Différences entre les versions de « Droit et Liberté n°307 - novembre 1971 »

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    • Non au racisme ! Forum de l’amitié le 20 novembre
    • Editorial: le bien le plus précieux
    • Antisémitisme: Autour de Silbermann; Non, M. Lipsky, pas vous!
    • Immigrés: 3 heures pour 4 millions; Selon que vous serez par J. Desmoulins
    • Allemagne de l'Ouest: nazisme et nostalgie par R. Chonavel
    • Dossier à nouveau ouvert (Klauss Barbie)
    • U.S.A.: pour Angela Davis par Alain Decaux; Dans une geôle aveugle
    • Dossier du mois: Alphabétisation : pourquoi, comment ? par Pierre Crepel; interview de Robert Buron pdt du C.L.A.P.
    • Théâtre: 28 jeunes chantent l'espoir ("Double V" de F. Dusollier, J.J. Debout) par M. Kagan
    • Liberez Angela tout de suite par D. Krzywkowski
    • Cinéma: des films contre le racisme par M.F. Sottet
    • Livres: pardonner? par m'abbé Jean Pihan
    • Education à la fraternité: ils sont 750000 (enfants des bidonvilles) par Yves Pierre Ragon


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JIIOYfMBRE 1971 • Ir 3D7 • l'IIO: "U' fWICS NON AU RACISME! 20 uo\('mb,'e à la \llItualité., FORUM DE L" AMITIE 28 jeunes dansent l'espoir • ALPHABETISATION POURQUOI? COMMENT? L'Assemblée .p arle. d,e s ImmIgres AUTOUR OE « SILBERMANN » 2 Profitant de l'offre d'abonnement annuel à 15 francs pour les amis et sympathisants du M.R.A.P., valable en novembre et décembre 1971, je vous envoie ci-joint cette somme par chèque bancaire - chèque postal - mandat poste (1). NOM .. _.. .... .... _.. _.. ... .... ... .... ......... _.. .... .... .... _.. ... ... PRÉNOM ....... _ .... _.. ... ........ .... ............... .... . PROFESSION ................... ............. ......... ADRESSE ______________________________________________________ _____ _ (1) Rayer les mentions inutiles. - C.C.P. 6070-98 Paris.1I Droit et Liberté Il, 120, rue Saint-Denis, Paris-2e • NON AU RACISME à l'~ntisémitisme, à la xénophobie, ces fléaux du xxe siècle • ADOPTION en France de lois antiracistes efficaces. RESPECT des droits et de la dignité des travailleurs immigrés • SOLIDARITE avec tous ceux qui souffrent du racisme et le combattent dans le monde • PAIX au Viêtnam, au Proche-Orient. COOPÉRATION véritable entre les peuples. AVEC LE M.R.A.P. (Mouvement contre le Racisme, l'Antisémitisme et pour la Paix) VENEZ NOMBREUX AU FORUM ., DE L'AMITIE Samedi 20 novembre 1971 de 14 à 18 heures " SALLE DE LA MUTUALITE 24, rue Saint-Victor, Paris-Se '(Métro Maubert-Mutualité) MEETING. FILMS. SPECTACLES. EXPOSITION. SIGNATURES . DE LIVRES ET DISQUES. PARTICIPATION DE NOMBREUX ARTISTES, ÉCRIVAINS ET PERSONNALITES Entrée libre - Ouverture des portes à 13 h 30 CE RASSEMBLEMENT EST ORGANISÉ DANS LE CADRE DE L'ANNÉE INTERNATIONALE DE LUTTE CONTRE LE RACISME ET LA DISCRIMINATION RACIALE, PROCLAMÉE PAR L'O.N.U. DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 3 4 Une vague de haine J'ai lu avec toute l'attention qu'il mérite l'article de « Droit & liberté» paru sous le titre : « Le petit écran mal inspiré». Dois-je vous dire que je suis entièrement de votre avis et que je vous félicite hautement pour la noble réaction qu'ont suscitée en vous les émissions que vous signalez. J'ai moi-même ressenti le même dégoût et la même indignation, et me suis étonné que les Pouvoirs publics ne rappellent pas à l'ordre, aussi souvent que souhaitable, les plumitifs que nous payons pour semer des germes pathogènes en toutes circonstances. Peut-être conviendraitil d'associer nos efforts pour mettre fin à de tels abus et prévenir une résurgence néonazie qui risque de faire déferler sur le monde une vague de haine, d'intolérance avec tout le cortège de drames sanglants, d'injustice, de mépris de la personne humaine et de persécutions sadiques de toutes sortes ... Si Hamza BOUBAKEUR Recteur de l'institut musulman de la Mosquée de Paris Nous avons vu ... Mon mari et moi avons vu su r le petit écran les deux émissions « Alors, raconte» et « Silbermann ». Nous avons ressenti exactement ce que vous exposez; malheureusement, nous n'avons pas su, au moment voulu, exprimer à qui de droit notre désapprobation. Croyez à notre soutien. R. et M. VANLERBERGHE 95-Saint-Gratien Malaise J'ai ressenti, moi aussi un grand malaise en assistant à la projection de « Silbermann» ; il faut quand même convenir que les catholiques et les protestants y prennent égaIement un « bon COUp». Je vous envoie 1.Jn autre livre de Jacques de Lacretelle: « Le retour de Silbermann». Si vous avez un petit musée de l'antisémitisme, il y figurera en bonne place, gardezle , je vous offre ce « chefd'oeuvre » d'hypocrisie et de sottise; j'espère qu'il vous servira à protester afin que la télévision n'ose pas tourner la suite de « Silbermann ». J'ai d'ailleurs rencontré des gens qui n'ont pas compris la signification de cette émission, et qui ont seulement admiré le jeune comédien qui jouait le rôle de David. Sonne continuation . Mme G. GABLIN 64-Pau Qui est responsable? Ce versement pour vous exprimer mon soutien. Cependant, il me semble qu'on ne peut pas rendre le roman de Jacques de Lacretelle responsable du film mauvais, absurde qui en a été tiré. Maurice JAN ET Paris (16e) Après la lune, la Chine C'est avec un réel intérêt que j'ai lu votre article intitulé

« Après la lune, la

Chine», paru dans le dernier numéro de Droit & Liberté. Ne possédant pas de « petit écran», je n'ai pu voir l'émission de Bernard Volker à laquelle vous faites allusion; par contre, étant sinisant (je prépare actuellement une licence de chinois à la Sorbonne). je ne puis qu'applaudir à vos propos, notamment lorsque vous dites que « de la Chine, nous sommes à 99 % des ignorants, plus ou moins imprégnés d'idées reçues désuètes et périmées». Or, je puis vous assurer que, dans ce domaine difficile, que je commence seulement d'appréhender, je suis malheureusement accoutumé d'entendre autour de moi des réflexions aussi révoltantes que fausses, tenues par des racistes de tous poils et concernant « le péril jaune» (croyance étonnamment tenace dans l'imagination de nombre de nos contemporains). « l'obséquiosité et l'hypocrisie des Chinois » ... Il est pourtant possible de venir à bout de ces préjugés et de démystifier un problème que les différends MoscouPékin n'ont pas peu contribué à passionner. A côté du rôle considérable qu'ont à jouer COURRIER ici les mass media, je pense qu'il faudrait aussi encourager l'étude du chinois, cette langue si riche, si poétique et tellement peu connue; n'est-il pas, en effet, de plus douce manière de connaître un peuple que d'en entendre la musique? Dr Christian MALET Paris (12e ) La technique et l'injustice A notre époque, les gens n'ont d'yeux et d'oreilles que pour la conquête de la lune, car il paraît que c'est un grand pas pour l'avenir de l'humanité. Il serait plus grand encore si le monde avait conscience de l'importance des problèmes raciaux aux U.S.A., en Afrique du Sud, et même ... en France! Bien entendu, la société dans laquelle nous vivons s'efforce de minimiser ces difficultés et, pour les faire oublier, nous expose les progrès techniques réalisés ces dernières années. Mais l'image des noirs ne jouissant pas des mêmes droits que les blancs, des juifs calomniés et persécutés, les conflits du Viêt-nam et du Moyen-Orient, la menace d'un conflit généralisé qui entraînerait la destruction de millions d'individus - toutes ces atrocités et injustices m'incitent à devenir militant d'un mouvement comme le M.R.A.P Dany MALDAGUE 02-Séry-les-Mézières Rugby et racisme J'ai lu dans « Droit & liberté » un article qui m'a choqué. C'est au sujet de la tournée du XV de France en Afrique du Sud. Je suis un grand amateur de rugby, et j'ai suivi avec intérêt cette tournée sur le plan sportif, bien que vous m'ayez convaincu qu'elle était néfaste. Mais j'ai trouvé un peu partial votre article intitulé

« Un perdant: le sport».

Vous y notez les nombreuses blessures de Bourgarel et les placages sévères qui lui furent infligés. Le rugby n'est pas un sport de fillettes, et surtout pas le rugby sud-africain

