendresse là où il nous émeut. » o Coupons les ailes de l'impunité. Récit de Josué Giraldo, recueilli par Luis Guillermo Perez. Centre national de coopération au développement. EXPOSITION D'AFFICHES ORIGINALES Vernissage à la galerie La Pochade le 12 mars d'une exposition d'affiches originales sur le thème du racisme réalisées par les élèves de l'Ecole nationale supérieure des arts appliqués et des métiers d'art et de J'Ecole supérieure des arts graphiques. Durée de l'exposition : d~ 12 au 21 mars. CASSETTE-VIDÉO Dans le cadre de la Semaine nationale d'éducation contre le racisme, le MRAP a co-réalisé avec le magazine Objectif Plein Sud de l'agence Orchidées un film-vidéo permettant d'aborder le thème des discriminations avec un public de collégiens ou de lycéens. Au sommaire de l'édition 98 : les cent-cinquante ans de l'abolition de l'esclavage avec L. M'Bokolo, historien; racisme et monde du travail avec des analyses de P. Bataille, M. Wieviorka, F. Vourc'h et des témoignages de jeunes et de formateurs; l'école face au racisme avec P. Tapernoux ; l'île Maurice au-delà de la carte postale. 35 mn (sujet racisme) + 20 mn (magazine: travail des enfants, de l'éthique sur l'étiquette ... ). En vente auprès du secteur éducation : 80 francs + 20 francs de port. Différences n° 194 mars 1998 Bibliothèque Diffusion: ACAT (Association des chrétiens pour l'abolition de la torture), 252 rue SaintJacques, 75005 Paris. Tél: 01 43298852). Josué Giraldo était colombien, il a été exécuté sans jugement par des tueurs à gage le 13 octobre 1996 sur ordre des paramili taires. Cet homme a été tué parce qu'il combattait, notamment dans les instances internationales, la violence politique, le trafic de drogue et le terrorisme d'Etat, la banalité du pire qui sévissent dans son pays. Quelques mois avant sa mort tragique, il était à Genève où il se reposait avant de reprendre son bâton de pèlerin. Là, durant plusieurs jours, son compatriote, Luis Guillermo Pérez Casas, avocat et militant comme lui contre la dictature colombienne, a recueilli le récit de sa vie et c'est cela qu'il livre dans cet ouvrage qu'il faut soutenir pour les idées qu'il contient et les valeurs qu'il défend. Et pour savoir ce qui se passe dans ce pays où le terrorisme d'Etat fait des ravages trop méconnus. A signaler également: • Le numéro 400-40 1 (janvier /février 1998) de la revue Après-demain, édité par la LDH, consacré au thème de l'immigration. • Le numéro 177 (mars 98) de la revue Autrement, publié par Amnesty International, sur la question de la violence et de l'inhumanité de l'Homme, intitulé « Le Droit à l'humanité, contre la violence des hommes ». • Dans le numéro 52 (février 98) de Ras l'front un petit guide électoral avec quelques chiffres concernant les régionales de 1992 et 1986: taux d'abstention, pourcentages de voix obtenus par le FN et projection pour les toutes prochaines élections. Un bon outil. Chérifa Benabdessadok • Il EN BREF • Le Conseil constitutionnel a annulé le 6 février l'élection de JeanMarie Le Chevalier aux législatives de juin 97 et déclaré son inéligibilité pour un an ; il lui est reproché de ne pas avoir respecté les obligations légales de financement de sa campagne. • Le MRAP a fait parvenir un message au congrès de SOS Racisme qui se déroulait les 7 et 8 février à Rennes. • Procès contre Roger Garaudy, auteur des cc Mythes fondateurs de la politique israélienne» et Pierre Guillaume, éditeur de la cc Vieille Taupe» : jugement attendu le 27 février. CHRONO PO UR MÉMOIRE Comité national de vigilance Une délégation du Comité national de vigilance contre l'extrême droite, composé notamment de responsables du MRAP (représenté par Alain Callès), du Manifeste contre le Front national, de SOS Racisme, du Réseau Voltaire, des