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Sommaire du numéro

n°164 de juin 1995

  • Edito: Dont acte par Mouloud Aounit
  • Les réponses de Jacques Chirac aux questions du MRAP
  • Kurdes de Turquie: voyage au cœur d'un nouvel an sous haute surveillance par Xavier Schapira
  • Naissance du parlement Kurde en exil par Alain Callès
  • L'école et la république: Paris, pratiques détestables par C. Benabdessadok
  • Parents étrangers d'enfants français par R. Le Mignot
  • Exposition réalisée par le MRAP: 1945/1995 un enseignement pour la paix et contre le racisme par Alain Ribat
  • Français si vous saviez: abus administratifs, ça continue par François Prunet [immigration]
  • Quand les dossiers évoluent positivement par R. Le Mignot
  • Etude de l'INED: l'intégration au quotidien par le comité de Menton

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J l Juin 1995 - N" 164 DSOMMAIRE Élections présidentielles Kurdes Retour de voyage Xavier Schapira Naissance d'un Parlement AJaÎn Calles Séjour des étrangers Pratique. détestables Chérifs Benabdessadok Parents d'enfants français Renée Le Mignot Exposition • 5 6 S LES RÉP NSES DE JAC DES C IRAC AoX oESTIONS 1M5/1995 : un enseignement contre 1. racisme 7 Alain Ribat Campagne o RAP Les abus administratifs 8 François Prunet Des dossiers qui évoluent Renée Le Mignot 8 La veille du premier tour des élections présidentielles, le MRAP a fait parvenir un questionnaire Intégration aux candidats. Nous publions ici les réponses Une étude de l'INEC • Comité local de Menton de M. Chirac élu le 7 mai président de la République. Chrono 10 Ses réponses sont datées du 24 avril. Courrier 12 " page 2 Composition du Bureau national du MRAP 12 ~ Donl acle Tous les candidats à l'élection présidentielle, à l'exception de MM. Le Pen et de Villiers (non sollicités), ont répondu au questionnaire que nous leur avons adressé. Nous les en remercions. Il nous est apparu utile de porter à la connaissance des lecteurs les réponses de M. Chirac. Je vois déjà un certain nombre d'entre vous rappeler l'expulsion des 101 Maliens sous son gouvernement, sa terrible phrase sur les odeurs à Orléans, l'attitude de la Mairie de Paris qui excluait les immigrés de l'allocation de congé parental d'éducation (que nous avons fait condamner par la justice). Ces faits ne peuvent pas nous faire oublier le ferme refus de MM. Chirac et Juppé de toute alliance avec le Frontnational, même si M. Chirac a repris durant l'entre-deux: tours les thèmes musclés relatifs à l'immigration clandestine. Nous n'oublierons pas non plus le geste symbolique du dépôt de gerbe par M. Baroin, représentant le RPR, le 3 mai à la manifestation au Pont du Carrousel en hommage à Brahim Bouaram. Enfin, pour en avoir été témoin,j 'ai encore en mémoire le plaidoyer antiraciste de "ex-Maire de Paris à l'UNESCO dans le cadre d'un colloque sur la xénophobie. Dès lors, se jeter aveuglément dans une attitude d'opposition systématique relèvemit de l'irresponsabilité d'autant que pour paraphraser Aragon ( quand les blés sont sous la grêle, fou est celui qui fait le délicat au coeur d'un combat commun ». L'attitude responsable nous impose de juger aux actes, de soutenir et de faire progresser tout ce qui est de nature à faire barrage au racisme, mais aussi de continuer la mobilisation pour l'abrogation des lois Pasqua et faire avancer le principe du droit de vote des étrangers non-européens, quoi qu'en pense M. Chirac. Dans les réponses du nouveau Président de la République, il y a incontestablement des points d'appui utiles pour notre action: l'intransigeance affichée contre les discriminations, le racisme et le révisionnisme, l'importance de l'action sur le terrain de l'éducation , le rôle de l'école, de l'histoire etde la mémoire. Des ouvertures intéressantes aussi en ce qui concerne la prise en compte d'autres critères que la répression de l'Etat pour accorder le statut de réfugié, notamment aux Algériens. Nous prenons acte .• Mouloud Aounit Il Élections présidentielles lES RÉPONSES DE JACQUES CHIRAC AUX QUESTIONS DU MRAP Dans le cadre de l'élection présidentielle, vous avez souhaité connaître mes positions concernant les préoccupations de votre Mouvement. Je vous en remercie. C'est bien volontiers que je réponds à votre lettre. Vous me demandez tout d'abord si je souhaite que le Parlement abroge la loi d'août 1993 relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d' accueil et de séjour des étrangers en France. Je considère que cette loi a le mérite de traiter clairement des conditions d'entrée et de séjour des étrangers. Sa modification par le Parlement ne me semble donc pas nécessaire. Vous soumettez, par ailleurs, à ma réflexion d'autres sujets sur lesquelsje vous fais part de ma position. Allez-vous abroger les lois d'août 1993 dites « lois Pasqua )) qui sont celles du gouvernement Balladur tout entier et de la majorité actuelle? Etes-vous prêt à prendre des mesures pour garantir les droits et libertés fondamentaux de tous les étrangers qui résident en France quelle que soit leur origine? La tradition intégratrice et généreuse de la République est le fruit de notre histoire et de notre droit. J'y suis personnellement très attaché. La France est fière d'accueillir en son sein ceux qui ont fait le choix de devenir citoyens français. En revanche, elle ne peut accepter l'immigration clandestine préjudiciable à tous. Les lois votées en 1993 ont eu le mérite de traiter clairement les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France. Quelles mesures allez-vous prendre pour faire reculer les pratiques discriminatoires dans les domaines-clefs du logement, de l'emploi, de l'enseignement et de la formation telles qu'elles ont été décrites dans les rapports successifs de la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme? Les pouvoirs publics doivent être intransigeants face aux pratiques discriminatoires. Cela veut dire appliquer les dispositions pénales chaque fois que le droit n'est pas respecté et que des discriminations sont avérées. Cela veut dire renforcer, ainsi que le préconise la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme, les actions de prévention et accroître l'effort d'intégration. De ce point de vue, le rôle de l'école républicaine est tout à fait essentiel et il faut lui donner les moyens d'être le creuset de la Nation Française. En répondant aux difficultés que rencontrent certains enfants par le soutien scolaire, l'aide aux devoirs, les activités périscolaires. En réaménageant les rythmes scolaires, notamment pour permettre à tous les enfants d'accéder à la culture. En enseignant, en particulier à travers l'histoire de France, la tolérance. En les conseillant mieux dans les choix d'orientation et en leur donnant toutes leurs chances, y compris celle de compléter plus tard leur formation initiale s'ils le souhaitent. La meilleure des préventions c'est l'intégration et c'est l'égalité des chances effectivement garantie pour tous. Tels sont les fondements de l'idéal républicain. Je souhaite que nous le remettions en pratique et que nous lui soyons fidèles. Allez-vous supprimer les discriminations parmi les demandeurs d'asile, notamment celles qui sont dues aux interprétations restrictives de la Convention de Genève (en particulier les articles 4, 5, 6 et 7) en suivant les recommandations du HCR et d'autres organismes internationaux? Que pensez-vous du peu d'empressement manifesté par les divers services (OFPRA, Commission de Recours, etc.) envers les déserteurs, insoumis et objecteurs de conscience de l'ex-Yougoslavie? La position officielle de la France, qui condamne les guerres ethniques, ne doit-elle pas être confirmée par un soutien concret à ceux qui refusent de par- Différences n° 164juin 1995 ticiper à cette guerre-là? Que comptezvous faire pour faciliter et permettre l'accueil d'urgence et le séjour des Algériens et Algériennes en proie aujourd'hui au terrorisme? La France a une tradition ancienne et forte de terre d'asile. Cela se traduit d'ailleurs dans la réalité sociologique française. Notre pays continue d'accueillir chaque année des milliers de réfugiés. Les interprétations restrictives de la France à la Convention de Genève ont essentiellement pour but d' éviter les abus dans le recours à ce droit d'asile. Pour ce qui concerne le conflit dans l'exYougoslavie et les conséquences que vous évoquez, il est normal qu'un Etat de droit comme la France s'assure, par le respect des procédures, de