demandez-le aux nombreux

autres blessés de la tournée, qui sont pourtant tous blancs. Aussi, n'impliquez pas la façon de jouer des Sud-Africains dans le racisme qui règne là-bas. Philippe BISSON 51-Reims. PRECISIONS Dans notre dernier numéro, trois notes correspondant aux renvois (ll. (2) et (3) de la p. 6, première colonne, ont « sauté» malencontreusement à la mise en page. Indiquons donc que les titres cités étaient extraits. dans l'ordre, de « Paris-Jour» (21-22 août 1971 et 25 août) et de « FranceSoi,, (25 août) . D'autre part, nous nous faisons un devoir de préciser que la photo de la plaque commémorative de l'école Lucien de Hirsch, souillée par des racistes, provenait de « Tribune juive . Nous en remercions notre confrère et nous nous excusons de ne l'avoir pas mentionné. dans ce nUInèro L'Assemblée nationale parle des immigrés Trois heures de débat pour quatre millions d'immigrés . Aucun vote n'est intervenu, car il s'agissait d'un point non inscrit à l'ordre du jour (p. 8). Autour de (( Silbermann )) Le débat se poursuit après cette émission. Le directeur de I·O.R.T.F. répond à deux lettres du M.R.A.P. (p. 6 et 7). Nazisme et nostalgies Anciens s.s., criminels de guerre coulent des jours tranquilles , en R.F.A. Ils se regroupent. Mais d'autres forces agissent ouvertement contre la détente (p. 10 et 11). Pour Angela Davis Aucun argument ne résiste à la démonstration du dossier juridique . Seul subsiste le délit d·opinion . Et puis, Angela Davis est noire (p. 13). 1 * Hf WEB 1-1 ---- L'A.B.C. de l'alphabétisation Qu'est-il fait, en France. pour l'alphabétisation des immigrés? Comment et par qui? Une remarque s'impose : les réalisations ne sont pas au niveau des besoins (p. 17 à 24). Des films, des pièces et le racisme Un phénomène intéressant se manifeste dans les domaines du spectacle : les questions du racisme sont traitées plus souvent (p. 25 à 28). EN COUVERTURE : Les danseurs de « Double V» sur la terrasse du Châtelet (photo Elie Kagan). MENSUEL l20, rue SaillHlenis ' - Paris (2~) Tél. 231-0~57 ~ C.C.P. Paris 0070ë98 ABONNEMENTS ' • Un an : 25 F • Ab6nnement de soutie!) J4mil/es, Réunion, cophol1e, Laos; Ca dOl/le: 25 F. Autres pays: 35 Chailgemeill. d'tidress(!. : 1 f'. Directeur de publicatioo; Albert Lévy Imprimerie La Haye DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 éditorial Le bien le plus préCieux EVENEMENT majeur, la venue en France d'une délégation gouvernementale soviétique, conduite par M. Brejnev, s'inscrit dans le climat de détente qui s'affirme actuellement dans les relations internationales. Ce voyage coïncide avec d'autres que les gouvernants de l'U.R.S.S. ont effectués ces derniers temps en Inde, en Algérie, en Yougoslavie, au Canada. Il précède de quelques mois les déplacements du président Nixon à Pékin et Moscou. Il se produit au moment de rentrée de la Chine populaire à l'O.N.U., peu après la signature de raccord des Quatre Grands sur Berlin et les rencontres du Chancelier Brandt avec les dirigeants polonais, est-allemands et soviétiques - politique « d'ouverture» qui vient de lui valoir le Prix Nobel de la Paix. Le séjour de M . Brejnev, enfin, se relie directement à la visite faite l'an dernier par M. Pompidou en U.R.S.S. , où il reçut un accueil chaleureux. Il est significatif que, selon un sondage réalisé peu avant, 74% des Français, quelles que soient par ailleurs leurs options, approuvent ce voyage, et que 4 % seulement le désapprouvent. Ces chiffres reflètent l'aspiration à la paix de notre peuple . Ils montrent le degré d'isolement des groupes qui se livrent à l'agitation la plus hostile : d'une part l'organisation raciste et fasciste « Ordre nouveau»; d'autre part les sionistes les plus extrémistes qui se posent, comme toujours, en défenseurs patentés des juifs soviétiques, et dont les méthodes provocatrices suscitent, elles aussi, de bien inquiétantes résonances. Les affiches injurieuses que ces derniers ont apposées à Paris, présentant M. Brejnev comme un criminel « recherché pour oppression antisémite», coupable notamment de la « déportation de juifs» illustrent bien l'outrance et l'irresponsabilité qui prévalent dans ces milieux. L'ignorance aussi - réelle ou feinte - car ceux qui tiennent de tels propos et qui prétendent parfois « pourchasser les nazis», ne trouvent pas de mots plus vengeurs pour fustiger les crimes hitlériens. De même, lorsqu'ils crient le mot d'ordre « U.R.S.S. S.S.», on pourrait les croire inconscients, les jeunes gens tout au moins, du fait que sans le sacrifice de 20 millions de Soviétiques, l'ordre des S.S., précisément, sévirait sans doute encore sur notre pays. I L est vrai que des interrogations demeurent concernant les juifs d'U.R.S.S. : leurs besoins dans le domaine yiddish, leur degré d'intégration, l'influence de l'idéologie sioniste, et la façon dont elle est combattue aujourd'hui, les raisons qui font que certains juifs ont été emprisonnés alors que plus de 5 000 ont pu gagner Israël depuis le début de l'année, les aspects réels de l'antisémitisme dont nul ne nie l'existence dans les régions où il était depuis longtemps enraciné. Les autorités soviétiques, divers témoignages, apportent depuis un certain temps quelques réponses . Pour partielles qu'elles soient, elles constituent un élément du dossier. Mais les groupes en question n'en tiennent aucun compte. Même ce qui devrait, en bonne logique, leur donner satisfaction, comme la progression de l'émigration et le départ, entre autres, d'une militante sioniste libérée de prison à cet effet, ils le passent systématiquement sous silence. Comme ils se taisent sur les comptesrendus de la délégation israélienne qui a voyagé en U.R.S.S. le mois dernier. Comme ils ignorent toutes les réalisations positives dont les juifs soviétiques ont bénéficié à la suite de la Révolution d'octobre. Et surtout, il s'évertuent à entretenir la confusion entre « sionisme» et « juifs» et, par voie de conséquence, entre antisionisme et antisémitisme. S'ils parvenaient à accréditer cette confusion à l'heure actuelle, l'opinion pourrait être tentée de croire qu'ils expriment les positions de l'ensemble des juifs de France, eux qui n'en représentent qu'une infime fraction et sont même désavoués par beaucoup de ceux qui se 5 sentent proches d'Israël. Il y aurait lieu de craindre, alors, que leur attitude, à contre-courant, ne favorise l'antisémitisme d'une façon plus , dangereuse que jamais. Heureusement, l'effort de clarification - auquel nous nous honorons de contribuer - a limité jusqu'à présent les effets d'une telle propagande. Une fois de plus, les développements de cette campagne, obstinément unilatérale, confirment à quel point ceux qui la mènent se soucient peu de combattre l'antisémitisme et les autres formes de racisme quand ces fléaux se manifestent de manière flagrante en France même. Ainsi se trouvent soulignées les arrière-pensées politiques qui les animent, et qui souvent, n'ont hélas! qu'un lointain rapport avec la noble cause qu'ils affirment à grands cris vouloir servir. ~ M.R.A.P., quant à lui, a pris position fermement, en toute occasion, contre l'antisémitisme et contre tous racismes, où qu'ils apparaissent. Il demande, dans tous les pays, quel que soit leur régime, l'application intégrale de la Charte universelle des Droits de l'Homme, la prévention et la répression de toutes les menées racistes, le respect de l'authenticité culturelle de tous les groupes de la communauté nationale. Il s'efforce à des jugements objectifs, fondés sur des informations vérifiées, en tenant compte de toutes les données, si complexes soient-elles, de toutes les évolutions. Il s'emploie à explorer toutes les possibilités de dialogue et de progrès. Loin de penser comme « Minute» - et probablement ceux qui participent à la même campagne - que « la détente, c'est de la foutaise», nous voyons, nous, dans la paix le bien le plus précieux; d'autant plus qu'entre autres bienfaits, elle peut ouvrir la voie à la solution de bien des problèmes qu'aiguisent les conflits et la guerre froide. En particulier, on peut penser qu'une issue pacifique satisfaisante au Proche-Orient lèverait le principal obstacle limitant en ce moment l'émigration des juifs d'U.R.S.S. qui souhaiteraient se rendre en Israël. La lutte pour la paix, estimons-nous, n'est pas incompatible avec la lutte contre le racisme. Bien au contraire, comme l'indique le titre même de notre Mouvement, elles sont l'une à l'autre complémentaires. « droit & liberté)) 6 antiséDlitisDle Autour de (( Silbermann)) 'AFFAIRE Silbermann... On peut L effectivement parler d' « affaire» dans la mesure où le film « Silbermann », adapté du roman de Jacques de Lacretelle par Pierre Cardinal pour la télévision, continue à faire des remous. « Le Nouvel Observateur» publiait aussitôt après l'émission deux articles, l'un de Michel Cournot, qui affirmait : .. Le film .. Silbermann If est un acte d'antisémitisme ••• (II) pose un deuxième problème, celui de la responsabilité de l'O.R.T.F. qui a diffusé un film antisémite, après avoir refusé de passer .. Le Chagrin et la Pitié If; l'autre, signé de Maurice Clavel, qui sous le titre .. Silbermann est exemplaire If prenait .. fait et cause et feu et flamme pour cet ouvrage If, à son avis injustement soupçonné par la presse quotidienne. Parallèlement à la protestation adressée par le M.R.A.P. au directeur général de l'O.R.T.F. à propos de cette émission et de celle qu'anime Jacques Rouland « Alors raconte» (1), Albert Lévy, secrétaire général, répondait à Maurice Clavel dans une lettre publiée dans « le Nouvel Observateur » du 4 octobre. Il écrivait notamment: ..... Ce qui est grave et répréhensible à nos yeux, c'est d'avoir affublé ce personnage (et ses proches) de tous les stéréotypes attribués aux juifs par la propagande antisémite : orgueil et arrogance, cynisme, intelligence corrosive et irritante, toutepuissance financière et politique, absence d'attaches nationales, solidarité aux dépens des chrétiens et même .. secrets transmis de génération en génération If. Tout antisémite en voyant ce film, aura pu dire : 4( C'est bien ça 1 If ••• En effet, un tel film diffusé à une heure de grande écoute et bénéficiant de l'impact indéniable de l'audio-visuel alimente les préjugés couramment répandus, et met à jour ceux qui sont encore inconscients. Peut-on s'empêcher d'inscrire au passif de ce film la réaction de ce boucher de Saint· Mandé qui, il y a quelques jours, chassait de sa boutique une de ses clientes qui s'étonnait de ne plus voir les prix affichés. « Ah! vous êtes bien une juive! » clamait cet individu. Au-delà de la mise en cause et de la réalisation du rôle de la télévision comme (1) Voir «Droit et Liberté », nO 305, p. 5. moyen d'information et de culture, il serait utile de remonter aux sources, et sans trop s'attarder sur la personnalité de l'auteur du roman, Jacques de Lacretelle, qui fut membre de la rédaction de « Combats », le journal de la Milice sous l'Occupation, s'en tenir à ses écrits et aux commentaires de ceux qui ont étudié son oeuvre. Un admirateur de Gobineau Ainsi Ramon Fernandez en préface au « Retour de Silbermann» souligne : .. Le problème de la race, entre autres a retenu son attention, et il connaît Gobineau sur le bout du doigt ( ... ). Il nous avoue que le conflit des races qui est le thème central de Il Silbermann" avait été conçu sous l'influence de Gobineau ». Rendons cependant justice à Jacques de Lacretelle qui a - trop tard - compris le danger. Il écrivait dans les « Commentaires sur Silbermann » que cite Ramon Fernandez : .. Mettre une fois pour toutes sur toute une espèce d'individus des marques indélébiles me paraît une psychologie fort élémentaire. Et je m'en méfie si bien que, lorsque j'écrivais mon livre, je m'efforçais de ne point donner à SiIbermann des traits de caractère reconnus indiscutablement comme propres aux juifs : .. Cela doit être faux If, pensais-je. En effet, toute généralisation tend forcément à s'éloigner de la vérité. Je regrette même aujourd'hui de ne pas avoir fait un portrait plus nuancé.)I Regrets largement motivés surtout quand on lit « Le retour de Silbermann». Silbermann et sa famille s'y voient attribuer les mêmes stéréotypes physiques et psychologiques que dans le premier tome. On parle de nez « légèrement courbé », de lèvres « proéminentes» (Editions du Capitole, p. 75). L'illustration de la page 121 est d'ailleurs significative comme reflet du texte. Mais Silbermann, à qui l'auteur fait proférer des arguments conformes aux stéréotypes antisémites, a changé, car il est vaincu. Il a voulu être un juif romantique et idéaliste. Or seuls survivent les juifs qui ont le sens des réalités, réalités étant, dans ce , livre, synonyme d'argent, de commerce, d'habileté. Les juifs « dominateurs ». Non, Monsieur Lipsky, pas vous , • Une illustration significative. .. Soudain, écrit Lacretelle, à propos d'un pianiste Herfitz, qui jouait pour la première fois en public, une idée naquit dans sa tête, l'idée qu'à ce moment précis il triomphait de ses ennemis. Il se vit dans cette grande salle, sur une estrade, dominant tous ces gens soumis et attentifs, et il se dit que c'était sa victoire, la victoire du juif sur les chrétiens." (p. 147). Souhaitons qu'il n'y ait pas de « retour de Silbermann» à la télévision ! CS scandales financiers ne sont pas de notre domaine. Notre réflexion, notre combat ont d'autres objets. Mais nous ne faillirons pas à notre ligne de conduite en abordant un aspect, un petit aspect, de ce qu'on appelle aujourd'hui l'affaire des sociétés immobilières. Ou plutôt les affaires. L'un des principaux accusés, M. Claude Lipsky, dirigeant du « Patrimoine Foncier », invoque pour sa défense ... l'antisémitisme. A un journaliste d' « Haaretz », il a notamment déclaré : .. Je ne pense pas que la police (française) soit antisémite. Jusqu'en 1970, j'étais convaincu qu'il n'existait pas de problème juif en France. J'étais français et j'étais juif et il n'y avait pas de problème. Mais en janvier 1971, je me suis rendu compte que sur les quinze sociétés comme les nôtres, certaines d'importance moyenne, certaines importantes, la police choisit de ne procéder à des enquêtes que dans deux compagnies les seules qui comptaient des juifs. " Une lettre de M. de Bresson, directeur de l'O.R.T.F. RéPondant à deux lettres du M.R.A .P., l'une du /1 septembre concernant la diffusion de " Silbermann ", l'autre du 20 aotÎt concernant l'émission " Alors raconte ", M . JeanJacques de Bresson, Directeur général de l'O.R. T.F., lui a adressé une lettre dont nous publions l'essentiel : « ... Je voudrais, en premier lieu, vous faire savoir que c'est avec une profonde émotion que j'ai constaté les réactions qu'à pu provoquer cette émission. En effet, de toute évidence, les responsables de ceUe émission n'ont pu avoir en aucune façon la moindre idée de racisme, ni a fortiori une intention délibérée de nuire. J'avais au surplus pris le soin de me faire présenter, avant sa diffusion, cc Silbermann D en compagnie de mes plus proches collaborateurs, sachant qu'après les épreuves subies par la communauté juive aucun doute ne devait s'élever sur les intentions réelles des auteurs A l'issue de cette projection, il ne m'est pas apparu que cette dramatique pourrait laisser la très pénible impression que vous évoquez. Au contraire, j'ai eu le sentiment que ce film dénonçait avec vigueur l'antisémitisme en en faisant apparaître le caractère odieux, puis les conséquences. Je n'ai décelé aucune malveillance dans la présentation de cette adaptation d'une oeuvre renommée. En ce qui concerne votre proposition d'organiser un débat privé avec les réalisateurs de cette oeuvre, je vous informe que j'en fait part à ces derniers par mt'me courrier. Par ailleurs, vous aviez bien voulu m'interroger au sujet de déclarations faites par des chauffeurs de taxis au cours de l'émission cc Alors raconte D, diffusée le 20 août dernier. Je n'ai pas manqué de faire part de vos critiques aux responsables de cette sl'l"ie et de lecr recommander de veiller avec soin à ce que de tels faits ne se reproduisent plus. Enfin, j'ai l'honneur de vous faire savoir que j'ai recommandé que soit étudiée la possibilité de programmer, prochainement, une émission consacrée à la lutte contre le racisme qui vous apportera une nouvelle preuve de la volonté des responsables de l'O.R.T.F. de s'unir à vous dans l'action que vous avez entreprise ... D Jean-Jacques de BRESSON. DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 Nous n'avons pas à nous prononcer sur le fond. La justice est là pour juger. Ce que nous pensons c'est qu'on peut très bien être juif, chrétien, musulman, bouddhiste ou athée et être passible des tribunaux. Et qu'il n'est pas donné à n'importe qui d'être le capitaine Dreyfus. Il est d'ailleurs étrange pour M. Lipsky de dresser, en l'occurrence, le bouclier de ses origines. Celles-ci ne l'ont pas empêché, par-delà 6 millions de morts juifs, de se porter acquéreur de barbelés de l'ancienne ligne Morice pour le compte d'une société espagnole animée par l'ex-colonel S.S . Skorzeny de sinistre mémoire, l'un des complices du génocide hitlérien. Nous remarquerons également que l'avocat de M. Lipsky, réfugié en Israël, est Me Ambre qui a beaucoup défrayé la chronique depuis quelques mois. Me Ambre qui, sous l'occupation hitlérienne a commis un livre justifiant les lois antijuives. Qu'on ait donc la pudeur de renoncer à des arguments qui, s'ils ont un certain impact dans le climat passionnel de notre époque, ne peuvent que masquer les réalités et faciliter les diversions. Un autre aspect de cette affaire apparaît préoccupant la présence de M. Lipsky en Israël. Certes, nous le savons bien, un contentieux existe entre Paris et Tel-Aviv concernant l'extradition. Il ne faudrait cependant pas que ce différend prête à interprétation. De nombreuses informations nous apprennent que la présence de M. Lipsky en Israël crée un certain malaise. Malaise d'autant plus perceptible, que cette affaire suit de très près celle de Meir Lansky, considéré comme le « roi de la pègre» et le « cerveau financier du syndicat du crime» aux Etats-Unis, lui aussi réfugié en Israël et qui demande à bénéficier, pour échapper aux poursuites de la police américaine, de la « loi du retour », Et cette information du « Monde» n'apaisera pas le malaise : .. Les autorités israéliennes ont refusé, le jeudi 8 octobre, l'entrée dans le pays à un groupe de 18 Noirs américains qui se disent israélites, et voulaient rejoindre la communauté d' .. Hébreux noirs,. établie dans le Neguev. La politique du gouvernement, a-t-il été précisé, est de ne pas admettre en Israël les personnes qui ne peuvent subvenir à leurs besoins et risquent d'être une charge pour l'Etat". R.C. 7 inunigrés 3 HEURES AINSI 4 millions d'immigrés - ils étaient 3400000 recensés au 1 er janvier 1971 auxquels il convient d'ajouter ceux qui ne le sont pas et les ressortissants des départements d'outre-mer considérés comme des nationaux français - ont eu droit de cité, à l'Assemblée nationale, l'espace d'un après-midi. Pour les 8 % de la population qu'ils représentent (10 % de la population active). pour l'ampleur des problèmes qui se rattachent à leurs conditions de vie et de travail, il faut avouer que c'est un peu court. « Un» débat, mais pas « le» débat - car force est de reconnaître qu'il s'est imposé par le biais des « questioris orales» et non comme une question dûment inscrite à l'ordre du jour. Et , fait significatif, le procédé ne donne lieu à aucun vote , ne nécessite aucun engagement, aucune mesure législative. Il est cependant remarquable de retrouver, 'de la part des cinq députés représentant tous les groupes de l'Assemblée, des analyses souvent parallèles, des constatations identiques et, parfois, des propositions qui, allant dans le sens de l'amélioration des conditions de vie des immigrés offrent bien des similitudes. Stopper l'anarchie Concernant l'afflux des immigrés M. Léon Feix (P.C.F .) a dit: liCe qu'on peut affirmer, c'est que malgré les accords inter-gouvernementaux conclus avec divers pays, les entrées d'immigrés n'ont jamais été aussi nombreuses. On n'a jamais assisté à pareille anarchie, à de tels odieux trafics clandestins de main-d'oeuvre immigrée de la part des modernes négriers. Il Sur ce point, M. Jacques Marette (U.D.R .) constate : Il Quels sont les aspects du problème des travailleurs immigrés? C'est d'abord le contrôle de l'entrée de ceux-ci, le contrôle est un privilège absolu des pouvoirs publics et il est nécessaire que vous le renforciez, Monsieur le Ministre. Il De son côté, M. Georges Carpentier (P.S.) affirme : Il Ces mesures embrassent les domaines les plus divers. La première d'entre-elles doit s'appliquer à l'entrée de ces travailleurs en France. Jusqu'à présent, cette immigration s'est faite d'une façon trop anarchique. Il 8 POUR 4 M. Gérard Ducray (indépendant) va dans le même sens quand il dit : Il Le contrôle de l'immigration me paraît le problème primordial. Les inconvénients et les dangers d'une immigration incontrôlée sont évidents. Il , De même pour M. Jean Poudevigne (centriste) : Il Notre pays compte plus de 3 millions de travailleurs étrangers : c'est beaucoup; mais ce ne serait pas grave si le phénomène était maîtrisé, si l'on savait précisément qui entre et qui sort. Il Pas de ghettos Dans sa lettre aux préfets, en date du 27 août 1971, M. Chaban-Delmas demandait Il d'éviter toute concentration géographique qui présenterait vite un dangereux caractère de ghetto Il. Nous voilà, de plain-pied, dans le difficile problème du logement des immigrés. Le débat de l'Assemblée nationale ne pouvait l'ignorer. Référons-nous encore au Premier ministre. En février 1970 il déclarait : Il La moitié des immigrés des bidonvilles et en garnis seront relogés dans des conditions convenables, avant fin 1970, les autres avant fin 1971. Il Il est indéniable que certains efforts ont été accomplis en dix années 120000 personnes ont été relogées. Mais le but est loin d'être atteint, quand on constate que les excédents entre les entrées et les sorties d'immigrés ont été de 195000 en 1969, de 260000 en 1970 et de 160000 pour les cinq premiers mois de 1971 ! Des nuances Tous les orateurs, avec des chiffres voisins, ont constaté ce fait. Autre constat unanime : les travailleurs immigrés sont utiles à l'économie française. Mais est-ce que la réciproque joue à plein? Là encore, à quelques nuances près, les réponses sont identiques : non. Les divergences apparaissant lorsqu'il s'agit de fixer les responsabilités. Ainsi, M. Léon Feix pose le problème en ces termes : Il Nous estimons que les ressources du Fonds d'action sociale doivent être, en outre, alimentées par une contribution spéciale de 2 % sur les salaires, traitements et indemnités versés par les employeurs de main- MILLIONS d'oeuvre immigrée. Le patronat n'a pour ainsi dire rien fait jusqu'à présent et il n'a jamais été mis en demeure par les Pouvoirs publics de loger décemment les travailleurs immigrés qu'il utilise. Il M. Jacques Marette, pense lui que Il l'économie nationale supporterait parfaitement une taxe de 1 % sur les salaires versés aux travailleurs étrangers, taxe dont la perception permettrait d'accélérer la construction de logements Il. M. Georges Carpentier considère qu'il Il faut aussi construire des foyers pour les célibataires, des logements pour les familles. Vous devez donc accroître les moyens du Fonds d'action et, aussi, envisager, pour les étrangers de porter à 2 % la contribution patronalell. Pour M. Gérard Ducray : Il La théorie, bien sûr, le contrat d'introduction signé par l'employeur qui s'adresse à l'Office lui fait obligation d'assurer le logement du travailleur étranger qu'il va employer. Mais, en pratique, comment les choses se passent-elles? Le logement est-il toujours fourni? Il Poser la question, c'est y répondre. La moindre des choses Dans ce débat, trop court, d'autres questions furent abordées . Dignité , intégration des immigrés dans notre société, lutte contre le racisme . Ainsi fut revendiquée , pour eux, la possibilité d'assurer leurs droits syndicaux, leur participation aux organismes qui ont à connaître et à décider de leur sort. Tout serait certainement simplifié si la loi codifiait toutes les perspectives raisonnables mises à jour par ce débat, en un mot si un statut des travailleu rs immiqrés était élaboré. Cet aspect important d'une politique nouvelle, que le M.R.A.P. , depuis des années suggère - avec propositions à l'appui - a retenu l'attention de M. Léon Feix, qui a pressé le ministre de faire droit à cette revendication des travailleurs immiqrés. Le ministre , M. Fontanet, a répondu. Il a expliqué l'action gouvernementa le et noté les progrès accomplis. Quant à l'avenir, il ne pouvait pousser plus loin le débat. Jacques DESMOULINS. L'industrie du sommeil Loger les immig,""s est une illdustri\' 1 luerati",, Mais la ..t'sistanee aux" marchands de sommeil'" se (,,"veloppe. A O\onnax (Aill). des Algériell~. logés à' 300 dans un foypr pré-, u pou l' l,O. et qui paient 80 F par lit. Ollt fait gri've quand le gé-rant a vo ulu accroître encore l'elltassement. A Paris (2(1"). ,100 Al"ricains "i"elll dans des réduits sordidt,s (photos ei · dessus). LI' propriéta il'e ellcaiss\' 2B 000 1: par mois. Malgr", cela. il doit 1:,000 F à [·E,D.F. Son géra nt a nl" nacé d'un poignard I, 's élus communistes qui venaient enqu!'ter sur place 1.- 20 octobre . A Boulogne. M, F ran cis Bouygues. II' promoteur bien conn u. a fait l'xp ulscr d'un pa, ilion 45 u'availll'urs immig"('s et les deux religieuses qui les hébl'rgl'aient. A l'appel dl' la C.C .T .. du P.C. F. du M.R.A.P .. la population s'est mobilisé!" pour Il's faire réillt,"grl' I' II' .Îour m"me Pt rpclamer un logement décellt. Les ,\l'ricains du loyel' dl' Pierrefiu,', soutenus par la municipalit!, et 1.M. R.A ,P. ont obtcnu plcine satisfaction

changcment de gé"ant, réparations.

llon-remboUl'sen1l'nt des IOyl' rs impayés pendant la grè,,1' , UnI' grand,' f.,te a été o "ganisél' pou l' cé lébrer 'T succès . DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 Selon que vous serez ... QUAND, en août dernier aux Coudreaux, M. Isèle, retraité, est battu à mort par de jeunes voyous, une partie de la presse se déchaîne. Les coupables sont des Algériens et leur crime devient exemplaire de la mentalité de la .. racaille nord-africaine». Une campagne s'engage. Des avertissements sont adressés à la population tel celui-ci «La racante nord-africaine assassine les gens et fait la loi aux Coudreaux •• , Jusqu'où ira la pourriture? ... " Cette prose ne suffit pas encore. On organise la provocation sous la forme d'un faux grossier et largement diffusé où l'on peut lire : «On nous reproche certains viols, mais cela ne compensera pas la guerre d'Algérie... nous avons gagné la guerre et nous avons le droit de prendre des Françaises... nous qui avons conquis la France jusqu'à Dunkerque ... " Et, pour mieux tromper, on signe «L'Amicale des Algériens en Europe", Celle-ci réagit aussitôt : Dans un communiqué elle précise

«Un tract émanant soi-disant de

l'Amicale des Algériens en Europe a été distribué dans certaines entreprises et certaines cités de la banlieue parisienne par des groupes fascistes bien connus. Il s'agit-là d'un faux grossier destiné à créer la suspicion entre les travailleurs algériens et leurs camarades français... Les arguments utilisés dans ce tract portent la marque et le style de publications fascistes connues dont la haine à l'égard de l'émigration algérienne ne s'est jamais démentieN, " Le faux, n'en doutons pas, eut un certain impact. Les propos tenus, les pétitions signées aux Coudreaux ont traduit pendant plusieurs semaines la montée du climat raciste, sciemment et systématiquement entretenu par certains (1). Quand la presse se tait Mais quand un travailleur algérien est roué de coups par des voyous, qu'il en meurt, la même presse se tait. Cela s'est passé à Boulogne dans la première quinzaine d'octobre et, selon des personnes de bonne foi il semble que les policiers ont refusé le témoignage de passants ayant assisté à l'agression. Chez Renault, là où travaillait Gacem Ali, la victime, un tract de la C.G.T. a condamné cet acte odieux. Déjà, le Il septembre, un jeune Algérien avait subi le même sort à la sortie d'un bal. Cela se passait à Clichy-sous-Bois. A 3 km des Coudreaux ... Même silence. Nous pourrions multiplier ces exemples de surdité et de cécité des journaux concernés. Nous voudrions évoquer d'autres faits. Le négrier et le rabatteur Le 4 octobre dernier la cour d'assises du Nord juge Germain Liénard. Il a assassiné un auto-stoppeur, M. J.-F. Lemelle, a tenté d'abuser de la femme de celui-ci puis de l'assassiner. Nous sommes donc confrontés à trois chefs d'accusation: meurtre, tentative de viol, tentative de meurtre. Germain Liénard est condamné à pero pétuité. Le 4 octobre dernier les assises des Alpes-Maritimes jugent Mohamed Lebdiri. Il a assassiné un chauffeur de taxi de Nice, André Bonnichon. Mohamed Lebdiri est condamné à mort, au milieu des cris de haine. En septembre dernier M, Marcel Dupont, ancien policier quitte sa belle villa de Vernouillet dans les Yvelines. Il fournissait des permis de séjour et de travail aux travailleurs immigrés. Moyennant finances bien entendu. Ses ({ services» valaient entre 2 500 et 3 500 F par personne. Environ dix millions ont été ainsi soutirés aux immigrés. M. Marcel Dupont avait des complices. Deux fonctionnaires du ministère du Travail d'abord. Un ({ rabatteur» arabe ensuite. Le premier fonctionnaire a été éloigné «pour un temps indéterminé". Le second a été suspendu pour quatre mois. Le .. rabatteur» arabe a été jeté en prison. M. Marcel Dupont se dore au soleil d'Alicante attendant sans trop d'inquiétude le mandat d'arrêt international lancé contre lui. Sans doute a-t-il quelque raison puisqu'évoquant cette affaire M, Pléven déclarait au Sénat : (( Ce n'est ni leur faute (celle des juges de la Cour de sûreté) ni celle du parquet si nous n'avons pas pu saisir au passage un négrier qui avait eu l'habileté de ne créer aucun des éléments constitutifs d'un délit d'escroquerie. Mais je le déplore autant que vous,,, Selon que vous serez... comme l'écrivait le bon Jean de La Fontaine. Mais la fable, ici, côtoie le drame. J.O. (I) Voir en page 35 comment, avec le M.R.A.P" d'autres organisations et des personnalités. la riposte fut organisée. 9 AllelDagne de l'Ouest NazisDle et nostalgies SAMEDI 17 octobre s'est constituée, en R.F.A., « l'Association des anciens soldats de la 2° division blindée SS Das Reich ». Elle compte environ deux cents adhérents. Son porte-parole est Hermann Buch, beaufrère de Martin Bormann et officier d'ordonnance de Himmler. « Das Reich », c'est la sinistre division qui participa aux massacres de Tulle et d'Oradoursur- Glane. A Rosenheim, en Haute-Bavière, des manifestations de protestation des victimes du nazisme, des syndicats, des jeunes, qui se déroulaient le même jour ont été dispersées par la police ouestallemande. Honneur S.S. Le président de l'Association des anciens S.S. de la Division « das Reich», un certain Wisliceny, « le plus décoré» de ces professionnels du crime, présente ainsi ses complices

Il Beaucoup ont fait carrière dans l'Etat et dans l'économie. Nous ne sommes pas, comme le prétendent ceux qui nous insultent, les vestiges du passé. Nous avons les deux pieds dans cet Etat. Cette place, nous l'avons conquise de haute lutte. Il Voici maintenant les propos du général de brigade Otto Kumm Il C'est notre idéalisme qui aujourd'hui est devenu si rare, dans un monde de matérialisme grossier, notre idéalisme qui nous a poussé à entrer dans les S.S. où nous savions qu'on exigerait de nous d'extraordinaires sacrificesll. Et le général présente son programme

