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Sommaire du numéro

n°54 de mars 1986

  • L'imbroglio misquito (Nicaragua) par Robert Pac [Amérique latine]
  • Attention: élections (programmes en matière d'immigration) par J.M. Ollé
  • Exclusion, répression (petite délinquance) par B. Hétier
  • Un désir nommé désert (expo sur le Hoggar) par M. Ayoun, Cherifa
  • Raï de marée par Afifa Zenati
  • Regards de femmes (festival de Créteil) par V. Mortaigne
  • La fête et ses rites propos de Jean Duvignaud recueillis par J.J. Pikon
  • Des années à se battre (Afrique du Sud) par M. Cornevin
  • Courrier; les juifs en URSS [pays de l'est]

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.----ASSURANCE-VIE et PREVOYANCE-____, - • Pour bien vivre sa vie, il faut être prévoyant. Depuis 150 ans, la Caisse Nationale de Prévoyance prend soin des personnes et de leur famille, avec des contrats clairs et bien adaptés aux besoins de chacun. Spécialiste de l'épargne-retraite, nol en matière d'assurance-vie et de pré~ voyance, avec une très large gamme de produits, la Caisse Nationale de Prévoyance est accessible à tous, quel que soit le niveau de revenus. 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Tél ... :}3,83,80.22., Commission paritaire n" 63634 ISSN 0247·9095. Dép~t légal : 1986-3 La rédaction ne peut être tenue pour responsable de$ textes, documents et photos confiés, ONT PARTICIPE A CE NUMERO : Yoro N'Diaye, Dolorès Aloia. Jean Roccia, Robert Pac, Bernadette Hétier, Monique Ayoun, Yves Thoraval, Chérifa, Joelle Tavano, Schofield Corryell, Jean-Jacques Pikon, Christiane Dancie, Marianne Cornevin, Alain Rauchvarger, Pierre Vallée, Million, ·tabachot, Dupont/Durand. PHOTO COIJ.VERTIJRE : Une femme du Hoggar, ISABELLE ESTIER OMMAmE _ ~------------~ 8 11 12 18 26 28 32 34 MARS ACTUEL POINT CHAUD L'imbroglio Miskito. ROBERT PAC Les sandinistes du Nicaragua promulgent ces jours-ci leur nouvelle constitution. Quelle place y sera faite aux Indiens miskitos ? RENCONTRE --- Attention élections. JEAN-MICHEL OLLE C'est l'heure du grand choix pour les électeurs. Nous avons fait le tour des programmes en matière d'immigration. PREJUGES Exclusion/répression . BERNADmE HETIER L~ petite déliquance est la vraie vedette des années 80. Nous avons suivi le chemin de tous les paumés qui finissent en prison. DOSSIER Un désir nommé désert. MONIQUE AYOUN, CHER/FA Ouverture au musée des Arts océaniens, à Paris, d'une exposition sur le Hoggar algérien. Qu'est-ce qui fait courir les Français vers les dunes ? Rien de nouveau, c'était déjà dans la Bible. CULTURES TENDANCES --- Raï de marée. AFIFA ZENATI Cette nouvelle musique franchit la Méditerranée presque aussi vite que le reggae avait traversé l'Atlantique. Attention aux oreilles. L'EVENEMENT--TAIGNE Regards de femmes. VERONIQUE MOR· Parti de rien, le VIII' Festival du film de femmes qui se tient en mars à Créteil prend cette année figure d'événement international. C'est peu dire qu'ille mérite. DÉCOUVERTES RÉFLEXION La fête et ses rites. JEAN ouviGNAuo On a beau vouloir ressusciter un peu partout la fête populaire, ça ne marche pas fort. Un sociologue explique pourquoi. Propos recueillis par Jean-Jacques Pikon HISTOIRE Des années à se battre. MARIANNE coRNEVJN Peut-être des siècles : la résistance à l'apartheid en Afrique du Sud est très ancienne. Il semble utile de le rappeler au moment où le 21 mars, Journée internationale contre le racisme, commémore le massacre de Sharpeville. vous L'agenda, Pour mémoire, les jeux, les petites annonces. Et pour satisfaire les joueurs qui se sont plaints du manque de délais, une prolongation du concours d'abonnements. Il est encore temps de gagner son billet pour New York. Rectificatif : la photo de couverture du mois dernier venait de l'agence ~G::::-:A-'-MM~.A.. ..... """"":""~""':"':"'~_;..,..o_;..,..o_;..,..o-.___ ____________________ j Il Différences- n" 54- MARS 1986 DIFFERENCES, ÇA SE LIT, ÇA SE RELIE! !lus n'en pouvez plus : depuis près de cinq ans que vous collectionnez Différences, il y en a partout, sur toutes les étagères, dans des tiroirs, aux quatre coins de votre appartement. Et puis, bien sûr, quand vous avez besoin d'un article, d'un renseignement, d'une référence, ils se trouvent toujours dans le numéro que vous n'arrivez pas à retrouver. Elle n'est pas facile, la vie du collectionneur ! Rassurez-vous, ces temps-là sont terminés. Désormais, vous pourrez archiver vos Différences dans de somptueuses reliures, et les classer par année. N'HESITEZ PAS, offrez-vous un demi-mètre de Différences, classés dans leurs reliures, à l'abri des gribouillages du petit dernier. JE COMMANDE . . . RELIURES DE DIFFERENCES, au prix de: 79 F l'une, port inclus 138 F les deux 177 F les trois SOIT UN CHEQUE DE F. A renvoyer à Différences, service abonnements, 89, rue Oberkampf, 75011 Paris, tél. : (1) 48.06.88.33. S'il vous manque des anciens numéros, téléphoneznous, vous saurez ceux qui sont encore disponibles. Reliure en balacron gris, Différences, imprimé jaune sur la couverture et au dos, emplacement au dos pour numérotation des reliures, format total 220 mm x 290 mm x 40 mm. 12 numéros par reliure. PARFUMS (;Q)( LATITUDE 48 J ~ AGENCE DE VOYAGES DES PRIX ET DES IDEES 21, rue de la Roquette - 75011 Tél. : 48.06.39.59- Télex 213 384 13, bd Arago- 75013 Tél. : 43.37.46.49. Licence A 1767 0/TOR/AL DATES Il Que celui qui ne s'estjamais ennuyé un 11 novembre devant le monument aux morts nous jette la première pierre : les commémorations, ce n'est pas très rigolo. Grands discours vite oubliés, dépôt de gerbe et recueillement, puis, rompez les rangs, on repart comme avant. L'ancien président l'avait bien compris, qui avait rayé de la carte le 8 mai. Mais, balayé lui-même par le 10 mai, il n'a pu continuer son grand nettoyage du calendrier. Et pourtant, quand on y pense ! D'abord, on supprimerait les guerres. 11 novembre, 8 mai, c'est loin tout ça, à la poubelle. 14 juillet, la nation cocorico, c'est ringard, au panier. 1er mai, c'est un coup de la CGT, Noël et la Pentecôte, un coup des cathos : pas question de garder tout ça, soyons modernes. A quoi ça sert de se souvenir ? Dans les écoles, on ferait mieux de supprimer l'histoire, et faire faire de l'informatique à la place. Les anciens combattants, les déportés, les résistants, à l'asile de vieillards. A la place des monuments, des cabines téléphoniques. Plus de noms de rues, des numéros, comme à New York. Ne parlons même pas du 21 mars, cette commémoration d'événements en Afrique du Sud, dont tout le monde se moque. A quoi ça rime de faire une journée internationale contre le racisme, alors que ça n'existe plus depuis belle lurette ? Si on n'encombrait pas la tête des Français avec toutes ces vieilleries, ils seraient assurément plus performants dans la dure compétition internationale. Suppression, dans les grammaires des temps du passé, amendes pour toutes les expressions subversives comme «Je me souviens ». Une race neuve et pure, prête à suivre ses chefs pour aller de l'avant. Vous vous rendez compte du temps qu'on gagnerait, aux élections, si on n'avait plus à se souvenir de ce que faisaient les candidats, avant ? ·~------------------------------~--------------~· Dijjërences - n" 54-MARS / 986 Il NBREF ___________________ ~ Un mois pas comme les autres L'Algérie à Paris Contrairement à certains, cela ne nous effraie pas ! Ainsi, sous l'impulsion des ministères de la Culture français et algérien, Paris et sa banlieue, et un peu Marseille, vivent à l'heure algérienne pendant un mois, jusqu'au 20 mars. Tant mieux car l'Algérie bouge, ce qui n'est pas toujours évident. Signe d'amitié et de confiance entre les deux peuples, ce festival concerne presque tous les arts et, avant tout, pour la découverte, la musique « raï », qui a submergé la maison de la culture de Bobigny, puis la grande halle de la Villette, une musique . comparée au blues du « Deep South » des EtatsUnis, à la fois marquée par la nostalgie et par l'expression de pulsions et de dires parallèles à ceux exprimés à haute voix dans le « social » (voir article). Le . rock algérien est là aussi, groupe T.34, ainsi que le groupe de jazz, eh oui, de Safy Boutella, au Rex Club et au New Morning respectivement, à Paris. Au centre Pompidou, une exposition a retracé, jusqu'au 24 février, un panorama littéraire algérien, grâce à des manuscrits et des ouvrages édités à Alger. A la Maison des cultures du monde, le Théâtre régional d'Oran, avant d'aller à la Maison de l'étranger de Marseille, a présenté la dernière pièce d' Abdelkader Alloua, El Ajouad («les Généraux»), fresque dramatique alliant ballades chantées et théâtre SORTIR SANS REVOLVER proprement dit, arabe dialectal et arabe littéraire. Les arts plastiques sont à l'honneur avec 16 jeunes peintres contemporains très intéressants, dans le hall du CNAP (27, avenue de l'Opéra), jusqu'au 13 mars, cependant qu' Abdi Abdelkader présente neuf créations d'ameublement dans le temple du mobilier « in et Starck », chez VIA (1, place SainteOpportune). Enfin, le « clou » des manifestations est la grande exposition, réalisée avec la wilaya de Tamanrasset, « Hoggar », au musée des Arts africains et océaniens, jusqu'au 18 mai. (V air dossier) YVES THORAVAL Informations générales sur le festival : Maison des cultures du monde, 101, boulevard Raspail, 75006 Paris, tél. : 45.44.72.30. Heureusement qu'on a Jean-Pierre Pierre-Bloch et André Santini pour nous mettre en garde, sinon on en arriverait à sortir de chez nous sans revolver, alors que la France, maintenant, c'est carrément Chicago. Les deux compères, candidats de l'opposition aux élections, ont commis le quatre-vingt-septième livre sur la sécurité de l'histoire de la politique française. Grosse campagne de pub sur les murs des grandes villes. Au premier plan, les deux Laurel et Hardy de l'autodéfense, graves, sérieux, responsables, sanglés dans des imperméables de barbouzes. Au deuxième, très innocemment, des Noirs. Sur l'autre photo, une auto qui brûle. Et à côté, devinez? Un Arabe, évidemment. Cousu main DUPONT-LAJOIE ENTRE EN SCENE Jouer le racisme ordinaire sur une scène pour mieux l'analyser. C'est ce que fait le Théâtre de l'Opprimé. Un spectacle sur mesure. A ma droite, le théâtre d'intervention, invention soixante-huitarde par excellence : le théâtre est dans la rue, la rue est une fête, etc. A ma gauche, la réflexion antiraciste et, souvent, le désarroi des gens quand il s'agit d'intervenir concrètement dans une situation de racisme patent. Exemple : vous êtes une femme et, dans le bus, un étranger vous pince les fesses. Que faire pour s'en débarrasser sans qu'il se fasse immédiatement agresser par les témoins ? Ou bien, vous êtes dans un taxi dont le <=l chauffeur tient des propos ~ racistes. Ou bien, vous re- \5 voyez vos parents après deux ..; . · . . . ans d'absence, pour vous Porte de la Villette : le public est aussi sur la scene apercevoir qu'ils sont prêts à gués par les thèses d'Augusto fessée ou du client du taxi. voter Le Pen. Autant de Boa!, monte un spectacle qui De votre siège, vous le dites. situations possibles dont on met en scène ces situations. Qu'à cela ne tienne, on vous se sort difficilement à l'aide Une douzaine de sketchs, fait monter sur la scène, et du discours antiraciste tradi- eux disent « modèles », ins- vous la jouez telle qu'elle tionnel. pirés de situations du racisme vous semble plausible ou A ma droite, le théâtre. A ordinaire. Les comédiens telle que vous voudriez ma gauche, la vie. Rassurez- jouent la scène, à leur façon. qu'elle soit. Le spectateur vous, on va vous aider. Le Vous, dans la salle, vous devient acteur, un débat Théâtre de l'opprimé, une n'êtes pas d'accord avec cette s'installe entre les divers scétroupe de comédiens mar- réaction de la fille pince- narios possibles et, du coup, OMAR L'EPICIER Omar Talb est l'Arabe d'Orsay. Entendez par là qu'il tient une épicerie qui reste ouverte tard le soir et le dimanche, un service apprécié des citadins en panne de supermarché. La sous-préfecture de Palaiseau veut lui faire fermer boutique, pour une sombre histoire d'autorisation qu'on a négligé de lui notifier depuis trois ans. Toute la population pétitionne à tour de bras pour garder son Arabe. Ce n'est pas si souvent ... Différences- no 54- MARS 1986 LAPSUS? Voici le fac-similé du télex pour lequel la Caisse nationale d'allocations familiales notifie aux administrations qu'il convient désormais de supprimer les allocations familiales aux immigrés chômeurs et pré retraités dont les enfants sont restés au pays. Une interprétation fâcheuse et très restrictive des accords bilatéraux avec les pays concernés. La mesure ne viendrait pas directement du gouvernement, qui serait néanmoins au courant. Lapsus ou concession ? sur les meilleures façons de réagir au racisme, voir plus haut les références à 68. Autre originalité du Théâtre de l'opprimé : c'est qu'il ne s'agit pas pour eux de s'enfermer dans un théâtre, devant les simples spectateurs du quartier. Ils font un théâtre à la carte, pour tous ceux qui veulent parler de racisme. Une soirée-débat, une rencontre de comité d'entreprise, une réunion politique, une manifestation culturelle ? Pas de problème, le Théâtre de l'opprimé vient à vous, où et quand vous le souhaitez, et lance le débat grâce à son spectacle. Voilà qui peut changer de l'éternelle cassette-introductive et lancer un débat plus vif, plus concret, donc meilleur. 0 Scènes de la vie raciste au quotidien, par le Théâtre de l'opprimé. Renseignements et réservation à partir du début mars, auprés de Thérèse Berger, Théâtre de l'opprimé, 24, avenue Laumière, 75019 Paris, tél. : (1) 42.05.89.31. • mNTCHAUD ____________________________ ~ Au Nicaragua IMBROGLIO MISKITO Les Sandinistes préparent une nouvelle Constitution. Que vont-ils faire de leurs Indiens ? Le conflit qui oppose deuis cinq ans la commuauté indienne Miskito, Suma et Rama de la Côte atlantique du Nicaragua au gouvernement du pays revient dans l'actualité à la faveur des discussions préliminaires à l'adoption d'une nouvelle constitution bientôt soumise au vote de l' Assemblée nationale. Le gouvernement a proposé à l'étude, au plan régional et national, un texte qui doit servir de base à la rédaction du chapitre Autonomie de la Côte atlantique Ce conflit n'était plus que rarement évoqué depuis la rupture, le 27 mai 1985, des négociations entre le gouvernement sandiniste et l'organisation indienne Misurasata premier, le Misurasata, fut «contra», basé au Costa souvent contre les villages en rebellion ouverte depuis fondé au lendemain de la Rica et dirigé par Eden Pas-· indiens de la zone atlantique 1981. Il avait pourtant été victoire de la révolution san- tora, dont les volte-face ren- en accord avec la politique une des armes privilégiées de diniste par Brooklyn Rivera dent toute collaboration im- i n d i g é n i s t e d e s l'entreprise de déstabilisation et Hazel Lau. Il disposait possible. Sandinistes ... (1). Le Misura du jeune Etat révolution- d'un siège au Conseil d'Etat. entretenait évidemment des naire nicaraguayen engagée En 1981, ce fut la rupture à la 1 liens étroits avec le FDN par les Etats-Unis et la CIA, suite de désaccords avec le Le pasteur renégat somoziste installé lui aussi au férus en manipulation des gouvernement du Nicaragua entraÎne les Indiens Honduras. minorités ethniques et des quant à sa politique d'assimi- Enfin, en mai 1985, le Misectes religieuses (1). Malgré lation à terme des Indiens et Le second mouvement, le satan voit le jour à l'initiative tout, les négociations étaient à de nombreuses « erreurs » Misura, a été fondé par le du gouvernement sandiniste. considérées comme seule- que les Sandinistes ont recon- pasteur morave Steedman Mouvement représentatif, ment« suspendues » et Was- nues ensuite. Fagoth, renégat du Misura- puisque, parmi ses dirihington ne pouvait envisager Le Misurasata fut alors dirigé sata et ancien garde somo- geants, on notait Hazel Lau, une autonomie négociée par Brooklyn Rivera exilé au ziste auquel les Sandinistes cofondatrice du Misurasata entre des Indiens et un gou- Costa Rica. Il entretenait en- avaient imprudemment ac- avec Brooklyn Rivera, et vernement révolutionnaire. viron trois mille guérilleros cordé leur pardon. Fagoth Oscar Hogsdon, membre du Pour éclairer nos lecteurs dans la zone atlantique. avait emmené, souvent de conseil exécutif du Conseil dans cette histoire extrême- Brooklyn Rivera a toujours force, une dizaine de milliers mondial des peuples inment complexe, il convient refusé toute alliance avec le de Miskitos en territoire hon- digènes. Le Misatan était évide préciser qu'au moment Misura de Steedman Fagoth, durien. Il y entraînait un demment pro-gouvernedes conversations interrom- et le mouvement « contra » millier de « contras » indiens mental. pues de mai 1985, la « résis- FDN, somoziste, basé au avec l'aide matérielle de la tance » indienne n'était pas Honduras. Il eut également CIA et d'instructeurs venus Les premiers contacts d'ocmonolithique, tant s'en faut . toujours beaucoup de diffi- des Etats-Unis. Les raids tobre 1984 entre les SandiIl existait alors trois mouve- cuités à s'entendre avec meurtriers se sont multipliés nistes et le Misurasata (1) B ments indiens distincts. Le l' Arde, autre mouvement en territoire nicaraguayen, avaient abouti à une pre~~==~==Charles 27 mars 2014 à 15:22 (UTC)--------------~~----------~ mière rencontre entre Brooklyn Rivera, Daniel Ortega, chef du gouvernement, et le père F. Cardenal, ministre de l'Education nationale. Le 8 décembre 1984, à Bogota, le gouvernement fit une première proposition repoussée par Brooklyn Rivera pour ne pas garantir clairement l'autodétermination des Indiens. Deux nouvelles réunions, en mars 1985 à Bogota à nouveau, et en avril à Mexico n'aboutirent pas davantage. Il semble que Brooklyn Rivera se soit alors livré à la surenchère. Alors qu'on touchait au but et qu'on débattait du choix d'une tierce partie garante de l'application des accords, il se prononça pour le Conseil épiscopal. Or, ce dernier, et son chef hiérarchique Mgr Obando y Bravo, ont toujours été clairement hostiles des négociateurs sandinistes de Luis Carrion par le ministre de l'Intérieur, Tomas Borge, héros de la Révolution; trop dogmatique. au gouvernement de Managua. Il eût paru plus logique que Brooklyn Rivera désigne l'Eglise morave, celle 1 des Miskitos, d'ailleurs présente aux négociations depuis le début en qualité d'observateur. Mais, pour le Misurasata, l'Eglise morave est « vendue aux Sandinistes » ! Une contrevérité puisque de nombreux pasteurs et fidèles moraves, regroupés autour de Steedman Fagoth, firent des séjours en prison plus ou moins longs pour activités contre-révolutionnaires. Néanmoins, malgré cette rupture, le gouvernement nicaraguayen décida d'autoriser le retour progressif dans leurs villages des communautés Miskitos, Suma et Rama, qui avaient dû être déplacées vers l'intérieur du pays en 1982 au plus fort des attaques des « contras » du FDN, dans la région du Rio Coco, ainsi que celui de milliers d'autres familles indiennes exilées au Honduras. Les Miskitos bénéficiaient également de la loi d'amnistie décrétée par le gouvernement

