Dossiers thématiques - La condition immigrée: l'exigence de dignité

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Ce dossier complète le dossier Dossiers thématiques - Législation et immigration.
Il explore les conditions de vie des immigrés vues à travers les publications du MRAP.

Des immigrés pour soutenir l'économie

Des conditions infra humaines

Dés sa création le MRAP dénonce les conditions de vie imposées aux travailleurs immigrés, essentiellement nord-africains et soutient leur combat pour la dignité
Droit et Liberté s'indigne des "rafles racistes" pratiquées par la police française: "Rafle raciste sur les boulevards. Plus de 1000 algériens arrêtés au faciès comme les juifs sous l'occupation"...
"Le Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et pour la Paix, sûr d'exprimer l'indignation de tous les antiracistes, de tous les républicains, élève une protestation énergique contre les rafles d'algériens qui ont été opérées dimanche 17 septembre" : DL n°42 (voir le document)
Dans le contexte de revendication de l'indépendance algérienne, ces rafles se multipkient. DL revient en 1951 sur de nouvelles rafles racistes: "...Il s'agissait d'empêcher un meeting qui devait avoir lieu à la Mutualité et interdit la veille au soir par les autorités préfectorales... Mais les rafles se déroulèrent souvent à des kilomètres de la Mutualité. En réalité, c'est à des manifestations purements racistes que se sont livrès les agents et les CRS..." : DL n°70 (voir le document)
Droit et Liberté s'indigne des conditions de vie déplorables des immigrés, en majorité nord-africains, recrutés pour satisfaire les besoins en main d'oeuvre de l'industrie:
"Que va-t-on faire pour les 200.000 travailleurs nord-africains qu'une propagande habile a attirés en France et sur lesquels, dans la seule région parisienne, plua de 100.000. vont se trouver au cours d'un hiver qui s'annonce rigoureux, démunis à la fols de travail, de logement et de ressources pour s'alimenter convenablement?" : DL n°02 (voir le document)
Le sort des travailleurs Nord-Africains est évoqué à l'Assemblée nationale, un orateur s'indigne: " La situation tragique dans laquelle se trouvent les 500000 travailleurs algériens résident en France est connue de tous... Ces travailleurs continuent à être logés dans des conditions déplorables...exploités par des hôteliers sans conscience..." DL n°71 :(voir le document)
Un article de Dl dénonce: "Entassés sous les ponts, dans des caves, des baraques ou des foyers surpeuplés: nous voulons vivre comme des hommes nous ont dit les travailleurs Nord-Africains de Paris: DL n°91 (voir le document).

Pour plus de détais sur cette période, consulter le chapitre "Misère, racisme et exclusion" du dossier: Dossiers thématiques - La guerre d'Algérie et ses conséquences .

Une immigration bénéfique pour l'économie

En 1967, Droit et Liberté consacre un dossier aux travailleurs immigrés en France et constate: "l'examen des chiffres et des statistiques prouve que l'immigration, loin d'être un poids pour la France, est extrêmement bénéfique à son économie."
DL dénonce la condition de ces travailleurs: "L'immigré trouve un emploi où et quand on a besoin de lui. Cette constatation peut paraître triviale ; c'est cependant parce qu'elle répond à une vérité simple qu'elle est riche d'implications. Jouant, en effet, le rôle de " bouche-trou» sur le marché du travail, l'immigré va se trouver pratiquement privé d'une formation professionnelle qui lui serait pourtant d'autant plus nécessaire que son niveau est bas.".
Puis DL s'interroge: "Qu'apporte donc cette main-d’œuvre aux économies européennes, et singulièrement à l'économie française, pour que le V' Plan prévoie une immigration de 60.000 travailleurs par an d'ici 1970, puis, ensuite, de 100.000 travailleurs par an ? Il est impossible de donner une évaluation chiffrée précise du profit que tire la France du travail de la main-d’œuvre étrangère. Mais un certain nombre d'approximations sont possibles. Elles indiquent que la masse des salaires et prestations sociales (allocations, remboursements de Sécurité sociale, etc.) versée à la main-d’œuvre immigrée se situe actuellement entre 10 et 12 milliards de F. Mais que la production assurée par cette même main-d’œuvre peut s'évaluer, en tenant compte de la marge d'approximation la plus large possible, à 16 à 18 milliards de francs. Le bénéfice net pour l'économie française se montre donc, en comptant au plus juste - c'est-à-dire en considérant le coût le plus élevé et le rapport le plus bas - , à 4 milliards de francs - ." : DL n°260 (voir le document)

Dans le n°266, Droit et Liberté rend compte d'un film "O salto" sur l'immigration portugaise: "o Salto, Le Saut, c'est la triste odyssée des . travailleurs portugais chassés par la misère. La terre promise. pour eux, ce sera la France de la solitude et des bidonvilles." : DL n°266 (voir le document)

En 1968, les travailleurs immigrés participent massivement au grand mouvement social: "Cette participation massive des travailleurs immigrés est d'autant plus méritoire qu'ils sont parmi les plus menacés dans leur sécurité et leur vie quotidienne : le travailleur étranger vit toujours sous la menace d'une expulsion, ses employeurs peuvent le licencier plus facilement qu'un Français, il vit souvent au jour le jour. Ils se sont donc engagés dans la lutte, pour que les revendications générales soient satisfaites mais aussi pour que certaines revendications particulières le soient égalité des salaires, des allocations familiales, des avantages sociaux, reconnaissance effective du droit de grève et des droits syndicaux, suppression des hidonvilles et construction de logements décents à des prix abordables....la caractéristique du mouvement revendicatif est la confirmation que les travailleurs immigrés sont partie intégrante du mouvement ouvrier en France." : DL n°274 (voir le document)

Le logement, les bidonvilles

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En 1968 toujours, Droit et Liberté se réjouit de la disparition d'un bidonville, remplacé par un village. Mais au-delà de cette réussite DL questionne: "C'est toute la question des bidonvilles et des diverses formes précaires de logement qui se trouve ainsi posée, comme une lèpre spectaculaire, bien que cachée, de nos sociétés dites abusivement de consommation...Parlons donc sérieusement de choses sérieuses : qu'ont fait les pouvoirs publics en France, particulièrement depuis dix ans, pour fournir les crédits et les cadres permettant des conditions de vie à peu près humaines, particulièrement dans le domaine du logement, à des millions de travailleurs immigrés : Algériens, Portugais, Noirs d'Afrique: etc., à plus forte raison Tziganes et Gitans résidant en France," : DL n°277 (voir le document)

Dans un numéro suivant, Droit et Liberté relate les expulsions: " D'autres bidonvilles disparaissent aussi, mais dans des conditions tout à fait différentes: à ce point que leurs habitants expulses regrettent leurs quatre planches et leurs morceaux de tôle." : DL n°278 (voir le document)
Evoquant la situation chez Renault, DL constate: "On sait que la totalité des allocations familiales qui leur est due n'est pas versée aux travailleurs immigrés dont les familles sont restées au pays. Le versement effectif est calculé sur la base des allocations appliquées dans le pays d'origine. La différence ? Elle est détournée vers le Fonds d'Action Sociale dont le financement est ainsi assuré pour 70 %. Le Fonds d'Action Sociale a pour mission d'assurer le logement des immigrés intéressés, par la construction de logements sociaux ou de foyers dont la gestion est confiée à des organismes privés.
« Mais notre argent semble s'évaporer, me dit justement l'un de ces intéressés. Nous n'avons aucune possibilité de contrôle sur son utilisation. Les organisations syndicales également n'ont pas droit de regard. Dans ces conditions, sans doute serait-il préférable que nous recevions ce qui nous est dû ... » DL n+279 :(voir le document)
Droit et Liberté, évoquant les problèmes rencontrés à Argenteuil dénonce la politique du logement: "Trois ans après l'adoption de la loi visant à la résorption des bidonvilles, les scandales qui se sont révélés ces derniers temps, attirent de nouveau l'attention sur la persistance d'une situation qui fait que des milliers, des dizaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants vivent dans des conditions inadmissibles.
Les dizaines de bidonvilles ne pourront disparaître définitivement que dans la mesure où une politique du logement sera pratiquée en correspondance avec les besoins du pays. : DL n°286 (voir le document)
Les conditions de logement amènent les occupants à déclencher des grèves de loyer, et parfois débouchent sur des drames: à Aubervilleirs cinq travailleurs meurent asphyxiés dans un logement insalubre.
Le MRAP réagit: "Des questions sont posées, auxquelles il est urgent de répondre. Réuni en congrès à la fin du mois de novembre, le M.R.A.P. avait tout particulièrement étudié la situation des travailleurs immigrés. «A court terme, disait la résolution adoptée, il faut lutter pour: une politique d'accueil débarrassée des tracasseries administratives ( ... ), la reconnaissance de l'existence et de la valeur des cultures des migrants ( ...), la participation des migrants à la vie économique et syndicale et le respect de leurs libertés individuelles. la participation des organisations représentatives des travailleurs migrants à la gestion du Fonds d'action sociale en vue, notamment, d'une authentique politique de logement, la mise en place d'un statut social et économique qui garantisse l'égalité effective des droits des travailleurs migrants." : Dl n°289:(voir le document)

