Différences n°138 - février 1993

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Sommaire du numéro

n°138 de février 1993

  • Edito: Pénombre et lueur par Mouloud Aounit
  • Bosnie-Herzégovine: une guerre de « purification ethnique » par I. Avran [pays de l'est]
  • Palestine: 415 déportés par I. Avran [moyen-orient]
  • L'image du noir dans la publicité par C. Benabdessadok
  • Comités locaux: portrait du comité local de Pau
  • Europe 93: les D.O.M. Inquiets {DOM-TOM]
  • Enquête: voyages de la mort (immigration)


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ED 1 T 0 PENOMBRE ET LUEUR L'année 92 s'éteint dans un monde en turbulcnccsqui se défait. où le règne du paradoxe CI de la démagogie laisse intacles les souffrances. les injustices. les tragédies de ceUe rin de siècle. Paradoxe : au moment où le spectre de la guerre nucléaire reçult. li Mogadiscio les mi· trailleuses et les mortiers sêmenl l'horreur el la famine. Dimacogie : soU$ l'oc: il des camé· ras, un minist re. un sacdc rizsurlc dos. dissimule derrière un paravcnt d'ingé rence humanitaire l'impuissance des politiques 11 trouver des solutions au drame du sous-développement qui affame, selon l'Unicef. plus de 250.000 enfants par semaine. Au memc moment, li l'heure du journal télévisé de 20 heures, J' Afrique sub-saharicnnc rem· bourse cn un an une dette supérieure de 700 milliards de dolla rs à ce qu'elle reçoit du Fmi . Pour peu. on oublierait que les CÔtes somaliennes sont une base stra tégique de la route du pétrole '"Pax America. quand tu me tiens en Afrique el en Irak·· ... Void des années que le Mrap a le coeur ct la conscience serrés par la tragédie de l'ex· Yougoslavie. JI y a 2 ans. après avoir participé il une mission d'enquête au Kosovo nous dénonciOfis les risques d'un embrasement de celte région. Depuis, nous n'avons de cesse d'exprimer publiquement notre condamnation de celte logique qui fait de la purification ethnique une fin en soi (communiqués des 13 aoo.t 92. 9 octobre 92. 7 janvier 93). Nous avons lancé un appel aux ONG le 8 déccmbre 92. participé aux campagnes de sensibilisation de I"opinion publique avec la LDH. 1"AHiance des Femmes. manifesté pour la Paix. dénoncé cc processus à la Sous-Commission des Droits de l'Hommc li Genève. Dangereux: au moment où s'ouvrent des négOciations Il Genève, Suilepage2 F ÉV RIER 1993 N , 138 10 F Bosnie-Herzégovine UNE GUERRKDE "PURIFICATION ETHNIQUE" A vril1992. Janvierl993. A l'heure où nous écrivons, voici déjà neuf moi$ que la Bosn;e subir la guerre. Une guerre menée au nom de la "purificalion ethnique". UfJe nouJ-'elle guerre dans "exYougoslavie après celles de Slovénie puis de Croatie, les bombardements de Zagreb, ceux de Dubrovnik et de Vukovar ... Pour se maintenir dans le tourbillon de la démocratisation politique,ou pour le moins de l'introduction du multipart isme, et dans la crise économique profonde qui rongeait la Yougoslavie de l'après Tito, les pou· 'loirs en place avaient choisi une recelle déjà servie par l'Histoire. la fuite en avant dans les nationalismes. Et l'Histoire précisément. caricaturée. rcvisitée par des raccourcis aussi simplistes que dangereux. servait à puiser de vieux démons, ceux qui catégorisent l'Aulre.l'étiqucttent en fonction de son appartenance ethnique ou religieuse et non pour ce qu'il est: son voisin. son proche, souvent son ami connu de longue date. Les Croates devenaient en masse. dans la propagande des nationalistes serbes, descendants d'Oustachis el oustachis eux-mêmes. les Serbes, systématiquement, n'étaient plus considérés par les Croates que comme Tchetnilc:s ... Logique terrifiante, dynamique qui peu Il peu fonctionne pour elle-même. parfois au-delà de ses initiateurs. Peu à peu.l'idte germe de la nécessité non pas de défendre ses valeurs ou son histoire. mais de se défendre contre l'Autre, forcément dangereux, mtme potentiellement, puis. pour les milices qui se mettent en place. qui elles aussi fonctionnent pour elles mêmes, finisscnt par vivre de la guerre et de l'état de guerre. il s'agit rapidement d'aller au boul de celle dynamique de la haine. Et d'éliminercet Autre ... Logique monstrueuse jusqu'à atteindre l'inimagi. nable. En Bosnie. la guerre se mène au nom de la "purification ethnique". Dès avril. Sarajevo est encerclée. En mai. la ville est bombardée par les forces se rbes. Dès juillet, l'on sa it que des "camps de purification ethnique" existent sur le sol bosniaque. Puis l'on apprend que des milliers de femmes Musulmanes sont violées par les miliciens serbes de Bosnie, massivement, là encore au nom de la "purification eth· nique". Et en janvier, l'Onu et l'Europe invitcnt à Genève les représentants élus du peuple bosniaquc (représentant le Président Alija Izedbegovtc). ceux des milices serbes de Bosnie de Radojan Karadzic et des milices croates en Basnie de Mate Boban. Sont également concernés le Président de la ~Nouvelle Yougoslavie- (Serbie et Monténégro) Dobrica Cosic, mais aussi le Président de Serbie,Slobodan Miloscvic. qui n·a cessé de nier son rôle dans le processus de ~purÎfication ethnique- mais dont Karadzic sait qu'il a besoin pour son approvisionnement en matériel suirepoge6 SOMMAIRE Chrono du mois ............................................................................................................ p 2 L'image du Noir dans la publicité .............................................................................. p4 Bosuie-Herzégovine ..... .... ........ .. ............................................................................ p 1/6 Portrait du Comité local de Pau ............ ....................................................... .............. p 8 TIrage des bons de soutien ........................................................................................ p Il Coanier .. ....... ........................................................................................................ ...... p 12 ED 1 T 0 Suite de la page 1 des voix irresponsables et de la déraison s'élèvent sous les lambris des confortables hôtels parisiens. Le maître à penser Bernard-Henri Levy est prêt à dégainer: contre qui? Comment? Pourquoi? Silence. Irresponsable! Comme si rajouter la violence à la violence permettait d'assécher des rancoeurs accumulées, de faire lâcher prise aux extrémismes de tous bords, en ex-Yougoslavie. Le coeur n'exclut pas la raison. Certes, les espoirs sont minces. Les négociations seront longues avec des phases d'avancées et de reculs. C'est indiscutable. Cependant, des voix ici et là-bas s'élèvent pour arrêter le processus destructeur et agissent pour qu'un compromis politique consolide la paix dans le respect du droit des peuples et des minorités. Ces sirènes de la paix doivent s'amplifier, afin d'édifier une persuasion morale, pour que toutes les parties concernées débouchent sur une négociation permettant à tous les habitants de ces régions de revivre en paix ensemble sur la terre qu'ils habitent depuis des siècles. On ne regrettera pas cette année 92 où le règne de l'ordre injuste a succédé à un désordre assassin. Puisse alors l'année 93 être celle des semences pour fertiliser les aspirations des peuples, des hommes, des minorités, au respect et au droit. Puisse l'année 93 être celle des mobilisations énergiques contre l'exclusion, qui oppose le Nord au Sud, le pauvre au riche, le salarié au chômeur, l'immigré au plus démuni. Pour le Mrap, cet objectif doit être une vague déferlente de l'espoir qui imposera d'autres actes, d'autres logiques, d'autres règles. Lueur: le 6 février sera, pour un mouvement comme le nôtre, un de ces moments forts du sursaut salvateur pour dépolluer les consciences, exprimer notre refus de banaliser ces situations qui poussent au désespoir, à la haine, au refus de l'autre, faire de cette . date un tremplin pour que l'égalité, la justice, le respect des droits de l'homme, la citoyenneté, de tous les hommes, aient raison des haines, des abandons. MouloudAOUNIT REPERES RÉVISIONNISTES Le 25 novembre, le Journal Officiel annonçait la création d'une association intitulée "amnistie nationale pour les internés et les victimes de la loi Gayssot", loi votée le 13 mai 1990, visant la répression antiraciste, et rendant illicites déclarations et écrits niant les crimes contre l'humanité. Le Mrap s'est déclaré "stupéfait" qu'une association ouvertement révisionniste qui se fixe comme but, officiellement, "d'ouvrir un débat contradictoire sur la question des chambres à gaz homicide durant la seconde guerre mondiale" soit "légalisée" par la Sous-Préfecture de Fontainebleau qui a autorisé son inscription. Le Mrap demande la dissolution de cette association, a initié une procédure en justice, a interpellé le Ministre de l'Intérieur et saisi l'ensemble des groupes parlementaires. ELUS CONDAMNÉS EN APPEL "Les mosquées, l'Islam, représentent un véritable danger pour notre société et n'ont rien à faire dans notre pays" écrivaient des candidats de la "liste d'union des libéraux de l'Isère" aux dernières cantonales. Poursuivis par le Mrap, la LDH. et le Centre Inter-Peuple de Grenoble, le maire RPR. de Charvieu- Chavagneux, l'adjoint aux finances de Grenoble, le président départemental du Cidunati et trois autres personnes (dont deux élus) sont condamnés en appelle 16 décembre. LIMOGES: VIOLENCES 16 déc. : 7 adolescents sont victimes d'agression de la part des forains qui accompagnent leurs actes d'injures racistes. BÉZIERS: LA BA VURE QUI TUE 20 déc. : un jeune homme de 17 ans, Hassan Ben Hamed, est tué par un CRS lors de son interpellation. Il venait de voler une voiture. Mais c'est une fois menotté qu'il a reçu une balle en pleine tête! JUSTICE POUR BOUBEKER 2 sept. : simple fait divers? Pas vraiment. Deux policiers