deux mille d'entre eux

qui avaient été mêlés à des activités contre-révolutionnaires purent regagner leurs villages. Aucun Indien ne se trouvait plus en prison fin juillet 1985. Quand tout semble rentrer dans l'ordre tout se complique 1 Une compagnie de guerriers sioux Par ailleurs, les Sandinistes avaient été indisposés par certains observateurs imposés par Brooklyn Rivera, particulièrement des Américains du Nord, présentés par celui-ci comme des « ethnologues » et des « supporters des luttes indiennes ». Sans parler de Russel Means, de l' American Indian Movement des Etats-Unis (AIM) qui agita la menace d'envoyer au Nicaragua une compagnie de guerriers sioux pour assurer la défense des Miskitos ! Un autre facteur défavorable fut le remplacement à la tête Différences- n• 54 - MARS 1986 Tout va bien, donc? Non, l'imbroglio est total. Qu'on en juge : d'abord, Steedman Fagoth a été expulsé du Honduras, le 7 janvier 1985, et a rejoint les Etats-Unis. Puis, le gouvernement nicaraguayen a passé à la mi-mai des accords discrets avec le Mis ur a (qui était pourtant l'ennemi juré à la fois des Sandinistes et du Misurasata), garantissant des accords de cessez-le-feu et la protection des Miskitos rapatriés vers le Rio Coco. Le principal acteur de ces accords, Eduardo Pantin, mourut peu après, vraisemblablement assassiné. Le 16 juin 1985, la commission Asla est créée afin d'unifier les groupes de résistance indienne au sein d'une organisation qui assurerait le développement du projet d'autonomie indienne et la préparation d'une assemblée générale. A la direction de l' Asla, Brooklyn Rivera, Wycliffe Diego et Jenelee Hodgson. Puis, début septembre 1985, le Misura et le Misurasata, hier ennemis irréductibles, se sont fondus en une seule organisation, le Kisan. Si, logiquement, Steedman Fagoth a été éliminé, Brooklyn Rivera a subi le même sort. Mais ce dernier continue de diriger un Misurasata fortement affaibli et de garder le contact avec Managua. Dans un communiqué de l' Asla daté du 12 setembre 1985, son secrétaire exécutif, 1\22] Miskitos llilll Sumus ~ Ramas - Noirs. Créoles territoire national, ainsi que l'unicité du peuple du Nicaragua. Il reconnaît la spécificité des peuples Miskitos, Suma, Rama et créole, garantit leurs différentes expressions culturelles et leurs langues, ainsi que la légitimité de leurs revendications. Il est à remarquer que le projet sandiniste prend en compte les quelque 30 000 « Créoles » ( criollos) qui vivent dans la Côte atlantique et qui ne sont pas toujours solidaires des Indiens (3). M e r Les populations indiennes au Nicaragua et Honduras. Delano Martin, condamne la création du Kisan qu'il désigne comme une manoeuvre du FDN pour en tirer un avantage politique en faisant ainsi croire qu'il a les Indiens de son côté (2). Quoi qu'il en soit, le gouvernement nicaraguayen est décidé à poursuivre son action pour accorder l'autonomie aux Indiens et créoles de la Côte atlantique. Mais il semble que son projet actuel ne diffère pas de la déclaration de principe que Lumberto Campbell, vice-ministre de la Côte atlantique, présenta en juillet 1981 aux Nations unies à Genève, lors de la Conférence internationale des ONG sur les peuples indigènes et la terre, et qui a toujours été rejetée. Ce nouveau texte établit l'indivisibilité et la souveraineté de l'Etat sandiniste sur tout le La seconde partie du texte définit les droits particuliers de ces communautés (langues, cultures, religions , coutumes, la propriété , la possession et l'usufruit de la terre, des forêts et des eaux) et les conditions de leur représentation à l'Assemblée nationale. Ce texte est encore imprécis et il faudra vraisemblablement encore des négociations avant d' aboutir, d'autant que l'état d'urgence proclamé par les Sandinistes n'est pas de nature à favoriser le dialogue.D ROBERT PAC (1) Voir Différences n• 42 - Février 1985. (2) In Akwesasne Notes volume 17, n• 6, Early winter 1985. (3) Contrairement à la définition du dictionnaire, au Nicaragua le terme « créole >> (criollos) désigne les descendants des anciens esclaves africains noirs qui ont été très fortement métissés avec les Amérindiens. Il ENCONTRE ____________________________ , Spécial 16 mars ATTENTION, ELECTIONS Nous avons passé tous les programmes électoraux au banc d'essai. Voici les propositions de chacun sur l'immigration. •••••••• L e syndrome du 16 mars 1986, observé depuis des S'appuyant sur les acquis du début du septennat. Le PS veut maintenir la situation actuelle, qu'il trouve juste, sur le principe de l'égalité des droits des travailleurs. On précise que « tout élargissement des droits sociaux devra bénéficier à l'ensemble des travailleurs sans distinction d'origine ». Le système actuel, qui verse pour les enfants d'immigrés restés au pays des prestations au prorata de celles du pays d'origine, n'est pas remis en cause. Sur ce point, le PS est gêné par les restrictions mises en place récemment par la CNAF, qui supprime les allocations aux étrangers chômeurs dont les enfants sont au pays. Gêne également sur le droit au regroupement familial, réaffirmé, mais en contradiction avec l'action du gouvernement qui l'a assorti de nouvelles contraintes. Ces points sont contestés par le PCF, qui souhaite que l'égalité des droits soit respectée y compris pour les familles resgrands renforts de pub, sur ce point précis de leur programme commun. Le RPR a, en effet, fait sienne depuis longtemps et appliqué à Paris, une mesure discriminatoire prônée par le FN (1). Il s'agirait, au nom d'une politique nataliste, de ne plus verser aux immigrés les prestations sociales dites « à vocation démographique >>, telle la prime au troisième enfant. C'est oublier que les incitations natalistes n'ont jamais fait augmenter le nombre de bébés en France . M. Toubon, surtout, a eu du mal à expliquer, à L'heure de vérité, comment le fait de priver les immigrés de ces prestations allait encourager les Français à faire plus d'enfants. A l'UDF. sous l'influence de personnes comme M. Stasi, sous la pression de Raymond Barre qui avait trouvé inconstitutionnelles de telles propositions. on a refusé tout net d'inclure cette mesure dans le programme commun. D'où disputes. mois, voire des années, a, au moins, deux avantages. D'abord, l'immigration n'a pas été, comme on le craignait, au centre de la campagne électorale. La cohabit ation , morne invention d'une démocratie qui s'encroûte, lui a ravi la vedette, et c'est tant mieux, parce que l'usage veut, hélas, qu'on dise statistiquement plus de bêtises sur l'immigration que de vérités. A part les habituels excités de l'Occident en danger, aucun parti politique n'en a vraiment fait son cheval de bataille, au moins au plan national, car dans la chaleur des réunions locales, les langues se délient. Deuxième avantage, on a un peu rangé au placard les grandes idées vagues, l'Immigration avec un grand 1, celle qu'on agite comme un épouvantail, pour batailler sur des points plus précis. On a, un peu, dégonflé le « problème >> de l'immigration qu'on arrivait mal à faire "' durer, tant il n'existe pas, '-.....,,.._....,.......,,__.""""'"'"'"'·•*""""'"-'""*" i ~ pour s'opposer sur des 1 -.: ' d ~ mesures a pren re ou pas, ci des lois à voter ou à abroger, programmes obligent. Qui est français ? Personne n'est d'accord ... Pris dans les Boûches-duRhône, en janvier 1986 : attention au virage à droite ... Petit détail : Le panneau est criblé de balles. A éplucher ces programmes, tées au pays, chiffre la Malthusianisme libéral traction s'aperçoit vite que tous les s o rn rn e non versée à tionnel qui fait qu'à l'UDF on partis se sont polari~és ~ur l~s 1,5 milliard de francs, et de- ne croit guère aux campagnes mêmes points. Celm qm a fmt mande la stricte application natalistes chères aux gaulcouler le plus d'encre, ce sont du droit au regroupement listes, humanisme bon teint les prestations sociales. Vieil familial. A droite , grand ou souci de se démarquer du argument du racisme, c'est branle-bas dans Lander- RPR ? De fait. la différence sur ce chapitre qu'il y a le neau : le RPR et l'UDF au- tant vantée tient surtout au Ill L_------------------------~p~l~u~s_d_e_d_i_ff_é_r_e_n_ce_s_. _________r_ a_ie_n_t _f _a_i_ll_i _s_ e _f_ â_ch_e_r_,_ _à_ __d _e~g~r_é_d_e_c_o_n_v_i_ct_io__n _n_ a_ta_l_is_t_e_.1 Autre débat, l'acquisition de la nationalité française. On est revenue à cet égard, entre la droite et la gauche, à une vieille querelle juridique, loi du sang ou loi du lieu. Pour la gauche, est français, grosso modo, celui qui naît en France ou épouse un( e) Français( e). C'est la loi du lieu, tradition de la République française , une seule fois remise en cause, soulignent PS et PCF, sous Pétain. Pour le PS, l'acquisition de droit de la nationalité française pour les enfants nés en France est partie intégrante d'une politique d'insertion des étrangers qui le désirent dans la société française. Même position au PCF, qui insiste de plus sur les moyens nécessaires pour faciliter les naturalisations (gratuité et s i rn p 1 i fi c a t i o n d e s d émarches). Le RPR et l'UDF sont revenus, quantàeux, àlaloidu sang. Même nés en France, les enfants d'étrangers devront mériter la naturalisation. Plus d'automatisme, il faudra prouver son désir d'intégration et demander la nationalité française , qu'on accordera après enquête. notamment sur la loi de 1981 établissant les droits des immigrés clandestins dans les procédures d'expulsion. Le PCF note que cette loi n'est pas appliquée et demande plus de rigueur contre les employeurs de sans-papier. La plate-forme RPR-UDF reste vague, mais pour le RPR il ne fait aucun doute qu'il faut rétablir la loi « sécurité, liberté » et les contrôles d'identité, ce qui implique, dans ce cas, le retour de la chasse au faciès. Il demande aussi l'instauration de visas pour tous les étrangers non européens. L'UDF ne réclame pas le retour de la loi Peyrefitte, mais demande l' instauration de papiers d'identité dits « non falsifiables ». Quant à Raymond Barre, qui n'aime pas les programmes, il reste vague sur les mesures envers les clandestins. Il est intéressant de noter que toute l'argumentation barriste sur le sujet réside sur ce postulat, plusieurs fois énoncé : ne poussons pas à bout les immigrés qui sont chez nous, . car ils pourraient se transformer en minorités organisées et révoltées, pilotées, pourquoi pas, de l'extérieur. 1 Quelques couacs dans l'harmonie des discours de campagne Même clivage sur le droit de vote. F. Mitterrand a solennellement rappelé son attachement à cette proposition. Le PS l'avait un peu oubliée, mais l'a remis en fin de compte à son programme. Le PCF, qui a adopté cette proposition en 1985, s'y tient. Pas question pour le RPR ni pour l'UDF. Contrôle des naissances, acquisition de la nationalité, droit de vote, on voit ce qui se joue : deux conceptions de 1 'identité française. Mais aussi deux conceptions de la société. Si tous les partis sont d'accord, pour des. raisons différentes, pour lutter contre l'immigration clandestine, chacun ne propose pas les mêmes solutions. Le PS s'appuie sur la politique actuelle du gouvernement, et Même goût de l'« ordre >>, à droite, quand il s'agit de lier immigration et délinquance. Pour Barre, la délinquance est notable, bien qu'elle doit être traitée dans le cadre de la déliquance en général. Pour le RPR, le lien est patent. Jacques Chirac affirmait face à L. Fabius que 40 % de la déliquance parisienne est étrangère (2). Les partis de gauche continuent globalement, à ne pas lier les deux points. Terminons par le consensus : le refus de gouverner avec Le Pen. Le problème ne se pose pas pour le PS et le PCF. Le RPR , par la voie de J. Chirac, s'est engagé à ne pas participer à un gouvernement où siégerait le FN. Quelques personnalités de l'UDF l'ont fait aussi. Mais ... J. Chirac s'est engagé au niveau gouvernemental, laissant à Le Pen le soin de préciser qu'au niveau local tout est possible, comme le prouvent les assemblées corse et néo-calédonienne. Quant à l'UDF, si elle compte des Stasi, elle a aussi ses Griotteray, qui n'ont rien à envier au FN sur cette question. Jean-Claude Gaudin clame chaque fois qu'il le peut qu'il s'alliera à Marseille, si nécessaire, avec l'extrême droite. Raymond Barre oscille entre le brevet de respectabilité et la condamnation. Le consensus n'est plus ce qu'il était. Dans l'analyse d'un phénomène, les écarts sont parfois plus significatifs que les moyennes. On notera donc, pour terminer , quelques couacs dans la belle harmonie des discours de campagne. A tout seigneur tout honneur, le Premier ministre s'est mal remis du semi-quitus donné à Jacques Chirac sur l'immigration dans leur face-à-face télévisé. Le PCF, fortement secoué dans ses rangs par la faute de Vitry/Saint-Maur en 1980, a redressé la barre. On ne citera pas, par pure délicatesse, la défense de Le Pen par Raymond Barre en 1984 et son vigoureux « Travail, famille, patrie >>, ni l'interview de J. Chirac à Libération où il préconisait le retour en masse des immigrés, retour payé ... par les cotisations des immigrés, ni enfin l'« espoir de Dreux >> qui concluait l'édito de Peyrefitte au lendemain de l'élection, dans cette ville, d'une liste RPR-UDF-FN. Pour éviter ces tentations malsaines, le MRAP a fait parvenir à tous les candidats un texte qui les engage, s'ils le signent, à respecter la législation antiraciste et les acquis des immigrés. On verra ... J.-M. O. (1) Le MRAP a d'ailleurs attaqué M. Chirac en justice sur ce point. Ce qui n'empêche pas ce dernier de multiplier les grandes déclarations contre le racisme. (2) A dire vrai, le thème a été tant et tant martelé qu'il est devenu quasiment implicite, ce qui est plus commode. Ill Différences-n• 54-MARS 1986 RUUGÉS ____________________________ ~ Délinquance EXCLUSION REPRESSION ..; Sait-on vraiment pourquoi les hommes volent ? Exclusion, délinquance, répression, les trois passages quasi obligés du chemin. Le phénomène de la dite « petite délinquance » défraie canettes de bières en rayon, sera abattu au Radar de la chronique. On s'en sert pour justifier la« légitime Livry-Gargan par un vigile, en présence de policiers. Son défense », les milices, la flambée sécuritaire et on meutrier sera condamné à 5 ans de réclusion, dont 3 avec renvoie trop souvent dos à dos de piteux meurtriers, de sursis par la cour d'assises de Bobigny, le 14 juin 1985, soit pitoyables braqueurs et d'innocentes victimes. Est-il juste deux ans de prison effective. de poser en prémisses l'exclusion sociale pour tout A coup sûr, il s'agit là d'un phénomène de société .qui expliquer, sinon légitimer ? atteint également les jeunes de toutes origines, même si Ce serait trop facile et simplificateur. Il existe de petits ceux d'origine étrangère, plus visibles, plus soupçonnés, voleurs, de petits escrocs, de petits indélicats qui n'ont plus contrôlés, sont plus souvent attrapés et confondus. jamais fait usage d'une arme, mais ont coutume, souvent Parmi eux, d'ailleurs, des jeunes à la carte d'identité ou parfois, de berner la société de consommation, incarnée française, maghrébins, antillais, réunionnais. Ainsi Patrick par les grandes surfaces ou les petits commerces. Ceux qui Mirval, Antillais, se fait prendre avec un copain français à se livrent à un tel sport ne sont généralement pas ramasser les pièces de monnaie « recrachées » par un dépourvus de moyens de subsistance et échappent aux distributeur de tickets de métro. Le copain sera vite relâché catégories statistiques favorites : ni orphelins, ni enfants de de Fleury. Patrick, lui, mourra au cours de son transfert au couples séparés, ni sous-prolétaires, ils sont contaminés par « mitard », de mauvais traitements, le 22 février 1974. Le la facilité ambiante, la perte du tabou de la propriété, le meurtrier présumé, un maton, se trouve encore actuellegoût du « qui sera le plus malin ». ment en liberté. Il est rare que les plus sportifs, les mieux organisés et les Il y a, bien sûr, plus flagrant encore : le cas de ces jeunes mieux entraînés se fassent surprendre. Ce seront donc les français ou immigrés, parfaitement innocents, morts sous moins malins, les moins branchés, dans la plupart des cas, les balles de tontons-flingueurs racistes ou sécuritaires. les plus dépourvus de fric qui seront les premiers pincés. Malheureusement, en donner toute la liste ne sert à rien : Les plus repérables, aussi : les jeunes, les basanés ou ceux la délinquance qui inquiète les Français, aujourd'hui, n'est qui sont les deux à la fois. Dans les grandes surfaces de la pas celle des meurtriers, mais celle des petits voleurs et région parisienne, il se passe de grandes indélicatesses, petits braqueurs. On s'est habitué à entendre le mot, portant sur des sommes importantes. Mais ce ser_a « insécurité » dans un sens univoque : ce qui perturbe ·la précisément le jeune Maghrébin qui a voulu s'approvt- vie des braves gens. sionner en baskets sans passer à la caisse qui sera poursuivi Mais qui songe, et qui plus est parle, de l'insécurité qui est m le premier. Le 17 juin 1983, Moussa Mezogh, 19 ans, pour devenue, dans certaines villes, le lot quotidien des L....:u::n::..:e~te::..:n:.:.t:..:a:.:.tt:.. v....:.e_d_e_v_o_l_d_e_b_l_o_u_s_o_n_et_la.__c_o_n_s_o_m_m_a_ti_o_n_d_e _a _d_o_l_e_sc_e_n_t_s_b_a_sa_n_e_s' ..;,._u_n_iq;_u_e_m_e_n_t p_a_r_c_e____;q;...u_'i_ls_s_o_n_t_d_e_J jeunes Arabes ? Création de la milice « les Chevaliers de Roubaix », existence de facto de milices semblables de villes ou de quartiers qui poursuivent les jeunes d'origine immigrée, à la nuit tombée. Qui parle des « videurs » de boîtes de nuit qui tuent à Lyon, des jeunes nazillons qui harcèlent à Troyes ? Que dire alors du sentiment de tragique insécurité des familles des cités populaires de France, des familles maghrébines en particulier, qui craignent chaque jour, chaque soir, pour la vie de leurs enfants ? Insécurité singulièrement renforcée par les bavures de policiers , gendarmes ou CRS. La série noire commence le 23 août 1977, avec Mustapha Boukhezzer, tué à bout portant par un policier à Chatenay-Malabry. Elle s'allonge d'année en année. Qui est petit délinquant ? On le sait, il s'agit presque toujours de jeunes adolescents, de sexe masculin, de cités populaires, de préférence au « type méditerranéen » ou bien plus simplement « loubard ». A ceux-là, on ne pardonne guère, on les soupçonne a priori, on les contrôle systématiquement, on les accuse plus sur leur réputation que sur preuves, on les interpelle, y compris par la force, ils finissent plus souvent que des jeunes « de bonne famille » en détention provisoire. Sol}t-ils plus coupables ? Les jeunes des milieux soêiaux les plus défavorisés, qu'ils soient français ou d'origine immigrée, sont, avec leurs parents, dans le champ de mire des services sociaux ; assistés et surveillés, ils deviennent socialement plus visibles. De plus, l'engrenage de l'assistance crée l'irresponsabilité. Au lieu de reconnaître aux familles les plus défavorisées le droit à la formation, au travail et au revenu de leur travail, la société perpétue ou crée des nouvelles catégories de populations sous-prolétaires incapables de se gérer : c'est ainsi qu'on enlève les enfants à leurs parents plutôt que de les aider à les élever. C'est ainsi qu'on crée les soupes populaires, les bons d'assistance des mairies, les lieux d'accueil qui font éclater les familles. Enfin, la société qui les assiste, les fait à peine survivre, tout en exerçant un contrôle sur eux (gestion obligatoire des budgets familiaux sous surveillance, en cas de dette envers les sociétés HLM) est la même qui les pousse à la surconsommation. La publicité tend à rendre de plus en plus d'objets « nécessaires ». 1 Un jeune, pris à roler une bricole à douze ans, sera fiché à la Police jusqu'à la fin de ses jours. La notion de propriété pnvee, naguère identifiable et sacro-sainte se dilue dans le gigantisme des magasins de distribution, entraîne l'atténuation de la gravité sociale du vol : voler dans un rayon d'hypermarché, ce n'est voler personne puisque ce n'est pas voler quelqu'un de précis. Ce n'est donc pas si grave. On commence par voler des bonbons, des confiseries, un vélo parce que celui des autres gamins est si rouge et si beau et qu'on n'en a pas ... Différences- n• 54- MARS 1986 Ainsi témoigne Ahmed : «Je suis arrivé en France tout jeune. J'ai vécu dans une ZUP où il y avait des Français et des étrangers. Mon père travaillait, ma mère restait avec les enfants. J'étais toujours dehors et je voyais les autres gosses qui avaient d'abord des vélos, puis des mobylettes, puis des voitures. Et moi, j'ai piqué des vélos, des mobylettes, des voitures, pour avoir comme les autres, puis des trucs pour avoir du fric. >> Tout va bien tant qu'on ne se fait pas piquer. Mais aujourd'hui , pour les petits délinquants, il n'y a plus guère de possibilité d'échapper ; tant de flics , de vigiles , de maîtres-chiens... Un jeune, s'il est pris à 12 ans sera désormais fiché au commissariat et donc, « connu des services de police ». Un enfant de famille aisée sera plus probablement reconduit à ses parents. Dans la plupart des cas, l'affaire en restera là parce que les parents, alertés, feront le nécessaire pour que l~s choses évoluent. Est-ce à dire qu'il y aurait une fatalité pour les enfants de familles en difficulté ? Là encore, généraliser serait une grave erreur. Combien de familles nombreuses d'origine étrangère, avec toute le déracinement que cela représente, ont élevé admirablement leurs enfants, garçons et filles en faisant des hommes et des femmes responsables . Cependant la pauvreté et l'exclusion sociale, l'inégalité, surtout si elles se retrouvent de génération en génération ou si elles apparaissent comme un mur infranchissable. sont étroitement liées à la délinquance : pas de travail, pas de domicile fixe, pas de moyens de subsistance, solitude. rejet par les autres membres du corps social. Et un beau jour, c'est la condamnation et l'emprisonnement ou. pire encore, la prison avant la condamnation. la détention provisoire destinée à assurer des garanties de représentation (éviter que le prévenu ne « disparaisse ») et éviter des troubles à l'ordre public. « L'emprisonnement est vécu par la population sousprolétaire, et par la plupart des détenus, quelle que soit leur origine sociale, comme une des formes les plus aiguës d'exclusion. Physiquement, le détenu est exclu, mis à l'écart de la société : aux yeux de celle-ci, il constitue un danger social, il doit expier une faute ... Intervient ici un sentiment de culpabilité ... [Mais] ce sentiment de culpabilité, renforcé par une condamnation pénale, lui est par ailleurs antérieur: point n'est besoin d'une juridiction pour condamner le sous-prolétaire. Les voisins, le quartier, la famille, l'accablent ... culpabilité interdit tout misme et maintient la sonne dans une qu'elle imagine méritée. DES ÉQUIPES DE PROFESSIONNBS RÉPONDENT A VOS BESOINS e mobilier et agencement de vos locaux • fournitures de bureau e informatique et bureautique e matériel et fournitures d'imprimerie • matériel et équipements de sport GIKO 28, rue pa.sfeur 94800 villejuif tél. :46 7722 60 LE CONTACT.;. NOUS AUX P11 ON ASSURE! que cene culpabilité est vécue par tout un peuple, elle devient collective, elle s'accompagne de ségrégation sociale. (. .. ) La prison s'inscrit dans la destinée de ce peuple et devient un lieu de passage obligé pour les plus exclus ... (ATD- Quart monde, IGLOO n• 93-94.) L'analyse ci-dessus est applicable, avec quelques variantes, aux jeunes d'origine immigrée

