Différences n°89 - mai 1989

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Sommaire du numéro

n°89 mai 1989

  • Lois Pasqua: l'abrogation en marche [législation]
  • Citoyenneté, identité, laïcité: réflexion a triple détente [identité]


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1 1 J M 1430 - a9 - 10 F - MAI 19a9 - N° 89 - MENSUEL - ISSN 0247 9095 EDiTO 40 ANS 1. 40· .,.nl.,.,. .. ,,.e du HRAP colnclde .reC' le bl· C'entelYJre de 1. Ré.,o/u· tIOn. Une""'tlon proto". d. unit , •• deux C'é/ébratlon •• e. ,. HRAP, ".,. défini· tlon, agit pou,. défendre et promou.,OIr le •• ",w" le • .,.eun de 1 PBP. $1 .a C'NatlOn .'.st a.,érée né· C' •• salre. C"est parC'e que leur mise en C'allS'e n'anlt jamal. C'e •• é au cours de. 1110 .nné.. alors éC'ou· lé ••• A.,.C' s/mult.ném.nt, bien .dr. , •• C'Omh,. mené. pour faire "'"C'tH/er l'hérita .. "'"o'utlonnal· n. Combats qu.1e ",RAP •• •• t .n"6é • poursui. .,re, .n C'ette Journée du .2.2 maJ ,."., oiH/ •• tné. "0 .,.. pour une "'0('1.· tlon, C'·ut une lonp."té •••• z relnlll'quab/e. Ce· p.ndant, ,. ",RAP reste J.une. Sa Jeuness. tient j ,. "'peur et j la C'OII.tanC'e de .a eIIorU, j .on pI""",.m., j .. apac/té de ft C'oIier " .ux réalité. dan. de • • ltuatlon. C'h.n..... ,... en m.'nten.,.t san. C'OIK ••• /on ••• prin· C'lpe •• t .e. olljectHs. I •• u de la Ré.,.tanC'e, Il a Ivteé en prIOrité, selon le. p4rlode" C'OIttre , •• mu/· tlple. 'équel,.. et recru· descences de l'hitlérisme, C'ontre le. .,Io/enee. du C'Glonla"sme, contre , •• InJu.tlC' •• Il... • l'lmmlpatIon. HaJ •• touJoun. Il a souIlI'fé que le l'Klsme. dan. 1. dJ.,en/té de ses expre •• 'on.. forme un tout 1 et que l'_rad.me, également, ne .. urait .e couper en Iranehe •• Tourné .,ers I·a.,enlr, Il "emp/o/e j C'onstru/re une .«#été ..... lMrrlère., tondée 'IU' I·épl/té. dan. le re.pert de. dlfféreftC'e •• qu'" co,,"nu. aJnsJ, et sa Jeunesse durera. A.l. contre le racisme. pour 'amitié entre les peuples LOI PASQUA L'ABROGATION EN MARCHE Au moment OÙ nous mettons sous presse cette édition, des associations (dont le MRAP) ont été entendues par Pierre Joxe. L'avant·projet relatif à l'abrogation de la loi Pasqua préparé par les collaborateurs du ministre, a subi, en seconde mouture une rectification substantielle. Ouf! On respire ... Un peu mieux. L'avant·projet de modification de l'ordonnance du 2 novembre 1945 (relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers), vue et corrigée par Pasqua-Pandraud, a subi un toilettage en profondeur sur la question du droit au séjour. Les remarques et pro· positions formulées par le MRAP et les associations avec lesquelles il collabore ont été en bonne partie prises en considération dans la nouvelle version de l'avant-projet discuté au ministère de l'Intérieur le 24 avril dernier. Ainsi: les catégories d'étrangers ayant automatiquement droit à une carte de dix ans sont élargies aux étrangers vic· times d'une maladie profes· sionnelle au même titre que les accidentés du travail; le pou· voir de J'autorité préfectorale est limité dans Je cas de refus de carte de séjour, dans la mesure où ce refus devra être déféré devant une commission composée de magistrats dont l'avis s'imposera au préfet; enfin, les étrangers présents depuis plus de dix ans deviennent inexpulsables sauf « urgence absolue ). Ces modifications ajoutées à celles de la première mouture redonnent prééminence au droit sur le pouvoir administratif. Le MRAP continue à défendre ses analyses quant aux points négatifs suivants: « Les conditions d'entrée en France sont toujours aussi restrictives, les visas, notamment de long séjour, sont toujours exigés, ainsi que les moyens d'existence. Les bénéficiaires de plein droit d'une carte de résident sont encore soumis à la condition de l'entrée en France régulière, ce qui peut faire échec à la régu· larisation de la situation admi· nistrafÎve des demandeurs d'osiledébourés qui ont defortes attaches en France (I). La qualité de résident est toujours caduque après un an d'absence du territoirefrançais ce qui empêche toute possibilité d'essai de retour dans les pays d'origine. Les cartes délivrées dans les DOM TOM ne sont toujours pas valables en métropole. Le séjour irrégulier est tou· jours passible d'une peine de prison. La rédaction de l'article 21 réprimant l'aide à l'entrée ou au séjour irréguliers n'est pas mo· difiée. La réglementation du regrou· pement familial et la renégo· ciation de l'accord franco· algérien ne sont pas envisagées Le réexamen de tous les refus de séjour en application de la loi du 9 septembre /986 ne serait que juste réparation. ~) (Communiqué du 24 avril) Le dialogue avec le ministère de l'Intérieur se poursuit (2). Le MRAP saisit les groupes parlementaires . (1) Cette disposition sur laquelle le mi· nistre demeure, semble.-t-il, particulièrement ferme, rejoint le principe du verrouillage des frontières européennes face au droit d'asile, principe contenu dans les accords Schengen. Cf. Différences mensuel, nO 88, avril 1989. (2) Des documents exhaustifs onl été étaborés par les responsables de la permanence et de la commission juridiques. Ils sont à votre disposition au siège du mouvement. UNSUCCËS Le numéro trimestriel de Dif- ........ "" ... férences paru en mars est toujours d'actualité. Il a un succès ~l1ifferences fou. Courez vite vous k! procu!' el' avant qu'U ne soit trop tard. Rappel: la nouvelle formule de notre journal se p~nte comme une information à double détente, Un mensuel consacré à l'actualité antiraciste (8 ou 16 pages) et un trimestriel (68 pages) dont l'ambition est de traiter un thème Il fond. (( Egaux et citoyens )} donnait une exdusivité