Puis Jacques Tenessi explique pourquoi les organisations syndicales et les associations d'immigrés veulent exercer un contrôle sur le Fond d'Action Sociale. cependant que d'Ivry à Saint-Denis les problèmes d’insalubrité sont dénoncés : DL n°293(voir le document)
Ces conditions de logement ont bien sûr des conséquences pour les enfants et Droit et Liberté consacre un dossier aux "écoliers des bidonvilles" En conclusion du dossier on note: "De la diversité des expériences relatées et des opinions émises se dégage nettement l'impression,..., que nos enseignants, pour résoudre le délicat problème auquel ils étaient confrontés, ont été presque entièrement livrés à eux mêmes, à leurs initiatives comme à leur dévouement personnel....Se fier purement et simplement... au « pouvoir assimilateur extraordinairement puissant de l'Ecole française», c'est se payer de mots, c'est méconnaître toutes les données réelles du problème, tout aussi bien que son caractère dramatique et urgent, : DL n°297 (voir le document)
Au début de l'année 1971, Jacques Tennessi dresse un bilan: "Pour ce qui concerne Droit et Liberté, nous avons évoqué sans cesse ces problèmes et, pour ne citer que cet exemple, nous publiions en avril dernier un document - Pour une politique de la migration ~ - établi par le M.R.A.P. et dans lequel étaient relevées les responsabilités des pouvoirs publics et du patronat.
En particulier nous avons souligné combien insuffisantes étaient les mesures prises en matière de logement. Le 12 février, après avoir visité un bidonville et quelques taudis, le Premier ministre lui-même, M. Chaban Delmas, déclarait : "Je compte que d'ici à la fin de l'année, nous aurons éliminé plus de la moitié des cas inacceptables; notre action vise à ce que, fin 1971, il en soit fini avec cette situation."
Nous avons interrogé des responsables d'organisations syndicales sur les problèmes de l'immigration. Tous soulignent que les préoccupations sociales pèsent bien peu en regard des préoccupations économiques et politiques. C.G.T., C.F.D.T., F.O., C.G.C. demandent à être associées à l'élaboration d'une politique d'immigration cohérente et équilibrée ..." Puis toutes les organisations syndicales expriment leur conviction que ces travailleurs sont indispensables à l'économie du pays : DL n°298 (voir le document)
En 1971 Droit et liberté titre: "Des morts dans les bidonvilles: Les drames du logement de fortune se succèdent"; Et conclut: "Il faudrait... Il faudrait...On n'en est qu'à envisager de résoudre le problème existant. Mais des travailleurs continuent à immigrer sans que rien ne soit prévu pour les accueillir. Et des gosses à mourir dans les bidonvilles. DL n°301 (p6) :(voir le document)
A la suite de la découverte, dans les pyrénnées de 80 jeunes africains abandonnés par des passeurs, droit et Liberté dénonce les "négriers": Cet événement honteux et dramatique pose le problème de l'immigration et des passeurs.
Aujourd'hui, il y a en France 8000 à 10000 travailleurs Africains non recensés. Autant dire sans carte d'identité, vraie ou fausse, sans sécurité sociale, sans garantie sanitaire. Que dire alors de leurs conditions d'emploi?... DL n°302 (p6) :(voir le document)

Discriminations et brimades

Au début des années 70, une poussée de racisme secoue le pays, les immigrés sont rendus responsables des conséquences de la situation internationale, Droit et Liberté proclame: "Immigrés, vous n'êtes pas seuls" et détaile les réactions d'un grand nombre d'organisations, tandis que Jean Pihan expose les prises de position de l'Eglise dans la lutte antiraciste. DL n°304 (p4 et 5) :(voir le document)
Dans le n°311, Marie Couton décrit "l'enfer de Penarroya" et les conditions de travail imposées aux travailleurs en grande partie immigrés: "Salaires dérisoires, accidents multiples, baraquements surpeuplés, travaux dangereux : on trouve tout cela à Penarroya."
Puis Louis Mouscron constate: "Certes, un recul des grands bidonvilles de la région parisienne est visible, par exemple à Champigny, Nanterre ou Saint- Denis ; une partie de leurs habitants a été relogée dans des conditions acceptables...mais Les bidonvilles que l'on vide emplissent les pavillons de ce genre, que des commerçants entreprenants transforment en dortoirs surpeuplés"..."Ce qui frappe dans tous les cas, c'est que des améliorations ne sont apportées aux conditions de logement des travailleurs immigrés, que lorsque ceux-ci font la grève des loyers et que des organisations solidaires alertent l'opinion, interviennent avec insistance pendant des mois et des mois auprès des Pouvoirs publics." : DL n°311 (voir le document) ; DL n°312 :(voir le document)
Dominique Defoix relate les discriminations et brimades dont sont victimes les immigrés que ce soit sur le plan du travail ou celui du logement. Et poutant: le. Le travailleur immigré rapporte, coûte peu et est docile. Mais cela suppose des conditions de vie et de travail révoltantes. A quoi s'ajoute trop souvent le racisme ... : DL n°314 (voir le document)

Droit et Liberté publie un dossier: "Vivre en bidonville" et relate les obsessions des habitants: la peur du feu, le problème de l'eau, le regard des autres...: DL n°315 (voir le document)
En 1973, droit et Liberté s'inquiète de la "bidonvilisation" de Paris : un responsable de la préfecture reconnaît : « On peut dire qu'il y a, à l'heure actuelle, plusieurs centaines de milliers de logements insalubres dans Paris. Pour ce qui est des migrants on peut en dénombrer 6 500 à 7 000 à vivre dans des conditions de parfaite insalubrité..." "Pourtant, des solutions existent. De même que les moyens pour résorber cet habitat insalubre dans la capitale. Il faudrait que l'on s'attaque, avant toute chose, aux sources du mal : la politique d'immigration - à reconsidérer de fond en comble - et la politique globale du logement qui défavorise autant les familles françaises les plus démunies que les travailleurs étrangers...". Ce même numéro donne la parole à cinq travailleurs immigrés: "...La solitude , la peur, les brimades seront les premiers compagnons de l'exilé ... Puis on vaque à la recherche d'un emploi. Au début, on est exigeant: ou bien l'on voudrait trouver une place correspondant à sa qualification, ou bien apprendre réellement un métier. Mais, au bout de quelques semaines de vaines tribulations, on accepte n'importe quoi.." : DL n°319 (voir le document)
Dans un article intitulé "être immigré en France", Dominique Defoix dénonce: "Leur origine les voue à toute occasion à la discrimination, à l'injustice. C'est elle en effet qui servira d'alibi pour refuser un logement convenable à un immigré...C'est elle, naturellement, qui sert d'alibi pour les surexploiter honteusement, les faire travailler ,dans des conditions d'hygiène et de sécurité incroyables...
Dans ce même numéro, dans le cadre de la lutte contre la "circulaire Fontanet", le MRAP propose huit mesures urgentes: "ces huit mesures, qui constituent un schéma, sont soumises à l'examen des pouvoirs publics, des parlementaires, des associations de défense des travailleurs immigrés, et de toutes autres organisations se prononçant pour une révision de la politique actuelle d'immigration."
Maryse Tripier, sociologue, analyse la condition d'OS et conclut: je crois important de détruire définitivement une idée trop diffusée. Le problème des immigrés , ce n'est pas une enclave dans un monde où tout va pour le mieux. C'est , au contraire , un problème significatif d'une situation d'ensemble, et il se situe dans un secteur essentiel de l'économie, Imaginons que tous les immigrés décident d'arrêter de travailler l'économie nationale serait totalement paralysée..." DL n°320 :(voir le document) .

