Différences n°245 - janvier 2003
Sommaire du numéro
n°245 de janvier 2003
- Un nouvel outil de communication pour notre combat par J.C. Dulieu (évolution de Différences)
- Les quatre chantiers du MRAP par Mouloud Aounit
- Irak: une guerre toujours programmée par Alexandrine Vocaturo [moyen-orient]
- Effets imaginables d'une guerre contre l'Irak sur le conflit Israélo-Palestinien
- Et maintenant, en avant contre l'Irak par Mumia Abu-Jamal
- Désordres publics et ordre social par Laurent Bonelli
- Les violences scolaires par Franck Poupeau
- Enquête sur la droite extrême par René Monzat [extrême-droite]
- Débat: l'éducation contre le racisme par Monique Lellouche
- Discriminations: interview de N. Boubaker
- Immigration: travailler en réseau aves l'IMADR, une chance pour le MRAP par Bernadette Hétier
- Une responsable d'organisation de femmes Dalit prend la parole
- Grands chantiers 2003 pour l'asile et l'immigration
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Texte brut du numéro
Edito : Les quatre chantiers du MRAP International : Irak : Une guerre toujours programmée Education : Education contre racisme : le débat Immigration : Travailler en réseau avec l’IMADR : une chance pour le MRAP NOTRE DOSSIER : Réflexions sur les violences et sur l’extrême droite Discriminations : Interview de N. Boubaker NO 245 - JANVIER 2003 - TRIMESTRIEL - 6 € 2 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 Les 23 et 24 novembre dernier, des militants du Mouvement (PST) se sont réunis à Paris pour examiner les répercussions de l'électrochoc du 21 Avril et en tirer les conséquences sur le sens du combat antiraciste dans la période à venir. Au cours de leurs travaux, les militants ont réaffirmé la nécessité pour le Mrap de disposer d'un outil de communication externe qui réponde essentiellement à deux objectifs
- à savoir
- diffuser les positions du Mouvement - participer de manière spécifique aux débats politiques touchant les questions liées à ses objectifs fondamentaux : antiracisme, amitié entre les peuples, immigration, Droits de l'- Homme. Dans le cadre de la nécessaire restructuration du Mouvement, qui inclut les moyens de communication, le bureau National lors de sa réunion du 3.décembre, à décidé d'adapter " Différences " à la situation nouvelle. Ce sera donc désormais une publication trimestrielle, comprenant 20 pages, comprenant un dossier et différentes rubriques liées aux activités du MRAP. Nouveau dans sa forme cet outil se veut innovant sur le fond. Cette première mouture est prévue comme amorce d'une formule évolutive durant toute l'année 2003. Il s'agit en effet de faire des quatre prochains numéros un champ d'expérimentation pour concevoir le produit final qui sera l'oeuvre d'un travail collégial. " Différences " appartient aux adhérents du MRAP, et sera demain ce que les acteurs du Mouvement et ses lecteurs en feront. L'objectif est donc de permettre à chacun de s'approprier le devenir du journal et d'en faire un véritable outil au service de l'efficacité de notre combat. C'est pourquoi vous trouverez ci-contre " un espace d'échange " permettant de vous exprimer. J.-C. DULIEU Secrétaire Général Adjoint. Edito page 3 International page 4 Dossier page 7 Education page 13 Discriminations page 15 Immigration page 16 Kiosque page 19 43, bd de Magenta 75010 Paris - Téléphone : 01 53 38 99 99 Télécopie : 01 40 40 90 98 - E-mail : journal.differences@free.fr 6 € le numéro - Abonnement 21 € (4 numéros par an) Collectif de direction « Différences » Directeur de publication : Mouloud Aounit Coordinateur responsable rédaction* : J.-C. Dulieu Responsable productions* : S. Goldberg Administratrice* : M.-A. Butez Impression : Impressions J-M Bordessoules Téléphone : 05 46 59 01 32 Commission paritaire n° 63634 0247-9095 Dépôt légal 2003/01 Photos pages 1 et 16 Jean Molins
- Bénévoles
Cet encart est votre espace d’expression. ( Si vous ne voulez pas abimer votre journal, photocopiez cette page) Ecrire à Différences (voir coordonnées ci-contre) International - Dossier MSooumvemmaeirnet Immigration - Discriminations Un nouvel outil de communication pour notre combat Meilleurs voeux du secrétariat national et de l’équipe de Différences « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 3 International - Dossier MouEvdeimtoent Immigration - Discriminations Si on déroule le ruban des derniers mois, on voit émerger deux dates : 21 avril 2002 et plus loin 11 septembre 2001. Ces deux dates ont durement marqué notre histoire et on peut dire que leurs suites continuent à marquer notre travail pour donner vie à ce qui est notre raison d'être : restituer à chaque être humain sa dignité quelle que soit sa nationalité, sa couleur de peau, sa religion, ses opinions philosophiques et politiques, oeuvrer pour que chaque personne, chaque peuple puisse vivre en paix dans le respect des droits et libertés fondamentaux. Le 21 avril, un électeur sur cinq a donné une légitimité politique aux réponses racistes devant les difficultés quotidiennes vécues par un très grand nombre de nos concitoyens. C'est un coup violent que la France a reçu, un coup inattendu. Les traces de cette agression contre les valeurs de générosité, de tolérance, de fraternité humaine et d'égalité nécessiteront du temps et de l'action opiniâtre pour nous épargner la récidive, ce qui suppose que la France retrouve le goût et la force de construire les vraies réponses à la malvie. Si le 5 mai le sursaut citoyen a repoussé le danger, il reste que la France, minée par ses peurs de l'autre, rongée par l'exclusion, la pauvreté et la marginalisation, accepte aujourd'hui les réponses inspirées par les idées d'extrême droite : il en est ainsi des lois et projets sur la sécurité et la justice qui criminalisent les plus pauvres et les exclus, les SDF, les sans papiers, les sans logis, les gens du voyage... Le combat sera rendu plus difficile encore par le fait qu'il s'agit de problèmes auxquels, malgré leur urgence, la gauche n'a pas apporté de solution ; il s'agit du combat pour l'égalité des droits et l'égalité tout court. Pendant ce temps l'opinion publique se laisse anesthésier par l'habile agitation du ministre de l'Intérieur, qu'on nous présente comme l'homme politique le plus admiré des Français ! ! ! Colmater les brèches ouvertes le 21 avril, construire les résistances, tel est en fait notre premier chantier. Le 11 septembre 2001 n'en finit pas ; autre date, autre horreur, autres tragédies à venir. Un an et demi après cet attentat barbare, il semble qu'aucun enseignement n'en ait été tiré et que la spirale de la barbarie continue. Cette catastrophe est un révélateur, un signal d'alarme d'une crise profonde née des humiliations, du mépris, de la misère, de la mondialisation des rapports de domination qui pousse les hommes, les peuples et les nations à rechercher en place et lieu de la justice, du droit et de l'équité des réponses de violence et de haine, se réclamant des religions ou des communautarismes. Le 11 septembre a aussi été un accélérateur des périls : partout dans le monde les discours de haine qui alimentent le racisme et engendrent les violences auront inévitablement des répercussions dans nos combats quotidiens. La peur, l'excitation, l'outrance sont les alliés objectifs du racisme. En France, alors que l'antisémitisme s'exprime et s'affiche de manière inquiétante, le rejet haineux des musulmans et de l'Islam s'installe sans les résistances intellectuelles, morales et politiques attendues. Notre combat contre tous les racismes et leurs manifestations nouvelles est notre deuxième chantier. En ce début d'année l'horizon de la paix est bouché. De gros nuages annonciateurs de tragédies humaines n'épargnent aucun continent. En Afrique, en Côte d'Ivoire, sous le regard passif de la communauté internationale, un deuxième Rwanda se prépare-t-il ? Au Proche Orient, deux peuples à jamais voisins s'entre-déchirent. L'occupation par la force fait du quotidien de chaque Palestinien une vie dans l'enfer, faite d'humiliations, de privation du droit de vivre dignement. De l'autre côté, les Israéliens sont en proie à la même peur, la même angoisse, la même insécurité que les Palestiniens : l'absence de paix rend toute vie impossible. En Irak, une catastrophe se prépare. Le hold-up voulu par les États- Unis pour s'installer dans cette zone géostratégique (à l'instar de l'Afghanistan) et pouvoir ainsi faire main basse sur les ressources pétrolières irakiennes risque d'anéantir un peuple déjà rendu exsangue par l'embargo. D'autre part, les risques sont grands d'embraser tout le Moyen Orient et d'exacerber les conflits actuels (comme en Tchétchénie et en Corée du Nord), mais aussi d'engendrer des répercussions parmi les différentes composantes de la population de France. C'est dire l'importance que revêt notre troisième chantier : le droit des peuples à vivre en paix pour l'humanité et la coexistence pacifique en France. Enfin, le quatrième chantier vital est de garantir l'existence du MRAP. Il manque chaque année près de 900 000 francs à notre mouvement pour équilibrer son budget. Le MRAP a douloureusement souffert d'une réalité, celle de l'absence chronique de moyens financiers à la hauteur des exigences toujours renouvelées que le combat contre le racisme, pour l'amitié et le droit des peuples lui ont imposé quotidiennement. En dernier ressort, le Bureau national a dû voter des mesures douloureuses mais indispensables pour sauvegarder l'existence même du Mouvement : à savoir la suppression de trois postes salariés. Cette réalité nous oblige à une adaptation et à une réorganisation nouvelles par l'appel au travail militant, une plus grande disponibilité des élus et des militants et un redéploiement de certaines tâches pratiques et d'exécution réalisées jusqu'à présent au siège. Il s'agit aussi de poursuivre trois objectifs vitaux : le développement des adhésions, l'amélioration de la communication interne et externe et la réorganisation de nos instances. Sauver, renforcer et améliorer le MRAP, c'est là notre quatrième chantier. Ce premier éditorial vous paraîtra sombre, il est à la couleur du temps. Nous l'aurions aimé autrement. Malgré tout, bonne année et, comme le disait Che Guevara : " Celui qui lutte peut perdre, celui qui ne lutte pas a déjà perdu ". Mouloud Aounit Secrétaire général janvier 2003 Les quatre chantiers du MRAP 4 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 Irak : une guerre toujours programmée Dès les premières menaces, alors que les États-Unis s'employaient à faire monter la pression, en présentant comme dangereux et potentiellement terroriste le régime de Bagdad, le MRAP, dans le 4 pages qu'il diffusait lors du premier rassemblement du mois d'octobre, dénonçait les manoeuvres américaines tendant à justifier leur volonté d'intervenir militairement, même si cela devait être de façon unilatérale, au cas où les Nations Unies ne se soumettaient pas à leur volonté... Drôle de conception des relations internationales et du droit. En qualifiant l'intervention américaine qui se dessinait de " guerre programmée ", le MRAP détaillait les véritables raisons qui font que les États- Unis veulent à tout prix intervenir en Irak : volonté de s'établir en plein coeur du Proche-Orient et d'en contrôler les évolutions économiques et politiques futures (à un moment où les relations avec l'Arabie Saoudite ne sont plus aussi sereines...), faire main basse sur la production pétrolière irakienne et par là mettre un peu plus sous dépendance énergétique des États-Unis le reste de l'économie mondiale. Ces raisons économiques et géostratégiques sont bien loin des prétextes d'ordre démocratique que les États- Unis présentent souvent comme l'une de leurs principales préoccupations. La lutte contre la dictature en Irak ne peut donner le change lorsque l'on sait que les États- Unis ont été l'un des principaux soutiens de Saddam Hussein, son principal fournisseur d'armes lors de la guerre entre l'Irak et l'Iran. La formation d'un gouvernement de rechange en Irak se heurte à des difficultés énormes. La récente réunion de Londres de l'opposition irakienne sous le patronage pressant des États-Unis a montré ses limites. A l'inverse de la situation en Afghanistan où les opposants au régime des talibans étaient présents et participaient à la lutte sur place, les opposants irakiens (à l'exception des Kurdes) ne peuvent se prévaloir d'aucun soutien populaire en Irak. Un