un artide de Monseigneur

Herbulot consacré à l'abbé Grégoire qui fait (enfin !) son entrée au Panthéon, Même Tonton nous a entendus! Pourquoi pas vous '! fR 89 ÉGAUX ET ~O! CITOYENS Ul 1Iiir.r- 11 '1Ir~ ,.ill 1 ;.:-,. Jill .Ir-· -1111 _., - ... 1 EN BREF • CRIMINEL L'incendie qui a détruit, le 20 mars deruier, la synagogue d'Yerres (Essonnes) serait d'origine criminelle, selon des premiers éléments d'enquête. Le feu, allumé, alors qu'une centaine de fidèles priaient dans les locaux n'avait fait aucune victime mais avait détruit totalement la synagogue, des bureaux et deux classes d' enseignements religieux. • PACIFISTES 15 000 Belges ont manifesté, le 16 avril, à Bruxelles, contre les projets de l'OTAN, de moderniser son arsenal nucléaire. Trois des cinq partis de la coalition gouvernementale s'étaient joints aux mouvements pacifistes pour appeler à la protestation. • CONDAMNES Deux militants du Front national avaient insulté et menacé d'un pistolet un passant maghrébin, lors de la campagne municipale. Alain Schlesser, candidat à Lunéville (Meurthe-etMoselle) et Claude Carmentre ont été condamnés, le 11 avril, à 3 mois de prison avec sursis, 1 000 F d'amende et 3 000 F de dommages et intérêts. • DIALOGUE Au centre des cultures méditerranéennes, à Belfort, aura lieu le 11 mai, un débat : « Deux vérités en face, un Arabe et un juif dialoguent. » Y participeront Théo Klein, président du CRIF et Hamad Essid, délégué de la Ligue arabe à Paris. Le rendez-vous est fixé à 20 h 30, le débat sera animé par JeanPierre Langellier du jourual Le Monde. Mi-avril, Marc Mougnot, chauffeur de taxi lyonnais qui avait tué Farid Oumrani d'une balle dans le dos, le 21 janvier, a été relaché. Oumrani avait tenté de s'enfuir sans payer. Après avoir tiré, le taxi avait abandonné le jeune homme sur place. Me Vergès a dénoncé, à l'occasion de cette libération, « J'ofticialisation de l'arabicide ». « On abat un jeune Arabe par semaine en France, depuis cinq ans ... Les responsables de ces actes criminels, quand ils sont poursuivis, bénéticientd'un tarif de faveur: cinq ans de primaximum », a déclaré NEO-JUSTICE CALEDONIENNE Les députés français ont adopté en première lecture le projet de loi sur l'organisation judiciaire de la Nouvelle-Calédonie. Largement mise en cause dans les événements de ces dernières années, la justice néo-calédonienne est considérée comme largement favorable aux anti-Kanaks : le jugement de l'affaire de Hienguène qui vit les meurtriers de dix Kanaks acquittés reste dans les mémoires comme le sommet des pratiques judiciaires néo-coloniales. Centralisé à Nouméa, l'appareil judiciaire devrait donc être décentralisé en partie avec la création de ESTOMAC SANS CONSCIENCE deux nouvelles sections à Lifou et Poindimié, compétentes dans leur province pour les affaires civiles, correctionnelles ou de police. Des assesseurs non-professionnels ayant voix délibératives se joindront désormais aux magistrats pour les délits pénaux. Une tentative intéressante de prendre en compte le poids traditionnel du droit coutumier dans l'archipel. Les présidents de ces deux sections seraient nommés directement par décret du président de la République (et non plus par le président de la cour d'appel de Nouméa) et les assesseurs par le garde des Sceaux. Un contournement de la hérarchie judiciaire néo-calédonienne qui montre qu'elle est bien encore largement suspectée d'appliquer une «justice coloniale» comme l'a souligné un député. MALIK OUSSEKINE POLICIERS La chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris a décidé, le 25 avril, de renvoyer les deux policiers inculpés pour la mort de Malik Oussékine devant la cour d'assises. Le brigadier Jean Schmitt et le gardien Christophe Garcia y seront jugés pour « homicide involontaire ayant entraîné la mort sans intention de la donner » avec circonstance aggravante puisqu'il s'agit« d'agents de la force publique dans l'exercice de leurs fonctions ». L'avocat des inculpés s'est immédiatement pourvu en cassation, ce qui retardera encore l'examen des faits. Me Garraud avait déjà utilisé cette procédure dans l'affaire du CRS Burgos. Le critique culinaire de LyonFigaro préfère les langoustes sudafricaines. Ille dit et l'écrit dans sa critique du 9 avril dernier. C'est son droit, encore que les autorités internationales se soient prononcées pour un boycott effectif des produits sud-africains. Mais que voulez-vous, ce monsieur à la cervelle dans l'estomac. Mais la petite provocation à laquelle il se livre en débutant son papier par « pardon au MRAP et à toutes les bonnes consciences, mais je ne boude pas ce que nous envoie d'Afrique du Sud ... », nous oblige à répondre à cet estomac sans conscience que les racistes ne font pas qu'envoyer des langoustes, ils envoient aussi des tueurs qui exécutent en plein Paris les militants anti-apartheid. Et cet imbécile à fourchette a écrit son papier un an - presque jour pour jour - après l'assassinat de Dulcie September par un commando sud-africain ... PAPIERS EGARES EN JUSTICE Pour Samba Guisse, né au Sénégal, tout allait bien jusqu'en décembre 1981. Il avait un passeport, une carte de séjour et un numéro de Sécurité sociale. Le 3 décembre de cette année-là, il est convoqué chez un juge de Reims et inculpé «d'usage de faux documents administratifs à l'aide d'un faux nom et d'escroquerie ». Malgré ses protestations d'innocence. En échange de la remise de ses papiers au juge, il reçoit une ordonnance de placement sous contrôle judiciaire. Lassé, il se rend en 1985 chez un avocat et apprend ainsi qu'il a été relaxé en 1983. Pendant deux ans, il a donc continué à pointer régulièrement au commissariat, sans raison: ni lui ni les policiers n'avaient été informés de la déci- .---------1 iHérences ---------, 89, rue Oberkampf 75543 Paris cedex Il Tél. : 48.06.88.00 N° mensuel (10 par an) : 10 F N° spécial (4 par an) : 40 F Abonnements : 1 an : 200 F 6 mois: 120 F Etudiants et chômeurs : 1 an : 150 F 6 mois: 80 F (joindre pièce justificative) Etranger : 1 an : 300 F Soutien : 500 F Abonnement d'honneur: 1 000 F Directeur de publication : Albert Lévy Rédaction en chef : René François Chérifa Benabdessadok Administration/gestion: Marie-Odile Leuenberger Publicité: au journal Photocomposition : PCP - 17, place de Villiers 93100 Montreuil Tél. : 42.87.31.00 Impression Montligeon Tél. : 33.83.80.22 Commission paritaire n° 63634 ISSN 0247-9095 Dépôt légal. 1989-4 sion du juge ! Samba Guisse demande donc à récupérer ses papiers. Rien ne vient, les papiers ont disparu, la justice les a égarés. Et ce n'est pas fini, car en septembre 1988, Samba Guisse est autorisé - la justice est trop bonne - à déposer une demande de nouvelle carte de séjour. .. à condition qu'il prouve qu'il n'est pas clandestin! Coluche ou Kafka, c'est à rire ou à pleurer. COIFFEUSE MAGHREBINE ? NON MERCI! U ne lectrice d'Argenteuil nous a rapporté une histoire banale, de celles qui font mal. Assistant à un conseil d'orientation, elle a relevé le cas d'une élève maghrébine qui demandait un apprentissage en coiffure . Réponse d'un des professeurs, qui en toute bonne foi, voulait éviter à son élève une impasse professionnelle