(( C'est à nous, anciens de

Il das Reich Il, de faire en sorte que ne disparaissent pas des vertus humaines comme la loyauté, la conscience du devoir, le sentiment des responsabilités et des notions comme l'honneur, la liberté, la camaraderie. Toutes ces idées qui forment notre tradition ont pour nous, comme aboutissement, le nom de notre vieille et fière division (( das Reich Il. Et il conclut : Il Le but de notre association est de maîtriser le présent et de prévoir l'avenir Il. 10 Ces faits et de nombreux autres, particulièrement le cas Barbie dont il est fait état dans ces pages, sont révélateurs du climat qui règne en République fédérale allemande. Ils prennent une signification particulière en cet octobre 1971, 25° anniversaire de la condamnation des criminels de guerre à Nuremberg. Ceux qui furent pris. Une concordance évidente Quand nous avons dénoncé le N.P.D. et son action néo-nazie, ses appels à la revanche et à la reconquête nous l'avons fait en fonction du climat dans lequel il développait et développe encore ses objectifs. Ce parti est aujourd'hui en perte de vitesse. Et tous les observateurs sont unanimes pour considérer que c'est au profit de la démocratie chrétienne ouestallemande (C.D.U . et C.S.U .). C'est dire que pour un certain nombre d'électeurs, les nuances pouvant exister entre les programmes et les actions préconisées par ces formations ne sont pas des obstacles insu rmontables. Ce phénomène s'explique donc par une concordance évidente des points de vue, dans la volonté proclamée de faire échec à tous les pas qui peuvent être accomplis vers la détente internationale. C'est en particulier contre le traité signé à Moscou entre le chancelier Brandt et le gouvernement soviétique, contre le traité de Varsovie, contre l'accord quadripartite sur Berlin, contre leur ratification par le Parlement de Bonn que se coalise et s'agite tout ce que la R.F.A. compte de forces hostiles à la détente en Europe. C'est ainsi que du 9 au 11 juillet dernier, à Munich, s'est tenu le rassemblement des associations ouest-allemandes qui se refusent à reconnaître la Silésie comme partie intégrante de la Pologne. Sur les prospectus distribués, on pouvait lire : Il L'Allemagne, c'est aussi Breslau, Konigsberg et Stettin ... Il Et, fait significatif, des télégrammes de félicitations furent adressés aux organisateurs de ce rassemblement de 150000 personnes par l'ex-chancelier Kiesinger, par Rainer Barzel, actuel président de la C.D.U ., par Axel César Springer, le « Napoléon de la presse» d'outre-Rhin. Contre la détente Dès le 24 août « Die Welt» écrivait : Il Quel que soit le jugement plus ou moins favorable de la C.D.U.-C.S.U. sur le règlement de la question de Berlin, il est certain, à l'heure actuelle, qu'il n'aura aucune influence sur son attitude négative à l'égard de la ratification des accords avec l'Est. Le Il non Il de l'opposition au débat de ratification a été annoncé d'avance par le président du groupe, Barzel, un Il non Il dont le groupe ne se départira pas. Il Si Barzel est devenu l'homme fort de la C.D.U. depuis le récent congrès de celle-ci c'est en premier lieu grâce à la dénonciation de la politique d'ouverture à l'Est du gouvernement de Bonn, et à sa hargne contre la détente qu'il doit son accession au sommet de cette formation. Une hargne que partage d'ailleurs F .-J . Strauss, leader de la C.S . U. (fraction bavaroise de la Démocratie-chrétienne). Celui-ci déclarait en effet, dès la signature de l'accord quadripartite sur Berlin que la présence ouest-allemande dans cette ville, Il si elle n'est pas sapée en totalité est cependant pratiquement réduite Il. Ce qui est une contre-vérité. Et poussant jusqu'au bout son développement, F.-J. Strauss condamnait lors du congrès de la C.S.U. réuni en octobre à Munich , Il les Alliés et les neutres qui continueraient de craindre l'Allemagne d'hier plutôt que le communisme d'aujourd'hui Il. Voilà qui est clair. Car « l'Allemagne d'hier», c'était quoi? .. Nous bouclons ainsi la boucle qui nous a conduit des anciens criminels de guerre, de leur impunité, à l'examen des conditions qui font qu'une telle situation est possible et si dangereuse. Il n'est pas trop osé en la matière de considérer comme essentielle cette phrase prononcée le 3 avril dernier, à Munich encore , par le Dr Gerhard Frey devant des militants de la C.D.U., de la C.S.U. et des représentants des organisations irrédentistes: Il Nous sommes prêts à gagner politiquement la Seconde Guerre mondiale. Il Cette phrase peut être appréciée comme le ciment unissant tous ceux qui s'opposent à tout progrès de la détente. Elle rejoint les déclarations du président de l'Association « Das Reich» que nous publions dans ces pages. La récente rencontre du chancelier Brandt et de M. Brej~ev a contribué de façon décisive à o~vrir I.a ~oie d'une véritable dé,tent~ en Europe. A droite, un nostalgique du nazisme et de la guerre frOIde : Hermann Buch, porte-parole de 1 associatIOn des massacreurs dOra dour. Cette orientation n'ec;t pas l'apanage de la R.F.A., même si c'est dans ce pays qu'elle s'exprime avec le plus d'outrances et qu'elle revêt un caractère particulièrement inquiétant. Des forces existent en France qui se réclament d'options identiques. Ainsi « Ordre nouveau» pour qui toute manifestation de bons rapports entre Etats donne lieu à des velléités de coup de force - la visite de Léonid Brejnev surtout. Ainsi « Carrefour» (parmi d'autres journaux) qui , enfourchant les vieux démons d'une période qu'on croyait résolue, écrit (le 13 octobre) : Il Rainer Barzel nous offre une seconde chance. Dispersés, les amis français de la C.D.U. doivent se regrouper à tout prix pour la courir. Il Chez nous, les forces existent pour s'élever et lutter contre ces retardataires de la guerre froide . En R.F.A. aussi. Et les élections qui se sont déroulées le 10 octobre à Brême le prouvent. Les résultats montrant un gain appréciable du Parti social-démocrate et un recul sensible de la C.D.U. pourtant activement soutenue par MM. Strauss et Barzel pendant la campagne électorale. Les commentateurs spécialisés, sans voir un test national dans cette consultation, admettent que la politique nationale plus que les phénomènes locaux, y ont joué un grand rôle . Le Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et pour la paix, comme son nom l'indique, a choisi son camp : celui de la détente. Roger CHONAVEL DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 Dossier a" nouveau ouvert

cAFFAIRE Klaus Barbie ne sera

pas escamotée. Le procureur gi·néral de 1\lunich. qui avait clos la procédure a dû, enfin, s'engager à ouvrir H nou\'t'au Ir dossit'r du "boucher de Lyon » . Rappelons It's faits. Six mois après la signature dt' la Convention francoallemande sur les crimes de guerre. le procureur RabI. de Munich. a~ait di-cidé de suspendre les poursUItes contre r ancien chef de la Gestapo de la région lyonnaise. Barbie s'est. signalé par de nombreuses atrocltes commises envers les résistants rt les juifs. Il l'st entre autres cou pablr de la 'murt dl" Jean Moulin, prrmier président du Conseil national de la Résistance, et responsable de l'envoi en di-portation de nombreux lyonnais dont quarante et un enfants juifs de truis à treize ans. La Mcision prise à l'épuque par le procureur Rabi était, pour le moins. un désa\eu dl" l'action dl" la Justice fmnçaist' qui par deux fois, en mai 1947 et en novembre 1954, avait condamné Klaus Ral·bie à la peine de murt par contumace. Le scandalr a suscité la réprobation normale de la part des organisations de déportés et de résistants français qui. le 12 septembre dernier se sont rendus en déli-gation à Munich pour protester contre cette di-cision inique. Gilles Lewskowitz. président Mpartemental du M.R.A.P. dans le Rhône faisait partir de cette Mlégation. A la suite de crtte di-marche, le procureur s'i-tait engagé à rouvrir le dossier si un témoin pouvait être retruuvé, prouvant quI' Barbie i-tait au courant du SOl"t qui attendait lrs di-portés. Etrange rrquête 1 Ainsi devant les faits : mise en accusation par drs organisations rrprésentativrs de milliers de résistants et de déporti-s, et dt'ux jugements idrntiques prononcés à Lyon. fondés SUI" d ' in~lOmb!'ables ti-moignages, la preuve n aura~ t pas encore i-té suffisante pour le tnbunal dl" Munich. Il lui fallait un éli-ment nouveau. Cet i-Iément nouveau devait être un témoignage certifiant des propos de Barbie. Mais les. actrs de Barbie'? Le procureur voulrut, comme tant de magistrats ouest-alle~a?ds l'ont M.jà fait. disculper un cnmll1el nazi en le di-clarant non-I·(·sponsable. Le ti-moignage l'st intt'rvenu ... Le Parquet munichois s'est t'n outre ri-servé la possibilité d'élargir la proci- dure à tous les crimes de guerre dans lesquels Barbie pourrait être impliqui- . C'est heureux !. Mais, n ·~· tait: ce pas trop que de lals~er c~OI~e .a l'opinion publique fl'ançalse, a 1 Oplniun publique internationalt' qu 'u n éli-ment nouveau i-tait nécessaire? Il reste à rt'trou\'!'r Barbie. ,lui le protège '? 11 Bons de Une information réjouissante! deux voyages : Dakar et la R.DA. s'ajoutent à ceux déjà prévus . 12 soutÏen Avec • La croisière Méditerranée-Mer Noire • La Finlande • La TunisIe • Londres Ce sont six voyages et de nombreux autres cadeaux qui sont offerts aux souscripteurs des Bons de Soutien du M.R.A.P.

  • Pour participer au tirage qui aura lieu le

samedi 11 décembre à 16 heures au siège du M.RA.P., 120, rue Saint- Denis, Paris-2e , VOUS DEVEZ, SI VOUS NE L'AVEZ DÉJÀ FAIT, RÉGLER VOS BONS DE SOUTIEN ET NOUS RETOURNER LES TALONS.

Le carnet: 30 F - Le Bon 3 F (C.C.P. M.R.A.P. 14825-85 Paris) U.S.A. POUR ANGELA DAVIS NOUS vivons en un siècle de fer. Par rapport au XIX· siècle, la régression est évidente quant à un concept essentiel : la tolérance. Croit-on que c'est par hasard que dans les années mêmes où les Rosenberg s'asseyaient sur la chaise électrique, on pendait Rajk et ses amis à Budapest, Slansky et les siens à Prague? Les Rosenberg étaient innocents. Mais Rajk et Slansky l'étaient aussP. Arrêter quelqu'un, juger quelqu'un, mettre la vie de quelqu'un en péril, non parce qu'il est coupable, mais parce que ses opinions politiques, religieuses, philosophiques, ses origines, ou encore la couleur de sa peau, font présumer qu'il est coupable, c'est à mes yeux run des plus grands crimes qui puisse se commettre contre l'homme. Le processus est élémentaire; il s'est manifesté tant et tant dans les années récentes que l'historien peut le constater sans difficulté. Or, l'historien, précisément, constate que c'est là ce qui se produit aujourd'hui aux Etats-Unis à l'encontre d'Angela Davis. Elle risque la mort devant un tribunal, alors qu'il n'existe aucune preuve du crime dont on l'accuse. Mais comme les opinions qu'elle professe sont insupportables au gouvernement, on estime que ses opinions compensent amplement le défaut de preuves. Quand Voltaire s'est convaincu qu'il s'était commis à l'égard de Calas une iniquité du même genre; quand il s'est senti assuré que l'on avait rompu vif Calas, non pas parce qu'il était démontré qu'il avait tué son fils, mais parce qu'étant protestant, on l'avait supposé capable d'avoir tué son fils; alors Voltaire a Il crié Il. Il était faible, malade et - il l'a avoué lui-même - il avait extrêmement peur. Cependant, pour que triomphe la justice, il a cc crié Il. Et la justice a triomphé. Chaque fois qu'il se produit dans le monde un fait d'intolérance, il est du devoir de tous les hommes de bonne volonté - ces hommes dont parle l'Evangile - de cc crier Il eux aussi. Il faut Il crier Il pour Angela Davis. Alain DECAUX Dans une geôle aveugle Il Y a un an , le 13 octobre 1970, Angela Davis, jeune professeur de philosophie à l'Université de Los Angeles était arrêtée à New York et inculpée de Il complicité de kidnapping, de meurtre et de conspiration Il. Depuis près d'un an Angela Davis est enfermée à la prison du comté de San Marin et exige l'ouverture de son procès afin de proclamer son innocence face à l'opinion publique mondiale et dénoncer le caractère politique et discriminatoire du procès qui lui est intenté. Cette date d'audience après avoir subi plusieurs reports a été fixée au 1 er novembre. Il nous est apparu utile à cette occasion de demander à Me Jules Borker, avocat à la Cour d'appel de Paris, membre du Comité national pour la libération d'Angela Davis' et qui rentre d'un voyage aux Etats-Unis de nous faire connaître son opinion . UNE jeune femme noire de 27 ans, enseignante de philosophie à l'Université de Los Angeles est enfermée depuis plus d'un an dans une geôle aveugle de la prison du comté de San Marin. Elle est menacée d'une condamnation à mort et d'une exéc~tion dans la chambre à gaz de l'Etat de Californie. Quelle est cette femme? De quoi est-elle poursuivie et pourquoi l'opinion mondiale s'émeut, se scandalise et se mobilise afin d'obtenir sa libération? Angela Davis ne se distingue apparemment pas des dizaines de milliers de noirs, de Portoricains, de Chicanos, enfermés dans des centaines de prisons américaines par suite d'une politique raciste et discriminatoire qui frappe de nombreuses minorités vivant aux Etats- Unis. Cependant, l'acharnement dont Angela Davis est victime, ne s'explique pas seulement parce qu'elle a la peau noire ou parce qu'elle militait en faveur de la libération des DROIT ET LIBERTE - N" 307 - NOVEMBRE 1971 Il Frères de Soledad Il. C'est une intellectuelle, une enseignante de philosophie, une progressiste membre du Parti communiste américain, luttant pour une société plus juste dans laquelle serait combattue et bannie toute politique raciste et chauvine. C'est également une militante luttant pour la paix au Viet-Nam. Toute sa vie, son attitude et ses combats faisaient d'elle un symbole que les dirigeants racistes de l'Etat de Californie s'efforçaient d'abattre depuis de nombreuses années. Le prétexte fut trouvé par le gouverneur Reagan à la suite des graves événements qui se déroulèrent dans l'enceinte du tribunal de San Rafael, le 7 août 1970, et au cours duquel un jeune militant noir Jonathan Jackson tentait d'enlever un magistrat dans le but - peut-être insensé mais généreux - d'obtenir en échange la libération de son frère George Jackson emprisonné depuis dix ans pour complicité de vol de 75 dollars et inculpé avec plusieurs de ses frères noirs dans l'affaire dite des cc Frères de Soledad Il. Pendant la tentative de fuite, les policiers qui cernent le Palais de Justice de San Rafael tirent à bout portant sur la camionnette dans laquelle Jonathan Jackson, deux autres prisonniers noirs et le juge Haley étaient enfermés, tuant tous les occupants de la voiture. Les policiers affirmèrent que les armes utilisées par le jeune Jonathan Jackson appartenaient à Angela Davis et un mandat d'amener tut délivré contre elle. Le climat d'hystérie raciste et meurtrière qui régnait à ce moment-là dans les milieux dirigeants de l'Etat de Californie incite Angela Davis à se réfugier à New York où elle est arrêtée le 13 octobre 1970 et extradée en Californie par le gouverneur de l'Etat de New York, Nelson Rockefeller, le mê.me qui prenait la responsabilité en septembre dernier de lancer ses policiers contre les emprisonnés de la prison d'Attica, tuant 40 de ces derniers. Angela fût mise au secret dans des conditions particulièrement graves pour sa santé. ~ 13 14 ~ Nous devons bien entendu nous placer dans le cadre de la loi américaine pour apprécier le caractère odieusement discriminatoire du procès que lui préparent les éléments les plus racistes et rétrogrades des Etats-Unis. Nous donnerons dans cet article cinq exemples discriminatoires. 1 ° CHOIX DU TRIBUNAL: en choisissant la juridiction de San Rafael où fut tué le juge Haley le 7 août 1970, le gouverneur Reagan sait parfaitement que le procès ne peut se dérouler dans un climat de sérénité et d'honnêteté indispensable au déroulement d'un tel procès. Rappelons pour mémoire qu'il a fallu attendre dix mois avant qu'un juge ne puisse entreprendre l'instruction du dossier : trois magistrats se déclarèrent incompétents ou se récusèrent, un quatrième démissionna, un cinquième fut récusé d'office. 2 0 CHOIX DE LA PROCEDURE D'INSTRUCTION : la procédure normale d'instruction appelée aux Etats-Unis cc pre-trial)) fut refusée à Angela Davis : au cours de cette procédure d'instruction, applicable dans 99 % des dossiers, le Procureur doit tenter de convaincre un magistrat municipal que les preuves retenues contre le prévenu sont suffisantes et l'on procède à un examen contradictoire des preuves, à l'interrogatoire des témoins, que l'inculpé peut interroger lui-même. Par contre, la procédure exceptionnelle du grand jury - retenue contre Angela - est secrète en ce sens que le défenseur de l'accusé ne peut y comparaître alors que le Procureur y est présent et dirige en fait les débats devant un jury composé de notables (le comté de San Marin est le plus riche de l'Etat de Californie). Pour les deux raisons indiquées plus haut, Angela Davis et ses défenseurs exigent que le procès ne se déroule pas à San Rafael, mais à San Francisco, c'est-à-dire, dans une région où la composition du tribunal et des jurés pourrait donner de plus grandes garanties à l'inculpée. 30 Les juges du tribunal de San Rafael tentèrent d'interdire à Angela Davis, la possibilité de se défendre personnellement aux côtés de ses avocats. Cette tentative de la baillonner fut mise en échec en juillet dernier, mais il fallut une longue bataille juridique avant qu'Angela et ses avocats obtiennent satisfaction. 40 Les juges de San Rafeal ont longuement refusé de disjoindre l'affaire Angela Davis de celle des Il Frères de Soledad Il et ce, dans le but de jeter la confusion dans l'opinion publique. Angela Davis, tout en se considérant comme solidaire de tous ses frères de couleur emprisonnés, voulait éviter toute confusion quant aux éléments matériels des deux dossiers,et ce pour pouvoir mieux dénoncer ses accusateurs et la politique raciste, discriminatoire et rétrograde de leurs inspirateurs. se REFUS DE LA MISE EN LIBERTE PROVISOIRE SOUS CAUTION : La Constitution de l' Etat de Californie de 1849 et l'article 1270 du Code pénal de ce même Etat fixent comme Restaurant Varso~ie Spécialités pOlonaises 10, rue Etienne-Marcel - Paris- 2e - Tél. : 231 -74- 18 AInblance lOuslcale : André Ropski Fermé le dimanche Fania Davis-Jordan, la soeur d'Angela Davis, a participe, le 3 octobre, à la manifestation organisée à Paris par le Mouvement de la Jeunesse Communiste . Soixante mille jeunes gens ont défilé de la place du Colonel-Fabien à la Bastille, en un cortége riche en couleurs, réclamant la libération de la militante emprisonnée, dénonçant le racisme et la guerre du Vietnam. C'est l'une des plus puissantes démonstrations auxquelles il m'a été donné d'assister, a déclaré Fania Davis (à gauche sur notre cliché pendant le meeting, place de la Basti lle). règle générale et impérative, la mise en liberté provisoire sous caution de tout inculpé. Ces garanties et ces droits furent refusés à Angela Davis, alors qu'elle n'a jamais été condamnée, qu'elle offrait toutes garanties de représentativité, que de nombreuses personnalités américaines lui offraient leur aide et leur caution; le juge Arnason décidait de rejeter la requête présentée par ses avocats, et ce, au moment où un magistrat municipal, auxiliaire de Justice et chargé par le tribunal de présenter un rapport sur la mise en liberté provisoire, déposait le 14 juin 1971, un document appuyant la demande des avocats : il s'agit du président Soetaert, directeur du Il Probation Department Il, qui fixait à 100000 dollars le montant de cette caution et appuyait la demande d'Angela Davis. La décision illégale, et inconstitutionnelle prononcée par le juge Arnason met la vie d'Angela Davis en grand danger. Les événements tragiques qui se sont déroulés depuis quelques mois dans les prisons américaines, la provocation dont fut victime George Jackson, abattu par ses gardiens à la prison de San Quentin en août dernier, doivent inciter à une vigilance permanente et à une intensification de nos efforts pour obtenir cette mise en liberté provisoire d'Angela Davis (les trafiquants de drogue arrêtés à New York avec des centaines de kilos d'héroïne dans le courant des mois de septembre et d'octobre de cette année, ont tous obtenu le bénéfice d'une mise en liberté provisoire sous caution). C'est parce qu'Angela Davis est un symbole pour ses accusateurs et pour des millions de démocrates, tant aux Etats-Unis que dans le monde, que sa vie est en danger. Le Comité national vient de lancer une pétition nationale. Nous insistons pour que, vite, des millions de signatures soient recueillies au bas de cet appel et que 'les lecteurs de Il Droit et Liberté Il et leurs amis apportent également leur généreux concours à la campagne destinée à obtenir la mise en liberté immédiate d'Angela Davis. Jules BORKER ~obayes CANCEREUX, leucémiques, ils sont perdus. Perdus? Non pas pour tous. La Bête a des besoins de chair humaine. Hier en Troisième Reich , aujourd'hui en U.S.A., elle tient à connaître les limites de la résistance humaine, hier au poison-torture, aujourd'hui à l'atomeexterminateur jusqu'à plusieurs générations. Alors, les troupes, les hommes, les servants de la Mort et déjà ses victimes, combien de temps pour l'honneur de la Bête, pour prolonger sa passion de meurtres, résisteront-ils? Déjà onze ans qu'on le calcule sur ces corps condamnéS , qui rapprochent tous nos corps condamnés de l'heure de notre Mort. Jean CUSSAT-BLANC Main blanche sur peau noire Cela pourrait être un très beau geste d'amour. Mais nous parlons d'une gifle. Annick Alexandre a 16 ans. Elle est Antillaise. Devant les magistrats de la 15e chambre correctionnelle de Paris, elle raconte l'aventure qui lui est arrivée , il y a plus d'un an , alors qu'elle sortait de son lycée à La Courneuve. Elle raconte : Il Nous étions cinq camarades qui rentrions chez nous après les cours. Nous sommes entrées dans la boulangerie de M. et Mme N ... Nous voulions des bonbons. Nous hésitions dans notre choix. La boulangère nous a houspillées. Elle m'a aperçue et m'a criée : Il Fous le camp d'ici, sale négresse à plateau! Il M. N ... est poursuivi pour coups et blessures. Il prétend avoir volé au secours de sa femme menacée et évoque pour ce faire le témoignage de clients ... qui n'étaient pas présents. Il avoue seulement que la petite Antillaise lui a dit : Il Je suis une cliente comme les autres Il. Ce qui a paru injurieux à M . N ... cc Je l'ai juste serrée un petit peu ... oui quelques coups de pieds mais avec des chaussons Il. Puis il l'a un peu tirée par les cheveux pour la jeter dehors. Des faits qui illustrent l'imbécillité, la cruauté inconsciente du racisme . Le verdict? Un mois de prison avec sursis et 800 F d'amende. Ce qui est sûr, c'est que rien n'effacera cette phrase prononcée par Annick : cc Jusqu'à présent je n'avais jamais eu conscience de ma condition de noire. Brusquement j'ai été traitée moins qu'un chien. Tout s'est passé comme si j'appartenais à une race inférieure. Jamais ne pourrai l'oublier. Il les juifs soviétiques et l'émigration M. Boris Choum i lin e, vi ce- ministre de l'Intér ieur de l'U.R.S .S. a précisé que 4450 ju ifs avaient été autorisés à quitter l'U .R.S.S. pour Israël au cours des six premiers mois de 1971. DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 cc Si un citoyen soviétique, quelle que soit sa nationalité, demande l'autorisation de sortir d'U.R.S.S., sa demande est examinée attentivement dans le cadre fixé par la loi, a-t-il déclaré . Et si des familles veulent se réunir, les demandes sont étudiées avec l'attention voulue. Il La position de l'U.R.S.S. demeure inchangée. Mais, comme chacun doit le comprendre, l'agression d'Israël contre les pays arabes, son refus obstiné d'appliquer la résolution du Conseil de sécurité sur la liquidation des conséquences de cette agression, les appels incessants lancés aux juifs de divers pays à venir renforcer cet Etat dans sa guerre antiarabe, ont introduit de nouveaux éléments dans la question de l'émigration des citoyens de Il nationalité Il juive vers Israël. Il M. Boris Choumiline a ajouté qu'il n'y avait jamais eu interdiction totale d'émigrer vers Israël. Il Naturellement, il ne fait aucun doute que la liquidation d~s séquelles de l'agression d'Israël contre les pays arabes créerait des conditions plus favorables à la solution de cette question Il a conclu le viceministre. A Paris, le nouvel ambassadeur de l'U .R.S.S. , M . Abrassimov, lors d'une rencontre avec une centaine de personnalités juives, a indiqué que le nombre de juifs soviétiques partis cette année pour Israël dépasse maintenant 5 000. « Conformément aux principes de notre politique nationale, a-t- il déclaré notamment, en U.R.S.S. , les juifs jouissent des mêmes droits que toutes les autres nationalités qui peuplent notre pays et sont pareillement appelés à en observer les devoirs ». On signale d'autre part à Moscou que le Groupe dramatique juif de la capitale soviétique , troupe théâtrale créée il y a neuf ans donne actuellement, en alternance , cinq spectacles en yiddish dans la capitale (oeuvres de Scholem Aleichem , Mikhail Lermontov, Avraam Golfaden). La troupe a parcouru le pays tout entier (Leningrad, région de la Volga , Extrême-Orient, Sibérie, Moldavie, Caucase, Ukraine, Pays Baltes, etc.) et rencontre un grand succès. La troupe, de 17 membres, est régulièrement renouvelée par des concours annoncés par les journaux (1 Vetcherniaia Moskva Il et Il Moskovskaïa Pravda Il. Ces concours sont des plus sévères sur le plan professionnel. Vladimir Schvarzer, dirigeant artistique du groupe a le titre « d'artiste éminei,t de la Fédération de Russie ». Pas de couleur à Tréfimétaux M . Alexandre Red est un citoyen français (de par la Loi), originaire de la Guyane française. Venu depuis plusieurs mois en France, il cherche du travail. Il s'adresse à une entreprise de nettoyage qui l'envoie le 2 juin 1971 à 6 h du matin pour se présenter à Tréfimétaux, 9 , avenue Matignon , Paris (8e). Mais avant même la fin du service , le chef du personnel renvoie M. Alexandre Red et lui demande de retourner au siège de l'entreprise. Et au dos du bon de placement, il écrit la « recommandation » suivante : Il Voulez-vous s.v.p. le mettre sur un autre chantier, pas de couleur à Tréfimétaux. Il M. Red a porté plainte contre cette discrimination . M. Soustelle et la LI.C.A. La Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (L.I.C .A.) du Rhône comptait déjà Me Ambre parmi ses instances di rigeantes. Me Ambre qui , sous l'occupation nazie, avait écrit un livre tendant à aggraver les lois antijuives de l'époque. Me Ambre, aujourd'hui l'un des défenseurs les plus ~ 15 ~ en vue des inculpés des scandales immobiliers qui alimentent l'actualité. Depuis le 20 octobre , la LI.C.A. s'est donné dans le Rhône un nouveau président: M . Jacques Soustelle. Celui-ci est un homme politique bien connu. Il s'est particulièrement illustré à la tête de l'O.A.S. , cette organisation factieuse qui s'est toujours refusée à reconnaître l"indépendance de l'Algérie et dont on connaît l'action criminelle, tant en France que de l'autre côté de la Méditerranée. Cette nomination qui a été obtenue lors de la réunion du bureau fédéral de la LI.C.A. par 6 voix contre 2 et 2 abstentions a provoqué des remous dans cette organisation . Des démissions ont déjà été enregistrées, d'autres sont attendues. M. Pierre Lévy, secrétaire général de la fédération du Rhône a tenu à préciser que la candidature de M . Jacques Soustelle avait été présentée en accord complet avec le président national de la ligue , M . Pierre-Bloch . Etrange conception de la lutte contre le racisme! Solidarité Le mercredi 22 septembre à Tigy dans le Loiret, on enterrait trois enfants, victimes d'un empoisonnement de champignons. Cela aurait pu être un simple fait divers. Mais ces enfants étaient portugais. A la suite de ces morts, les villageois se sont rendu compte de l'existence , à côté d'eux, de travailleurs portugais, qui comme eux travaillaient, avaient les mêmes soucis et se heurtaient en outre aux problèmes de la langue et de la surexploitation. Les villageois ont fait, pour les funérailles, une collecte qui a rapporté plus d'un million d'anciens francs. Geste de solidarité fraternelle . Mais faudra-t-il toujours attendre qu"il y ait des morts, avant que ne s'exprime , cette solidarité? 16 EUROPE Revue littéraire mensuelle