la qualité des personnes se présentant comme réfugiés. Le caractère dramatique de ce conflit, où les armées recourent à la conscription et à l' enrôlement, doit effectivement amener nos services à étudier le plus vite possible les cas qui leur sont soumis. De manière générale, la France a surtout un rôle à jouer pour agir sur les causes du conflit, plutôt que de panser seulement les plaies. Il revient à la France comme à l' ensemble des pays européens, mais aussi aux Etats-Unis d'Amérique et à la Russie, de tout mettre en oeuvre pour faire cesser au plus vite la guerre en Europe centrale, aussi bien que dans le Caucase. En effet, la guerre, ferment d'instabilité majeur, se traduit aujourd 'hui par des désertions et des insoumissions dans les armées. Mais demain c'est à une immigration massive des populations civiles que l'Europe de l'Ouest pourrait devoir faire face. Les Algériennes et les Algériens eux aussi menacés par le terrorisme et les assassinats odieux doivent naturellement trouver asile à l'étranger et notamment en France, pays dont ils parlent la langue. Je me suis déjà clairement prononcé là-dessus: il est évident qu'il serait inapproprié de s'en tenir aux seuls critères de la répression d'Etat pour accorder le statut de réfugié; Allez-vous agir pour que la France décide l'Union Européenne à soutenir la mise en vigueur de la Convention internationale des droits des travailleurs migrants et de leurs familles, par la signature des chefs d'Etat et la ratification des Parlements? Et si l'Union Européenne n'est pas facile à remuer, allez-vous demander à la France de montrer l'exemple en tant que patrie des Droits de l'Homme? Nous estimons que le texte du Traité de Maastricht n'interdit pas formellement à notre pays de se déterminer sur ce point. Cette Convention, préparée en 1990 dans le cadre de l'Assemblée Générale de l'ONU, prévoit la ratification directe par les Etats (art. 86) pas celle par les organisations d'iniigration économique régionale, il n'est donc pas possible, en l'état, de la faire ratifier par l'Union Européenne. Je note d'ailleurs, qu'à ce jour, aucun des Etats membres ne l'a ratifiée. Cela n'enlève rien, bien sûr, à la valeur de ce document, dont il faudrait évidemment se préoccuper, et surtout à l'objet de cette Convention. Le statut des travailleurs migrants et de leurs familles n'est d'ailleurs pas absent du droit européen, ni même du droit français, puisqu'il existe déjà une Convention européenne sur le statut juridique du travailleur migrant et, comme vous le savez, la loi française prévoit et organise le regroupement familial. J'ai bien conscience que cette question s'inscrit dans un vrai débat qui est celui du statut que les pays du Nord doivent assurer aux populations du Sud qui viennent travailler, mais aussi vivre, sur leurs territoires. C'est effectivement une question que devra suivre attentivement le futur Gouvernement de la France. Il conviendra effectivement, comme la situation l'exige, d'améliorer le cadre juridique international des migrations de ces populations. Il y a un enjeu humain et politique pour l'Union Européenne toute entière et vous avez raison de souligner que la France a un rôle de premier plan à jouer. Je souhaite, que, comme toujours, la France prenne l'initiative. Êtes-vous d'accord avec l'idée d'une extension à tous les résidents durablement installés en France du droit de vote notamment aux élections locales et régionales, qui est actuellement partiellement consenti aux ressortissants des pays de l'Union Européenne? Je n'y suis pas favorable. Quelles mesures comptez-vous prendre pour mettre un terme aux campagnes de haine raciste qui vont parfois, comme récemment à Marseille, jusqu'à légitimer le meurtre, campagnes menées non seulement par des groupuscules néo-nazis, mais surtout par un Élections présidentielles parti prétendument légaliste: le Front national? En tant que candidat, quelle action les pouvoirs publics doivent-ils, à votre avis, mettre en oeuvre de manière préventive pour barrer la route aux idéologies racistes, sans en excepter le révisionnisme? Ne pensez-vous pas que la France doit jouer un rôle moteur en Europe dans la lutte contre le racisme et les formes larvées ou non du fascisme? Et si vous le pensez, quelles initiatives politiques et pédagogiques proposez-vous de prendre en ce sens? Je me suis toujours senti très impliqué dans la lutte contre le racisme et l'antisémitisme. Etant Premier Ministre, j'ai fait compléter l' arsenal législatif et réglementaire dont nous disposons en la matière. Je pense, en particulier, à toutes les incitations à la haine raciale, colportées dans des revues ou des écrits de toutes sortes qui sont, depuis, encore plus sévèrement sanctionnés. Je pense au port d'insignes nazis, parce qu'en la matière, rien n'est insignifiant. Je pense aux dérives révisionnistes, que j'ai toujours dénoncées avec la plus grande vigueur. J'ai voulu également que l'histoire de l'occupation, y compris dans ses heures les plus sombres, soit enseignée dans le cadre des cours d'histoire, tant il me paraissait anormal d'aborder la deuxième guerre mondiale sans rien dire des lois anti -juives, qui ont déshonoré le régime de Vichy. L'important, maintenant, c'est d'appliquer les lois qui existent dans toute leur rigueur, et d'être fidèles à notre devoir de vigilance. Certains partis exploitent sans vergogne le rejet et la haine de l'autre, si prompts à naître dans les périodes de crise. Je les ai toujours combattus, et je continuerai à le faire. Quelle politique nouvelle proposezvous pour l'aide aux « pays en développement ))? Quelle est votre position sur la dette? Allez-vous porter l'aide publique au développement à 0,7% du PNB comme le demande en vain l'ONU depuis des années à tous les États développés? Allez-vous soutenir les propositions du Programme des Nations- Unies pour le Développement (PNUD), en particulier l'arrêt ou la diminution de la vente des armements, la taxation à 0,5% du montant des transactions financières spéculatives, au pro- Différences n° 164 juin 1995 fit d'un fonds spécial pour le développement? Le sous-développement est au coeur de mes préoccupations en matière internationale. J'ai l'occasion depuis de nombreuses années de voyager régulièrement en Afrique, mais aussi en Asie du Sud-Est et de constater moi-même le décalage certain entre les discours et la réalité dramatique de cette question. Je m'en entretiens régulièrement, de manière très franche avec les dirigeants politiques concernés. L'Afrique notamment, dont la population va doubler dans les 25 années à venir, est confrontée à une situation explosive. Mais il n'y a pas, en Afrique comme ailleurs, de fatalité du sous-développement. Les institutions fmancières internationales, le Fonds Monétaire et la Banque Mondiale, doivent adapter leurs méthodes d'intervention aux situations locales. Pour lutter contre l'endettement, on peut, par exemple, mettre en oeuvre un mécanisme permettant de tenir • compte du cours des marchés des matières premières dans le calcul de la charge annuelle de la dette. Des maux nouveaux sont aussi venus accabler l'Afrique : le retour de maladies que l'on croyait éradiquées et surtout, bien sûr, l'expansion terrible du Sida; à cela s'ajoute le retour d'anciens démons comme les guerres interethniques et les massacres systématiques. Je suis toujours avec intérêt les travaux du PNUD. Je trouve souvent pertinente son analyse et ses propositions et je souscris à l'idée d'un fonds spécial pour le développement. J'ai d'ailleurs eu plusieurs fois l'occasion de le dire récemment au Secrétaire Général des Nations-Unies. Quant à la manière de financer ce fonds, je crois surtout à un effort volontaire des Etats et à la réalisation de l'objectif de 0,7% du PNB. La lutte contre le sous-développement est, non seulement, un devoir moral, mais aussi une nécessité géostratégique. Soigner les symptômes en négligeant les racines du mal, c'est laisser se développer un drame aux conséquences humaines et financières incalculables. Ceux qui disent aujourd 'hui qu'il faut laisser tomber l'Afrique et se contenter de 1 'humanitaire commettent une erreur historique très grave, comme si 1 'humanité pouvait fermer les yeux sur un continent entier voué à la misère, à la guerre et à l'instabilité. Le problème du sous-développement reste l'affaire de l'ensemble de la communauté internationale .