exclusion qui fait un

peuple d'exclus un peuple~ voué à la marginalité et donc à ~ la prison. Voici le témoignage~ de M ... recueilli en 1984 : ~ ~ Un jour je me suis retrouvé <'i en prison. Là, on est des~ « merdes », des « chiens ». Et"' les • merdes », on/es fout à la poubelle. C'est ce que pensem les matons. A la prison, c'est pire que dehors, on est encore plus solitaire, plus dans la merde, pour étouffer. A la prison, il y a 5 000 taulards, violeurs, braqueurs, jeunes, vieux ... C'est le • chacun pour soi et Dieu pour tous » ou en plus direct : le premier baise l'autre. C'est la société, la «justice » qui font les délinquants ... J'ai essayé de me réinsérer, j'ai frappé à toutes les portes et on me les a toutes claquées à la figure parce que j'avais l'image du taulard, c'est-à-dire la peste. • Et ainsi de suite, pour ne pas revoler, recel et re·prison : « Je me suis retrouvé avec les mineurs. C'est un mrtre monde, les m{)mes se retrouvaient à trois dans une cellule pour deux mal nourris. En plus, un m{)me, à seize ans, ça ne sait pas gérer son budget. Et puis, il y a les • roxicos ,. qui som au service médico-psychiatrique. Ils sont bourrés de médicamellls. Les psychiatres les défonce/11 comme dehors. Puis, peu à peu, on diminue les doses et il n'y a plus de doses du tour, et les mômes s' ouvrenl les veines, ou se pendent. ,. Aujourd'hui, M ... , comme plusieurs centaines d'autres jeunes à travers la France, est en formation d'animateur pour porter secours aux petits frères des ZUP et leur éviter les terribles galères des grands. C'est bien de tirer profit de leur expérience et de la mettre au service des plus jeunes, mais la société, en même temps, ignore les grands comme les petits et s'en remet aux uns pour gérer les autres. « On s'est aperçu, dit M ... , que ce sontlesjermes des ZUP, en tant qu'animaleurs-éducateurs, qui peuvent arranger les merdes» ... Quand on a lité /BURB délinquant, qu'on a connu la galère, comment s'en sortir ? Reprendre goût à la vie ? Ceux, par exemple, qui ont entamé, il y a trois ans déjà, une formation mise en place par le ministère des Affaires sociales et de la Solidarité nationale : « Dans le cadre du plan de /uue contre la pauvreté et la précarité, le gouvememenr s'est donné pour objectif de faire accéder d une formation professionnelle reconnue de travailleur social, de jeunes adultes qui, du fait de leur origine sociale et de leur expérience individuelle, seront à méme d'apporter au travail social une dimension el une efficaci.Jé nouvelles. ( ... ) Les candidats seront sélectionnés en fonction, notamment, de critères d' • intention • ou critère personnel. Le programme s'adresse à des personnes ayant manifesté une volonté de • faire quelque chose • pour leur environnement social. Volonté qui s'est Diffluncts- n• 54- MARS traduite par une action (bénévole, militante) et donc l'acquisition d'un certain savoir· faire ( .. .)qu'il faut consolider er enrichir, grâce à la formation, afin qu'il devienne la base d'une démarche professionnelle. (. .. ) Je tiens à insister sur l'importance que j' auache d la réussite de ce programme dans lequel les objectifs de promotion et de promotion sociale som ùrdissociables. • (Georgina Dufoix) Il existe plusieurs façons d'essayer de s'en sortir et d'aider les autres à s'en sortir : par exemple, quand on a été jeune délinquant, qu'on a vécu la galère et l'absence d'espoir, on peut créer une association, comme il s'en est créée des centaines dans toute la France depuis cinq ans. Citons le cas exemplaire de. « Mixtu.re », association de jeunes de Villeneuve-sur-Lot, pour la plupart enfants de familles musulmanes rapatriées dans les bagages de la France après 1962. Tout comme dans l' histoire, dans le jaillissement des jacqueries paysannes et des émeutes de crève-la-faim, coupe-jarrets et mendiants, il y a eu prise de conscience qu'il ne s'agissait pas seulement de cas isolés, qu'il existait des structures d'opposition et c'est ainsi « que certains se sont faits révolutionnaires, conscients et organisés » (ATDQua. rt monde - Igloo n• 93-94). Le même texte souligne que « seule une analyse politique pemrer ce passa8e : perme/Ire au sous-prolétaire culpabilisé et révolté de devenir militant d'une société sans exclusion. Cene perspeclive bouleverse la conception acluelle de l'action préventive à la délinquance. Il s'agit d'abord de rassembler les plus exclus ... » Ne pourrait-on mieux dire encore : il s'agit que les jeunes, les exclus, les délinquants, les anciens délinquants se rassemblent, prennent conscience collectivement dans le cadre de leurs groupes et associations de quartier, de leurs aspirations et motivations profondes, des causes de l'état de délinquance, si lucidement analysées par nombre d'entre eux. Il s'agit qu'ils puissent en faire une · analyse politique cohérente, qu'ils soient partenaires d'une action pour changer la société, pour en faire une société sans exclusion, dans laquelle tous jouissent de droit égaux. C'est loin encore de la politique de prévention mise en oeuvre actuellement. On ne change pas les esprits et les coeurs du jour au lendemain. Mais, pour avancer, il faut clairement savoir où est le chemin. BERNADETTE HEnER OURMÉMmRE--------------------------~ -KURDESQuatre patriotes Kurdes sont abattus par l'armée turque dans le sud-est de la Turquie (15 janvier). -EXCUSESBonn

le jeune député

bavarois Herrmann Fellner (CSU), qui avait tenu des propos antisémites au sujet des réparations demandées au groupe Flick pour l'utilisation de travailleurs forcés juifs pendant la guerre, s'en excuse publiquement à la tribune du Bundestag et auprès du président de la communauté juive ouest-allemande (16 janvier). ---VISA--- Le fils du cinéaste soviétique émigré Andréi Tarkovsky, Andréi, 15 ans et sa belle-mère Anna Egorkina, 85 ans arrivent à Paris à l'issue de longues démarches pour obtenir leur visa d'émigration (19 janvier). MLK--- Célébration aux Etats-Unis de la Journée nationale d'hommage à Martin Luther King Jr. Discours, expositions, concerts, inauguration d'un buste du célèbre pasteur noir au Capitol à Washington. Grand spectacle pour finir dans la capitale américaine organisée p'ar Stevie Wonder. Pour leur part, les membres du Ku Klux Klan ont défilé devant le Capitole et dans plusieurs villes américaines en réclamant la suppression de la journée d'hommage à Martin Luther King (20 janvier). --SACRE--- Le Conseil du grand rabbinat d'Israël interdit à tout juif de pénétrer dans l'enceinte du mont du Temple (où se trouve l'esplanade des Mosquées), à Jérusalem, « en raison de la sainteté de l'endroit>>. Cette interdiction fait suite à une série d'incidents au cours desquels, la semaine précédente, des extrêmistes juifs --· LESOTHO -- Après trois mois de blocus, l'Afrique du Sud provoque la chute du gouvernement du Lesotho accusé d'être solidaire de l' ANC, principale organisation noire luttant pour l'émancipation en Afrique du Sud. Vingt-deux dissidents noirs, tous leaders de l'<< United Democratie Front >>, sont jugés pour haute trahison à Johannesburg. Ils risquent tous la peine de mort (20 janvier). - P'TITS GARS - Début du procès des trois légionnaires accusés du meurtre de Habib Grimzi dans le Bordeaux Vintimille en novembre 83. Ils seront lourdement condamnés, à perpétuité pour deux d'entre eux (20 janvier). --SLEPAK-- Mme Orlovsky demande aux autorités soviétiques qu'à l'occasion du 27' congrès du Parti communiste, sa soeur Marie Slepak soit autorisée à émigrer en Israël au titre du regroupement familial (20 janvier). - CIMETIERESLe vice-président du Conseil d'Etat polonais reçoit à Varsovie M. Sigmund Nissenbaum, président d'une fondation de RFA. Les discussions portent sur la restauration de cimetières juifs de Varsovie (24 janvier). -CHOMEUR?- Le directeur de l'ANPE de Grenoble comparaît à nouveau devant la cour correctionnelle de Lyon. En effet, l'ANPE de Grenoble faisait figurer sur ses fiches, à la demande des employeurs, des mentions excluant les candidatures de Noirs ou d'étrangers. Plusieurs employeurs ont été déjà condamnés le 5 janvier 1982 (24 janvier). - MAUVAIS GOUT- (parmi lesquels des parlemen- Laura Ashley, fabricant de tissus ---PRIX--- Winnie Mandela reçoit le prix Robert F. Kennedy pour les Droits de l'homme 1985 dans un hôtel de la périphérie de Johannesburg. Elle partage ce prix avec deux autres importants militants antiapartheid : Allan Boesak, président de l'Alliance mondiale des églises réformées et Beyers Naudes, secrétaire général du Conseil des églises sudafricaines. Winnie Mandela et Boesak avaient été dans l'impossibilité de se rendre à New York pour recevoir leur prix (26 janvier). ---MORT--- Un écolier noir est tué et trois autres blessés lors d'un rassemblement de 5 000 élèves violemment dispersé par la police, dans un ghetto de Krugersdorp, à 50 kilomètres de Johannesburg (27 janvier). PETITION-- Un demi-million d'Israéliens signent une pétition contre le racisme qui est remise au président du Parlement, M. Shlomo Hillel. Cette pétition a été organisée par le Front de lutte antiraciste qui regroupe 17 formations politiques en lutte contre le mouvement d'inspiration raciste antiarabe << Kach >> du député rabbin Meir Kahana (27 janvier). ---ASILE--- Vingt-cinq assoCiatiOns de défense et d'accueil des candidats au refuge, dont le MRAP, ouvrent à Paris une campagne nationale sur << le droit d'asile aujourd'hui et demain >> (29 janvier). - INDEMNITES - Une cour d'appel américaine déclare recevables les demandes d'indemnisation présentées par les Américains d'origine japonaise au nombre de 120 000 arrêtés sous prétexte de sécurité nationale et internés dans des camps aux Etats-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale (29 janvier). --PAROLES -- Nelson Mandela lui aussi dit non à Botha. M. Pieter Botha annonce que les laissez-passer pour les Noirs seront supprimés avant le 1" juillet prochain (31 janvier). --RAPPORT-- Au moment où le gouvernement turc doit fournir à la Commissiori des droits de l'homme du Conseil de l'Europe son premier rapport sur cette question , le plus grand journal turc Notkta (Le Point) publie la confession d'un policier tortionnaire qui raconte, dessins à l'appui, comment il a exercé pendant plus de sept ans toutes sortes de sévices sur quelque deux cents prisonniers politiques, hommes et femmes (l" février). ---FUSIL--- Youssef Lharbi, un ouvrier de 30 ans d'origine maghrébine, est tué d'un coup de fusil à Sannois (Val-de-Marne) la suite d'une rixe dans un café (2 février). ---ONU--- Nations unies: M. Hermann Klenner, un ancien nazi, est élu vice-président de la Commission des droits de l'homme ! (3 février). --VOYAGE-- En << voyage d'agrément >> en Afrique du Sud, 40 policiers ouest-allemands visitent une école de dressage de chiens et des camps d'entraînement de leurs confrères sut-africains (4 février). - ETONNEMENTLe bureau national du MRAP s'étonne des récentes directives de la Caisse nationale d'allocations familiales de supprimer les allocations versées aux immigrés privés de travail pour leurs enfants restés au pays (4 février). --- AIDES --- Le secrétaire d'Etat américain George Shultz se déclare, devant une commission de la Chambre des représentants, << tout à fait favorable à aider la cause >> de Savimbi, le chef des mercenaires de l'UNIT A, à la solde de l'Afrique du Sud, menant des actions militaires visant à déstabiliser le régime de l'Angola (5 février). --L'ARCHE-- taires d'extrême droite) avaient londonien, met au rebut toute sa M. Pieter Botha propose d'épénétré de force sur l'esplanade production d'un modèle de tissu, changer Nelson Mandela contre des Mosquées et perturbé la parce que le motif imprimé sur deux dissidents soviétiques et un Décès à Paris, à 65 ans, de prière des musulmans, provo- celui-ci évoquait la tristement soldat sud-africain emprisonné Jacques Sabbath, ancien rédac- 11!1 quant des affrontements (20 jan- célèbre svastika, emblème de en Angola. Cette dernière pro- teur en chef de L'Arche, la revue Ill L_~_·e_r~>·_ _______________________H ~it:l:er~(24::~ja:n:v~i:er~):· ____________~ p~o~s~it~io~n~e~st~r~e~je~t~é~e~p~a=r~l~'A~n=g~o_l_a._ ___d_ u~j~u_d_a_is_m__e _rr _a_n~ç~a_is_(~5-~_é_v_ri_e_r~)-~ ~ ~L-------------------------------------------------------------------------------------------~ Le 11 février 1986: Anatoli Chtcharansky libéré. Sur le pont de Glienicke à Berlin, pendant plus d'une demi-heure, on procède aux « échanges d'espions ». ---NAZIS--- Cinq membres d'un groupe néonazi violent << The Order >> dont l'objectif est de renverser le gouvernement américain et de créer un Etat << aryen >> sans juifs ni minorités, sont condamnés à des peines de 29 à 35 ans de prison pour hold-up, cambriolages, racket et plusieurs meurtres (6 février). --ISRAEL-- Une centaine d'étudiants israéliens empêchent, aux cris de <<Vive Mandela>>, l'ambassadeur d'Afrique du Sud en Israël de prendre la parole à l'Université hébraïque. - FLYING DOCWashington contraint le président Duvalier à abandonner le pouvoir à Haïti. La France lui accorde un droit d'asile << provisoire >> (7 février). ---PUNIS--- Le chef de l'Etat sud-africain, M. Pieter Botha, désavoue publiquement son ministre des Affaires étrangères, M. Pik Botha. D'autre part, M. Frederick Van Zyl Slabbert, dirigeant de l'opposition et du PFP (Parti fédéral Différences- n" 54- MARS 1986 progressiste), démissionne après un violent réquisitoire contre le gouvernement et le constat amer d'un << immense sentiment d'absurdité >> (7 février). --EST-OUEST-- Un fermier du nord-est des Etats-Unis mélange des laines de moutons américains et soviétiques pour tisser « une toison de paix >> qui, explique-t-il, contribuera au réchauffement des relations entre les deux superpuissances (8 février). --ROSETTE-- Le grand écrivain noir américain James Baldwin est fait commandeur de la Légion d'honneur par le président François Mitterrand (10 février). ENFIN--- Le dissident soviétique Anatoli Chtcharanski est libéré à Berlin à la faveur d'un échange d'agents entre l'Est et l'Ouest. Il a passé neuf ans en prison (11 février). -RIVOLI-BEAUBOURGUn an après l'attentat antisémite qui l'a ravagé, le cinéma Rivoli Beaubourg n'a toujours pas été reconstruit. Le MRAP lance une campagne avec Jeanne Moreau et Costa-Gavras pour trouver les fonds nécessaires. Il a notamment écrit au Conseil de Paris pour que celui-ci complète la subvention accordée par Jack Lang (11 février). - CONDAMNES - Vingt-six Marocains accusés d'appartenir au mouvement liai Amam (En avant) sont condamnés à des peines allant de trois à 26 ans de prison par la chambre criminelle de la cour d'appel de Casablanca (12 février). - COOPERATION - La société française CGEE Alsthom, qui opère sur le chantier de la centrale nucléaire sudafricaine de Koeberg. près du Cap. a retiré en décembre dernier l'autorisation d'accès au chantier à Cecil Theys. président régional du Syndicat des électriciens (EATUSA). à la suite d'une réunion entre les dirigeants de CGEE-Alsthom. des représentants de la police sudafricaine et de la Compagnie nationale d'électricité (ESCOM). On lui reproche d'avoir participé à une · manifestation antiapartheid (12 février). --CINQ ANS-- Cinq ans de prison, dont trois avec sursis, pour l'assassin de Wahid Hachichi à Lyon. La famille proteste contre la clémence de la peine (14 février). --RIGOLO-- Le maire chrétien-démocrate de Korschenbroich en Rhénanie. démissionne de ses fonctions en raison du tollé déclenché par une remarque antisémite qu'il a\'ait faite le mois dernier en plein conseil municipal. Il avait cru bon de plaisanter en déclarant que. pour équilibrer son budget communaL « il allait fa lloir assommer une paire de riches juifs ».(14 février). --OTAGES-- Un quatrième habitant juif de Beyrouth. enlevé l'été dernier. est retrouvé mort au Liban (15 février). Réalisé par ROBERT PAC Il