les patrons la refuseront

à cause de ses origines. Le professeur n'est pas en cause, mais peut-on dissuader une élève de suivre son chemin à cause du racisme qui règne dans certaines entreprises ? demande notre lectrice. Elle a essayé d'en savoir plus, avec d'autre enseignants. Ils lui ont confirmé la banalité du refus oral de certains patrons de recevoir des apprentis d'origine étrangère, qu'ils soient ou pas Français. Les Antillais et les Africains sont particulièrement en butte à ce type de racisme. Est-ce tolérable? • Proche-Orient: vers des élections ? Rencontrant le Président américain, Yitzhak Shamir a présenté, le 14 avril, son nouveau projet pour les territoires occupés par Israël. Le Premier ministre israëlien y propose des « élections libres et démocratiques », les élus de se scrutin devant ensuite « négocier une période intérimaire de gouvernement autonome ». Les modalités, les formes et la participation à ces élections n'ont pas été définies dans ce projet. Et c'est bien là le problème

il n'y a rien de neuf

dans ces propositions. « Petit pas en avant », les officiels américains ont marqué les limites du projets Shamir. D'accord sur le principe, ils sont cependant un peu plus loin en souhaitant, eux, une organisation de scrutin sous couvert international, ces élections devant «être conçues pour contribuer à un processus politique de dialogue et de paix» selon George Bush qui demande aux Israéliens de retirer au moins une partie de leurs troupes, refusant « l'occupation et la souveraineté israélienne dans les territoires occupés ». Jim Baker, secrétaire d'Etat américain, a enfoncé le clou en se déclarant favorable à des négociations directe entre l'OLP et Israël et la tenue - sous certaines conditions d'une conférence internationale sur le Moyen-Orient. Ce dont les Israéliens ne veulent pas entendre parler. Evacuation des territoires occupés et supervision du scrutin par l'ONU, ces deux demandes américaines rejoignent les exigences de Yasser Arafat: « Nous voulons des élections mais existe-t-il un seul homme libre à travers le monde qui accepterait des élections à l'ombre de l'occupation? Quant à la période de transition sous la supervisation de l'ONU, nous l'acceptons comme une forme de défi, pour quelques mois, avec la présence de forces des Nations unies et à condition que les forces israéliennes se retirent de tous les territoires palestiniens et arabes occupés. » Une exigence portée à l'intérieur même des zones occupées

la semaine ou Shamir

était à Washington, treize palestiniens ont été tués par l'armée israélienne. ARARAT, documentaire long métrage du réalisateur suédois Pea Holmquist sur le génocide arménien. Images d'Anatolie, d'Erevan, New York, Lyon, Alep ... Le film manque de nerf, mais il a le mérite d'exister. NATALIA, de Bernard Cohn, ou l'histoire d'une jeune fille juive qui rêve de devenir comédienne dans le Paris de 1940. Avec Philipine Leroy-Beaulieu et Pierre Arditi. MISSISSIPI BURNING, d'Alan Parker. Quand la ségrégation raciale et le Klu-klux-klan sont filmés à la manière hollywoodienne : 'le Bien l'emporte sur le Mal grâce aux vertus de deux agents du FBI. Gene Hackman est génial. ROMUALD ET JULIETTE, de Coli ne Serreau (avec Daniel Auteuil)