• Il Kurdes de Turquie VOYAGE AU COEUR D'UN NOUVEl AN SOUS HAUTE SURVEillANCE Xavier Schapira, membre du conseil national, est allé à Diyarbakir et à Istanbul exprimer la solidarité du MRAP aux Kurdes de Turquie dont le nouvel an est placé, tous les ans, sous haute surveillance. Récit. DEPUIS QUELQUES ANNEES, des observateurs étrangers se rendent au Kurdistan turc, aux alentours du 21 mars,jour du Newroz, tète nationale du peuple kurde. Leur mission est, avant tout, de protéger, par leur présence même, la population kurde des actions violentes de répression perpétrées par les forces armées et la police turques qui essayent d'empêcher par la force toutes manifestations extérieures de joie. C'est ainsi qu'en tant que représentant de notre Mouvement (seule organisation présente en tant que telle dans la délégation française), nous nous sommes rendus à Diyarbakir, capitale du Kurdistan occupée par les Turcs, puis à Istanbul, du 19 au 25 mars 1995. Cette mission se situe dans le droit-fil de l'action sommes donc arrivés à Diyarbakir la veille de la Fête nationale. Diyarbakir, une cité en état de siège: blindés légers disposés aux carrefours stratégiques; mitrailleuses pointées sur la foule; omniprésence des patrouilles de police; barrages aux portes de la ville; hôtel bourré de policiers en civil munis de talkies-walkies et nous suivant dans tous nos déplacements à quelques mètres derrière. Nous n'avons pu que constater l'ampleur de la répression: la veille de notre arrivée, nos interprètes avaient été arrêtés; le téléphone de l'Association des Droits de l'Homme ne répondait pas, et pour cause, ses onze dirigeants, dont cinq avocats, avaient été emprisonnés deux semaines auparavant. Les Kurdes n'ont pu fêter dignement le Newroz sauf dans quelusagés pour célébrer le Nouvel An. Nous avons reçu un accueil émouvant de la population qui, en prenant de gros risques, manifestait de l'amitié aux visiteurs venus de loin en leur offrant du thé dans la rue, à la barbe des policiers. Des membres de la délégation furent même invités à domicile. A Diyarbakir et à Istanbul nous avons rencontré de nombreux militants d' associations démocratiques: Associations des Droits de l 'Homme, parti démocratique RADEP, syndicat des avocats, de la Santé, de l'Enseignement. Ils nous ont reçus au péril de leur vie car il n'est pas d'organisation dont les dirigeants n'aient été, ces dernières années, arrêtés, torturés, emprisonnés et parfois assassinés par la police. Pour ne citer qu'un exemple, le président du syndicat des avocats a disparu il y a cinq mois et les pouvoirs publics ne veulent pas reconnaître qu'ils sont responsables de ce crime. Kurdes et turcs La répression qui vise aussi bien les résistants kurdes que les démocrates turcs se développe avec la complicité des EtatsUnis, des Etats membres de l'Union Européenne et singulièrement de la France qui ferme les yeux sur les violations systématiques des droits de l'Homme et accepte de livrer des armes à un Etat qui n'est en rien un état démocratique. Dans ces conditions, il est scandaleux que l'on continue à envimenée au sein du MRAP, depuis plusieurs années, en faveur des Kurdes. On se souvient notamment de la mobilisation du National et des comités concernés, fin 1993/début L'égalité naturelle est celle qui est entre tous les hommes par la constitution de leur nature seulement. Cette égalité est le principe et le fondement de la liberté . . sager l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Comment accepter dans une Europe qui se veut démocratique, un pays dont le gouvernement viole les frontières internatio- L'égalité naturelle ou morale est donc fondée sur la constitution de la nature humaine commune à tous les hommes, qui naissent, croissent, subissent et meurent de la même manière. Chevalier de Jaucourt, Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers 1755 in Les droits de ['Homme, références page 12 nales, dénie toute existence à une minorité qui représente près du quart de la population totale et mène une lutte impitoyable -bien que vouée à l' écheccontre des populations civiles pour la plupart déjà déplacées. Tous les membres du MRAP se doivent d'exiger du gouvernement français et du futur Président que la France rompe avec sa politique d'aide inconditionnelle à la Turquie et s'oppose à l'entrée de ce pays dans l'Europe tant qu'il n'aura pas cessé sa politique d'agression contre un peuple qui lutte courageusement pour son droit à l'existence .• 1994, au moment où Charles Pasqua procédait à une rafle parmi les réfugiés kurdes. Les actions de solidarité du MRAP sont largement connues au Kurdistan et nous avons constaté avec surprise et fierté que le sigle MRAP était une sorte de mot de passe grâce auquel le dialogue avec les militants pouvait s' instaurer facilement. J'ai pris conscience Et, soit-dit en passant, c'est là-bas que j'ai pris conscience de l'importance de la dimensionAmitié entre les Peuples qui figure dans l'intitulé de notre Mouvement. Nous ques lieux écartés. La tension dans Diyarbakir dont la population est formée en grande partie de réfugiés chassés de leurs villages par l'armée était extrême; elle était aggravée par le vrombissement des avions militaires partant bombarder le Kurdistan irakien envahi le 20 mars par 35 000 soldats. Le matin du Newroz, nous avons pu parvenir à Bismil, localité située à une cinquantaine de kilomètres de Diyarbakir. Toujours suivis par des policiers en civil, nous avons parcouru les rues défoncées. Ça et là des militaires faisaient éteindre par les enfants les feux allumés au centre de pneus Différences na 164 juin 1995 Xavier Schapira, Fédération du Tarn NAISSANCE DU PARlEMENT KURDE EN EXil Renée Le Mignot et Alain Callès ont représenté le MRAP à La Haye où se déroulait le 12 avril dernier la séance d'ouverture du Parlement kurde en exil dont le siège est à Bruxelles. Rappel des faits. DEPUIS LA CONFERENCE DE BRUXELLES qui s'est tenue il y a maintenant plus d'un an, la diaspora kurde et la résistance cherchent une solution politique à la question dans le sud-est de la Turquie. Lors de cette conférence à laquelle ont participé des organisations kurdes d'Europe que l'on ne voyait pas ensemble auparavant, une plate-forme d'accords et de revendications commune a été établie. Cette plate-forme demandait en particulier l'arrêt de toute activité guerrière. Simultanément, la résistance kurde s'est engagée à respecter un cessez-Ie-feu unilatéral afin de trouver des solutions politiques; Dans les solutions proposées au gouvernement d'Ankara, la référence à une indépendance était clairement laissée de côté au profit d'une solution fédérative au sein de la nation turque. Refus de toute solution négociée Le Premier ministre turc, T. Ciller, a refusé toute solution négociée et a ainsi imposé la rupture du cessez-le-feu. Au contraire, Madame Ciller a affirmé son refus de toute paix et a confirmé sa volonté d'accentuer la répression militaire avec pour objectif! 'éradication de la résistance kurde avant la fin de l'année 1994. A l'occasion du jour de l'an kurde, l'armée turque a lancé une grande opération militaire au Kurdistan, repoussant la population kurde au-delà des frontières turques, en Irak. On le sait, depuis de longues années, S. Hussein s'est également fait remarquer par son acharnement à réduire le peuple kurde. Au mépris du respect des conventions internationales, l'armée turque a franchi les limites de son territoire et a poursuivi les civils kurdes en territoire irakien sur une soixantaine de kilomètres. Ces événements aux portes de l'Europe se sont déroulés dans une quasi indifférence médiatique en France et nosjiers à bras politiques de la solidarité internationale ne se sont guère fait remarquer par leur prise de position ou leur soutien envers un peuple victime d'un génocide. Le Conseil de l'Europe, gêné d'avoir en son sein un état massacreur et mis à l'index par Amnesty International pour bafouer d'une manière constante les droits de l'Homme, a demandé à la Turquie de se retirer d'ici à 2 mois de l'Irak. Quand on connaît l'efficacité de l'armée turque, c'est se donner bonne conscience tout en lui laissant le temps nécessaire à la bonne exécution des massacres sur une telle période; Pour éviter tout reproche l'armée s'est retirée en laissant la. 000 hommes pour une période indéterminée. C'est largement de quoi pouvoir continuer son sale boulot d'extermination. Le tout dans le silence international et la bonne conscience générale. Néanmoins, c'est la première fois que l'Europe met la Turquie à l'index. De son