gouvernement ainsi constitué de par le choix et la volonté des États-Unis représente- t-il une véritable alternative au projet de mettre l'Irak sous administration militaire directe des Etats-Unis ?. A ce sujet, le MRAP avait attiré l'attention sur la question de la légitimité d'un gouvernement sorti des soutes d'un avion de l'US Air Force (tout en se refusant à cautionner de quelque manière que ce soit le régime d'oppression de Saddam Hussein que le MRAP a toujours condamné).. Sans oublier les répercussions tant au niveau national (montée de l'intolérance, de la xénophobie, aggravation des mesures policières...) qu'au niveau international (déstabilisation du Moyen Orient, montée de l'islamisme radical, aggravation de la situation en Palestine..), le MRAP, dans sa déclaration du bureau national du 21 septembre 2002, s'inquiétait des pressions américaines sur les Nations- Unies et précisait que la France se doit de ne pas céder à ces pressions et qu' " elle doit impérativement déterminer sa position en fonction des principes du droit et de la justice qui doivent prévaloir dans les enceintes internationales ". Aujourd'hui, alors que les États- Unis semblent avoir renoncé à l'intervention militaire unilatérale pour porter la question irakienne à l'ONU, cette requête garde toute son actualité comme garde toute son actualité la lettre-pétition du MRAP au Président de la République française lui demandant que " la France exprime de la façon la plus nette sa volonté d'opposer son veto à toute tentative d'intervention militaire qui cache mal la volonté des États-Unis d'imposer leur loi au reste du monde tout en contrôlant par leur présence directe l'ensemble du Proche- Orient ". Tout en indiquant, dans sa déclaration diffusée lors des manifestations du 14 décembre 2002, que " si les inspections ont débuté en Irak éloignant pour un temps les risques de guerre, la volonté des États-Unis d'intervenir militairement demeure toujours aussi inquiétante ", le MRAP rappelait les " mésaventures " de la première commission d'inspection en Irak (commission Buttler) pour mettre en garde contre " toute manoeuvre visant à justifier une escalade fatale à la paix " et appelait la France, membre permanent du Conseil de sécurité à se montrer " vigilante et circonspecte ". Le hold-up commis par les États-Unis sur le rapport remis à l'ONU par les autorités irakiennes n'allait pas tarder à donner raison aux appréhensions du MRAP. Cette façon de procéder, par sa brutalité préméditée, témoigne du désir des États-Unis d'asservir les Nations Unies et d'amener l'ensemble des nations à reconnaître leur suprématie incontestable. Ainsi l'abandon d'intervenir unilatéralement et le passage par l'ONU marque la volonté des États-Unis de soumettre cette institution, de compromettre sa réputation et en fin de compte de la rendre inopérante. En passant sous tutelle américaine, l'ONU ne serait plus (n'est plus ?) qu'un nouvel instrument de domination des États-Unis. et l'Europe y perdrait toute crédibilité politique. Alors que l'Allemagne, la Russie et nombre de pays, qui n'ont généralement pas droit au chapitre, se refusent à accepter une intervention militaire contre l'Irak, il faut plus que jamais que la France renouvelle officiellement son opposition totale à cette guerre en usant de son droit de veto, d'autant que la résolution 1441 ne prévoit pas d'automaticité de la guerre. La France ne doit participer en aucune façon à ce qui apparaît de plus en plus comme une guerre d'agression, d'ailleurs les États-Unis n'ont pas besoin d'une quelconque aide militaire pour venir à bout d'une armée irakienne carrément exsangue après plus de dix ans d'embargo. En ce sens, la notion de guerre préventive mise en avant par les États-Unis, outre qu'elle ne se fonde sur aucun argument légal au niveau international, manque pour le moins de sérieux et de crédibilité. Le soutien que les États-Unis recherchent n'est pas tant militaire que politique. Se rendre complice de l'agression américaine, c'est n'avoir plus le choix qu'entre subordination et vassalité. Cette crise représente un tournant déterminant, c'est pourquoi notre responsabilité est grande : s'en remettre aux seuls gouvernements ne saurait suffire. Les mobilisations, aux États- Unis en particulier restent un élément essentiel pour tenter de sauver la paix. L'échec relatif des manifestations en France, s'il pose question, doit surtout nous pousser à réussir la mobilisation du 18 janvier. Les choix d'aujourd'hui ne doivent pas préfigurer les asservissements de demain. Alexandrine Vocaturo 26 décembre 2002 L'ensemble des textes sur la guerre peut être consulté à la rubrique International " du site du MRAP. International - Dossier MIntoeurvneamtioennatl Immigration - Discriminations « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 5 Chaque jour qui passe nous convainc davantage que les États-Unis sont déterminés à attaquer l'Irak. Ici, en Israël, nous entendons un étrange silence mondial sur ce cap brutal. Mais plus étrange encore est le silence audible en Israël qui, de multiples façons, subira fortement les effets de cette guerre cardinale. Tant de facteurs s'entrecroisent, s'amplifient aussi bien que s'annulent au Moyen- Orient que je ne peux tenter d'analyser ici que certaines des forces en jeu les plus puissantes ainsi que leurs effets combinés et les scénarios qu'elles peuvent engendrer : 1- Contexte Amérique - Reste du Monde : Les États-Unis, dans leur attaque, bénéficieront-ils de l'environnement favorable d'un soutien mondial parce qu'ils auront découvert des preuves tangibles des violations perpétrées par l'Irak ? Ou bien attaquerontils seuls, sur des bases fragiles ? 2- Contexte Irak - Israël : Israël sera-t-il frappé par des missiles irakiens, en particulier chimiques ou biologiques ? 3- Contexte Israël - Palestine : une telle frappe irakienne verrat- elle Israéliens et Palestiniens enchevêtrés dans un nouveau cercle vicieux d'attaques et de représailles ou marqueront-ils une pause relative ? 4- Contexte Gauche - Droite israéliennes : enfin, une telle frappe aura-t-elle lieu avant ou après les élections israéliennes ? Et qui remportera ces élections ? Il est évident que de chacune des réponses possibles à ces quatre questions découle un scénario totalement différent dans les relations israélo-palestiniennes. Le public israélien, déjà plongé dans un état de panique et d'usure profonde après deux ans d'Intifada, ne manquerait sans doute pas de suivre n'importe quelle voie imposée par ses dirigeants, fût-elle la plus radicale, la plus immorale et même la plus irrationnelle des solutions. D'autre part, ce même état de panique et d'usure peut, s'il en est usé avec sagesse, permettre un grand bond en avant vers une solution positive. Sharon et Mitzna savent parfaitement que l'impasse actuelle ne peut guère perdurer et que, de fait, il n'existe que deux options décisives : 1- La solution " Deux Etats ", en gros sur les frontières de 67 ; 2- Un transfert de populations palestiniennes et la création d'un État Juif, sans Arabes, sur ce territoire. Bien sûr, il est possible de concevoir plusieurs scénarios dans les quatre contextes ci-dessus et tenter d'imaginer l'effet de chacun d'eux sur les deux options majeures possibles. Mais je n'ébaucherai ici que les deux scénarios les plus extrêmes : 1- Les États-Unis découvrent de gigantesques caches d'armes chimiques, gagnent l'appui du reste du monde et la Coalition ressuscitée attaque l'Irak. Le dirigeant irakien désespéré lance des missiles chimiques sur Tel Aviv, provoquant un grand nombre de victimes. Les Palestiniens, tirant avantage de la panique et du chaos ainsi créés en Israël, lancent une offensive d'attentats suicides. La Droite est au pouvoir en Israël, avant ou après les élections, les Américains victorieux déclarent leur intention de dessiner une " nouvelle carte du Moyen Orient " et tout cela se produit dans le " silence des agneaux " mondial. Dans ce scénario catastrophe, il est très possible que la Droite israélienne tire prétexte de la situation pour expulser du pays tous les Palestiniens et créer ainsi un État sans Arabes, de la Méditerranée au Jourdain. Le flux des réfugiés renversera le Royaume Hachémite et les Palestiniens créeront un État palestinien en Jordanie. Israël " aidera " aussi le Liban à faire de même avec les réfugiés se trouvant sur son propre territoire. La Coalition, dirigée par les États-Unis, " conseillera " à la Syrie de se préoccuper de très près de son avenir et lui offrira la possibilité de désarmer, d'accepter la paix avec Israël, de renoncer aux hauteurs du Golan syriennes (occupées par Israël) et d'échapper ainsi au sort de l'Irak. Les États-Unis, Israël et la Grande Bretagne " redessineront " alors la carte d'un Moyen-Orient " stable ". Une version plus modérée de ce " rêve fantasmatique " de la Droite serait de parvenir à la purification ethnique de l'ouest des Territoires occupés (Qalkilia, Tul-Karem et les nombreux villages de la " ligne verte "). Au total quelque 250 000 personnes. Ce qui permettrait à Israël d'annexer cette zone, de créer un " Bantoustan " Palestinien dans le reste de la Cisjordanie et d'attendre le moment où la tâche pourra être achevée. Le second scénario est extrême dans l'autre sens : 2- Les États-Unis ne trouvent aucun élément de preuve contre l'Irak et, poussés par la clientèle politique de Bush, lancent la guerre contre la volonté du monde entier. L'attaque a lieu une semaine avant les élections en Israël. Les écrans de télévision du monde entier s'emplissent d'images de champs pétrolifères en flammes, de quantité de victimes et de catastrophes écologiques. Le prix du pétrole est multiplié par deux et les gouvernements Européens, comprenant le prix élevé de cette instabilité, ne veulent rester cois plus longtemps. Ils pointent un doigt accusateur vers les États-Unis et vers Israël. L'Irak n'attaque pas Israël et les Palestiniens ne lancent pas d'attentats suicides contre des civils israéliens. L'Europe lance une vaste et puissante campagne de stabilisation de la région, sur le fondement des propositions de la Ligue Arabe. Affaiblis, les États-Unis sont obligés de s'incliner afin de conserver leurs acquis, quels qu'ils soient, en Irak. Mitzna, face à une gigantesque pression mondiale en faveur d'une paix, qui plus est rapidement, s'engage auprès du Peuple israélien, s'il est élu, à conclure la paix avec l'ensemble du monde arabe dans les douze mois. Le public israélien, effrayé et très fatigué, accepte et la Gauche gagne les élections. Le prix du pétrole chute. Douze mois plus tard, la paix est là... La réalité, ici, au Moyen-Orient, va fluctuer entre ces deux pôles. Dans cette situation chaotique, il nous appartient dans une grande mesure d'influer sur le cours des événements. Oren Medicks Israélien, membre de Gush Shalom. 21 décembre 2002 Effets imaginables d’une guerre contre l’Irak sur le conflit israélo-palestinien International - Dossier MIntoeurvneamtioennatl Immigration - Discriminations 6 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 Avec l'objectif atteint d'un Afghanistan perclu de bombardements et apparemment pacifié, nous voyons l'Amérique ériger, une fois de plus, l'Irak en "démon-du-moment". Le dernier prétexte en date pour faire de l'Irak une cible des médias et de l'appareil militaire est que ce pays possède des "armes de destruction massive". Mais quel pays n'en possède pas ? L'ancien Président Bill Clinton, avait déjà joué la carte de l'Irak quand il avait accusé le gouvernement de Bagdad d'être le seul à utiliser des armes de destruction massive même si l'Irak n'était pas le seul pays a en posséder. L'éminent historien, Howard Zinn, auteur de "l'Histoire des Etats-Unis vue par ses peuples" a déclaré que seule une nation qui tourne le dos à son histoire serait capable d'accepter l'argumentation de Clinton
- "il ne peut soutenir ces