Accueillir en producteurs, mais aussi en hommes

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Enfin Droit et Liberté dénonce les drames des immigrés clandestins victimes des "passeurs" et s'indigne des conditions de vie réservées aux immigrés "Leur origine les voue à toute occasion à la discrimination, à l'injustice"; Le MRAP propose 8 mesures urgentes...DL n°320 :(voir le document)
Analysant les réactions aux huit propositions urgentes du MRAP, George Laure Pau constate: "Il apparaît donc bien que le logement, l'alphabétisation, la formation professionnelle, la suppression de la carte de travail, l'allègement des formalités et des contrôles, l'octroi du statut de réfugié politique aux jeunes déserteurs portuguais, la garantie des droits sociaux et syndicaux, et des sanctions contre les véritables responsables, tels sont les problèmes auxquels il faut s'attaquer sérieusement pour répondre à l'idée de la justice la plus élémentaire...." DL n°321 :(voir le document)
Le MRAP organise la riposte contre la vague de haine raciste qui secoue la France en 1973, et dans une lettre ouverte au maire de Toulon, dont les propos attisaient les réactions de rejet des immigrés, écrit..."Il est vrai, répétons-le, que l'accueil d'un grand nombre de personnes d'origines diverses soulève beaucoup de problèmes. Il convient de réfléchir très sérieusement à la nature des structures à mettre en place, de sorte qu'elles tiennent compte du mode de vie et des aspirations culturelles des nouveaux migrants sans pour autant les isoler dans des « ghettos»; qu'elles favorisent leur insertion sociale, sans pour autant aboutir à l'assimilation forcée...Mais n'ont-ils pas, eux, des besoins? Ils devraient être accueillis non seulement en producteurs, mais aussi en hommes, porteurs de riches traditions nationales, de cultures, de civilisations que nous nous enrichirions à mieux connaître dans un esprit de respect mutuel ..." DL n°323 :(voir le document)
L'expulsion brutale d'un foyer parisien, relance à nouveau le problème du logement des immigrés: Dl n°327 :(voir le document)
En marge d'un film projetté à la télévision, l'ambassadeur d'Algérie en France est appelé à intervenir, après avoir dénoncé les "scènes de lynchage" il poursuit: " Sur le plan du travail également, les conditions ne sont pas des plus réjouissantes...Je signale entre parenthèses que pratiquement la moitié de la population laborieuse algérienne en France travaille dans le bâtiment :48 % à peu près. Et je précise que pour diverses raisons, nous enregistrons, dans les Consulats, environ un décès tous les deux jours. Autrement dit, un jour sur deux, on fait débarquer un cercueil d'un avion atterrissant à Alger. C'est une situation assez dramatique, il n'y a pas toujours au niveau des entreprises du bâtiment et des travaux publics les conditions normales de sécurité...Il y a donc toute une série de clichés à dénoncer. On nous dit par exemple que les travailleurs immigrés prennent la place des autres travailleurs et viennent manger le pain des autres. Je crois qu'il est temps de voir les choses autrement...Ils font des métiers pénibles difficiles, qu'il- n'est pas tellement aisé de donner à d'autres, en tout cas à des travailleurs français dont le niveau de vie est plus élevé. Et puis, surtout, les gens qui sont dans le bâtiment font le gros-oeuvre, ce qui permettra à toutes ,les .industries qui sont en aval de continuer leur travail. Autrement dit, ils ne prennent pas le pain des autres mais ils l'assurent..." DL n°336 :(voir le document)

Une situation qui empire

Le 21 mars 1975, à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, le MRAP donne la parole aux immigrés. A la conférence de presse organisée au siège du mouvement, les problèmes, les revendications des diverses communautés nationales ont été exposés par les délégués de plusieurs organisations représentatives.
"La situation des travailleurs immigrés est loin de s'améliorer. Malgré les promesses officielles, elle a plutôt tendance à empirer », constatait Pierre Paraf, président du M.R.A.P. Tandis qu'Albert Lévy, secrétaire général, citait un chiffre particulièrement significatif : dans le budget consacré à l'immigration pour 1975, un seul poste s'est élevé : celui du contrôle et de la réglementation !". "Les organisations d'immigrés représentées ont largement illustré par leurs propos les difficultés diverses que rencontre chacun selon sa nationalité ou sa couleur." DL n°338 :(voir le document)
Toujours en 1975, l'affire d'Arenc, une prison clandestine découverte à Marseille, met en lumière les liens entre racisme, justice et police. DL n°339 :(voir le document)
Cependant les occupants des foyers entrent en lutte: "En réponse aux légitimes revendications des locataires de ces foyers, les responsables de cette situation ont préféré durcir leur position, refusant d'accéder à leurs demandes, tout en augmentant les loyers. Ils ont ainsi pris l'entière responsabilité de la décision des travailleurs immigrés de refuser les augmentations imposées jusqu'à l'aboutissement des revendications. La vie dans ces foyers est rendue particulièrement pénible en raison du non-respect des règles d'hygiène et de sécurité de la part des propriétaires. Le chauffage et les installations électriques sont souvent défectueux voire dégradés au point d'être inutilisables; l'équipement sanitaire déjà insuffisant en regard de la législation n'est pas remplacé lorsqu'il est en mauvais état; les fenêtres, portes, toitures ne sont pas réparées lorsqu'elles sont endommagées. DL n°339 :(voir le document) : DL n°342 (voir le document)
Droit et Liberté publie le témoignage d'un travailleur malien qui conclut: "Nous qui travaillons en France, nous savons que nous ne volons pas ce que nous gagnons. Nous faisons les travaux les plus durs et les moins payés. Le soir quand nous avons fini le travail nous voudrions au moins nous reposer normalement, puisque nous avons travaillé normalement, mais cela est impossible, pourquoi? Nous le savons : parce que certains veulent non seulement profiter de notre travail mais encore de notre sommeil. Cela, nous ne pouvons pas l'accepter.". DL n°344 :(voir le document)
Dans droit et Liberté n°347, Jean Louis Sagot_Duvauroux revient sur le problème du logement et sur la révolte des mal logés et s'indigne: "S'habituer à voir sans réagir, des hommes et des femmes vivre dans des conditions honteuses, c'est préparer pour demain des renoncements que tout le monde aura à payer". DL n°347:(voir le document)
Le MRAP se pose la question: Crise à qui la faute? Après avoir exposé les prises de position des syndicats, le MRAP propose dix arguments pour convaincre et pour dénoncer les déclarations officielles qui tendent à rendre les étrangers vivant en France responsables de tous nos maux: DL n°349:(voir le document)
En 1977, Droit et liberté s'entretient avec deux médecins à propos du livre "la santé des migrants" publié aux éditions Droit et Liberté. Ils expliquent le succès rencontré par le livre: "Tout d'abord, il dédramatise le problème de ce que nous appelons « la pathologie d'apport ii, c'est à dire, si vous voulez, les maladies ou les carences qui seraient « importées par les étrangers. De ce point de vue, le livre peut permettre de rassurer totalement la population d'accueil. Mais il pose aussi une question qui n'est pas moins importante; c'est la nécessité de la prise de conscience que la santé des migrants est particulièrement vulnérable dans la situation actuelle. Ils constituent ce que l'on appelle chez nous une groupe « à haut risque ii et ceci pour de multiples raisons dont les principales sont le fait de la transplantation, le mauvais habitat, une nourriture insuffisamment riche et des conditions de travail souvent pénibles ou dangereuses."...ils concluent: "Bien souvent, un immigré n'a l'impression d'exister que comme force de travail, en fonction même de ses conditions d'existence. Ceci fait que l'on compte de nombreux cas de sinistrose; par exemple, après un accident du travail. Le travailleur se sent alors inutile, abandonné et son corps recrée perpétuellement les symptômes de son mal, même après que ses causes purement physiologiques aient disparu. Ce qu'il faut avant tout, c'est changer la mentalité de la population d'accueil." DL n°357 :(voir le document)