côté, l'Allemagne a suspendu toute li vraison d'armes et cela fait bientôt un an qu'elle a reconnu les organisations kurdes sur son territoire après les avoir suspendues conjointement à ce qu'avait fait la France lors des rafles sécuritaires de Pasqua au sein de la communauté kurde. Acte de naissance C'est dans ce contexte que les Kurdes en exil ont poursuivi les objectifs déterminés lors de la conférence de Bruxelles. Avec les députés kurdes déjà contraints à l'exil par le gouvernement d'Ankara, les Kurdes ont mis en place un Parlement en exil à Bruxelles. Des élections se sont déroulées dans tous les pays où réside une communauté kurde. Les élections donnent un résultat diversifié tant par la sensibilité politique ou religieuse des députés élus que par leur origine géographique (de Turquie, mais aussi du Kurdistan iranien et irakien). La séance d'investiture et d'ouverture du Parlement en exil a eu lieu à La Haye, ce 12 Différences na 164 juin 1995 Droits des peuples avril, en présence de délégations kurdes venues aussi bien de Californie que de Russie, du Canada ou des pays d'Europe. Un grand nombre de messages de soutien est parvenu du monde entier. Les parlementaires de très nombreux pays ont montré, par leur présence aux côtés de leurs collègues kurdes lors de cette première séance, l'importance qu'ils accordaient à cet événement historique. L'absence de la France La France s'est fait remarquer parmi les pays d'Europe en étant le seul pays important à ne pas avoir de représentation parlementaire ou politique. Au pays qui rappelle sans cesse être le berceau des Droits de l'Homme, aucun parlementaire n'a estimé que sa présence pouvait être un soutien, dans le concert parlementaire international ce jour-là. Aucun de nos députés ne semble avoir cru qu'un Parlement en exil pouvait être un grand pas en avant vers une solution politique et pacifique à la question kurde. Je n'ose croire que nos parlementaires ont si peu de foi en l'action que peut avoir un Parlement et qu'il s'agit plutôt d'un manque de courage politique pour s'afficher aux côtés de ceux qui ont été ici les victimes de la campagne d' amalgame Kurde / terroriste menée par notre ministre de l'Intérieur, Charles Pasqua, depuis les rafles de novembre 1993. Comme organisations françaises, seuls le MRAP et la ClMADE étaient présents à cette séance qui fera date dans l'histoire du peuple kurde. A cette occasion, la délégation française représentée par Renée Le Mignot et moi -même, a affirmé son soutien au peuple kurde et aux démocrates turcs victimes de la répression ainsi que son appui à toute recherche d'une résolution prenant en compte la coexistence pacifique des peuples dans la région. Notre Mouvement qui continue d'intervenir auprès des instances internationales, est également intervenu auprès du ministère des Affaires étrangères et auprès des groupes parlementaires français afin qu'une pression soit exercée sur la Turquie pour qu'elle respecte les droits de l 'Homme et recherche une solution politique à la question kurde. Quoi qu'il en soit, cette journée montre le sens des responsabilités des organisations kurdes en exil. Elle est un pas en avant incontournable pour exiger de la Turquie le respect des droits de l 'Homme et une solution pacifique à la question kurde . • Alain Callès • Il L'école et la République PARIS: PRATIQUES DÉTESTABLES DANS LE COURANT de la semaine du 24 avril dernier, la fédération du MRAP de Paris a fait parvenir à la Cellule départementale de lutte contre le racisme un courrier alarmant dans lequel il est notamment explicité que dans Paris « plusieurs mairies d'arrondissement exigent les titres de séjour des parents étrangers pour inscrire leurs enfants dans les écoles. Cette pratique, contraire à la loi, entraîne des refus de scolarisation qui ont de graves conséquences pour les enfants concernés et leur famille. La circulaire du ministère de l'Education nationale du 16 juillet 1984 est très claire à ce sujet: " l'instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, Français ou . étrangers, âgés de 6 à 16 ans "; elle précise que" les titres de séjour des parents ou des responsables du mineur n'ont pas à être demandés lors de l'inscription dans un établissement" ». Le MRAP demande donc à la commission Education nationale d'utiliser les moyens nécessaires pour contraindre les mairies parisiennes des ge, 12e, 14e, 15e, 16e, 17e, 18e, 1ge et20e arrondissements dans lesquelles le MRAP a constaté cette infraction de se conformer à la loi. Malheureusement et curieusement, ce courrier n'a pas reçu de suite. Des enfants pris en otage Depuis la dernière enquête du MRAP dont les informations recueillies avaient été exposées au cours d'une conférence de presse le 15 septembre 1994 (cf Différences nOI56), la situation semble s'être globalement aggravée. En effet, depuis, la mairie du 14e a adapté ses formulaires aux principes de l'obligation scolaire mais celle du 13e persiste dans la pratique d'exiger les titres de séjour, tandis que dans les mairies de l'Est parisien, les associations réunies dans le Collectif pour la scolarisation des enfants de parents étrangers ont constaté une très grave pratique: la dénonciation quasi-systématique (on dénombre plusieurs dizaines de cas) des parents soupçonnés d'être en situation irrégulière à la police! En plus donc d'une pratique illégale, c'est à une pratique de délation que se livrent désormais les fonctionnaires des mairies auxquels des ordres hiérarchiques sont vraisemblablement donnés. Devant le silence de la Cellule départementale contre le racisme, la fédération départementale du MRAP a été contrainte de suspendre sa participation à cette instance et en a informé le préfet (qui préside la structure en question) dans une lettre où il est notamment précisé « Lors de la première réunion de la cellule départementale de lutte contre le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme et l'intolérance, le 26 octobre à Paris, Monsieur Patrick Gaubert mettait l'accent sur la nature même de cette instance conçue pour être une structure de lutte effective contre les maux que son intitulé désigne et non pas seulement un lieu de concertation. Le MRAP a décidé, alors, d'y participer, à Paris, sous l'angle d'un engagement concret contre les conséquences des comportements racistes et discriminatoires. Jusqu'à aujourd'hui, nous n'avons pu que constater l'impossibilité pour cette structure de prendre compte les demandes associatives; avec pour corollaire son inefficacité quasi totale sur le terrain censé être son champ d'intervention. ( ... ) Pour toutes ces raisons, nous suspendons dès à présent notre participation à l'instance que vous présidez, dans l'attente d'une clarification du rôle et de l'efficacité de la Cellule départementale de lutte contre le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme et l'intolérance ». Dossier à suivre .• Chérifa Benabdessadok PARENTS ÉTRANGERS D'ENFANTS FRANÇAIS La situation des parents étrangers d'enfants français est une des conséquences directes des nouvelles lois sur l'immigration: théoriquement non expulsables, ces personnes ne bénéficient pas pour autant d'un titre de séjour. Elles sont ainsi placées en situation d' illégalité, sans droit au travail, sans protection sociale, sans possibilité d'assurer à leurs enfants pourtant citoyens français une vie normale. Depuis près de deux ans, le collectif pour le droit des étrangers à vivre en famille auquel participe le MRAP tente d'attirer l'attention des pouvoirs publics sur cette situation dramatique. Le MRAP est intervenu sur cette question lors des rencontres avec les représentants des ministères de l'Intérieur et des Affaires sociales en février dernier. Le Il avril, 6 pères de famille placés dans cette situation entamaient une grève de la faim pour obtenir une régularisation globale des personnes concernées. Suite à la solidarité et à la mobilisation autour des grévistes, Pasqua, par circulaire du Il mai, vient de demander aux préfectures de réexaminer les dossiers des personnes concernées « avec bienveillance ». Vendredi 12 mai, les 6 grévistes obtenaient leur régularisation sans condition et arrêtaient leur grève après 31 jours! Il ne s'agit certes pas de la régularisation globale, mais ce premier résultat, rappelons-le, 15 jours après les 20% obtenus par l'extrême droite aux élections présidentielles, peut être considéré comme une première victoire. Il démontre d'une part, comme le reconnaissait