pren- 2 CHRONO ne nt en flagrant délit deux individus volant à la roulotte, mais qui parviennent à s'enfuir. L'un d'eux blesse un policier. Les agents les poursuivent jusqu'à l'entrée d'un immeuble où arrive un peu plus tard Boubeker Bourherara, 19 ans. Ils l'arrêtent, l'accusent, le frappent. Direction : prison ... préventive .. Puis le véritable coupable innocente Boubeker, ainsi que des témoins qui étaient avec lui au moment des faits. Mais ils ne sont même pas entendus lors du procès : Boubeker est condamné à 4 mois de prison ferme qu'il effectue. Plusieurs associations, dont le Mrap, soutiennent Boubeker. Le 21 déc., la Xème Cour d'Appel de Paris prononce enfin la relaxe ... MONT-DE-MARSAN: SKINS Le 24 déc., Hocine Ladjari est roué de coups et blessé aux yeux (par un pistolet à grenaille) par des skins voulant s'en prendre "au premier bougnoule" (sic) rencontré. Dans un communiqué, le Comité du Mrap rappelle: "les criminels ne sont que les mercenaires des théoriciens de l'extrême- droite ( ... ). Des hommes politiques qui se veulent respectables plantent le décor de la haine. Les acteurs, skinheads ou autres déséquilibrés, passent alors aux actes". Plus de mille personnes participent le 9 janv. à une manifestation à l'appel du Mrap et de la LDH. DÉFILÉS ANTI-RACISTES AUX PAYS-BAS Plusieurs dizaines de milliers de Hollandais manifestent contre le racisme le 24 déc. au soir: 8.000 à Heidhoven, 4.000 à Amsterdam ... Ces défilés font suite à une série d'autres dans les semaines précédentes dans plusieurs villes. CANNES: LA MORT SANS SOMMATION 29 déc.: Béchir Sanchis s'installe au Port Canto, port de Cannes, branche tranquillement son autoradio. Un vigile interpelle ses amis. Lorsque Béchir s'approche, le vigile tire sans sommation. Et le tue. Pour le Mrap, ce crime "s'inscrit dans un contexte marqué par la banalisation et la légalisation du crime sécuritaire". Le 31, 300 personnes se rassemblent devant la mairie où le Premier-adjoint (et non le maire lui-même) reçoit la famille de Béchir. ALLEMAGNE: SUCCESSION DE MANIFESTATIONS CONTRE LE RACISME Les violences des skins et autres lampistes assassins de l'extrême-droite continuent à se multiplier en Allemagne: le 18 déc., trois néo-nazis agressent une jeune fille grecque, marquant au couteau son front d'une croix gammée. Dans la nuit du 19 au 20 : incendie au foyer de demandeurs d'asile de Greifswald (ex-RDA). Un incendie identique tue deux personnes près de Stuttgard le 1er janv. Dans la nuit du 2 au 3, 6 hommes agressent un Mozambicain à Berlin. De nouveau 4 Vietnamiens sont agressés à Francfort le 10. Mais les premières condamnations tombent

le 23 déc., deux jeunes de

19 et 20 ans ayant tenté d'incendier un foyer d'étrangers sont condamnés à 3 ans et 9 mois et 3 ans de prison ferme (le procureur n'avait requis que 3 mois) par le Tribunal de Hagen. Le 25, un skin est interdit d'autobus à Merburg après y avoir agressé un Noir, tandis que plusieurs entreprises annoncent le licenciement de néo-nazis ou de propagateurs du racisme. Surtout, d'importantes manifestations se multiplient: 300.000 personnes le 20 déc. dans plusieurs villes, 50.000 à Francfort le 22 avec la participation du maire et du ministre président de l'Etat de Hesse (Hans Eichel), 200.000 à Berlin le 25, et manifestation de 50.000 handicapés le 9 janvier. ALLEMAGNE: DROIT D'ASILE L'Allemagne est le pays d'Europe qui accueille le plus de demandeurs d'asile: plus de 438.000 en 1992, dont plus du quart de l'ex-Yougoslavie et plus de 100.000 de Roumanie, les autres venant principalement de Bulgarie et de Turquie. Mais l'Allemagne veut modifier le principe même du droit d'asile et en restreindre l'accès. L'écrivain Günter Grass quitte le 29 déc. le SPD pour protester contre l'accord de son parti à ce sujet. DU MOIS POLÉMIQUE SUR LE "FICHIER DES JUIFS" A l'automne 1991, Serge Klarsfeld exhumait des archives du Secrétariat d'Etat aux Anciens Combattants un fichier de 40.000 fiches qu'il disait provenir du recensement des Juifs du département de la Seine établi en 1940 par les autorités de Vichy. Selon une Commission d'historiens présidée par René Remond, il s'agirait en fait du fichier des victimes. Le fichier de 1940 aurait, lui, été détruit en 1947. (Communiqué de Jack Lang, ministre de la Culture et de l'Education Nationale du 30 déc.). MORTS DE FROID Le froid a tué en France durant les semaines de Noël et du Jour de l'An. A plusieurs reprises. Des sans-abris ... Combien les mal-logés sont-ils ? Aucune certitude, chiffres oscillant du simple au double. Selon les estimations officielles: plus de 2,2 millions de mal-logés et 400.000 "sans toit.. ." "Catastrophe nationale" dit l'Abbé Pierre. A son initiative, le 23 déc., le gouvernement crée le Haut Comité au logement. Composé de 8 membres pour la plupart militants d'associations, il remettra chaque année un rapport au Ministère. Plusieurs immeubles sont réquisitionnés. Mais des "promesses" demeurent sans suite : plusieurs familles sans toit de "Vincennes" demeurent sans logement. Pour les familles du "Quai de la Gare", seuls une dizaine de logements ont été construits sur les 600 qui devaient l'être entre 1991 et 1994. Nombre d'offices Hlm gèrent les appartements sur des critères de rentabilité et non sociaux et le parc de construction immobilière est davantage orienté vers le haut standing ... PROFANATIONS Moins de quatre semaines après la mise à sac de locaux de la synagogue de Menau, le petit cimetière juif de Cronanbourg (Strasbourg) est par deux fois profané les 28 et 29 déc. Des inscriptions relatives à la situation au Proche-Orient et à Israël laissent supposer que leurs auteurs font l'amalgame raciste entre politique israélienne et communautés juives. Le Mrap "dénonce ces profanations à répétition qui illustrent une stratégie de tensions sociales, de provocations à la haine raciste et de banalisation d'un racisme au quotidien" et porte plainte contre X. Dans la nuit du 31 déc. au 1er janv., une dizaine d'hommes masqués jettent des cocktails incendiaires dans la synagogue de Villepinte. Attentat revendiqué par un groupuscule inconnu: "La France pure". Le 3 janv., des vandales saccagent la synagogue de Bischeim, dans la banlieue de Strasbourg. Le 29 déc., un jeune nazi lion de Lyon, profanateur du cimetière juif, est condamné à dix mois de prison dont deux et demi fermes. RÉPUBLIQUES TCHÈQUE ET SLOVAQUE Nuit du 31 déc. au 1er janv. : la Tchéco-Slovaquie est morte. Les Républiques Slovaque et Tchèque sont nées. La Tchécoslovaquie avait été proclamée le 28 oct. 1918, du démembrement de l'Empire austro-hongrois. 20 ans plus tard, le 30 sept. 1938, les accords de Munich avalisaient l'occupation des Sudètes par le Reich. A la sortie de la guerre, la Tchécoslovaquie retrouvait son unité. En mars 1990, elle devenait République fédérative tchèque et slovaque, à la suite de la "guerre du trait d'union". La République tchèque compte 10.347.000 habitants, (dont 300.000 Slovaques) et la Slovaquie 5.389.000 (dont 50.000 Tchèques). AUTRICHE: PÉTITION RACISTE Jorg Haïder, leader de l'extrême- droite autrichienne, fait signer en ce mois de janvier une pétition contre les étrangers. La loi autrichienne oblige le Parlement à l'examiner si elle recueille 10.000 voix ou plus. GRÈCE: RELIGION MENTIONNÉE Le 1er janv., les Grecs bénéficient d'une nouvelle carte d'identité bilingue (leur permettant de voyager dans la Communauté européenne). Mais leur religion y sera toujours mentionnée. Les conservateurs et le très puissant clergé orthodoxe ont en effet multi- 3 plié les pressions en ce sens. Ce clergé vient aussi de demander la libération des anciens putchistes, initiateurs des années de "dictature des colonels". Toute autre religion que l'Orthodoxie est considérée comme "étrangère" à l'identité nationale. UN IMAM MENACÉ D'EXPULSION Début janvier: l'Association de la culture islamique de Bondy (93), avec le soutien de la municipalité, se mobilise contre l'expulsion d'un imam, chargé, notamment, des cours d'arabe à l'intention des jeunes. Le Ministre de l'Intérieur motive sa décision par "une insuffisance des ressources, une activité non exercée à titre principal, et une maîtrise insuffisante du Français". ARCHIVES DE GUERRE À GUERNESEY 5 janv. : le gouvernement confirme la participation des autorités de l'île dans la déportation par les nazis de plusieurs femmes JUives. La police, l'Eglise anglicane et des autorités locales auraient collaboré avec les nazis, le bailli de Guernesey ordonnant à la police en mars 1941 de ficher tous les Juifs de l'île. BESOIN D'AIDE D'URGENCE 5 janv. : selon un rapport du FAO, vingt pays africains auront besoin en 1993 d'une aide d'urgence. A propos de l'intervention en Somalie, le Mrap écrit: "Dans les circonstances tragiques que connaît la population de Somalie -en tout cas celle du sud du pays- il convenait que les organisations internationales, l'ONU en premier lieu, prennent en mains énergiquement l'action humanitaire urgente. ( .. .). La question qui est posée par l'intervention militaire est bien différente: tout se passe comme si l'intervention des USA prenait place dans un dispositif stratégique rendant possible toutes sortes d'expéditions qui n'auraient plus rien d'humanitaire et qui pourraient bien ressembler à l'instauration d'un ordre néo-colonialiste. Le Mrap estime que dans les REPERES interventions humanitaires, en Afrique et ailleurs, le rôle dirigeant doit être confié aux instances internationales et non à l'état-major des U.S.A. Enfin, cette situation inadmissible rend encore plus criant le retard pris par les puissances occidentales, le plus souvent alignées sur le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale, dans l'aide au développement qui