Un apartheid à la française

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J. P. Giovenco évoque le problème des cités de transit: "apartheid à la française" et dénonce: "Créées pour accueillir les personnes expulsées des logements insalubres, les cités de transit sont devenues, à l'usage, des bidonvilles « normalisés ». DL n°369 :(voir le document)
Droit et Liberté relaie la lutte des résidents des "foyers taudis" et leur revendication "Vivre dignes". DL n°373 :(voir le document)
Les exactions contre les immigrés se multiplient: DL n°374 :(voir le document)
En 1979 droit et Liberté consacre un dossier aux immigrés européens; "un tiers monde à domicile" et dénonce: "infra droits, super profits". Examinant le cas français, J. Barou conclut: "il ressort que derrière les apparences quelque peu incohérentes de la politique française d'immigration, s'affirment de plus en plus les intérêts des grandes firmes cherchant à réaliser le maximum d'économie dans la gestion de la main-d'oeuvre étrangère dont elles ne peuvent objectivement vouloir la diminution massive mais plutôt le renouvellement et la mise en condition la plus favorable pour lui faire accepter des conditions de travail et de salaire qu'elle a tendance à rejeter à partir d'un certain degré d'insertion dans l'économie...Économiquement, il ne peut y avoir d'antagonisme sur le marché de l'emploi entre Français et immigrés, l'intérêt des travailleurs français va même dans le sens d'une prise de conscience de plus en plus aigüe par les travailleurs immigrés de leurs droits et intérêts propres et leur insertion dans les luttes DL n°377 :(voir le document)
Retour sur les problèmes de logement et la Sonacotra qui règle ses comptes: "Refus ,de négocier honnêtement, expulsion des résidents par la police, c'est le choix qu'a fait la Sonacotra, organisme chargé de gérer des foyers de travailleurs Immigrés, face aux revendications des locataires" et en conclusion: "Les sales boulots, le sous-paiement, les marchands de sommeil, les bavures policières, les contrôles d'identité au faciès, les agressions racistes, les tracasseries administratives, le ghetto social, les expulsions de foyers. Ca commence à faire lourd sur le dos des travailleurs immigrés!" DL n°383 :(voir le document)
"Sous la loi, les hommes" titre Droit et Liberté en 1980: " On n'en finit pas de décrire les cas d'espèce qui résultent du racisme d'Etat peu à peu mis en place par le gouvernement. De loi Bonnet en note Stoléru, des contrôles d'identité racistes aux appels ministériels à considérer l'expulsion des étrangers comme une solution à tous les maux, la vie des immigrés se transforme peu à peu en un cauchemar où l'incertitude est le lot quotidien et le fruit d'un arbitraire qui, aujourd'hui, s'est introduit dans tous les aspects de la vie...Les interdictions de mariages sont devenues des cas tout-à-fait banaux. Et Jean-Louis Sagot-Duvauroux prévient: "On comprend le sens d'un engrenage qui commence par de telles mesures. Aujourd'hui , c'est: « Haro sur les immigrés! ». Demain, ça se transforme en :«Malheur aux pauvres! » DL n°392 :(voir le document)
Anicet Le Pors auteur en 1977 d'un rapport interministériel intitulé « Immigration et développement économique et social », répond ici au secrétaire d'Etat L. Stoleru qui clame que la solution du problème du chômage en France passe par le départ des immigrés. Il rapelle :"Les principales conclusions de cette mission avaient été les suivantes :
1. Les transferts de fonds des immigrés vers l 'étranger ne représentent qu'une très faible partie de la balance des paiements dont le déséquilibre ne peut avoir pour cause ce poste particulier.
2. Tout compte fait, les travailleurs immigrés sont « rentables » pour les finances publiques si l'on réalise le bilan de l 'ensemble des prélèvements obligatoires et des réaffectations collectives qui concernent les immigrés et si l'on compare ce bilan particulier au bilan global réalisé pour l'ensemble de la population française.
3. Le renvoi massif des travailleurs immigrés ne constitue pas un remède au chômage étant donné que ces travailleurs représentent une donnée structurelle de l'appareil productif national et que les enquêtes réalisées aussi bien que les calculs effectués par l'I.N.S.E.E. montrent que, dans l 'hypothèse du renvoi de 150000 travailleurs immigrés, on n'aboutit qu'à la création de 13000 emplois pour les Français dans l 'hypothèse la plus vraisemblable." DL n°394 :(voir le document)
Droit et Liberté revient sur le problème "immigration et chômage" et analyse: "Six ans après l'arrêt «total» de l'immigration, le nombre de chômeurs s'est multiplié par quatre. Pour la simple année 1979, il a progressé de 6,7% et les perspectives du VIIIe Plan à l'horizon 1985 le fixent entre 2,2 et 2,5 millions. Il est évident que les phénomènes immigration et chômage évoluent séparément sans jamais se recouvrir. On ne peut donc mettre, sous aucun prétexte, un signe d'égalité entre eux." DL n°396 :(voir le document)

Les immigrés dans la cité

En 1981, une enquête : "les immigrés dans la cité", dévoile la réalité de deux cités du Loiret, peuplées par 37 nationalités. Un travailleur social explique: "Ce sont avant tout les conditions de vie de la population qui dégradent le quartier et non pas la présence de 38 % d'immigrés, comme une certaine propagande tendrait à le faire croire...ce qu'il faut faire pour changer l'image de la cité, ce n'est pas diminuer la proportion d'immigrés, mais donner du travail. aux gens et appuyer les revendications de ceux qui travaillent, pour obtenir de meilleurs salaires. C'est aussi améliorer ·le cadre de vie dans ce quartier de l'an 2000 où les gens vivent à l'heure du siècle dernier." DL n°398 :(voir le document)
Toujours dans l'enquête "les immigrés dans la cité", Mario Granelli s'interoge: "Comment naît un ghetto?" et examine le cas de la "rose des vents", cité de Aulnay sous bois. Un adjoint au maire répond: "en construisant des cités n 'importe comment, mal désservies par les transports, où l'absence de point de rencontre se fait durement sentir, où la vie associative est inexistante parce que les rapports entre les gens sont difficiles du fait de l'isolement..le ghetto traduit en négatif ce qui pourrait être source d'enrichissement. On ne voit en l'autre qu'un concurrent, un gêneur, un témoin de son mauvais sort. Pour les communautés immigrées, le seul recours est de se rassembler, par nationalités." Dl n°399 :(voir le document)
Et Différences, dans son numéro inaugural, présente le cas de Genevilliers: 50 000 habitants dont 16 000 immigrés: Diff n°0:(voir le document)
Puis en 1982, Différences dénonce l'action des spéculateurs immobiliers dans le quartier de la Goutte d'Or à Paris : "Les propriétaires des immeubles refusent depuis des années de maintenir ceux-ci en état d'habitation. Ils veulent ainsi obliger les locataires à s'en aller: la détérioration faisant son oeuvre, l'arrêté de péril tombe, et les locataires sont expulsés, « évacués » comme on dit à la Préfecture de police. Les bâtiments vidés, les propriétaires peuvent alors espérer les vendre aux spéculateurs immobiliers, intéressés par des logements d'un tout autre standing, avec des loyers beaucoup plus élevés. Diff n°8 :(voir le document)
Puis le MRAP une fois de plus s'insurge contre le "dangereux amalgame" entre immigration et délinquance, après avoir détaillé quelques exemples, il conclut: "Pour le MRAP, lier délinquance et immigration en se contentant de dénoncer les délinquants étrangers c'est augmenter en eux leur part d'amertume envers une société qui n'a pas su les accueillir, c'est les désigner injustement à la vindicte populaire, c'est alimenter le racisme: Dl n°410 :(voir le document)
Au cours du congrès du MRAP en 1982, une sociologue dresse un historique du déséquilibre Nord-Sud dans le nouvel ordre économique mondial et de ses conséquences, elle conclut: "Le problème de l'immigration reste lié à celui de la nature des rapports Nord-Sud, c'est-à-dire de la division internationale du travail qu'organise l'hégémonie du dollar,.... Autant dire que la suprématie du capital américain est loin d'être battue en brèche. Et que si les pays du Nord, ont à vivre quelques années difficiles de croissance pratiquement nulle jusqu'aux années 1990, les pays du Sud sont encore pour un moment au pain sec et à l'eau, dans un «éternel ordre économique mondial» à l'intérieur duquel, ils ne sont à peine considérés que comme des fournisseurs de main d'oeuvre et paradoxalement comme des marchés à conquérir". DL n°414 :(voir le document)
Différences publie un reportage sur le "tiers monde à domicile" et dénonce es conditions d'exploitation des employées de maison immigrées:Diff n°4 (voir le document)
Et le MRAP à nouveau souligne; "Le MRAP met en garde l'opinion française contre l'intense campagne d'intoxication attribuant aux immigrés la responsabilité de tous les problèmes actuels, du chômage au logement, de l'insécurité aux déficits sociaux. L'examen objectif des faits montre que le développement du chômage, phénomène international, est indépendant de la présence des travailleurs immigrés et que le départ de ceux-ci, loin de le supprimer, ne peut qu'aller de pair avec la destruction de secteurs entiers de l'économie... Quant à l'insécurité, qui correspond à une situation économique et sociale dégradée depuis des années, les immigrés et leurs familles en souffrent autant, sinon plus, que les autres, comme en témoignent les agressions et crimes racistes qui se sont multipliés au cours de l'été. La campagne actuelle vise de toute évidence à obscurcir J'analyse de la situation et à gêner la mise en oeuvre des solutions fondamentales nécessaires. Elle implique la négation des droits les plus élémentaires des travailleurs immigrés, en premier lieu celui de faire valoir leur dignité...Son caractère discriminatoire, ses objectifs de diversion et de division traduisent une volonté délibérée d'alimenter le racisme comme moven d'opposition politique.. Dl n°422 :(voir le document)