l'ex- gouvernement, que « toutes les conséquences des lois n'avaient pas été prévues ». Ce n'est pas faute d'avoir, pour notre part, alerter les pouvoirs publics! Ces pouvoirs publics reconnaissent, d'autre part, que les mesures prises par les préfectures ne « sont pas applicables» (phrase citée par Pasqua luimême dans sa circulaire aux préfectures!). C'est une première brèche, à nous de l'élargir. Concrètement, nous incitons toutes les personnes concernées à prendre contact avec nos permanences d'accueil afin que leurs dossiers puissent être déposés le plus rapidement possible dans les préfectures. Nous leur demandons d'avertir dès que possible le siège national des réponses qui leur seront apportées . • Renée Le Mignot Différences n° 164 juin 1995 Exposition réalisée par le MRAP 1945 /1995 : UN ENSEIGNEMENT POUR lA PAIX ET CONTRE lE RACISME Une exposition sur ce thème est à votre disposition au siège du MRAP. Cette nouvelle production est ici présentée par son coordinateur. L'EQUIPE QUI A REALISE CETTE EXPOSITION comprend Norbert Haddad et Mireille Maner (dont l'expérience des deux dernières expositions nous a été précieuse), Marcelle Einhorn, Suzanne Larrue, Charles Owezarek et moi-même, auxquels on aj outera une participation de Claude Dewaele, Catherine Grupper et Raymond Sultan. On peut noter qu'à peu près toutes les générations étaient représentées dans ce groupe, chacun apportant ses préoccupations et sa compétence propre, reflets de la diversité du MRAP. Nous nous sommes attachés la collaboration de plusieurs personnalités, que je remercie vivement: Niels Anderson, Mouloud Aounit, Jacques Jurquet, Pierre Krausz, Daniel Kupferstein, Mehdi Lallaoui, Albert Lévy et Charles Palant. 1995 est l'année du cinquantenaire de la victoire alliée sur le nazisme. L'événement est largement célébré et médiatisé. Le MRAP, bien évidemment, a souhaité s'associer à cet événement. Il a publié deux facsimilés sur la libération des camps (Combat) et le 8 mai 1945 (Franc-Tireur). Il aorganisé un Concert du Cinquantenaire aux Bouffes du Nord. Mais parce que, comme l 'historien Marc Bloch, nous pensons qu'il est nécessaire de « comprendre le présent par le passé et le passé par le présent », et parce que nous restons fidèles à notre vocation éducative et pédagogique, nous souhaitons aller au-delà des aspects spectaculaires et purement commémoratifs. Cette exposition a pour but de montrer les résonances en 1995 des événements importants et complexes, parfois paradoxaux, de 1945. 1945, date charnière de notre siècle, c'est la victoire sur le nazisme, la libération des camps de concentration, le procès de Nuremberg, c'est aussi le massacre de Sétif, la création de l'ONU et la bombe atomique frappant Hiroshima et Nagasaki. Quelles sont les inter-relations entre ces événements? Que nous disent-ils en 1995 sur le sens de notre combat antiraciste et pour l'amitié entre les peuples? Nous n'avons pas une vision univoque de l'Histoire, elle est complexe et il faut en décrypter les sens. Et notre vision est dynamique, elle nous permet de mieux lutter au présent. Dans cette exposition, nous avons effectué des choix: certains thèmes seront sans doute traités de manière différente par d'autres. Nous avons voulu réaliser un outil éveillant la mémoire, suscitant la curiosité, la vigilance et le combat pour l'avenir; Nous donnons des pistes, suggérons des priorités, rappelons des faits -parfois méconnus. Les thèmes Les panneaux traitent des thèmes suivants (sans ordre chrono logique) : • les oubliés de la Libération, relatant la participation des étrangers et coloniaux dans la guerre, la Résistance et la Libération • la libération des camps, et la découverte de l'horreur nazie • le procès de Nuremberg, à l'origine de la définition de crime contre l'humanité • le 8 mai (capitulation de l'Allemagne) et le 2 septembre 1945 (capitulation du Japon), un bilan de la guerre • la bombe atomique, et la course aux armements • la persistance des idées nazies aujourd'hui • les barbaries au xxe siècle • l'ONU, née en 1945, toujours vivante en 1995? • les massacres de Sétif et du Constantinois (Algérie) en mai 1945 • l'Algérieaujourd'hui,émergence de l'intégrisme • le MRAP, héritier des luttes de la Résistance, et le MRAP dans ses luttes d'aujourd'hui. Avec ce travail, on comprend pourquoi Léopold Sédar Senghor a pu écrire en mai 1945 que, si l'Allemagne avait été vaincue, le nazisme ne l'avait pas été. L'est-il d'ailleurs de nos jours? • Alain Ribat DESCRIPTION TECHNIQUE ET LOCATION L'exposition se compose de 12 panneaux de 1,50 m sur 1,20 m en couleurs. Comme les précédentes expositions, ces panneaux plastifiés sont légers, aisément transportables. Elle sera gracieusement prêtée aux établissements scolaires, et louée en dehors de ces enceintes, au prix de 500 francs (plus frais de port et d'assurance). Il convient de contacter le siège du MRAP pour la réserver. Peut-être Nuremberg apparaîtra-t-il, plus tard, comme le prélude de cette «justice internationale des droits de l'homme» dont le nom a déjà été prononcé. Quoi qu'il en soit de l'avenir, il importe, maintenant, que la leçon de ce qui est acquis soit répandue et comprise. Edgar Faure, La Persécution des juifs en France et dans les autres pays de l'Ouest, présentée par la France Nuremberg 1947 in Les droits de l'Homme, référence page 12 Différences n° 164 juin 1995 • Il Campagne « Français si vous saviez» ABUS ADMINISTRATIFS: avec la ferme intention de rentrer en France avant la fin du délai de 6 mois d'absence (entraînant péremption du titre de séjour pour les ressortissants algériens avant les nouveaux accords franco-algériens publiés au J.O. en fin 1994). Dès son arrivée là-bas, il est sans cesse tracassé par le GIA qui cherche à lui extorquer son argent et le menace de mort. Devant l'insistance des menaces, il s'enfuit chez ses beauxparents avec l'épouse et les petits laissant dans la précipitation tous ses papiers à la maison. Le lendemain, la famille revient et constate le vol et les dégradations de l'appartement (dont les papiers). Aussitôt, il fait à la police algérienne une déclaration et muni du document de police fait la même déclaration au consulat de France qui informe sa préfecture de rattachement en France. Alors, ayant pu obtenir enfm un visa, dès son arrivée en France, il se rend en préfecture et y ÇA CONTINUE! François Prunet brosse ici, à grand traits, le portrait de personnes victimes d'abus administratifs et des effets des lois sur l'entrée et le séjour des étrangers. Nous avons changé les noms par précaution. COLETTE, ivoirienne, était fiancée à Dominique, ivoirien résidant en France. Il voulait la faire venir en France et l'épouser. Ils firent toutes démarches dans ce sens: établissement du dossier complet, certificat d'hébergement etc. Cela dura une année. Lorsqu'en 1991, elle se rendit au Consulat français d'Abidjan, le visa lui fut refusé sous prétexte que le ministre des Affaires étrangères avait donné des ordres en ce sens. Aussi elle vint en France via l'Italie et ils se marièrent en novembre 93. Elle avait obtenu de la préfecture des récépissés successifs avec autorisations provisoire de travail. Une petite fille est née en France en 92 -française du fait que le père était né en Côte d'Ivoire avant l'indépendance. Lui réside depuis 20 ans en France. Mais on leur a objecté qu'ils ne réunissaient pas toutes les conditions d'une procédure de regroupement familial. Elle a donc fait l'objet d'une invitation à quitter le territoire français. Les recours gracieux et hiérarchiques sont demeurés actuellement sans réponse. B ACIDR est tunisien marié en France à une ressortissante tunisienne dont il a eu deux enfants. N'en réunissant pas les conditions, il n'avait pas alors entamé une procédure de regroupement familial. Mais après de longues démarches, il obtint un logement conforme; il avait des ressources stables et suffisantes. Il envoya en Tunisie dans leur famille son épouse et les deux fillettes, avertit la Sécurité Sociale de ne plus les affilier en tant qu'ayants droit ainsi que la préfecture par lettre recommandée avec AR. Puis il déposa une demande de procédure de regroupement. La DASS et l 'OMI donnèrent un avis favorable, mais la préfecture refusa ce regroupement prétextant la présence des membres de famille en France, l'insuffisance des ressources, etc. Alors que tous ces justificatifs, notamment l'attestation de résidence des membres de famille en Tunisie par le consulat français, avaient