Il Djanet. Quand vous arrivez, tout est jaune. Ilfaut plusieurs jours pour que les yeux s'habituent à cette extraordinaire lumière ocre, presque dorée qui .inonde le désert. n faut l'amadouer, la prendre à petites gorgées comme une potion. A l'aéroport, quelques Touaregs, habillés dans un vêtement d'une seule couleur, et des touristes. Des touristes tout de même un peu particuliers, le désert attire à lui des catégories de gens très différents, mais qui ont tous en commun le goût de l'aventure et d'un inconnu que chacun interprète à sa manière. Qu'est-ce qui réunit donc le jeune garçon qui a vendu sa 2 CV pour franchir ce pas vers ce qu'il croit être l'absolu et ce couple de médecins suisses soucieux de faire du tourisme intelligent ? Entre ces deux cas limites, on trouve une palette diversifiée : routards, alpinistes, amateurs de solitude en car climatisé ou à la dure, doux hallucinés ou casse-cou exaltés. Et des «fous de désert», impatients d'avoir leur dose et qui rêvent en secret d'arriver, par la faim, la soif, ou la lente marche à travers les sables, jusqu'à leurs limites les plus reculées, comme ces pèlerins d'antan. L'agence de tourisme algérienne en place à Djanet (l'ONAT) offre deux possibilités : des ballades en Land- · Rover ou des excursions à pied qui peuvent durer de trois à six jours selon la formule adoptée. Mieux vaut partir à pied. ·. Le rythme habituel est de vingt kilomètres par jour. Des ânes chargés de barils d'eau, de Victuailles et du matériel de camping suivent le groupe. Départ avant le lever du soleil, pause-thé, casse-croûte, sieste vers midi jusqu'à quinze heures pendant la grande chaleur, à l'ombre d'un rocher ou d'un bouquet d'épineux. Remise en marche jusqu'au coucher du soleil. C'est l/lle SIRS8IÎIIII UIJÎIIUI IIUI Ile tltJIIIIÏI au milieu Ile nulle llilll Le iythme est régulier, mais pas monotone, aucun oued ne ressemble à un autre. Tout change de couleur d'heure en heure, le ciel, la terre, les rochers, le sable. Ces marches sont épuisantes, mais, étrangement, quand le soir vient, on n'est guère fatigué et l'on se joint volontiers, quand on le peut, aux Touaregs. Ceux-ci ont pour coutume de serVir rituellement le thé trois fois, car, selon le dicton, Le premier est amer comme la vie, le deuxième fort comme l'amour et le troisième suave comme la mort. >> · Des campements sont prévus pour la nuit, mais on peut aussi dormir à la belle étoile. C'est une sensation unique · que de dormir au milieu de nulle part. On a l'impression de disparaître. Les constellations de la nuit prennent possession du désert et l'entourent de leur chape étoilée. Mais, ce n'est guère l'endroit de se laisser aller au lyrisme (qu'il inspire pourtant). Le désert tord le cou à l'éloquence. Il supporte mal le romantisme, le bavardage, l'enflure. Muet, minéral et introverti, il exprime la mort plus que la vie. Il est sec, gigantesque, cahotique. Et il suffit toujours, théoriquement au moins, d'une gourde prématurément vide, de provisions épuisées, d'un scorpion ou d'une cheville foulée pour devenir à jamais prisonnier de cette étendue implacable, bien qu'il devienne très rare qu'un touriste y meure ! On imagine volontiers le désert comme d'immenses étendues de sable. Pourtant celles-ci ne représentent même pas la moitié de la superficie du Sahara. Zones montagneuses et plaines rocailleuses sont bien plus vastes. Espaces lunaires où les rocs noirâtres semblent avoir été sculptés par de mystérieux architectes. Enormes boules de granit, forêts de pierres se succèdent. Et quand, entre les pierres, apparaissent les dunes, douces et lisses et qui montent à l'assaut du ciel, c'est presque un miracle, on croirait voir un ventre de femme. Les dunes, c'est la chair du désert. Des plages de tendresse où il se repose enfin, allongeant son grand corps s~nueux et galbé, plein de courbes et de bosses. .L'inattendu domine. Que fait-il là dans ce creux, cetarbre solitaire et rachitique, piquant comme un chardon ? On le croyait hospitalier et . il blesse. Le désert est un immense mirage. Déconcertant, il ne donne pas ce qu'il promet, mais davantage ou tout autre chose. « Ne cherche pas à lire dans Je desert, écrivait Edmond jabès, tu y trouverais tous les livres ensevelis dans la poussière de leurs mots. » Idriss, le guide, tout en marchant, chantonne à voix basse. En route, il compose·· des poèmes qu'il chante le ~:;;;;...._,.;.,," soir autour du feu de camp. Idriss est un troubadour, en même temps qu'un guide parfaitement compétent. Le dernier jour, alors que nous revenions vers la palmeraie de Djanet, j'ai failli lui demander son adresse. Puis j'y' ai renoncé. o MONIQUE A YOUN Le Hoggar : le paysage reste inchangé, les hommes bougent. ID Désert Le désert, voilà un terme qui plonge notre imagination loin dans le temps passé et à venir du monde, un terme chargé de significations fortes et de représentations multiples. Parmi celles-ci, la plus commune, déjà marquée du sceau du paradoxe, se rapporte au rapprochement entre le désert et l'océan. La muse du désert semble particulièrement sensible aux images qui répètent cette comparaison. On y trouve le flot des dunes, les vagues que forment les ergs, la tempête de sable, et les rives du Sahara. Le chameau devient vaisseau du désert, les oasis des îles, les puits sont des escales, et le premier Français qui ait traversé le Sahara aurait été marin (l). Mais, incontournable différence, le Sahara << a ses humains "• ils y ont laissé des traces, et dans une des versions dramatiques c'est << le pays de la soif"· Dans la conscience collective occidentale, le désert a depuis fort longtemps été investi d'une mystique qui s'est nourrie à plusieurs sources. Ainsi, la spiritualité biblique et chrétienne était pleine de références au désert ; espace et temps hostiles à traverser, mais aussi refuge sûr pour le peuple juif; le désert, lieu de retraite des prophètes et du Christ, lieu où le diable tente, mais aussi où Dieu parle : « Dieu conduit les âmes saintes dans le désert ou dans la solitude pour leur parler au coeur, (Osée II, 14) ,, (2). Mais il est remarquable de constater qu'en France la littérature du désert s'est trouvée fécondée d'une manière exceptionnelle avec la découverte du Sahara, laquelle a accompagné l'expansion coloniale. De manière globale, avant comme après la conquête, deux types d'appréhension du désert se côtoient, se croisent ou se confondent. D'une part, la séduction, la fascination qu'il exerce et qui va jusqu'à << l'abolition de l'être devant l'absolu et l'infini ». André Gide note dans l'Immoraliste : « En ce pays de mortelle gloire et d'intolérable splendeur, l'homme, l'accident humain s'estompe ou s'efface. L'effort de l'homme y paraît laid et nuisible. » D'autre part, cette L'EXPO Un regard se porte sur une région de l'Algérie, le Hoggar. Les collections ethnographiques du musée de l'Homme et du musée des Arts africains et océaniens, ainsi que des collections privées, sont mises en scène dans un environnement qui reconstitue l'habitat nomade chez les pasteurs Touaregs Kef Ahaggar. L'espace est recréé par une animation audiovisuelle. L'ensemble suggère les différents modes de vie des popukltions du Hoggar aujourd'hui, les ruptures et les éklns d'une société traditionnelle et son insertion dans un pays en plein développement. Une invite entre ville et désert. Une rencontre avec des hommes plus vraiment mouvants, immobile.~ non plus. Musée des Arts africains et océaniens, 293, avenue Daumesnil, 75012 Paris. Du 21 février au 18 mai. Hommes bleus, Touaregs, parties intégrantes du mythe du désert. Et les femmes ? fascination se double d'une volonté d'affrontement qui se présente d'abord, comme un affrontement à la nature simultanément extasiant et terrifiante. Le père Charles de Foucauld représente l'un des exemples les mieux connus de l'attraction qu'exerce le désert mais aussi (surtout ?) de la volonté de transformer cette terre << virginale >> et, bien sûr, ses habitants. Pour accomplir sa mission évangélisatrice, Foucauld sillonne le désert en faisant des << tournées d'apprivoisement >> durant lesquelles il « décide de donner une aumône de sept francs dans chaque ksar petit, quatorze francs dans chaque grand, vingt et un francs dans chaque très grand» (3). Mais surtout, il va toujours plus loin. Il écrit dans son journal, au moment où il s'établit définitivement dans le Hoggar : «je choisis Tamanrasset, village de vingt-deux feux, en pleine montagne, à l'écart de tous les centres importants. Il ne semble pas que jamais il doive y avoir ici garnison, télégraphe, Européens ; de longtemps il n'y aura pas de mission :je choisis ce lieu délaissé, et je m'y fixe , (3). Les mythes aussi ont besoin de se nourrir aux portes du réel. C'est donc la conquête de l'Algérie et du Sahara algérien qui vont rapprocher le désert de la France et permettre aux divers explorateurs, etnographes, aventuriers, écrivains, peintres de construire l'exotisme du désert. Ils vont lui donner des contours, des personnages, des histoires qui s'appuient sur l'idée de la mission civilisatrice. Ils seront en cela les continuateurs et les relais de la notion de progrès. La destinée prométhéenne de l'homme est une fois de plus réhabilitée avec force. Si l'Orient des Romantiques, pour plusieurs raisons, n'a jamais mobilisé les 1 grandes foules, en revanche le désert, comme sujet ou contexte, touche une grande masse de personnes et leur permet d'échapper aux limites et aux frustrations de la réalité qu9tidienne ; là tout devient possible : l'épopée, le courage, les amours impossibles, la rencontre avec l'infini et l'absolu, l'aventure, l'inattendu.. . Les textes comme l'Atlantide (P. Benoit), le Petit Prince (Saint-Exupéry), Fort Sagane (L. Gardel), et bien d'autres encore ainsi que les bandes dessinées ont créé un imaginaire collectif auquel il est difficile d'échapper. Les ltlumées de Chlrles de Fouoeu/d: une 1umône de septltBnts d1ns dlilque ksilt petit, t/Uilltltze 1t1na d1ns thilque ltilnd L'annoblissement par le désert se conjugue avec un certain annoblissement de ceux qui y vivent. Ainsi, les Touaregs continuent de fasciner les Européens depuis plus d'un siècle. Ils sont constamment modalisés de toutes sortes d'adjectifs plutôt valorisants. La revue Géo (4) titre «Le valeureux peuple du désert» et le journaliste qui s'est rendu à Tamanrasset remarque « Les hautes silhouettes longitilignes des Touaregs habillés de pied en cap (qui) se détachent avantageusement de la masse bigarrée ... ,, Cette admiration va parfois jusqu'à l'extrême, jusqu'à l'ambiguïté ; ainsi on s'étonne devant «les réflexes étonnants » de «ces hommes du désert» tout simplement parce qu'un jeune rêvé Touareg de 20 ans a choisi le métier de chauffeur, et qu'il n'a rien perdu en changeant de << monture · Hier comme aujourd'hui, le désert signifie avant tout la nature à l'état brut et l'antisociété : << L'homme ici s'abolit, en ce qu'il a de social ou d'artificiel, devant la nature péremptoire, et son apparente démesure. Toute la charge collective qui l'oppresse devient dérisoire : un fardeau d'illusions ; la lumière crue fait l'évidence : ce qui impor te, seul, c'est la vérité humaine que chaque être porte en so1~ et que la foule oblitère. Le désert restitue à l'homme son contenu d'humanité. » Une humanité vierge, non souillée par la société corruptrice, une humanité sans les hommes en quelque sorte (5). Autre temps, autres moeurs, aujourd'hui le Sahara, le décor westernien du Hoggar, représentent pour les amoureux de la mer de sable, les << vraies >> vacances, une sorte de retour à la nature presque obligé : ,, Il y a ainsi dans tout homme moderne une nécessaire quête du désert que quelques-uns réalisent plus intensément et de façon plus sensible que les autres qui ne vivent le désert qu'à l'état d'idée ou qu'à travers le substitut des vacances période d'absence, de déconnextion du temps moderne: de retour charnel au sable, ce sable des plages qui est, même s'il est souillé, la rencontre de tous les éléments archaïques : eau, terre, air, feu, et qui est aussi bien sûr la limite sensible du monde civilisé. (2) ,, Le besoin du mirage désertique ne va pas parfois sans quelque ambiguïté. Ainsi, la condescendance, que l'on exprime parfois à l'égard des hommes <<authentiques,, qui vivent dans le désert, s'accompagne souvent d'une certaine désolation devant le fait que les nomades se sédentarisent qu'ils conduisent des camions au lieu des caravane~ d'antan, bref, que la modernité s'installe aussi aux confins du désert. · Espace à coloniser - civiliser, prétexte à rêver, le désert offre des images parlantes aux fantasmes du sédentaire en crise ; l'espace céleste a pris depuis quelques années le relais de ce lieu imaginaire où distance spatiale et distance temporelle se confondent. L'un et l'autre nous permettent de transgresser plus ou moins merveilleusement notre destin moderne. Si la guerre n'a pu être évitée au Sahara, espérons que le destin nous épargnera la guerre des étoiles. 0 CHER/FA (1) Connaissance de l'Afrique, le Sa-. hara avant le pétrole, Guy Le Rumeur, Société continentale d'éditions modernes illustrées, 1960. (2) Le Désert nécessaire, Jean Robert Henry, in revue Autrement, série 5, n• 83. (3) Charles de Foucauld, René Bazin, oc Plon, 1921. ~ (4) N• 70, décembre 1984. ~ (5) Sahara, François Vergnaud, ~ Petite Planète. ~ ~ IVRES ____________________ ~ Sid-Aii Melouah : BD réalistes BD ET TAPIS VOLANTS. « Il n'y a pas de raison qu'un petit garçon algérien s'identifie à Goldorak ! », s'exclame Sid-Ali Melouah. « Les auteurs de bande dessinée, qu'ils soient Français, Belges, Italiens ou Américains produisent tous en fonction d'une vision typiquement américaine qui est le western. L'originalité de la bande dessinée algérienne, c'est de traiter des sujets qui lui soient propres, avec des héros qui ont des têtes d'Arabes, non de Suédois ou d'Amerloques, et des fictions qui conviennent à des imaginations nourries de batailles au sabre, de djellabahs qui volent, de youyous de femmes et de contes des mille et une nuits. » Sid-Ali Melouah pense au contraire que la bande dessinée, outre sa fonction nécessaire de pourvoyeuse de rêve et d'évasion, peut être utilisée de façon positive et mise au service de la sécurité, de l'éducation, de la fraternité entre les peuples. « Par mes dessins, déclare Sid-Ali, j'aimerais faire rêver les gens sans pour autant perdre de vue que nous avons un passif culturel à récupérer et qu'il est nécessaire de traiter des thèmes qui concernent la société algérienne. » La bande dessinée de Melouah confirme que rêve et réalité ne sont pas inconciliables. Avec un grand souci de véracité historique, il part d'éléments réels et vérifiables pour ensuite donner Celui qui nous assène cette affirmation libre cours à une imagination débridée, carrée - mais si profondément juste - où pirates enturbannés, bateaux ailés, c'est un garçon très doux et très sen- étranges tapis volants (Sid-Ali propose, sible, mais qui est parfois agacé par un en effet, une vision toute personnelle et dernier carré de rétrogrades qui contes- futuriste des traditionnesls tapis votent l'importance et le bien-fondé de la lants) , se chevauchent et s'entrecroisent BD algérienne ou qui la pensent néces- en un défilé époustouflant. .. sairement porteuse d'un message né- Avant de devenir l'un des principaux gatif venant influencer ou contrecarrer précurseurs de la bande dessinée de Ill L-----------------------------~~-l_e_s_o~p_t_io_n_s_d_u~p_a~y_s_. __________________sc _i_e_n_c_e_f_i_ct_io__n _a _l~g~é_ri_e_n_n_e~,__M_ e_ lo_u_a_h _a _; longtemps fait du dessin d'humour. Mais son inventivité toujours en éveil et son type bien particulier de sensibilité pointue, investigatrice et « questionneuse » devaient trouver leur véritable épanouissement à travers un dessin dit réaliste, lui permettant d'approcher des aspects de la réalité algérienne (dans l'actualité ou dans l'histoire), tout en laissant le champ libre à sa fantaisie imaginative. Ce qu'on appelle la « bande dessinée réaliste », ce n'est pas tant un scénario fondé sur des faits réels, c'est surtout un certain style de dessin qui nécessite une approche en matière d'anatomie artistique. Et en cela Melouah excelle : le tracé de ses personnages est sûr, musclé, et l'identification de son graphisme est en complète harmonie avec les normes qu'il entend donner à la BD algérienne et à l'originalité de celle-ci. On sait qu'en Algérie cette forme d'expression nouvelle, qu'on nomme le 9• art, s'est imposée depuis peu, mais qu'à présent les autorités algériennes prennent conscience de l'importance de cet art. Lors de son bref passage à Paris, nous en avons félicité Melouah qui nous a répondu : « Peut-être que nous, pionniers en la matière, y sommes pour quelque chose. Ce serait en tout cas là notre plus grande satisfaction. » 0 MONIQUE AYOUN Cité interdite, de Sid-Ali Melouah, éd. EN AL. DRAGUE. Comment faire l'amour avec un nègre sans se fatiguer ou les tribulations de deux jeunes Noirs dans un quartier de Montréal, le Carré Saint Louis. L'un est fou de jazz et écoute des disques à longueur de journée en faisant des commentaires très personnels sur Freud, sa vie, son oeuvre ... L'autre tente d'écrire un roman-journal, n'y arrive pas toujours. Il est cent fois tenté de renoncer, mais persiste malgré tout et frappe sur sa vieille Remington, qui aurait - lui a certifié le vendeur - appartenu à Chester Himes ... De quoi A ' rever ... . Des filles partagent leur vie ... passent. .. font un tour de valse ... repartent aussitôt. .. , mais quelquefois s'installent pour une durée plus ou moins longue. Dany Laferrière, l'auteur de ce romanjournal, possède un style vif, mordant, ironique et parfois désespéré... La drague a ses lois, à chacun d'y trouver son compte. 