Vivre ensemble avec nos différences

Assises et marche

En 1984 le MRAP organise les assises nationales: "Vivre ensemble avec nos différences", préparées partout en France par des assises locales : "Se rencontrer, dialoguer, faire l'inventaire des difficultés, mais aussi des réussites, et formuler des propositions concrètes pour que les choses aillent mieux: c'est l'objectif des Assises locales qui doivent se multiplier." DL n°425 :(voir le document)
Au cours des Assises nationales, plusieurs forums débattent des divers aspects du vivre ensemble: Habitat et cadre de vie, Entreprise et droit des travailleurs, Medlas, Histoire et cultures, Ecole et éducation, Participation à la vie publique.
Analysant un sondage "L'insertion des immigrés, l'opinion des français", Véronique de Rudder, sociologue, souligne: "que la cohabitation avec des immigrés n'induit pas de « seuil de tolérance » au niveau des opinions exprimées : les habitants des villes à forte implantation étrangère le manifestent clairement, autant que ceux du logement social collectif. Il reste que la cohabitation « non choisie », lorsqu'elle ne s'accompagne pas d'une connaissance personnelle des immigrés que 1' on côtoie, tend à induire une attitude de blocage envers l'insertion de ces immigrés dans la vie sociale ; que le nationalisme, et le poids de 1 'histoire, restent très présents dans l'opinion française, comme en témoignent les positions à l'égard de la citoyenneté (droit de vote), et l'importance de « l'algérianophobie ».
En conclusion de ces Assises, George Pau-Langevin se réjouit de la richesse des échanges: "Les Assises ont permis un dialogue fructueux, vif, animé, entre organisations, entre les différentes communautés, antillaises, gitanes, maghrébines ; entre générations: jeunes issus de l'immigration et immigrés de longue date...Ce qui est apparu clairement, c'est que pour vivre mieux ensemble il faut surtout lutter ensemble pour vivre mieux, dans l'école pour qu'elle soit meilleure et prenne en compte les aptitudes diverses des enfants, dans les quartiers pour que chacun puisse accéder à un logement de bonne qualité..." Différences spécial Assises :(voir le document)
Différences n°27 pose la question: "si les immigrés partaient?" et détaille le scénario catastrophe qui s'en suivrait, puis ce même numéro évoque les difficultés d'une commune du Loiret où 40 nationalités coexistent pacifiquement, mais qui se trouve confrontée à des fermetures d'usine. et enfin un article rapelle que l'immigration n'a pas commencé en 1981 et que l'étranger a une longue histoire en France. Diff n°27 :(voir le document)
En 1984 est organisée la "marche des Beurs" dont rend compte Différences: "Ils sont une poignée à Marseille, le 15 octobre. Ils partent «pour ne pas craquer, pour ne pas ramper ». C'est la Marche de la dernière chance. Encouragés tout au long du chemin, ils finissent en apothéose à Paris, accueillis par 70.000 personnes, peut-être plus : leur Marche devient celle de toutes les chances." A Marche relance l'espoir: "Partout des collectifs, des comités pour l'égalité sont en train de naître, sans violence et sans haine. « Le silence est mort », la Marche l'a tué. Et la solidarité français immigrés n'est déjà plus un simple slogan. Diff n°30 :(voir le document)

Seuils de tolérance?

En 1985, la municipamité de Montfermeil refuse d'inscrire des enfants d'immigrés dans ses écoles sous pretexte de "seuil de tolérance dépassé", le MRAP réagit et le maire est mis en demeure d'inscrire tous les enfants en age scolaire dans sa commune: :(voir le document)
Droit et Liberté évoque les difficultés du regroupement familial: "En effet, un grand nombre d'immigrés, en situation régulière et disposant de ressources normales, mais modestes - c'est à dire un salaire qui ne dépasse guère le SMIC - ne peuvent pas trouver de logement répondant aux normes fixées par la circulaire ministérielle de janvier 1985, n1 dans les logements sociaux ni dans le parc locatif privé . Il apparaît à l'évidence que la responsabilité des mauvaises conditions de logement dont pâtissent souvent les immigrés ne provient pas de leur fait mais incombe aux autorités publiques qui n'ont pas pris les mesures nécessaires pour assurer la construction d'un nombre suffisant de logements accessibles aux familles à petits revenus, françaises et immigrées." :(voir le document)
Le problème du logement se pose avec acuité et Différences souligne: "Droit fondamental... les termes prennent un tour dérisoire quand on sait que le choix consiste pour les immigrés soit à se rabattre sur les logements qu'on leur laisse dans le circuit privé (hôtels garnis, marchands de sommeil) ou à s'inscrire sur les listes d'attente des HLM, les seules filières normales à la mesure des ressources dont la plupart disposent. Déjà freinées, leurs demandes ne risquent-elles pas d'être carrément bloquées devant une norme communément admise : celle du droit à assigner les gens à résidence, au nom de « l'équilibre social» ? :(voir le document)

Enseigner l'histoire de l'immigration

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Ecole et immigration titre Différences en 88: "L'école est malade. L'échec scolaire est massif. Ce simple constat pose la question de l'intégration des enfants - de tous les enfants - à la société de demain. Les enfants d'immigrés sont-ils plus touchés par cet échec? Et le sont-ils parce qu'enfants d'étrangers ou parce que socialement défavorisés? Rien n'est simple. L'école - les écoles - sont un puzzle. Ce qui est sûr, c'est que l'école des immigrés n'existe pas." L'article donne des repères: "A conditions socio-économiques équivalentes les enfants d'immigrés n'échouent pas plus que les enfants de Français de souche."
Claude Liauzu, professeur d'histooire, plaide pour l'enseignement de l'histoire de l'immigration: "L'immigration est totalement absente de l'enseignement de l'histoire. Il n'y a pas à ma connaissance une seule université en France qui dispense un enseignement à part entière sur l'histoire de l'immigration. Si nous sommes un quart de la population française à provenir directement de cette histoire, il faut bien commencer à s'y intéresser..."L'immigration comme la diversité sociale et culturelle de la France ont été gommées de cet enseignement." "La société française a l'habitude de considérer les cultures du tiers monde comme des sous-cultures. On réduit ces cultures à du folklore, au couscous, au mieux à la musique. Mais elles ne sont jamais considérées comme des composantes sensibles et intelligentes à part entière. Il y a en France une ignorance profonde par rapport aux autres cultures. La clé de voûte de cette appréhension est la notion jacobine de nation qui est aujourd'hui en parfait décalage par rapport aux phénomènes actuels..." Diff n°82 :(voir le document)
La police et la justice sont-elles exemptes de racisme? A travers interview de policiers et de magistrats, Différences étudie la question: "l'idée d'une France multiraciale est une idée neuve bien que sa réalité soit ancienne. Traditionnellement, dans la conscience collective, l'Etat français, est un Etat blanc." Diff n°83 :(voir le document)
En décembre 1989 le MRAP organise les Assises de l'égalité, dont Différences rend compte dès janvier 90. En ouverture Mouloud Aounit déclare: il n'y a pas à proprement parler de probleme de l'immigration comme on a trop l'habitude de le dire. Ils vivent les mêmes problèmes que l'ensemble des populations exclues sauf que chez eux ils sont accentués. Le seul problème qui est posé aujourd'hui est celui de l'exclusion, dans lequel s'intègrent précisément les exclus parmi les exclus, qui représentent une certaine catégorie d'immigrés, pas tous les immigrés...l'immigration révèle qu'on accepte l'immigré à condition qu'il reste à sa place, qu'il ne soit quhomoeconomicus" (une simple et unique force de travail, docile, malléable, silencieuse) et d'autre part, ce qui dérange aussi, c'est un fait marquant de ces dernières années, que la plupart des immigrés sont déjà intégrés dans la crise, parfois, mais aussi ils sont des acteurs, des forces sociales, économiques, une source de création culturelle, sportive. L'immigré crée, participe aussi à la vie civile, politique, aux mouvements revendicatifs; ce bougé quotidien dérange, bouscule..." Albert Levy conclut ces Assises: "Le racisme ne se nourrit pas que de préjugés. Il prend racine dans la marginalisation socio-économique. C'estlà qu'il faut agir. La question du racisme est fondamentalement liée à celle des inégalités sociales et économiques. Celles-ci ont été récemment reconnues, répertoriées, chiffrées par le Centre d'Etude des Revenus et des Coûts (CERC), organisme dépendant du Premier ministre. Notre société comporte deux pôles: d'un côté, les plus riches, qui ne cessent de s'enrichir, de l'autre les plus pauvres qui s'appauvrissent. Entre les deux, des couches très diversifiées. Peut -être qu'au sein de cette troisième catégorie, il y en a une, particulière, les immigrés qui connaissent, comme l'a dit un intervenant, une superposition des difficultés dues à leur situation économique avec celles qui sont liées à leur origine. Dans tous les domaines abordés au cours de ces Assises, et d'autres, on observe que les immigrés et leurs familles sont frappés des mêmes maux que bien des Français de souche, mais dans une proportion plus élevée" Diff n°98_99 :(voir le document)