Derniers nUIDéros parus Marcel PROVST 1 Marcel PROVST Il Elsa 7'RIOLET Paul Valéry E'ernand LEGER DOSTOIEVSKI Chaque numéro 15 F

21. rue de Richelieu - Paris (1e r) C.C.P. PARIS 4560-04 --Des faits qui •.. --. • Le 9 octobre. un commando de la « Nouvelle action française » s'est introduit, vers 19 heures à l'O .R.T.F. Objectif : attirer l'attention sur la tenue de leur congrès. • Une nouvelle vague de perquisitions s'est abattue sur l'Afrique du Sud : elle vise particulièrement des ecclésiastiques, des journalistes et des étudiants hostiles à l'apartheid. • Lu sur une affiche de l'agence Propinco, concernant un logement à louer (un hôtel particulier du boulevard Murat) : « Accepte max, 1 enfant. Préfère couple étranger sauf noirs ». Et les noirs de nationalité française? • M. Eban, ministre israélien des Affaires étrangères, interviewé à la télévision américaine, a dit, en réponse à une question sur la « chasse aux anciens nazis Il : « Qu'un malheureux réfugié au Paraguay ou au Brésil soit traduit en justice m'intéresse à peine. Je ne pense pas que cela ait de l'importance Il. • Le général Yahya Khan, dirigeant du Pakistan occidental, responsable des massacres au Bengale a déclaré au journal « Le Monde» : « La France nous accorde entière coopération et assistance et nous lui sommes reconnaissants de nous livrer des armements (avions, hélicoptères, sous-marins) ». • La brasserie Apollinaire, boulevard Saint-Germain, refuse de servir les juifs d'Afrique du Nord. C'est ce qu'a dit le tenancier à un de ses clients. D'autres consommateurs ont vivement protesté contre cet acte de racisme. • Au Vietnam , une unité d'élite américaine appartenant à la 1 ,e division aéroportée de cavalerie a refusé d'obéir aux ordres d'attaques et d'effectuer des (( sorties Il. (( Nous ne voulons pas être les derniers à mourir dans cette guerre Il, ont déclaré les soldats. donnent à penser Le sort des Bengalis Ils sont actuellement près de 9 500000 réfugiés et tous les jours leur nombre croît de 40000. Plus de 2 millions d'enfants de moins de 14 ans sont menacés de mort par malnutrition. Mais l'Inde ne peut pas aider comme il le faudrait tout ce surplus de population , car l'Inde est aussi un pays sous-développé. Pour aider les Bengalis , elle s'est vue contrainte de limiter certains programmes de développement. Que fait le gouvernement français? Intervient-il auprès du gouvernement du Pakistan occidental pour qu'il cesse h3S massacres, ou continue-t-il à lui prêter assistance? Cliquetis d'armes en Afrique du Sud Le Conseil de sécurité de l'O.N.U., à l'unanimité, a condamné la violation du territoire zambien par des forces sud-africaines. D'autre part, à la Conférence de Mogadiscio les Etats d'Afrique orientale et centrale ont condamné les ventes d'armes à l'Afrique du Sud et la tentative de « dialogue» préconisée notamment par la Côte-d'Ivoire de M. Houphouët-Boigny. Ajoutons que le gouvernements sud-africain a acheté des corvettes équipées de canons à I·Espagne. Ces armes seront bientôt livrées. La France a vendu au pays de l'apartheid une grande abondance de Mirages et d'hélicoptères, de tanks et d'armes légères. L'a b de


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DROIT ET LIBERTÉ - N° 307 - NOVEMBRE 1971 l'alphabétÏsatÏon EN France vivent 3,5 millions d'étrangers, dont 2,2 millions sont des travailleurs. Poussés par la misère et le chômage qui règnent dans leur pays, ils sont venus, obligés d'accepter n'importe quel travail, de donner à l'cc économie française)) bien davantage qu'ils ne reçoivent, de subir toutes sortes de discriminations, de vivre dans des taudis et, pour comble, de se voir accusés de manger le pain des Français et de causer le déficit de la Sécurité sociale. Les immigrés adultes (1) peuvent-ils apprendre à lire et à écrire? Ont-ils un droit à la culture, à la promotion sociale 7 C'est à ces questions que le présent dossier essaie de répondre; le problème sera situé par une interview que Robert Buron, président du Comité de liaison pour l'alphabétisation et la promotion (C.L.A.P.) a bien voulu accorder à Droit et Liberté, ainsi que par quelques chiffres sur les niveaux d'cc alphabétisation » des étrangers et sur la qualification professionnelle des travailleurs immigrés. Les chapitres suivants ont pour but de déterminer qui alphabétise, avec quels moyens financiers et de quelle manière. (1) Pour la question de la scolarisation des enfants d'immigrés, voir D.L. de novembre 1970: « Les écoliers des bidonvilles». DROIT ET LIBERTE - N' 307 - NOVEMBRE 1971 17 18 Une interview de Robert Buron Président du C.L.A.P. Le Comité de liaison pour l'alphabétisation et la promotion (C.L.A.P.), groupe une quarantaine d'associations (dont le M.R.A.P.). Son président, M. Robert Buron a bien voulu répondre à nos questions (1). D. L. - Certains estiment qu'est non-analphabète celui qui sait écrire son nom; qu'en pensez-vous? R. B. - Le fait d'écrire ou de ne pas écrire certains signes ne suffit pas à caractériser l'analphabétisme. On peut rencontrer un homme qui signe son nom comme il dessinerait un arbre ou un âne sans, 'pour autant, qu'il sache vraiment écrire. De même, combien d'enfants ... et d'adultes peuvent épeler des mots écrits sans pour autant, après avoir énoncé les deux ou trois syllabes d'un mot, compris réellement le sens de ce mot. L'alphabétisation, c'est lire et écrire au moins les mots simples en ayant conscience de leur signification profonde. C'est relier, comme l'on dit maintenant, le signifié au signifiant; l'analphabète est celui qui est incapable d'établir cette relation. D. L. - Ne s'agirait-il pas de réhabiliter rillettré? R.B. - Pour moi, un illettré est régal du lettré même au niveau culturel dans une large mesure. J'ai connu des illettrés cultivateurs, pasteurs ou marins, dont la culture humaine profonde était très supérieure à celle de prétendus philosophes. L'alphabétisation est un instrument de transfert, elle n'est pas le seul, elle n'est pas le meilleur. La conscientisation par l'image commentée, les moyens audio-visuels, le véritable dialogue-participation sont d'autres instruments, aussi valables parfois que l'alphabétisation pour le transfert des connaissances, supérieurs le plus souvent pour l'ouverture de l'esprit. D. L. - Pouvez-vous dresser un tableau rapide de l'analphabétisme dans le monde? R.B. - L'analphabétisme est en régression certaine, en Amérique du Sud et dans le Moyen-Orient en particulier. Il reste encore une carence pour l'accès au monde moderne de nombreuses populations. Le problème est très grave encore aujourd'hui surtout si, par alphabétisation, on entend absence d'éveil aux connaissances scientifiques, techniques, etc., et insuffisance de prise de conscience des réalités qui sous-tehdent la vie quotidienne. D. L. - On emploie beaucoup rexpression K alphabétisation fonctionnelle))? Que signifie-t-elle? R. B . ..:.. Je laisse aux spécialistes de la formule le soin de la définir. La tâche essentielle de l'alphabétisation ou plutôt des moniteurs est : a) L'éveil de conscience aux problèmes du monde moderne. b) L'explication du monde quotidien dans lequel le travailleur migrant - et aussi bien parfois le-paysan français Des cours pour 30000. arrivant des régions rurales sous-équipées à la ville - se trouve brusquement plongé et aux surprises duquel rien ne ra préparé. c) Le transfert des connaissances pratiques nécessaires dans cette vie quotidienne : démarches auprès des assistantes sociales, des services de la main-d'oeuvre ou du commissariat de police, envoi de mandats, etc. d) L'alphabétisation proprement dite enfin. e) Le reste qui est le plus important. Il peut se résumer dans le mot de promotion ou plutôt d'épanouissement. D. L. - Comment doit-on tenir compte d'un éventuel retour des migrants au pays? R. B. - L'alphabétisation joue à deux niveaux différents. Elle doit tenir compte à la fois des cas où, pour des raisons politiques ou affectives, le migrant sera conduit à se fixer durablement en France et des cas, tout aussi nombreux, où il est venu pour assurer quelques ressources à sa famille mais s'est donné pour objectif le retour au pays. Tout effort d'alphabétisation au sens large - le seul qui nous intéresse - est tâche éminemment délicate puisqu'il faut éviter la « déculturation» et chercher au contraire à développer la culture initiale, en lui ajoutant l'enrichissement des connaissances qu'entraîne tout naturellement le maniement d'une langue étrangère, le français en l'occurrence. (1) C.L.A.P., 103, rue Réaumur, Paris-2°. Deux millions ••• Niveau d 'alphabétisation Le caractère nuancé àe la notion d'analphabète et l'abSence totale de statistiques font qu'on est obligé de se livrer à des estimations plus ou moins sûres. D'après le Ministère de l'Intérieur 3,4 millions d'étrangers vivaient en France en 1970 (1), parmi lesquels 2,7 millions sont âgés de plus de 16 ans (2). Le vrai classement La distinction essentielle est à faire entre les « francophones» et les « nonfrancophones », c'est-à-dire entre : a) Ceux (Maghrébins, quelques Africains, auxquels il faudrait ajouter certains originaires des départements et territoires d'outre-mer) qui comprennent· et parlent au moins un peu le français; et : b) Ceux (Turcs, Yougoslaves, Portu· gais, certains Maghrébins, bon nombre d'Espagnols ... ) qui ne comprennent pas notre langue, auxquels il faut ajouter : c) Les « assimilés» (la majorité des Polonais et des Italiens, un certain nombre d'Espagnols ... ) qui comprennent, parlent, lisent et écrivent (plus ou moins bien) le français, Les étrangers du premier groupe sont en majorité analphabètes (3) au sens qu'ils ne savent ni lire ni écrire; les étrangers du second groupe, eux, sont souvent déjà scolarisés dans leur langue, de manière plus ou moins approfondie. Bien entendu, il existe toutes sortes de nuances. Quelques chiffres Une estimation modeste du nombre des étrangers analphabètes donne au moins 750000. Ce chiffre ne tient compte ni des originaires des D.O.M. et T.O.M., ni des Gitans, ni, bien sûr, des Français « métropolitains» analphabètes qui sont en nombre important comme le montrent les rapports des autorités militaires sur l'incorporation des appelés. Au total, il y a, sans aucun doute, en France, plus d'un million d'analphabètes. Encore, ce chiffre est-il trompeur, car une personne alphabétisée en arabe par exemple se trouve parfaitement incapable de lire le nom d'une station de métro, ou l'écriteau « Danger de mort» : du point de vue pratique, elle est souvent DROIT ET LIBERTE - N' 307 - NOVEMBRE 1971 dans la même situation qu'un analphabète. Le nombre des adultes étrangers alphabétisés dans leur langue, mais ayant un besoin impérieux d'apprendre le français, ne serait-ce que pour pouvoir lire les consignes de sécurité ou remplir correctement un imprimé simple, peut être estimé, lui aussi, à un bon million (4). En fin de compte, il y a plus de 2 millions de personnes (certains disent 3) qui devraient bénéficier de manière absolue de « cours du soir». Les plus déshérités d'entre eux sont ceux qui SOr.lt à la fois non-francophones et analphabètes. Certains immigrés (Africains surtout), absolument étrangers à toute vie urbaine, sont même incapables de lire un dessin et tout code leur est incompréhensible. Qualification professionnelle La qualification professionnelle des travailleurs immigrés est un peu meilleure dans la région parisienne qu'en province. Le tableau suivant de l'Office National d'Immigration (O.N.I.) donne la qualification des étrangers entrés en France en 1970 Manoeuvres 42,3% 73,4% Ouvriers spécialisés 31,1 % Ouvriers qualifiés 25 % Techniciens, cadres 1,6 % Mais ces chiffres ne tiennent compte que des 174000 travailleurs introduits Dar l'O.N.I. et des « clandestins» réÇJularisés. Les autres, dont il est raisonna- Les plus bas salaires. ble de penser qu'ils ont les emplois les moins qualifiés, ne sont pas comptés. En général, on estime que les travailleurs non qualifiés représentent au moins 80 % de la main-d'oeuvre étrangère. (1) Hommes et Migrations, document nO 808 (1-6-1971 ). (2) Estimations faites au moyen du docu ment précédent et des numéros 113 et 116 des Etudes d'Hommes et Migrations. (3) Il est juste de dire que dans les D.O.M., la scol.arisation est à peu près générale, bien que ses effets demeurent, très souvent, insuffisants (Voir Droit et Uberté, septembre 1970 : « A la recherche des Antilles »). (4) Les chiffres qui précèdent sont des estimations faites à partir des documents d'Hommes et Migrations. Qui alphabétise ? 1 ES chiffres précédents montrent l'amLpleur du problème et la diversité des gens à alphabétiser. Suivant 'Ie pays d'origine, l'âge, le sexe, les conditions de vie du migrant, les choses seront très différentes. Mais la variété ne vient pas que des « alphabétisés». L'alphabétisation elle-même ne résulte pas d'une organisation centralisée, ni même coordonnée. Elle est dispensée par des voies fort diverses. Position du patronat Voyons, d'abord, sous quel angle l'alphabétisation est vue de ce côté. • K Tout d'abord, bon nombre d'entreprises considèrent qu'il n'est pas dans leur intérêt de donner aux travailleurs étrangers une formation qui contribuerait à les enlever à des postes peu qualifiés pour lesquels leur immigration est jugée nécessaire. D'autres estiment suffisante 19 la Il formation sur le tas)) dont bénéficie peu ou prou tout travailleur d'usine, si peu instruit soit-il. )) • Il L'employeur a pour fonction première de gagner de rargent. Il forme pour ses propres besoins et de ce point de vue, il doit considérer le travailleur étranger comme il le fait des travailleurs nationaux... Les étrangers ne doivent pas considérer qu'ils ont un droit à une formation quel que soit leur niveau de connaissances, c'est d'opportunité de formation, pas de droit qu'il convient de parler.)) Ces citations sont extraites du rapport final intitulé Il Les travailleurs émigrés retournant dans leurs pays)), du séminaire patronal international tenu à Athènes du 18 au 21 octobre 1966, sous l'égide de ro.C .D.E. (1) . Evidemment, ces propos tenus dans une réunion restreinte ne sont généralement pas diffusés dans le grand public ; il convient pourtant de les conserver à l'esprit lorsqu'on essaie de dresser le bilan des réalisations dans le domaine de l'a lphabétisation. Pour être juste, il faut dire que les citations précédentes sont des constatations faites par les patrons et non des conseils donnés par eux. On trouve d'ailleurs dans le même rapport une série de « mesures préconisées » qu'on pourrait cro ire extraites d'un catalogue de revendications syndicales ; toutefois, une page plus loin , l'auteur, étudiant les Il conditions d'efficacité Il de ces mesures, précise que Il leur coût est élevé)) et que Il leur application se heurte à l'antagonisme des intérêts des pays, des entrepreneurs et des intéressés eux-mêmes)) (2). Des conclusions analogues pourraient être tirées d'une table ronde de banquiers, d'économistes et de financiers sur l'alphabét isation (réunie par l'U .N.E.S .C.O. du 11 au 13 février 1969), ou après des «recommandations» excellentes, la principale méthode préconisée est d'exempter de certains impôts les employeurs qui organiseraient des cours d'alphabétisation (3) . Réalisations pratiques De la loi du 9 juillet 1970 sur la formation professionnelle , on devrait comprendre que les immigrés ont droit à une formation de base , mais le texte est suffisamment flou pour que chacun puisse avoir son interprétation personnelle. D'autre part , les entreprises doivent donner aux ressortissants de la C.E.E . (Communauté économique européenne) une ini~iation à la langue française ; mais les cours, quand ils sont fait s, sont plus que sommaires. En f in 20 de compte le cadre légal est à peu près inexistant. En pratique, deux cas peuvent se présenter : a) Le cours est contrôlé par la Direction Il arrive que l'o rganisation de cours apparaisse à l'employeur comme une nécessité urgente. Par exemple, les immigrés d'une usine ne peuvent li re les consignes de sécurité ou parlent t rès mal le français : ils se blessent t rès souvent, alo rs l'inspecteur du t ravail proteste et (su rtout) les arrêts de la chaîne ou les ennuis divers sont très fréquents . Dans de telles circonstances, la direction prend parfois le taureau par les cornes : chez Berliet, par exemple, l'entreprise a organisé des cours payés pendant 15 jours, à plein temps. De t elles expériences sont pourtant rares. Autre réalisation : dans certains cas, il y a des .séances d'alphabétisation au rythme de quelques heures par semaine, le plus souvent en dehors des heures de travail (les ouvriers bénéficient quelquefois de dérogations d'un quart d'heure pour se rendre au coursl. les moniteurs sont payés, les élèves ne le sont pas. Comprendre la feui lle de paie. b) Le cours est contrôlé par le Comité d'entreprise La gestion de ce cours, dans la plupa rt des cas, revient à une commission « Immigrés » ou « Alphabét isation», en liaison avec la commission « Formation » du C.E. (4) . Tel est le cas de cours donnés à la FNAC et dans une des usines de Thomson C.S.F., où le patronat de ces ent reprises fi nance l'enseignement en partie ou en t otalité. (1) Auteurs respectifs: J.-C. Reverdy: rapport fina l. p. 2 5 ; P.J . Casey, Rolf Weber: suppléments au rapport f inal. (2) P. 73-75. (3) Rapport final. (4 ) On ne parle pas ici du cas où ce sont les syndicats qui font tout le travail et où la di rection se montre t rès peu coopérante. Les pouvoirs publics Nombreux sont ceux qui estiment que l'alphabétisation est du ressort des Pouvoirs publics. La position de ceux-ci est donc particulièrement importante. La position gouvernementale Le gouvernement français a approuvé la recommandation du Congrès mondial des ministres de l' Education nationale réunis par l'UNESCO invitant notamment les employeurs à favoriser des cours d'alphabétisation pendant le travail, sans perte de salaire. Il a signé de nombreuses autres résolutions en faveur de l'alphabétisation et de la promotion des immigrés (1) . Ces prises de position se reflètentelles dans la réalité? Si on consulte les options du Vie Plan , on remarque que la place consacrée aux immigrés est minime. Le chapitre « Education» est muet sur la scolarisation des enfants étrangers (2) ; ailleurs, cependant, deux phrases ont rapport à l'alphabétisation : Il Des actions spécifiques visant à la valorisation de l'apport des travailleurs étrangers dans le développement industriel et à leur meilleure intégration dans la société française. Ces actions menées en liaison avec les services chargés de l'emploi et de l'accueil des étrangers comporteront une part importante de formation générale et, le cas échéant, d'alphabétisation.)) Il Il convient enfin de permettre à tous ceux qui le souhaitent de s'établir définitivement dans leur pays d'accueil. A cet égard raction doit s'exercer essentiellement dans le domaine de l'éducation. L'alphabétisation des adultes sera développée Il (3) . Dans ces deux textes, il faut constater qu'aucun engagement n'est pris . Les lois La loi du 9 juillet 1970 sur la format ion professionnelle, et quelques autres textes laissent le champ libre à toutes les int erprétations. Pourtant des propositions de lois assez précises, concernant l'alphabétisation des étrangers, ont été déposées au Parlement en été 1968; l'une émanait du groupe communiste, l'autre plus restrictive de M. Halbout, député du groupe P.D.M . : aucune des deux n'a été rapportée ni inscrite à l'ordre du jour (dont le gouvernement est maître !) (4). Defeno. absolue de loucher aUI' fi .. êleclriq .. es Les réalisations PRI~FElimJl;S DE PROTEanON CIVILE POSTE • SECOURS CI: La part du F.A.S. (Fonds d'Action Sociale) consacrée à l'action éducative et à la formation est la seule source de financement publique de l'alphabétisation et de ce qui s'y rattache . Elle a été en 1970 de 26,2 millions de francs ; encore faut- il constater que le F.A.S. prélève sur ces fonds des sommes importantes pour l'éducation des jeunes d'âge scolaire , alors que de telles charges devraient revenir à l'Education nationale . Or, deux millions au moins d'étrangers de plus de 16 ans auraient un besoin impérieux de cours d' « alphabétisation », soit qu'ils ne sachent ni lire ni écrire, soit qu'ils ne connaissent pas le français. De source officielle, en 1970, 32000 hommes et 5 000 femmes ont bénéficié de cours d'alphabétisation; de 8 à 9000 travailleurs ont bénéficié d'une préformation ou d'une formation professionnelle , il y a eu en outre des cours (1) Assemblée générale de l'O .N.U., 8-12- 1965 ; Convention nO 97 de l'Organisation internat ionale du travail ; Règlement nO 1612/68 de la C.E.E. (Conseil du 15- 10- 1968). (2) Aussi bien dans la brochure « Actions prioritaires » que dans ce lle « Programmes d'actions détaillées » (Cl , pp. 157-165) du « projet soumis par le gouvernement au Conseil économique et social ». (3) Programmes d'actions détaillées: A4 (Formation professionnelle). p. 34, Cl0 (Action sociale). pp. 216-17 (souligné par nous). (4) Ces propositions de lois, nO' 290 et 319 se trouvent à l'annexe du procès-verbal du 3- 10- 1968. Cl ~. ...s..a v.o.i.r.li.re. .le. .d. a.n.ge.r. ............... 1L.t3t F. A.S. 1 ES travailleurs immigrés paient les mêmes cotisations L que les travailleurs « nationaux» à la Sécurité soci.ale, mais leurs droits « sociaux» et ceux de leurs familles sont réduits dans tous les domaines (allocation de maternité, carte nationale de priorité des mères de famille , titres de réduction dans les transports , bourses d'études, remboursement des soins de santé, allocations familiales , retraites ... ). La Commission Emploi du Vie Plan estime , elle-même, à 600 millions (actuels) les sommes que les immigrés ne perçoivent pas en prestations de Sécurité sociale du fait des discriminations dont ils sont victimes, et à 350 millions le manque à gagner sur les allocations familiales par les 150000 familles non installées en France . Ces derniers mots obscurs s'expliquent de la manière suivante : il existe un principe intitulé Il principe de territorialité Il qui stipule que, normalement, les allocations familiales ne sont pas versées aux étrangers quand la famille ne réside pas en France. Ce principe est valable , à la lettre, pour les allocations de salaire unique, mais pour les autres allocations, la France a passé avec certains pays des accords bilatéraux qui atténuent cette discrimination scandaleuse ; toutefois, ces allocations ne sont versées que quelques années (le nombre étant variable selon les pays) et les discriminations sont encore très grandes comme le montre le tableau ci-après des sommes en francs versées aux familles suivant le pays de résidence de celles-ci (1) . Le gouvernement a mauvaise conscience (?) . Pour soulager celle-ci (et aussi parce que les syndicats l'y ont poussél. il distribue donc une petite part (81 ,55 millions en 1970) de l'argent que les immigrés n'ont pas touché au titre des allocations fam iliales, à un organisme, le Fonds d'action sociale (F .A .S.1. créé il y a dix ans et chargé de l'action sociale en faveur des immigrés. Le FAS recoit en outre des fonds divers, venant princi palement de . pénalités infligées à des employeurs non en règle. Ses recettes totales (en augmentation) étaient en 1970 de 118,72 millions (à peine le prix d'un bombardier ... ). On voit donc que les ressources du FAS proviennent pour la plus grande partie (68 ,7 %) de l'argent des immigrés eux-mêmes. Pourtant ni ceux-ci , ni les syndicats n'ont de droit de regard sur la gestion de l'organisme . DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 La plus grande partie des crédits est consacrée au logement, mais jusqu'en 1970, un travailleur sur 200 seulement a pu bénéficier d'un lit financé par le FAS (et encore ce travailleur paie-t-il le loyer !). En fin de compte , l'argent consacré à Il l'action éducative, la préformation et la formation professionnelle Il a été seulement de 26,2 millions de francs (en 1970). PAYS NOMBRE D'ENFANTS 2 5 10 France ........... . ... ... . .. . .. .. .... 85 499 1 138 Départements d'Outre-Mer .. . . . . . 68 245 330 Espagne .. ... .... ... .... ... ..... ..... 76 262 550 Italie . ... ....... .. .... . ... ... .. . . . . .. 85 254 508 Portugal .... ..................... . .. 39 97 193 Yougoslavie .. .. .. . , . . ...... .. ...... 73 181 346 Maroc .. ................ ...... ... .. . 78 156 156 Algérie , Tunisie . . . . ....... . . . .. . .... 68 135 135 * Mauritanie, Sénégal . .... . ..... .. . . 50 100 100 * Madagascar ............... . ... . . .. 50 100 100 * Mali ........... . . .... ... .... .. .... .. 25 50 50 * Autres (sauf Marché commun) ex . : Turquie ..... .. . ............ 0 0 0 (1 ) Circulaire nO 1 (9-3- 1971) du Centre de Sécurité sociale des Travailleurs migrants, 11 , rue de la Tour-des-Dames (les chiffres ont été convertis et arrondis au franc supérieur, il n'a pas été tenu compte des majorations pour enfa nts de plus de 10 ans ou de plus de 15 ans , valables seulement en France et dans quelques pays ; en outre, des accords sont en vue pour améliorer la situation des Portugais) . On remarquera que les DOM qui , officiellement , sont considérés comme des départements f rançais à part entière ont un statut spécial. En outre, pour être juste. il faut préciser qu'un Français, dont la famille réside en France, mais qui t ravai lle à l'étranger subit les mêmes discriminations ; mais la France n'étant pas un pays d'émigration, le phénomène reste très limité. Pour les pays marqués d'un " il s'agit de sommes forfaitaires versées au pays par la France, et c'est le pays qui donne lui-même les allocations familiales. à ses propres taux. 21 pour 12500 adolescents (5). De tels chiffres sont d'ailleurs trompeurs : par exemple, pour les cours d'alphabétisation , il s'agit des inscrits, les assidus étant beaucoup moins nombreux; en outre les cours sont , en maiorité, assurés par des bénévoles et il est difficile de mettre leur action au compte des Pouvoirs publics. Une carence scandaleuse En fait l'Etat n'organise aucun cours, il subventionne, par l'intermédiaire du F.A.S. , un organisme privé l' « Amicale pour renseignement des étrangers» (6) (qui paie des instituteurs ou d'autres personnes agréées par un inspecteur) et des associations de bénévoles. L' « Amicale» a reçu 7 ,7 millions de francs en 1970 et a touché au plus 15 000 personnes. Actuellement, le F.A.S. a tendance à consacrer davantage dEJ crédits à l'action éducative au détriment de la préformation et de la formation professionnelle