contrevérités qu'auprès d'une population spoliée de son histoire. Les Etats-Unis ont équipé la Turquie, Israël et l'Indonésie avec de telles armes et ces pays les ont utilisées contre leurs populations civiles. La nation la plus coupable est bien la nôtre. Aucune nation sur la planète ne possède autant d'armes de destruction massive et aucune nation ne les a utilisées plus souvent que nous - avec des pertes en vie civiles plus importantes. A Hiroshima, des centaines de milliers sont morts, en Corée et au Vietnam des millions sont morts à cause de notre utilisation de telles armes". L'audacité de l'hypocrisie exhibée par une nation comme la nôtre, capable d'accabler de menaces une autre nation sous prétexte qu'elle possède "des armes de destruction massive" est sidérante. Les peuples asiatiques et arabes ne doivent pas en croire leurs oreilles. Le dérapage de Clinton vers la droite pendant son deuxième mandat est aujourd'hui reproduit par Bush fils, lequel recycle le mensonge de son prédécesseur : ce bon vieux mythe des "armes de destruction massive". C'est là également pour Bush Jr de réparer l'échec de Bush père dans la mesure où celui-ci avait omis de discipliner, comme il se devait, l'Irak parce que cette nation avait osé se conduire en Etat souverain et non en Etat vassal (ou Etatclient) inféodé à l'Etat américain. Pour pousser plus loin encore cette hypocrisie, sachez que certaines des armes détenues par l'Irak étaient en effet des armes de destruction massive, ce que Washington ne pouvait ignorer puisque ce sont des équipements militaires américains qui furent livrés aux Iraquiens pour mieux leur permettre de tuer leurs adversaires iraniens. Les Etats-Unis, la Grande Bretagne et d'autres puissances occidentales se sont considérablement enrichis en vendant de telles armes non seulement à l'Irak mais aussi à l'Iran. Les deux adversaires ont utilisé ces armes avec une efficacité redoutable au cours d'une guerre qui dura huit ans et provoqua la mort de 800 000 personnes – peut-être même un million de femmes, hommes et enfants. Courroucés par l'expulsion du Shah et la montée de l'ayatollah Khomeiny, les Etats-Unis se sont frotté les mains avec une joie toute mercantile tandis qu'ils armaient et poussaient au combat les Irakiens tout proches. Les alliés d'hier sont les adversaires de demain. Et ce demain est arrivé
- la poussière des bombardements
répétés a à peine eu le temps de se mêler à la dure et froide terre afghane que l'Amérique cherche à étendre la série de ses nouvelles croisades à l'Irak. Alors que l'Irak a subi dix ans de bombardements ininterrompus, alors que ce pays ne s'est pas encore relevé de pertes civiles s'élevant à près de 500 000 morts, alors que l'Irak est devenu un grand dépotoir de déchets toxiques à force de bombardements chimiques. En 1991, 1993 1998 et aujourd'hui même les menaces, le harcèlement et les bombardements de l'Irak n'ont rien à voir avec cette affaire d'armes de destruction massive. Pourquoi l'Irak est-il un bouc émissaire de choix aujourd'hui ? Le brigadier général américain William Looney qui dirigea le bombardement de l'Irak à la fin des années 1990 l'a dit sans ambages
- "s'ils utilisent leurs radars,
nous allons faire exploser leurs satanés missiles sol-air. Ils savent que nous possédons leurs pays. Nous possédons leur espace aérien...Nous dictons la façon dont ils vivent et s'expriment. C'est pour cela que l'Amérique d'aujourd'hui est formidable. Tout ça est bon, surtout qu'il y a beaucoup de pétrole làbas et nous en avons besoin" (Wm Blum, Rogue State, Common Courage, 2000, p. 159). Voilà, nous y sommes : le pétrole. Ne s'agit-il pas là d'un crime en violation de la législation internationale ? Mumia ABU JAMAL écrit depuis le couloir de la mort. Distribution et traduction par Julia Wright responsable en France du COSIMAPP (Comité International de Soutien à Mumia Abu Jamal et aux Prisonniers politiques aux USA c/o LPJ 58 rue Gay Lussac 75005 Paris) Et maintenant, en avant contre l'Irak par Mumia Abu Jamal Malgré les 20 années passées dans l'enfer du couloir de la mort, Mumia Abu Jamal n'a cessé d'avoir une vision politique d'une extraordinaire lucidité et s'est engagé sur toutes les questions fondamentales concernant aussi bien les Etats-Unis que l'ensemble de la planète. C'est l'une des raisons de l'acharnement de la "justice" américaine à vouloir le faire taire. C'est aussi la raison pour lequel le MRAP reproduit, avec l'aimable autorisation du COSIMAPP son engagement contre la guerre en Irak. RLM International - Dossier MIntoeurvneamtioennatl Immigration - Discriminations « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 7 Réunion des présidents, secrétaires et trésoriers du 23 novembre 2002 Le démarrage de la journée est prévu à 8 h 45, quelques personnes seulement sont là... On commencera avec beaucoup de retard que l’on finira par rattraper, les organisatrices ont toujours l’oeil fixé sur la montre... Mais tout ceci est de peu d’importance. En effet, ce qui compte, ce sont les retrouvailles entre militants, amis, mais aussi les rencontres, la découverte de la richesse des autres. On a soif de la diversité des accents. On voit le MRAP. Il devient visible. On se sent fort pour les combats à venir. Sur fond de 20e arrondissement, vieux quartier parisien, riche d’Histoire du mouvement ouvrier, l’auberge bruisse. Des jeunes circulent en tous sens, l’italien, l’espagnol, l’anglais, l’allemand fusent. Dehors, il fait gris, il pleut sans discontinuer
- mais peu nous importe, car
la journée sera sous le signe de la chaleur, par petits groupes ou tous ensemble, autour du café (toujours pris d’assaut), au self à midi ou lors du buffet libanais. Là, les couleurs, l’esthétique, les goûts si variés et raffinés mènent au rêve, mais aussi aux débats enflammés sur des sujets brûlants. En effet, toute la journée s’expriment les besoins d’échanges d’idées, de réflexion pour mieux pouvoir agir. Les exposés des intervenants sont suivis avec beaucoup d’intérêt et de concentration
- les débats passionnés montrent
la grande diversité mais aussi le socle commun d’idées partagées par les militants du MRAP. Tout cela semble trop court. On demande d’autres journées. Ce désir de réflexion, d’information, mais aussi de rêve se matérialise aussi devant les tables de livres, de documents qui s’arrachent. Là encore, on discute, on compare, on découvre. Heureusement, on est encore là demain. ML Le 23 novembre 2002 à l’auberge d’Artagnan Pas une semaine, pas un jour presque, ne s’écoulent sans que les titres de la presse n’attirent notre attention sur « l’explosion » de l’insécurité dans les « banlieues » françaises. Des experts auto-proclamés en sécurité y prophétisent sur fond de courbes exponentielles de la délinquance et de la violence l’avènement d’une « pléthore d’oranges mécaniques », de zones de « non-droit « aux mains de délinquants toujours plus jeunes, plus récidivistes et plus violents. Les différents partis politiques, toutes tendances confondues - avec des nuances dans le ton - joignent leurs voix à celles des journalistes et des « experts » pour entonner le couplet sur la « demande de sécurité » de leurs électeurs, et réclamer plus de policiers, fussent-ils municipaux. Depuis cinq ans maintenant, la sécurité urbaine est devenue l’une des principales priorités des différents gouvernements, qui, de la loi sur la sécurité quotidienne (LSQ) à la loi de programmation sur la sécurité intérieure (LOPSI) y consacrent des moyens importants, matériels et législatifs. Pour comprendre cette inflation extraordinaire de la sécurité dans notre société, il faudrait revenir sur l’ensemble des jeux politiques, médiatiques et bureaucratiques qui rendent cette émergence possible à un moment donné, comme somme des investissements - et parfois intéressés - d’une myriade d’agents sociaux appartenant à des univers aussi différents que la police, le monde politique, l’université, l’entreprise. Ce n’est pas ce que je ferai ici, renvoyant pour cela à d’autres travaux. Je me propose en revanche de m’interroger sur les transformations des quartiers populaires, de la Désordres publics et ordre social... dans les quartiers populaires par Laurent Bonelli International - Dossier MoDuovsesmieernt Immigration - Discriminations 8 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 « violence » qu’on peut y observer et de ses modes de traitement. Quand j’entends « quartiers populaires », je fais référence à ceux que l’on retrouve au centre des grandes villes : le XVIIIe arrondissement de Paris, par exemple, ou dans les périphéries urbaines : « les banlieues ». Ces quartiers ont connu entre les années 60 et 80, puis entre les années 80 et aujourd’hui, de grandes évolutions. Durant les années 60, ils étaient synonymes de progrès social et permettaient à des familles ouvrières d’accéder au confort (eau courante, électricité, etc.). Or, sous l’effet des politiques libérales en matière de logement promues durant les années 70 (aide à la pierre), les couches les plus favorisées de ces quartiers ont pu accéder à la propriété et les ont désertés. A la même époque, la crise a frappé le monde industriel non qualifié qui occupait la majorité des habitants de ces zones. Ce double phénomène de concentration/ précarisation va avoir des effets très importants sur les populations les plus jeunes. La violence des jeunesses populaires n’est pas nouvelle (voir les blousons noirs, les loubards), mais son cadre d’expression se modifie largement. En effet, l’errance dans l’espace public propre à ces adolescents, qui se traduisait par une série de comportements « déviants » (violences verbales et physiques, petits vols, dégradations, etc.) prenait rapidement fin par l’intégration, dans les fractions les plus déqualifiées, du prolétariat industriel. Et loin de s’opposer à la culture de l’atelier, leurs valeurs de culture de rue dont ils étaient porteurs (virilité, violence, anti-autoritarisme, etc.) y trouvaient un réceptacle favorable. Il suffit de penser à la lutte contre le « petit chef », le contremaître. Ces valeurs nourrissaient même parfois l’action syndicale et politique. Au fil des années l’intégration professionnelle s’accompagnait du passage à un mode de vie « classique ». Aujourd’hui ces mêmes jeunes ne peuvent plus s’intégrer à un monde qui décline largement, pas plus qu’ils ne peuvent occuper les nouveaux emplois sous-qualifiés auxquels leur absence de qualification les voue objectivement. En effet, ceux-ci se développent exclusivement dans le secteur tertiaire. Et s’il est exact de dire que le travail d’un caissier de supermarché est un travail à la chaîne, il diffère profondément de ce dernier par l’introduction du client, qui impose des formes de civilité et de comportements « normalisés » qui s’opposent à la culture de rue (docilité, politesse, voire déférence). Dans le même temps, la massification de l’enseignement en France (80 % d’une classe d’âge au bac) a prolongé dans le système scolaire des adolescents qui en auraient été exclus ; sans pour autant que l’école ne leur ouvre un avenir autre qu’au rabais. C’est une sorte de marché de dupes, dont ils ne sont justement pas dupes, qui sape les fondements de l’autorité des enseignants. Il n’est d’ailleurs pas neutre que les difficultés majeures en termes de troubles scolaires concernent aujourd’hui le collège. Problèmes à l’école, donc, mais aussi dans les quartiers, dans les structures socio-culturelles auxquelles ils ne participent pas mais perturbent, dans les halls d’immeubles qu’ils transforment en lieux visibles d’une sociabilité spécifique, etc. Et ce à plus forte raison que cet état tend à se prolonger de plus en plus tardivement en âge, allongeant d’autant le temps des « conneries » et rendant les ruptures plus difficiles. Ces adolescents, garçons pour l’immense majorité, sont ce que Robert Castel appelle des « désaffiliés », ces « inutiles au monde, qui y séjournent sans vraiment y appartenir. Ils occupent une position de surnuméraires, en situation de flottaison dans une sorte de no man’s land social, non intégrés et sans doute in-intégrables. [...] Ils ne sont pas branchés sur les circuits d’échanges productifs, ils ont raté le train de la modernisation et restent sur le quai avec très peu de bagages. Dès lors, ils peuvent faire l’objet d’attentions et susciter de l’inquiétude, car ils posent problème ». Les difficultés réelles des différentes institutions (écoles, bailleurs sociaux, transporteurs publics, élus locaux, etc.) pour « gérer » ces populations et leurs comportements se sont traduites par une augmentation multilatérale des demandes de résolution policière de ces questions. C’est-à-dire à une pression pour une gestion policière de la désaffiliation, dont l’ambition avérée reste la régulation des désordres en public. Comme le rappelait un commissaire de police d’une grande ville du Sud Ouest de la France : « ici, il y a une spécialité, c’est