0 J. T. Comment faire l'amour avec un nègre sans se fatiguer, de Dany Laferrière VLB éditeur. Différences- n" 54- MARS 1986 Azouz Begag BANLIEUES. Dans son roman le Gone du Chaâba, Azouz Begag nous conte l'enfance d'un jeune algérien dans les bidonvilles de Villeurbanne, banlieue de Lyon... Bidonville où, malgré la misère, les conditions de vie rudes et précaires, survivent encore l'amitié, les traditions, l'observance des coutumes religieuses et où l'autorité du chef reste toujours indiscutée ... Peu à peu, le bidonville va cependant se dépeupler. Les familles, une à une, vont quitter le Chaâba pour s'installer dans ces banlieues modernes où la fée électricité et la télévision (la tilifiziou) font leur entrée .. . Peu à peu, également, va s'insinuer en Azouz la honte d'être arabe. Il préférera s'avouer juif plutôt qu'Algérien et le jour où sa mère, en costume traditionnel, viendra l'attendre à la sortie des classes, il saura l'éviter et lui faire comprendre que cela ne doit jamais se reproduire .. . Dans un style oscillant sans cesse entre le rire et les larmes, le comique et le tragique, Azouz Begag nous fait vivre l'exode à la fois dérisoire et tragique de ces familles algériennes dans les années 1960-1970. 0 J. T. Le Gone du Chaâba, de Azouz Begag, éd. du Seuil, coll. Points. LES BRAHMANES. Samskara, le roman de l'Indien Anantha Murthy est un roman initiatique. Un homme vient de mourir à l' Agrahara - le village où vivent les brahmanes. Qui va donc se charger de l'ensevelir, ainsi que l'exigent la tradition et les rites funéraires ? Tout ce roman consiste en fait en une réflexion sur la caste des brahmanes et sur leur mode de vie. Les brahmanes sont, en effet, une classe socialement inactive et qui vit des revenus ainsi que des produits de la .terre que quelqu'un d'autre travaille et cultive à leur place. Samskara consiste donc en une critique sociale, une réflexion philosophique et une description minutieuse et passionnante de la vie quotidienne en Inde durant les années 1930-1940. La femme y revêt un rôle d'une importance primordiale, tant par son rôle d'épouse vertueuse que par son rôle de maîtresse initiatrice des plaisirs de la chair qu'un brahmane se doit de connaître et de pratiquer - entre autres - pour devenir un homme accompli. 0 JOELLE TAVANO Samskara, rites pour un mort, de U. R. Anantha Murthy, éd. L'Harmattan, traduit de l'anglais par Anne-Cécile Padoux. NOTRE TERRE. Le titre de cette revue trimestrielle, Nitassinan, emprunté au vocabulaire des Indiens Innus (Montagnais) du Québec, signifie « Notre terre ». Il exprime mieux qu'un long discours la philosophie et le sens de la lutte que mènent les peuples indiens des Amériques. Aujourd'hui , face à la société occidentale , inhumaine et suicidaire à terme, les Indiens apparaissent comme les détenteurs des valeurs qui assurent un avenir à l'humanité. Il est encore temps pour nous d'entendre la parole de l'Indien. Nitassinan en est à son cinquième numéro. Au sommaire, on trouve plusieurs articles sur Léonard Peltier, le leader emprisonné injustement aux Etats-Unis, l'éducation des jeunes Indiens et beaucoup de contes et de poésie. Quatre numéros sont consacrés chacun à un peuple indien. Le numéro 2 parle des Innus (Montagnais) du Québec, le numéro 3 des Navajos et des Hopis du sud-ouest des Etats-Unis, le numéro 4 des Indiens « français » de la Guyane et le numéro 5 du Manifeste iroquois, un document essentiel, le message au monde occidental d'une des cultures connues les plus anciennes pour la survie d'un monde de paix et de fraternité. 0 ROBERT PAC Nitassinan, revue trimestriellé éditée par le Comité de soutien aux Indiens d'Amérique. BP IJ0-08, 75363 Parix cedex 08. Le numéro : 25 F, abonnement annuel 4 numéros: 100 F (soutien 150 F) . Il Bobigny, janvier 1986 : le Premier Festival raï. Différences-no 54-MARS 1986 ran, Belzunce, les Minguettes, Barbès et enfin Paris, à Bobigny en janvier, la Villette en février. Le nouveau son-choc qui, depuis quelques années, fait frétiller des milliers de jeunes Algériens passe physiquement les frontières. Nu, cru, le raï signifie et chante son opinion. Une opinion pleine de verdeur gaillarde, de rythmes sensuels et lancinants. La vie quotidienne, la rue, une réalité qui exagère toujours trop, c'est ce que l'on crie à plein gosier, tripes ouvertes. Désormais, la tête haute, on chante l'alcool et les femmes. Tant pis pour les musulmans trop bien pensants, tant pis pour les autorités trop longtemps réticentes. Les promoteurs du pop raï : une sympathique smala de chahs (jeunes) Oranais de la zone. Petit chic, petit genre, séducteurs made in Méditerranée, ils se sont imprégnés de rock, de reggae, de flamenco. Ils ont ensuite régénéré ce vieux genre musical que leur ont légué les flûtes bédouines des premiers cheikhs (vieux maîtres) du raï. Foulard au garde-à-vous sur les hanches souvent généreuses des femmes, bras tendus, synthétiseur et boîte à rythme à fond la caisse, le raï a cette magie d'exciter, d'électriser la salle avant même les premiers trémolos. Que ce soit à Bobigny, sur une scène municipale oranaise, dans un cabaret ou un mariage, le rite est invariablement le même. Simple et spontané. Le même que quand on chantait sous les portes cochères, avec un bidon de plastique pour toute derbouka et une vieille guitare essoufflée qui se laisse gratouiller tant bien que mal. Esprits rationnels et cartésiens, ne cherchez pas le produit pro, ne cherchez pas le travail fini, ici il n'y a pas de labeur, il n'y a que la vie et elle n'est plus tout à fait morose. Ainsi naquit le raï Le raï, c'est avant tout une ambiance qui déchaîne, un état d'esprit qui se hurle, des paroles qui s'improvisent. Vulgaires, obscènes ? Pensez-vous ! Plutôt quotidiennes, banales, savoureuses, comme seul peut l'être le langage populaire teinté souvent de franco-algérien comme : « Je t'aime, je t'aime, rani nebeghik » (« Je t'aime, je t'aime, je te désire»), ou encore : «Je t'aime, je t'aime, rani n'couli'alik » («Je t'aime, je t'aime, je coule à cause de toi»). De quoi faire ravaler sept fois leurs plumes rouillées aux juristes de la langue arabe, les détracteurs les plus acharnés du raï. Ils sont jeunes, ils étaient pauvres, ils sont contestataires, mais ils l'ignorent. Les plus en vogue s'appellent chab Khaled (aisément qualifié de « roi du raï »), chab Mami (le môme à la voix de cristal) et le duo très sage chaba Fadila/chab Sahraoui. Ils étaient à Bobigny fin janvier, c'était leur première victoire hors du territoire natal où leurs cassettes s'arrachent par milliers. Leur raï : un moyen d'expression furieusement rénové , dont les premières racines remontent au début du siècle. Le mot raï est né dans les montagnes de l'Oranie, prononcé par des bergers bédouins qui faisaient vibrer leur solitude au son d'une flûte langoureuse. Chanteurs par occasion , flûtistes par nature, ils comblaient les rimes cassées ou l'absence d'inspiration par un pathétique « y a raï » ou « raï y a raï ». On retrouve partout ce même procédé d'onomatopée musicale : en andalou, Différences- n" 54- MARS 1986 « taraliyalal » ; en Egypte, c'est « ya li/ ya ain » ; en version rock, « yé yé » ou « oh yeah ». Moulé dans des airs simples, leur rythme avait pour seul écho le regard surpris, mais désintéressé, de leurs chèvres. Ce n'est que plus tard, dans les années vingt, que le raï quitte le spleen des hauteurs et s'adapte aux créneaux plus frisonnants de la vie semi-urbaine des gros bourgs. Là, des filles dites « de joie » reprennent ce rythme plaintif et mél.ancolique. La forme mélodique subit peu de changement, mais le fond thématique se trouve totalement chamboulé. Les chikhates en font le chant de leurs marasmes, de leur condition , mais, surtout, elles l'agrémentent de paroles grivoises, aiguisées. On y conte les moeurs libertines, l'alcool, les passes, les amours brûlantes ou les passions déçues. La naissance du phonographe (78 tours) et les diffusions dans les bars, maisons de tolérance et surtout dans les cafés, même les jours de marché, allait définitivement happer la chanson bédouine. Les Raïmans de vingt ans Il s'ensuit donc un déferlement de chikhates dont l'une, Chikha Rémiti. marque encore de son sceau la légende . Mais il y en a d'autres. « Agressive, elle mord dans cette morale codée par les vulcanisateurs des participes passés et les mécaniciens de "bonnes moeurs" à pleines dents pour ces emmurées déboussolées », écrit le journal Algérie Actualité dans un article consacré à Rimiti Rilizania (native des environs de Sidi-bel-Abbès), et qui débuta comme danseuse . Troisième étape du raï. les années cinquante, où l'on verra l'introduction d'instruments modernes comme l'accordéon, le violon et surtout la trompette. La trompette du célèbre Bellemou. dont les sons stridents ouvriront définitivement la voie au pop raï des années d'après l'indépendance. Cocktail, fusion, synthèse de tous ces g~nres, le pop raï des années quatrevmgt est b1en un carrefour. Incursion dans le genre « bédoui » (bédouin) dans le « Asri » (oranais moderne). dans. la tra?ition hispano-mauresque (Ennco Mac1as), etc .. etc .. la liste serait épuisante à dresser. les frontière s. comme dans tout phénomène musical. étant très difficiles à délimiter. Pour les jeunes chanteurs. ces discussions, souvent dignes de celles sur le sexe des anges, n'ont aucune teneur. Pour eux, le raï est, il s'écoule comme s'écoule goutte à goutte la grisaille du quotidien. Musique d'ambiance. musique de corps, le pop raï est typiquement jeune, typiquement algérien. II est un jeune cri de révolte musicale qui embrase et balaie toute velléité de régionalisme. De l'état du raï au raï de l'Etat D'Est en Ouest, du Nord au Sud , un seul critère : refuser de vivre dans l'étouffement de la petite morale, celle de la société. Mais, de la rue au cabaret , du cabaret aux séries de concert, le raï saura-t-il durer , sera-t-il un phénomène éphémère , une simple explosion de trop plein ? Pour cela , l'amateurisme ternit. hélas, trop vite,! Alors, jeunes raïneurs. à vous d'affirmer le son, à vous de travailler avec vos propres formations . Avec vous, le public dit non à l'inertie . Le raï, en Algérie ? Très longtemps marginalisé , trop longtemps laissé aux seules fluctuations mercantiles des producteurs de mauvaises cassettes. Encore maintenant. on la manie avec des gants de bonne morale arabo-islamique, mais les millions de jeunes sont là et les autorités ne veulent pas être en reste .. . On lui a lâché la bride. tout à coup. l'été dernier. Quelques lauriers reviennent de droit (c'est incontestable) à certains journalistes tenaces de Radio Chaîne III et de l'hebdomadaire Algérie Actualité. Un premier test. en juillet 1985. au Festival de la jeunesse où Raina Raï. un groupe pourtant loin d'être << hardraï » . a déchaîné les foules pour qu'enfin. le mois suivant à Oran. ait lieu la première reconnaissance officielle du raï avec l'organisation de son premier festival . Malgré cela. le raï de chab Khaled. Mar~i. Fadéla. ne passe toujours pas la frontière de la sacra-sainte télévision algérienne. Oui. là-bas aussi. difficile de bouger les carcans des variétés soporifiques. Difficile. quand Algérie Actualité écrit : " On boit sur des paroles religieuses. On danse sur des chants funèbres. On n'aime pas. on veut. On ne boit pas. on se sao!Île. On ne chante pas. on crie. On n'écrit pas. on improvise avec ses tripes. " Mais les chabs. grands princes. répondront à la télé algérienne. ce que l'on dit là-bas : « Na 'al bou li may habnach » ( << Maudits soient ceux qui ne nous aiment pas >>). Quant à la télé française. à quand les premiers clips. alors que. déjà. les cassettes. pirates ou non , sont presque introuvables ? D AFIFA ZENAT/ Discographie : Hada raykoun, Chab Khaled Ouach etsalini, Chab Mami Horizon music, 7, rue Decres, 1!!1 75014 Paris Ill Différences-no 54-MARS 1986 Il Cinéma à Créteil REGARDS DE FEMMES la Maison des arts de Créteil accueille le VIW Festival international de film de femmes. Un portrait de Bulle Ogier, un hommage à Dorothy Arzner, une rétrospective Mai Zetterling et bien d'autres choses encore ... Huitième du nom, le Festival international du film de femmes, qui s'ouvre le 14 mars, a élu domicile à la Maison des arts de Créteil pour la deuxième année consécutive. Après les temps pionniers de Sceaux, où une poignée de féministes convaincues tentaient de sortir des films réalisés par des femmes des placards où ils étaient confinés, Je Festival prend du poids. Vingt mille entrées en 1985, encore plus en 1986 - du moins J'espère-t-on chez les organisatrices - pour un menu riche et varié. « Nous avons voulu, cette année, explique Jackie Buet, mettre en valeur deux aspects essentiels de la création cinématographique féminine : sur la forme, la défense d'un cinéma d'auteur, c'est-à-dire non commercial, et vous verrez à Créteil des films qui ne sortiront nulle part ailleurs. Sur le fond, un des soucis majeurs des réalisatrices tourne autour de la question de l'identité sexuelle : qu'est-ce que le masculin, qu'est-ce que le féminin ? » Pièce maîtresse - pour cinéphiles avertis - de ce festival, un hommage à Dorothy Arzner, réalisatrice américaine, qui tourna, entre 1927 et 1943, plus de vingt films et fut une des rares (y compris parmi ses collègues masculins) à réaliser Je passage du muet au parlant. Le premier film parlant produit par la Paramount, c'est elle, les débuts de Katharina Hepburn et de Joan Crawford aussi . Le Festival, en collaboration avec la cinémathèque française, présentera dix de ses films, dont Merri/y, we go to hell avec Gary Grant et Cristopher Song, où Katharina Hepburn est à la fois pilote, amoureuse d'un homme marié et amie de la fille du même homme. Gageons que le spectateur moyen ressente quelques difficultés à assister à toutes les projections des films de Dorothy Arzner, mais J'itinéraire de cette pionnière mérite qu'on s'y arrête. Considérée comme l'une des dix éminents réalisateurs d'Hollywood, avec Lubitsch, Cukor, Capra, Dorothy Arzner est née en 1900 à Los Angeles. Ambulancière dans sa jeunesse, elle visite, un beau jour de 1920, des studios à Hollywood. Coup de foudre. Les sept années qui suivront seront celles de l'apprentissage, qu'elle décrivait ainsi dans une interview à la revue Ciné Monde en 1937 : « Mon raisonnement fut le suivant : la plupart des spectateurs de cinéma sont des ... spectatrices. Les · ·':u':· recettes dépendent largement du nombre de femmes qui font la queue devant le . petit guichet. Aussi, s'il n'y a pas de ~ '------"'-"'------'__...,_ ______ ___. « metteuses en scène » il faut qu'il y en Bulle Qgier ait. Et je commençais au bas de l'échelle. Mon premier emploi fut celui de dactylo dans le département des scénarios, à quinze dollars par semaine. Une vacance dans les rangs des lecteurs de manuscrit fut mon premier échelon. Puis, grâce à l'appui de William de Mille, je devins script-girl; de là James Cruze me promut au rang de monteuse. Quand je fus persuadée que je n'avais plus rien à apprendre des secrets du montage, je n'eus cesse de trouver un emploi comme scénariste. Je finis par l'avoir et, quelques temps après, j'eus enfin l'occasion de diriger mon premier film, Fashions for women. » Peinture au couteau « Le sens dramatique des femmes est inestimable pour le cinéma », ajoutait Dorothy Arzner. Une génération plus tard, Mai Zetterling inverse les compléments