Francas, de Ras l'Front ainsi que du Parti socialiste, des Verts et du PRS, a séjourné du 26 au 29 novembre 97 dans le Sud-Est. Ils ont rencontré des militants de partis politiques, d'associations, de syndicats, regroupés ou non en collectifs. Ce groupe s'apprête à rendre public un rapport sur ce qu'ils ont vu et entendu sur place. A suivre. Nouvelles de I"AGRIF Le tribunal administratif de Nice a refusé, fin décembre 1997, de reconnaître le caractère antiraciste de l'Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l'identité française (AGRIF), association proche du Front national qui a pour objet la lutte contre le racisme antifrançais et antichrétien. L' affaire remonte au mois de novembre 1993. Le préfet du Var s'était alors opposé à la participation de cette association à la cellule départementale de lutte contre le racisme, la xénophobie et l'antisémiti sme. L'association avait déposé un recours devant le tribunal administratif qui avait confirmé le bien fondé du refus du préfet du Var. Selon le président du tribunal, Norbert Cal deraro, cette décision est motivée par l'absence d'indépendance de cette association, « simple émanation d'un parti politique » et par son objet« directement contraire au caractère générai et universel de la lutte contre le racisme». Sus p e n s ion d'un proviseur à V itro lles Par arrêté ministériel, le proviseur du lycée Mendès- France à Vitrolles a été suspendu début janvier pour une durée de quatre mois en raison de « risques de troubles à la rentrée» (Le Figaro 7.01.98). Selon le rectorat, cette suspension «ne préjuge pas des conclusions du rapport contradictoire» qui est instruit par l'Inspection générale. Le conflit entre les enseignants et le proviseur date de plusieurs mois et porte sur des sujets divers: accueil de C. Mégret, exclusion d'un élève sans conseil de discipline, présence de policiers municipaux à l'intérieur de l'établissement avant la tenue d'un conseil d'administration, plainte d'une élève pour injures racistes ... Afficha g e sanglant Les trois colleurs d'affiches du Front national accusés du meurtre d'un jeune homme de 17 ans d'origine comorienne ont été déférés devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-enProvence le 8 j anvier à Marseille. Les faits remontent à février 1995, Ibrahim Ali Abdallah avait été tué d'une balle de 22 long rifle dans le dos alors qu'il s'enfuyait. Les amis d'Ibrahim présents sur les lieux du drame se sont constitués partie civile ainsi que le MRAP, la Licra, la LDH, SOS Racisme et Espérance. Selon La Marseillaise, le procès en assises devrait se tenir avant l'été. Préférenc e p lu s p lus Selon Libération (25.01), Marie-France Stirbois a proposé le 23 janvier à Menton de faire bénéficier d'une prime de 5 000 francs les parents français ou de l'Union européenne de la région Centre où elle est candidate. SOS Es cla ves Les présidents respectifs de l'association SOS Esclaves et de l'association mauritanienne des doits de l'Homme ainsi que le secrétaire général des avocats mauritaniens ont été jugés à Nouakchott a partir du 31 j anvier et condamnés à de lourdes peines de prison pour « faux , usage de faux, propagation de fausses nouvelles à l'étranger et appartenance à une organisation illégale ». De la violence des mots ... Membre du comité départemental de vigilance contre l'extrême droite, le MRAP a appelé à un rassemblement le 20 février devant le palais de justice de Versailles (Yvelines) au moment où Le Pen était jugé pour avoir agressé une candidate aux dernières élections législatives. Rappel de quelques faits. Depuis le début de l'année, des groupes de militants du Front national procèdent sur les marchés de la capitale à des coups de force et à des provocations, sous couvert de distribution