Dessine moi la France

Dessine moi la france, c'est le défi lancé par le numéro spécial de Différences n°106 en 1990: Une France du "melting-pot":
"L'immigration, c'est l'histoire de France. D'horizons différents, sous des formes multiples, mais à toutes les époques, des millions d'hommes et de femmes ont choisi ce pays. Ils l'ont fait. Aujourd’hui, de larges pans du nouveau peuplement de la France sont marginalisés et mis en demeure de prouver la légitimité de leur présence. Vagues de démagogie racistes, débat politicien et réglementations sécuritaires stigmatisent le basané, le clandestin, le réfugié, l'immigré. Pourtant, de la Gaule à l'Empire, le visage de la communauté France n'a cessé de s'épanouir des traits les plus divers."
Claude Liauzu interroge, qu'est ce que l'identité française et conclut:
"Sans doute sommes-nous entrés dans une période historique de « remontées» identitaires qui prennent des allures obsessionnelles et qui se nourrissent les unes des autres. Relever ce défi, qui paraît le plus redoutable de la fin du siècle, n'est possible qu'en faisant de la démocratie une composante de la pluralité et de la pluralité une composante de la démocratie.". Alternant témoignages, études, table ronde, ce numéro de Différences dresse un état des lieux de l'immigration en Frnace et appelle à "une vie plus grande": "Si la. culture française existe c'est sans doute qu'elle a touiours su accueillir, rencontrer, assimiler, côtoyer, voire, piller les modes de vie et les cultures d'ailleurs. Un formidable aller retour nourricier. Et la culture mène à tout: à conquèrir l'intelligence du monde en gardant le goût de l'inconnu et de la découverte. La compréhension des autres ne sert pas qu'aux autres. Elle sert aussi à étoiler sa propre vie dans un espace touiours plus vaste." diff n°106 :(voir le document)
Et Différeces poursuit par un nouveau numéro spécial consacré à la ville "Bouge ma ville" et constate:
"Bien que la ville moderne ait supprimé les murs d'enceinte et transformé les signes extérieurs de richesse (ou de pauvreté), les mécanismes de l'exclusion-intégration se poursuivent sous des formes différentes. La stigmatisation négative - pauvreté, immigration, chômage, échec scolaire - qui va iusqu'à la présomption de culpabilité - délinquance, criminalité, drogue - atteint directement l'habitat.".
Véronique de Rudder s'insurge contre la notion de "gettho" et s'alarme: "Le ghetto est aujourd'hui dans les têtes, il n'est pas certain qu'il ne soit pas, demain, dans les faits. La prétendue lutte contre les "ghettos" risque, in fine, d'en permettre la réalisation.".
Différences rappelle les données sur la logement; " Les étrangers vivent plus souvent que les Français dans des logements anciens; Les étrangers sont également sous-représentés dans l'habitat individuel; la proportion d'étrangers vivant inconfortablement est plus élevée que celle des Français; et insiste: "Un logement sinon rien: Il faut gagner la bataille contre la précarité par l'insertion-logement". Posant la question: C'est quand demain? Différences constate:
"La rapidité de l'action que tout le monde attend risque d'achopper sur la lenteur des modalités pratiques et sur le blocage des systèmes de représentation civique. Quel que soit le chemin annoncé vers une autre cité, la chaleur du contact humain comme la confiance entre partenaires ne se décrètent pas en haut lieu. Elles sont pourtant indispensables." Diff n°110:(voir le document)
En 1991, Jacques Chevassus dresse un état des lieux de la politique d'immigration, réalisations, projets et propositions et insiste: "L'immigration, problème de société oui, mais surtout chance pour la France. Quelle victoire si, avec l'intégration, l'immigration n'occupait plus le devant de la scène. diff n°112-113 :(voir le document)
Puis c'est à nouveau l'indignation: à Paris "deux cents adultes et deux cent soixante enfants, expulsés de leurs logements parisiens, campent dans la poussière, sous la canicule estivale. Deux bébés sont nés depuis cette veille d'anniversaire du début d'une Révolution menée au nom des droits de l'Homme, deux enfants dont la vie commence à Paris dans un vaste camp de réfugiés." Diff n°120 :(voir le document)
En 1992, Différences interviewe Sami Nair, professeur de sciences politiques qui analyse: "Travailler sur la façon dont la société française a été confrontée à ses immigrations depuis le XIXème siècle m'a mené à un double constat Tout d'abord, les immigrations changent, mais les discours restent sur le fond les mêmes, sinon qu'ils se radicalisent plus ou moins. Ensuite, cette radicalisation s'opère dans des moments précis: des moments de crise ou de transformation de la société française elle-même. Aussi le vrai problème n'est-il pas les immigrations ou les immigrés mais la société." Diff n°134 :(voir le document)

Logement et discriminations

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Préparant un colloque "Logement et discrimination", le MRAP publie un dossier consacré à ce thème sur deux numéros de Différences : "L' exclusion massive du logement social de Paris et de sa proche banlieue explique que "la majorité des ménages étrangers de l'Ile-de-France (42,3%), et plus de la moitié de ceux de Paris, ont recours à la location dans le secteur privé dans des conditions qui, on le devine sont loin de leur être favorabies et qui accentuent encore les inégalités avec les Français" diff n°145 :(voir le document) Diff n°146 :(voir le document)
En ouverture du colloque, Mouloud Aounit en définit les objectifs: "Ces rencontres se veulent un lieu de confrontation, d'échanges, de dialogue et de travail pour aboutir à des propositions.( ... )
Parmi les réponses possibles, il y a lieu de dénoncer l'absence de volonté politique sur le plan national, le pouvoir grandissant des maires et pour les élus de bonne volonté les risques de sanctions électorales. Enfin, on peut s'interroger sur un problème réel qu'est l'absence dans la loi d'un système de contrôle et de sanction. Nous estimons qu'il faudrait par exemple que la loi donne en premier lieu une valeur constitutionnelle au droit au logement, mais que faire pour mettre en oeuvre ce droit que la loi prévoit?...( ... ) nous sommes aujourd'hui dans une situation telle que dans ce domaine-là nous sommes condamnés à réussir ensemble si nous voulons parer aux risques d'explosion, de fractures et de réveils douloureux. La responsabilité de chacun d'entre nous est en jeu".
Véronique de Rudder, sociologue, souligne: "S'il est de bon ton, désormais de hurler avec les loups à l'encontre des cités et grands ensembles de nos banlieues, il n'est pas mauvais de rappeler que ceci n'est jamais que l'ordinaire historique. Des 'bas-fonds" à la zone, du faubourg aux baraquements d'urgence de la cité ouvrière à la cité-jardin, du bidonville au "clapier à lapins", les espaces et les logements des pauvres, des ouvriers, des immigrés ont toujours inquiété et irrité les bien-pensants...Les stéréotypes concernant les immigrés ne sont que la pointe extrême d'un discours qui, initialement et de façon résurgente, vise l'ensemble des pauvres, et tout particulièrement les ouvriers.( ... }."
3 groupes de travail sont définis: La loi, faiblesse et insuffisance; les associations et le droit au logement; solidarité locale et solidarité nationale. Différences publie un résumé des interventions: : Diff 149 (voir le document)
L'édition de octobre 1996 rend compte d'une enquête sur les immigrés et leurs enfants, et publie un entretien avec la coordinatrice du projet qui constate: "Les pratiques discriminatoires ont besoin d'être nourries par des représentations dévalorisantes. Pour les jeunes d'origine algérienne, il est clair que c'est lié à la guerre d'Algérie. On a des représentations qui ne sont pas mises à jour, notamment dans la sphère des chefs d'entreprise: le travailleur immigré algérien a été tellement porteur de la figure emblématique du travailleur immigré qu'on a du mal à se rendre compte que ses enfants ne lui ressemblent pas. Ces enfants d'immigrés ne peuvent pas reproduire le profil professionnel ou culturel de leurs pères et ils ne le veulent pas." Diff n°178 :(voir le document)