le rugby, c’est-à-dire qu’on passe la balle à son voisin. Le problème c’est que la police est sur l’aile, au bord de la touche et qu’elle ne peut la refiler à personne ! » [Entretien, mars 2001]. Or, les réponses que peut apporter la police restent ambivalentes. En effet, les missions de « pacification sociale » n’intéressent pas beaucoup les policiers, dont la hiérarchie des normes est autre, plaçant au sommet de l’échelle le travail judiciaire voire le renseignement. La police est en effet une institution qui se caractérise peut-être plus que d’autres par le choix de ses missions et la manière dont elle va les exercer. Les policiers vont choisir dans l’éventail des illégalismes - que la multiplication des règles et des règlements rend chaque jour plus nombreux - ceux qu’ils vont considérer ou pas. Cette hiérarchie des normes, jamais codifiée comme telle, détermine en dernière International - Dossier MoDuovsesmieernt Immigration - Discriminations « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 9 analyse ce qui va être poursuivi dans l’activité ordinaire des agents. Cette latitude d’action n’est pas forcément en phase avec les sollicitations extérieures. La question des groupes d’adolescents qui stationnent dans les halls d’immeubles est à ce point de vue intéressante, puisqu’elle est le point de convergence de nombreuses plaintes, tant de la part de particuliers que d’agents institutionnels. Ce décalage entre des demandes d’intervention relativement anodines, mais répétées, et la poursuite des délits, limite l’enthousiasme des policiers pour intervenir. En effet, les demandes de régulation des petits désordres excèdent largement les capacités de la police et son savoir-faire (ou son savoir- être). Cette intervention solitaire de la police, qui se réduit souvent à une répression sans délits, un contrôle sans infractions, reste très difficile. Un chef de police résumait ainsi l’action de ses brigades anti-criminalité (BAC) dans les halls d’immeuble : « s’ils trouvent quelque chose, arme, shit ou autre, ils interpellent, mais sinon, ils se contentent de contrôles d’identité et les font partir en leur expliquant qu’ils font chier tout le monde » [Entretien, mars 2001]. Dans tous les cas de figure, ces missions restent peu gratifiantes et leur répétition instaure un fort climat de défiance entre forces de l’ordre et les groupes qu’elles contrôlent. Défiance qui trouve une traduction immédiate dans l’augmentation des outrages, voire des rébellions. Pour autant, cette augmentation du nombre d’outrages et le durcissement des relations entre « jeunes » et police ne résolvent pas la question initiale, celle des petites nuisances qui avaient déclenché ce type d’interventions. Les policiers confrontés au quotidien à ce type de contradictions sont alors d’autant plus portés à s’investir dans les structures « partenariales », comme les Contrats Locaux de Sécurité (CLS), qu’ils ont pratiquement et symboliquement tout à y gagner. En effet, engager d’autres agents sociaux dans le contrôle et la normalisation de ces comportements déviants est l’une des solutions les moins coûteuses et les plus efficaces pour répondre à des troubles qu’ils sont incapables de résoudre, pour des raisons tant internes (priorités policières, « inversion hiérarchique ») que liées à leurs prérogatives (nécessité de constater un délit, déplacement des problèmes, de quelques mètres parfois en cas d’opérations intensives de police). C’est ainsi qu’on assiste à un travail d’enrôlement policier des autres institutions, soit direct dans le cas des bailleurs sociaux, des transporteurs publics, voire des municipalités, qui développent leurs propres forces de sécurité ; soit indirect, pour l’Ecole, les ANPE, les missions locales d’insertion, etc., sommés de fournir des informations sur les adolescents qu’ils suivent ou côtoient. Dans le même temps, cette mobilisation confère aux policiers une position de centralité qu’ils n’avaient sans doute jamais connue auparavant, ce qui transfigure largement les formes des réponses qui vont être apportées. Sous certains aspects, ce mouvement constitue une reformulation policière de la question sociale, et particulièrement de la question de la « désaffiliation ». Il trouve son origine dans des orientations politiques et idéologiques qu’on observe en France depuis quelques années. L’abandon depuis le milieu des années 90 du traitement social de la délinquance - marqué par la proclamation de « l’échec » de la politique de la Ville - est une conséquence de logiques importées des Etats-Unis qui voudraient que « la première cause du crime soit le criminel lui même ». « On sait que la délinquance n’a aucune nature sociale et qu’elle relève de la responsabilité individuelle de chacun » rapportait de la sorte Christophe Caresche, député PS de Paris. Corrélatifs de la doxa conservatrice de « responsabilité individuelle » des actes, ces schémas présupposent que les adolescents des quartiers populaires auraient ainsi fait le choix facile, rationnel et durable, d’un système de valeurs « délinquantes » contre celui de valeurs « conventionnelles », où le travail reste central. Comme le déclarait Julien Dray, secrétaire national du Parti socialiste chargé de la sécurité, aux rencontres nationales sur la sécurité, (Evry, 27 octobre 2001) : « référonsnous, pour une fois, aux préceptes des économistes néo-classiques : pour l’homo-oeconomicus rationnel, le prix de la possible punition doit excéder les bénéfices attendus du délit ». Reprises massivement dans les discours politiques, ces visions occultent volontairement les causes sociales des désordres observés dans ces zones de relégation. Insistant sur la nécessité de traitement policier de ces questions, elles traduisent l’idée d’une « dangerosité sociale » de ces quartiers et de leurs habitants. D’une certaine manière, les quartiers « en danger » sont devenus des « quartiers dangereux ». Ce calcul politique est très fonctionnel, particulièrement en période électorale, car il vient redonner force au mythe de la souveraineté du politique, battu en brèche en matière économique et financière notamment. Il est faux à moyen et à long terme. La police n’a en effet pas les moyens de juguler la petite délinquance, qui constitue bien souvent l’un des seuls modes de (sur) vie de petits groupes exclus durablement du circuit des échanges productifs. Comme le soulignent les études menées outre-atlantique, rien ne montre que l’augmentation du nombre de policiers sur le terrain ait été responsable du déclin des crimes violents aux Etats-Unis. En revanche, la saturation de la présence policière dans certains quartiers creuse un fossé d’incompréhension entre leurs populations - et notamment les plus jeunes - et les institutions. Elle radicalise et durcit les positions de chacun, ce qu’illustre la multiplication des violences policières illégitimes observées ces derniers mois, à Poissy, Châtenay-Malabry, Saint- Denis, Dammarie-les-Lys ou ailleurs. Cette escalade est socialement catastrophique et moralement inquiétante, sauf à admettre, une fois pour toutes que le creusement des inégalités et l’exclusion de parties sans cesse croissantes de la population ne relèvent que du maintien de l’ordre social, dont la police reste l’un des piliers essentiels. Laurent Bonelli Chercheur en sciences politiques au « Groupe d’analyse politique » de l’Université Paris XNanterre et au Centre d’Etudes sur les Conflits. www.conflits.org International - Dossier MoDuovsesmieernt Immigration - Discriminations 10 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 Les violences scolaires Déconstruire le discours sur les « violences scolaires » ou montrer comment une institution produit un objet est une des façons d’interroger l’école. En effet, les « violences scolaires « sont rentables pour l’institution ; elles vont permettre de légitimer une transformation de l’école en lieu de remédiation sociale et de pénalisation de la misère (les fiches de signalement des incidents sont désormais envoyées au Rectorat, au Commissaire, au Procureur). Les différents plans anti-violence n’ont pas varié. Le flou statistique de la catégorie « violence scolaire » Tout d’abord, elle désigne des phénomènes hétérogènes qui n’ont en commun que de se produire dans l’espace scolaire ; or, estce très différent de ce qui se passe dehors ? D’autre part, même si on ne peut nier que, dans certains établissements, les incidents sont nombreux et difficiles à supporter, on est obligé de remarquer que l’évolution de la « violence à l’école » est une construction politique où entrent désormais des incidents qui en étaient écartés (les « incivilités »), car traités dans le cadre de l’établissement, d’où le gonflement statistique. De plus, ce flou statistique va permettre d’utiliser la catégorie « violences scolaires » de manière contradictoire. Violences à l’école violence de l’école (1) Les plans anti-violence, qui se sont succédé, mettent en avant le recul de l’Autorité « naturelle » des enseignants et des parents pour expliquer la violence à l’école ; elle serait importée des « banlieues » et serait le fait de « sauvageons », donc la collaboration Ferry-Sarkozy apparaît comme une nécessité évidente, la politique sécuritaire tenant lieu de politique éducative. L’impasse est totale sur la relation pédagogique. Une autre analyse, d’apparence plus « progressiste » met en avant la violence de l’école. Les problèmes pédagogiques (B. Charlot), l’opposition croissante entre l’origine sociale des enseignants et des élèves (F. Dubet) alimenteraient la violence scolaire. Témoin, ce jeune normalien de Seine Saint Denis qui quitte le métier car ses élèves en échec scolaire attendent de lui d’être un « flic » pour pouvoir se faire respecter... Or, cette opposition est peu efficace car elle ferme le discours et ne permet pas le questionnement sur les « violences scolaires » de manière fructueuse. Illusion promotionnelle, remédiation sociale L’illusion promotionnelle (80 % d’une classe d’âge au bac, le collège unique, etc.) laisse espérer que l’école est un lieu de promotion sociale. Or les écarts entre groupes sociaux ne diminuent pas ; en fait, la sélection augmente par le biais des filières ; on peut parler des exclus de l’intérieur. De plus, les stratégies de dérogation, d’évitement permettent de rester entre soi, les « autres » étant relégués dans des classes ou établissements poubelles. Ainsi, les jeunes pauvres restent, de plus en plus, dans l’école, mais sans véritable espoir. L’école devient, alors, un lieu de remédiation sociale : l’important n’est pas la transmission des savoirs mais la gestion des populations pauvres (classes relais, dispositifs d’insertion, etc.). Une simple gestion des flux tient lieu de démocratisation, et les jeunes le pressentent... Ainsi, les transformations de l’institution, confrontée à des demandes croissantes, amènent des mesures de remédiation. Elle s’adapte notamment en codifiant et produisant la catégorie « violences scolaires ». Franck Poupeau Chercheur au Centre de sociologie européenne (1) – Franck Poupeau, Sandrine Garcia, « L’enseignement pris en otage, violences à l’école, violence de l’école » in Le monde Diplomatique, octobre 2000. International - Dossier MoDuovsesmieernt Immigration - Discriminations « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 11 Le score du premier tour n’est pas une illusion d’optique Jamais l’extrême droite n’avait recueilli : – autant de voix 5,5 millions (en France métropolitaine Le Pen + Mégret ont eu plus de voix que Chirac) ; – un tel pourcentage exprimé (19,20 %) ; – un tel pourcentage des inscrits (13,41 % au deuxième tour). De 1984, date où il conquiert une audience supérieure à 10 % aux Européennes, à 1999, le FN connaît un gain de voix d’une élection comparable à une autre. Même quand, aux législatives, les scores sont plus faibles (9,65 % en 1988 dans la foulée des 14,39 % de la présidentielle), cela n’indique pas un recul de ce courant dans la société française. La mobilisation entre les deux tours a permis de casser une dynamique. En effet, en tenant compte des résultats du premier tour et à l’aide des projections habituelles, Le Pen pouvait espérer à 25 ou 26 % au deuxième tour. Or il a eu 17,8 %. Le différentiel résulte donc de la mobilisation entre les deux tours Pourquoi ce résultat ? Après la scission du FN en 1999, tout le monde a considéré que le problème