de tracts. Ainsi le 24 janvier dernier, une cinquantaine d'entre eux, à l'allure de mercenaires et munis de talkie-walkies, « font la loi " rue des Pyrénées (XXe arrondissement), adressant aux commerçants des injures antisémites, et agressant une militante du MRAP. Le 15 février, sur le marché Blanqui (XIIie arrondissement), une dizaine de personnes cagoulées s'en prend violemment à des militants antiracistes. Victime d'un jet de gaz lacrymogène, une fillette doit être transportéé à l'hôpital. Le même jour Place des Fêtes (XIXe arrondissement), un groupe de quatrevingts personnes, parmi lesquelles M. Dantès, candidat FN du XIe arrondissement aux élections législatives de 1997, réitère les exploits du 24 janvier, maniant le tract et l'insulte antisémite. Ces individus sont flanqués d'éléments <1 Différences n° 194 mars 1998 Maître Fatimata Mbaye, vice-présidente de l'Association mauritanienne des droits de l'homme, a également été arrêtée le 6 février à l'issue d'une manifestation de 3 000 personnes durement réprimée par la police. Un appel pour la libération de ces personnes a été signé par 15 associations dont le MRAP, syndicats et partis politiques et par une cinquantaine de personnalités. Le MRAP a engagé plusieurs actions de solidarité dont un rassemblement de protestation devant l'ambassade de Mauritanie le 18 février. Algér ie, entre s olid a r ité e t e x p ulsion Plusieurs dizaines d'associations dont le MRAP ont appelé à un rassemblement le 2 février à Paris en solidarité avec le peuple algérien. Une soirée était organisée le 6 février sur le thème «Comprendre l'Algérie ». Les comités locaux du MRAP organisent un peu partout en France des actions de solidarité ct des initiatives très di n:rses. Le 17 février, la Cimade, la Fondation FranceLibertés, le CCFD (Comité catholique contre la faim et pour le développement) et l'ACAT (Action des chrétiens contre la torture) appelaient à un moratoire des expulsions vers l'Algérie. La Cimade a décidé de publier chaque semaine des extraits des lettres qui lui parviennent des centres de rétention. En effet, l'association a constaté une multiplication des actes de désespoir dans ces centres ; ainsi, au centre du Mesnil Amelot (près de Paris) 29 tentatives de suicide ont été enregistrées en 1997, la plupart d'Algériens. (Source AFP). à la violence physique Rouen contre Mégret Les manifestations contre la présence de leaders du FN se font de plus en plus visibles. Ainsi à Rouen, à l'appel notamment du MRAP, de Ras l'Front, de la CGT, de la CFDT, de la FSU, et de partis de gauche, dix mille personnes ont manifesté contre la venue de Bruno Mégret le 13 février . Un succès sans précédent pour une manifestation soutenue par la municipalité qui avait fait placer une banderole sur la façade de la mairie avec cette phrase de Martin Luther King : « Apprenons à vivre ensemble comme des frères sinon nous mourrons ensemble comme des idiots ». Pour la p aix au Proc h e-Orien t « Lamenaced'unenouvelle guerre des EtatsUnis contre l'Irak semble se préciser, maldu Département Protection Sécurité (DPS) du FN. Les CRS doivent intervenir, après que certaines personnes sur le marché eurent été battues. Ces incidents ne sont pas isolés. Ils participent d'une volonté délibérée de terreur, de tension et de provocation, tant à l'égard des opposants les plus visibles, que de la population en général. Le but est clair: faire naître l'inquiétude et le désarroi pour apparaître ensuite comme le dernier rempart contre l'insécurité. Le MRAP rappelle que les intimidations verbales, les violences physiques constituent les armes principales de l'extrême droite contre la démocratie. Il appartient à chacun d'entre nous de mesurer l'accentuation du caractère fasciste des pratiques du