les femmes ont besoin du

cinéma. Réalisatrice suédoise, née en 1925, actrice au Théâtre royal de Stockholm, puis de cinéma, elle est passée de l'autre côté de la caméra pour dénoncer. Des Amoureux (1984), peinture au couteau des années trente, où J'on suit l'itinéraire de trois femmes sur le point d'accoucher, à Scrubbers (1985), un film sur les prisons de femmes en Angleterre, nulle trace de complaisance chez Mai Zetterling. Une rétrospective de cinq de ses films est proposée aux spectateurs. A voir, car beaucoup ne sont pas distribués en France et le travail de recherche (actrices non professionnelles prises sur Je vif, construction cinématographique) est remarquable. Et si vous n'aimez que Je cinéma français, allez quand même, et surtout, à Créteil, vous y serez comblés. En créant cette année une section « Réalisatrices françaises »,le Festival de films de femmes s'est écarté de ses chemins habituels, la compétition internationale (quinze longs métrages pour 1986) n'incluant habituellement que des films non distribués en France. Un vrai délice de dix films français, de, Louise l'insoumise de Charlotte Silvera, à Sans toit, ni loi d'Agnès Varda, Rue Case Nègres d'Euzhan Paley, ou Trois Dorothy Arzner, pendant le tournage de Dance, girl, dance. hommes et un couffin de Coline Serreau. «Les femmes ont fait une percée remarquable dans le cinéma français grand public, explique Jackie Buet, nous ne pouvions pas manquer de le dire. » La peur des images Nouvelle section également, « Autoportrait ~'une actrice » inaugurée par Bulle Ogier. L'occasion de voir et de revoir La Salamandre d'Alain Tanner Un mariage de Claude Lelouch ou 1~ merveilleux Pont du Nord de Jacques Rivette, avec Bulle et Pascale. Un peu louche sur le fond, pourtant, ce portrait d'actrice qui permet, comme l'ont répété les organisatrices avec un peu trop d'insistance, de présenter des films d'homme. La peur de J'image de m~rque , n~&ative (hystériques, sectaires, hegenes, etc.) a profondément ma~qué une équipe qui longtemps a subi les foudres conjuguées de la presse, des ~isogynes purs et durs, des femmes antighettos, ou tout simplement antiféministes. Aujourd'hui, la mixité est de mise et à Créteil, on ne manque pas une occ~sion de la rev~ndiquer : mixité du public, des orgamsateurs, et, depuis peu, des réalisateurs, puisque le Marché du film organisé pour la deuxième année consé~ cutive à l'intention des professionnels, se propose de « réunir des oeuvres de fictions, et des documentaires réalisés par des hommes et des femmes de tous horizons ». Professionnalisme oblige. Différences- n• 54- MARS 1986 Pas antihomme, mais procinéma Démarche controversée reflet d'une certaine crise mondiale 'du féminisme plus frileux et moins militant. La venue de Bulle Ogier au Festival de Créteil représente ainsi une minivictoire. Très réticente au _d_él?art, l'actrice explique : «Je me méftals du ghetto, mais j'ai rencontré en Suisse la cinéaste Edna Politi qui a levé cette objection. Elle m'a d_it avoir v~ à ce fest~ val des quantités de fl~ms q_ue lon ne vmt nulle part ailleurs. C est lmportant. Elle m'a convaincue que ce n'était pas un festival antihommes, mais procinéma. , « Le désir de plaire rend dépendant de l'opinion », disait madame de Staël. et c'est peut-être dommage. La recherche d'une reconnaissance plus large sur le plan de la , q_u~Iité cinématographique est certes legitime. Mais le Festival de Créteil ne risque-t-il pas ainsi de s"écarter, lentement mais sûrement. de sa raison d'être : la promotion et la défense d'un cinéma d"auteur réalisé par des femmes, à qui certaines portes restent fermées, ou, du moins, très coûteuses à ouvrir ? D "' VERONIQUE MORTAIGNE ~ Festival international du film de femmes de Créteil, du 14 au 23 mars. Maison des arts, place Salvador-Allende, métro Créteil-préfecture. Tél. : (1) 48.99.90.50.