émouvant, drôle, profondément

antiraciste. • Béorgie: • Namibie: oelle ver. ton ? AUTOUR DE 1789 ... L'EUROPE ET LA REVOLUTION au Grand Palais (jusqu'au 26 juin). Une exposition qui rassemble 1 500 oeuvres qui illustrent notamment les événements qui ont fait qu'on est passé de l'Europe des Lumières à celle des nationalités, de l'Europe à sa négation. Un thème d'actualité ... la lin des a/l/laratchiks Après les manifestations nationalistes du 9 avril à Tbilissi (Géorgie), durement réprimées par la police, les autorités soviétiques ont décidé d'écarter nombre des responsables locaux de la milice et du parti communiste. Les manifestations s'étaient soldées par 19 morts dont certains tués à coup de pelle selon des témoins, de nombreux autres jeunes avaient été blessés ou intoxiqués par des gaz de combat. Edouard Chevardnazdé, ministre des Affaires étrangères d'URSS et géorgien lui-même, chargé de régler la crise, a démis de leurs fonctions les plus hauts responsables politiques de la République, les considérant comme responsables du drame. Le ministre a dénoncé « ceux qui occupent des postes importants et ne sont pas capables de renoncer aux principes éronnés du passé» d'autant qu'il semble bien que la brutale répression du 9 avril ait été préparée: des hôpitaux locaux avaient été avertis, plusieurs heures à l'avance, d'avoir à mobiliser médecins et lits. Différences - N° 89 - Mai 1989 Début avril, des affrontements extrêmement meurtriers ont eu lieu au nord de la Namibie. Plusieurs centaines de militants de la SWAPO y ont été tués. L'armée sud-africaine a participé aux combats et s'est empressée de dénoncer une violation de l'accord conclu sur l'accès à l'indépendance du pays. Une version largement reprise par la presse. Annoncés comme violents et mettant en présence des groupes fortement armés selon les SudAfricains, le bilan des affrontements présente un déséquilibre curieux : les tués sont tous ou presque membres de la SWAPO, comme s'ils n'avaient guère opposé de résistance. Un bilan d'un massacre plutôt que celui d'un combat. On sait aussi désormais que des prisonniers ont été sommairement exécutés par l'armée sud-africaine. A noter la complète absence des forces d'interposition de l'ONU. Que s'est-il passé dans cette région d'accès difficile et bouclée par l'armée? Cette affaire se présente comme un coup monté tendant à démontrer la volonté de la SWAPO de ne pas appliquer des accords qu'elle réclamait pourtant depuis des années. Tout cela sert trop bien les intérêts sud-africains pour être innocent. • PENDUS Alors qu'une fois encore le gouvernement sud-africain laisse courir la rumeur d'une prochaine libération de Nelson Mandela, le porte-parole de l'association Avocats pour les droits de l'homme a annoncé que sept pendaisons étaient prévues pour les prochains jours. Un ballet de BEJART autour du « devoir de l'homme de respecter la nature» et dés inégalités à travers le monde. Le titre? « 1789 ... et nous» (au Grand Palais). Bernard Langlois en journaliste anachronique interrogeant en direct Locke, Rousseau, Kant. C'est dans «HE MESSIEURS! C'EST A CETTE EMEUTE QUE LA NATION DOIT SA LIBERTE », au théâtre de l'Impromptu, au Déjazet (Paris). Le spectacle se déplace sur demande, Contact: Joël Toledo, tél. (1) 64.23.91.47. LOIFRAK Toute la bijouterie fantaisie 10, rue de Lancry - 75010 Paris Il CITOYENNETE, IDENTITE, LAICITE Citoyenneté REVOLUTION ET ACTUALITE 1989, l'année du Bicentenaire, nous a naturellement amenés à engager notre action sur le thème de la citoyenneté. Tout le justifiait; la recherche dans notre passé commun des racines de notre action, l'examen des reculs de l'Histoire et l'actualité des grands principes de la Révolution, enfin, la recherche des prolongements à donner à ces principes. Mais 1989 ne saurait être consacrée à la seule commémoration. Curieusement, alors que le moment était choisi pour favoriser les prises de conscience, l'actualité nous a fait sentir à quel point les valeurs universelles pouvaient apparaître relatives, contingentes. Laïcité La laïcité est-elle une vieille idée? Pour n'être pas révolutionnaire et avoir un peu pâti du combat social et politique qui a secoué l'Ecole en 1983, la laïcité semble devoir faire un retour en force. Valeur républicaine entre toutes, la laïcité garantit l'exercice des différences dans une collectivité qui serait en danger si elle ne savait délimiter le champ d'un langage commun. Etape ultérieure du droit à la différence reconnu, la laïcité rend compte d'une évidence: ce qui rapproche les membres d'une communauté vaut aussi bien de ce qui les distingue. Voilà pourquoi il nous a semblé que le triple thème de citoyenneté-identité-laïcité favoriserait lors de notre congrès un débat d'où ne seraient absents ni la référence à la Révolution, ni celle à l'action du MRAP, ni le débat d'actualité. Dominique Coujard CONGRES DU MRAP GRENOBLE (10-11 JUIN) La réflexion autour du thème du congrès est entamée. Différences publie les deux premières contributions. Celle d'Albert Jacquard, membre de la présidence du MRAP, s'aHache à démontrer comment les trois concepts - citoyenneté, identité, laïcité - fonctionnent dans une rigoureuse et dynamique interaction. En somme, le citoyen a besoin de vivre dans une société laïque pour protéger et épanouir son identité individuelle. Dominique Coujard, également membre de la direction, signe un article qui met en évidence l'actualité du bicentenaire et la nécessaire actualisation des valeurs de la Révolution française. Qu'un film de Scorsese vienne heurter le sentiment de certains chrétiens et un cinéma brûle boulevard Saint-Michel à Paris tuant un spectateur; qu'un livre soit considéré comme blasphématoire par certain musulmans et la tête de l'auteur des Versets Sataniques est mise à prix, un imam et son bibliothécaire assassinés. DES CONCEPTS EN INTERACTION Au moment où les récentes élections venaient tempérer l'inquiétude face à une extrême droite grandissante, on s'interroge sur le retour des guerres de religion. Quelles seront les victimes de ces excès ? L'immigration, bien sûr, dont la composante islamique donne l'occasion de généralisations excessives. On croyait sortir - un peu - du