devrait devenir l'un de leurs objectifs majeurs. Nous répétons que pour commencer, la France devrait agir pour l'abolition de la dette, lafin du commerce des armes, le relèvement des prix des matières premières". DANGER: NÉO-NAZIS DANS LEXIVème 6janv. : mobilisation anti-raciste au marché Daguerre à Paris: autour d'une boutique de vêtements "skins" se diffusent aussi des revues où le racisme assassin est prôné au premier degré. Le quartier est aussi lieu de rendez- vous des hooligans du PSG. EXCISION :PRISON FERME Pression sociale, tradition ... est-ce donc la répression des mères qui permettrait aux petites filles de ne plus subir l'excision ? Pour la première fois, le 8 janv., la Cour d'Assises de Paris condamne une mère africaine à un an de prison ferme pour "coups et blessures volontaires sur enfants de moins de 15 ans ayant entraîné une mutilation". "Il faut que le bâton tombe. Il faut que les parents sachent que l'excision ne se pratique pas sans risque", assure l'avocat général. Pour la défense, "les mères n'ont pas le choix, et ont toujours le rêve de rentrer au pays. Là, les filles ne seront mariables que si elles ont été excisées". Un autre risque apparaît, tout aussi grave pour les fillettes: que les excisions persistent, mais clandestines, et sans suivi médical. Des associations de femmes africaines ont, elles, préféré le travail sur le terrain à la répression. Chronologie établie par I.A. REPERES PALESTINE: 415 DÉPORTÉS 14 décembre 1992. Après l'enlèvement puis l'assassinat d'un garde-frontière israélien par le "Mouvement de Résistance Islamique" "Hamas", les dirigeants israéliens décident une série de mesures de "répression collective" à l'égard des Palestiniens de l'ensemble des territoires occupés. A la suite d'une rafle en Cisjordanie et Gaza, ils arrêtent en effet 1200 personnes, qui s'ajoutent aux 12000 prisonniers politiques palestiniens retenus dans les prisons et les camps israéliens aussi bien dans les territoires occupés qu'en Israël même (contrairement aux prescriptions des Conventions de Genève). Ils décrètent également le couvre-feu 24h/24 sur Gaza (qui, depuis le début de l'Intifada, connaît le couvre-feu tous les jours de 21 heures à 5 heures) et la Cisjordanie, où il sera levé progressivement. Enfin, ils déportent 415 Palestiniens hors de leurs terres, vers le Liban. Par sa résolution 799, le Conseil de sécurité des Nationsunies condamne à l'unanimité ces déportations. La résolution exige le retour immédiat des déportés. La décision israélif)!me, en effet, viole l'article 49 des quatrièmes Conventions de Genève, qui interdit à la puissance occupante tout transf\ert de population (individuel ou collectif) des territoires qu'elle occupe, dans et hors ces territoires. Elle viole en même temps la souveraineté du Liban, prétendant y déporter 415 personnes contre la volonté de Beyrouth. M.Hariri, le premier ministre libanais, refuse que son pays soit pris "pour un dépotoir". Mais la résolution 799 n'est pas "contraignante", aussi les dirigeants israéliens décident-ils de passer outre. Ils maintiennent la déportation des 415 dans la zone qu'Israël contrôle au sud du Liban, et où les autorités libanaises ne peuvent de fait exercer leur souveraineté. Les 415 sont soumis aux tirs de l'ALS ("l'Armée du Libansud", milice supplétive d'Israël). De même, la Cour suprême d'Israël confirme ces déportations. L'Onu envoie plusieurs émissaires tenter de "convaincre" Israël. Sans succès. La France, quant à elle, condamne ces déportations - Roland Dumas le rappelle sur France 21e 27 décembre - mais ne décide aucune mesure à l'encontre du partenaire économique israélien avec qui de nouveaux contrats sont en cours (suite à la visite de François Mitterrand en Israël le mois précédent). La France propose aide et équipe médicale aux déportés, mais Israël refuse de les laisser passer, de même que toute équipe du Cicr, depuis le territoire israélien. Tel-Aviv prétend que c'est au Liban de les faire passer, tentant ainsi de faire avaliser par Beyrouth (qui refuse, avec l'appui des Palestiniens), le fait accompli de la déportation. Il faudra attendre trois semaines pour que Tel-Aviv cède enfin sur le passage du Cicr, refusant toujours cependant de rapatrier les 415. Israël ne reconnaît pas l'applicabilité des Conventions de Genève dans les territoires palestiniens de Gaza et de Cisjordanie (et notamment à Jérusalem-est, illégalement annexée), car il ne se reconnaît pas comme puissance occupante ... Plusieurs centaines de Palestiniens ont été expulsés hors de Cisjordanie et de Gaza depuis 1967, principalement des cadres politiques (maires ... ), ou intellectuels (universitaires, journalistes, avocats, médecins ... ). De même, lors de la guerre israélo-arabe de 1948, 700.000 Palestiniens ont fui leurs villages où des groupes terroristes israéliens perpétraient de véritables massacres, tel Deir Yassine( 1). Israël refuse depuis de reconnaître leur droit au retour dans leurs foyers malgré la résolution 194 de l'Onu. A la suite de la guerre de 1967, 300 000 autres réfugiés se sont retrouvés dans le même cas. Ils sont plus de trois millions de réfugiés palestiniens dans la diaspora à qui Israël ne reconnaît pas le droit au retour. C'est l'avant-dernier jour du dernier round de négociations israéloarabes et notamment israélopaIéstiniennes à Washington - depuis suspendues - qu'Yitzakh Rabin a décidé ces déportations. Au cours des négociations, l'OLP avait marqué des points politiques, notamment en imposant son rôle dirigeant, malgré les vetos israéliens à sa participation. Mais après plus d'un an de négociations, il s'agissait de les entamer véritablement, d'ouvrir les dossiers principaux: la nature, le rôle, le mode d'élection de l'autorité nationale palestinienne dans les territoires occupés durant la "phase transitoire", ses prérogatives, et notamment en matière de gestion des ressources nationales (terres et eau, tandis qu'Israël contrôle actuellement la quasi-intégralité de l'eau palestinienne et a confisqué 40% des terres de Gaza occupée et 65% des terres de Cisjordanie occupée, hors Jérusalem), le lien avec le "statut final" , et l'application de la résolution 242 qui prévoit le retrait d'Israël de tous les territoires occupés depuis 1967. Est-ce ce processus que voulait suspendre Y. Rabin? Pour l'OLP, les négociations sont suspendues jusqu'au retour des 415. I.A. 1 -Voir à ce sujet le livre du journaliste israélien Benny Morris: The birth of the Palestinian refugee problem, 1947·1949 (Cambrige Middle-East Library) 4 SCIENCE ET CONSCIENCE L'IMAGE DU NOIR DANS LA PUBLICITÉ C'est à une exploration de l'imaginaire occidental, français en particulier, qu'invite "Négripub, l'image du Noir dans la publicité"(l), un bel ouvrage paru tout récemment aux éditions Som ogy. En ces temps difficiles, où la frontière entre xénophobie, préjugé culturel et comportement raciste parfois s'estompe, échappant au regard non averti, ce livre ouvre un chemin à la fois ludique et intelligent à la réflexion. Plus de trois cents illustrations (en couleur) accompagnées d'un texte cohérent et spbtile composent "N égripub" qui a pour origines deux expositions: l'une organisée par la bibliothèque Forney à Paris (2) , en 1987, à partir d'un fonds documentaire rassemblé pendant dix ans : "Négripub, 100 ans d'images de Noirs dans la publicité" ; l'autre, présentée à Nanterre par l'agence "QIPO" en 1985 sous le titre : "Les Noirs, têtes d'affiches". Conçu comme un documentaire, largement commenté, la première impression que dégage Négripub est un étrange malaise. En effet, les images publicitaires aux couleurs chatoyantes laissent regarder, plus souvent, avec plaisir en même temps qu'elles présentent les stéréotypes, parfois insupportables, avec lesquels les publicitaires ont jonglé. Pour Anne-Claude Lelieur, conservatrice en chef de la bibliothèque Forney, "cela tient à la publicité elle-même. Elle cherche à plaire, à accrocher de manière sympathique à l'inconscient collectif Les gens qui regardaient ces images devaient les trouver drôles, c'est tout. Bien que les caricatures étaient énormes, les Noirs représentés de manière très laide". Du nègre assimilé très explicitement au singe, mettant ainsi en oeuvre son "infériorité naturelle" au jovial "Y'a bon Banania" réduisant l'homme au produit, la publicité décline tous les clichés permanents ou conjoncturels de la représentation du Noir par la culture occidentale. Et ceci malgré les recommandations émises dans les années 1970 par le Bureau de Vérification de la Publicité : "La publicité doit éviter avec le plus grand soin de faire appel, même indirectement, aux relents de sectarisme ou de racisme qui peuvent exister dans certaines couches de population. Toute allusion, même humoristique, à une quelconque idée péjorative ou d'infériorité liée à l'appartenance à une ethnie ou à une religion doit être bannie. L'expression de stéréotypes évoquant les caractères censés être représentatifs d'un groupe ethnique ou religieux doit être maniée avec la plus grande délicatesse ... ". . Pourtant, la tête de Nègre est de manière quasi-permanente depuis cent ans caricaturée de manière inhumaine, cruelle, invraisemblablement loin de la diversité, de la beauté, de la réalité. Cette tête comporte dans les mains des affichistes "cinq lieux communs: yeux en boule de loto, cheveux en tortillons, bouche lippue, dents blanches, nez épaté. Les affichistes concentrent leur attention sur la bouche ogresse aux lèvres rouges, à la langue pendante, aux dents proéminentes. Leurs audaces graphiques jouent des yeux- phares phosphorescents, des traits exacerbés, d'une pose figée par des cadrages anthropométriques. Bref, l'affiche crée une tête abstraite, asexuée, grotesque ( . .). La frontalité du visage noir, sa monstruosité, terrifiante et risible, exorcise cette différence qui trouble le corps social. Et la laideur devient l'image de marque des marchandises aux consonances négroïdes". DÉLIT DE FACIÈS C'est bien à un refus de connaître et reconnaître l'identité et la dignité du Noir que réfère cette mise en images. Les auteurs rattachent cette déshumanisation du Noir à la culture chrétienne et rationnelle qui fait le substrat de l'inconscient collectif "Comme chaque visage, écrivent- ils, reflète la grâce divine dans l'histoire de la représentation de la société chrétienne, cette grammaire de la tête véhicule à son insu les pires thèses raciales sur l'inhumanité du Noir. En effet, les naturalistes des lumières, Linné et Buffon, jugèrent le Nègre très laid en fonction de la couleur de sa peau, de la qualité de ses cheveux et du type de sa physionomie. Camper le trouva bête en mesurant le degré de prognathisme de son crâne, signe de moindre faculté intellectuelle. Bien sûr, ce grand enfant n'avait pas d'âme, ironisait Montesquieu en se moquant des esclavagistes dans l'Esprit des Lois. Dieunepeutpasavoir mis une âme dans un corps noir. Ces assertions scientifiques anthropologiques perdurent dans le style graphique de l'ère coloniale qui entretient insidieusement un "délit" de faciès". L'anthropométrie, blason de la supériorité coloniale, masques 5 outranciers provoquant d'inquiétantes étrangetés, bouches d'ogresses et d'enfer, tirailleurs en anges ou démons au service de la "mère-patrie", rois nègres, images d'opérette, domestiques serviles, exotisme tranquille en attendant de "trimer comme un nègre", l'imaginaire occidental a produit une fertile saison de visages nègres volés, violés, paralysés dans une infériorité congénitale. Le dernier chapitre du livre, consacré aux années 1980, laisse interrogateur. Le succès de la Société Benetton affichant son antiracisme comme les campagnes d'affichages de SOS-Racisme ou les publicités commerciales (Pelforth, Y 0- plait, etc .. ) montrent une nette évolution. On est loin de la galerie de portraits monstrueux d'avantguerre. La beauté noire s'affiche enfin. On y retrouve toujours néanmoins des stéréotypes enracinés (ils ont la musique dans le sang!) et l'injonction à être un consommateur anonyme. Enfin, souligne, Anne-Claude Lelieur, des tabous demeurent toujours en vigueur : aucune publicité pour des cosmétiques n'a encore, en France, jugé pertinent de vanter tel ou tel produit par une femme noire; si le couple-domino "homme blanc - femme noire" existe dans les représentations, l'inverse, "femme blanche homme noir" n'a pas encore droit à la représentation. Les Beurs commencent à intégrer la représentation publicitaire, mais l'Arabe adulte est toujours inexistant. Il faut croire que consciemment ou inconsciemment, les publicitaires craindraient de représenter ces images propres à choquer leur public ou pour le moins à ne pas susciter le plaisir. Anne-Claude Lelieur est satisfaite parce que "ce livre est beau en même temps qu'il ressemble à nos idées". Il semble bien qu'elle ait raison. L'exposition qui a donné lieu à cet ouvrage sera montée cet été de fin juin à fin août à Nantes, au Château des Ducs de Bretagne dans le cadre d'une manifestation relative au rôle de cette ville portuaire dans la période de l'esclavage. Cette manifestation s'intitulera : "Les anneaux de la mémoire". Quant à la bibliothèque Forney, elle présentera au mois de mars une exposition sur les textiles mayas du Guatemala. Chérifa BENABDESSADOK 1 - Par Raymond Bachollet, Jean-Barthelemi Debost, Anne-Claude Lelieur, MarieChristine Peyrière. 2 - Bibliothèque d'Art de la Ville de Paris. ELÉMENTSDE CHRONOLOGIE 1980 - mort de Tito 1981 - révolte des Albanais du Kosovo 1988 - Au Kosovo et en Voïvodine, démission de dirigeants politiques à la suite de pressions du pouvoir central serbe 1989 - une réforme de la constitution serbe réduit les prérogatives laissées à la Voïvodine et au Kosovo - légalisation du pluripartisme en Slovénie 1990 - légalisation du pluripartisme en Croatie - abandon du rôle dirigeant de la Ligue communiste de Y ougoslavie - élections libres en Slovénie, Croatie, puis Bosnie-Herzégovine, Macédoine, Serbie et Monténégro -les députés du Kosovo décrètent l'indépendance de cette région autonome (juillet), mais sont révoqués par le Parlement serbe. Réduction (septembre) de l'autonomie du Kosovo et de la Voïvodine dans la nouvelle Constitution serbe (qui introduit le régime présidentiel) - septembre - référendum sur l'autonomie des Serbes de Croatie et premiers affrontements serbo- croates en Croatie. - décembre - référendum sur l'indépendance en Slovénie 1991 - mai: référendum sur l'indépendance en Croatie -juin - proclamation de leur indépendance par la Slovénie et par la Croatie. Entrée en Slovénie de l'armée fédérale. Moratoire de trois mois sur les indépendances (accord de Brioni, en juillet) et retrait de l'armée fédérale de Slovénie. - août - intervention de l'armée fédérale en Croatie. Début du siège de Vukovar, puis ouverture d'une conférence de paix à La Haye. - référendum sur l'indépendance en Macédoine, référendum (clandestin) sur l'indépendance au Kosovo. Proclamation par les Serbes de Bosnie-Herzégovine de régions autonomes - L'Onu décide l'embargo des armes en direction de la Y ougoslavie - L'armée fédérale (au mains de la Serbie et du Monténégro) assiège et bombarde Dubrovnik. Premiers bombardements à Zagreb. Le siège de Vukovar se poursuit. - décembre - tandis que les bombardements se poursuivent en Croatie, l'Allemagne reconnaît les indépendances des deux républiques du "nord" de la Yougoslavie: la Slovénie et la Croatie B OSNIE·HERZÉGOVINE UNE GUERRE DE "PURIFICA TION ETHNIQUE" suite de la page 1 d'armement, et le Président croate Franjo Tudjman. L'Onu et l'Ueo proposent la paix. Mais elles proposent pour cela de découper en dix zones la Bosnie-Herzegovine, sur des bases "ethniques", et qui concrètisent essentiellement le rapport des forces imposé par les armes sur le terrain. Plusieurs questions se posent dès lors: l'Onu n'aurait-elle donc véritablement d'autre choix que de légitimer ainsi un rapport de forces imposé? Les cicatrices profondes de ces neuf mois d'une guerre qui se poursuit interdiraient-elles le retour à une Bosnie-Herzégovine plu ri-ethnique, pluri-culturelle, pl uri-religieuse où les populations ne seraient pas d'abord "cantonnisés" en fonction de leur appartenance communautaire? Le découPab;! proposé, s'il est accepté par les différentes parties en présence, a-t-il une quelconque viabilité, peut-on au-moins en attendre la fin des massacres? Quid de Sarajevo, toujours sous le feu des milices serbes et qui continue, sans armes, à revendiquer le droit de vivre et de rester ville plurielle? Les cicatrices, en effet, sont profondes . Et durables. Comment en serait-il autrement lorsqu'une guerre est menée selon des principes de discrimInation ethnique, religieuse ... ? Plusieurs villes de Bosnie ont subi sièges et massacres de milices serbes: Tulza, Kozarac, Visegrad, Biejljina, Foca, Mostar, Bihar, Jojce ... autant de villes martyrs. Bains de sang, exodes des réfugiés, terres et biens pillés. A Sarajevo, le siège se poursuit. Les snippers tirent à vue au coeur de la ville. Autour, sur les collines, les milices serbes bénéficient de l'armement fédéral. C'est la nouvelle Yougoslavie, en effet, qui a récupéré l'essentiel de l'armement de l'ex -fédération yougoslave, et notamment l'armement lourd. Les milices serbes en Bosnie disposeraient de 200 à 250 blindés lourds et de 500 à 600 canons de gros calibre. Dès le 19 avril, une assemblée des citoyens de Sarajevo, avec des représentants de tous les partis parlementaires, rappelait les siècles de vie commune des diverses communautés culturelles, etniq ues, religieuses, et le caractère indivisible de la capitale. Depuis, la population tente de survivre, et même de s'informer, multipliant les appels à une aide internationale pour désarmer d'urgence les milices assiègeantes ou pour lever un embargo sur les armes qui, en l'occurence, frappe essentiellement ceux qui n'ont pu 6 bénéficier de la récupération des armements fédéraux. Une telle levée de l'embargo, si elle permettait au-moins de se défendre face aux armements lourds, serait cependant en même temps la poursuite inéluctable d'une logique de guerre ihter-milices. D'autres villes sont aussi devenues lieux de combats de "purification ethnique". C'est le cas notamment dans les zones que le plan de Genève prévoit de laisser aux Croates. Ainsi de villes comme GornjiVakuf, à majorité Musulmane, où les partisans de l'armée bosniaque refusent de se soumettre aux Forces croates de Bosnie qui de nouveau réagissent par les armes et le sang ... Cicatrices à vie, aussi, pour des milliers de femmes de Bosnie. Une mission d'enquête de la Communauté européenne, dans un rapport destiné au conseil européen (voyage d'enquête du 18 au 24 décembre), estime à plus de 20 000 le nombre de femmes Musulmanes mais aussi de fillettes violées systématiquement par les miliciens serbes. Nombre d'entre elles ont été ensuite assassinées. Des milliers d'autres sont enceintes. Depuis, toujours aussi douloureux, les témoignages abondent. Les femmes ont toujours été parmi les premières victimes des guerres, qui toujours s'accompagnent de viols. Mais, en l'occurence, ces viols en masse prennent aussi un autre caractère. Selon Roman Wieruszevski, assistant de Tadeuz Mazowiecki, rapporteur spécial de l'Onu sur les violations des droits de l'Homme dans l'ex-Yougoslavie, "le rapport de la commission a établi sur une base systématique que les viols relèvent d'une stratégie de nettoyage ethnique". Humilier, inciter