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~ ~ :;e; ~ ~ DEUX INITIATIVES ORIGINALES Cinéma à domicile Une opération de sensibilisation au cinéma se déroule dans le département du Val-de-Marne avant le Festival de Créteil. Des animatrices projettent une sélection de films dans les écoles lycées, locaux associatifs, MJC, comités d'entreprises ... , révèlent les " ficelles , du cinéma (qui fait les films, pourquoi, comment ?). et animent des débats sur " la question de la création des femmes et de leur langage cinématographiques, souvent nouvelle pour les groupes touc~é~. En effet, le public est plus enclm a penser que les films réalisés par des femmes traitent d'aspects sociaux et revendicatifs que de sujets présentant une originalité ouvrant à d'autres champs de réflexion. " En 1985, 71 animations de ce type ont été réalisées dans une vingtaine de villes de la région parisienne, s'adressant à un public de 28 000 personnes environ ce qui a permis au Festival d'attirer ens'uite un très gros public local. Le carrefour des festivals Trente-deux organisateurs de festivals et de journées cinématographiques français présenteront leurs travaux et leurs projets sur des stands pendant la durée du Festival de Créteil. Cinq d'entre eux viendront avec des films : en autre, le Festival international de? films du monde rural d'Aurillac, qui presentera un moyen métrage américain tourné en Chine, Small happiness; Women of a chinese village. o m Lettre d'un inculpé : la Turquie et ses prisons sadique ses hommes qui s'acharnent sur un des co-détenus de Güney, un simple ouvrier dont les autorités ont décidé de PRISON TURQUE. Voilà une p1ece faire un bouc émissaire, pour le« faire d'une actualité brûlante, qui traite d'un parler ». « Le colonel » déclare avec sujet délicat et difficile parmi d'autres une franchise brutale : « Ici, il n'y a pas - la torture infligée à des milliers de de constitution, il n'y a pas de droit, il détenus politiques dans les prisons de la n'y a pas de machin universel des droits Turquie. Brillamment mise en scène de l'homme. Ici, il n'y a que les lois de la par Marianik Révillon, Lettres d'un guerre. » inculpé a été adapté de deux ouvrages La scénographie de Michel Launay, est inédits en France, du grand acteur et un espace ouvert fait de trames, de cinéaste turc, Yilmaz Güney, qui avait miroirs et de poutrelles, où les acteurs lui-même passé plusieurs années der- se meuvent comme des funambules. Ce rière les barreaux pour ses convictions décor exprime la situation de ces marprogressistes. tyrs, voués à une mort lente et horrible, persuadés que leur lutte pour la dignité, La pièce se passe entièrement à l'inté- et pour le bonheur des autres, ne sera rieur d'une prison et Güney est incarné jamais inconnue ou oubliée. T ENCORE CHAUD, CHAUD. C'est reparti à SaintDenis. La faculté Paris VIII, ex-Vincennes, organise, comme chaque année, son festival interculturel. La faculté la plus métissée de France veut s'ouvrir aux cultures représentées parmi ses étudiants, mieux s'intégrer au département de Seine-Saint-Denis qui l'accueille. Un double axe pour trois journées, avec des débats, des films, de la musique, des expos photos, des stands, tout pour se rencontrer. La population locale est vivement conviée, comme on dit, à venir à la fac, du 20 au 22 mars, les portes seront grandes ouvertes. Quatre idées bases : on s'interrogera d'abord sur les traditions interculturelles de Paris VIII, comment ce métissage est vécu par les élèves, les profs, le personnel. On fera le point sur le mouvement alternatif en France, sur les banlieues, Saint-Denis, les communes avoisinantes, tout le département. Et surtout, sans doute le plus neuf, un groupe d'élèves et d'enseignants présentera un travail d'enquête sur les étudiants étrangers qui ont fait leurs études en France et sont retournés au pays, avec leurs acquis, leur savoir, et leurs problèmes. De quoi énerver tous ceux qui parlent de faux étudiants étrangers. Pas d'inquiétude : malgré l'aridité des thèmes, on s'amusera bien à Saint-Denis-Vincennes pour les premiers jours du printemps. Chaud, chaud, chaud, le printemps, bien entendu! Renseignements: (1) 48.21.63.64, poste 16-37, l'après-midi. IMAGE par un personnage qui s'appelle tout Marianik Révillon, qui s'occupe depuis simplement « l'homme ». Dans des 1979 de l'atelier-théâtre d'Aubervilliers lettres à sa femme, celui-ci exprime, -essentiellement composé de jeunes avec une vigueur lyrique, son amour de travailleurs, dont beaucoup d'imla vie, son espoir, à la fois rationnel et migrés- a créé avec ce groupe plusieurs ORCHESTRE NOIR. L'extrême droite, passionné, de voir naître à l'avenir un pièces, toutes porteuses d'un message ce n'est pas seulement quelques indimonde débarrassé des formes les plus social et politique. En 1985, elle a créé vidus à la cervelle détraquée, admiraflagrantes de l'inhumanité. sa propre compagnie de professionnels, teurs solitaires de Hitler. La situation « Sais-tu, dit "l'homme", que mes pen- l'Asphodèle. est bien plus complexe ; les nostalgisées construisent des mondes de plus en Lettres d'un inculpé est remarquable- ques de l'ordre et de la « pureté de la plus libres, purs, illimités. » « Le monde ment interprété par des membres des race » sont bel et bien organisés en des change, ajoute-t-il, et il n'offre aucune deux groupes, mêlant acteurs et ama- réseaux très étroits et bien protégés. chance de survie à ceux qui ne parvien- teurs, français et étrangers. Ainsi, l'ex- C'est ce que montre très clairement le nent pas à s'accommoder du change- cellent acteur libanais, Habib Ham- film reportage (1) de Stéphan Lejeune, ment, il les écrase ... Nous ne serons pas moud, est «l'homme», tandis que le l' Orchestre noir, qui, jusque-là, n'avait écrasés, nous suivrons en permanence le rôle du garde est joué par le Nicara- connu que des projections militantes, processus du changement et, emportés guayen Raoul Fernandez. La distribu- mais qui est sorti en salle le 26 février. par ses flots, nous coulerons vers les tion comprend également deux Turcs, Un film violent mais qui, preuve à lendemains ... » « une femme » et « un soldat ». l'appui, dessine des ramifications inter- Particulièrement frappante est l'inter- SCHOFIELD CORYELL nationales de cet « ordre noir ». La prétation de ce monstre froid, le tor- Lettres d'un inculpé, de Yilmaz Güney, Belgique y apparaît comme la plaque tionnaire en chef, qui s'appelle « le Grand Théâtre de la Cité internationale, tournante, orientée tout à la fois vers la colonel >> , haut de taille et élancé, vêtu jusqu'au 2 2 mars. Tél. : (1) Grande-Bretagne (le National Front), Il ·11 · 45 89 38 69 l'Espagne (la Cedade, Fuerza Nueva), ~d~e_b~l~a~n~c~,~s~u~rv:e~l~a~n~t~a:ve~c~u~n~c~yn~l:s~m:e~_:~·~·::~·~·------------------------Charles 27 mars 2014 à 15:22 (UTC)----------------------J la France (le Front national, le Parti des forces nouvelles, les Faisceaux nationalistes européens), les Etats-Unis (le KKK), l'Amérique latine, l'Allemagne (le NPD) (2). La Belgique, c'est essentiellement le Front de la jeunesse, le VMO, le Westland New Post - qui semble étonnamment lié à certaines personnalités de la Sûreté de l'Etat. Images frappantes par tant de brutalité gratuite : les camps d'entraînement militaire où se retrouvent des enfants en uniforme noir , les attentats, les tortures ... Images inquiétantes lorsque l'on voit la police féliciter le dirigeant .: du VMO, Erikson, lui qui avouera que c:i....__--'-......., «l'erreur d'Hitler, c'est d'avoir perdu la Un musée pour la mode guerre ». D'autant plus inquiétantes que demeure ouverte la question de savoir qui finance qui ... Un film qui en dérangera plus d'un .. . GERMAINE DUPONT L'Orchestre noir. Stéphan Lejeune, à partir du 26 février 1986, au cinéma Utopia (rue Champollion, Paris 5'). (1) Un film document, fondé sur une enquête dans les milieux d'ED. Le projet a mis quatre ans pour être achevé. (2) Comme le montre le reportage tourné au pèlerinage de l'Yser à Dixmude et où l'on retrouve tout ce beau monde ... peuple nomade d'Asie centrale qui occupa, entre le VI< et le VIII< siècle le territoire de l'actuelle Hongrie, possédait de merveilleux orfèvres et facteurs d'armes et d'excellents forgerons et potiers. Une civilisation « autre », une culture rattachée au splendide « art des steppes », dont toutes les pièces ici montrées proviennent des musées hongrois. Encore un nouveau musée à Paris ! Celui des Arts de la mode, Paris oblige ! Mais ce n'est pas un temple de la fanfreluche, comme d'aucuns le craignaient, mais bien un lieu vivant, moderne, centre d'étude et de création, DE L'OR. L'air du temps est aux bilans. ouvert au public, qui vient de coloniser Il en est un que l'on pourrait dresser, les combles joliment rénovés d'un autre dans un domaine dont les responsables musée, lui-même agréable et bien sont restés trop discrets : celui de la agencé : les Arts décoratifs. Avec un lecture publique en France. Depuis fonds de 9 000 costumes et de 30 000 1981, date significative, mais pas seule- accessoires, éntre autres, le musée rement pour ce que vous croyez, avec un place pour le public, une partie de ses budget triplé par rapport aux années collections permanentes dans leur amprécédentes, la Direction du livre du biance, mais il accueillera également ministère de la Culture a investi hôpi- des expositions dont celle, prestigieuse, taux, prisons, communautés immigrées de Saint-Laurent :pour le visiteur, c'est ou comités d'entreprises pour les doter un lieu de nostalgie pour un passé en livres. révolu, mais aussi le laboratoire pour la Mais, surtout, elle a équipé dix-sept mode, art ô combien vivant ! du futur. départements qui manquaient de bi- Retour à la lecture : il est des livres qui bliothèques centrales de prêt, desser- sont, en soi, une petite oeuvre d'art. vant une population supplémentaire Ainsi, de l'Art de l'Islam, un classique, estimée à dix millions de personnes, de Titus Burckhardt, réédité chez Sindacquérant près de cinq millions de bab, illustré de superbes photos de volumes supplémentaires. Roland et Sabrina Michaud. Tout le De même, le nombre des bibliothèques contraire de ce que les Américains municipales dans les villes de plus de nomment coffee table book, de ceux 10 000 habitants est passé de 634 en que l'on expose ostensiblement chez 1981 à 705 en 1985 ; sans oublier soi, mais un passionnant itinéraire, par l'équipement audiovisuel de 52 bi- un spécialiste reconnu, à travers les arts bliothèques municipales supplémen- de l'Islam, sous toutes leurs formes. 0 taires. YVES THORAVAL Des chiffres, me direz-vous ? Sans Direction du livre et de la lecture, 27, doute, mais qui marquent une étape avenue de l'Opéra, 75001 Paris. irréversible en faveur de tous les ci- Pavillon des Arts, Forum des Halles toyens pour l'avenir de la lecture ... (tous les jours, sauf lundi, de JO heures à Connaissez-vous les Avars, sans « e » ? 18h30). L'ELU Il a fallu l'obstination d'une petite maison de distribution et la sortie par l'écurie Walt Disney du dernier film de Kagan, Natty Gan, pour que l'Elu qu'il a réalisé en 1981 soit enfin présenté dans les salles. Le film est tiré d'un ronian de Chaim Potok, romancier juif new-yorkais. L'Elu est un film d'apprentissage. Jeremy Paul Kagan est familier de ces personnages qui n'arrivent pas à grandir parce qu'au moment où ils sont supposés passer à l'âge adulte un drame de l'histoire de leur pays ou de leur milieu les désespère, les arrête dans leur marche confiante. L'époque de l'Elu est la fin de la guerre, 1944. Les deux héros sont juifs. L'un, Daniel, fils de rabbin, vit dans la tradition orthodoxe, consacrant le plus clair de son temps à étudier le Talmud. 11 rencontre Reuven, fils d'un intellectuel libéral et jeune Américain « branché » façon années quarante

jazz, Freud et existentialisme, Danny

va se déprendre de la rigidité de son éducation, passer outre les interdictions de son rabbin de père (Rod Steiger, méconnaissable) flirter, avec le sionisme et entrer à l'Université. Ce n'est là que le début d'un apprentissage sans fin, mais les crises de croissance des jeunes Américains représentés par Kagan sont infiniment plus joyeuses que les certitudes musclées et bellicistes de tous les Rambos. CHRISTIANE DANCIE L'histoire du cinéma yiddish, sa naissance, son développement en Europe de l'Est et aux États-Unis dans les années 30. Sa situation aux USA (autour de Chaplin, les frères Marx, Jerry Lewis, Mel Brooks, Woody Allen) en France (Drach, Hanin ... ) en Allemagne (sous Hitler et après) en Israël et ailleurs. Cinéma ct ion n" 37 - 192 pages + 100 illustrations -132 F Si vous allez voir l'exposition l'Or des Musée des Arts de la mode, 107, rue de Avars (pavillon des Arts, jusqu'au Rivoli, 75001 Paris. Ouvert tous les ,_ _3 0_m_ a_ rs~),~v_o_u_s __d~ é~c_o_u_v_r_ir_e_z __q~ u_e_ _c _e _~ J_o_u_rs~,_s_a_u~f_l_e_m_a_r_d_i~,_d_e_1_2_ à_ 1_8_h_e_u_r_e_s_. _________________________~ ----~ Ill Différences- n" 54 - MARS 1986 Le propre de l'homme LA FETE ET SES RITES Ecrivain et sociologue, Jean Duvignaud s'intéresse aux phénomènes collectifs : le rire, la solidarité ... D'après lui, on tente de réhabiliter la fête, mais le coeur n'y est pas. Jean Duvignaud : « Fondamentalement, la fête appartient à des moments « incasables » de la vie des sociétés, tout en étant, dans le même temps une prise de possession d'espaces. Qu'on songe à l'investissement du Jeu de paume en 1789, ou à la Commune de 1870 où le peuple français et ses tribuns contestaient alors les espaces publics « confisqués » par la monarchie, puis par Haussmann ... Un historien a relaté qu'avant la Révolution se déroulaient en Provence des fêtes populaires jugées « contestatrices (:?t barbares » par la bourgeoisie même qui allait faire cette révolution. Et cette bourgeoisie organisa - elle - des manifestations à tendances pédagogiques et idéologiques à travers lesquelles s'expliquait, s'explicitait sa pensée poétique. Ces manifestations - si elles étaient indispensables - ne pouvaient être considérées comme de véritables fêtes. La société cherche toujours à se protéger contre l'inopiné, le déstructuré et la subversion inhérents à la fête ; en la déplaçant ou en la régularisant. Et ça, on peut le constater de la prise de la Bastille à mai 68 ... Où l'on contraint la fête populaire collective à vivre dans la durée ce qu'elle ne fait qu'émerger dans les instants de son irruption. Comme si la société réintégrait alors la dimension de la fête dans une orbite « sécuritaire » pour en circonscrire le caractère subversif. Nos sociétés actuelles, technologiques et hyperurbanisées, ne permettent guère la réalité de la fête. Dans les années cinquante s'est élaboré un mode d'habitat vertical - d'empilement - où règne la boîte-télévision (individuelle ou familiale). Le concept de « grand ensemble » est bien celui de la mise en compartements de la vie. Et lorsqu'on sort, à l'extérieur, c'est pour être confronté à des espaces surveillés, fléchés, contrôlés. Immeubles, tours et grandes surfaces sont devenus des lieux de mass media, des espaces sociaux où le spontané et l'intempestif liés par nature à la fête s'amenuisent de plus en plus. La fête, c'est d'abord l'investissement d'espaces horizontaux pour de libres rencontres. On pourrait même dire qu'il n'y a de démocratie festive qu'au ras du sol ». Différences : Mais, en tant que sociologue, vous avez depuis plusieurs décennies réactualisé ces réflexions autour de la fête. J. D. : « Une longue enquête réalisée avec mes étudiants, il y a quelques années, sur le thème La planète des jeunes nous avait révélé que nombre d'entre eux (et même de moins jeunes) se réunissaient dans ce que nous avons appelé des « niches écologiques ». Pour vivre d'autres rapports interindividuels dans un plaisir de communication directe que la société quotidienne ne permet pas dans ses espaces normatifs. En se regroupant par affinités où les gens aimaient se retrouver en « microgroupes », dans les quartiers, les villages, les métiers ... Pour partager : nourriture, danse, musique, voyage ... Mais le système idéologique sur lequel repose nos sociétés est fondé sur l'efficacité, l'intensité et la quantité de travail abstrait ; il exige avant tout des individus l'acceptation de la réalité laborieuse. Marx d'ailleurs partageait cette conception (liée à la notion de péché originel) : l'homme est fait pour le travail et doit y consacrer ses forces et ses capacités majeures. Le refus et l'écart Alors, pour ceux qui s'opposent au système : deux alternatives. Soit un refus violent, soit tenter de se mettre en dehors en expérimentant- ici et maintenant- ce que les grandes utopies nous ont toujours promis à l'échéance de plusieurs générations. C'est ce qui est apparu dans le sillage des années post-soixante-huit ... Les nouvelles générations revendiquaient le sens de la fête ; en la faisant à leur manière (même en vase clos). Avec une certaine volonté de créativité collective et la suggestion de nouveaux rapports sociaux. » Différences : Pour arriver à aujourd'hui ? J. D. : « En régularisant la notion de fête nos sociétés occ~dent~le~ ont créé la nostalgie de son esse~ce profonde. AuJourd hm, les gens ont le sentiment que les fêtes pourraient être autre chose que ce qu'on leur vend. Car la fête est aussi illusion lyrique et moment périssable, mais dont l'intensité peut avoir de formidables résonnances. Pour entrer dans l'espace même de la fête il faut retrouver l'élé~_ental du co~ps : la mangeaille, la da'nse, ect., que les participants y aillent vraiment de leur corps et pas s~ulement de .. . l'idéologie. Avec tout l'aspect de ritualisahon par lequel un groupe humain « socialise » ainsi toutes les instances destructrices (la faim, la mort, etc) ... » Différences : Est-ce que nous n'assistons pas actuellement à une déperdition, une banalisation de la fête et de ses rituels à travers le monde ? J. D. : « Ce n'est pas simple. Au Brésil, par exemple, la macumba, un rite religieux teinté de fête, survit d'une manière très populaire et Jllli , · 'W\1 27 mars 2014 à 15:22 (UTC):61t~~i0Charles 27 mars 2014 à 15:22 (UTC):eis~~e J~ ' · . · '·;' \,~· la culture africaine, qui de- · meure un rituel très précisément codifié. Avec les sonorités des tambours, l'imposition des rythmes, les corps entrent en transes et sont alors comme partagés entre plaisir et souffrance ... Mais que l'on considère le carnaval de Rio d'aujourd'hui. Cette considérable fête collective est devenue complètement médiatisée au niveau international et son origine profonde s'est grandement émoussée. Alors que le carnaval de Bahia a beaucoup mieux conservé ses racines culturelles festives. Différences : Et la réalité de la fête dans nos sociétés d'Europe? J. D. : « Nous savons désormais que les grandes « unanimités >> sont devenues problématiques et que prétendre créer de fausses unanimités collectives peut aussi conduire au fascisme. N'oublions pas qu'un Hitler savait très bien rassembler les masses allemandes dans de monumentales « fêtes » ; sans distinction de classes ni prise en compte de réalités sociales différentes. » Différences : Mais nos simples fêtes nationales et celles de passage d'une année à l'autre ... J. D. : « En Europe, aujourd'hui, les fêtes nationales sont loin de l'effervescence ancienne qui s'emparait des rues et des villes. En France, notre 14 juillet relève maintenant de la célébration sociopolitique grave, solennelle, et finalement pompeuse. Quant à nos fêtes de fin d'année, elles ont aussi perdu leur caractère vraiment festif en devenant un parcours obligé du rythme calendaire ; sans compter leur fantastique impact de commercialisation. Mais on pourrait s'interroger sur certaines fêtes locales et régionales qui perdurent avec une certaine authenticité telles les Ducasses du Nord. Comme s'il y avait là de nécessaires compensations festives et une convivialité plus forte dans certaines zones laborieuses climatiquement défavorisées. Différences- no 54- MARS 1986 « La puissance de la fête : faire éclater pour un instant les normes de productivité, de gain, d'efficacité qui sont le lot de la vie quotidienne. » Dans la nature profonde de la fête - comme dans le rêve - la logique cesse d'être euclidienne ... La puissance de la fête réside dans sa fonction ponctuelle à faire éclater temporairement les normes de productivité, de gain, et d'efficacité de la vie quotidienne ordinaire. » Différences : Alors, ces derniers mois en France le temps n'était pas à la fête ? !· D. : « Ah si ! Il y a eu cet événement complètement mattendu d'un peu avant Noël. Quand les forains ont investi le jardin des Tuileries. Certes, pour des raisons objectives de revendications professionnelles (syndicales et autres). Mais, en offrant simultanément à la population parisienne un espace tout à fait imprévu de jeux et de lumières. Et ce, justement, dans un espace historique où la monarchie donnait jadis ses propres fêtes. Oui, cette période de Luna-Park spontané au jardin des Tuileries était, je pense, une vraie fête. D'ailleurs, les enfants ne s'y sont pas trompés ! » D Propos recueillis par J.-J. PIKON Duvignaud a publié récemment Le propre de l'homme, un essai sur le rire (éd. Hachette). Il prépare actuellement un nouveau livre sur la notion de solidarité (chez le même éditeur) . Il l' Il El mrmRE ___________________________ ~ Afrique du Sud DES ANNEES A SE BATTRE Le 21 mars 1960, la police de l'apartheid ouvre le feu sur des manifestants à Sharpeville. 69 morts, qui s'ajoutent aux milliers de martyrs de la résistance co mmencée au début de ce siècle. Depuis, l'ONU a fait de cette date la journée internationale contre le racisme. Contrairement au reste de l'Afrique noire, où la conquête coloniale a été réalisée par des militaires et des fonctionnaires européens de passage, qui ont laissé aux Africains la propriété de la terre, l'implantation étrangère en Afrique du Sud a été le fait de civils qui ont systématiquement exproprié les populations autochtones de leurs terres et de leur bétail. Au lieu d'avoir commencé à l'extême fin du XIX• siècle, la conquête du pays khoisan (Bochimans et Hottentots aujourd'hui disparus) a débuté en 1652 ; celle du pays noir en 1779 avec la première « guerre de frontière » ou « guerre khosa » dans l'est de l'actuelle province du Cap. La résistance opposée par les Noirs à l'envahisseur blanc a été exceptionnellement longue et vigoureuse, puisque la. révolte du chef zoulou Bambata, dans le Natal, en 1906, est considérée comme le dernier épisode de la résistance armée de type tribal. Il Le 8 janvier 1912, deux ans après la naissance de l'Union sud-africaine, la fondation du South African National Native Congress qui sera rebaptisé African National Congress, (ANC), en 1923, marque le départ d'une nouvelle forme de résistance africaine, fondée sur le rejet des divisions tribales et la collaboration avec des organisations politiques indiennes et métisses. L'avocat indien Gandhi, qui a séjourné en Afrique du Sud entre 1893 et 1914, et organisé la résistance indienne a utilisé des méthodes non violentes. Son exemple sera suivi pendant près de cinquante ans par l' ANC. Il Le 26 juin 1955, l'ANC convoque à Kliptown, près de Johannesburg, un Congrès du peuple réunissant près de trois mille délégués, noirs, indiens, métis et blancs. Par acclamations, l'assemblée adopte le préambule suivant : « L'Afrique du Sud appartient à tous ceux qui y vivent, Blancs et Noirs, et aucun gouvernement n'est justifié à orétendre exercer l'autorité s'il ne la tient de la volonté de tous. » On vote une Chartè de la liberté en dix chapitres, dont celui-ci : « Toute personne, sans distinction de race, de .couleur ou de sexe, doit avoir le droit de voter et d'être éligible à tout organe législatif ou administratif » A !'Appel à la paix et à l'amitié exprimé à la fin de la Charte, le gouvernement répond en traduisant en justice 156 signataires sous l'accusation de trahison (Treason Trial) et en intensifiant les poursuites pour infraction aux