FN. A cet effet, le MRAP interpelle les autorités constituées, afin qu'il soit mis fin sans attendre aux agissements du Département Protection Sécurité (DPS) du Front national, véritable milice privée sous la responsabilité directe de Jean-Marie Le Pen. Le MRAP appelle publiquement à sa dissolution, conformément à la loi du 10 janvier 1936 sur les ligues. Aujourd'hui et demain 20 février, Jean-Marie Le Pen est jugé pour les propos et les actes d'intimidation commis le 30 mai dernier sur un marché de Mantes- la-Jolie à l'encontre d'une candidate aux élections législatives. Communiqué du MRAP, 19 février. gré les efforts de nombreux pays, dont le nôtre - pour faire prévaloir le bon sens et l' humanité. Le bon sens : car à supposer qu'il s'agisse réellement de défendre la paix et les droits de l'homme, le résultat en sera à l'opposé, la guerre du Golfe n'a fait que renforcer Saddam Hussein, son pouvoir et son influence. L'humanité : car après que la guerre du Golfe eut fait des dizaines de milliers de morts dans la population ci vile, l'embargo alimentaire et sanitaire contre l'Irak a été la cause directe d' aumoins un million d'autres, parmi lesquels de nombreux enfants. Une nouvelle guerre serait une catastrophe pour toute la région et mettrait fin définitivement à l'espoir de paix en Palestine. Les démocrates qui souhaitent ardemment la paix et la liberté pour tous les peuples de cette région, sans exception, doivent manifester leur refus de ce processus désastreux ( ... ) » Communiqué MRAP 18 février. Schengen s 'é la r git Rejoignant les sept pays où la convention est appliquée, après avoir supprimé les contrôles dans les aéroports pour les voyageurs, l'Italie devrait étendre cette mesure aux autres frontières le 31 ma rs prochain . L'Autriche a commencé à ouvrir ses frontières le 31 décembre dernier. • Infos r assemblées par C. Benabdessadok et Juliette Rennes Différences n° 194 mars 1998 EN BREF • Jean-Marie Le Pen a comparu les 19 et 20 février devant la 5e chambre du tribunal correctionnel de Versailles pour cc violences en réunion », lors d'incidents survenus à Mantes-la-Jolie le 30 mai 1997. Le procureur de la République a requis une peine de trois mois de prison éventuellement assortie d'un sursis, 20 000 francs d'amende et la privation de ses droits civiques, civils et de famille durant deux ans. Verdict le 2 avril. • La Cinquième diffuse le 19 mars un reportage cc Les petites ombres d'Alger» consacré à l'enfance en difficulté dans les faubourgs de la capitale algérienne et réalisé par Malek Sahraoui. Il Débat 1 Concert e L'INTERVENTION d'Alain Callès reproduite dans Différences (nQ 192 décembre 97) ouvre un débat important. EIre citoyen ce n'est pas accepter d'être dans la légalité, et il faut prendre à la lettre la définition d'Aristote: être gouverné, oui, et aussi gouverner. Un livre récent (1) rappelle une vérité souvent inaudible sous les flonflons du conformisme post-moderne: la citoyenneté, qu'on proclame à tout bout de champ renvoie en réalité à deux notions, dès J'origine antagonistes. Il y a ['idée libérale de la démocratie, fondée sur les choix libres d'individus indépendants, qu'un équilibre miraculeux est censé condu ire à des décisions d'intérêt général. Mais l'idée républicaine est toute autre: c'est celle qu'exprimait Rousseau dans ses écrits politiques et qui a pris corps en 1772, et c'est seulement par référence à elle qu'on peut comprendre que les femmes, écartées des droits politiques, étaiem néanmoins citoyennes et admises dans les clubs. La République n'est pas un équilibre, mais un projet, et plus précisément le projet de l'égalité sociale telle que chaque époque peut se la représenter. C'est cette citoyenneté là qui se propose aux étrangers et à leurs enfants, et