à l'exode synonyme de transfert de population dans une stratégie de récupération de zones de plus en plus vastes et "purifiées" , et... "fabriquer des petits tchetniks". Tels seraient au plus haut niveau les buts des criminels de guerre. Et dans les camps, des détenus attendent toujours une libération qui ne vient pas. Détenus pour la couleur de leur sang. Ou bien parce que, de même "ethnie" que les bourreaux, ils refusent la logique de purification. Qu'ils soient musulmans, serbes, croates ... C'est dans ce contexte qu'intervient le plan de paix de Genève. Il prévoit de diviser la Bosnie-Herzégovine en dix zones, tout en maintenant l'intégrité territoriale du pays: chaque "province", désignée comme zone d'influence croate, serbe ou musulmane, bénéficierait de prérogatives spécifiques (semblables à celles de "mini-gouvernements", à l'exception des relations internationales ... ) sans être "séparée" de la Bosnie Herzégovine, où la Constitution reconnaîtrait trois peuples constituants; la présidence se composerait des représentants de ces trois peuples. La carte présentée à Genève indique donc dix zones. Trois seraient "attribuées" aux Bosniaques musulmans, trois aux Serbes, trois aux Croates, Sarajevo demeurerait à "population mélangée". Que dit cette carte? Si l'on se rapporte aux chiffres de population, l'on s'aperçoit que la part belle est faite aux Croates et aux Serbes. En effet, sur 4,4 millions d'habitants, Le plan discuté à Genève pour la future Bosnie Mer Adriatique cv r--î Zone r--î Zone L--J musulmane L--J croate 44% se déclarent Musulmans, 31,5% Serbes, 17% Croates, 5,5% se revendiquant comme Yougoslaves. Il est prévu d'attribuer 20% du territoire aux Musulmans, 30% aux Croates, 50% aux Serbes. Poser la question en ces termes, c'est de facto admettre l'idée d'un partage du territoire de la BosnieHerzégovine selon des critères de type ethnique. Dès lors que le projet est soumis à Genève à l'approbation des protagonistes, cette question se pose pourtant. Alija Izedbegovic, même s'il ne peut être favorable à un plan qui partage ainsi le territoire bosniaque, s'est dit prêt cependant à le négocier. Il peut en effet permettre d'envisager la fin des massacres. Des mouvements de pacifistes bosniaques anti-nationalistes y sont pour leur part opposés par principe, estimant que le plan entérine un processus inscrit par les armes sur le terrain. A l'opposé de l'échiquier politique bosniaque, des milices nationalistes, encore très minoritaires, encouragées par l'engrenage de la guerre et de son cortège de violences, se prononcent pour une république islamique et n'hésitent pas à multiplier les provocations. Côté croate, on n'est pas mécontent d'un tel plan qui attribue un tel territoire aux Croates. Qui plus est, les zones qui leur sont attribuées se situent à la frontière de la Croatie, qui entoure, par l'ouest, le nord et le sud de la Bosnie. Une continuité territoriale est donc assurée entre zones croates de Bosnie et Croatie. Voilà de quoi satisfaire le Président Franjo Tudjman, ainsi que les milices croates de Bosnie, qui avaient imaginé un partage assez semblable lors de leur rencontre à ce sujet avec les forces serbes de Bosnie, en mai dernier, à Graz, en Autriche. Les Serbes de Bosnie sont plus réticents, qui ont conquis par les armes près de 70% du territoire. Qui plus est, les zones qui leur sont attribuées se situent à l'ouest, loin de la Serbie, et "dispersées" comme un chaîne en pointillé entre les zones laissées aux Bosniaques. Ceux-ci craignent du reste des tentatives des milices serbes de poursuivre la "purification" des zones attribuées aux Bosniaques dans le but de créer une continuité de terntOlres "ethniquement homogènes". Siobodan Milosevic a finalement accepté ce plan. Puis Radovan Karadzic, sans le signer, l'a accepté à son tour le 12 janvier à la condition que le Parlement des Serbes de Bosnie donne son accord. C'est chose faite depuis le 20 janvier. Réunis à Pale, les députés de la "République auto-proclamée des Serbes de Bosnie" ont voté oui à la majorité: ils acceptent les principes du projet constitutionnel, qui prévoit le maintien de l'intégrité de la Bosnie-Herzégovine, mais entendent bien négocier le tracé des "frontières" intérieures. Ils viennent d'échapper au risque de plus fortes "pressions" de l'Onu. Ils entendent réclamer à Genève une zone plus large encore que ce que le plan leur attribue. Ils revendiquent notamment un corridor reliant entre eux les territoires serbes et communiquant avec la Serbie. C'est dans ce contexte que les négociations vont donc reprendre à Genève. I.A. LE COMMUNIQUE DUMRAP Le 7 janvier, le Mrap rendait public le communiqué suivant: "Ex-Yougoslavie: non à l'intervention militaire! Tout faire pour que les négociations aboutissent! Le Mrap condamne depuis longtemps la politique xénophobe menée par les factions qui déchirent l'ex-Yougoslavie et l'obstination criminelle des dirigeants serbes. En particulier, depuis trois ans, il a tenté vainement d'attirer l'attention sur la situation explosive du Kosovo. Il faut maintenant que cessent les massacres, qu'il soit mis fin aux purifications ethniques. Contrairement à ce que certains disent, ce résultat ne sera pas obtenu par l'extension de la guerre. Les puissances européennes ont les moyens d'imposer la paix aux dirigeants qui la refusent. Tout doit être fait pour que la négociation de Genève aboutisse. La seule façon d'exprimer efficacement notre solidarité à l'égard de ceux qui souffrent, là-bas, c'est de dire non à la guerre, oui à la négociation. C'est pourquoi le Mrap appelle les antiracistes au rassemblement du 8 janvier à 18h30 place de l'opéra". Par ailleurs, le Mrap soutient l'appel lancé par plusieurs femmes à l'initiative d'Antoinette Fouque en faveur des femmes victimes de viol, et notamment pour leur accueil urgent comme réfugiées politiques. Le Mrap s'est prononcé en faveur d'un tribunal international pour juger les criminels de guerre 7 ELÉMENTS DE CHRONOLOGIE 1992 - La Communauté européenne suit dès janvier la décision de l'Allemagne. Franjo Tudjman reconnaît inconditionnellement le plan de paix de l'Onu. - référendum sur l'autonomie des Albanais de Macédoine. - Résolution 743 du Conseil de sécurité de l'Onu: création de la Forpronu (21 février). Envoi de casques bleus (avril) en Croatie. - référendum sur l'indépendance en Bosnie Herzégovine (62, 78% de voix favorables) . Elle est reconnue en avril par la CEE, qui en revanche ajourne sa décision sur la Macédoine du fait des pressions grecques. Les Serbes de Bosnie y proclament une République serbe autonome. - La Serbie et le Monténégro forment la République fédérale de Yougoslavie. - Premiers bombardements de Sarajevo (avril) et appels du gouvernement de Bosnie-Herzégovine à une intervention extérieure. Sanctions économiques de l'Europe contre la Serbie. Puis embargo de l'Onu contre la nouvelle Yougoslavie (résolution 752 du 15 mai qui exige l'arrêt des combats en Bosnie-Herzégovine et le retrait des troupes croates et de l'armée fédérale ex-yougoslave). Envoi de 1000 casques bleus à Sarajevo. Admission de la Slovénie, de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine à l'Onu. Bombardements serbes contre Sarajevo et Dubrovnik. Embargo contre la Serbie et le Monténégro (résolution 757, 30 mai). - 15 juin: Dobrica Cosic élu Président de la nouvelle Yougoslavie. Le 28: voyage de François Mitterrand à Sarajévo. -2 août: Franjo Tudjman élu Président de la Croatie. Confirmations au plus haut niveau des révélations d'un magazine américain sur l'existence des camps de concentration, "camps de purification ethnique" (cf Différences d'octobre 1992). Résolutions 770 et 771 du conseil de sécurité sur la protection militaire de l'approvisionnement humanitaire en Bosnie- Herzégovine et condamnant la "purification ethnique" (13 août). - Reconnaissance de la Slovénie par la Serbie (13 août). Lord Owen remplace Lord Carrington pour une nouvelle tentative de conférence de paix à Londres, nouvel échec. Exclusion de l'Onu de la nouvelle Yougoslavie. Constitution par l'Onu d'une commission d'enquête sur les crimes de guerre (résolution 780, 6 octobre). Interdiction de l'espace aérien aux avions militaires serbes (résolution 781, 9 octobre). Après la chute de villes bosniaques et de nouveaux exodes, renforcement des sanctions (résolution 787, 16 novembre). - Milan Kucan élu Président de Slovénie (6 décembre). - Déploiement "préventif" de casques bleus en Macédoine. - La résolution 798 (18 décembre) exige la fermeture des camps de détention. - Election de Siobodan Milosevic à la Présidence de la Serbie avec plus de 56% des voix contre 34% à Milan Panic, officiellement opposé à la poursuite de la guerre. Les ultranationalistes, qui jouent la surenchère par rapport à Milosevic, deviennent la deuxième force au Parlement serbe (20 décembre). 