de l’extrême droite était réglé. Cependant, lors des européennes de 1999, les 6 % des lepénistes plus les 3 % des mégretistes, frôlaient les 10 %. Malgré le discrédit de ses représentants politiques, l’extrême droite gardait donc une base. Puis les sondages de 2002 en ont montré le regain de vigueur et d’audience. En effet un courant qui réunit entre 10 et 20 % des voix dans un pays sur deux décennies ne régresse pas spontanément. Il a fallu une guerre mondiale pour casser la vague d’extrême droite des années 30. Celle d’aujourd’hui ne pourra régresser sans une vraie contre-offensive politique. Les deux piliers électoraux de l’extrême droite � Les couches moyennes traditionnelles, � Un courant populaire de la classe ouvrière, victime de la mondialisation libérale. L’habileté de l’extrême droite consiste à « rabattre » les inquiétudes que l’on peut résumer par : « Nos enfants et nos neveux auront- ils une vie plus confortable que la nôtre ? », sur l’insécurité du voisinage. Puis à fabriquer un coupable unique : l’immigration. Et enfin à livrer une solution « clé en mains » : mettre dehors la totalité de cette population en fonction de la couleur de sa peau. Paradoxalement, le succès de Le Pen est moins imputable à l’extrême droite ellemême, qu’à l’effondrement du PS. En effet l’appareil du FN reste anémique et se réduit localement parfois à ses élus. Le Pen voudrait regagner ses 42 000 militants d’avant la scission, au cours de laquelle les relais militants du parti se sont effondrés. Le FN est ainsi le premier parti de l’électorat ouvrier, mais sans y disposer de relais militants. Dans le même temps le MNR implose. Où en est le FN ? Aujourd’hui,la contradiction se résume ainsi : – 5 500 000 électeurs (Force) ; – peu de militants (Faiblesse) ; – pénurie de cadres, partis au MNR ; – processus de radicalisation idéologique et politique. La promotion de Marine, la fille du chef, reflète la volonté de casser l’image du FN liée aux prêtres en soutane et aux portraits de Pétain. Et de faire passer l’idée qu’on peut rejoindre l’extrême droite en écoutant n’importe quelle musique, en étant pour l’avortement et la contraception. Il s’agit donc Enquête sur la droite extrême International - Dossier MoDuovsesmieernt Immigration - Discriminations De gauche à droite : Renée Le Mignot, Monique Lelouche, Jean-Claude Dulieu, Mouloud Aounit. 12 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 d’un phénomène politique de modernisation du parti. Cela permettrait de renforcer ses liens avec les couches populaires parmi les plus déchristianisées, et de gagner de nouveaux soutiens parmi la jeunesse ou les femmes. La crise du MNR Le MNR, lui, avait convaincu les militants mais pas les électeurs. Il était basé sur des cadres forts d’un un enracinement local. Mais, sans l’adoubement de Le Pen, ils n’ont pas su le conserver, sauf exception comme à Marignane, Vitrolles où Mulhouse. Mais Mégret s’est ingénié à cloner Le Pen, sans charisme. Aussi l’électorat préfère-t-il l’original à la copie. De plus Mégret a commis des erreurs tactiques après le 11 septembre, lui aliénant ses cadres anti-américains, enfin le MNR a perdu Vitrolles. L’avenir du MNR est sombre. D’autant que le MNR a une assise plus bourgeoise que le FN. Les élus s’autonomisent. Ils rejoignent, comme en Alsace, des régionalistes, créent des groupes « identitaires » locaux en Normandie, Champagne, Languedoc. Début Novembre, un millier de cadres du MNR se sont retrouvés, pour créer un pôle militant « identitaire » à côté du FN, mettant au centre de leur combat les questions ethniques, raciales. Sur le plan électoral les anciens cadres du FN passés par le MNR pourraient, comme Pierre Vial à Villeurbanne, réactiver la formule du « Renouveau national ». Ils bénéficieraient du label « Le Pen » sans être membres du parti. Ces anciens cadres du MNR, bien implantés, pourraient donc servir d’appoint au FN. La radicalisation idéologique se manifeste par la floraison de publications étayant une vision du monde qui donne la prééminence au facteur racial. Des maisons d’éditions et des librairies, qui insèrent fréquemment des publicités dans National Hebdo : « L’âme des races » de Ludwig Ferdinand Clauss qui fut un classique de la raciologie national socialiste, « Synthèse de doctrine de la race » du fasciste italien Julius Evola, « Le déclin de la grande race » de l’américain Madison Grant etc. A ceci, s’ajoute un courant catholique intégriste qui réédite des ouvrages des années 30 rappelant le Protocole des sages de Sion : « Le Crime rituel chez les Juifs », « La Situation actuelle au Proche orient, vers la réalisation d’une prophétie sioniste de 1898 ». En conclusion, un(e) électeur (trice) sur cinq a fait confiance au FN, mais n’ose le plus souvent pas dire qu’il (elle) soutient l’extrême droite, et ne s’assume pas politiquement. Comment mener une contre-offensive politique en direction de gens qui ne sont pas visibles ? Il y a forcément dans vos familles, votre voisinage, votre entreprise, parmi les clients de votre boulangerie, des gens qui ont voté Le Pen. Débat avec la salle (extraits) « Comment concevez-vous la lutte contre l’extrême droite ? » La Sécurité est un problème important, et pour les électeurs de Le Pen, et pour les autres. L’insécurisation concerne le travail, à la peur d’être au chômage, d’avoir un problème avec la banque... La question des retraites renforce un sentiment d’insécurité collective, alors que leur caractère de solidarité institutionnalisée est remis en cause.. Le « responsable » n’est pas l’immigration, mais l’idéologie libérale détruisant les piliers de l’Etat providence. Par ailleurs l’insécurité a été vendue par les chaînes de télé, ce qui a fait le jeu de l’extrême droite. En attaquant de front les acquis sociaux, le FN veut accroître l’insécurité réelle, exacerber les problèmes, en allant vers une société à l’américaine précipitant la « guerre ethnique ». Le discours « mezzo voce » de la gauche sur la sécurité a été une faute lourde. Il aurait fallu dire « Parlons-en », mais au fond. Il ne fallait pas se taire. Quelqu’un qui s’est fait agresser n’est pas victime d’un « sentiment » d’insécurité. L’extrême droite a eu le monopole d’une explication globale de l’insécurité. La gauche devait se présenter comme une force de résistance à l’évolution libérale, qui génère une insécurisation globale et détruit les solidarités existantes et ne pas se limiter à proposer du « sécuritaire » repeint en rose. Car le 21 avril c’est Le Pen qui a raflé la mise et aujourd’hui Sarkozy. Les questions d’insécurité constituent un domaine potentiel de mobilisation citoyenne : traité par la mobilisation des habitants (Samira voudrait, comme Marie-Claire rentrer tranquillement le soir, et ne pas avoir sa boîte à lettres cassée...), et non rester dans la grille d’interprétation de l’extrême droite avec la « pétition contre les Arabes » Débat sur les tournantes, mais aussi sur le discours de revues avec « femme objet sexuel »... Question autour du « Choc des civilisations ». Accepter ce cadre d’analyse revient à accepter une régression majeure. Une attaque frontale contre les valeurs républicaines se déroule à l’échelle du globe, en Europe, en Amérique, en Israël, en Palestine, avec les courants intégristes du Djihad islamique et du Hamas. Il faut reformuler ces valeurs de base face aux menaces de régression (défense d’un Etat sur base ethnique), alors que nous vivons une période historique de mutation conflictuelle. René Monzat Journaliste, auteur notamment de « Enquêtes sur la droite extrême » et collaborateur de Ras l’Front. Bibliographie : – « Ces Français qui votent Le Pen » Nonna Mayer, Flammarion. – « Une autre France » d’Hervé Le Bras, Odile Jacob. International - Dossier MoDuovsesmieernt Immigration - Discriminations « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 13 Après le choc du 21 avril, beaucoup d'organisations, de chercheurs, de citoyens se posent des questions. En effet, sans réduire bien évidemment le score du front national à un certain échec de nos combats, force est de constater que l'idéologie de l'extrême droite s'est banalisée pour bon nombre d'électeurs ou d'abstentionnistes. Cette idéologie raciste, xénophobe, nationaliste, machiste s'implante. Il est donc nécessaire de s'interroger sur la pédagogie de l'antiracisme. Cette réflexion est également menée dans le cadre du comité de pilotage de la semaine d'éducation contre le racisme (un débat a eu lieu, sur ce sujet, le 20 novembre 2002 au salon de l'éducation). En effet, le racisme prend de nouvelles formes à chaque moment de l'histoire. Il nous faut mieux le connaître pour le combattre avec efficacité. De manière générale faut-il utiliser une démarche de " style républicain " où l'on ne reconnaît dans l'espace public, par exemple à l'école, que des élèves, et dans la société, que des citoyens sans particularisme, selon les principes universalistes ? Ce fut la base de l'intégration voire de l'assimilation des enfants d'immigrés italiens, polonais... Actuellement, l'exaltation du rôle de l'individu d'un côté et la nécessité de politiques publiques ciblées d'un autre, rendent plus difficile cette méthode. - L'approche morale permet, elle, de mettre en évidence une référence à un système de valeurs, de fixer des interdits. Elle est très décriée actuellement comme sans nuance et peut pousser au repli. Elle est culpabilisante et peut être ressentie comme excluant. Cela montrerait les limites de l'antiracisme, selon certains. - Une pédagogie davantage basée sur la science prouvera par contre, à l'aide de la génétique par exemple, que les racistes se trompent. - Enfin, l'éducation à la citoyenneté, pour d'autres, semble l'approche la plus fructueuse, car elle permet de mettre en avant que le racisme est hors-la-loi, en étudiant les droits de l'Homme, la Loi, base de la démocratie, dans le cadre de l'éducation civique, mais aussi à partir des situations concrètes auxquelles les jeunes se trouvent confrontés (police, justice). Le questionnement De manière plus spécifique, de nombreuses questions se posent. Faut-il adopter une démarche positive, éduquer au non racisme plutôt que " contre le racisme ", lutter contre le racisme et/ou éduquer à la citoyenneté, ce qui laisserait supposer que l'éducation s'opère dans un monde sans tension ce qui est lourd de présupposés idéologiques ? Ou alors serionsnous amenés à fondre les discriminations racistes dans l'ensemble des discriminations ? Devrons-nous abandonner le terrain de l'antiracisme idéologique pour celui des discriminations racistes et s'adresser aux auteurs d'actes racistes et non plus seulement aux victimes ? Bien évidemment, toutes ces questions ne pourront être analysées dans le cadre de cet article qui a pour but non d'être exhaustif mais d'ouvrir le débat. Pour cela, dresser un état des lieux de nos principales pratiques, tout en les questionnant, peut alimenter la réflexion. Tout d'abord, la lutte contre le racisme repose sur de nombreux présupposés. En effet, le racisme, traditionnellement, est une doctrine, une idéologie qui a comme point de départ l'affirmation d'une prétendue existence de races, inégales naturellement et hiérarchisées, système d'interprétation du monde (ce qui a légitimé la colonisation entre autres). Mais des évolutions ont eu lieu dans cette doctrine, battue en brèche par la fin du nazisme, la décolonisation et les progrès de la génétique. En effet, les idéologues de l'extrême droite, sans toutefois abandonner leur premier terrain de prédilection vont peu à peu mettre en avant de prétendues différences culturelles irréductibles
- vu l'arrivée massive de travailleurs