non pas l'égalité libérale, où les pauvres n'ont que le droit fictif de concourir avec les riches dans le marché des compétences et des qualifications. C'est pourquoi l'intégration à l'américaine est un mensonge qui n'abuse même plus ceux qui le profèrent: il peut bien y avoir des maires noirs, y compris à Philadelphie, mais le peuple noir est rejeté dans l'exclusion multiforme, et avec les autres minorités il fournit les gros bataillons de la misère, ainsi que des condamnés à mort. Aussi, ce système ne peut déboucher que sur les replis identitaires el les guerres ethniques: le racisme apparaît ainsi comme la conclusion de l'histoire, après en avoir été l'initiateur. C'est vrai aussi pour la Francc. La société libérale peut intégrer des indi vidus dans son jeu d'échanges. On peut devenir maire de Neuilly, PDG de grandes sociétés ... cela n'a aucune signification du point de vue du racisme dans la société française. J'écris cela en fonction du congrès prochain, qui devra aflïner l'orientation politique du MRAP. Le mot ne doit ni effrayer ni faire illusion. Il ne s'agit pas de« la politique », mais du politique. L'éga/iberté La politique est légitime, mais en permanence menacée de sombrer dans le jeu dérisoire des pouvoirs et des luttes de pouvoir ce qui excite toujours davantage la démagogie fasciste. Elle ne peUl prendre vie que si elle est portée par un projet Tarif réduit pour un concert de Serge Utgé-Royo au théâtre Trévise à Paris Auteur-compositeur-interprète, Serge Utgé-Royo s'inscrit dans la tradition française de la chanson à texte. Il a édité plusieurs albums dont le demier s'intitule" Cinq cents hivers», titre de l'une des seize nouvelles chansons de cet album, en hommage aux Indiens d'Amérique, et dont le refrain est: Indien, mon frère Des rois, des reines, Cinq cents hivers des mercenaires ont recouvert et des curés tes chants sacrés t'ont crucifié. Ce fils d'exilés espagnols né à Paris, également écrivain et comédien, voue un profond attachement aux droits humains et à la lutte contre le racisme. La voix est chaude et la musique aussi sobre que soignée. Elles vous invitent si le coeur vous en dit: du 1 er au 11 avril à 20h30 14 rue de Trévise Paris ge (Métro: Cadet ou Rue Montmartre) Tarif réduit sur présentation de ce numéro de Différences ou de votre carte d'adhésion au MRAP 70 francs au lieu de 100 francs Réservation obligatoire au : 01 40 21 88 09 Différences n° 194 mars 1998 qui soit celui des citoyens: de ceux des citoyens qui veulent faire une République. Je reprenais volontiers il y a quelques années un concept inventé par Balibar: l'égaliberté. Aujourd'hui, avec l'enracinement du racisme, tant en Europe- qu'en France, avec l'énorme inégalité structurelle du monde, je crois qu'il faut dire que notre objectif politique c' eSll'égalité-fratemité, l'égalité égalitaire des citoyens el des peuples, la volonté d'un monde autre. Ce qu'on appelle le monde réel (en réalité bourré de fantasmes) produit toujours plus de racisme, d'exclusions, d'intégrismes. Un autre monde est à inventer et demeure possible. En tout cas c'est cela la tâche citoyenne. ~< Le pire n'est pas toujours sûr» .• Jean-Jacques Kirkyacharian (1) « Déclarer la philosophie », Dominique Lecourt, PUF, 1997 43, boulevard de Magenta 75010 Paris Tél. : 01 44 52 03 03 Télécopie: 01 44 52 00 44 • Directeur de la publication Mouloud Aounit • Gérante bénévole Isabelle Sirot • Rjdactrlce en chef Cherifa Benabdessadok • Administration - gestion Patricia Jouhannet • Abonnements Éric Lathière-Lavergne 120 F pour Il numéros/an 12 F le numéro • Maquette Cherifa Benabdessadok • Impression Montligeon Té1.:0233858000 • Commission paritaIre n° 63634 ISSN 0247-909~ Dépôt légal 1998-3

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