lois sur les pass. En cette année 1955, le nombre des

condamnations à une peine de prison ou une amende

>'élèvera à 338 000, soit une pour cent Noirs urbanisés.

Il Le 9 août 1956, plus de 20 000 femmes noires entament une marche sur Pretoria, la capitale administrative, pour protester contre la loi étendant aux Jfemmes l'obligation du pass. Le 9 août est célébré depuis comme le Jour des femmes (South Africa Women's Day). Il Le 21 mars 1960, la police .ouvre le feu sur une foule de Sud-Africains noirs qui se présentaient sans pass. La fusillade fait 69 morts et plus de 200 blessés à Shaperville. En vertu de l'état d'urgence proclamé le 30 mars, 20 000 personnes sont arrêtées et 2 000 détenues sans jugement. Le 8 avril, l'ANC est interdit en même temps que le Pan' African Congress (PAC), parti noir dissident, fondé en 1959 par Robert Sobukwe, et qui revendique « le gouvernement des Africains par les Africains et pour les Africains >>. Albert Luthuli, président de l' ANC (qui obtiendra le prix Nobel de la paix en 1961), est condamné à trois ans de prison, ainsi que Robert Sobukwe. Il Le 16 décembre 1961, six mois après la proclamation de la république d'Afrique du Sud, une campagne de sabotages est lancée par des militants de l' ANC et du P AC (tous les deux interdits depuis plus d'un an), auxquels se joignent des Sud-Africains indiens et blancs. La répression est immédiate et terrible, surtout après l'arrestation, en août 1963, à Rivonia, dans la banlieue de Pretoria, de dix dirigeants de l' ANC, parmi lesquels Walter Sisulu et Goban Mbeki. Le procès dit de Rivonia débute en octobre 1963 et se poursuit jusqu'en juin 1964. En même temps que les auteurs de sabotages arrêtés à Rivonia, on y juge Nelson Mandela, alors âgé de quarante-cinq ans, qui a été, avec Olivier Tambo, actuel président de l'ANC, le premier avocat noir d'Afrique du Sud. Tous seront condamnés à l'emprisonnement à vie à Robben Island, en face de la ville du Cap. En 1983, Nelson Mandela sera transféré dans la prison de Pollsmoor, près du Cap. Il De janvier 1963 à décembre 1965, les tribunaux distribueront 8 000 années de prison à 1 300 accusés et 300 condamnations à mort (deux pendaisons par semaine). Il En i968, apparaît le mouvement de la conscience Noire. Alors qu'elle paraissait brisée à la fin de 1965, la résistance africaine renaît en 1968 avec la mise sur pied de plusieurs organisations scolaires et communautaires rattachées au mouvement de la Conscience noire, BC, dont la philosophie sera résumée par Steve Biko en 1972 : « Le Noir doit se dégager de ses complexes d'infériorité et être fier de son propre système de valeurs, de sa culture, de sa religion et de sa vision de la vie. >> D'abord limité aux scolarisés, étudiants et lycéens, le mouvement de la Conscience noire se répand par la poésie, le théâtre, la théologie et différentes organisations communautaires. Beaucoup de ses membres, poursuivis par la police, sont obligés de fuir leur pays ou de rester dans la clandestinité. Il En février 1973, pour la première fois dans l'histoire de l'Afrique du Sud, des grèves obtiennent des résultats. Plus de 61 000 ouvriers de Durban, presque tous des Zoulou, font prendre conscience aux travailleurs noirs du pouvoir qu'ils détiennent en raison de la proportion de plus de 70 % qu'ils occupent dans la population active. Il Le 16 juin 1976, la police réprime de façon sanglante à Soweto (township de Johannesburg comptant plus d'un million d'habitants) des émeutes qui avaient débuté par une manifestation pacifique d'environ 10 000 collégiens noirs âgés de douze à vingt et un ans contre l'introduction de l'afrikaans comme langue d'enseignement pour une moitié du programme. Le 25 juin, le nombre des victimes annoncé officiellement s'élève à 176 tués, plus de mille blessés et 1 300 arrestations. Entre le 25 juin et le 25 septembre, les émeutes débordant largement le milieu des scolarisés atteignent toutes les grandes zones industrielles d'Afrique du Sud. A la fin de l'année, on fera état, officiellement, de plus de 600 morts, plusieurs milliers de blessés, environ 5 000 arrestations et au moins 700 personnes détenues pour « raisons de sécurité », parmi lesquelles presque tous les dirigeants du mouvement de la Conscience noire, des dizaines de journalistes et des personnalités Différences-n" 54 - MARS 1986 Dessin CORTES Il Le 17 septembre 1977, on apprend la mort en prison de Steve Biko, le leader reconnu de la Conscience noire. L'opinion internationale réagit violemment en apprenant que Steve Biko est, depuis mars 1976, le 25< détenu mort à la suite de mauvais traitements de ses geôliers. Aux accusations lancées conte lui, le gouvernement répond par un coup de massue sans précédent porté à la résistance. Le 19 octobre avant l'aube, des raids de police aboutissent à l'arrestation d'une cinquantaine de personnalités noires ou blanches, et à la mise hors la loi de dix-huit organisations, dont dix-sept relèvent de la Conscience noire. Deux journaux à grand tirage destinés aux Noirs sont interdits. De Ghandi à Nelson Mandela, deux avocats pour la cause noire. Il En 1979, le gouvernement spécifie que« le terme de travailleur ne sera plus désormais suivi d'une quelconque référence raciale >> et admet en conséquence les principes de liberté d'association et d'autonomie des syndicats noirs. Dans l'espace de quatre années, on assiste à une véritable explosion syndicale noire. Le nombre de syndiqués est multiplié par quatre : 350 000 en 1983, soit 6 % des salariés noirs (contre 20 % de syndiqués parmi les travailleurs blancs). Deux fédérations multiraciales sont créées. la FOSATU et le CUSA. Elles s'ajoutent aux deux anciennes fédérations également multiraciales : la SACTU. fondée en 1955, qui a toujours entretenu des liens étroits avec l'ANC et qui a dû passer dans la clandestinité en 1964 :et la TUCSA, créée en 1954, qui comprenait en 1983. sur 370 000 membres, une minorité de Noirs et une majorité Il d'Indiens et de métis. Sauf- évidemment -la SACTU interdite, ces fédérations se proclament officiellement « apolitiques ». A côté d'elles se créent de nouveaux syndicats, qui n'hésitent pas, malgré une intense surveillance policière, à se dire partie prenante dans les mouvements de résistance politique. Dans le cas du Syndicat national des mineurs, NUM, cette prise de position apparaît particulièrement prometteuse pour l'avenir de la résistance noire, étant donné la place prépondérante tenue par l'industfie minière dans l'économie sud-africaine. Fondé en 1982, le NUM annoncera 80 000 adhérents en 1984 et 180 000 en août 1985, sur un total de 475 000 mineurs noirs. Parmi les nouvelles associations de scolarisés qui ont succédé à celles interdites en 1977, il faut distinguer deux tendances : le mouvement des étudiants azaniens, AZASM, fondé en 1983, adhère aux thèses de la Conscience noire et le Congrès des étudiants sud-africains, COSAS, fondé en 1979, a des effectifs plus importants et affirme son attachement à la Charte de la liberté, donc à l' ANC ; il a mis sur pied en 1983 des « organisations de jeunesse » s'adressant aux jeunes travailleurs et aux jeunes chômeurs. Des hommes qui se battent A côté de ces associations de jeunes, scolarisés ou travailleurs, se fondent de nombreuses associations de « résidents » dans les townships (Civic Associations), dans lesquelles les femmes sont particulièrement actives. Pour situer la place des milieux d'Eglise dans la résistance, il faut savoir que 92 %des Sud-Africains noirs se déclarent chrétiens et que presque toutes les réunions, y compris les réunions syndicales s'ouvrent par une prière. C'est, dans le continent africain, une situation tout à fait particulière. Plusieurs personnalités religieuses ont joué et jouent un rôle de premier plan dans la résistance en s'engageant publiquement et en dénonçant devant l'ensemble du monde chrétien le «scandale de l'apartheid». L'évêque anglican, Desmond Tutu, auquel a été attribué le prix Nobel de la paix en 1984, est le mieux connu à l'extérieur de l'Afrique du Sud. Le pasteur Allan Boesak, aumônier de l'université de Western Cape, réservée aux métis, élu en 1982 président de l'Alliance réformée mondiale, WARC, prêche depuis 1979 l'union des Eglises et des mouvements politiques antiapartheid. En 1983, il a mis ces idées en action en lançant le Front démocratique uni (UDF). L'archevêque de Durban, Mgr Denis Hurley, est une des figures dominantes de l'Eglise catholique en Afrique du Sud, Eglise dont les effectifs ont fait plus que doubler depuis 1960 : deux millions et demi de fidèles, dont 80 % de Noirs au recensement de 1980. Mgr Hurley a pris depuis longtemps des positions clairement exprimées contre l'apartheid. En 1982, il a déclaré que : « L'Eglise veut engager son poids moral aux côtés des syndicats dans leur lutte. » Président du conseil des évêques catholiques de l'Afrique australe, SACBC, il a constamment soutenu son secrétaire général, le père Smangaliso Mkhatshwa, quand celui-ci a été « banni » pour cinq ans en 1977, puis emprisonné et jugé au Ciskei (Etat noir« indépendant»), en 1983, pour avoir adhéré à l'UDF. Banni en octobre 1977, pour avoir soutenu la cause de la Conscience noire, et rendu à une vie normale sept ans plus tard (26 septembre 1984), le pasteur Beyers Naudé est une figure extraordinaire du protestantisme sud-africain, car il appartient à une famille afrikaner et à une Eglise de langue afrikaans, la NGK, qui a toujours défendu l'apartheid. D 1879: les Zoulous font la guerre aux Anglais, qui, eux-mêmes, ont attaqué les Boers. 1960: Sharpeville, le premier jour de la campagne de désobéissance ... civile~ fait plus de~ soixante morts . .::L--------------1 1!1 MARIANNE CORNEVIN Iii l_ _______ ~E~~m~it~d~e~m~p~o~ch~e~ffe~A~p~a~n~he~w~p~u~b~oo~e~e~n~m~aCharlesp~a~r~m~M~R~A~P~. _ :=::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::J EUX_ · ------------------------~ PIERRE VALLÉE /1oT.S CROlsÉJ . .·•."· • .·..·· .... ....\. .:.. . ..~.~.·....·...·...·.. ...·. ..•....·...·...·...·...·...·...·.•.·. ·...·...·.:... . •·•·•·•·•·•·•·•·•••·•·•·•·•••·• •••• ..... ............... ~,. ...... . .. . ., HORIZONTALEMENT: 2 3 4 56 7 8 910 1. Servent pour payer. Toujours vert. - 2. D'un département français. 3. Planches de bois. Apparus. - 4. Epaissit. Nombreux dans un immeuble. - 5. Avions l'audace de. - 6. Il ou elle ? Vastes étendues d'eau. - 7. Possessif. Ville antique. - 8. Saisons. Jeu. - '9. Note. Qui entraîne la mort. - 10. Pronom. Courbe. VERTICALEMENT : 2 3 4 5 6 7 8 1. On peut les voir dans l'air. 9 Note. - 2. Me rendrais. Organe. - 3. Mettaient en 10 couches. - 4. Terme de tennis. Lac pyrénéen. Possédés. - 5. D'une mer. - 6. Servent à juger. Mesure. -7. Direction. Diriger.- 8. Célèbre par son violon. Possessif.- 9. Il parlait bien. Procure un plaisir. - 10. Parties charnues. Pour encourager. LA On passera du premier au dernier mot en ne changeant qu'une seule lettre à la fois, l'ordre des lettres restant inchangé et formant à chaque fois un mot existant. BIC PION JUS DAME Solution des jeux du numéro précédent : Mots croisés : Horizontalement: 1. Décalages, - 2. Arriérés. - 3. Miette. Tel. - 4. Anar. Ovide. - 5. Sète. Limes. - 6. Sisteron. - 7. Ente. - 8. Ain. Obèses. - 9. Cossues. Et. - 10. En. Usé. Ose. Verticalement : 1. Damas. Face.- 2. Erines. Ion.- 3. Créations.- 4. Aîtres. Su. -5. Let. Trous.- 6. Aréole. Bée. - 7. Gê. Virées.- 8. Estimons.- 9. Edentées. - Clés. Este. Cryptarithme T = 1, C = 2, A= 3, U = 4, K = 5, N = 6, R = 9. L-----------~------------------------------------~· Différences-n• 54-MARS 1986 El LES JUIFS EN URSS Notre initiative d'une table ronde réunissant Français et Soviétiques sur cette question nous a valu un abondant courrier, dont voici des exemples. Exigences La table ronde franco-soviétique organisée par Différences ouvre une voie originale dans l'action relative aux juifs d'URSS. Vous avez enfin dépassé les passions et les rigidités contradictoires qui bloquaient la situation. Pour en arriver là, je suppose qu'il a fallu de la diplomatie et de l'obstination de votre part ; mais aussi un changement d'attitude notable côté soviétique. Ce n'est pas rien. Sur certains points débattus, je pense qu'on relativiserait quelque peu les griefs formulés contre l'URSS -sans pour autant, bien sûr, les effacer- si l'on se référait de façon plus critique à ce qui se passe chez nous. Par exemple, il est évident que le chiffre de << 500 000 à 700 000 >> juifs en France, avancé par le CRIF, ne correspond pas à la réalité. Au plan religieux, la communauté connaît un lent mouvement régressif, comme les autres confessions. Lors des récentes élections consistoriales, un journal titrait : << Paris : 300 000 juifs. Adhérents : 12 000. Votants : 2 016 ! » Il y a aussi, 1' << assimilation », les mariages << mixtes », dont certains responsables communautaires n'hésitent pas à comparer les << ravages » à ceux du génocide nazi. Ce phénomène a donné lieu ces temps-ci à de vives polémiques entre Consistoire et Rabbinat. Malgré le soutien inconditionnel d'un certain nombre de juifs (combien ? c'est à voir) à la politique israélienne, l'engouement pro-israélien des bien-pensants et la puissance de la propagande sioniste, l'émigration vers Israël, en provenance de la France et de l'ensemble du monde occidental, est insignifiante. En 1985, encore, elle ne suffit pas à compenser les départs d'Israéliens vers d'autres pays. Je signalerai enfin la grande misère de la langue et de la culture yiddish en France, leur recul continu aux Etats-Unis, leur remplacement par l'hébreu en Israël. Alors, une question : n'imputet- on pas à l'URSS seule des problèmes qui se posent partout, et n'exige-t-on pas d'elle les solutions qu'on ne peut soimême apporter ? Il faudrait que, là-bas comme nulle part ailleurs, la religion juive prospère et que le yiddish se développe, que cesse l'<< assimilation » et que des contingents massifs d'émigrants viennent affermir Israël, voire même le Grand Israël ! Vous avez raison d'agir contre toute limitation de la liberté religieuse, pour des activités culturelles répondant pleinement aux besoins, contre toute dérive antisémiste de l'<< antisionisme », contre la marginalisatian ou l'emprisonnement, pour la possibilité accordée à chacun d'aller et venir s'il le souhaite ... Mais attention ! beaucoup de ceux qui militent pour les juifs d'URSS ont, consciemment ou non, d'autres préoccupations. CHARLES GUTMAN Marseille Détails L'un des participants à la table ronde de Différences sur les juifs en URSS a évoqué l'impossibilité pour les détenus juifs d'exercer leurs rites religieux et de manger << cacher » dans les /prisons. C'est, en effet, une atteinte, parmi d'autres, à leur dignité. Cependant, si j'en crois Actualité juive du 31 janvier 1986, tout ne va pas pour le mieux en France, dans ce domaine. Un intéressant article sur les détenus juifs dans les prisons françaises montre, certes, que les pratiques religieuses ne leur sont pas interdites, mais l'un d'eux, dont le témoignage est cité, écrit : << Il est très difficile de pouvoir observer la cacherouth parce que, dans ma prison, il n'est pas prévu de régime cacher. C'est dur de ne pouvoir mettre les tefilinn. Les livres sont très chers pour nous » . .. Par ailleurs, je note dans le Figaro (14.2.1986), à propos de Chtcharanski, que, avant son passage sur le pont de Glienicke, << on lui avait enlevé tous ses objets personnels, y compris un petit livre de psaumes en hébreu, cadeau de sa femme », et qu'il s'est étendu sur la neige jusqu'à ce qu'on le lui rende. Dernier acte de résistance à ses geôliers, mais aussi détail ajouté au précédent, d'où il ressort que les choses sont parfois moins tranchées qu'on ne le croit. Or, pour défendre les juifs d'URSS, il faut rechercher la vérité dans toutes ses nuances et avoir des analyses irréfutables. C'est difficile, mais c'est une condition d'efficacité. GILLES LEV/NE Paris 17• Antisémitisme ( ... ) Revenons en arrière ; revenons au déclin des langues juives en URSS : l'hébreu et le yiddisch. En 1909, pratiquement tous les juifs parlaient une langue juive. Mais après la Révolution, ces langues déclinent rapidement ; en 1979, à peine 20 % des juifs parlent encore une langue juive, même en seconde langue. Cela est dû essentiellement à deux facteurs : - Les juifs, qui furent la minorité la plus active dans la révolution russe, ont cherché délibérément à s'assimiler. Ce pouvoir les considérait comme des citoyens à part entière et l'antisémitisme était hors la loi. La volonté d'intégration des juifs s'est traduite par un effort d'intégration linguistique qu'aucune autre minorité n'a égalé. Notons au passage que cela explique en partie l'échec de la tentative du Birobidjan : si les juifs n'y sont pas allés, c'est qu'ils voulaient plutôt s'intégrer que constituer un groupe national à part. - La quasi-totalité des écrivains en yiddish a disparu, soit lors des purges des années 1930, soit pendant la guerre. Les survivants ont été liquidés lors des purges entre 1948 et 1952. Mais , dès 1948, l'antisémitisme réapparaît en URSS. La population qu'il frappe était en train de s'intégrer ; pour réussir cette intégration, elle s'était volontairement déculturée. Une fois de plus , c'est au moment où l'assimilation des juifs est en train de réussir qu'ils sont rejetés. Et quelle a été la réaction de ces juifs qui avaient jeté aux orties leur vieille culture pour en endosser une nouvelle que maintenant on leur refusait ? Un fait marquant se produisit en 1967, avec la guerre des Six Jours ; la victoire israélienne, ils la vivent comme un gigantesque pied de nez à la propagande antisioniste effrénée qui les entoure. Pour beaucoup d'entre eux, c'est le déclic : ils se redécouvrent juifs. Et alors même que la propagande antisémite et la répression s'intensifient, on assiste à un renouveau du judaïsme en URSS ! Il y a un besoin de reculturation : c'est un regain d'intérêt pour l'hébreu, langue de la philosophie juive, pour l'histoire juive et aussi pour la foi juive. Les refuzniks d'aujourd'hui ne sont pas des survivants d'un autre âge : beaucoup sont des jeunes, très attachés à leur pays, qui pourtant leur rend la vie impossible. D'où le besoin d'émigrer, seule façon pour eux de vivre dignement. Car il faut être bien clair : c'est bien l'antisémitisme qui est présent en URSS. Même s'il se cache - fort mal - derrière l'étiquette « antisionisme», c'est bien de l'antisémitisme. Et n'est abusé que celui qui veut bien être abusé. M. Pac, dans une lettre déjà ancienne parue dans Différences, incluait dans son propos une démonstration de l'inutilité, voire du danger du sionisme. Il s'appuyait, entre autres, sur des révélations concernant le groupe Stern, en 1942. Pour lui, ces révélations semblent jeter un discrédit définitif sur le sionisme. Je ne m'en cache pas, ce point de vue est à l'opposé du mien, aussi je vais y revenir pour terminer. Je dirai tout d'abord que la résurgence en URSS de l'antisémitisme, cent ans après les débuts du sionisme moderne, me paraît la meilleure preuve de la nécessité d'un Etat pour les juifs. Je veux enfin revenir sur le groupe Stern ; il s'agissait d'un groupe d'une douzaine de personnes qui, par la suite, a été mis hors la loi par toutes les autres organisations sionistes. C'était l'époque du Livre blanc, imposé par l'Angleterre, et au nom duquel cette puissance mandataire interdisait l'immigration juive en Palestine ; les bateaux bondés de juifs qui fuyaient leurs bourreaux étaient refoulés de Palestine vers l'Europe. Parmi les sionistes, ceux du groupe Stern avaient eu l'idée folle et démentielle de vouloir pactiser avec l'Allemagne nazie pour lutter contre de Livre blanc. Ce groupe est tout à fait condamnable, mais cette condamnation ne peut toucher le mouvement sioniste tout entier que si l'on se livre à une démarche globalisante et discriminatoire, c'est-àdire raciste. Signalons tout de même que le même groupe Stern envisageait une convergence des nationalismes juifs et arabes. Si le comité antisémite de l'opinion publique de l'URSS ne fait pas de révélation sur ce dernier point, c'est peut-être qu'il gêne la démonstration << sioniste =nazi »... D A. FEIGENBAUM Reims Merci Merci à Différences pour la façon dont vous rapportez les conversations autour de la table ronde au sujet des juifs d'Union soviétique. J'espère que d'utiles et fructueux échanges se poursuivront dans l'intérêt mutuel de toutes les parties concernées. DENIS GUIRAUD Saint-Juere Scandaleux Depuis la création de Différences, je suis un de ses fidèles et je vous adresse régulièrement ma participation financière. Je trouve absolument scandaleux d'imaginer que vous recevez officiellement le grand rabbin de Moscou et ses deux acolytes, dont chacun, lorsqu'il est bien renseigné, a tout lieu de penser qu'ils sont aux ordres du gouvernement soviétique, pour ne pas dire davantage. Je regrette que vous n'ayez pas jugé opportun d'annuler cette réunion . Aussi bien je me vois contraint de cesser toute relation avec vous. YVES HAGUENAUER Neuilly-sur-Seine Consternation Nous avons choisi de supprimer notre abonnement à Différences, car votre numéro consacré aux juifs d'URSS nous a consternés. Différences- n" 54 - MARS 1986 Vous avez pu obtenir la présence inespérée de deux représentants éminents de cette communauté. On aurait pu grâce à vous espérer avoir de nombreux renseignements de première main qui changeraient des habituelles calomnies répandues à ce sujet, et vous avez pratiquement hurlé avec les loups. Vous avez laissé à vos invités la portion congrue : plus d'un tiers de votre pagination était consacrée aux questions d'adversaires attitrés de l'URSS qui se répondaient euxmêmes dans leurs questions provocatrices ou à celles de votre rédacteur, à peine plus aimables. Ce qui aurait pu être un scoop journalistique s'est révélé être une tribune que l'on trouve habituellement dans d'autres publications spécialisées dans la désinformation. M. J. et R. KR/VINE Parodie Je vous prie de cesser à ce jour de m'envoyer Différences. Je ne puis accepter la parodie de débat sur les juifs d'URSS que vous avez organisée. Comment revendiquer l'honneur d'avoir posé de si pâles questions, d'avoir laissé les Soviétiques développer leur discours tout faits sans intervenir ? J'estime ne plus rien voir à faire avec une telle publicati on. PIERRE JANGAUX Nantes Bravo Bravo pour votre excellente et efficace intervention concernant les juifs en URSS. La raison l'emporte sur la passion, l'initiative du MRAP me paraît être la seule crédible. A Charles Palant et Jean-Michel Ollé, j'adresse mes félicitations. SERGE KRIWKOSK/ adjoint au maire de Marseille Outrances Je suis profondément convaincue, connaissant bien la politique de l'Union soviétique et la rigueur de son analyse de tout événement, que la dénonciation du sionisme et des crimes israéliens commis contre les peuples palestinien et libanais ne porte à aucune confusion, ne fait aucun amalgame et nulle surenchère - en est-il besoin ? - susceptibles de renouer avec l'ancien antisémitisme, et ceci, et surtout, à travers des articles, livres et brochures. Si profondément convaincue que je mets quiconque au défi d'en apporter preuve. (Quels articles, quand , dans quel journal ? Quelles brochures diffusées par qui, où ? Quels livres ? Sous la responsabilité du gouvernement soviétique ?) . Si nous ne faisons que prétendre, que juger ou si nous posons un certain regard (nous ne savons plus porter que celuilà) sur les positions claires et énergiques - encore heureux - que prend l'URSS lorsqu'il s'agit de l'agression, de l'oppression, du génocide d'un peuple, dans le cas présent palestinien, par le gendarme du Moyen-Orient made in USA, Israël - qui pourvoit en armement les racistes d'Afrique du Sud, qui expérimente et perfectionne des armes nouvelles au Liban - je trouve que l'accusation << d'outrances » est , pour le moins, déplacée, qu'elle est, une fois plus, grave en ceci qu'elle cherche à nier une réalité : l'outrance, l'outrecuidance sont du côté d'Israël et de lui seul, qu'elle est, plus encore, indécente quand on sait le sort réservé aux Palestiniens en Israël, quand on sait se souvenir de l'invasion du Liban et du massacre systématique des populations civiles palestiniennes par l'Etat sioniste et qu'on a pu voir, dernièrement, la négociation et la violation par ce même Etat de l'intégrité et de l'indépendance du territoire tunisien. Là aussi des civils ont payé. En somme, non contents de nous en prendre, depuis plusieurs années, à << l'antisémitisme » en URSS, nous en venons en plus - ce doit être maladif - à reprocher à ce pays des positions trop dures ou trop nettes vis-à-vis du sionisme. Nous dépassons les bornes et cette intervention auprès des autorités soviétiques procède plus du procès d'intention que de tout autre motivation. Il me semble, à l'évidence, que l'URSS n'a de leçon à recevoir de personne quant au respect des minorités et à la lutte pour la disparition des discriminations ou des préjugés alors que son peuple est si hautement éduqué dans le sens du bien de l'homme et de la collectivité. A notre tour de ne pas nous rendre coupable d'amalgames car en présence de certains cas si exploités en Occident, dont l'humanisme a pourtant de singulières défaillances (Walesa, martyr repu et Prix Nobel bien portant mais les syndicalistes turcs emprisonnés , torturés, exécutés: silence), il s'agit d'un problème politique uniquement et non de caractère raciste, si c'est là que nous allons puiser notre inspiration. Ce n'est pas le fait qu'ils soient juifs qui place ces individus en accusation dans leur pays mais celui d'être des citoyens soviétiques qui portent atteinte et préjudice à la sécurité de l'Etat avec l'aide extérieure et qui ne sont pas respectueux de la Constitution que le peuple soviétique s'est donnée. L'exploitation qui est faite de ces cas isolés n'a d'autre objectif que de nuire à l'image d'un pays qui s'est doté d'un système politique. économique et social différent du notre. Qu'on ait. ici et là. rejoint le camp des pleureurs de métier ne nous grandit pas. Mme LESPARRE Perpignan Charles PJJ~ tU la~ JI!~ tkl~~ Mots Droite, Nouvelle Droite, Extrême Droite Sous la direction de Simone Bonnafous et Pierre-André Taguieff 27, RUE SAINT-GUILLAUME · PARIS 7' MARS 1986 232p./20F Il BENDA ____________________________ ~ MARS 1 Jusqu'au 20 avril, La ville de Paul Claudel dans une mise en scène de Bernard Sobel, au théâtre des Amandiers, à Nanterre. Rens. au 47.21.22.25. o 3 Reprise au théâtre GérardPhilipe à Saint-Denis de Technique pour un coup d'Etat, monté par Saskia Cohen Tanugi, d'après La conjuration de Fiesque de Schiller. Renseignements au 42.43.00.59. o 4 Début de soirées rock à l'Eldorado- Bobino à Paris. La direction recherche encore de jeunes groupes intéressés par la scène . Se renseigner au 42.08.23 .50. 0 4 au 8, au Théâtre de la Ville à Paris, Paolo Conte, chanteur italien, en récital pour quelques jours seulement. Renseignements au 42. 74.22. 77. o 6 au 15, trois compagnies théâtrales européennes à Bourges. A voir, La tempête de William Shakespeare, par la compagnie de marionnettes Carlo Colla et figli (Milan). Renseignements au GrandThéâtre de Bourges. o 7 Fin des cinquièmes rendezvous chorégraphiques de Sceaux, avec notamment la compagnie Brigitte Farges. Renseignements au 46.60.05.64. o 7 au 23 mars, création de La Parisienne, d'Henry Becque, mise en scène par Agnès Celerier, au théâtre du Gymnase à Marseille. Renseignements au 91.94.18.00. 0 8 à 20h30, à Sevran, gymnase Jesse Owens, Dizzy Gillespie Quintette, dans le cadre de Banlieues bleues, jazz en 93. Renseignements au 43.85.66.00. o 10 au 18 mars, festival Jazz musique à Grenoble, du jazz américain au rock arabe, en passant par le big-band. Renseignements au 76.25.05.45. o 11 au 4 mai, sculptures en ciment du Nigeria, exposition de 18 sculptures dans le hall (Qi( LATITUDE 48 J ~ AGENCE DE VOYAGES DES PRIX ET DES IDEES 21, rue de la Roquette - 75011 Tél. : 48.06.39.59- Télex 213 384 13, bd Arago - 75013 Tél. : 43.37.46.49. Licence A 1767 de la grande salle de la maison de la culture du Havre. Renseignements au 35 .21.21.10. o 11 A Lyon, journée d'information et de réflexion organisée par les écoles de parents et d'éducateurs sur le thème << Paternage et paternité ». Renseignements à la fédération , 43.48.00.16. 0 12 Dernière du Monstre Turquin, une pièce de Carlo Gozzi , à la Maison des arts de Créteil. Renseignements au 48.99 .94.50. 0 15 Dernier jour des rencontres franco-germaniques organisées par Jacques Leenhardt et Françoise Gaillard dans le cadre de l'association Dialogue entre les cultures, au Goethe Institut de Paris. Renseignements au 37.23.61.21. o 15 à 15 heures, rencontredébat à l'auditorium de la Fnac Lille, sur le thème : « Le théâtre sourd, création marginale ? », avec la troupe des Papham, troupe de malentendants. Renseignements au théâtre La Fontaine , tél. : 20 .09 .45.50. 0 16 Dernière limite pour voir l'exposition de John Miro au musée d'Art moderne de Villeneuve-d' Ascq, près de Lille . Renseignements au 20 .M.42.46. o 16 au 25 mars, 14' Festival du film de Strasbourg, organisé par l'Institut international des droits de l'homme. Quinze films inédits en compétition . Renseignements à l' Institut international des droits de l'homme, 1, quai Leza-Marnésia, 67000 Strasbourg. o 17 au 31 mars, l'Union chrétienne de jeunes gens de Paris organise différents ateliers et expositions consacrés aux artistes du tiers monde à Paris, plus particulièrement dans cette période ceux d'origine américaine et caribéenne. Renseignements au 47.70.90.94. o 18 au 20, colloque organisé par l' AECEF et le centre des Fontaines sur le thème : « Rencontre juifs, chrétiens, musulmans, la foi et l'écoute de l'autre » . Renseignements au 44.57.24.60 à Chantilly. o 19 Sortie nationale du film de Djibril Diop Mambety , Touki-Bouki, produit par Paris films. o 20 Unique récital de Mariann Mathéus au café-théâtre la Piscine à Châtenay-Malabry. Un hommage à toutes les grandes chanteuses populaires d'Antilles et d'Haïti. Renseignements au 46.61.33.33 . 0 21 Journées internationale contre le racisme, en souvenir du massacre de Sharpeville (Afrique du Sud), le 21 mars 1960. A Paris, le MRAP affrète un autobus à l'ancienne, qui sillonnera la ville. Des artistes se produiront, des écrivains dédicaceront leurs livres, des débats seront improvisés sur les lieux de. passage avec la population. Renseignements sur le parcours et les activités prévues du « Fraternibus »au MRAP, 48.06.88.00.0 23 Dernière de L'homme gris, une pièce québécoise de Marie Laberge, à la maison de la culture de Bobigny. Renseignements auprès du théâtre. o 26 à 21 heures, Uzeb, groupe canadien, en concert à Poitiers, salle du Confort moderne. Renseignements au 49.46.08.08. 0 27 28 et 29, journées de congrès des Assises nationales des petites structures de théâtre, pour regrouper dans leur diversité les lieux de diffusion de spectacle vivant. Renseignements à Bourges , tél. : 48.65.43.66. 0 28 au 4 avril, voyage en Turquie organisé par le CEVIED, Centre d'échanges et de voyages internationaux pour études de développement. D'autres voyages sont prévus. Renseignements au CEVIED, à Lyon, tél. : 78.42.95.33. o 28 au 6 avril , le Printemps de Bourges, nouvelle monture. Au programme Touré Kunda, Karim Kacel, Higelin , Murray Head... o 29 jusqu'au 6 avril, premier congrès international de guitare à Cannes, Espace Miramar, avec de nombreux stages pratiques pour des musiques de tous les pays. Renseignements à l'OMACC, tél. : 93.99.04.04. o UMEUR La fédération du MRAP-Charente a profité du Salon de la bande dessinée à Angoulème pour éditer un album de dessins antiracistes, dont voici un échantillon, signé Million et Labachot. 1- Vot LA COMME: çA 1 Lt:UR- '\ DU Al BAt.Ai/11 tT ,.~u!stc~ q>u IlS foNT cES CoNS? / jLS S'E.N VoNT. - On peut le commander au MRAP, 89, rue Oberkampf, 75011 Paris. Tél. : (1) 48.06.88.00. Joindre 50 F + 10 F de frais de port. 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Notes

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