immigrés à partir de 1960 en France, l'identité culturelle devient une obsession, le slogan " La France aux Français " puis l'exaltation de la préférence nationale viennent au premier plan. Ce néo-racisme a l'intérêt d'être plus " présentable ", si l'on peut dire. Dans ce contexte, comment alors se positionner dans la pédagogie de l'antiracisme ? Comment se situer par rapport aux cultures différentes ? L'interculturel Nous avons toujours beaucoup pratiqué les actions culturelles, artistiques, conviviales, sportives qui montrent la richesse des autres cultures, adoptant ainsi une démarche positive, et, par là, valorisant l'Autre. Toutefois, le développement de certaines formes de racisme actuel nous amène à nous poser des questions. En effet, des critiques se sont élevées contre un certain " culturalisme " qui, avec la meilleure volonté antiraciste, exprimerait la culpabilité des élites (!). L'apologie de la différence culturelle pourrait aller jusqu'à la stigmatisation, et, par là même alimenter des dérives " communautaires ". D'ailleurs, pour les minorités, la revendication de la différence culturelle n'est pas forcément prioritaire. D'autre part, cette exaltation de la différence culturelle pourrait aller jusqu'au mépris pour ceux qui ne sont pas " différents " (!), alimentant, via le sentiment de victimisation, un racisme " de petit blanc " et le vote extrême droite. Bref, ces pratiques pourraient avoir un effet boomerang et développer elles-mêmes le racisme tous azimuts, d'autant plus que le Front National essentialise les différences, les fait passer pour irréductibles, naturelles. Au-delà de ces outrances, l'approche sociologique multiculturaliste essaie une voie moyenne entre le risque de l'enfermement des minorités et leur assimilation pure et simple, perte de leur identité, en tentant un équilibre entre particularisme culturel, respect de la différence et en même temps des droits et devoirs ainsi que des valeurs universelles. Nous, nous parlerons plutôt d'interculturel, c’està- dire du mélange des cultures qui permet le métissage, ferment de riches évolutions pour une société. D'autre part, pour casser la logique en quelque sorte totalitaire du racisme, nous nous plaçons sur d'autres terrains que celui de l'idéologie. Déconstruire les stéréotypes Notre expertise est déjà riche. Pédagogie de la prévention, cette action repose sur la sensibilisation à partir de l'information et de la construction de repères. Une réflexion critique permet alors de cerner les préjugés (transformation d'un cas particulier en généralité), de déconstruire les stéréotypes (représentations collectives, constructions sociales, qui font passer pour naturel ce qui est culturel). Toutes ces interventions partent de situations concrètes, parfois de tensions fortes. L'intérêt de cette démarche est de favoriser la prise de conscience et l'analyse des causes des stéréotypes, par exemple suivre la norme Débat : L'éducation contre le racisme Débat à Roubaix (Nord) International - Dossier MEoduuvceamtieont Immigration - Discriminations 14 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 peut être rassurant, la méconnaissance de la culture de l'Autre, l'imbrication de l'Histoire individuelle et collective dans l'inconscient. Toutes ces actions, nous les menons à tout moment et partout. En effet, même si le milieu scolaire reste notre terrain d'action privilégié, nous intervenons aussi dans des foyers de jeunes travailleurs, centres sociaux, maisons de jeunes, centres de loisirs, etc. Notre dernière motion de Congrès insiste sur le développement de l'action envers les jeunes dans des établissements difficiles, dans des quartiers défavorisés. D'autre part, nous sommes amenés à participer à la formation des formateurs. Nous souhaitons développer des actions vers les IUFM. Les terrains de l'Histoire Une autre manière de procéder est de se placer sur le terrain de l'Histoire. Montrer des Histoires différentes, même si elles sont difficiles est particulièrement productif dans les classes où sont scolarisés des enfants d'origines très diverses ; cela est profitable à tous, sans exacerber la culpabilité ni un certain misérabilisme. Si, dans les programmes scolaires, on note beaucoup d'insuffisances sur l'Histoire des immigrations, notamment les retombées des guerres coloniales (exemple : le 17 octobre 1961), de nombreux enseignants traitent de questions touchant le racisme. Notre rôle peut être différent, complémentaire. Lors des interventions dans un autre contexte que la classe, nous pouvons susciter la réflexion, par exemple en permettant aux familles venant de l'immigration de s'exprimer sous forme de témoignages écrits ou oraux. Cette libération de la parole, en objectivant une Histoire souvent difficile, soulage les jeunes en montrant leur place dans la société française, à part entière, et informe tous de la richesse de l'- Histoire commune même difficile. Ainsi apparaîtrait la complexité des phénomènes migratoires et dans le temps et dans l'espace ; les jeunes verraient alors que la France a toujours été un pays de migration, qu'elle est plurielle, que c'est là sa richesse, à mettre en perspective avec l'histoire européenne et mondiale. Il est également important qu'ils comprennent que cette histoire n'est pas linéaire, mais faite de déchirures, d'exploitations, mais aussi de luttes, de solidarités qui ont permis un peu plus de droits et d'égalité dans les pays démocratiques, du moins à certains moments ! Par ce biais, on pourrait peut-être comprendre davantage la construction du mythe du " choc des civilisations ", issu d'un autre âge. Partir des discriminations, c'està- dire du " racisme en actes " permet également de casser le discours raciste en se mettant sur un tout autre plan, celui de la réalité de la vie quotidienne, dans tous les domaines, mais particulièrement dans l'emploi, le logement, les loisirs, la consommation. Les jeunes sont particulièrement sensibles à cette démarche, par exemple, par rapport aux problèmes de discrimination qui surgissent dans l'accès aux stages en entreprise pour valider leur cursus scolaire ou universitaire, ou dans les loisirs. A qui s'adresser ? Enfin, une autre question se pose, une véritable révolution s'opère chez les antiracistes, y compris dans le MRAP. En effet, habitués à entendre et défendre les victimes du racisme, nous nous demandons si, sans toutefois renier notre première démarche, il ne faudrait pas s'adresser aux publics réceptifs aux messages racistes, voire aux " gens des quartiers à fort vote front national " (une action commune commission éducation/ commission extrême droite se met en place). L'intérêt de cette pratique est de mieux comprendre les motivations, les ressorts des personnes sensibles au discours raciste et de leur opposer des arguments afin de les convaincre, sans propos moralisateurs, ni jugements de valeur. Ainsi, on suppose qu'ils ont leurs " raisons ", qu'il faut les " comprendre "; par là même les responsabilités seraient en quelque sorte partagées entre les victimes et auteurs de racisme (ne soyons pas " angéliques "...)
- en conséquence, la victime développerait
un " racisme à l'envers " et l'auteur, se sentant stigmatisé et subissant, selon lui, une sorte de harcèlement venant des immigrés, serait amené à voter FN... Tout ceci n'est pas sans poser de questions. En effet, n'émettre aucun jugement laisse supposer que ces personnes sensibles au discours raciste pouvant mener au vote FN n'ont aucune once de liberté, qu'elles sont totalement dominées par les difficultés de la vie quotidienne, le peu d'espoir, sur fond de dépolitisation galopante. C'est également oublier que le racisme et le vote FN existent aussi dans d'autres couches de la population ! D'autre part, dans la spirale infernale (victime et auteur partageant des responsabilités) le racisme serait amené à être banalisé, relativisé. Enfin, peut-on convaincre individuellement des personnes sensibles au discours raciste par des arguments ? L'action, sur ce terrain, n'est-elle pas avant tout politique ? Ainsi, lutter contre le racisme est complexe et demande beaucoup de subtilité et d'analyse. Il n'existe pas de bonnes ou mauvaises méthodes, mais des situations complexes, parfois des tensions qui peuvent être dramatiques, et que nous devons aborder avec toutes les méthodes, tous les outils, en en connaissant les limites. Les tendances actuelles qui émergent sont multiples parfois contradictoires, en apparence du moins. La pédagogie antiraciste que nous pratiquons se veut, avant tout, concrète à partir de la déconstruction des stéréotypes, mais aussi de l'analyse des discriminations, ce qui permet de mettre en évidence la Loi, exercice qui n'est pas toujours facile auprès des jeunes. Elle reste aussi très positive en montrant que les différentes cultures participent à l'enrichissement de tous et inversement, dans une société en mouvement où l'intégration (et non l'assimilation !) dans le respect des valeurs fondamentales, mène au métissage, une des clés de l'évolution démocratique. D'autre part, nous souhaitons élargir les publics concernés (sans pour autant négliger les anciens) : les jeunes en difficulté, les personnes perméables au discours raciste, voire électeurs du FN. Toutefois, la tentative pour dissoudre l'éducation contre le racisme dans l'éducation à la citoyenneté, aux droits de l'Homme, et la discrimination raciste dans l'ensemble des discriminations ne semble pas aller dans le bon sens. En effet, racisme et discrimination raciste sont spécifiques et peuvent permettre précisément d'interroger, en inter-activité, la société pour la faire évoluer vers plus d'égalité. Le débat est ouvert... Monique Lellouche Quelques lectures : Claude Liauzu, " Eduquer contre le racisme " in Les idées en mouvement, HS n°3 mars 2001. Différences n° spécial 234/235. Michel Wieviorka, " Le multiculturalisme en débat ", La Découverte/poche Pierre Tévanian, " Le racisme républicain ", L'esprit frappeur M. Fourier & G. Vermes, " Ethnicisation des rapports sociaux ", L'Harmattan J.P. Tauvel, " Sortir de l'incantation rituelle
- l'antiracisme à l'école ", Migrants-
formation n°109 Gilles Verbunt, " La société interculturelle ", Ed. Le seuil 15 décembre: Roubaix (Nord) : inauguration par J.-C. Dulieu et P. Mairat de l’exposition « du préjugé aux discriminations «. International - Dossier MEoduuvceamtieont Immigration - Discriminations « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 15 Différences : Quel bilan tirez-vous des dispositifs de lutte contre les discriminations mis en place à ce jour ? N. BOUBAKER : Je voudrais, en préalable, préciser que ces propos sont tenus à titre personnel. Ils n'engagent donc pas le Fasild. Je dirais tout d'abord que le gouvernement précédent, s'il a beaucoup fait pour la reconnaissance publique d'un problème largement occulté, n'a pas su trouver les solutions efficaces contre un phénomène qui met à mal le principe d'égalité et fragilise profondément le contrat social. Au regard d'un tel enjeu, les dispositifs mis en place sont d'autant plus insuffisants, que, comme l'a déclaré le ministre des Affaires sociales et de nombreux acteurs de la vie sociale, " ils ne fonctionnent pas ". D'abord, parce que le Geld n'est pas réellement indépendant. Il n'a pas pu s'imposer dans le paysage. Il a malheureusement peu produit et ses notes ne sont pas suivies d'effet (cf notes sur les emplois fermés aux étrangers ou sur le logement). Ensuite, les dispositifs 114- Codac n'ont pas permis de franchir le cap qualitatif espéré dans le traitement des plaintes ou la prise en compte de la parole des victimes. Conçus à l'origine, séparément et même, en partie, de façon concurrentielle, ils n'ont pu jouer le rôle attendu d'eux, sauf dans quelques rares départements. Un rapport très lucide et sévère de l'IGAS n'a pas suffisamment attiré l'attention des pouvoirs publics et n'a, malheureusement, été suivi que de peu d'effets correcteurs. Une question m'a toujours préoccupé. Si la question des discriminations, est d'abord celle de l'égalité réelle de traitement et celle de l'effectivité du droit, c'est avant tout l'affaire de l'Etat, des pouvoirs publics, des institutions. Pourquoi alors faire appel aussi largement aux associations, lesquelles ont accepté, sans trop de critiques, l'externalisation de cette charge, MRAP compris ? N'est-ce pas à l'Etat de faire respecter le droit ? N'est-ce pas ce qui se passe avec la délinquance et l'insécurité, par exemple, ou la lutte contre la pédophilie ? Tout se passe comme si la discrimination était d'une autre nature, comme s'il fallait être prudent, ne pas choquer, ni trop contrarier les discriminants. D : Que proposez-vous alors pour lutter efficacement contre les discriminations ? N.B. Je n'ai pas la prétention de connaître les remèdes. Il me semble toutefois, que face à un phénomène décrit comme systémique et mettant en cause la société tout entière, il faut articuler les réponses. Celles-ci doivent être systémiques aussi et globales. Tout d'abord, je suis persuadé qu'il ne saurait y avoir d'action politique efficace sans un recours sans complaisance à la loi pour créer un électrochoc, envoyer