racisme, on y retournerait par anathèmes interposés. Aussi, nous appartient-il au premier chef, après avoir condamné toutes les manifestations d'intolérance religieuse, de rappeler notre attachement au respect des différences, de dire que l'islam, pas plus que le judaïsme ou le christianisme n'est, par nature, porteur d'intolérance, de nous opposer avec force à toute tentative d'amalgame. Au même titre que la diversité des cultures, la liberté des religions c'est-à-dire aussi celle de n'en pratiquer aucune est, pour nous, une composante de la Culture nationale, la condition de l'épanouissement des individus. Qui garantira ce libre exercice sinon un Etat laïque, c'est-à-dire un Etat neutre? Toute réflexion sur les rapports entre les individus et les sociétés s'appuie nécessairement sur une définition de l'homme. Longtemps cette définition a résulté d'un double regard, privilégiant tantôt le support matériel, tantôt les performances réalisées; d'un côté le corps, les organes, les cellules, les molécules, semblables à leurs homologues rencontrés partout sur la Terre; de l'autre l'intelligence, la pensée, l'esprit, 1'« âme », privilèges de notre espèce. Il se trouve que, dans la phase actuelle du développement scientifique, ces deux points de vue sont réunifiés. Notre espèce est vue comme l'aboutissement d'un processus de complexification à l'oeuvre dans l'univers depuis son origine, présentée sous la forme d'une prodigieuse explosion, le célèbre Big Bang. L'homme est aujourd'hui, du moins localement, le champion de la complexité. Du coup il se trouve être doté, beaucoup plus qu'aucune autre structure matérielle connue, d'une extraordinaire capacité d'autodestruction; il peut, grâce à la A 25 minutes de Paris par A4. dans un parc de 30 hectares Château de Grande Romaine HOTEL***NN RESTAURANT SOl! 1-'/:1.1./:' S...I U./:' /lfO/)CLIIJU: /JI,' /(JO tI 3f10 l'I:RSOI\';V I:.S J O,YNANTSlIU u: l'AlU' OUVERT TOUTE t'ANNE:": pour vos réceptions casher... sowle {'(If/,râl" dllllt',Ir-/)il/ de l'tlri.\ MARIAGE - BAR MITZVA - BRIT MILA • Conférences - Séminaires - Congrès JOURNÉES DE DÉTEnTE RENSEIGNEMENTS: M, ABITBOL ( Direction) 77330 LESIGNY o (1) 60.02.26.01 - 60.02.21.24 richesse de son système nerveux central (cent milliards de neurones reliés par un million de milliards de connexions) participer à sa propre réalisation: la constitution progressive du cerveau résulte de son fonctionnement même. On peut ainsi proposer la définition: « L'homme est un objet, l'homme est un animal, qui reçoit individuellement le pouvoir de s'attribuer collectivement des pouvoirs. » Cette définition introduit tout naturellement les trois termes formant le titre de cette communication. C'est un individu qui reçoit, par la fusion d'un ovule et d'un spermatozoïde, les recettes lui permettant de développer les divers organes, par exemple ses cordes vocales. Le mécanisme par lequel a été constitué le patrimoine génétique grâce auquel il va peu à peu se réaliser, comporte une loterie au résultat aléatoire; le nombre des combinaisons possibles entre les gènes des deux parents est si fabuleusement grand que chaque patrimoine est unique et permet d'identifier chaque individu. Mais c'est une collectivité qui apporte à cet individu les recettes lui permettant d'utiliser efficacement certains de ces organes, par exemple de transformer les sons émis par les cordes vocales en un langage. Cette collectivité n'a d'existence réelle que par la participation des individus qui la constituent; chacun y reçoit et y apporte; elle est une cité, il est un citoyen. La laïcité de l'Etat Le plus décisif des pouvoirs que l'homme s'est attribués est sa capacité à poser des questions. Pour les animaux seuls existent des faits; pour les hommes ces faits deviennent des sources d'interrogations. Pourquoi, comment, tels événements se produisent-ils? La science peu à peu apporte quelques réponses. Mais, elle en est consciente, son cheminement ne fait qu'élargir le champ des questions encore ouvertes. Or il est tentant d'obtenir des réponses globales, absolues, définitives. Elles ne peuvent être fournies par l'observation et la réflexion; leur source ne peut être qu'une « révélation », une foi en un principe extérieur à l'univers accessible. Cette foi, pour assurer sa continuité, le plus souvent s'incarne en une religion, une Eglise. D'un groupe humain à l'autre, ou à l'intérieur d'un même groupe, la foi diffère selon les individus et plus encore selon les Eglises; en son nom les hommes s'opposent, se combattent parfois avec acharnement et barbarie. Au terme d'expériences souvent dramatiques, de nombreuses sociétés ont reconnu la nécessité d'une séparation rigoureuse entre le Différences - N° 89 - Mai 1989 pouvoir des structures civiles et celui des structures ecclésiales ; elles sont fondées sur la laïcité de l'Etat. Ces trois termes, identité, citoyenneté, laïcité, sont ainsi étroitement liés; chacun est incompréhensible, ou dénaturé, s'il est séparé des deux autres. Pour respecter leurs interactions, un cheminement en « boucle» est nécessaire; l'objet de la réflexion n'est donc pas chacun de ces trois termes, mais chacune des trois flèches réflectives qui les unissent: identité H citoyenneté, citoyenneté H laïcité, laïcité H identité. Le « Je » et le « Tu » La définition proposée pour l'homme amène non à opposer l'individu et la collectivité, l'identité et la citoyenneté, mais à constater qu'ils sont deux éléments indissociables d'un processus de construction. Dans une réaction chimique, personne ne pose la question de savoir si l'énergie est produite par l'un ou par l'autre des éléments en présence; elle résulte de leur interaction. De même l'individu devient peu à peu réalité autonome grâce aux apports de ceux qui l'entourent, et la collectivité n'a d'existence concrète que par la participation des individus. La marque suprême de l'identification individuelle est la capacité à dire « je ». Mais d'où vient ce « je », sinon des « tu » entendus? Et ces « tu » n'ont ce merveilleux pouvoir que si celui à qui ils s'adressent est déjà considéré comme un membre à part entière de la cité, comme un « citoyen ». Celui qu'aucun groupe ne considère comme un