été envoyés dans son dossier. Sur la base de ces justificatifs, nous sommes aussitôt intervenus. La réponse a été alors un avis favorable de la préfecture. Pour s'excuser, celle- ci expliqua qu'elle n'avait pas connaissance du dossier au moment de la réponse négative. n JAMEL est depuis 1990 résident algérien en France (titre de 10 ans renouvelable). Son épouse et ses deux jeunes enfants sont restés au pays; début 94, inquiet de leur sort en Algérie, il s 'y rend pour quelques mois en congé, QUAND DES DOSSIERS ÉVOLUENT POSITIVEMENT Parmi les nombreux dossiers pris en charge par le MRAP dans le cadre de la campagne « Français si vous saviez », certains ont évolué dans le bon sens. Lors du meeting national du 10 décembre qui devait lancer la campagne Français, si vous saviez, des étrangers placés en situation irrégulière par l'arsenal législatif des lois dites Pasqua sont venus témoigner, souvent avec beaucoup d'émotion. Ces témoignages ont été publiés dans le numéro de Différences du mois de janvier. Des militants nous avaient alors appelés pour savoir comment ils pouvaient soutenir telle ou telle personne. Aussi, pour vous tenir informés, nous signalons que certaines d'entre elles ont obtenu une régularisation. Il ne s'agit pas, comme l'a dit quelqu'un au congrès, de se satisfaire d'avoir sauvé un «arbre quand la forêt brûle »; il s'agit de s'appuyer sur ces résultats pour éveiller de grands courants de solidarité et de lutte. Notre objectif étant l'abrogation de ces lois. JOSO, mobilisé par l'armée serbe, avait été placé en détention pour avoir refusé de tirer sur un enfant. Après cette détention au Différences n° 164juin 1995 cours de laquelle il avait subi des sévices, il déserte et se réfugie en France où il est rejoint peu de temps après par son épouse et leurs deux enfants. L'OFPRA avait rejeté sa demande d'asile sous prétexte qu'il n'avait pas prouvé que sa désertion était « due à des motifs de conscience »! Soutenu par le MRAP et défendu par Maître Pariente, il vient enfin d'obtenir la réouverture de son dossier et la reconnaissance du statut de réfugié. ALPHONSE, jeune Rwandais de 20 ans, est un sportif de haut niveau. Le ministère de la Coopération lui avait accordé une bourse et le droit de séjourner en France. En octobre 94, ce même ministère revient brutalement sur sa décision et lui demande de retourner dans un pays où toute sa famille a été massacrée. Pendant 2 mois, il a été caché par des militants du MRAP. Aujourd'hui, le ministère a rétabli la bourse promise et Alphonse s'entraîne au Club Athlétique de Montreuil, en Seine-Saint-Denis. Renée Le Mignot monte un dossier pour restitution de son titre de résident algérien. Au bout de quelques jours, la préfecture le convoque et lui adresse une invitation à quitter le territoire (parce qu'ayant dépassé les 6 mois d'absence prévus) bien qu'averti par le consulat d' Alger et par lui-même du drame et du vol dont il fut victime et alors que les nouveaux accords franco-algériens augmentant à 3 ans le délai mère de deux jeunes enfants nés en France dont l'une suivie régulièrement au niveau médical pour une pathologie congénitale. Soutenue par des travailleurs sociaux et par le MRAP elle pu, suite à son rejet au recours, bénéficier momentanément de récépissés et d'autorisations de travail provisoires et renouvelables. Ensuite, elle reçu une invitation à quitter le territoire lors du non-renouvellement de ce récépissé. Quelque temps après, d'absence venaient d'être signés et ratifiés. La situation en est là. Nous avons avec lui déposé recours auprès de M. Faugère (Intérieur) comme auprès de la préfecture concernée. De même que dans les articles précédents, il n'est pas question ici de philanthropie, elle est convoquée au bureau des étrangers pour affaire concernant sa régularisation. Elle vient donc avec sa fille cadette âgée de3 ans. On la fait attendre longtemps puis on lui met des menotmais du Droit, et là hospitalité signifie le droit qu'a un étranger arrivant sur le sol d'au autre de ne pas être taité en ennemi. K HALlD, algérien, est étudiant et Emmanuel Kant, Pour la paix perpétuelle (1795) in Les droits de l'Homme, référence page 12 maître-auxiliaire en France depuis 4 ans. Ce jeune homme a épousé une jeune résidente (de 10 ans) algérienne et ont donné naissance à une fillette en septembre 94. Il demande un changement de statut. On lui retire son titre d'étudiant en préfecture et lui octroie des récépissés renouvelables sans autorisation de travail. Il perd donc son emploi de M-A et n'est plus affectable à la rentrée. Puis d'autorité on lui reprend son dernier récépissé et le conduit en rétention administrative après une invitation à quitter le territoire. Intervention

il est libéré, mais sans

papier. Nouvelles interventions

on l'autorise au regroupement

sur place, mais il n'a plus ni papier ni emploi. On intervient toujours. ZOE est zaïroise, deman deur d'asile débouté et tes et on la conduit à Roissy à la PAF. Elle peut à un moment téléphoner à sa famille. Elle s'affole, on l' enferme toute la nuit avec sa fillette. Le lendemain, on la conduit à l'avion. Elle refuse et fait une grave crise d'hypertension. On la ranime, elle sera conduite au cachot puis libérée quelques heures plus tard. A Bobigny, le jour du jugement en TG!, lorsqu'elle entend Mme le Procureur, elle fait une nouvelle crise d'hypertension. Le Procureur parle de simulation avec mépris. On attend le SAMU durant 20 minutes. La salle est vidée et l'assistance conduite dans une autre pièce. Lorsque vient le médecin, il lui prend la tension : elle a encore 19. Je demande qu'un certificat médical soit versé au dossier de sa défense. C'est une grande malade cardiaque .• François Prunet Document ÉTUDE DE L'INED ___ _ L'INTÉGRATION AU QUOTIDIEN Cette enquête met en pièces bon nombre de préjugés et de lieux communs qui nourrissent la xénophobie quotidienne. Elle révèle notamment les faits suivants: • Chez les Algériens, dans 97% des unions ou des mariages, le partenaire a été rencontré hors de la famille. La moitié des garçons d'origine algérienne et le quart des filles vivent avec un « Français de souche» , l'union libre étant le plus souvent la forme prise par ces unions« mixtes ». • Les pratiques polygamiques sont loin d'être aussi répandues que ne le laissent entendre les rumeurs alarmistes savamment entretenues à ce sujet et qui ont« justifié» la rigueur législative. Ainsi l'enquête retient le chiffre de 300 ménages polygames. • Les pratiques religieuses ne correspondent aucunement aux fantasmes véhiculés sur l'Islam. 48% des Algériens (plus de 60% chez les Kabyles) se disent« sans religion» ou «non-pratiquants ». Chez les enfants d'immigrés algériens, seuls 10% des garçons et 18% des filles se déclarent« pratiquants réguliers », près d'un jeune sur trois se disant « sans religion ». Les Noirs d'Afrique et dans une moindre mesure les Marocains et les Turcs fréquentent plus assidûment la mosquée et pratiquent un Islam qui, • en France, est loin d'être homogène. L'enquête confirme que plus la ségrégation sociale vécue par les immigrés est forte, plus la pratique religieuse a tendance à s'intensifier. • Si les résultats scolaires des filles sont très légèrement supérieurs à ceux des garçons, les uns comme les autres se trouvent souvent orientés, voire relégués vers les filières techniques. Cependant la confiance dans l'institution scolaire demeure et la pression des parents maghrébins en faveur de la prolongation des études se développe. • L' ascensionsocialeesttoujoursréalisablepourlesenfantsd' immigrés: ainsi les fils et filles d'ouvriers espagnols et algériens sontils plus nombreux à avoir quitté la condition ouvrière et à avoir amélioré leur statut social que la moyenne des enfants ouvriers. Néanmoins les enfants d'immigrés maghrébins demeurent plus que les autres exposés au chômage. Ainsi plus de la moitié d'entre eux, parmi les 20-29 ans, subissent-ils une période de chômage de plus d'un an après leurs études contre 29% en moyenne nationale. • Les inscriptions sur les listes électorales révèlent de façon très nette l'attachement des enfants d'immigrés aux valeurs démocratiques de la France. Parmi les 25-29 ans, 85% des fils d'Espagnols, 76% des fils de Portugais et 63% des fils d'Algériens figurent parmi les électeurs (87% de moyenne nationale) ; cette proportion étant supérieure pour les femmes. Si l'enquête met en lumière les principales causes de la ségrégation que vivent les immigrés (effet ghetto lié aux politiques d'urbanisme et problème du chômage), ses résultats sont riches d'indications témoignant que les immigrés continuent, comme par le passé, de s'intégrer à la société française. Paradoxalement les lois dites Pasqua, en déstabilisant toujours plus les populations immigrées les plus fragiles, dressent des obstacles à l'intégration et créent ainsi plus de problèmes qu'elles n'en résolvent. Comité local de Menton Différences n° 164 juin 1995 Il EN BREF • Diffusion le 10 mai sur Arte d'un .' documentaire intitulé « Les massacres de Sétif, un certain 8 mai 1945 ». Un travail inédit signé Mehdi Lallaoui et Bernard Langlois. • Un exilé algérien, Mohamed Amzert, s'est immolé par le feu le 12 mai à Paris. Il avait 46 ans, il était réalisateur. • L'un des trois colleurs d'affiches du Front national inculpés pour le meurtre du jeune Ibrahim Ali à Marseille a été mis en liberté le 17 mai. Selon ses affirmations, il n'était pas armé le jour des faits. Auparavant le juge d'instruction avait rejeté les constitutions de parties civiles des organisations antiracistes. Lire communiqué du MRAP ci-dessous. • Tenue le 17 à Paris du procès intenté par les associations arméniennes en France contre le célèbre orientaliste, Bernard Lewis, à propos de ses affirmations concernant le génocide exercé par la Turquie au début du siècle. Verdict le 21 juin. VERSAILLES, CARTON ROUGE! Les chefs d'établissements du second degré ont reçu une circulaire de l'Inspection académique des Hauts-de-Seine leur enjoignant de recenser le nombre d'élèves ( de moins et de plus de 16 ans) en situation irrégulière. Ceci, dixit M. Jean Demars, l'inspecteur d'Académie signataire de la note, pour « prévenir les comportements à risque ». Dans un communiqué (11 avril), le MRAP s'est élevé contre cette circulaire qui non seulement invite à la délation mais désigne on ne peut plus clairement les enfants d'étrangers comme portant a priori la graine de la délinquance. L'association a saisi le ministre de l'Education nationale et entend donner à cette affaire les suitesjudiciaires qui s'imposent. SKINS DÉGUISÉS A Courbevoie, dans les Hauts-de-Seine, le 21 avril trois skinheads déguisés en policiers ont « contrôlé »et brutalisé une jeune Algérienne résidant en France. Ils ont tenté de lui passer les menottes et lui ont pris ses papiers. Après leur interpellation par la police, on a découvert à leur domicile, une panoplie à l'apologie du Ille Reich (livres, armes etc), et une carte du Front national. Maître Mairat a représenté le MRAP (qui s'est constitué partie civile) au procès qui a eu lieu le 18 mai. Le verdict sera rendu mi-juin. CHRONO PO CHARLES PALANTÀ LIVERPOOL C. Palant a été invité par le conseil municipal de Liverpool dans le cadre de la commémoration du 50 ème anniversaire de la Libération. Il y a été chaleureusement accueilli, notamment par le conseil municipal et les jeunes lycéens de Liverpool. L'ex-président du MRAP a prononcé un discours dans lequel il a notamment rappelé dans quelles circonstances il a été arrêté par la police allemande le 17 août 1943 et interné à Auschwitz. « Lorsque je revins en France, je ne pesais plus que 38 kilos, a-t-il précisé. J'avais 23 ans. Je suis, depuis, resté fidèle au serment que je fis à la mémoire des miens et de tant d'autres, morts dans les camps du Brahim Bouaram génocide nazi. J'ai consacré ma vie militante à la dénonciation et au combat contre le racisme, contre tous les racismes. ( ... ) Le devoir de mémoire commande de communier ainsi que nous le faisons ici, aujourd'hui, dans le souvenir des victimes d'il y a un demi -siècle. Mais il nous faut également accomplir, chaque jour, le devoir de vigilance et de lucidité, alors que sous nos yeux se déroulent de terrifiantes tragédies dans lesquelles sombrent à nouveau des vies humaines pas milliers ». TRAITEMENT INHUMAIN Le 26 avril, la préfecture de police annonce la fermeture provisoire du centre de rétention des étrangers de Paris. Le Comité de prévention de la torture (CPT) du Conseil de l'Europe avait constaté dès le 20 juillet 1994, que les personnes qui y sont retenues sont laissées « dans l'ignorance de leurs droits ». Il aura fallu le suicide d'unjeune Marocain de 24 ans (Différences n° 162) et la stupéfaction de l'opinion publique après la découverte des conditions de vie dignes du bagne pour que les autorités préfectorales décident le transfert des étrangers vers des lieux plus décents. Un premier rapport du CPT, établi à l'automne 1991,est curieusement resté confidentiel. DRANCY SE SOUVIENT Durant le mois de mai, Drancy, ville de la banlieue parisienne, a tenu à 1er MAI: LE CHOC Brahim Bouaram est mort le jour de la fête du Travail poussé dans la Seine par des skinheads qui participaient à la manifestation (désormais rituelle) du Front national. Une mort sans ambigu'llé, provoquée par les mots de la haine, les simplifications les plus abusives, les justifications les moins admissibles. Le 2 mai, au cours de la réunion de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme, Charles Palant a, au nom du MRAP, « demandé à la commission qu'il soit fait état de son émotion et de son indignation après l'assassinat d'un citoyen marocain )). C. Palant a fait remarquer que « la question de la sécurité des immigrés est pleinement posée », malgré l'adoption proposée par le ministre de l'Intérieur de lois en vue disait-on de garantir la sécurité des personnes lors des manifestations 1 (Communiqué du MRAP /2 mai ). Le 3 mai, des milliers de personnes ont manifesté à l'appel des associations au pont du Carrousel, sur les lieux du crime. Le 11 mai, trois très jeunes skinheads ont avoué leur crime. Ils ont autour de vingt ans et c'est l'un d'entre eux qui a frappé la victime. Le MRAP s'est constitué partie civile par l'intermédiaire de maître Pierre Mairat. Comme le rappelle l'association, ce fait n'est pas isolé. Selon les chiffres de la CNCDH, de 1980 à 1994,553 actions racistes contre des Maghrébins ont été répertoriées, faisant 24 morts et 270 blessés. Comme l'écrivait Sylvie Caster dans le Canard Enchaîné (17 mai), « racisme et ordinaire sont deux mots qu'il est très dangereux d'accoler ». Chérifa B. Différences n° 164 juin 1995 UR MÉMOIRE marquer particulièrement ces événements. Ainsi, le MRAP 93, la ville de Drancy, le Conservatoire historique et le Conseil général de Seine-Saint-Denis ont établi un programme de commémoration liant le passé et le présent. C'est du camp de Drancy que partirent vers l'extermination des milliers de Juifs. Les organisateurs mis l'accent sur la spécificité de la Shoah et sur le caractère universel de ce drame ainsi que sur les résurgences actuelles des nationalismes et des génocides. ÀCAEN LA PAIX C'est sous ce joli titre que la ville de Caen a fêté les 13 et 14 mai la Libération de la ville. C'état dans le même temps la 5 ème édition de Ibrahim Ali la fête populaire avec spectacles, créations originales, et un programme spécial jeunes. A noter entre autres spectacles, un titre originall' « Eloge de la défaite », en fait une satire dont la guerre fait les frais et par laquelle sont évoquées les « grandes défaites françaises» : de Pavie à Waterloo, en passant par la soi-disant «drôle de guerre» et l'authentique Guerre des Boutons! ISRAËLI PALESTINE « Malgré les mises en garde émanant de tous ceux qui sont attachés à la réussite du processus en paix entre Israël et la Palestine, le gouvernement israélien persiste dans une politique dangereuse de remise en cause du contenu des Accords. Il est impossible de croire sérieusement que cette politique est compatible avec l'application loyale des accords. Sur le plan économique, les restrictions très fortes à l'entrée des travailleurs palestiniens en Israël aboutissent à l'exacerbation du chômage et des frustrations qui en découlent. Et la poursuite du processus d'extension des colonies de peuplement en Cisjordanie et à Jérusalem-Est élève de nouveaux obstacles à l'organisation des élections( ... ). Au nom d bon sens comme de la justice, le MRAP demande solennellement au gouvernement israélien de prendre enfin des mesures significatives qui rendront crédible sa participation sans arrière-pensée au NE BANALISEZ PAS LE RACISME! Trois mois après le crime du jeune comorien Ibrahim Ali à Marseille par des colleurs d'affiches du Front National, le juge d'instruction vient de rendre en date du 15 mai une ordonnance aux termes de laquelle elle déclare l'irrecevabilité des constitutions