seulement quelques milliers

de travailleurs étrangers, par an, peuvent suivre (difficilement) les stages du 1 er degré de la F. P .A. (Formation Professionnelle pour Adultes). Une telle carence des Pouvoirs publics est d'autant plus scandaleuse que la plupart des travailleurs étrangers sont venus en France « prêts à produire», que leur enfance et leur formation éventuelle n'ont rien coûté à la France, et que la proportion d'étrangers actifs est plus grande que la proportion de nationaux actifs. (5) Ce dernier chiffre est de 1967. (6) 32 , rue de Penthièvre, Paris (se). 225-31 -24 Les syndicats 1 E Monde écrit, dans un article sur L l'alphabétisation que Illes syndicats ne sont pas toujours très combatifs sur ce terrain Il (1). D'autres publications n'hésitent pas à mettre les Il responsabilités syndicales et patronales Il sur le même plan . Ces accusations sont graves, il faut donc creuser le sujet et examiner les positions et les actions des syndicats ouvriers et enseignants

La C.G.T. La C.G.T a élaboré un projet de loi sur Ilia formation et le perfectionnement continu des travailleurs Il, elle a aussi 22 a:: ci Les travaux les plus pénibles. remis au Premier ministre, le 21 mai 1970, par l'intermédiaire d'une délégation, un Mémoire intitulé : Il Pour une politique de l'immigration conforme aux intérêts des travailleurs français et immigrés Il, dans lequel les questions d'alphabétisation et de formation professionnelle tiennent une bonne place : il y est demandé en particulier, conformément aux recommandations de l'UNESCO, la création d'un Comité national pour l'alphabétisation, des cours d'alphabétisation fonctionnelle pour les travailleurs immigrés pendant le temps de travail et sans perte de salaire , l'égalité dans tous les domaines entre Français et immigrés (adultes ou d'âge scolaire) et les réalisations pratiques permettant de rendre cette égalité effective ; en particulier la C.G .T. dit : Il Les travailleurs immigrés devront recevoir avant leur départ des pays d'origine, une préformation professionnelle adaptée à leur nouvelle condition [ ... et] des cours d'initiation à la langue française. Il En outre, des revendications concrètes sont formulées pour les femmes (II cours d'alphabétisation et de français, formation ménagère et sanitaire ... Il) et les enfants (avec en outre un enseignement gratuit de la langue d'origine, Il par les soins de l'Education nationale aux enfants des immigrés et aux jeunes immigrés qui le désirent Il) ; la C.G.T. précise en outre comment ces actions devraient être financées et assure qu'elle entend Il développer une intense campagne en direction du gouvernement et du patronat pour que les engagements pris par eux soient respectés et qu'ils consacrent des moyens suffisants pour ralphabétisation des immigrés en France Il • . Elle a en outre, participé à une conférence organisée à Nicosie, en mai 1969, par la Fédération syndicale mondiale en collaboration avec l'UNESCO. Concrètement, elle agit, avec les autres organisations syndicales , face au patronat en demandant l'octroi aux moniteurs d'alphabétisation et aux travailleurs étrangers, d'heures payées sur le temps de travail et de locaux adaptés pour des cours d'alphabétisation. Dans d'assez nombreuses entreprises, le « C.E.» (comité d'entreprise ou d'établissement) ou les syndicats, en particulier la C.G.T., ont monté des cours, en général bénévoles, arrachant un quart d'heure par ci par là sur le temps de travail. La C.G.T. considère que ce sont des cours pilotes, constituant Il rorientation juste et à réclamer aux directions des entreprises pour qu'elles mettent à la disposition des C.E. leurs énormes moyensll pour l'alphabétisation (1). La centrale syndicale précise qu'elle Il n'a pas la prétention de liquider ranalphabétisme en France, car ce n'est pas son rôle et elle n'en a pas les moyens Il (2). La C.F.D.T. Pour la C.F.D.T., III'alphabétisation des travailleurs immigrés a besoin de perspectives et de moyens; actuellement elle reste une affaire privée, alors qu'elle devrait devenir une affaire publique [ •.. ] Il est donc urgent de définir une action d'envergure, dans ce domaine. La C.F.D.T. réclame aussi la mise en oeuvre d'un programme spécifique pour permettre la multiplication des centres de préformation [ •.. ] et l'accroissement rapide du nombre de travailleurs immigrés dans les centres de formation professionnelle Il (3). Comme la C.G.T., la C.F .D.T. estime donc que le but à rechercher est, non la multiplication des cours bénévoles, mais la prise en charge de la question par l'Etat, ceci n'excluant pas, bien entendu, l'existence d'une alphabétisation bénévole pouvant servir de modèle à ce qui devrait être fait. La C.F.D.T. n'organise pas de cours elle-même, mais une association amie (composée en très grande partie de militants de la C.F.D.T.) : le G.E.R .M.A.E. (4) s'occupe spécialement de cette question; plusieurs centres existent à Paris et dans la banlieue; presque tous les « élèves» a:: ci Voyage sans retour? et de nombreux moniteurs sont Algériens, en fait les élèves et les moniteurs participent à ranimation de l'association. Le G.E.R.M.A.E. donne sa conception de l'alphabétisation engagée qu'il préconise

ft En se limitant à un apprentissage

technique de la lecture, sans développer rexpression parlée, la réflexion, le jugement et le sens de la solidarité, dans le monde du travail, le G.E.R.M.A.E. n'atteindrait pas le but qu'il s'est fixé. Il ft Mais il ne doit absolument pas dépasser ces limites qui sont d'ailleurs basées sur le plus strict respect des élèves. Il (5). F.O. La C.G.T. et la C.F.D.T. ont, sur l'alphabétisation, des idées et des actions très voisines; il n'en est pas de même de F.O. qui, tout en reconnaissant que le problème existe, estime ne pas avoIr à prendre position sur ce sujet qui relève, d'après elle, des organisations, béné- (1) l·'janvier 1970. (2) «Les travailleurs immigrés en France. Problèmes de l'alphabétisation fonctionnelle. Solutions préconisées par la· C.G.T.» Nicosie 6-10 mai 1969. (Ce document mérite d'être lu en entier.). (3) Interview à «Droit & Liberté », décembre 1970-janvier 1971 . (4) Groupe d'études et de recherches des méthodes actives d·éducation. 42, faubourg Montmartre, Paris (9°). (5) «Etre instruit pour être libre» (Bulletin de liaison). novembre 1970. (6) Conversation téléphonique avec M. Robert Degris, secrétaire de F.O. Malheureusement; F.O. ne nous a pas donné d'autres précisions. DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 voles ou non, qui s'occupent d'alphabétisation. F.O. les assure de sa sympathie (6) . Syndicats enseignants Pour tous les syndicats de la Fédération de l'Education nationale, tout individu (Français ou étranger) doit pouvoir accéder à l'éducation permanente, cette tâche, quel que soit le degré d'intervention, étant un devoir d'Etat. En outre le S.N.1. (Syndicat national des instituteurs). par exemple, incite ses adhérents à participer à des cours pour étrangers rétribués par l'Amicale pour renseignement des étrangers.

Enfin, des militants de tous les syndicats ouvriers, enseignants ou étudiants participent à titre personnel à des cours d'alphabétisation un peu partout en France. le bénévolat Les cours dont on a parlé plus haut (cours en entreprise, ou organisés par l'Amicale) sont très minoritaires : les trois quarts de l'alphabétisation sont le fait de bénévoles. Qui sont-ils? Il Seuls les gauchistes et les chrétiens Il écrit Le Nouvel Observateur en sous-titre d'un de ses articles. Ce n'est guère exact; tous ceux qui ont alphabétisé savent que les moniteurs sont des gens de tous âqes, de toutes professions. de toutes nationalités et de toutes tendances. L'hebdomadaire cité a d'ailleurs eu la correction de publier une protestation intéressante d'Alain Gaussel : Il [ ... ] Depuis quinze ans que j'alphabétise, j'ai rencontré dans de nombreuses associations (Service civil international, M.R.A.P., Cimade, associations de solidarité avec les émigrés, etc.) des moniteurs de tout bord : des chrétiens, certes, depuis longtemps, et des gauchistes plus récemment et, bien sûr, des chrétiens gauchistes; mais aussi des athées non-gauchistes comme moimême, des juifs, sans parler des musulmans. Des moins de quinze ans et des plus de quatre-vingts ans, et, parfois, dans un même cours, un amiral un tant soit peu parternaliste et un objecteur de conscience anarchisant. Il (1). Certains viennent pour faire leur « B.A.» , d'autres pour voir, ou pour faire une étude sociologique, d'autres pour se faire des copains ou pour rigoler, d'autres encore pour faire de la propagande; quelques-uns ne savent pas pourquoi ils viennent, quelques autres alphabétisent parce que c'est conforme à leurs opinions philosophiques, politiques ou religieuses, ou parce qu'on le leur a demandé