1993: janvier: ouverture des négociations sur la Bosnie-Herzégovine à Genève. - Dans la nuit des 8 au 9, assassinat du vice-premier ministre bosniaque pourtant sous protection de l'Onu par des miliciens serbes, près de l'aéroport de Sarajevo. POUR EN SAVOIR PLUS. I.A. La presse abonde de commentaires multiples. Mais pour en savoir plus, l'on peut se reporter à plusieurs ouvrages sur l'histoire de l'ex-Yougoslavie et des conflits qui la déchirent aujourd'hui. L'Histoire des Balkans, de Georges Castellan, chez Fayard, expose, avec de nombreuses cartes, l'histoire de la région depuis le XIVème siècle. Mihailo Crnobrnja, économiste, ancien ambassadeur de la Yougoslavie auprès de la Cee et yougoslave convaincu a publié aux éditions "Apogée". Le Drame yougoslave. Les éditions Complexe ont recueilli sous la direction de Jacques Rupnik, chercheur au Ceri, plusieurs textes de réflexion sur les causes et enjeux des nationalismes dans l'ex-Yougoslavie et sur les enjeux internationaux du conflit, sous le titre De Sarajevo à Sarajevo, l'échec yougoslave. Des revues à signaler également: Hérodote:"Balkans et balkanisation" (4ème trimestre 1991) et, plus ancienne, Problèmes politiques et sociaux: "Yougoslavie, la fédération menacée" (décembre 1990). C.N.C.D.H. Chaque 21 mars, la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme remet au premier Ministre son rapport annuel sur la lutte contre le racisme et la xénophobie. Pour son président, Paul Boucher, "la réflexion qui sera menée dans le Rapport 1992 resituera le combat an ti-raciste dans le cadre de la promotion globale des Droits de l'Homme: la lutte contre le racisme et la xénophobie ne peut être effective et durable que si les Droits de l'Homme sont appliqués sous tous leurs aspects: droits civils et politiques et droits économiques et sociaux. . L'intégration des exclus passe pour une large part, par la réduction des inégalités culturelles. ( ... ) Par ailleurs, ce rapport 92 comportera, comme dans ses précédentes versions, un état des manifestations de racisme et d'antisémitisme, un bilan des mesures prises dans l'année dans le cadre de la lutte contre le racisme et la xénophobie, ainsi qu'un sondage de l'opinion publique". Le Mrap, à travers les contributions de cinq de ses Commissions ("Education", "Tsiganes et Gens du Voyage", "Antisémitisme et néo-nazisme", "Immigration", "juridique") a participé à l'élaboration du rapport 1992 : Quid de l'égalité de tous au droit à l'éducation? - Méfiance, rejet et discriminations à l'encontre des Tsiganes et Gens du Voyage - Banalisation des exactions de l' extrêmedroite, laquelle jouit d'une position de plus en plus confortable dans la société française - La loi de 1972 : procédures judiciaires inadéquates aux conséquences perverses - la "Double peine", loin d'être supprimée semble avoir un bel avenir devant elle! Par ailleurs, lors d'une audition portant sur le droit au logement, l'un des membres de la Commission "Immigration" témoignait sur "l'affaire des Maliens de Vincennes". Ce nouveau rapport de la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme devrait être publié à la Documentation française. COMITÉS LOCAUX Portrait du comité Nous avons rencontré Michèle Petillot, présidente du comité local de Pau Quel a été le contexte de la création du comité? Son histoire et éventuellement les phases de son évolution si elles sont repérables ? Le comité palois du Mrap a été créé en 1980, à l'initiative d'une adhérente de l'époque, qui a regroupé autour d'elle quelques adhérents isolés. Je me suis trouvée présidente en 1981 et le suis restée depuis (mais j'aspire à me faire remplacer). Le comité a peu à peu r~cruté des adhérents. A une époque (1984-85) nous étions plus de soixante, mais en fait très peu de militants. Depuis sa création, le comité tient une réunion publique mensuelle, annoncée régulièrement dans la presse locale, à laquelle participent toujours les mêmes personnes, c'est-à-dire le bureau et quelques adhérents plus ou moins militants, mais sur lesquels on peut compter pour les actions décidées ensemble, justement à ces réunions, sur proposition du bureau (4 personnes) ou de tout autre participant. Viennent parfois à ces réunions des personnes qui ont des problèmes particuliers et demandent notre aide. Peux-tu brosser à grands traits les caractéristiques du comité: sa composi- 8 tion, ses membres, ses sphères d'influence? Le comité comprenait, en 1992, trente deux adhérents. Certains d'entre eux renouvellent fidè lement leur adhésion, mais nous ne les connaissons pas, parce qu'ils ne viennent jamais aux réunions: trop éloignés, trop âgés ou simplement parce qu'ils adhèrent par fidélité aux idées que nous défendons, mais ne veulent pas s'engager davantage. Certains aussi ont d'autres responsabilités ailleurs et n'ont pas le temps de participer davantage. Le comité compte des enseignants, des prêtres, un pasteur, des éducatrices, des personnes travaillant dans des bureaux, mais pas d'ouvriers, peu de jeunes. Malgré le petit nombre d'adhérents, le comité est connu maintenant des autorités, des responsables de MJC, centres sociaux, de la presse, des radios. Je pense que son influence est supérieure à ce que laisserait penser son importance numérique. Quelles sont les principales activités que le comité a animées ou appuyées ces derniers mois ? Il faut dire que nos activités sont nombreuses et continues. Dans les six derniers mois, nous avons affiché le texte de la loi contre le racisme dans de nombreux lieux publics, avec l'accord des responsables de ces tribunal, centres de tralieux: maIrie, CAF, MJC, sociaux, école vailleurs sociaux. Nous avons déposé une gerbe place de la Déportation à Pau le 16 juillet dernier pour commémorer la triste rafle du Vel d'Hiv. Mais grosse déception pour nous : la communauté juive ne s'est pas sentie concernée et ne s'est pas déplacée à cette occasion. Alors qu'après Carpentras, à l'appel du Mrap, 500 personnes s'étaient retrouvées sur cette même place où j'avais pris la parole au nom du Mrap. Pau compte une importante communauté juive originaire d'Afrique du Nord. Fin octobre, nous avons organisé une SOiree au cinéma (salle art et essai) "Le Méliès" avec projection du film "La guerre de pacification en Amazonie" et débat animé par Jean Ortez et suivi par deux cents personnes passionnées. Après un concours de dessins d'enfants sur le thème de l'Amitié entre les Peuples, en mars dernier, nous avons réalisé des cartes postales à partir de ces dessins et nous faisons une petite fête avec les enfants en janvier. Chacun recevra un pin's du Mrap. En janvier, nous avons présenté l'exposition sur la Palestine. En mars, nous organiserons une quinzaine du cinéma contre le racisme pour les collégiens et lycéens. local de Pau Peux-tu décrire et analyser une activité importante organisée par le comité? Nous avons réalisé entièrement l'exposition sur l'abolition de l'esclavage en 1989, pour le Bicentenaire de la Révolution française (lire encadré page 10). Nous avons mis en circulation une mallette pédagogique ainsi que des cassettes video, achetées à la Médiathèque des Trois Mondes, que nous prêtons gratuitement à d'autres associations et que nous présentons au cours de soirées-débats. Le comité est-il en liaison avec d'autres? De quelle manière? Nous sommes en liaison avec les autres comités des Pyrénées Atlantiques, avec ceux de Tarbes, de Mont-deMarsan et de Bagnères. Nous échangeons des informations avec eux, organisons parfois des actions communes. Par ailleurs, nous travaillons beaucoup avec d'autres associations, soit de mamere continue depuis 1987, dans le "Collectif Anti-Expulsion", où se retrouvent principalement l'Asti, la Cimade, Justice et Paix, le Ccfd, la Maison des Femmes du Héolas, SOS-Racisme, l'Apsap (Association de Prévention Spécialisée sur l'Agglomération Paloise). Au cours de ces années, le Collectif a suivi plus de 60 dossiers, beaucoup avec succès, en particulier en ce qui concerne des familles kurdes déboutées du droit d'asile, des étrangers en difficulté pour leur séjour. J'ai déjà rendu compte de cette activité à plusieurs reprises au National. J'ai, en particulier, envoyé à la Commission Juridique le compte-rendu détaillé de notre activité -au Collectif- pour deux femmes et dix enfants kurdes, pour lesquels nous avons obtenu une régularisation exceptionnelle. C'est un très gros travail qui demande beaucoup d'engagement, de réunions, de rencontres avec les intéressés, de démarches auprès de la Préfecture. Mais c'est un Collectif qui marche bien. Par ailleurs, nous participons à des collectifs ponctuellement: guerre du Golfe, 1er Mai, manifestation du 25 janvier à Paris, prochaine manifestation du 6 février, etc. L'action antiraciste semble difficile. Peux-tu répertorier les symptômes et aborder une analyse? L'action antiraciste est difficile: oui! Nous cherchons à informer par tous les moyens possibles: communiqués de presse, radios. Nous avons assuré -à deux- une émission de radio hebdomadaire pendant un an. Mais nous y avons renoncé à cause du sucroît de travail. Par ailleurs, nous avons eu à nous porter partie civile à 9 plusieurs reprises lors d'un procès en Cour d'Assises l'an dernier (compte-rendu fait au National) lors d'une autre affaire avec mort d'un Maghrébin au début de cette année, mais le Parquet n'a pas retenu le caractère raciste de l'affaire. Nous sommes en cassation. Le procès n'a pas encore eu lieu. Cela dit, on constate que les gens qui n'osaient pas se dire racistes, le disent ouvertement, dans les magasins, ailleurs, dans la rue, et c'est très inquiétant. Nos forces sont insuffisantes pour faire face. Quels sont les moyens du comité'? " J'ai déjà abordé cette question. Les moyens humains sont assez faibles et j'assure une demipermanence qui ne peut plus durer. Les moyens matériels sont assurés par une subvention municipale, par nos propres soirées ou autres produits que nous réalisons et par un bénévolat en termes de temps et en soutien financier. Quel est l'apport du siège national ? Les liens avec le National sont assurés par notre délégué au Conseil ~ational, par les courners que nous recevons, mais parfois avec beaucoup de retard. Ces liens sont essentiels, mais nous avons pris l'habitude aussi de réagir aux évènements sans attendre la réaction -souvent tardive- du National et de nous déterminer sur telle ou telle action à mener. Je ne pense pas que le National, lointain et débordé, puisse être de quelque efficacité dans la relance par exemple d'un comité à bout de souffle. Que pense ton comité de la campagne d'adhésion lancée par le