de ses membres ne fut-ce que sa propre famille, ne pourra développer son « je », fonder son identité. Les Gaulois, paraîtil, infligeaient à ceux qui avaient commis les pires crimes non la peine de mort (par quelle aberration peut-on ravaler la mort au rang d'une peine ?) mais le rejet hors du groupe; personne ne s'adressait plus au coupable; il avait perdu, à la fois, citoyenneté et identité. Une fois son identité établie, il est certes possible à chacun de délimiter la « cité» à laquelle il estime appartenir. Pour les uns elle s'étend à la totalité des humains; pour d'autres elle se limite à leur nation, à leur village, à leur famille, à leur personne. Dans ce dernier cas la fermeture est totale; après avoir été fait par l'apport des autres, l'individu refuse toute réciprocité; il est comme une cendre du feu qui se propage d'homme à homme. Le refus de jouer le jeu collectif peut cependant être motivé par le constat que ce jeu est perverti, et le désir de la transformer. Il ne s'agit plus alors d'un égoïsme dommageable pour tous, mais d'un sursaut qui à la fois intensifie l'identité et enrichit la citoyenneté. Ainsi François d'Assise se dépouillant de ses vêtements quittant la ville, et provoquant finalement le renouveau des règles du jeu social. Au terme de sa réalisation l'individu est distinct du citoyen, ce qui justifie d'avoir défini indépendamment les droits du premier et ceux du second. Ils n'en sont pas moins deux branches issues d'un même tronc, fruit d'une même racine. L'organisation de la cité nécessite l'attribution de pouvoirs à quelques personnes ou à quelques groupes. Comment justifier ces pouvoirs? Il est probable qu'à l'origine la seule justification était la force; le mâle le plus puissant règne sur la tribu et impose ses décisions par l'intimidation. Mais les hommes constituent une espèce dont la particularité, nous l'avons souligné, est de transformer chaque fait en source d'interrogation. Comme ils sont le plus souvent incapables d'apporter des réponses, ils sont prêts, pour atténuer leur angoisse, à écouter ceux qui déclarent avoir bénéficié d'une révélation les mettant en contact direct avec les mystères de l'univers. La tentation est grande pour ceux-ci de fonder un pouvoir sur ce privilège. Il ne s'agit plus d'être le plus fort, mais d'être le porte-parole d'un être plus puissant que tous les hommes, car hors du réel accessible. (suite page 7) Il ~Mcto~lID1O"" VOUS invite à découvrir Bibliothèqué du Bicentenaire 10 Révolution Franc, aise dans les Antilles '11l~~) REVOUJl'lON ,,'I\AN(~/U s.~ LA RÉVOLUTION ET L'ESCLAVAGE À LA GUADELOUPE 1789 • 1802 de Henri BANGOU 1 livre de 200 pages Format réel: 13 x 21,5 cm Prix: 80 F L'ÉPOPÉE NOIRE 4 février 1794 : « La Convention nationale déclare abolir l'esclavage des Nègres dans toutes les colonies. En conséquence, elle décrète que les hommes, sans distinction de couleur, domiciliés dans les colonies, sont citoyens français et jouiront de tous les droits assurés par la Constitution ... » Ce livre, écrit par un érudit passionné par l'histoire des Antilles, nous plonge dans la foule des Noirs esclaves de la Guadeloupe et de Saint-Domingue, révoltés contre l'esclavage; il nous mène à travers quelques personnages aussi divers que Toussaint-Louverture et Victor Hugues, jusqu'à l'acte final de cette épopée noire, le génocide perpétré par les troupes du Premier Consul Bonaparte. L'auteur: Le docteur Henri Bangou est sénateur-maire de Pointe-à-Pitre et fondateur de la société d'histoire de la Guadeloupe. BON DE COMMANDE - -~ à retourner à Messidor-Livres Service, 146, rue du Faubourg-Poissonnière, 75010 Paris. Veuillez m'adresser votre ouvrage LA R~VOLUTION ET L'ESCLAVAGE A' LA GUADELOUPE. Je joins mon règlement: 80 F + 15 F de frais d'envoi, soit au total: 95 F (0 chèque bancaire 0 chèque postal). NOM .................................................................................. Prénom Adresse ............................................................................................... , .................................... , .......................................... . Code postal __ _ Localité ............................................................................................................................... . (suite de la page 5) DES CONCEPTS EN INTERACTION Les théocraties, ou plus généralement les sociétés où le pouvoir est dévolu à une hiérarchie religieuse, ne sont guère différentes dans leur essence des sociétés où ce pouvoir est entre les mains du personnage ou du groupe qui s'est révélé le plus capable d'intimidation. Simplement la source de cette intimidation n'est pas la force brutale ouvertement manifestée, mais l'évocation de puissances occultées éventuellement maléfiques. Démocratie et théocratie La principale différence concerne la stabilité de ces régimes: celui qui intimide par sa force, un jour, vieillit, s'affaiblit, est éliminé et remplacé par un autre; la théocratie, elle, est installée dans la durée, du moins tant que les détenteurs du pouvoir peuvent convaincre le peuple de la source divine de leur autorité. Dans l'un et l'autre cas, l'individu ordinaire ne peut qu'être soumis à des règles décidées par d'autres; il habite dans la cité, il y travaille, il y consomme, mais il ne participe que passivement à son fonctionnement; il est semblable au carburant mis dans le moteur; il n'est qu'un objet. Pour lui le terme du « citoyen » n'a aucun contenu. Après bien des tatonnements, certaines sociétés ont adopté des organisations où le pouvoir qui s'exerce sur les membres du groupe n'a d'autre source qu'eux-mêmes. Il délèguent à certains d'entre eux la responsabilité des choix essentiels; c'est en leur nom que les décisions sont prises. Ils sont tous, à la fois, origine et aboutissement des mécanismes régulant le fonctionnement de la cité; ils sont des « citoyens ». A vrai dire, la mise au points des méthodes permettant cette régulation est fort difficile. Après de nombreux siècles d'expériences diverses, la démocratie parfaite n'a encore été installée durablement nulle part. Des progrès ont cependant été réalisés et quelques règles ont peu à peu été dégagées. La principale est sans doute la