nombreux, enfin, sont ceux

qui viennent un peu pour toutes ces raisons à la fois. Les moniteurs bénévoles alphabétisent soit en dehors de toute association , en formant des « cours sauvages», soit regroupés au sein de divers organismes subventionnés ou non par le F.A.S. (2) . Ces organismes s'occupent parfoi;; des immigrés à d'autres titres (pour l'accueil , le logement ... ) et certains, principalement ceux qui sont subventionnés, disposent de quelques permanents chargés en g é n é rai d ' u n t r a va i 1 d e coordination. A noter qu'une quarantaine de ées associations sont fédérées au C.L.A.P., qui s'attache à regrouper leurs efforts, en organisant des journées de formation pour les moniteurs, en centralisant tous les renseignements et toute la documentation utiles. Dans certaines associations, les bénévoles sont encadrés par un ou plusieurs enseignants de l'Amicale. Quelques cours, enfin, parviennent à obtenir çà et là de maigres subventIons ou quelques facilites de ia part des collectivités locales, de groupement religieux, du Secours populaire ... , mais tout cela ne peut aller très loin. (1) 29' mars 1971, p. 66 et 12 avril 1971 Courrier des lecteurs. (2) Le G.E.R .M.A.E. a réussi à obtenir une faible subvention du F.A.S. (30000 F par an) après de nombreuses années de lutte; la C.G.T. n'en a pas encore. Par contre, les associations « charitables » ont beaucoup moins de mal à se faire subventionner. 23 Conclusion Même dans les cours « qui marchent», les difficultés ne manquent pas. Pourquoi? L'indifférence des Pouvoirs publics qui n'apportent qu'une aide dérisoire, est une première raison. Mais il y en a bien d'autres : les moniteurs manquent en général d'expérience, leur formation est souvent trop scolaire, ils ne savent pas non plus très bien quel but donner à un cours. Mais surtout, dans la plupart des cas, c'est leur ignorance de la vie ouvrière et du pays d'origine des migrants qui est la principale cause d'échec. Dans les ratés, il ne faut pas oublier d'autres raisons encore plus évidentes liées aux migrants : la fatigue, les conditions de logement, les chanÇlements de travail ou de domicile, les horaires surchargés ou variables, pour les travailleurs, les tâches ménagères ou certaines coutumes, pour les femmes." La liste pourrait s'allonger. Comment y remédier? Il n'est pas question ici d'imposer tel ou tel point de vue, Toutefois un certain nombre d'idées se dégaÇJent : - Il est fondamental d'abord que les migrants participent eux-mêmes à l'organisation du cours et aux autres activités, - Il est également important de prendre comme point de départ la vie du migrant. Dans le cas de l'alphabétisation de travailleurs immigrés, le moniteur devrait savoir le plus précisément possible ce que sont une feuille de paye, la Sécurité sociale, la législation du travail, le syndicalisme .. , (1), le responsable du cours pourrait organiser périodiquement des réunions avec des militants syndicaux du quartier ou de la localité, - Un autre point généralement reconnu comme fondamental est la priorité à donner à la langue orale, même argotique, et à la correction phonétique, De même, il est évident que le travailleur immigré qui risque sur un chantier de recevoir une brique sur la tête, entendra les Français lui dire non pas : « Veuillez, Monsieur, avoir l'amabilité de vous translater de quelques mètres sur la gauche», mais « Barr'toi d'là », S'il ne comprend que le français académique, il recevra la brique sur la tête, En outre l'expérience courante montre qu'on apprend une langue en la pratiquant et non en récitant des verbes, Enfin, il importe de penser que le migrant, vivant en France, devrait en apprendre bien plus en dehors du cours que pendant le cours; par suite, le cours doit surtout lui permettre d' « apprendre à apprendre» (à lire les affiches, les journaux, les tracts, à parler et à avoir envie de lire ou de parler) .. , 24 Un palliatif, Les limites du bénévolat Tout ce qui précède prouve à l'évidence que le bénévolat même « encadré» ne sera jamais qu'une goutte d'eau dans la mer. En particulier, il est bien certain que, sauf cas exceptionnels, ce ne sont pas des bénévoles qui peuvent efficacement préparer les immigrés à des examens sérieux, tels que l'entrée en F ,p .A.; les chiffres sont là pour le prouver. L'alphabétisation bénévole apparaît bien comme un palliatif dont il faut voir les limites; elle doit être alors accompagnée d'une action directe envers les Pouvoirs publics pour que ceux-ci prennent en charge la plus grande partie de l'alphabétisation, obligeant les entreprises à faire leur devoir et débloquant les crédits suffisants. Certaines associations spécialisées dans l'alphabétisation estiment Qu'elles ont seulement à s'occuper des questions techniques, et tout en constatant la nécessité d'une action politique, elles croient que celleci doit être menée en dehors de l'association. D'autres pensent au contraire qu'alphabétisation et action revendicative sont indissociables et sont toutes deux du ressort de l'association. D'autres encore ne semblent pas convaincues de la nécessité d'agir efficacement à l'égard des autorités et du patronat pour que l'éducation permanente soit un droit et non une charité. Nombreuses sont les questions qui restent ouvertes. Citons-en une : si le gouvernement respectait les résolutions ou accords qu'il a signés et faisait son devoir en matière d'alphabétisation, serait-ce suffisant? Certains estiment que des cours bénévoles engendrent une certaine compréhension, une certaine atmosphère entre Français et migrants que ne pourraient avoir des cou rs officiels. Nous ne prendrons pas position sur ce sujet. Critiques sur ce dossier Elle ne devraient pas manquer et elles seront de toute façon les bienvenues. Faute de place, de nombreux points intéressants n'ont pu être traités l'alphabétisation des tziganes, les cours dans les hôpitaux, en prison ... ; le côté technique a été escamoté (était-ce notre rôle? Le C.L.A.P., par exemple, est bien mi'eux qualifié pour cela, et nous vous renvoyons à luil, Peut-être nous reprochera-t-on d'avoir parlé davantage de ce qui ne se fait pas que de ce qui se fait? Les chiffres sont là : au moins 2 millions d'étrangers qui ont besoin de cours, quelques dizaines de milliers Qui en bénéficient! Autre grief : n'aurait-il pas mieux valu se placer constamment du point de vue du migrant et non survoler les choses? Le débat est ouvert, nous attendons vos réponses. Pierre CREPEL (1) La lecture du Guide Juridique de Poche de la Vie Ouvrière (6 F). 33, rue Bouret, Paris (19). tél. : 205-79-59, est fort utile à ce sujet. théâtre 28 jeunes chantent l'espoir I LS sont vingt-huit réunis par la grâce d'un auteur, d'un compositeur, d'un directeur de théâtre, vingt-huit jeunes, garçons et filles, de dix-sept pays différents, Français, Espagnols, Japonais, Américains, Russes, Vietnamien, Israéliens, Marocains, Porto-Ricains, etc ... , de tous les horizons, du ghetto de Harlem aux rues de Marseille. Ils ont seize ans, toute l'ardeur, tout l'enthousiasme de la jeunesse, Ils sont les interprètes de la première « Musical Comedy » française: « Double V », écrite par François Dusolier, mise en musique par Jean-Jacques Debout: c'est sur cet événement artistique que le Châtelet fermé depuis le 18 avril, ouvre ses portes le 9 novembre, sous la direction de Michel Roux. François Dusolier, Jean-Jacques Debout, Michel Roux, ou le triangle de la victoire, Il a fallu qu'ils se trouvent pour que « Double V» naisse, et pour que le Châtelet, changeant complètement d'orientation, espère drainer un nouveau public grâce à ce spectacle. Show, comédie musicale, opéra dans un Châtelet rénové, transformé en chambre acoustique, sur un plateau géant translucide, dans une ambiance lumineuse. « Double V» avec V comme victoire, V comme signe de fraternité et d'espoir, est la première oeuvre de l'ère spatiale. le Le 21 juillet 1969, à 3 H 56' 20", l'Américain Neil Amstrong pose le pied sur la Lune. A ce moment précis, l'histoire de l'humanité va changer. C'était la fin d'un monde", dit François Dusolier que nous avons dû arracher à une répétition animée - ô combien - par Jean-Jacques Debout chantant à tue-tête, et à laquelle assistait Daniel Hechter - c'est lui qui réalise les costumes - le La fin d'un monde et le commencement d'un autre, un monde qui appartiendra aux enfants. Ils vont, eux, vivre une aventure qui nous est interdite Jean.Jacques Debout au piano.' «Je suis heureux 1 ... )) DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 .!!! Lü ~_ .. ~ if. c: 'c"r. s:1 .!!! Lü o o . 0. à jamais. La conquête de l'espace, c'est un grand courant d'air venu à notre insu qui balaie tous les fondements de notre vie. L'espace nous apprend l'humilité. C'est une autre vision, un autre destin où les jeunes, mêlés et venant de toutes les races trouveront la sérénité et la paix ... Il «Les jeunes que j'ai choisis sont représentatifs de la réalité terrienne. Ils ne sont pas professionnels, pas conditionnés, je leur fais confiance. «Double V Il est leur chose. Ils peuvent improviser, changer les dialogues, qui sont en anglais et en français, en fonction de leur origine, de leurs convictions, de leur éducation, de leur caractère ... Ils dansent, chantent, se taisent comme ils en ont envie. Le voyage de l'espace a commencé dans leur coeur, dans leur tête. Ils sont partis pour agrandir leur horizon. L'espace s'ouvre à eux. Ils trouveront la sérénité, la paix symbolique par le V, index et majeur des deux mains tendus à la fin du spectacle Il. Ecrivain, photographe, aventurier, pilote d'essai, journaliste, producteur - de « Hair» -, François Dusolier avait besoin d'un compositeur jeune, ouvert, disponible. Il a choisi Jean-Jacques Debout qui, enthousiasmé par le sujet, s'est mis au travail dans une maison de l'Ile de Ré. «J'ai .voulu composer un petit opéra sans prétention, dit-il, mais très lyrique, très pur. Une messe d'espoir des enfants qui disent adieu au vieux monde Il. Jeunesse, espoir, paix : les symboles sont beaux. Voguent longtemps - deux ans sont prévus - les « Double V» dans leur vaisseau du Châtelet! Marguerite KAGAN De droite à gauche .' F. Dusolier, le chorégraphe Steve Curry, J..J. Debout, D. Hechter. 25 (( Liberez Angela taut de suite)) O entre. On place tout autour de nous des grilles et nous voilà dans les prisons américaines. Jackson nous parle. On nous demandera aussi de mettre des masques noirs et blancs et de représenter ainsi des travailleurs noirs et blancs au bureau de chômage. Ce n'est certes pas un spectacle traditionnel. il n'y a pas véritablement de spectateurs, mais c'est beaucoup mieux, nous participons et ne nous y trompons pas, José Valverde, le réalisateur de ce montage, est à la fois un remarquable homme de théâtre et un militant passionné par la cause des noirs américains. A cet égard. la piece nous apprend beaucoup sur les affaires Jackson et Angela Davis. A l'aide de photographies, de chansons. de lectures des lettres de Jackson, d'Angela Davis, nous sont présentés les dossiers « noirs» des Etats-Unis. Car la Compagnie José Valverde n'a pas « dramatisé» à partir de faits réels plus ou moins isolés. elle a essayé, au contraire de rendre compte totalement d'une réalité qui est dramatique en elle-même, d'y coller le plus possible : c"est ce qui explique comme me le fait remarquer José Valverde que la pièce est «un canevas ouvert où on incorpore les données nouvelles ». José Valverde s'est rendu aux obsèques de George Jackson et, à cette occasion. a fait la connaissance de Bobby Seale et d'Erika Juggins. A la lumière des discussions qu'il a eues avec eux. de ce qu'il a vu. il ne se fait pas beaucoup d'illusions sur la Justice américaine. Une chanson du spectacle d'ailleurs la dénonce « Votre notion de justice à la révolte est propice, à chaque jour d'esclavage, je suis moins seul dans ma rage.» ADlarphe d'Ottenburg Nous sommes dans un royaume, Ottenburg, en proie aux forces du mal incarnées par le roi Hans et son fils, Amorphe, débile sanguinaire. Toutes les interprétations d'un pièce sont possibles. mais je ne crois pas me tromper en disant que Jean-Claude Grumberg a essayé de traduire. sur le mode imaginaire, une réalité concentrationnaire qui le hante. La première image du spectacle nous donne l'atmosphère générale : des hommes et des femmes suspendus, tels des araignées ou des primates, s'accrochent, amorphes et en guenilles à des treillis de cordes géants. Dans un coin, la présence eOErayante d'une aigle, emblème d'une puissance dévorante, rapace en équilibre sur une balle: c'est la terre qui est représentée là, sous les griffes despotiques du mal, de l'injustice. Les images violentes se succèdent, soutenues par un dialogue à la fois 26 dramatique et comique : Amorphe, le fils débile, ne peut s'exprimer que dans et par le mal. Il tue les vieillards, les infirmes : ce sont des forces improductives, explique le roi pour .iustifier ces actes, recourant à des arguments qui ne sont pas sans nous rappeler certains souvenirs. Il nous faut une économie saine, dit-il, être un pays sain, une race pure. les vieillards sont tout justes bons à gémir; quant aux enfants, il n'y a pas de place pour eux: les serfs sont là pOUl' produire et non pour se reproduire. Représentation d'un monde-cauchemar (qui malheureusement existe), langage varié et riche, mise en scène effroyablement adaptée, très bonne interprétation par la Comédie rrançaise. Cette pièce est à voir absolument même si ça fait mal (à l'OdéonThéâtre national jusqu'au 14 novembre). D.K. Il s'est rendu compte de la tactique employée par le gouvernement des Etats-Unis pour saper la montée du courant révolutionnaire : « J'ai pu me convaincre que l'une des préoccupations des noirs était de trouver des moyens financiers pour leurs programmes (prise en charge des orphelins de détenus, de militants tués par la police, crèches, dispensaires) car le gouvernement s'efforce de frapper à la caisse les organisations démocratiques, de faire ponction sur leurs finances en les accablant d'amendes et de procès.» Une partie du bénéfice de la pièce doit ainsi servir au soutien de ces mouvements. Telle autre chanson insiste sur le chômage croissant en particulier pour les noirs, telle autre ironise sur le « bon cow-boy» américain qui tue les Vietnamiens. Quelle a été la réaction du public français? .. C'est un public divers que nous avons eu, explique José Valverde. aussi bien de théâtre (mais plus parisien que d'habitude) que militant (nous avons constaté une assez forte assistance noire). Il y a des gens qui sont venus pour critiquer, nous reprochant de sous-estimer le rôle d'Eldrige Cleaver. Dans l'ensemble, les representations, très vite, ont été complétées.» José Yalverde m'a aussi parlé de la façon dont il concevait le théâtre et cela sans dogmatisme, avec la simplicité de l"homme, épris de démocratie: « Ce n'est pas la première pièce que je monte sur des problèmes réels, actuels . J'ai déjà monté la « Politique des Restes ». d'Arthur Adamov. « Othello» dans une perspective antiraciste ... En 1966 et 68, nous avons aussi fait des recherches théâtrales à partir du problème du Vietnam. des atteintes à la sécurité de remploi ... . .. « Le théâtre est une des formes d'intervention des hommes pour aider à la transformation de la société, il doit, dans ce but, aborder des sujets d'actualité. «C'est un des modes d' expression naturel de l'humanité. Le théâtre, selon moi, doit être polémique.)) José Valverde et sa troupe vont partir en province. pour jouer. que dis-je, pour montrer la réalité, partout dans des gymnases. des maisons de jeunes, des usines. Dominique KRZYWKOWSKI. cinélDa A gauche : J ean Rouch. Ci-dessus : une scène de Benito CC/'eno, de Serge Roullet. Des ffiOlS contre le raCI•S Ole 1 A rentrée cinématographique présente L plusieurs films qui, à des titres divers posent des problèmes se rapportant au racisme et au nazisme. Le pire côtoie parfois le meilleur, dans ces spectacles qui veulent défendre une bonne cause; mais ne boudez pas le plaisir de voir les quelques films suivants. A des titres divers, ils sont tous excellents. Il la veuve Couderc Il, avec ces deux merveilleux artistes que sont Simone Signoret et Alain Delon, est enrichi d'arnere- pensées politiques, car cette intrigue de Siménon a comme toile de fond l'année 1934. Pendant ces mois où s'esquisse le Front Populaire, où la France fermente, l'agitation de droite, l'action des « Croix de feu», la chasse aux « métèques» par quelques énergumènes xénophobes et racistes b a tt en t leur plein .. . Sautons quelques années et voici cc le Sauve4r Il, de Mardore, où, d'emblée, nous sommes plongés dans l'univers de la guerre et de l'occupation. L'horreur glacée du nazisme face à la vie, la beauté et l'amour y sont excellemment dépeints. Quant au Il Voleur de chevaux Il, d'Abraham Polonsky, c'est l'histoire d'une sorte de Il Till l'Espiègle Il, juif et polonais, qui rêve de l'Amérique . La vie d'une communauté juive pourtant difficile en 1904 y est retracée avec humour, et c'est par cet aspect que l'oeuvre m'a le plus appris .. . Dans des genres très différents, mentionnons deux autres films: - Il le Chemin de lumière Il, de Reichenbach où Yehudi Menuhin, génie du violon mais aussi pacifiste convaincu et DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVÈMBRE 1971 généreux « vit», sans cabotinage, devant le spectateur .. le temps d'un film ... Et l'on croit à cet homme fraternel et bon qui s'applique. à donner de la joie aux uns, et à diminuer la peine des autres. - Il le sel de la terre Il, de Biberman, sorti en 1955, est une des premières oeuvres engagées du cinéma américain; il dépeint les luttes sociales d'ouvriers agricoles contre la société qui les opprime, et contre le racisme qui tend à les diviser. Une bonne reprise. Mais nous nous attarderons surtout, aujourd'hui sur le dernier film de l'ethnogue- cinéaste Jean Rouch : - Il Petit à Petit Il est à voir par tous ceux qui luttent (peu ou prou) contre le racisme, le paternalisme, le néo-colonialisme. Ce film burlesque et grave dresse le constat d'une crise de civilisation. Deux hommes d'affaires africains essaient. en vain, d'appliquer au Niger, les moeurs et les coutumes parisiennes. La découverte de Paris et des Parisiens par Damouré, imitant les ethnologues, est une séquence bien savoureuse ! Derrière ce film provocateur et souvent invraisemblable, volontairement, est posé le problème sérieux et grave des pays fraîchement décolonisés face à leur destin. Jean Rouch : « L'heure de fanthropologie partagée)) Jean Rouch s'est d'ailleurs expliqué sur son film; voici ce qu'il m'a déclaré: « Damouré et Lam, les deux « vedettes » du film, sont mes complices, mes compagnons depuis trente ans. ~ Pablo Neruda prix Nobel de littérature Le jeudi 21 octobre le prix Nobel de littérature a été attribué à Pablo Néruda. Ce choix couronne un grand écrivain, un homme de paix et de progrès, le poète des terres meurtries longtemps par le colonialisme. En honorant celui qui a su chanter son peuple et le besoin de liberté et de bonheur de tous les hommes de ce peuple et du monde entier, le prix Nobel s'est lui-même distingué. 27 Nous sommes partis avec ridée d'un documentaire, d'un essai qui irait"« plus loin» dans le témoignage sur cette Afrique que je connais depuis trente ans. Mon film se veut drôle car, pour aborder et traiter les problèmes sérieux et vrais, il vaut mieux commencer par en rire . Durant le « première décennie», la coopération s'est avérée être un échec, aucun plan valable de développement n'a été appliqué . Quant aux termes d'ethnographie et de négritude, ils sont à dénoncer et à supprimer comme des hydres. Ce sont toujours les descendants des pays colonisés qui sont étudiés par les descendants des pays coloniaux, il est temps de changer cela et l'heure de l'anthropologie partagée est arrivée. « La fin de mon tllm est un arrêt de la réflexion ... « Etre antiraciste est abominable si l'on ne reconnaît pas la culture de l'autre ... J'ai autant appris en Afrique que j'y ai enseigné. En somme, je demande. .. l'imagination au pouvoir! Quant à la coopération, la seule bonne, c'est l'amitié, mais il y faut plusieurs années. « Il faut tout retrouver ; rien n'est encore perdu, les cultures noires et magh· rébines par exemple n'ont pas encore été complètement volées. C'est pourquoi mon prochain film : Il Grand à grand Il ou Il les testicules du hibou Il (personne ne les a jamais vus!) traitera sérieusement des grands problèmes de la civilisation africaine : la famille , la propriété, l'argent, l'amour, la mort, etc ... « On a trouvé dans Il Petit à Petit Il des aspects racistes. « Mes» Africains parlent mal le français? En réalité, la langue de Damouré est admirable, faite de jeux de mots et d'expressions nouvelles et insolites « Mes» Africains sont d'odieux capitalistes? Ce dénigrement est volontaire. Pour montrer les contradictions du capitalisme international dans les pays sous-développés , je renverse le genre et montre un ethnologue noir nanti dominant des Européens. Damouré règle par des chèques qu'il ne sait même pas remplir, des achats somptuaires? Par ces achats symboliques, je veux montrer le gâchis incroyable qui règne en Afrique Noire. » .. . Ai nsi, ce film humorist ique qui se veut, selon les termes de Rouch « provocation , jeu et fable aussi », montre en définitive beaucoup de sérieux, par toutes les questions, d'une actualité déchirante, qu'il soulève. Marie-France SOTTET, 28 Benito Au 18e siècle des navires faisaient la navette entre les côtes africaines et américaines, les cales emplies d'esclaves noirs. Des révoltes ont parfois éclaté. C'est une de ces révoltes que nous raconte Il Benito Cereno Il, de Serge Roullet d'après la nouvelle d'Herman Melville. L' histoire est inspirée du journal de bord du capitaine Delano, de nationalité américaine . En février 1799, son bâtiment croisa un navire espagnol transportant une cargaison d'esclaves. Ce navire, commandé par Benito Cereno, était en proie à de grandes difficultés. Le navire américain approcha pour lui venir en aide. Une lu ... vu ... • Indienne, originaire d'une tribu Cree , Buffy Sainte-Marie est passée le 23 octobre à l'Olympia. Ses qualités vocales phénoménales, ses dons pour la composition ont fait d'elle une vedette qui a contribué à faire connaître la lutte dramatique des Indiens. Il Au même titre que Bob Dylan ou Joan Baez, Buffy SainteMarie est une chanteuse folklorique, si fon entend par là, fincarnation chantée de la vie réelle et actuelle d'un peuple Il, écrit Jacques Vassal dans la revue « Rock & Folk ». • Notre collaborateur Bernard SannierSalabert ouvrira sa galerie, 34, passage Jouffroy (entrée, 10, boulevard Montmartre). Il présentera les oeuvres récentes de S.M. Huttin du 4 au 24 décembre 1971 . Les peintres amis du M.R.A.P . y seront les bienvenus. Cereno étrange ambiance y régnait. Les esclaves noirs en étaient devenus les maîtres. Benito Cereno s'enfuit sur le navire américain. Plus tard , le chef de la révolte . Atimbo , sera pendu. Cet excellent film, remarquablement réalisé, et qui est une histoire réelle, a également sa propre histoire. Il fut présenté au festival de Venise de 1969 où il fit impression . Pendant deux ans il est resté dans les boîtes, sans doute parce qu'il touchait au sujet considéré encore comme « subversif», et en tout cas « non commercial». Un film à voir, qui aidera dans la lutte contre les négriers des temps modernes. Jacques OlMET entendu • « Ta vue me dérange, Hotnot» la pièce d'Athol Fugard sur l'apartheid, créée en janvier dernier par le T.O.P., part en tournée : Yvan Labéjof y conserve son rôle , en face de Pierre Vielhescaze, directeur du T.O.P. qui remplace Robert Rimbaud. • Fidèle à une pOlitique culturelle précise, le Théâtre Romain Rolland de Villejuif, que dirige Raymond Gerbai , annonce avec « La grande main de Faragaladoum» sa sixième création pour jeune public, démontrant ainsi la nécessité de donner à voir aux enfants des spectacles de qualité et de les traiter avec respect et considération. • La firme soviétique « Melodia » sort un nouveau disque de chansons populaires juives exécutées par Samuel Rivkin avec l'accompagnement de S. Rozenberg. • La revue « Spiritus» (40, rue Lafontaine, Paris 168 ) a publié dans son numéro 46 une étude approfondie du Père Joseph Vandrisse sur les raisons du départ des Pères Blancs du Mozambique. • A partir du livre d'Annie Lauran , « L'Age scandaleux », (Editeurs Français Réunis). et des photos de Pierre Lambert, une exposition-témoignage sur la vieillesse vue pa~ les enfants a eu lieu du 19 octobre au 6 novembre chez Josie Péron , libraire. L'ouvrage d'Annie Lauran , « récit-vérité », réalisé à l'aide du magnétophone comme « Un noir a quitté le fleuve », et de devoirs d'écoliers, met parfaitement en lumière ce que la réalité vécue par les vieillards a de « scandaleux », au sens révoltant. • En son dernier numéro « Tous les Hommes sont Frères », ELAN de notre ami Lippens (59-Li nselles), plus fraternel que jamais, « mérite non seulement l'attention et l'estime, mais la tendresse », commente notre collaborateur Jean Cussat-Blanc. Cll~res Pardonner ? • ) CETTE plaquette (1) n'est qu'un long cri de protestation douloureuse motivé par l'annonce d'une éventuelle prescription des crimes de guerre. L'un de ces crimes, le génocide perpétré contre les juifs, est sans commune mesure avec les autres. Il est imprescriptible , impardonnable. D'ailleurs, les Allemands Il nous ontils jamais demandé pardon? Il Ils sont Il un peuple irrepenti Il (p. 45). Et Il en quoi les survivants ont-ils qualité pour pardonner à la place des victimes? Il (p. 51) . Devant une Il amnistie morale qui n'est qu'une honteuse amnésie Il, devant la quiétude des bonnes consciences ou le sommeil des inconsciences, Il une seule ressource : se souvenir, se recueillir, ... ressentir, inépuisablement Il. Ressentiment qui n'est pas rancune, mais horreur : Il horreur des fanatiques qui ont perpétré cette chose, des amorphes qui l'ont acceptée, et des indifférents qui l'ont déjà oubliée Il (p. 58). Mon humble avis, après avoir lu et relu ces pages, c'est qu'un non-juif L'Union des engagés volontaires et anciens combattants juifs ( 1939-1945) donne son 27e BAL ANNUEL le samedi 11 décembre de 22 h à l'aube dans les salons de l'HÔTEL HILTON La soirée sera animée par Paul FABRE et son orchestre Entrée 25 F Réservez vos places dès à présent à L'U . E . V. C.J . 58, rue du Château-d'Eau Tél. 607-49-26 (PRIX DU SOUPER Paris-Xe