Liberté de circulation

A l'occasion du mouvement des sans-papiers, Jacqueline Costa-Lascoux dans un entretien accordé à Différences affirme: "Il n'y a pas de raison de ne pas penser les conditions de séjour à partir du principe de la liberté de circulation: poser les libertés fondamentales en premier et voir comment les conditions de leur exercice n'y portent pas atteinte. Si on reconnaissait le droit de vivre en famille y compris, par exemple, en permettant des allers et retours avec les pays d'origine, on ne forcerait pas certains à s'installer ici dans n'importe quelles conditions et on aurait une autre politique d'accueil et de logement social. Plus on opte pour des réglementations tatillonnes, plus on favorise des situations d'irrégularité et plus on fait le jeu des trafiquants..." Diff n°179 :(voir le document)
Toujours dans le cadre du mouvement des sans-papiers, appelé par les médiateurs des assises nationales sur l'immigration à faire des propositions, le MRAP affirme: "Il est indispensable, en premier lieu, de mettre en relief les aspects positifs de l' immigration pour les pays d'accueil : apport à la croissance et à la démographie, contribution aux transferts sociaux entre générations, enrichissement et fécondation des cultures (contre l'idée de perte d' identité), moyen de brassage de populations et facteur de paix dans le monde, amortisseur de choc économique» et motif de la réduction ultérieure de l'incitation à émigrer...
Une politique européenne raisonnable et équilibrée doit fixer comme objectif à terme d' instaurer les conditions politiques, économiques et sociales permettant d'aboutir à la« libre circulation des personnes. Alors que seule la libre circulation des capitaux, des marchandises ou des ondes existe aujourd'hui sans entraves." Diff n°181 :(voir le document)
En 1998, lors de son congrès national, le MRAP a engagé un large débat sur les concepts de « liberté de circulation" et de « liberté d'installation ", dans le cadre des propositions d'orientations du secteur Immigration. Différences publie ces propositions et souligne en particulier: "La perte de l'emploi, la cascade des échecs sociaux qui en découlent ainsi que l'insuffisance grave de logement social ont abouti à la relégation en certains lieux des catégories de population les plus pauvres parmi celles qui travaillent mais aussi les plus précarisées et les plus exclues. Ces quartiers, souvent périurbains, souffrent en outre du manque d' infrastructures, d'une insuffisante présence des services publics, d'un traitement social fortement axé sur la répression au détriment de la prévention. Les habitants immigrés ou d'origine immigrée de ces quartiers, outre qu'ils vivent les mêmes exclusions que les Français, subissent aussi de plein fouet les effets de la stigmatisation par la résidence dans des cités défavorisées ou par l'origine étrangère (nom, faciès) et sont victimes de la discrimination diff n°198 :(voir le document)

Le dossier du n°212, est consacré au thème de la liberté de circulation. Un entretien avec Monique Chemillier-Gendreau Professeur de droit international, permet d'expliquer pourquoi une politique de l'immigration radicalement différente est indispensable. Elle affirme: "Je soutiens que la politique et la morale sont indissociables. Pour faire le bonheur dans la cité, le politique doit introduire des éléments d'équilibre entre les gens. Or nous sommes dans la recherche de 1 'hégémonie et non de l'équilibre.
L'Occident a fait faire ses guerres par les hommes des pays du tiers monde, puis il les a utilisés pour asseoir son expansion économique...L'appartenance d'un individu à un groupe ~ national est quelque chose de contingent. ~ Cette donnée contingente ne devrait jamais surpasser en importance et en défense d'intérêt l'identité humaine proprement dite, qui est la vraie identité naturelle biologique. Toutes les autres identités sont contingentes. Il y en a bien d'autres que celle de l'appartenance à la nation. On a des solidarités par métiers, par activités annexes, etc. Mais on a mis un poids juridique particulier à l'identité nationale. Ce que je trouve grave et dangereux c'est qu'on ait transformé une identité parmi d'autres, celle qui résulte de la contingence historique, en une identité rigide et définitive, et c'est une erreur. Diff n°212 :(voir le document)
En 2000, Différences publie un dossier sur le combat des femmes immigrées pour l'égalité. Claudie Lesselier, historienne analyse: La féminisation des mouvements migratoires à l'échelle mondiale est significative. Des femmes non seulement accompagnent ou rejoignent des hommes migrants ou immigrés, mais développent de plus en plus leur projet migratoire propre. Elles viennent trouver du travail, une vie meilleure, elles veulent s'émanciper de situations d'oppression sociale et familiale devenues insupportables, et les demandeuses d'asile cherchent refuge face à des violences de toutes sortes. Ces migrations sont dues non seulement aux inégalités accrues dans un monde plus globalisé, mais aussi aux évolutions sociales dans les pays dominants (avec l'appel croissant de main-d'oeuvre pour des emplois de services) et aux transformations de la condition des femmes dans les pays d'origine qui les rend plus autonomes (volontairement ou par obligation).... : Diff n°223 (voir le document)

Quartiers dangereux ou quartiers en danger?

En 2003, lors d'une réunion interne du MRAP, Laurent Bonelli, chercheur en sciences politiques intervient sur le thème: "désordre public et ordre social dans les quartiers populaires.".
Il constate: "Depuis cinq ans maintenant, la sécurité urbaine est devenue l'une des principales priorités des différents gouvernements". Puis il analyse l'évolution des "quartiers": Ces quartiers ont connu entre les années 60 et 80, puis entre les années 80 et aujourd'hui, de grandes évolutions. Durant les années 60, ils étaient synonymes de progrès social et permettaient à des familles ouvrières d'accéder au confort (eau courante, électricité, etc.). Or, sous l'effet des politiques libérales en matière de logement promues durant les années 70 (aide à la pierre), les couches les plus favorisées de ces quartiers ont pu accéder à la propriété et les ont désertés. A la même époque, la crise a frappé le monde industriel non qualifié qui occupait la majorité des habitants de ces zones. Ce double phénomène de concentration/précarisation va avoir des effets très importants sur les populations les plus jeunes...Au fil des années l'intégration professionnelle s'accompagnait du passage à un mode de vie " classique ". Aujourd'hui ces mêmes jeunes ne peuvent plus s'intégrer à un monde qui décline largement, pas plus qu'ils ne peuvent occuper les nouveaux emplois sous-qualifiés auxquels leur absence de qualification les voue objectivement...
Les difficultés réelles des différentes institutions (écoles, bailleurs sociaux, transporteurs publics, élus locaux, etc.) pour " gérer " ces populations et leurs comportements se sont traduites par une augmentation multilatérale des demandes de résolution policière de ces questions."Il poursuit: "L'abandon depuis le milieu des années 90 du traitement social de la délinquance - marqué par la proclamation de " l'échec " de la politique de la Ville - est une conséquence de logiques importées des Etats-Unis qui voudraient que " la première cause du crime soit le criminel lui même "...Reprises massivement dans les discours politiques, ces visions occultent volontairement les causes sociales des désordres observés dans ces zones de relégation. Insistant sur la nécessité de traitement policier de ces questions, elles traduisent l'idée d'une" dangerosité sociale " de ces quartiers et de leurs habitants. D'une certaine manière, les quartiers" en danger" sont devenus des " quartiers dangereux "...Cette escalade est socialement catastrophique et moralement inquiétante, sauf à admettre, une fois pour toutes que le creusement des inégalités et l'exclusion de parties sans cesse croissantes de la population ne relèvent que du maintien de l'ordre social, dont la police reste l'un des piliers essentiels." diff n°245 :(voir le document)
En 2004, une étude de l'Institut National d'Etudes Démographique met en avant "l'opportune vérité des chiffres":
Non, conclut l'étude, « l'immigration n'est pas massive, elle n'est pas majoritairement clandestine, elle n'est ni prolifique ni misérable, et pas davantage insaisissable. Elle reste encore largement à découvrir». Diff n°250 :(voir le document)
Bernadette Hétier dans Différences n°252 publie une rétrospective des articles de Droit et Liberté et des actions du MRAP sur le thème du logement des immigrés. Elle conclut: la question des foyers restera posée jusqu'à aujourd'hui, tandis que le remplacement des bidonvilles par des cités de transit, puis l'installation en HLM, pourtant accueillie avec espoir, ne supprimeront à terme ni les inégalités sociales, ni les discriminations racistes ni les phénomènes de ghetto." diff n°252 :(voir le document)
En 2008, le MRAP organise un colloque sur le thème: "Immigration et mondialisation" Au cours de ce colloque, Joël Oudinet démonte des mythes entourant l'immigration et conclut: Sur le marché du travail des pays d'accueil. les conséquences négatives se limitent à certains types de travailleurs dans quelques secteurs, mais d'un point de vue macroéconomique, l'immigration a un effet bénéfique à terme sur l'emploi de l'économie d'accueil, même si son ampleur reste limitée, L'augmentation de la consommation liée à la croissance de la population relance la demande de travail et l'emploi, D'autres mécanismes permettent aussi de réduire les externalités négatives pour le marché du travail des pays d'arrivée, L'émigration de natifs vers d'autres régions plus attractives, et l'amélioration de leurs qualifications à long terme afin de ne plus se trouver en concurrence , sont autant d'éléments qui sont favorables au marché du travail. Les immigrants, bien loin de peser sur les budgets sociaux sont plutôt des contributeurs aux finances publiques. Les trois mythes relayant un impact négatif des immigrants sur l'économie d'accueil sont bien infirmés tant du point de vue théorique que du point de vue empirique." Diff n°265 :(voir le document)