National? Comment le comité va-til s'y prendre pour la réaliser? Je ne sais pas encore comment le comité va essayer d'augmenter ses effectifs. Nous en discuterons à la prochaine réunion. Quelles sont tes appréciations concernant Différences? Différences est un journal intéressant, mais sa parution irrégulière nous a fait suspendre l'an dernier nos efforts pour l'abonnement au mensuel. Les numéros speCiaux sont, je pense, trop difficiles à lire pour un public peu informé des sujets traités. Je préfèrerais, pour ma part, des articles moins ambitieux, mais clairs, bien documentés, qui puissent être utilisés pour informer des jeunes du niveau collège et lycée. Ceci est mon opinion personnelle, mais pas forcément celle des autres adhérents. Chérifa BENABDESSADOK LYON: PROFANATEURS CONDAMNÉS Le tribunal correctionnel de Lyon a condamné le 18 janvier deux jeunes de 20 ans qui avaient saccagé le cimetière juif de Lyon et souillé les tombes de croix gammées dans la nuit des 12 et 13 septembre après un match de foot. Ils portent drapeaux, uniformes, sigles nazis, et répètent les slogans nazis. Le Mrap, la Licra et l'Association culturelle israélite s'étaient portés parties civiles. Les deux profanateurs ont été condamnés à 16 mois de prison dont 8 avec sursis, et 3 ans de mise à l'épreuve avec interdiction de fréquenter le stade. PRIXCORRIN Dominique Natanson, Président du comité de Soissons, vient de recevoir le prix Corrin (prix national contre l'oubli de la Shoah) pour son livre: La mémoire juive en Soissonnais. (voir notre numéro de novembre 1992). LES FIELLEUX VOUS INVITENT AU THEATRE Prix réduit pour les lecteurs de Différences "Les Fielleux", une pièce de théâtre au contenu ambitieux et aux allures sympathiques, écrite par Daniel Colmar et mise en scène par Stéphane Gildas (Compagnie Action-Théâtre). Le thème: un vaste tour d'horizon sur l'état de la France et quelques excursions dans le monde, avec une dominante, la bêtise du racisme. Le ton est spontané, la peinture de moeurs pleine d'humour jeune, l'amateurisme non déplaisant. Quatorze personnages se retrouvent pour pendre la crémaillère : l'alcool coule, les langues se délient, les clichés et les sarcasmes abondent. Les lecteurs ne seront pas dépaysés, ils y gagneront un moment de rire franc et de détente. Prochaines représentations Centre Wallonie-Bruxelles, du 23 février au 6 mars (relâche mardi et dimanche) , réservations au 42.71.26.16, Théâtre de la Plaine, du 14 au 16 mai (relâche lundi et dimanche sauf en matinée), réservations au 40.43.01.82. Stéphane Gildas offre aux lecteurs de Différences un prix réduit de 70francs laplace (au lieu de 120 frallcs) sur présentation de ce numéro de Différences. C.B. EUROPE 1993 Les DOM inquiets Plus de quarante cinq ans après la transformation de leur statut juridique de colonies en "départements d'outre mer", les Dom continuent à être étroitement dépendants de la métropole, à souffrir d'un sous-développement du primaire et du secondaire parallèlement à une hypertrophie du tertiaire et à accuser un net retard social ... Ils s'inquiètentfortement du Marché unique de 1993. En novembre, les Dom caribéens avaient été totalement paralysés plusieurs jours durant par une population soucieuse de l'avenir des exportations de bananes. Plus de 20% de la population des Antilles dépend en effet très directement de la production et de la commercialisation vers l'extérieur de la banane. En 1962, sous De Gaulle, avait été institué un régime spécial pour les bananes antillaises face à la concurrence des "bananes-dollars" bien moins chères d'Amérique latine ou d'Afrique (voir Différences de janvier): la France importait deux tiers de bananes des Dom et un tiers des anciennes colonies. Quid de ces quotas avec l'Acte unique? La France et l'Allemagne grande consommatrice de bananes, les moins chères possible - défendaient en la matière des intérêts divergents. Un compromis a cependant été trouvé à la mi-décembre, instituant d e "pseudo-quotas", par l'intermédiaire de taxes douanières imposées aux produits non communautaires au-delà de certains chiffres d'importations ... La suppression, même progressive, de "l'octroi de mer" alarme également les populations des Dom. Taxe imposée sur les marchandises à l'entrée des Dom, cet "octroi de mer" jugé illégal par la Cour de Justice de la Communauté correspond à 40% des ressources des collectivités locales. Il serait remplacé durant dix ans par une nouvelle taxe censée alimenter à son tour les caisses des communes. La libre circulation des marchandises fait craindre la pénétration en Europe de produits concurrents, et celle de produits européens dans les Dom. La suppression des visas pour les ressortissants communautaires laisse déjà entrevoir quant à elle l'utilisation que les promoteurs immobiliers veulent en faire, transformant partiellement les Dom en paradis de luxe de l'autre côté des paravents de la misère, sans nul souci du respect des lieux. Ni de leurs populations, évidemment. La libre circulation des personnes pourrait pourtant permettre d'envisager de nouveaux développements d'un tourisme bien pensé. Pour l'instant, ce n'est guère cette orientation que semblent choisir les promoteurs qui, eux, sont déjà à l'oeuvre de longue date. Aussi les mouvements de population se sont cristallisés cet hiver sur un aspect qui, aux yeux extérieurs, pourrait n'apparaître que sectoriel, la banane, ils sont en fait révélateurs d'un malaise et d'une inquiétude bien plus larges. I.A. EXPOSITION: "L'ABOLITION DE L'ESCLAVAGE" Réalisée par le comité de Pau 33 panneaux 80 x 60 cm, plastifiés, munis d'oeillets pour l'accrochage, crochets fournis. Les thèmes traités sont: La pratique de la traite: Sur la côte d'Afrique, Le Voyage sur les bateaux négriers, L'esclavage aux Antilles françaises, Bayonne et le commerce triangulaire, Le Mouvement d'Idées, L'abolition de l'esclavage (1794) et son rétablissement (1802), Tousssaint-Louverture, Les révoltes d'esclaves, Le Mouvement abolitionniste, Victor Schoelcher et l'abolition de l'esclavage en 1848, Et après?: le travail forcé en Afrique, Les survivances de l'esclavage aujourd'hui encore, Et aujourd'hui? Le travail des enfants dans le monde, L'apartheid, système esclavagiste. Tous les panneaux sont numérotés de 1 à 32. (Le premier, non numéroté, présente l'expo). Deux panneaux présentent la Déclaration des Droits de l'Homme et la Planche pour l'Egalité, réalisée par le Mrap national. Sources documentaires: L'abolition de l'esclavage, dossier du Mrap, L'homme de toutes les couleurs (Pierre Paraf), Les esclaves (Suzanne Everett), Histoire de la traite des Noirs de l'antiquité à nos jours (Hubert Deschamps), L'abolition de l'esclavage (Gaston Martin) , Bayonne guide historique (M. Goyenetche), Archives départementales (inventaire analytique du registre de l'Amirauté de Bayonne par Ducère), Le code noir ou le calvaire de Canaan (Louis Sala-Molins), Toussaint-Louverture(Aimé Césaire), Anthologie négro-africaine(Lilyan Kesteloot) , Différences, mensuel du Mrap, Le Monde diplomatique (août 1988), Le Monde, L 'Humanité, Actuel, Le courrier de l'UNESCO, La documentation photographique. 10 ENQUETE Voyages de la mort Novembre 1992. Le "Mac Ruby" arrive au Havre. Un cargo où un jeune Ghanéen vient d'échapper à la mort. Contrairement à ses huit compagnons de voyage, eux aussi Ghanéens. Espérant se soustraire à la misère, ils avaient été découverts par des marins, jetés à l'eau, assassinés. Pour la première fois, un témoin a osé parler. Les marins, en l'occurence ukrainiens, ont immédiatement été inculpés. Si, pour une fois, la loi du silence a été brisée, des cas semblables sont hélas innombrables, rappelle Fausto Giudice qui, avec l'association "Taifun", tente de mener une enquête approfondie sur ces voyages de la mort. Ceux des Haïtiens, tentant d'échapper à la violence criminelle des hommes de main de la junte qui a renversé le Président Aristide en septembre 1991. Pour eux, l'espoir se résume à la noyade lorsqu'échouent leurs embarcations de fortune, ou au retour chez les "tontons macoutes" (même s'ils ont changé de nom depuis la chute de Duvallier), imposé par les gardecôtes des Etats-unis d'où sont systématiquement refoulés ces nouveaux boatpeoples. Ceux des Sénégalais ou des Marocains... qui subissent le même sort avec, en prime de "retour", un passage obligé par les "arènes" de Tanger... La voie de la mer semble pourtant plus facile à des milliers de candidats-réfugiés que celle des airs, notamment depuis l'appli- TIRAGE DES BONS DE SOUTIEN 1992 • 1er lot: un voyage AR à Mexico numéro 65 518 • 2ème lot: un micro-ordinateur numéro 198 098 • 3ème lot: un répondeur fax électronique numéro 74 295 • du 4ème au IOème lot: un film-video "Les oubliés de l'Histoire" numéros 70987 48903 63347 63349 14843 118497 122498 • du Ilème au 25ème lot: Une collection de 7 pin's numéros 30987 43546 47791 51898 51927 095868 108400 227447 132476 139931 169042 169524 196931 198914 214161 • du 26ème au 37ème lot: Livre "Si les immigrés m'étaient comptés" numéros 119984 158047 210 570 148062 162215 41756 53378 11 cation des accords de Schengen qui transforment les compagnies aériennes en compagnies de vigiles contre d'éventuels clandestins. L'on voudrait aussi faire jouer ce rôle aux marins, explique Fausto Giudice. C'est la raison pour laquelle syndicats de marins et associations antiracistes se sont retrouvés ensemble, au Havre, pour rendre hommage aux huit passagers du "Mac Ruby". Les compagnies maritimes sont généralement tenues de reconduire les passagers clandestins au port où ils ont embarqué. Parfois, la traversée dure plusieurs mois. Quant aux frais ... de nombreuses compagnies ne souscrivent pas d'assurance alors même qu'il