80 F)

n'a pas qualité pour oser porter un jugement sur elles. Bouleversé par l'expression d'une pareille souffrance (II 0 vous tous qui passez, regardez et voyez, s'il y a une douleur pareille à celle qui pèse sur moi Il, se lamentait jadis Jérémie) , le non-juif est comme les amis de Job : il ne peut que s'asseoir sans rien dire, si ce n'est, comme le prudent Eliphas de Theman : Il Si nous risquons un mot, peut-être en seras-tu affligé? Il Ce mot, Jacques Madaule ra pourtant risqué. Sa lettre, loyalement reproduite, me paraît apporter non pas un correctif mais un complément nécessaire, et il semble que l'auteur rait reconnu . Il Dans sa douleur excessive Il, dirai-je, en reprenant les mots du poème biblique de Job, VI. Jankélévitch semble étendre la responsabilité du génocide à tout le peuple allemand - et même aux Autrichiens - tout en saluant quelques êtres d'exception Il perdus dans la masse vociférante Il. C'est sur cette notion de responsabilité collective que Jacques Madaule intervient. Et aussi Pierre Abraham, qui étaye ses observations sur d'autres arguments. En définitive, je ne suis pas sûr que le titre de cet écrit, en dépit du point d'interrogation qu'il comporte, soit adéquat. Que de questions restent sans réponse : Que signifie très exactement pardonner? La prescription implique-telle le pardon? Peut-on distinguer pardon et oubli, comme au Mémorial de l'île de la Cité : Il Pardonne, n'oublie pas? Il Et même lorsque VI. Jankélévitch parle du Il ressentiment Il qui Il n'est pas rancune mais horreur Il, ne peut-on pas dire qu'il satisfait déjà aux exigences de toute conscience droite? Craint-il qu'on lui réclame (qui, on?) quelque chose de plus? Mon sentiment personnel est que les crimes de guerre restent imprescriptibles. Je rejoins Madaule quand il ajoute que certains - il cite Auschwitz - sont essentiellement impardonnables. Mais je vais plus loin. Je ne vois pas au nom de quoi, et pour quelque faute que ce soit, bénigne ou effroyable, on pourrait imposer à un homme de Il pardonner Il à son semblable. Si ce n'est par référence · au pardon que Dieu accorde à l'homme : et donc, il y faut la foi à un Dieu qui ne saurait être celui des philosophes et des savants, mais le Dieu vivant d'Abraham, Isaac et DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 Jacob. Ou alors, par une si grande conviction, quasi-mystique, de la supériorité, de la puissance de percussion, de la victoire finale de l'Amour, que l'on puisse - individueilement sans doute et sans engager quiconque autour de soi - se permettre la folie du pardon. Alors, de quel droit reprocherais- je à un homme comme Jankélévitch, quand il déclare prendre sur lui la souffrance de millions d'autres hommes exterminés par la haine, de douter de la possibilité du pardon? Excès de douleur Il est possible que le nombre des victimes du drame du Bengale dépasse d'ici quelques semaines le nombre des victimes des camps d'extermination nazis. Certes, les circonstances sont autres. VI. Jankélévitch aurait beau jeu de voir dans ce nouveau drame une confirmation de ce qu'il a écrit : Il Ce qui est arrivé (de par rhitlérisme) est unique dans rhistoire et sans doute ne se reproduira jamais, car il n'en est pas d'autres exemples depuis que le monde est monde~ (p. 57). Mais enfin, il ne faudrait pas que ce triste privilège d'unicité, de supériorité indiscutable dans l'horreur, que nous reconnaissons au génocide nazi, nous donne maintenant le droit de nous tranquilliser devant un génocide qui ne peut être qu'inférieur qualitativement, même s'il devenait supérieur quantitativement. Comme dit VI. Jankélévitch, les Bridoison ergotent. Pour les victimes, le résultat est le même! J'aimerais que M. Vladimir Jankélévitch, ayant relu les pages 52 à 59 de son livre, s'interroge et nous interroge tous avec la même éloquence, la même amertume, le même Il excès de douleur Il (Job, 2, 13). Car, nous a-t-il dit: Il Tout le monde est IIlus ou moins coupable de non-assistance à un peuple en danger de morh (p. 54). Et : Il ragonie des déportés sans sépulture et des petits enfants qui ne sont pas revenus durera jusqu'à la fin du mondell(p.59) . Abbé Jean PIHAN. (1) Vladimir Jankelevitch : Pardonner 7 Une plaquette de 104 pages, avec deux lettres de Pierre Abraham et de Jacques Madaule, et les réponses de l'auteur. Le Pavillon. Ro'ger Maria, éd. 1971 (5, rue Rollin, Paris-50 ) . 29 Diffusion de couture • Créations Arlette Nastat vaae~nastat 43, rue d'Aboukir, Paris-2e • Tél .. 508-88-60 30 arts PICASSO notre anll- Ouatre-vingt-dix ans: de l'hommage officiel aux manifestations populaires, de l'exposition du Louvre aux galeries du monde entier, des numéros spéciaux de revues aux ouvrages d'art, l'anniversaire de Picasso est un heureux événement pour la foule innombrable de ceux qui l'admirent et qui l'aiment. Aucun artiste n'a plus que lui, sans doute, exprimé et marqué son temps. Le jaillissement ininterrompu de son oeuvre, sans cesse renouvelée, explorant tous les aspects de la vie à travers formes et techniques, témoigne de l'éternelle jeunesse de Picasso. Ce qui fait en outre sa grandeur et sa fascination, c'est qu'elle se situe au coeur même de la réalité contemporaine, de ses conflits, de ses craintes, de ses espoirs. Et que nous y rencontrons dans une authentique et riche multiplicité, non pas l'homme abstrait, mais les hommes : en lutte, en mouvement, douloureux, aimant, aspirant au bonheur, à la paix. L'art, pour Picasso, est aussi acte. Dans les combats quotidiens, toutes les nobles causes sont siennes. De Guernica à la Colombe Un dessin de Picasso, exposé à la dernière vente du M.R .A.P. de la Paix, des héros et martyrs de la Gréce aux Rosenberg, il apporte le soutien vigoureux de son trait, de ses couleurs, à ceux qui souffrent et qui luttent. A chacune des expositions-ventes du M.R.A.P., figure une oeuvre de Picasso. Droit et 'Liberté a reproduit ses « Quatre parties du monde» sur la couverture de son numéro spécial, consacré à la présente Année internationale de lutte contre le racisme. Nous souhaitons de tout coeur un bon anniversaire à Picasso, notre ami . Profils de médailles Tandis que s'achève en l'Hôtel des monnaies, quai de Conti, l'ext,.ao,.dinai,.e exposition Les Graveurs d'acier & la médaille, de l'antiquité à nos jours, la lW"onnaie de Pa,.is que di,.ige avec compétence IW"' Dehaye, continue sa P,.oduction habituelle de monnaies et médailles et liv,.e à not,.e cu,.iosité tout un choix de f,.appes dont, souvent, l'actualité guide la sélection. ON retroU\ e avec plaisir une oeuvre de Sylvain Bret marquant 1(' XXV" anniversaire de la F.A.O. (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture). Le symbolisme des 25 gerbes de blé placées entrp les méridiens du globe est facile. pput-êtn·. mais l"aniste a su ex prinH'r. au-delà de son propos. I"univer'salité d'un oq~anisme souvent méconnu. Voici Auguste Blanqui. de 1\larcel Chauvenet. qui trouver'a place auprès de l'excellente Louise Michel. récemment publiée pour le centenaire de la Commune. GANTS - TETINES Chez votre pharmacien. DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 Avec Charlotte Engels, c'est Léopold-Sedar Senghor qui entre au catalogue des monnaies. « Pour une civilisation de l'Universel .. , qui frappe le revers. s'accommode de deux visages ailés. ' Pour commémorer le trentième anniversaire de l'Appel du 18 juin du Cénéral-de-Caulle. voici une mrdaille de Raymond. : Joly - l'un des plus brillants graveurs de la maison, un de ceux dont la personnalité est la plus marquante - : voici sa gravure du cf'ntenair'e de la proclamation de la Républiquf' (4 septembre 1870) avec la place de l'Hôtel de Ville et, surtout le rappel. au revers, des différentes Républiques figuratives qui marquèrent nos monnaies depuis un siècle: que ce soit cellf' d'Oudiné. de Chaplain. de MorIon. de Bazor ou de Roty ... et j 'f'n oublie - tout cela fait de cette médaillf' une sorte de témoignage hisLOriquf', la concrétisation, sur 81 mm, de cent ans d·Histoire. un début prestigieux pour de .Îf'unes collectionneurs. Car le trait. pris dans le bronze ou l'argf'nt est plus que tout autre manifestation de l'artiste, un commencement d'éternité. C'est le grand philosophe Alain qui disait « ... Me fier à un artisan de médaille pour qui le style est un métier. » C'est si vrai que, des cylindres gravés du 3" millénaire de Mésopotamie aux dernières oeuvres d'Henri Navarre ou de Raymond Corbin. se dégage un même désir. un méme besoin de communiquer par ce que la main de l"hommf' a fait de plus fu gace : le tra.t. transmis au-dplà df's siècles par les matériaux les moins périssa-' bles . Une collection de médailles., c· est. aussi, un moyen de se mieux connaître, se reconnaître. Bernard SANNIER-SALABERT. 31 « Le trésor. de l'homme» cc le trésor de l'homme Il, tel est le titre d'un magnifique album pour enfants, consacré au Vietnam, édité par la Farandole (1). y sont rassemblés des contes millénaires , des récits et poèmes d'a ujourd'hui , des jeux, des comptines, des illustrations en couleurs - découpages, estampes, photographies - qui évoquent remarquablement la vie actuelle des enfants vietnamiens et mettent l'accent sur le riche passé culturel de ce pays si éprouvé. Tous ceux qui ont participé à la composition de ce livre ont renoncé à leurs droits d'auteu r en faveur de l'aide médicale au Vietnam . A noter également à la Farandole, un livre pour adolescents

cc Les fils de Grand-Aigle» par Sat Okh. L'auteur

est le fils d'une Polonaise et d'un chef de la tribu aujourd'hui décimée des Shawanèses. (1) Editions La Farandole 3, cour du Commerce-St-André. Paris (68) ~. n . ".,., "OH' . ... " .•


Mensuel ~d;it~é -----Té-'- : S-74-.3-S.-S6- .-C-.C- .P-. "Pa-riS-l"O.':':07~2.':':S3-

par le Conseil National du Mouvement de la Paix Au sonunaire du n° 250 (15 nov.-'I5 déc.)

  • Choses vues en A lTIérique Latine * Le Far West et ses Indiens * Dans le dossier du désarlTlelTlent

32 Rappel : * * Le Bangla-Desh tel que je l'ai vu, un témoignage du R.P. Jean-Yves JOLlF, membre du Bureau National du Mouvement de la Paix (n° 249).