des messages sans équivoque, redéfinir les limites et mettre enfin un terme à l'impunité qui perdure. Je le regrette, mais je crois à la vertu de quelques procès exemplaires, bien médiatisés. Il me semble, ensuite qu'il faut, comme le Fasild tente de le faire, d'engager un travail systématique, de longue haleine et non moins complaisant sur les mentalités, pour tenter de modifier les comportements et les représentations. Il faut traquer, là où ils se nichent, pour essayer de les neutraliser, les stéréotypes dont l'usage commun échappe le plus souvent à la claire conscience. Un travail d'éducation systématique, de formation et d'information s'impose comme une nécessité, d'autant qu'il n'est pas toujours facile de distinguer la frontière entre le stéréotype et le préjugé raciste. Tout cela est le plus souvent inconscient, les discriminations sont alors indirectes, non-intentionnelles, mais elles ont sur les victimes le même effet. Je suis persuadé que la croyance en l'inégalité de la valeur des personnes selon leur sexe, par exemple, ou leur origine est une idéologie bien plus répandue qu'on ne le croit. Je pense que c'est cette croyance qui permet d'expliquer la banalisation des pratiques discriminatoires et l'impunité qui les caractérisent mystérieusement. Il faut rendre illégitime et hors la loi cette " croyance " là. D : Que pensez-vous de la création d'une autorité administrative indépendante proposée par le gouvernement ? N.B. Le Fasild y a, constamment été favorable. J'espère sincèrement qu'elle va se mettre en place. Je regrette qu'on ait perdu plusieurs années depuis le rapport Belorgey qui l'a préconisée. Je crois surtout qu'il faut qu'elle soit vraiment indépendante et qu'elle jouisse d'une grande liberté d'action. Cela implique qu'elle soit présidée par une personnalité à l'autorité et la compétence reconnues, qu'elle dispose de moyens conséquents. Il me semble vital entre autre, qu'elle dispose aussi d'un pouvoir préjuridictionnel, seul susceptible d'assurer en l'état, l'instruction des plaintes. Il faudrait également qu'elle soit, à l'instar de la Belgique ou de la Grande- Bretagne, dotée d'un véritable pouvoir d'investigation dans les entreprises et les services publics, par exemple. " A chacun son couplet " 1) En effet, n'est ce pas Sarkozy qui annonce pour le début de l'année nouvelle le débat sur " sa loi " sur l'immigration. Cette loi devrait comprendre quatre grands blocs : - La maîtrise des flux migratoires avec le renforcement des contrôles aux frontières et la création de nouveaux outils juridiques pour lutter contre l'immigration clandestine et les filières. - La lutte contre les fraudes à l'immigration (état civil, mariages de complaisance...)- L'adaptation de la législation sur les reconduites aux frontières - la définition de la nationalité (condition d'attribution et de retrait). En un mot accueillir la population étrangère dont la France a économiquement besoin avec la mise en place d'une politique de Quotas (sans en lui donner le nom). 2) La réforme du Droit d'asile promise par J. Chirac est en cours d'élaboration. Celle-ci devrait comprendre la fusion du droit d'asile politique et du droit d'asile territorial avec un guichet unique l'OFPRA. 3) N'est ce pas Raffarin qui annonça lors de l'installation du Haut Conseil à l'Intégration que son gouvernement présentera un programme pour l'intégration des immigrés et des " enfants de l'immigration ", incluant un " contrat d'accueil ". 4)Enfin, F. Fillon résumant ainsi les futures orientations gouvernementales
- " notre politique
comporte 4 volets : l'accueil des étrangers en situation régulière, la mise en place du contrat d'intégration, la naturalisation et une lutte contre les discriminations avec la mise en place d'une haute autorité indépendante ". Afin d'élaborer en Janvier des propositions offensives sur l'ensemble de ces questionnements, notre mouvement a engagé courant décembre un certain nombre d'audits auprès de militants et de personnalités pleinement engagées dans ces combats des Droits de l'Homme. C'est dans cet esprit que nous avons rencontré N. BOUBAKER (directeur chargé de la formation et de l'emploi au Fasild). Nous vous communiquons le contenu de notre entretien. Il s'exprime à titre personnel. JC Dulieu Le premier trimestre 2003 est prometteur de débats sur l’immigration et sur les discriminations raciales. International - Dossier MDisocurimveinmateionnts Immigration - Discriminations Interview : 16 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 Le MRAP était présent à Tokyo du 21 au 24 novembre 2002 aux réunions et colloques du Mouvement International contre toutes les formes de discrimination et de racisme (International Movement Against all forms of Discrimination and Racism - IMADR). L'Histoire : le 3 mars 1922 était proclamée au Japon par l' " Association des Niveleurs " la " SUIHEISHA ", Déclaration solennelle des TOKUSHU BURAKUMIN (" gens d'une communauté spéciale "), affirmant à la fois leur détermination à mener leurs propres luttes pour en finir avec un système de " profanation de la dignité humaine " fondé sur la naissance et les métiers, et leur fierté d'être des ETA, c’està- dire un " monceau de saleté ", terme courant à l'époque EDO (1.603-1867) et au delà, pour assigner aux Burakumin un statut inférieur. Ils affirmaient trois principes : la lutte des personnes concernées pour leur propre libération, l'exigence d'égalité face au travail et l'aspiration à la " plus haute perfection de l'Humanité ". C'est à leur initiative que fut fondé l'IMADR en 1988. Le Mouvement, qui a le statut consultatif auprès des Nations Unies et dispose d'un Bureau à Genève, s'est depuis lors étendu à l'Asie, l'Amérique du Nord, l'Amérique Latine et l'Europe, tandis que de nouveaux contacts sont établis avec l'Afrique pour intensifier la coopération Sud - Sud. Le MRAP à Tokyo : membre de l'IMADR et de son conseil d'administration presque depuis sa fondation, le MRAP y est actuellement représenté par son Secrétaire Général ex oficio, assisté par un suppléant. La récente réunion de Tokyo a vu l'élection de Mouloud AOUNIT à l'une des Vice-Présidences mondiales, ce qui exprime bien l'attente actuelle d'une implication forte du MRAP dans la vie du Mouvement. Les domaines d'action sur lesquels le MRAP a pris un engagement spécifique sont les discriminations subies par les Rroms, Sintis, Tsiganes, Gitanos... aussi bien sédentarisés que voyageurs en Europe ; le racisme et les discriminations à l'encontre des réfugié(e)s et migrant(e)s ; les discriminations dans le domaine de la Justice pénale. Se remettre à l'échelle du Monde : les causes qui nous mobilisent au quotidien, en France et en Europe, exigent tant d'investissement qu'il nous est difficile de penser celles qui sont les plus prégnantes ailleurs. Si participer à un Réseau mondial a un sens, c'est bien de nous permettre de (re) devenir citoyens du Monde. Les réunions de l'IMADR ont été l'occasion de s'ouvrir collectivement aux souffrances et aux espoirs de tous : " Dalits", " enfants de Dieu " pour Gandhi mais, dans leurs sociétés, " caste inférieure ", assignés aux " tâches impures ", parfois décrétés " intouchables ", toujours violentés (violées lorsque ce sont des femmes), souvent assassiné( e) s en Inde, au Sri Lanka, au Népal... et parfois dans les pays d'émigration ; Peuples autochtones de toute l'Amérique, dépouillés de leurs terres ; femmes et enfants d'Asie et d'Afrique, objets de traite humaine ; " castes " et esclaves occultés ou déniés du continent africain ; " minorités " rejetées d'Europe et d'ailleurs... Les Nations Unies : dans leur lutte pour la dignité et l'égalité, l'ensemble des victimes et ceux qui les soutiennent doivent s'appuyer sur les conventions de l'ONU, en particulier celle sur l'élimination de toutes les formes de racisme et de discrimination dont le Comité ICERD assure la surveillance mondiale (possibilité de contre-rapports par les ONG). Pour tous, la conférence de Durban 2001 a marqué un jalon vers la reconnaissance. Bernadette HETIER Secrétaire nationale MRAP représentante du MRAP à Tokyo Travailler en réseau avec l’IMADR : une chance pour le MRAP International - Dossier MImomuvigermateinotn Immigration - Discriminations « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 17 Burnad Fatima NATESON (Tamil-Nadu, Inde), membre du conseil d'administration de l'IMADR, et l'une des chevilles ouvrières du Comité asiatique de l'organisation, se désole que le " progrès scientifique et technique magique " de la modernité n'ait pas eu son pendant dans la lutte contre les discriminations liées aux castes. " Je subis aujourd'hui des discriminations à cause de mon père, de mon grand-père et de tous mes aïeux ". On compte en Inde 165 millions de Dalits (plus quelque 250 millions dans le sud-est asiatique). L'- hindouisme, majoritaire à 85 %, en est la cause. La caste supérieure des Brahmin est " pure " tandis que les Dalits ne peuvent entrer dans un temple car ils sont " impurs ", relégués aux tâches de fouilleurs d'ordures, nettoyeurs de caniveaux, balayeurs de rues et de routes, ramasseurs d'excréments et, pour les femmes, des résidus biologiques de l'accouchement... " Nous vivons dans une zone séparée du village où il n'y a ni sanitaires, ni eau, ni électricité ". L'éducation étant privatisée et payante, " 90 % des enfants contraints au travail sont Dalit. Ils doivent s'occuper d'animaux. Sans éducation, quel avenir ? ". Surtout les filles qui abandonnent de plus en plus l'école par manque de classes, pour s'occuper des petits ou pour des travaux dangereux dans les ateliers de pétards ou d'allumettes. Les cordonniers ont coutume de vouer leurs filles à la déesse Mathamma, censée guérir les malades en son temple. Lorsqu'une fillette est effectivement guérie, elle est unie par " mariage " à la déesse, en porte le nom et passera le reste de sa vie comme " danseuse " au service du temple, soumise au harcèlement sexuel et à l'exploitation des hommes. Mères abandonnées, sans famille ni sécurité, beaucoup finissent victimes du " commerce du sexe " et du SIDA. Les femmes Dalit - 16,3 % de la population totale - vivent pour 18 % dans les zones rurales et 76 % d'entre elles sont analphabètes. Parce qu' " intouchables ", les femmes DALIT n'ont pas le droit d'accéder au robinet du réservoir public. Pauvres, mal payées, elles doivent parcourir des kilomètres à la recherche d'eau, de fourrage pour les animaux, de combustible. Elles travaillent dur à la maison et à moins d'un dollar par jour pour un grand propriétaire. Elles nettoient les étables, travaillent dans les champs traités aux pesticides, mais aussi sur les chantiers de construction, dans les fours à briques, servent de cobayes dans les essais de contrôle des naissances... Elles subissent de plein fouet la mondialisation qui les laisse sans travail et sans terre, de par la mécanisation et les cultures de rente. La mortalité infantile s'élève à 90 pour 100 000. Les femmes Dalit sont exclues de tout pouvoir. Pourtant, le 73ème amendement à la Constitution indienne leur permet de se faire élire au niveau local. Si elles le sont, elles ne peuvent exercer leurs prérogatives. Une Dalit présidente de conseil municipal a pu être assassinée en plein jour, une autre destituée pour avoir célébré un mariage inter-caste, une autre encore violée pour s'être opposée à un mariage d'enfant dans son village... " Les femmes Dalit sont militantes et puissantes ! Elles se battent pour arracher le pouvoir politique au sein même du système de castes ". Elles ne veulent rien moins que l'application des lois existante sous la responsabilité de l'Etat, un véritable programme d'émancipation des femmes par le travail et l'octroi de parcelles agricoles, l'accès à l'éducation, à la santé et à l'ensemble des droits fondamentaux. International - Dossier MImomuvigermateinotn Immigration - Discriminations Une responsable d'organisation de femmes Dalit prend la parole ! De gauche à droite : Catherine Cadou (France), sous-secrétaire général de l’IMRAD ; Burnad Fatima Nateson (Tamil- Nadu, Inde), conseil d’administration de l’IMRAD ; Nimalka Fernando (Sri Lanka), présidente de l’IMRAD; Bernadette Hetier (France), MRAP. 18 « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no245 - Janvier 2003 REFUGIES Sangatte : une fermeture qui laisse intacts les problèmes de fond mais démontre une volonté politique Le centre de