de partie civile des associations antiracistes au motif que le caractère raciste du crime n'est pas rapporté. Ce sera donc sur le plan du Droit commun que cet acte odieux sera jugé. Dénier le caractère raciste de ce crime revient à faire abstraction du contexte dans lequel il est survenu, de l'appartenance de ses auteurs au Front National et de leur endoctrinement, ainsi que du choix de la victime et de son origine. Le MRAP s'insurge contre une telle décision prématurée, qui intervient alors que l'instruction est encore en cours. Il n'entend pas être ainsi écarté de la procédure et à dès aujourd'hui fait appel, par l'intermédiaire de Maîtres Lothe et Cohen, devant la Chambre d'Accusation. Le MRAP élève la voix pour que ce type de décision, à une époque où les violences racistes se développent dangereusement, n'aboutisse pas à une réelle banalisation du racisme et au musellement des associations qui militent pour le respect de chaque personne quelle que soit sa race, son ethnie ou sa religion. Communiqué du MRAP /16 mai 1995 Différences n° 164 juin 1995 processus de paix» CommuniquéduMRAP du 15 mai. IIYACENT ANS, L'AFFAIRE La commission antisémitisme et néonazisme du MRAP a élaboré un dépliant de 4 pages diffusé par l'Education nationale sur l'Affaire Dreyfus. Après avoir marqué en octobre 1994, le 100 e anniversaire de l'arrestation du capitaine Dreyfus (voir Différences nov. 94), la Commission a désiré apporté sa contribution à l'information des jeunes sur l'histoire et les conséquence de ce fait d'histoire. Elle a élaboré ce document diffusé par le ministère de l'Education nationale. Il peut être consulté dans tous les CDI des collèges et lycées mais on peut aussi se le procurer auprès du ministère de l'Education nationale, service DITEN, 11 0 rue de Grenelle, 75007 Paris. UN HOMME SUR DEUX EST UNEFEMME C'est sous cet intitulé que se déroule du 30 mai au 27 juin une exposition sur le féminisme international à la Maison de l'Information du Centre national d'information et de documentation des femmes et des familles (CNIDFF), au 7 rue du Jura 75013 Paris (tel: 4331 77 00 P. 454). Un cycle de conférences est également organisé en parallèle à l'exposition. Eléments d'information rassemblés par C. B EN BREF • Concert de musique de chambre organisé par le MRAP le 15 mai pour le cinquantenaire de la victoire sur le nazisme au théâtre des Bouffes du Nord. • Le parti d'extrême droite belge, Vlaams Blok a obtenu 13 % des suffrages à l'issue des élections législatives du 21 mai. • Le corps de Imad Bouhoud est découvert le 7 mai dans le bassin de Vauban au Havre. Selon les aveux d'un jeune skinhead, un autre skin l'aurait poussé à l'eau au cours d'une bagarre. Mouloud Aounit et Liliane Lainé participent à la manifestation organisée au Havre le 24 mai. • Violents affrontements entre policiers et population dans le quartier de Belleville, à Paris, le 26 mai, à la suite d'un contrôle d'identité. Des injures racistes auraient été proférées par les policiers; le Mrap appelle à un rassemblement le 29 mai. • Courrier Je ne supporte plus les discours de haine quotidienne. En tant qu'étudiante, mes moyens financiers sont limités mais je suis prête à me battre de toutes mes forces contre la xénophobie. Elise A. Lille C'est trop 1 pouvoir pour que ces actes racistes ne se reproduisent plus. Je vous demande de faire pression sur le prochain président de la République, de gauche ou de droite, afin qu'il ignore les idées abjectes du FN. Je suis un jeune Français qui se révolte avec des mots mais je crois que nous sommes nombreux car la jeunesse em ... le FN. Moi, je rêve d'une France multiculturelie, où toutes les religions et tous les hommes de toutes les couleurs, vivent dans l'amour et l'harmonie : essayez de fai re tout poury arriver,je vous soutiens. Olivier R. TouloD Les actes du colloque Logement et discriminations Lo actes da ce coUaque organisé par la MRAP an Janvlar 1994 vlannent d'être publiés. On y trou· va 1.. text.. da. Interventions des experta, décideurs et mUlDn .. qui pannettent da camar la quotlon da. dl.crlmlnatlons dans 'a logamant et d'envl.agar la. grand. axa. da. revendication. an la matière. C. documant Important nt i votre dl.posltlon au .l'aa du MRAP au prix da 50 francs pour le publk: et 35 francs pour'" comltts locaux d. l'auoclatlon. Je vous écris sur un coup de colère car je viens d'apprendre par la radio le meurtre d'un jeune Marocainjeté dans la Seine par des skinheads ( ... ).Et enten4 dre m. Mégret déclarer une nouvelle fois que ne meurtre n'a aucun lien avec la manifestation du FN m'a mis hors de moi. Plus tard, Le Pen fidèle à lui· même a qualifié cet acte odieux d'incident en certifiant qu'il n'y a pas de skins au FN ... Je ne supporte plus ces discours de haine, les meurtres à répétions contre les étrangers, les 15 % de xénophobes en France et le racisme ordinaire autour de moi. J'ignore s'il existe un moyen efficace pour lutter contre la bêtise, l'ignorance et la cruauté mais je suis prête à soutenir le MRAP dans sa lutte Je veux vous faire part de toute mon indignation et de toute ma profonde tristesse face à ce qui s'est passé à Paris,ence 1er mai. ( ... ) C'est trop t Il faut que cela cesse t Le Pen, par ses paroles, déclenche la haine et la violence jusqu'à la mort Quand je vois que 15 % des Français ont voté pour ce parti raciste et xénophobe, j'ai honte d'être frança is. La France est le pays des droits de l'Homme et elle le restera, elle réglera ses problèmes dans la tolérance. C'est pourquoi je vous demande de faire tout ce qui est en votre _ Las droits da "Homma ___________ _ Les citations mises en exergue dans les pages intérieures sont extraites d'une anthologie des textes qui ont construit au cours de l'Histoire le champ complexe et contradictoire des droits fondamentaux. Editions de l'Imprimerie nationale, 27 rue de la Convention, 75732 Cedex 15 tel: 40 58 30 88 LE BUREAU NATIONAL DU MRAP ___ _ La Conseil national, élu i l'I •• ua du congrès (31 ma,.., 1ar at 2 avril), s'ast réuni la13 mal dernier. lia procédé il'électlon du Bureau national quis. compose comme suit: PRÉSIDENCE Jacques Chevassus, président-délégué : Jean-Jacque. Klrkyacharlan, président chargé de la coordination internationale et des publications : Paul Muzard, président chargé du développement régionale et de la formation inteme; Pierre Malrat, président chargé du secteur libertés et droits fondamentaux SECRÉTARIAT NATIONAL Mouloud Aounit, secrétaire général: Alain Callés, secrétaire-général adjoint chargé des relations extemes et de la coordination des campagnes nationales; Renée le Mignot, secrétairegénérale adjointe chargée de la communication interne et de la coordination des campagnes sur la région parisienne: Bernadette Hétl.r, secrétaire nationale chargée du secteur santé, immigration et justice ; Liliane lainé et Norbert Haddad,secrétaires nationaux chargés de l'éducation du citoyen : Jean-Claude Dulieu, secrétaire national chargé du développement et de la formation interne ; François Prunet, secrétaire naUonal chargé de l'immigration et du droit d'asile LES AUTRES MEMBRES DU BUREAU NATIONAL Ahmad Khenniche, chargé des questions européennes ; Marle-Catherine Andréani, chargée des question africaines : Eliane Benaroche, chargée des questions du Bassin méditerranéen

Jean Charbonnier, chargé du développement du MRAP région Est 1 Franche Comté;

Gérard Kerforn, chargé du développement région Sud-Ouest : Baya Jurquet, chargée du développement Provence-Alpes-COte d'Azur ; Alexandrine Vocaturo, chargée du développement Provence-Aipes-COte d'Azur : Céline Butez, chargée de la jeunesse ; Bertrand Bary, chargé des Tsiganes et Gens du Voyage ; laure Perrin, chargée de la coordination du secteur juridique et des droits de l'Homme; Pierre Krausz, chargé de la lutte contre l'extrême droite et l'antisémitisme: Dominique Brendel, chargée de la lutle contre les discriminations dans le logement et l'emploi. Di1Mrenc .. n· 184 juin 1995 59, rue Oberkampf 75543 Paris Cedex Il Tél.:43145353 Télécopie: 431483 50 • Directeur de la publication Mouloud Aounit , Gérant bénévole Maniai Le Nancq , Rédactrice en che' Cherifa 8 enabdessadok , Administration - gestion Patricia Jouhannet , Abonnements Isabel Dos Manires 120 F pour Il numtroslan 12 F le numéro , Maquette Cherira Benabdessadok , Impression Montligeon Tél.:33858000 , Commission paritaire nO 63634 ISSN 0247-9095 Dépôt légal 1992·10 l

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