  • (( Marchands de canons », ilTlage de

nlarque de la France? Un dossier publié dans le n° 248. * MégatOlTles, lTIégalTlorts. Un monde capable de se surtuer (n° 247). Specimen sur demande : « Combat pour la Paix, 35, rue de Clichy, Paris-go - C.C.P. 10.072.53 - Abonnement 1 an (10 numéros) : 18 F, le numéro 2 F. Dites-le avec des ti ..... res ..• PENDANT l'Année internationale contre le racisme, ne manquez pas d'utiliser et de diffuser les timbres édités par le M.R.A.P. Ceux de grand format ( 110 x 140 mm) peuvent se coller sur la vitre d'une voiture, la vitrine d'un magasin, d'une bibliothéque, etc. Ceux de petit format (28 x 55 mm), peuvent figurer sur votre courrier, vos cahiers, dossiers, livres, etc. Grâce à ces timbres, vous exprimerez votre attachement à la cause antiraciste, vous susciterez l'attention et une réflexion salutaire sur les problémes qui nous tiennent à coeur. Les commandes doivent être passées au M.R.A.P., 120, rue Saint-Denis, Paris (2"). (C.c.P. 14-825-85). LE GRAND TIMBRE: 10 F; LE PETIT: 1 F (10 F la feuille de dix). Remise de 20 % pour toute commande atteignant 50 F. LE PAVILLON ROGER MARIA ÉDITEUR présente sa galerie BRONZES D'ART MONNAIES ET MÉDAILLES 6, rue Thouin, 75-PARIS 05, TéL 633-66-35 POUR VOS CADEAUX nous vous proposons une sélection des plus attrayantes productions de LA MONNAIE DE PARIS • OFFREZ ET COLLECTIONNEZ des médailles et médaillons représentant les personnalités les plus diverses d'hier et d'aujourd'hui (écrivains, musiciens, peintres, hommes politiques, etc.) ou évoquant des thèmes variés, des reproductions de monnaies anciennes. ENTRÉE LIBRE OUVERT TOUS LES JOURS (SAUF DIMANCHE) de 14 h à 19 h LA VIE DU M.RAl? NOVEMBRE 1971 DeslDaret (de « Minnte ))) pa-tera Le journaliste de Minute qui avait engagé des poursuit'es contre Droit & Uberté, Pierre Desmaret en sera pour ses frais. En date du 15 octobre 1971, la 78 chambre de la cour d'appel de Paris, infirmant une décision de la 3e chambre correctionnelle, a débouté Pierre Desmaret; elle le condamne en outre aux dépens de première instance et Parce que nous avions relevé vigoureusement un de ses d'appel. articles, paru en mai 1969, qui s'inscrivait dans la campagne que mène cet hebdomadaire contre les Algériens en France, M. Desmaret, s'estimant lésé dans sa vie professionnelle et personnelle, nous réclamait 6 millions d'anciens francs de dommages et intérêts. Avant même que le tribun!!1 ait eu à juger sur le fond , une longue bataille juridique a eu lieu, faisant apparaître une faute de procédure dans l'action engagée contre nous . Toutes nos félicitations pour ce succès à notre ami M8 Armand Dimet, qui défendait les intérêts de Droit & liberté. Merci aux militants et amis qui avaient rassemblé des documents et témoignages permettant de démontrer devant le tribunal la justesse de notre prise de position . Merci aux milliers de lecteurs qui avaient signé et fait signer la pétition exprimant leur solidarité à notre revue , leur revue. Le forum de (Samedi 20 novembre à la Mutualité) Le Conseil national du M. R.A.P . s'est réuni le dimanche 17 octobre. Il a i-té présidé successivement par Pierre Paraf et l'abbé Jean Pihan. La discussion s'est rapidement engagée après une courte introduction d'Albert Lf'vy . Il s'agissait en premier lieu d'examiner If' bilan de l' action du M.R.A.P. au cours de l'annéf' internationale de lutte contre If' racisme. D'embléf' une constatation s'est imposée : les résultats sont positifs. Prise de conscience L' annl;e intf'rnationale est maintenant connue. De très nombreux articles et prises de position s'y réfèrent df'puis plusieurs mois. Df' nombreux journaux et revues ont saisi cette occasion pour publier des articles, df'S enquêtes, des dossiers sur le racisme. La plupart du temps avf'C le concours du M .R.A. P . Les problèmes relatifs du racisme sont mis plus souvent à l'ordre du jour aujourd'hui que dans le passé. Ce phénomène a été particulièrement perceptible lors de la crise pétrolière franco-algérienne, où les l'éactions ont été vives dans les milieux les plus divers pour combattre le car ac- DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 tèr'e raciste qUf' certains voulaient donnf'r à ce différend. Le Conseil national a également apprécié comme heurf'ux les efforts accomplis dans le domaine culturf'1. Au tlH;âtre. au cinéma notamment. les « sorties» se font plus nombreuses qui traitent du racisme sous différents aspects. Cependant - toutes les interventions à ce Conseil national l'ont indiqué, - les progrès enregistî'és aussi prometteurs soient-ils n'ont pas écarté le danger raciste . Il nous appartient donc df' maintenir la pression, de l'augmenter' encore. Autre remarque d'importance. car elle est une constatation en même temps qu'une ligne de conduite et une perspective : cette conscience antiraciste qui tend à progresser dans l'opinion ne doit ni ne peut être attribuée aux seuls mérites du M.R.A.P. Il convient d'insister aussi sur le rôle des Eglises (journée mondiale du l 'T janvier organisée à l'appel du Pape, déclarations d'évêques et d ' or~anismes ecclésiastiques, etc). des syndicats (action commune C.G.T.-C.F.D.T. pour la défense des travailleurs immigrés) , de la presse. des créations artistiques plus fréquentes: c'est tout cet ensemble qui. !ijouté à la propre action du M.R.A.Poo aide à combattre les pr~jugés . Les comités locaux ont également agi et If' Conseil national s'en est féli cité; il a insistp fortf'ment sur la nécessité d'en créer de nouveaux, de les structurf' r , de les animer pour qu'ils puissent faire face à toutes les sollicitations de l'évi-nement local, comme à la conduite des campagnf's d'importance na tionale. Cela est d'autant plus nécessaire que les suggf'stions formulées par la délégation du M.R.A.P. reçue le 5 janvier par le Premier' ministre n'ont pas été suivies à ce jour, des mesures que nous souhaiter·ions. Mêmf' si quelques progrès sont à noter. La semaine d'action Nous sommes à moins de trois mois de la fin de l'Année internationale de lutte contre le racisme. Il convient de poursuivre et d'i ntensifier l'effort. C'est ce qu'a di-cidé le Conseil national en lançant l'idée d 'une semaine d'action contre le racisme, du 13 au 20 novembre. Il s'agit pour le M.R.A.P., ses militants et ses amis, pour toutes les orga- ~ 33 ~ nisations intéressées de sensibiliser toujours plus ("opinion aux problèmes du racisme: d' amplifier r action pour l"adoption de 1I0S propositions dt' lois et des P"oposilions tendant à améliorer la situation des travailleurs immigrés. Le Conseil national a été ainsi amené à répondre à deux questions : Comment? Avec qui? Sur le premier point, il a .iugé qu'il ne peut y avoir de schéma pré-établi. Les formes d'action les plus diverses doivent t·tre utilisées: tracts, affiches, pétitions. « tables l'ondes», projections, expositions, Mbats dans les localités, les entreprises, les lycées, les facultés. tout est recommandé selon le lieu, les possibilités. En veillant, ce qui doit couler de source; à la création de comités du M .R.A.P., au renforcement de ceux qui existent déjà. Sur le second point, l'exemple des démarches effectuées par le Bureau national montre ce qui peut être envisagé. Des contacts ont été pris, en vue de la semaine d'action avec les syndicats: la C.G.T., la C.F.D.T., la F .E.N. De même, peuvent être informées et sollicitées de nombreuses autres organisations, des groupes et des personnalités du monde politique, culturel, religieux, les municipalités, les M.J .C., etc. Dans ce sens, la pétition lancée par le Conseil national pour que soient votées nos propositions de lois d'ici à la fin de l'Année internationale, est à la fois un stimulant et un moyen de contact. Le Forum Il ne peut s'agir d'imposer. Chacun, selon sa volonté et ses méthodes, en fonction des conditions, pqurra. soit prendre ses propres initiatives, dans le cadre de la semaine antiraciste, soit participer à une action commune. Il est dans tous les cas souhaitable que cette semaine se termine par une manifestation . marquant la , convergence de toutes les réalisations, de tous les participants. C'est ce qui a été décidé au plan national. A Paris, cette semaine s' achèvera par un Forum de l'Amitié, le samedi après-midi 20 novembre à la Mutualité. Ce sera un grand rassemblement comportant une partie artistique et où s'exprimeront les représentants des divers courants d'opinion et secteurs d'activité dans une commune volonté de faire échec au racisme, Il appartient à tous d'en assurer le succès, 34 1 SACHEZ AUSSI QUE ... 1 • Une conférence de M. Aron Cohen, le célèbre orientaliste israélien, auteur de nombreux ouvrages sur les problèmes du monde arabe, a eu lieu le 15 octo· bre à Paris, à l'Hôtel Moderne sur le thème : «Proche· Orient perspectives de paix ». Organisée par la Commission des sociétés juives auprès du M.R.A.P., qu'anime Alexandre Chil·Kozlowski, secrétaire national. cette conférence était présidée par Charles Palant. vice·président du Mouvement. • L 'exposition du M.RA.P. sur les problèmes des trava/Heurs immigrés en France a été présentée à Bobigny (Seine·Saint-Denisl du 14 au 28 octobre. Elle ira ensuite à Fontenay·sous·Bois et Malakoff. • Des tracts antisémites marqués de la croix gammée sont apparus dans plusieurs quartiers de Paris. notamment aux Champs-Elysées. Le M.R.A.P. est intervenu auprès des autorités préfectorales. • A l'Ecole centrale. à Châtenay-Malabry. un débat sur les travailleurs immigrés a eu lieu le 25 octobre. Il était animé par Sally N'Dongo. secrétaire national du M.RAP. • Lors du passage à Dijon du film «Mektoub ». le Comité local du M.R.A.P. a fait paraître dans la presse des extraits d'une interview du réalisateur. Aligalem. publiée dans Droit & Liberté. • Projections annoncées : «Nuit et Brouillard» et «Les Autres ». le 8 novembre au Centre régional d'éducation populaire des P. et T. (Paris-12~1; « Etranges Etrangers ». le 17 novembre à Saintes. Collection le Chansonnier International Grand Prix du Disque ARGENTINE Atahualpa Yupanqui : Trabajo, quiero trabajo. LDX 74371 Duerme negrito. LDX 74394 Preguntitas sobre Dios. LDX 74415 CHll.I Juan Capra: Canto a 10 humano. LDX 74407 • Une conférence·débat sur le racisme a eu lieu le 23 octobre à Bobigny. dans une Maison de Jeunes. Elle était animée par Elisabeth Labrousse. • L 'expositioll du M.R.A.P. sur l'apartheid sera présentée en novembre à Malakoff (92) et à COllches (27). NOTRE CARNET 1 DISTINCTION Nous avons appris avec un vif plaisir la nomination de notre ami Jean SCHAPIRA, membre du Bureau national du M.R.A.P., à la direction de l'Ecole de commerce de Paris, où il dirigeait déjà le département des affaires internationales. Avocat à la cour de Paris, spécialiste de Droit international et de Droit européen des affaires, auteur de nombreuses études juridiques, Jean Schapira dirige également un séminaire de 3 cycle à l'université de Paris-Dauphine. Nous lui exprimons nos très cordiales félicitations. NOS DEUILS Notre collaborateur le photographe Georges Azenstarck a eu la douleur de perdre sa mère, née Perla BUKCHKAN. Qu'il trouve ici l'expression de nos amicales condoléances. MEXIQUE Judith Reyes : Cronica Mexicana. LDX 74421 URUGUAY Daniel Viglietti : Canciones para mi America. LDX 74362 LE CHANT PROFOND DE L'AMÉRIQUE LATINE par Alfredo et Yolanda de Robertis et Pedro Serrano. (Présentation en album avec texte bilingue .) LDX 74395 BRÉSll. Sertaos et Favellas. LDX 74346 Vibrante assemblée aux Coudreaux L'émotion qui s'est emparée de la population du quartier des Coudreaux, à Chelles-Montfermeil, après le drame du mois d'août, l'exploitation des événements à des fins racistes, ont donné naissance à une profonde tension, ces dernières semaines, dans cette région, qui se trouve aux limites de la Seine-Saint-Denis et de la Seine-et-Marne (1). Le M.R.A.P. se devait d'intervenir à ce « point chaud», comme il l'a fait, dans des circonstances un peu comparables, à Orléans, lorsque la ville fut submergée, l'autre année, par la « rumeur» antijuive. Il s'agit, cette fois, d'une campagne anti-algérienne. L'intensité des préjugés soutenus par Minute et quelques quotidiens, la grossièreté de certaines calomnies répandues par tracts avaient suscité, dès le début, la riposte de diverses organisations et personnalités. C'est donc avec de nombreux concours que le M.R.A.P. a pu organiser, le 22 octobre une assemblée d'information. S'étaient joints à l'appel les sections de Montfermeil et Chelles du Parti communiste français et du Parti socialiste, les Unions locales C.G.T., l'Union locale C.F.D.T. de Montfermeil, les sous-sections du Syndicat national des instituteurs, le Conseil des parents d'élèves des Coudreaux. Sous la présidence de M. Rosenblatt, maire de Montfermeil. l'assemblée s'est déroulée dans.le préau de l'école des Coudreaux, plein à craquer. Exposant la situation en toute franchise et réfutant un à un les mensonges racistes diffusés contre les travailleurs algériens du bidonville voisin, Albert Lévy, secrétaire général du M.R.A.P. soulève quelques objections dans un coin de la salle, auxquelles il répond au passage, et son intervention est longuement applaudie. L'assistance vibrante applaudira ensuite avec une même chaleur, MM. Giraud (S.N.I.), Pouliguen (Parti socialiste). Saliba (C.G.T.), Meunier (A.P.E.). Guimet (P.C.F .) qui prennent tour à tour la parole. Sous tous les aspects possibles, l'analyse des problèmes posés se poursuit. des solutions sont avancées pour mettre fin aux difficultés tant de la population française que de la population algérienne, pour favoriser la compréhension réciproque, l'entente et l'action commune dans I.a défense des intérêts communs. C'est la richesse de ces informations, de ces suggestions, que souligne Charles Palant, vice-président du M.R.A.P., en tirant les conclusions de la soirée. Il invite les participants à donner une suite concrète à cette assemblée en adhérant au M.R.A.P. pour créer un comité local. Son appel sera largement entendu, et des dispositions seront prises pour développer encore l'information. Une soirée exaltante et fort utile, dont chacun est sorti plus fort, plus apte à agir contre les préjugés et les haines racistes. Certains, ébranlés mais pas totalement convaincus, posaient des questions nombreuses après la clôture de l'assemblée, suscitant parfois de vives controverses. La salle mit longtemps à se vider. Et l'on en parle encore aux Coudreaux. (1) Voir. dans le numéro 305 de «Droit et Liberté». l'article: «Tempête sur les Coudreaux ». et dans le présent numéro. page 9. DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 ~ 1 1 ! Q) -ca r:::: ..o.-.., ca r:::: r:::: o •• w •

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Plp PRESIDENT : Pierre PARAF ; VICE-PRESIDENTS : BULLE'I'1N D' .&DB.SION Charles PALANT, abbé Jean PIHAN , Fred HERMANTIN ; SECRETAIRE GENERAL: Albert LEVY, COMITE D'HONNEUR Bâtonnier Paul ARRIGHI, Georges AURIC, Claude AVELINE, Robert BALLANGER, Roger BASTIDE, Jean CASSOU, Aimé CESAIRE, Charles de CHAM BRUN, André CHAMSON, Pierre COT, Docteur Jean DALSACE, louis DAQUIN, Hubert DESCHAMPS, Henri DESOILLE, Michel DROIT, Maurice DRUON, Pasteur André DUMAS, Adolphe ESPIARD, Henri FAURÉ, Max- Pol FOUCHET, Marcel GROMAIRE, André HAURIOU, Charles-André JULIEN , Alfred KASTLER" Henri LAUGIER, Alain LE LEAP, Michel LEI RI!; . Jeanne LEVY, Darius MILHAUD, Théodore MONOD, Etienne NOUVEAU, Jean PAIN LEVE, Marcel PRENANT, Alain RESNAIS, Emmanuel ROBLES, Françoise ROSAY, Armand SALACROU, Jean-Paul SARTRE, laurent SCHWARTZ, Jean SURET-CANALE, Jacqueline THOME-PATENOTRE, Général Paul TUBERT, VERCORS, Dr Pierre WERTHEIMER. Robert ATIULY, Vincent AURIOL, Georges DUHAMEL, Yves FARGE, Francisque GAY, Jacques HADAMARD, Georges HUISMAN ,Jules ISAAC, Frédéric JOLIOT-CURIE, Jean LURÇAT, Léon LYON-CAEN, André MAUROIS, Amiral MUSELlER, Marc SANGNIER, André SPIRE, Chanoine Jean VIOLLET. Désireux de soutenir l'action contre le racisme. l'antisémitisme et pour la paix. J'ADHÈRE AU M.R.A.P. Nom , , .... . ... . . ,.,., ." .. .. . ",. , .. . . Prénom . . , .. " .... " ................ . Profession '.' ....... , ..... , , . Adresse , . . .. ,., ...... , . .... ' Je vous envoie, à cet effet. la somme de Je souhaite : • recevoir une documentation complète sur le M.R.A.P. • être invité à ses réunions et manifestations, • participer à l'un de ses Comités locaux ou professionnels. Le montant de la carte d'adhésion Cà partir de 10 francs) est laissé à l'appréciation du souscripteur, sèlon ses possibilités, compte tenu de la nécessité d'apporter le soutien le plus efficace à l'action du M.R.A.P. MOUVEMENT CONTRE LE RACISME, L'ANTISÉMITISME ET POUR LA PAIX (M.RA.PJ .... _____ 120, rue Saint-Denis - Paris (2") - Téléphone: 231-09-57 - C.C.P. : 14-825-85 Paris _____ _ DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 37 ... [EDUCATION A LA FRATERNITE Ils 1 E C.L.E.P.R. s'est beaucoup préL occupé, depuis un an , de la condition des « enfants des bidonvilles », enfants de travailleurs immigrés. Dans le dernier numéro de Droit & Liberté, aux pages d'Education à la fraternité, notre président, le professeur MarcAndré Bloch rappelait les différentes études parues sur la question et signalait l'article qu' il a publié lu i-même dans le numéro du 6 mai 1971 de L'Education. Nous pouvons espérer que, grâce à lui , ce grave problème retiendra l'attention d'un grand nombre d'éducateurs et d'enseignants qui ne sont pas lecteurs de notre publication. Qu'on veuille bien me permettre de revenir sur cet article, et tout d'abord de demander à nos amis de retrouver ce numéro, ou de se le procurer (1) et de le faire connaître autour d'eux. Peutêtre alors, ayant ainsi fait connaissance avec l'auteur de l'article et reconnu sa compétence exceptionnelle en un tel domaine, ces enseignants qui nous ignoraient se proposeront- ils pour travailler avec nous? Des maîtres d'élite Il ressort de cette étude du président M.-A. Bloch , tout d'abord que ces enfants et jeunes adolescents sont actuellement 750000 sur notre territoire . Il ne s'agit donc pas d'un problème marginal. Ensuite, que les mesures réglementaires les concernant ne remontent pas au-delà de janvier 1970, alors que le problème se pose depuis bien longtemps. Qu'elles n'intéressent les enfants d'origine étrangère qu'indirectement, car elles sont relatives à « J'inadaptation» en général ; sur trois circulaires ministérielles, deux se situent « dans une perspective essentiellement médico-pédagogique» ; une seule (13 janvier 1970) prévoit la création de classes spécifiques, dites « classes expérimentales d'initiation pour enfants étrangers». 38 sont 750 000 L'auteur de l'article analyse par le détail ces différentes circulaires, se félicite de leur excellent esprit, mais il remarque qu'elles ne couvrent pas la totalité du problème. C'est à tout âge que des enfants de travailleurs étrangers arrivent en France. Il L'intégration rapide des enfants dans le milieu scolaire normal Il, qui est l'objectif louable de ces classes spécifiques, fait surtout difficulté quand il s'agit de pré-adolescents ou d'adolescents. Or, rien ne semble prévu pour les plus de treize ans ... Par ailleurs, Il il faudrait nécessairement des maîtres d'élite Il, note encore M.-A. Bloch, pour affronter une entreprise pédagogique difficile entre toutes. En fait , on est très loin de compte. Il n'est pas question de mettre ICI en cause la bonne volonté des en sei;] nants, mais elle ne saurait suffire. L'auteur de l'article propose des mesures indispensables. Le plus grave Sur cette seule question de la scolarisation, ajoute-t-il , les réalisations faites jusqu'ici Il restent infiniment audessous des besoins, et nous n'en sommes qu'au seuil de l'immense tâche à accomplir Il. De plus, la scolarisation n'est pas le seul problème. Nous en sommes bien conscients, au C.L.E .P.R., habitués que nous sommes à replacer le problème scolaire dans tout son contexte familial et social. M.-A. Bloch n'hésite pas à dire que le problème scolaire Il n'est peut-être pas même le plus grave Il de ceux que soulève la présence de ces enfants étrangers au sein de notre société. Il faut citer ici textuellement ce que note à cet égard le président du C.L.E.P .R. : Il Il yale problème des rapports de ces enfants et de ces jeunes avec leurs camarades et leurs maîtres français : ne restent-ils pas constamment exposés, de la part de ceux-là et parfois, hélas ! de ceux-ci, aux réactions d'hostilité et de rejet que peuvent inspirer les déplorables préjugés racistes ou nationalistes ? Il Y a ... la troublante question de savoir si le souci légitime de ce que la circulaire du 13 janvier appelle leur Il adaptation à la vie française Il ne risque pas de les déraciner en les coupant de leur culture originelle, que nombre d'entre eux seront appelés à retrouver lorsque prendra fin le séjour en France de leurs parents et qu'ils retourneront dans leur pays; que peuton faire pour conjurer ce risque? Il Y a enfin le problème de leurs conditions de vie : on ne saurait, sinon par abstraction, traiter de leur situation en oubliant combien d'entre eux vivent encore dans des bidonvilles ou des cités de transit, où ils trouvent évidemment le milieu le plus défavorable qui soit à leur développement scolaire comme à leur développement spirituel. Il Conscientiser Oui , la tâche est immense et nous ne sommes qu'au point de départ. Une concertation des efforts de tous est nécessaire, y compris de la part des familles elles-mêmes. Il faud rait les amener peu à peu à se « conscientiser», selon le mot cher à Helder Camara .. . C'est possible, et l'expérience le prouve. C'est possible, à condition qu'une administration sourcilleuse ne considère pas qu'il y aurait, de la part de ces familles et de ces « milieux » d'étrangers, impertinence à vouloir changer leur condition (comme ce fut le cas, récemment, à Massy avec « l'affaire Fonseca »). L'on ne saurait résoudre le problème de l'éducation des enfants sans travailler en même temps à 111'éducation permanente Il des adultes. La tâche de l'éducateur postule celle du militant. (1) L'Education, 13, rue du Four, Paris (6e ) . Le numéro : 1,50 F. RacisHle et éducation perDlanente Dans l'effort que tous les hommes de bonne volonté accomplissent par principe , par idéal, pour rendre 1971 véritablement l'Année internationale de lutte contre le racisme , c'est avec une grande satisfaction que nous présentons le nO 75 (juillet-août) de là revue Il Pourquoi? Il éditée par la Ligue de renseignement et de l'éducation permanente, consacré entièrement aux problèmes du racisme . Il n'est pas nécessaire de souligner J'importance de cette revue qui touche un large public. Remarquons particulièrement l'entretien de Michel Tricot avec Jean Rostand et, surtout la conclusion à laquelle est arrivé cet éminent biologiste qui, s'interrogeant sur les différences humaines devant la science conclut à J'influence déterminante du facteur sociologique. De cet homme, tout simplement, dans sa réaction la plus affective : « Je ne peux supporter aucune ségrégation ... » Ensuite un exposé, « Humanisme et racisme », nous retrace l'histoire ignominieuse du racisme : les événements marquants qui jalonnent la conscience humaine, le climat général de mépris et de haine, d'orgueil et de peur, d'ignorance; ces siècles de religions fanatiques, racistes même, d'antisémitisme passionnel, d'esclavage aux atrocités inouïes, de colonialisme dégradant. Et puis, nous abordons le xxe siècle", Il Pourquoi? Il traque le racisme sous toutes ses facettes, de l'apartheid, ce racisme absolu, monstrueux d' « une prodigieuse imbécillité », aux racismes insidieux, diffus présents en nombreuses taches dans le monde et sous toutes ses formes (racisme sexuel, social qui proclame J'inégalité de la femme, racisme anti-jeunes ... ). Nul d'entre nous ne doit ignorer ce dossier d'éducation, cet outil pédagogique d'une remarquable richesse. Il est une incitation à développer l'éducation permanente, moyen efficace de combattre le racisme. Yves-Pierre RAGON • Pourquoi 7 J, revue éditée par la Ligue de renseignement et de l'éducation permanente, 3, rue Récamier, Paris (7 e) , Abonnement : 20 F. Prix du numéro : 3 F. Juillet-août, nO 75 : « Le racisme », DROIT ET LIBERTE - N° 307 - NOVEMBRE 1971 Vne initiative intéressante Nous avons reçu, au cours de l'été (provoquée par la lecture d'articles qui citaient le C.L.E .P.R.), une lettre fort intéressante émanant d'un animateur d'une Association de coopération francoalgérienne située dans une grande ville de la région Rhône-Alpes . Cet animateur ne connaissait pas le C.L.E.P.R. Nous extrayons de sa lettre quelques passages intéressants, qui peuvent donner à d'autres ridée de tenter une expérience analogue. Il Notre Association, qui est animée par des travailleurs algériens - et même plus largement maghrébins- - et des Français est très sensibilisée à toutes les manifestations du racisme qui sont un peu notre pain quotidien. Nous organisons sur l'agglomération de nombreux cours d'alphabétisation et nous avons ouvert, voici trois ans, un foyer où les immigrés maghrébins peuvent pratiquer diverses activités culturelles ou autres; mais ce foyer se veut surtout lieu de rencontre entre Français et Algériens : il est d'ailleurs situé à rintérieur d'une Maison des Jeunes et de la Culture. A ce titre, nous avons, durant la dernière année scolaire, été sollicités par des professeurs de français soit pour des interventions dans le cadre de cours de français, soit pour l'accueil de groupes d'élèves chargés d'un exposé dans leur classe; chaque fois les jeunes ont pu converser avec un ou plusieurs travailleurs algériens, accompagnés le plus souvent d'un Français. Nous pensons prochainement réunir quelques professeurs, avec qui nous avons collaboré, pour faire le point de cette expérience et, évidemment, l'améliorer. Il

Nous avons souligné dans cette lettre le point qui nous a paru le plus original et nous souhaitons qu'il suscite des réactions. D'autres enseignants, ou animateurs socio-culturels, auraient-ils des faits analogues à nous signaler? Cette expérience de contact direct des jeunes avec des travailleurs maghrébins n'est-elle pas une condition importante d'une réelle « éducation à la fraternité» ? Vn dossier sur les noirs UU.T U.S.A. Le · numéro d'octobre 1971 du magazine Terres lointaines (publié par « L'Enfance missionnaire », organisation catholique) comporte un dossier de 12 pages sur les noirs aux U.S.A., illustré et en couleur. L'essentiel du dossier est constitué par une interview de Jimmy, un jeune collégien noir, fervent du basket. A propos de cette interview, tous les problèmes qui se posent aux Américains de race noire sont abordés. Des indications statistiques sont données de ci, de là, dans des « à plats» très lisibles. Deux pages d'histoire en bandes rappellent, de 1619 à nos jours, la longue et douloureuse marche des noirs vers leur libération. Le numéro: 1 F, 12, boulevard Flandrin, Paris (16e). PIEDS SENSIBLES Les chausseurs du super-confort et de l'élégance C~i)ix UNIQUE en CHEVREAU, en SPORTS et en TRESSE MAIN Femmes du 35 au 43 - Hommes du 38 au 48 6 largeurs différentes (9) GARE SAINT-LAZARE, 81, rue St-Lazare (MO Saint-Lazare _ Trinité) (6' ) RIVE GAUCHE, 85, rue de Sèvres (MO Sèvres - Babylone) (ID") GARE DE L'EST, 53, boulevard de Strasbourg (Mo Château-d 'Eau ).


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Notes

<references />