Sangatte (ouvert en 09-1999, 25 000 m2, géré par la Croix-Rouge sur financement DPM, fermé le 16-12-02) a accueilli environ 70 000 réfugiés en 3 ans (les plus nombreux : Kurdes d'Irak à 27 % et Tadjiks d'Afghanistan à 25 %). Les motifs de départ (voir Smaïn Laacher, " Après SANGATTE... ", Ed. LA DISPUTE) sont, à 39, 4 % la guerre (Tadjiks) et à 34, 2 % les persécutions personnelles (Kurdes irakiens). Sangatte fermé fait ressortir les contradictions et hypocrisies des politiques Française et Européenne d'immigration et d'asile. Le RU autorise une " entrée exceptionnelle " de " travailleurs " (permis de travail de 4 ans renouvelable), sans statut de réfugié...pour fermer la porte aux anciens de Sangatte. La France accepte l'accueil, avec un titre de travail, de " ceux qui restent " mais... examinera les demandes d'asile. (Presque) escamoté le droit d'asile, la convention de Dublin ne pose plus problème. L'accord miraculeux ne touche qu'environ 1 500 des quelque 70 000 personnes passées par Sangatte. Restent inchangés les problèmes de Dublin, de taux d'accord du statut de réfugié, de conditions d'accueil et de causes de départ. En 2003 : peser collectivement sur la réforme annoncée du droit d'asile en France (délais de traitement, conditions d'accueil, asile territorial...) et sur l'harmonisation Européenne en matière de procédures, de conditions d'accueil et de statut de réfugié. Rroms migrants et réfugiés : vers une reconnaissance comme " Peuple d'Europe " ? Le projet de loi sur la sécurité intérieure (débattu à l'assemblée nationale à partir du 14-01-03) et les opérations coup de poing sur des campements du Val de Marne en décembre dernier, ont rendu un peu plus visible la situation inhumaine en France des groupes de Rroms d'Europe de l'est. Installés sur le sol Européen qu'ils parcourent depuis des siècles, plus récemment sédentarisés dans certains pays, les Rroms fuient les persécutions et discriminations qui les vouent à la misère. Ne devraient-ils être reconnus partie prenante de l'identité européenne, comme le réclame Günter GRASS, et voir leurs députés siéger au Parlement Européen ? En 2003 : transformer l'idée en utopie pour l'action, pour animer les luttes à venir. SANS PAPIERS « Nous ne rentrerons pas dans la clandestinité » De l'occupation de la Basilique de Saint-Denis à celle de la Salle Saint- Bruno (30-12-02) Pas de pause dans les mobilisations au passage à 2003 : une Lettre au Président de la République revendiquant une audience et un audit de situation, " la libération et la régularisation des Sans Papiers en prison pour séjour irrégulier,...la régularisation globale des Sans Papiers...et un large débat pour la définition d'une politique progressiste de l'immigration ". La Coordination Nationale a orchestré pour plus de visibilité trois occupations d'églises à Paris (la Madeleine sans succès, Sainte Marguerite vite évacuée et, face à l'église " historique " de Saint-Bernard, la salle Saint- Bruno d'où les près de 200 sans papiers, avant d'être évacués, ont annoncé leur rejet de la circulaire Sarkozy du 19-12-02 et obtenu un rendez-vous avec Daniel CANEPA (Dr adjoint de cabinet du ministre) pour le lundi 6-01-03. Le discours du ministre de l'Intérieur aux préfets du 21-11-02 le ministre annonce, outre une circulaire sur les demandes de titres de séjour, des mesures législatives pour porter remède à la " double peine ". (http://www.interieur.gouv.fr/rubriques/c /c1_le_ministre/c13_discours/2002_1 1_21_reunion_prefets) International - Dossier MImomuvigermateinotn Immigration - Discriminations La Circulaire Sarkozy du 19-12-02 - à l'ombre du Conseil d'Etat Si elle pose le principe du droit à réexamen des demandes en cas de fait nouveau, vise à rendre plus cohérent le traitement entre préfectures, assouplit un peu l'exigence de preuves d'ancienneté du séjour, tout en fixant des niveaux impératifs de valeur probante, repousse les éloignements jusqu'à la prise de décision et revalorise la commission du séjour, la circulaire n'ouvre aucun droit nouveau. Elle pose plutôt, au nom de la lutte contre les " abus ", des restrictions immédiates et à venir, sur le regroupement familial, le titre " vie privée et familiale " et surtout le droit au séjour des malades, arraché de haute lutte par les associations sous les ministres Debré et Chevènement. (http://www.interieur.gouv.fr/rubriques /b/b5_lois_decrets/02-00215/INTD0 200215C. pdf L'avenant aux Accords Franco- Algérien Publication du décret du 20-12- 02 au JO du 26-12-02. En 2003 : peser à tous niveaux pour une régularisation de l'ensemble des sans papiers résidant eu Europe, pour l'abolition de la Double Peine et contre l'harmonisation vers le bas des politiques européennes concernant en particulier l'éloignement du territoire, le droit de vivre en famille et les résidents de longue durée. BH Grands chantiers 2003 pour l’asile et l’immigration « Différences » - Mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples - no 245 - Janvier 2003 19 Joss Dray et Denis Sieffert : La Guerre Israélienne de l'information Désinformation et fausses symétrie dans le conflit Israélo-Palestinien Avec un cahier de photos de Joss Dray : collection " sur le vif " 128p ; 8 € La Découverte La guerre, avant d'être une affaire militaire, est une affaire de mots. Ils ont joué un rôle majeur dans l'offensive déclenchée le 28 février 2002, par l'armée Israélienne contre les villes Palestiniennes. On sait à quel point, à cette occasion, elle a placé l'information sous contrôle. Mais on sait moins que l'offensive a été préparée par un long travail de délégitimation de l'autorité Palestinienne. Cette entreprise de désinformation commence dès le lendemain de la négociation de Camp David II, en juillet 2002 : Le refus de Yasser Arrafat d'accepter la " généreuse " proposition israélienne de restitution de 97 % des territoires occupés va devenir une vérité acceptée par l'ensemble de l'opinion internationale. Or, comme le démontrent les auteurs de ce livre il s'agit d'un pur mensonge, suivi de bien d'autres. Pourquoi ont-ils pu être aussi largement repris par la presse mondiale, et française en particulier ? Pour répondre à cette question, les auteurs ont décrypté la presse écrite et audiovisuelle, révélant comment, au même moment, les mêmes réécritures de l'histoire ou de l'actualité immédiate apparaissent dans la plupart des médias. Et, en les confrontant aux témoignages de Palestiniens qu'ils ont recueillis, ils montrent à quel point le souci d'une prétendue objectivité peut devenir un obstacle à la vérité. Loin de tout parti pris militant, ce livre salutaire est aussi un appel à la responsabilité de ceux qui manient la parole publique, pour leur rappeler que les mots et les images peuvent tuer. Joss Dray, photographe, est l'auteur de nombreuses expositions sur la mémoire du peuple palestinien, ainsi que de chroniques sur des cités de banlieue. Denis Sieffert, directeur de la rédaction de l'hebdomadaire Politis, a réalisé plusieurs reportages au Proche-Orient depuis 1986, au Liban, en Palestine et Israël. Jean Olivier Héron Modestes Propositions Pour garantir la sécurité d'Israel et le bienêtre des Palestiniens, en attendant la paix qui s'ensuivra peut-être. Hors collection : 64 p ; 8.50 € La Découverte Au milieu du XVIII° siècle, Jonathan Swift publia un texte resté célèbre pour crier son indignation face à la famine atroce qui dévastait l'Irlande et dénoncer ses responsables : Il s'agit de sa modeste proposition pour empêcher les enfants des pauvres en Irlande d'être à la charge de leurs parents ou de leur pays et pour les rendre utiles au public. C'est cette même indignation et le souvenir aigu de ce texte qui ont conduit jean Olivier Héron à rédiger cette " modeste proposition " consacrée au sort aujourd'hui réservé aux Palestiniens. Doté d'une solide culture biblique, Jean Olivier Héron a mis dans ce pamphlet son humour et ses facultés d'indignation au service de ceux qui lui semblent les plus démunis dans la crise du Moyen- Orient : le peuple palestinien. Dans ce texte provocateur, mais qui vise juste, il part d'un constat : rien n'étant plus admirable que l'amour d'Israel pour sa terre, sa flore et les animaux qui l'habitent, on doit se demander si ce respect profond ne devrait pas s'étendre à l'espèce endémique que constitue le peuple des Palestiniens, mammifères omnivores présents dans la région depuis plusieurs milliers d'années. Ainsi seraient garantis par les lois de l'Etat Hébreu le respect de leur biotope, la restauration de leurs sites de reproduction, la qualité des soins que leur santé demande et tout ce qui pourrait contribuer à l'épanouissement du groupe et de ses membres. Telle est, dans sa simplicité, l'approche nouvelle et pragmatique de la crise du Moyen-Orient que ce texte propose, fondée sur ce qu'Israel peut offrir de meilleur en matière d'environnement. Jean Olivier Héron qui fut, avec Pierre Marchand, cofondateur de Gallimard jeunesse, a également été le conseiller éditorial du guide Gallimard de Terre Sainte, ce qui lui permit de nouer un solide réseau d'amitiés tant du côté palestinien qu'israélien. Paul Muzard Engrenage et dynamique du racisme Editions MRAP ; 9 « La France ne peut accueillir toute la misère du monde ! » Une exclamation qui revient à la mode !... et à la rescousse du racisme...! La France est envahie, submergée par des milliers d’immigrés clandestins qui se font passer pour des réfugiés politiques, alors que ce sont des réfugiés économiques ! Le flot du scandale enfle !... à Sangatte, désormais célèbre dans la France entière ! C’est plus facile, paraît-il pour obtenir le droit d’asile. Tricheurs va ! Mais d’où vient donc cette misère du monde ? Les pays riches seraient-ils victimes de ces « crève-la-faim ? » Eux qui promettent de faire diminuer de moitié le nombre des 815 millions de ceux qui souffrent de la faim, mais ne tiennent pas leurs engagements ! Eux qui définissent 27 objectifs pour améliorer le sort de plus de 150 millions d’enfants, leur survie, leur santé, leur éducation, leur protection, mais en n’appliquant que 6 de ces objectifs ! Engagements non tenus ! Eux qui ont promis de contribuer au développement des pays pauvres, à raison de 0,70 % de leur Produit Intérieur Brut, annuel et respectif, mais n’en versent pas la moitié ! Encore des engagements non tenus ! Eux qui écrasent ces mêmes pays par le poids insupportable de la dette, déjà, le plus souvent, remboursée plusieurs fois, au détriment de l’éducation, de la santé, de l’emploi ! et ôtent ainsi toute possibilité de développement ! Eux qui subventionnent leurs agriculteurs, notamment les producteurs de céréales, pour ruiner les paysans du sud, incapables de faire face à cette concurrence ! Connaissez-vous toutes ces contributions au renforcement du racisme ? Connaissez- vous le cheminement de la misère du monde ? Allons-nous laisser faire et supporter la criminalisation de ceux qui subissent la misère qui leur est imposée ? L’ auteur : Paul Muzard est co-président du MRAP Victime ou témoin de racisme : comment agir ? (Guide juridique édité par le MRAP) Editions du Rouergue - MRAP ; 9 € Créer en 1949 à l'initiative de résistants et d'anciens déportés, le mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples, (MRAP) n'a pas cessé de combattre toutes les formes de racisme et pour l'égalité des droits entre les êtres humains. Cet ouvrage s'inscrit dans le combat du MRAP pour l'égalité des droits entre les êtres humains et contre toutes les formes de racisme. Il a pour objectif de permettre aux particuliers de mieux connaître leurs droits et d'engager les procédures adéquates pour obtenir réparation. Parce qu'une procédure peut être longue, pénible et coûteuse, nous avons souhaité présenter les différents rouages des actions en justice pour permettre à chacun d'être éclairé et d'exercer au mieux son droit à réparation. Les synthèses, conseils pratiques dispensés dans cet ouvrage en font un outil indispensable pour vous, victimes ou témoins de racisme. Il peut être également un support précieux pour les professionnels, bénévoles ou militants, chargés de conseiller et de soutenir les victimes de racisme et de discrimination. Les Auteurs : Sophie PISK et Wina VENTURA sont juristes au MRAP International - Dossier Mouvement Immigration - Discriminations Publications du MRAP Sur le Proche - Orient Kiosque
Notes
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