existe un système d'assurance international, explique Fausto. Parfois, ce sont les équipages eux-mêmes qui doi- 123154 136549 07511 69-053 139887 • du 38ème au 50ème lot: Livre "La France de l'Affaire Dreyfus numéros 229610 164 597 103574 191908 164 581 187669 05473 59521 67905 093241 137680 140275 118414 • du 51ème au IOOème lot: 2 numéros spéciaux de Différences : Proche-Orient et Les Antisémitismes. vent payer les frais. Les marins de l'ex-Union soviétique sont parmi les plus touchés par ce système. Des milliers d'entre eux, aujourd'hui au chômage, vont jusqu'à "financer" des recruteurs qui leur procurent des emplois aux salaires pourtant presque partout ailleurs inacceptés. Lorsqu'ils sont payés ... Tout un système qui favorise ces "débordements" criminels. Pour Fausto, il est temps que le choses se sachent, que les marins ne se contentent plus de "dénoncer le capitalisme sauvage et les pavillons de complaisance", que leurs syndicats se retrouvent de façon plus permananente avec les mouve mens antiracistes, pour que la mort ne soit pas systématiquement au bout du voyage pour des milliers d'individus. I.A. numéros 05016 130581 08821 141226 13 316 141646 30481 144868 42050 154912 47284 162212 64574 174743 65047 176690 085347 181037 089675 182650 093952 183551 094826 183576 095510 188035 095866 193910 102779 199068 103302 200713 103305 205891 103307 208274 116224 209568 118870 215412 119230 226737 119624 227454 120983 229523 120998 219919 123807 225208 COURRIERS DROIT D'ASILE, PAS D'ACCORD! MOIl opinion, je VOliS rai écrite plusieurs fois. II semble qu'elle soil scandaleuse el non publiable. Je réitère mon refus de la démagogic à propos des huit propositions sur le droit d'asile. \. la responsabilisatioll des transporteurs doil être faile, sinon il suffît d'avoir de quoi payer, S. la présomption de bonne foi , c'est de l'angélisme et vous le savez très bien. C'est au demandeur d'asile à présenter un dossier valable. Démontrer que les allégations du demandeur sont infondées demanderait un temps ct une bureaucratie inconcevables. Cf. les mariages blancs ! 6. Comment garantir le droit au travail (autrement que par une autorisation de travailler) quand les ressortissants du pays d'accueil n'Cil jouissent pas? 7. Les mesures générales ct exceptionnelles permettant de sortir de la cl~ndestinité, il yen a déjà eu. Ça n'a fait que créer l'appel d'air, ct vous le savez bien, Je pense n'avoir plus de raisons de soutenir le Mrap. Vous n'êtes pas Ics seuls à mener ce combal, ct vos excès vont à l'encontre du but. Mme FLORENTIN LANEUVEVILLE DEVANT NANCY Diffioencu : Rien n'al scandaleux, mis à pari It racisme u tNbal sur Itdroll d'asilt nt fait qut commtRctrttl'OUS ùes /ibn t t rt:Sponsablt th l'QS opinions. DÉCONCERTANT Depuis l'envoi de ma lettre du 20 septembre que vous avez publiée en partie (ce dont je vous remercie), les évènements sont venus, tristement hélas, me donner raison, l'écrivais, après avoir évoq ué Carpentras, "Imaginez que les sépultures profanées aient élé cdles d'AlgériellS, même morts pour la France, .. nous auriollS eu du mill à rassembler quelques centaines de personnes .. , Je ne sais pas combien de participants se sont rassemblés devant le monumcnt aux morts le 25 novembre dernier à Vallons, près de Mulbouse (profanation de tombes musulmanes NDLR), mais leur nombre est probablement très en deçà ct je n'ai pas entendu dire que le Premier Ministre se soit déplacé, Le Mrap a-t-il réagi sur le plan national? Je n'en ai eu personnellement aucun écho, Les médias sont restés scandaleusement discrets et notre propre journal y consacre six lignes dans la rubrique "en bref', Tout cela est lamentable et déconcertant. Je ne voulais pas revenir sur celte question pour ne pas donner l'impression de polémiquer. Mais l'équipe de Différences se plaignant de ne pas avoir de nos nouvelles,j'ai pris une fois de plus ma plume .. Il ne serait pas inintéressant de savoir ce qu'en pensent lcs militants du Mrap, lectcurs de Diffirenca, P,S, J'ai allendu l'A,G, dc la Fédération le 19décembreà Carpentras pour cxpédier celle lellre, Aucun apaisement ni éclaircissement ne m'ayant été donnés, je vous la fais parvenir avec encore un peu plus d'amertume, Gaston PELLET PUJAUT Concernant la proflJlUJtian de tomba musulmanes que l'OUS il'uquez. le Mrap a appt:/t à une manifo'lalion le 15 nOl't mbre el porté plainre avec constitution rk partit civile (cf chronologie rk Diffirt:tlcu du mois thJfUfl'itr). INTERVENIR CONTRE LES MASSACRES rai toujours cru et crois toujours qu'il n'y a de vra ie solution que politique en ex-Yougoslavie. Mais d'appuyer uniquement sur les négociations en cours à Genève revient à laisser le processus en cours sur le terrain tt re mené à son tenne. Si bien qu'au bout de semaines de négociations infructueuses, la solution "politique~ serait la situation de fait: une Bosnie et une Her/..égovine orientale purement serbes, une Herdgovine ocddentale purement croate, nettoyées, des cimetièrcs purement serbes, croates, musulmans. Se contenter de déplorer les combats ct affirmer sa seule solidarité morale avec les populations civiles, et refuser toute intervention militaire et toute levée de ["embargo sur les ventes d'armcs, ceci tout à la fois revient à entériner celle finale solution ( ... ). ToUl le monde l'a compris: les négociations de Genève ne sauraient aboutir à quoi quc ce soit tant que la situation militaire n'est pas bloquée, tant que des partics escomptent encore des progrès dans leurs conquêtes de territoire, dans la purification ethnique des territoires conquis. La situation nécessite aujourd'hui ou jamais une intervention militaire, pour forcer les belligérants à recbercber véritablement une issue politique à ce conflit, pour épargner les populations civiles, pour sauver Saraje- 12 va que l'on s'évertue à anéantir, symbole du fait que Serbes, Croates, Musulmans coexistaient, il y a un an encore, pacifiquement, amicalement ( ... ), Oeuvrer pour la paix ne peUl pas signifier être neutre. Etre neutre, ne pas s'engager, c'est se laver lcs mains du connit. Déplorer la purification ethnique en Bosnie-Hen'égovine en refusant les moyens militaires d'arrêter la Honte équivaut à déplorer les six millions de juifs morts durant la scconde guerre mondiale en refusant l'engagement armé des résistances et des armées alliées face au nazisme. Olivier LANNUZEL PARIS DE L'HONNEUR D'ÊTRE FRANCAIS Que la République doive ~condamner les crimes de Vichy ~, mais non "en répondre~, je suis de l'avis de Jean-Pierre Chevènement, qui l'a dit dans une tribune duMondedu 18décembre 1992. Et c'est aussi pourquoij"estimequ'il a caricaturé le débat qui s'est engagé depuis quelques mois. S'agit-il vraiment pour la majorité de ceux qui soubaitent une condamnation officielle de la politique menée en France de la fin de 1939 à la Libération, comme il le prétend, de ürihabiliter juridiquement Vichy pour mieux condamner polilique· ment el moralement la France"? Beaucoup de Français, dont je suis. trouvent tout simplement qu'il est aujourd'bui indispensable d'en· tendre les représentants de la République fra nçaise proclamer collectivement combien le gouvernement de Vichy a été criminel dans ses institutions et dans les pouvoirs qu'il s'est octroyés. Indispensable de les entendre proclamer que les institutions républicaines ont été confisquées, à ["époque, par un Etat dit français, sous la direction d'individus qui ont voté, couvert, ordonné, exécuté ce qui s'appelle juridiquement des ~crimes", voire parfois des ~crimes contre l'humanité". Caril ne faudrait tout de même pas oublier le point de départ de ce débat: l'arrêt de non-lieu rendu le 13 avril 1992 à l'égard de l'ancien cbef de la milice lyonnaise Paul Touvier. Comment considérer précisément cet arrêt autrement que comme une infâmie contre la République française puisqu'il permet de déculpabiliser, du même coup, tous les exécutants du gouvernement de Vichy et tous les serviteurs zélés de l'Allemagne nazie? .. Cet arrêt,dont la validité a été enfin juridiquement mise en cause, représente une atteinte à la conscience civique des Français. Notre Assemblée Nationale, à l'occasion du SOème anniversaire du "SIaIUI des juifs", signé par Pétain le 3 octobre 1940 au nom de l'Elat français", avait la possibilaité de proclamer la culpabilité fondamentalc du gouvernement de Vichy et sa responsabilité dans les persécutions antisémites. Quelque ehosc de ce genre a-t-il été voté? ... L'occasion s'est renou· velée avec le cinquantenaire de la rafle du Vel' d'Hiv' des 16 et 17 juillet 1942. Notre Assemblée Nationale a-t-elle pris collective· ment et officiellement position? ( .. .) Il est urgent de voir l'Assemblée Nationale reprendre la loi qui fut votée par eHe en 1951 contre "l'apologie des crimes ou délits de collaboralion"( ... ). Pour les jeunes gens d'aujourd'hui et les générations à venir. il yvade leur honneur d'être français. De leur possibilité de croire, preuves à l'appui, que la France ct l'humain ne font qu'un, et que les valeurs républicaines méritent effectivement d'être défendues, Lionel RICHARD Profel'seur de Lilltralllre comparée à la Facullé des Leures d'AmiellS el auteur, notammenl, du /ivre "Le naûl'me el la wllure" (Comple.reJPUF, 1988). 89, rue Oberkampf 75543 Paris Cedex 11 Tél.: 48.06.88.00 Télécopie: 48.06.88.01 • Directeur de la publication Mouloud Aounit Gérant bénévole Martial Le Nancq • Rédactrice en chef Cherifa Benabdessadok • Journaliste isabelle Avran • Publicité aujoumal • Abonnements Isabel de Oliveira • Mise en page Kayen Tél.: 49 37 28 25 • Impression Montligeon Tél.: 33.83.80.22 • Commission paritaire nO 63634 lSSN 0247-9095 DépôtlégaI1992-10

Notes

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