nécessité de la laïcité. C'est au nom des hommes, de leurs besoins, de leurs espoirs, que les décisions sont prises, non en vue de respecter des préceptes issus d'une révélation. Pour autant le contenu de ces révélations n'a à être ni combattu, si soutenu par le pouvoir, pour autant que ce contenu ne s'oppose pas au fonctionnement normal des institutions adoptées par les citoyens. Une telle opposition ne peut d'ailleurs résulter que d'une perversion par les hommes de l'essence de cette révélation, d'une dégradation de la foi en une religion. La foi, par définition, concerne un au-delà de l'univers; elle s'intéresse à ce qui est extérieur à l'espace et au temps; elle ne devrait en rien s'occuper des détails mesquins de la vie d'ici-bas . Les religions, moyens utilisés par les hommes pour manifester leur foi, tiennent nécessairement compte des contraintes matérielles de l'existence concrète; elles savent adapter leurs objectifs spirituels aux limites humaines ; elles doivent admettre que l'organisation sociale adoptée par le peuple est une de ces limites, et s'y conformer. L'écoeurant rallye Préserver la laÏCité de l'Etat et, du même effort, donner un contenu au mot « citoyen », ce n'est pas seulement contenir les LES PIEDS SENSIBLES c'est l'affaire de SULLY Confort, élégance, qualité, des chaussures faites pour marcher 85 rue de Sèvres 5 rue du Louvre 53 bd de Strasbourg 81 rue St-Lazare Du 34 au 43 féminin . du 38 au 48 masculin. six largeurs CA T ALOGUE GRATUIT "il 'U.\', 85 rue de Sèvres. Paris 6- ~ ~ sur p'ls~nra(lon de cerre annonce Différences - N ° 89 - Mai 1989 religions à leur juste place dans l'organisation sociale, c'est aussi lutter contre l'emprise de certaines obsessions collectives qui, dépassant toute mesure, deviennent dans l'esprit public l'équivalent de religions, sans la référence à une foi. Ainsi voit on se développer dans notre société la religion du profit, la religion de la réussite, la religion (aux offices de plus en plus suivis) du sport de compétition. Présenter aux jeunes Français une opération aussi écoeurante que le rallye Paris-Dakar comme une exaltante aventure, c'est précher la religion de la domination du riche sur le pauvre, du rapide sur le lent, de l'Européen sur l'Africain, du Blanc sur le Noir. Le rôle d'un Etat véritablement laïc serait non pas d'interdire ce genre d'activité, mais d'en présenter, notamment à l'école, la véritable nature. La laïcité n'est pas un « truC» plus ou moins efficace permettant de résoudre certains problèmes de la vie des sociétés. Elle est l'aboutissement nécessaire d'un cheminement rigoureux dont le point de départ, c'est vrai, est une foi: la foi en l'homme, la foi en tout homme. Foi en tout homme, c'est-àdire foi en chacun, quel qu'il soit, lui, toi, moi. Aragon a évoqué celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas; quand il fallut se battre pour défendre la liberté, ils se sont retrouvés mais dans la main. Pour parachever le long cheminement de leur propre construction, beaucoup d'hommes se réfèrent à une transcendance. Ils ne se sentent véritablement une personne qùe sous le regard de Dieu, seul capable de les identifier. D'autres ne voient dans cette attitude qu'une fuite devant le mystère de la condition de l'homme, produit sécrété par l'univers et devenu observateur de l'univers, noeud définitif où se mêlent les forces à l'oeuvre et la compréhension de ces forces. Ce mystère, il faut l'assumer sans faiblesse. L'homme co créateur de lui-même, comme individu ou comme espèce, n'est plus digne de sa condition lorsqu'il s'abandonne entre les mains de Créateur. Que ce Créateur corresponde à une nécessité ou à une illusion, c'est à chacun d'en décider librement au plus profond de sa conscience. Cette décision est un élément fondamental de son identité; elle ne peut être véritablement libre que si elle échappe aux pressions de ceux qui se présentent comme les porte-parole de Dieu, que si, par conséquent, la société est « laïque ». La laïcité n'est pas un truc En cette fin du XXe siècle, nous avons la chance de pouvoir échapper aux stupides querelles opposant « croyants» et « noncroyants ». Profitons-en pour accepter sans fausse honte nos incertitudes, nos interrogations pour redonner valeurs aux affirmations, d'où qu'elles viennent, qui nous ont permis de nous émerveiller devant le possible destin humain. Lorsque Saint-Augustin constatait « Plus est en moi », sans doute faisait-il allusion à la présence en lui d'une part divine; mais sa phrase peut être reprise intégralement par le biologiste d'aujourd'hui définissant l'homme comme l'animal capable de se faire des dons à lui-même. Dépouillée de la religion, la foi en Dieu n'est guère éloignée de la foi en l'homme. L'important est de savoir que l'avenir de l'homme est entre ses mains. Albert Jacquard GlLERIE ARIEL 140, boulevard Haussmann • 75008 Paris Tél. (1) 45.62.13.09 Il POSITIONS L'échéance d'un Liban uni et bâti sur une organisation SOCIOpolitique laïque s'éloigne chaque jour davantage. Le pays s'enfonce dans l'horreur de la guerre fratricide. Les clivages confessionnels ont été exacerbés par ['intervention des puissances étrang~ res, par le terrorisme,les intégrismes religieux, les inlérêts partisans. Dans un communiqué (19 avril), le MRAP « condamne les interventions militaires étrangères, notamment de la part de la Syrie et d'Is raël et les ingérences politiques dans les affaires intérieures du Liban; il soutient les démarches du gouvernement français pour aider tous les Libanais, sans aucune distinction, à soigner leurs blessures », Cinq des neuf personnes inculpées pour les attentats racistes de [a Côte d'Azur (dont celui de Cagnes-sur-Mer) om ~t~ reIAch~s. C'est-à-dire que la justice ne considère pas comme dangereux des hommes au moins compliees de meurtre. U: MRAP (' a dé :id~ de saisir le prnident du tribunal de grande instance de Gra.o;se ainsi que le Procureur g~n~ra l d'Aix pour qu'ils fassent appel de celle ordonnance » (18 avril 1989). • NON AUX AMALIAMES Un drame à Suresnes a coClt~ la vic à trois jeunes gens d'origine marocaine, dont l'un a tue les deux autres avant de retourner l'arme comre lui-même. Cenains journaux, sans prendre