Discrimination: cancer social

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A l'occasion de son 60ème anniversaire, le MRAP se penche sur les discriminations:
"Ce qui est remarquable, au sens premier du terme, c'est que les discriminations touchent essentiellement des personnes, de nationalité française ou non, appartenant à des communautés immigrées majoritairement issues du passé colonial de la France, y compris celles originaires des TOM-DOM, c'est à dire principalement des Arabes et des Noirs...
Véritable cancer social, les discriminations sont à l'évidence une véritable mise en acte du racisme. Cependant, la lutte contre les discriminations n'a jamais fait l'objet d'une politique publique déterminée, de la part des gouvernements de droite ou de gauche. La fin de non-recevoir aux revendications portées par la Marche pour l'Egalité, entreprise par les « Beurs» en 1983, qui posait avec force la question du racisme et de l'égalité des droits, montre l'état réel d'une société incapable de donner toute sa place à la diversité de ses membres...Pour le MRAP, les remèdes existent pourtant mais demandent une action volontariste de l'Etat pour mettre en place une politique active de rattrapage et de promotion des catégories défavorisées, privilégiant les problématiques sociale et territoriale et non ethnique à l'intérieur d'un dispositif qui ne doit pas sortir du droit commun, tout en offrant plus à ceux qui ont moins" Diff n°270 :(voir le document)
En 2012, Différeces publie un entretien avec deux chercheuses sur l'échec scolaire des enfants d'immigrés. Si elles observent que "Lorsque l'on s'en tient uniquement au critère d'origine migratoire, les enfants d'immigrés réussissent moins bien leur scolarité que les élèves français d'origine" elles constatent aussi :"Lorsque l'on compare maintenant les scolarités en tenant compte des facteurs sociaux et du contexte résidentiel, les différences s'estompent (qu'il s'agisse des notes aux évaluations en 6ème ou au brevet) et l'on constate même de meilleurs parcours scolaires des jeunes d'origine maghrébine (orientation vers une filière générale ou technologique et obtention d'un baccalauréat). Les différences sont donc avant tout sociales. et elles dénoncent: "Portés par les aspirations parentales à une scolarité générale longue, les enfants d'origine maghrébine se distinguent par leur volonté d'échapper à une orientation vers le professionnel. Or, ils obtiennent rarement l'orientation de leur choix, notamment à l'issue de la seconde indifférenciée où ils sont plutôt orientés vers les filières technologiques. Ils vivent très mal cette orientation imposée et éprouvent alors un fort sentiment d'injustice." Diff n°282 :(voir le document)

Une invasion? quelle invasion? titre Différences en 2015 alors que le phénomène migratoire semble s'emballer. "halte aux fantasmes ! Les chiffres sont en réalité d'une étonnante stabilité.
Selon le Ministère de l'intérieur, sur les dix dernières années et de façon relativement stable, on constate l'attribution annuelle d'environ 200 000 titres de séjour. En tenant compte des départs, on a un solde net de quelque 100 000 immigrés par an, soit 0,2 % des 66 millions d'habitants. Et dans ces 200 000 titres, il faut compter en moyenne 60 000 étudiants. Viennent ensuite les regroupements familiaux (de 80 à 90 000), les migrations économiques (autour de 20 000), entre 17 et 20 000 titres humanitaires (réfugiés) et 10 000 titres divers. Mais les sans papiers, diront certains ? Là encore, depuis des années, les différentes sources officielles ou associatives s'accordent sur un « stock » relativement permanent de 300 à 400 000. Sur le long terme aussi, la stabilité est étonnante : on compte actuellement 5,5 M d'immigrés (au sens de nés à l'étranger de parents étrangers), soit 8 %, à peu près le même pourcentage que depuis 40 ans. Et 40% d'entre eux sont des Européens...
il n'est pas sûr que la liberté de circulation et d'installation que prônent nombre d'associations, dont le MRAP, changerait significativement ces masses. Bien au contraire, de plus en plus de chercheurs pensent que la répression ne modifie pas réellement les mouvements de population. L'ouverture des frontières (dans un premier temps la facilitation des visas) éviterait simplement le caractère dangereux et inhumain que prennent actuellement ces mouvements. Elle éviterait aussi que des peuples construisent des fantasmes d'invasion qui les amènent à se dresser les uns contre les autres, au lieu de construire ce qui sera inévitablement le « village planétaire »..." Diff n°293 : voir le document)

La banlieue dans les médias

En 2016, le MRAP organise un colloque sur le thème de "la banlieue dans les médias".
Les sociologues Jérôme Berthaut et Julie Sedel analysent comment les logiques de production des reportages et les sources des journalistes expliquent l'image véhiculée par les médias et la transmission des stéréotypes.
Jérôme Berthaut s'interroge la réalisation des reportages: "...Quand vous discutez avec des journalistes, vous vous rendez vite compte qu'ils sont complètement sensibilisés au fait que les discours journalistiques peuvent être discriminants, stigmatisants, réducteurs. Pourtant, quand vous les observez en train de travailler, ils peuvent continuer malgré tout à reproduire, à remobiliser ces stéréotypes considérés comme stigmatisants, notamment par les habitants. Donc je voulais résoudre ce paradoxe: comment se fait-il que des gens qui sont complètement sensibilisés aux risques de mobilisation de stéréotypes dans la production quotidienne des reportages, peuvent dans leur propre pratique quotidienne remobiliser ces stéréotypes? Il constate l'influence de la conférence de rédaction:
"Le sommaire du journal se construit donc dans un entre soi hiérarchique qui va formuler ou reformuler les projets de reportage qui ont été proposés par les reporters." Puis le poids des sources: "...ce qui va pouvoir émerger, ce sont des sujets portés par des catégories de la population, les porte-paroles, qui ont les moyens de se faire entendre jusqu'à ce groupe de responsables de la rédaction réunis entre eux. Cela favorise certains types de porte-paroles dans l'espace public, dans la société. Autrement dit, pour une petite association de quartier ou le maire d'une commune petite ou moyenne, c'est assez difficile de se faire entendre par les conférences de rédaction de France 2, TF1 ou BFM.....un ministre comme celui de l'Intérieur a beaucoup de poids parce qu'il traite de délinquance, d'insécurité, ce qui pèse beaucoup dans les priorités gouvernementales au fil des dernières décennies..."
Il traite ensuite de la concurrence entre médias: "C'est un effet d'alignement des journaux les uns sur les autres, lié à la concurrence pour traiter ce qui paraît attendu par le public...on perçoit combien il est difficile que le quotidien d'un quartier populaire trouve à être représenté tel que les habitants peuvent le vivre...En conclusion, la mobilisation des stéréotypes on la retrouve à la phase de production et de confection du sujet final: on tend alors à reconstruire des figures d'habitants, des décors, parce que l'on considère que ça va être compréhensible par le public de la chaîne.
Julie Sedel souligne: "...Les journalistes jouent un rôle important puisqu'ils permettent à certains groupes d'acquérir une visibilité, mais ils sont parfois secondaires dans le processus de sélection des problèmes sociaux parce que, finalement, ils relaient malgré eux des informations, le discours d'un porteparole, malgré eux c'est-à-dire sans avoir forcément contrôlé l'origine de ces discours. Ils ont des impératifs temporels de contraintes économiques....Le ministère de l'Intérieur a joué un rôle très important dans le traitement des banlieues à partir des années 2000 : il diffuse ces catégories dans le débat public par le biais de ses experts, il parvient donc à imposer une certaine vision des banlieues en organisant aussi les reportages des journalistes dans ces quartiers et par le travail régulier qu'il entretient avec les rédactions. On voit donc bien les inéga lités d'accès des groupes sociaux à cet espace médiatique..."
Joséphine Lebard, journaliste freelance co-auteur du livre "Une année à Clichy, la ville qui rêvait qu'on l'oublie" traite de son expérience et dénonce: "...une caste de journalistes domine le monde médiatique- blancs et quinquagénaires -, ce qui fait que les jeunes générations sont très peu entendues: certains d'entre nous viennent des banlieues et nous avons envie d'en parler d'une tout autre manière."
Marie Laure Augry, journaliste à FR3 insiste: "Il est très important que les médias ne renforcent pas les préjugés : le prisme de la violence, le prisme de la drogue, tout dépend de la façon dont ils sont abordés dans un reportage. Ce qui renforce ce phénomène c'est que nous sommes dans une sorte de formatage d'écriture sur un certain nombre de documentaires : le choix de la musique dramatique, les images et la manière de filmer, mais aussi les mots et le poids des mots..." Elle ajoute une note d'espoir: "Depuis un an et demi, une équipe de France 3 s'est installée à Bobigny. La nature des sujets qui ont été diffusés sur France 3-lle de France depuis le début de cette expérience a beaucoup évolué. Le fait d'être installé à Bobigny, de vivre avec les gens et de s'immerger complètement a permis une multitude de sujets d'une tonalité complètement différente." diff n°299 :(voir le document)

Documents

"La vérité sur les immigrés": édition de 1987: (voir le document)
"L'immigration, un chapitre occulté de notre mémoire." Un document du Comité de Menton en 1991 (voir le document)