la peine de v~rifier leurs infonnations, n'ont pas lard~ a s'emparer de ce fait divers pour le présenter comme l'effet du traditionnalisme musulman, sousemendam la non-inttgrabilité de certaines immigrations ... Or, les suites de l'enquête ont montu le caracthe passionnel de ce drame qui n'avait rien a voir avec une quelconque religion. U: MRAP s'était élevé « comre les voix simplistes qui accusent sans distinction leurs auteurs, et de façon général l' Islam, de barbarie ». • BREBOIIE AU PANTHEDN Le MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié ent re les peuples) se r~jouit de la décision annoncée par Pompe. fun.br •• •• rbrerle CAHEN & Cie le prnident de la République du transfert au Pamh&ln des cendres de l'abbé Grégoire en même temps que de Condorcet et de Monge. Engagé dès avant la Révolution dans le combat pour l' égalit~, l'abbé Grégoire, .. l'ami des hommes de toutes les couleurs », a contribué de façon dbcisive a l'bnancipalion des juifs et des Noirs, a l'abolilion de l'esclavage et a la liberté des cultes (18 avril 1989). • DES ROUMAINS BI CIllE L'installation de quelques familles roumaine dans un quartier populaire de Roubaix a suscité quelques remous et des propos peu rassurants de la part de certains élus locaux. Le MRAP et la LOH ont réagi, notamment par un communiqué dans lequel les deux associations estiment qu'il s'agit .. de comribuer à résoudre les difficultn d'insertion de ces familles fuyant la dictature et la misère, et celles d'un quartier trop souvent oubLM! par la municipalité et les pouvoirs publics lt. Apres avoir affinné leur attachement au droit d'asile, héritage de la Révolution française, elles ajoutent que « concernant l'information des habitants enfin, l'arrivée des réfugin p0- litiques aurait pu être l'occasion pour les ~lus et la presse municipale d' informer la population sur la situation des pays d'origine: la non-information n'aide pas il la connaissance mutuel· le ". Enfin, le MRAP et la LDH se de· darent prêts à discuter et apponer leur contribution sur tout ou panie des points soulevb. • VITE U PAil Le MRAP S'esl félicité de l'initiative du prnident Mitterrand de recevoir le chef de l'OLP à Paris. II nourrill'espoir que cette rencontre de M. Arafat avec les officiels français fasse avancer la cause de la paix au ProcheOrient et qu'une conférence internationale sur la question se tienne dans les plus brefs délais (26 avril). ACTIONS """/' : IBlIrrI .'11 Après une altercation violente entre jeunes Français d'origine algérienne (fils de harkis) et des îlotiers aux HLM Clodion, le sénateur·maire, M. Alduy s'est fendu d'une déclaration très lepénienne : « Quand il y a 4 ()()() Maghrébins el aulan/ d'étrangers dans celte ville, il eSllrès difficile d'assurer la sécurité. »Le bureau du MRAP lui a fait parvenir une lettre ouverte dans laquelle lui sont rappelées les lois du 29 juillet 1881 et du 1er juillet 1972 contre les diffamations et injures racistes. /( Nous demandons au pré/el, ajoute la missive, des Pyrénées-Orien/ales de meUre à votre disposition les textes de la loi COn/re le racisme afin qu'ils soien/ affichés dans 10US les lieux publics. Nous espérons que vous enferez., vous aussi, bon usage. » Le président de1a Fédération a reçu des menaces répétées de mOTl. Le Mouvement a porté plainte contre X. Les violences verbales racistes qui ont jalonné la campagne des municipales ne semblent pas étrangères au climat actuel. Homm", à Oulcl, Les comités locaux ainsi que les membres de la commission antiapartheid ont été présents un peu partout en France à la commémoration de la mort criminelle de Dulcie September. Lorient, Rennes, Roubaix, Lille, Paris ... se sont retrouvés sur le terrain de la mémoire antiraciste. LlmlHlBS. " lilll Une belle fête de l'amitié entre les peuples, organisée le 21 mars, a réuni une cinquanta ine d'associations, partis et syndicats autour des militants du MRAP. Omx : /Ils lIIIfIIItS dt/l, lIIIitIm:a Plusieurs centaines d'enfants des écoles maternelles et primaires ont créé une « Grande-Rue )) à Dreux pour célébrer (le 31 mars) l'amour entre toutes les races. Chapeautée par l'ONU et organisée par le MRAP, la manifestation s'est RACISME? ,. -- - -- -- . . ~ le rnrap lUf mIntteoI : 3615 taper mrap terminée par un envol de ballons multicolores. Mme Stirbois n'a pas apprécié, qui a jugé ce rassemblement comme de « l'embrigadement »). Propos à suivre de près ... SIIIIIS l1li n,1IIIX Quatre garçons (moyenne d'âge vingt ans) insultent le 5 avril 1988 un ressort Îssant sénégalais: /( Sale négro, race de singe ... » et menacent une jeune femme marocaine de la sortir par la fcnêtre du train (ValenciennesLille). Constitué partie civile dans cette affaire - en la personne de maître Tillie -, le MRAP a obtenu le jugement suivant : six mois de prison avec sursis, un travail de 200 heures d'intérêt général et 5 000 F de dommages et intérêts versés au Mouvement. &InItuIux : IIII1a11111I11 tIIIbII J ean Blum, président départemental, a salué la création théâtrale de « AuschwilZ de mes nuits» écrite et mise en scène par Manuel Florensa. Attention, a-ti! conclu, « les émules el les thuriféraires de l'ordre fasciste so nt toujours prêts à recommencer ... » FII1 IIICIsllI TOUTO,"*- Gendre de Le Pen, Gendron a dû acheminer 43 000 professions de foi «( nouvelle formule» lors des élections municipales. Le tribunal de grande instance de Lille, statuant en ré féré, a jugé que' les propos tenus dans la première mouture comenaient des éléments « pouvant inciter à la haine raciale ». Amalgamant immigrés musulmans et intégristes violents, Gendron avait argué qu'il « convenait de s'adresser en termes simples mais forts à un électorat populaire ),. Empêcheurs de prendre les gens pOUf des C .•. , te MRAP, la L1CRA, le candidat socialiste à la mairie, Bernard Canon et Ic sénateur-maire CDS, André Diligent ont saisi la justice à temps. 43.20.74.52 MINITEL N' le 11 (la sn utr ., III .& l'_ lIk'MrI Nom et prénom . . . Adresse ..... Ci-joint le montant de mon abonnement 0 200F O lOF (pour les adhérents du MRAP) A dkoupc'r e'1 envo)·C'r à Diffi"nus, 89, ruC' ObC'rkampr, 7SS43 Pa ris CC'dC'~ Il ,

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